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Résolution 1547 (2007)
Situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe
1. L’adhésion au Conseil de l’Europe,
fondé en 1949, repose sur trois piliers: le principe en vertu duquel toute
personne placée sous la juridiction de ses Etats membres doit jouir
des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la consolidation
de l’Etat de droit et l’existence d’une véritable démocratie pluraliste,
fondés sur les valeurs spirituelles et morales qui sont le patrimoine
commun européen. Les réalisations du Conseil de l’Europe dans le
domaine des droits de l’homme, et dans l’établissement et le renforcement
de la démocratie sont inégalées.
2. Cependant, nous ne pouvons pas nous permettre de nous contenter
de l’acquis, qui a pourtant dépassé les rêves les plus optimistes
des pères fondateurs de l’Organisation. L’Assemblée parlementaire
du Conseil de l’Europe, composée de parlementaires des 46 Etats
membres de l’Organisation, estime par conséquent qu’elle se doit
non seulement de reconnaître les principales réalisations de l’Organisation,
mais également de souligner les nouvelles missions et les défis
auxquels elle est confrontée au XXIe siècle.
I. La situation des droits de l’homme en Europe
i. Le Conseil de l’Europe, gardien des droits de l’homme en Europe
3. L’Assemblée rappelle le rôle irremplaçable joué par le Conseil
de l’Europe en tant que principale Organisation pour les droits
de l’homme en Europe: s’il n’avait pas été fondé en 1949, il faudrait
le créer aujourd’hui.
4. Le Conseil de l’Europe, qui couvre désormais presque tout
le continent, est le point de référence et le gardien des droits
de l’homme, de la démocratie et du respect de l’Etat de droit en
Europe. Il dispose de toute une panoplie de mécanismes de contrôle
efficaces, au premier rang desquels figurent la Convention européenne
des Droits de l’Homme (STE n° 5), la Convention européenne pour
la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains
ou dégradants (STE n° 126), la Charte sociale européenne (STE n°
35) et la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales
(STE n° 157). Ces instruments disposent d’instances de contrôle
indépendantes, telles que la Cour européenne des Droits de l’Homme
(la Cour), garante exceptionnelle de la protection judiciaire internationale
des droits de l’homme. Cet arsenal pour la protection des droits
de l’homme a été renforcé, notamment par la création de la Commission
européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) et l’institution
du commissaire aux droits de l’homme.
5. En plus de ses activités dans les domaines normatif et de
suivi, le Conseil de l’Europe met en oeuvre des programmes de coopération,
d’assistance et de sensibilisation dans les domaines juridique et
des droits de l’homme, notamment sous la forme d’expertises de la
législation, de développement des compétences et de formation. Ces
activités, souvent réalisées en partenariat avec la Commission européenne,
l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE),
les Nations Unies et ses agences spécialisées, telles que le Haut-Commissariat
des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), ainsi que ses partenaires
non gouvernementaux, contribuent efficacement à une amélioration
et une consolidation constantes des normes juridiques et de leur
mise en oeuvre dans les Etats membres, renforçant ainsi la stabilité
démocratique en Europe. Le rôle du Conseil de l’Europe, en stimulant
et en apportant un soutien actif à la création de structures nationales
indépendantes pour les droits de l’homme dans les Etats membres,
illustre la contribution de l’Organisation à la consolidation des
institutions des droits de l’homme en Europe.
6. L’une des plus importantes réalisations du Conseil de l’Europe,
et de son Assemblée parlementaire en particulier, est l’abolition
de facto de la peine de mort en temps de paix dans tous les Etats
membres.
7. L’Assemblée rappelle que ces succès ont été atteints avec
des ressources très limitées, le budget total du Conseil de l’Europe
– y compris celui de l’Assemblée et de la Cour – étant de moins
de 200 millions d’euros en 2007, ce qui représente moins de 15 %
du seul budget du Parlement européen pour 2007.
ii. Principaux défis en matière de droits de l’homme
8. Tout en reconnaissant que des progrès importants ont été accomplis
dans les Etats membres, l’écart entre les normes définies sur le
papier et la réalité sur le terrain doit encore être réduit. La
pleine mise en oeuvre des droits de l’homme existants, dans la vie
quotidienne, est une mission inachevée. Les droits de l’homme sont
d’autant plus efficacement défendus qu’ils sont ancrés dans la culture
des citoyens, ce qui exige de la part de tous les Etats membres
et du Conseil de l’Europe des politiques éducatives et culturelles adéquates.
9. L’Assemblée reste profondément préoccupée par le fait qu’il
y a toujours des violations des droits de l’homme en Europe, y compris
les plus graves.
10. Dans plusieurs pays européens, les défenseurs des droits de
l’homme sont harcelés et confrontés à un climat de répression qui
s’aggrave. Il est essentiel pour la protection et la promotion des
droits de l’homme en Europe que les défenseurs des droits de l’homme,
en particulier les organisations non gouvernementales, les avocats
et les journalistes, puissent travailler sans entrave.
11. L’Etat de droit n’est toujours pas pleinement respecté dans
plusieurs pays d’Europe. L’indépendance judiciaire et l’efficacité
de la justice ont besoin d’être consolidées et renforcées dans de
nombreux cas. De surcroît, il y a toujours des «trous noirs» géographiques
où les mécanismes du Conseil de l’Europe en matière de droits de
l’homme ne peuvent être pleinement mis en oeuvre. C’est le cas du
Bélarus, un pays non membre, et de certaines zones dans des Etats
membres dont les autorités ne sont pas reconnues internationalement et/ou
qui ne sont pas de facto sous leur contrôle, comme le Haut-Karabakh,
le Kosovo, la «République moldave de Transnistrie», l’Ossétie du
Sud et l’Abkhazie, ainsi que la partie nord de Chypre.
12. Même les violations des droits de l’homme les plus graves,
comme les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires,
les détentions secrètes, la torture et les traitements inhumains,
ont toujours cours en Europe, comme l’indique le rapport de la commission
des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée
(Doc. 11202).
13. L’impunité, y compris pour ces violations des droits de l’homme
les plus graves, n’a pas été éradiquée en Europe. L’impunité doit
être éliminée par des enquêtes et des procédures judiciaires promptes, approfondies
et impartiales.
14. Le terrorisme est l’un des principaux défis auxquels doivent
faire face les sociétés ouvertes en Europe; il peut et doit être
vaincu sans violation des principes mêmes des droits de l’homme,
de l’Etat de droit et de la tolérance que les terroristes veulent
détruire.
15. La traite des êtres humains, en particulier des femmes et
des enfants, est la forme moderne de l’ancien commerce mondial des
esclaves. Elle considère les êtres humains comme des marchandises
que l’on peut acheter et vendre. Cette pratique est répandue en
Europe et constitue une grave violation des droits de l’homme. La
nouvelle Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la
traite des êtres humains (STCE no 197),
ouverte à la signature en mai 2005, représente une étape majeure
dans la lutte contre ce fléau.
16. Partout en Europe se trouvent des personnes dans des situations
particulièrement vulnérables, dont les droits doivent être davantage
protégés et renforcés.
16.1. Le traitement
des personnes privées de liberté mérite plus d’attention, qu’elles
soient en garde à vue, en prison, dans des hôpitaux psychiatriques
ou d’autres structures de détention, telles que les «centres de
rétention» pour les migrants en situation irrégulière. L’éradication
de tout mauvais traitement envers les personnes détenues, y compris
les cas de torture les plus graves dont l’existence a été établie
par la Cour européenne des Droits de l’Homme dans différentes régions
d’Europe et tout particulièrement dans le Caucase du Nord, doit
rester un objectif prioritaire.
16.2. Un trop grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées
à l’intérieur de leur pays ne peuvent rentrer chez eux en toute
sécurité. Les demandeurs d’asile ont des difficultés à entrer en
Europe et, une fois dans un Etat membre, ils sont souvent confrontés
à l’impossibilité de facto de voir leur demande traitée de façon
équitable, en raison de procédures d’une complexité inacceptable;
cette situation est aggravée par des différences de traitement substantielles
d’un pays à l’autre. En outre, les migrants – particulièrement ceux
qui sont en situation irrégulière – font souvent l’objet d’un traitement discriminatoire
quant à l’accès à leurs droits économiques et sociaux.
16.3. Les droits des enfants, des personnes âgées et des personnes
souffrant d’un handicap ont également besoin d’être mieux protégés.
16.4. Des efforts particuliers doivent être faits pour mieux
intégrer les exclus sociaux, y compris les Roms et les Gens du voyage.
17. La violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique,
est encore très répandue et doit être combattue résolument à tous
les niveaux. Les mariages forcés et les mariages d’enfants, les
prétendus «crimes d’honneur» et les mutilations sexuelles féminines
constituent également des violations graves des droits de l’homme,
qui doivent être combattues sans délai.
18. Le racisme, la xénophobie et l’intolérance n’ont pas été éradiqués
et les discriminations fondées sur l’origine raciale, ethnique ou
religieuse sont toujours largement présentes dans les sociétés européennes.
La recrudescence de l’antisémitisme est particulièrement préoccupante,
de même que la montée inquiétante de l’islamophobie.
19. La discrimination fondée sur le genre ou l’orientation sexuelle
est répandue dans un certain nombre d’Etats. Le non-respect ou la
restriction inacceptable de droits tels que la liberté d’expression,
d’association et de réunion, fondés sur le genre ou l’orientation
sexuelle, sont intolérables.
20. De même, dans de nombreux Etats membres, le respect des droits
des personnes appartenant à des minorités nationales ou à d’autres
minorités, ainsi que l’intégration des groupes minoritaires dans
la société, en particulier les Roms et les Gens du voyage, restent
des défis importants.
21. Les droits sociaux et économiques doivent être pleinement
respectés, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, au
logement, aux soins de santé, à l’emploi, aux revenus minimums,
aux prestations sociales et aux retraites. Tous les Etats membres
devraient considérer qu’ils sont liés au respect de ces droits en
conformité, entre autres, avec les principes énoncés dans la Charte
sociale européenne révisée (STE n° 163).
22. Les droits culturels font partie intégrante des droits de
l’homme, en particulier le droit à l’éducation consacré par l’article
2 du Protocole additionnel à la Convention européenne des Droits
de l’Homme (STE n° 9) et le droit de chacun de participer à la vie
culturelle, énoncé à l’article 15 du Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies.
Les Etats membres doivent respecter ces droits et ceux prévus par
la Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine
culturel pour la société (STCE no 199), ainsi que la liberté académique
et l’autonomie universitaire.
23. Le Conseil de l’Europe a en outre élaboré les seules normes
internationales spécifiques en matière de bioéthique dans la Convention
sur les droits de l’homme et la biomédecine (STE n° 164), et ses
protocoles.
24. Le développement durable est un autre objectif majeur européen
et mondial. Toute personne devrait avoir droit à un environnement
sain, viable et décent. Ce droit est interdépendant et inséparable
des valeurs fondamentales de la paix et de l’Etat de droit, du respect
de la dignité humaine et des droits de l’homme, de l’équité entre
les générations, de la cohésion géographique et sociale, et du développement
économique. Il doit être garanti si l’on veut parvenir à un développement
durable, fondé sur la solidarité, pour les générations actuelles
et futures.
iii. La nécessité de renforcer les mécanismes de l’Organisation en matière de droits de l’homme
25. Au vu des défis mentionnés précédemment, l’Assemblée considère
que la mission statutaire du Conseil de l’Europe est toujours aussi
pertinente, si ce n’est plus, que lors de sa création en 1949. L’Organisation
doit continuer à être renforcée en tant que «conscience morale»
de l’Europe.
26. Afin de garantir l’efficacité à long terme de la Convention
européenne des Droits de l’Homme, la mise en oeuvre du processus
de réforme doit être accélérée. Une mise en oeuvre rapide du Protocole
no 14 à la Convention (STCE no 194) est nécessaire, mais pas suffisante.
Les droits de l’homme doivent avant tout être appliqués au niveau
national.
27. Etant donné ses ressources limitées, le Conseil de l’Europe,
y compris son Assemblée parlementaire, devrait se concentrer sur
ses domaines d’excellence – les droits de l’homme, la démocratie
et l’Etat de droit.
28. La crédibilité du Conseil de l’Europe en tant que principale
organisation des droits de l’homme en Europe dépend de la capacité
du Comité des Ministres, l’organe de prise de décision de l’Organisation,
à prendre ses responsabilités face aux principaux défis en matière
de droits de l’homme. Le consensus comme processus de décision risque
de paralyser l’acquis de l’Organisation en matière de droits de
l’homme.
29. Un autre défi de taille pour le système de protection des
droits de l’homme de l’Organisation est le risque de duplication
inutile de ses activités par des organes de l’Union européenne,
qui pourrait donner lieu à des normes divergentes et entraîner de
nouvelles lignes de division en Europe. Ce serait aussi un gaspillage
des ressources budgétaires limitées, en cette période d’austérité
générale. L’Union européenne et ses Etats membres devraient faire
un meilleur usage des instruments existants du Conseil de l’Europe,
l’adhésion à la Convention européenne des Droits de l’Homme étant
désormais une priorité absolue. L’adhésion de l’Union européenne/Communauté
européenne à la Charte sociale européenne révisée devrait également
faire l’objet d’un examen attentif. La complémentarité et la recherche
de valeur ajoutée devraient également régir les relations entre
le Conseil de l’Europe et l’Agence des droits fondamentaux de l’Union
européenne, récemment instituée.
iv. La voie à suivre
30. L’Assemblée parlementaire rappelle ses résolutions précédentes
sur des questions spécifiques de droits de l’homme mentionnées dans
le présent texte et dans le rapport de la commission des questions juridiques
et des droits de l’homme de l’Assemblée (Doc. 11202).
31. L’Assemblée est préoccupée par le fossé existant entre les
déclarations solennelles et les engagements pris par les Etats membres,
y compris lors du 3e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement
du Conseil de l’Europe, tenu à Varsovie en mai 2005, et la situation
dans la pratique, où les violations des droits de l’homme restent
souvent sans réparation ou recours. Ce décalage porte atteinte à
la crédibilité de l’ensemble de nos dirigeants nationaux, de nos
instances parlementaires, de l’Organisation, ainsi qu’à celle de
tout le continent européen et des valeurs universelles qu’il défend.
32. L’Assemblée considère qu’il est temps de mettre fin à l’hypocrisie
et de passer de la parole aux actes. Par ailleurs, l’Assemblée considère
que la méthode la plus efficace pour prévenir les violations des
droits de l’homme est d’adopter une tolérance zéro à l’égard de
telles violations.
33. Par conséquent, elle décide, d’abord et avant tout, de se
donner pour mandat, dans ses travaux futurs, d’accorder une plus
grande priorité aux droits de l’homme et à l’Etat de droit, et invite
le Comité des Ministres à faire de même.
34. Elle invite également les Etats membres du Conseil de l’Europe,
en particulier leurs instances parlementaires respectives, à s’employer
à résoudre toutes les questions soulevées dans les rapports et les avis
ayant servi de support à la présente résolution et, notamment:
34.1. à garantir la prompte et pleine
mise en oeuvre de la Déclaration et du Plan d’action du Sommet de
Varsovie de 2005, notamment des mesures garantissant l’efficacité
permanente de la Convention européenne des Droits de l’Homme et
celles visant à protéger et promouvoir les droits de l’homme et l’Etat
de droit par le biais des autres institutions et mécanismes du Conseil
de l’Europe;
34.2. à prendre toutes les mesures appropriées en s’efforçant
réellement d’éliminer toutes les violations des droits de l’homme,
en particulier les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, les
détentions secrètes, la torture et les traitements inhumains, et
de mener des enquêtes effectives sur ces crimes et d’en poursuivre
les auteurs. A cet égard, l’Assemblée rappelle, une fois de plus,
que le droit à la vie et l’interdiction de la torture et des peines
ou traitements inhumains ou dégradants sont des droits auxquels
il ne peut être dérogé en vertu de la Convention européenne des
Droits de l’Homme;
34.3. à mettre un terme à l’impunité des auteurs de violations
des droits de l’homme, en condamnant rapidement et fermement ces
violations au niveau le plus élevé, en garantissant que les forces
de l’ordre mènent des enquêtes transparentes, impartiales et effectives,
et en rendant les autorités responsables devant les parlements;
34.4. à protéger efficacement les défenseurs des droits de l’homme
et leur travail, y compris l’accès sans entrave des personnes à
la Cour européenne des Droits de l’Homme;
34.5. à mettre pleinement en oeuvre, au niveau national, les
droits garantis par la Convention européenne des Droits de l’Homme
et les autres instruments internationaux en matière de droits de l’homme,
faisant ainsi des droits de l’homme une réalité pour chacun partout
en Europe;
34.6. à mettre pleinement en oeuvre les arrêts de la Cour européenne
des Droits de l’Homme dans l’ordre juridique de tous les Etats membres;
34.7. à faire de l’éducation aux droits de l’homme un élément
de base de l’éducation scolaire et de l’apprentissage tout au long
de la vie;
34.8. à respecter pleinement les droits de l’homme dans la lutte
contre le terrorisme, comme l’a déjà demandé l’Assemblée à de nombreuses
occasions, à refuser d’expulser ou d’extrader quiconque vers un
pays où il existe un risque réel pour cette personne d’être soumise
à de graves violations des droits de l’homme, quelles que soient
les assurances reçues, et à signer et/ou à ratifier dès que possible
les conventions et instruments de l’Organisation relatifs aux droits
de l’homme, y compris ceux portant sur la lutte contre le terrorisme;
34.9. à éliminer la traite des êtres humains. A cet égard, l’Assemblée
invite les Etats membres à signer et/ou à ratifier au plus vite
la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite
des êtres humains afin qu’elle puisse entrer en vigueur le plus
tôt possible, et, de toute façon, à mettre immédiatement en oeuvre
ses dispositions les plus importantes. L’Assemblée invite également
l’Union européenne à signer et à ratifier cette convention dans
les meilleurs délais;
34.10. à mieux protéger les droits des personnes dans des situations
particulièrement vulnérables, notamment les personnes privées de
liberté, les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de
leur pays, les personnes disparues et les membres de leur famille,
les demandeurs d’asile et les migrants, les enfants, les personnes
âgées, les personnes souffrant d’un handicap, les exclus sociaux,
y compris les Roms et les Gens du voyage, et à coopérer pleinement
avec les instances concernées fondées par un traité et avec les
autres organes oeuvrant dans ce domaine;
34.11. à lutter efficacement contre la violence domestique, les
mariages forcés et les mariages d’enfants, ainsi que contre les
prétendus «crimes d’honneur» et les mutilations sexuelles féminines;
34.12. s’agissant de la lutte contre la violence domestique,
à poursuivre et à intensifier leurs efforts pour mettre en oeuvre
le programme de la Campagne du Conseil de l’Europe pour combattre
la violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique,
sensibiliser le public et adopter des normes pour bannir la violence
domestique à l’égard des femmes;
34.13. à lutter efficacement contre toutes les formes de discrimination
fondées sur l’origine raciale, ethnique ou religieuse, en particulier
contre la montée de l’antisémitisme et de l’islamophobie, et, à
cet égard, à signer et à ratifier le Protocole no 12 à la Convention
européenne des Droits de l’Homme (STE n° 177) qui prévoit une interdiction
générale de la discrimination, et à mettre pleinement en oeuvre
les recommandations de l’ECRI;
34.14. à mieux protéger les droits des personnes appartenant
à des minorités nationales et à d’autres minorités, et à mieux garantir
l’intégration des groupes minoritaires dans la société, en particulier
des Roms et des Gens du voyage;
34.15. à signer et/ou à ratifier la Charte sociale européenne
révisée ainsi que sa procédure de réclamation collective, et à défendre
et à appliquer pleinement les droits sociaux et économiques, notamment
en ce qui concerne l’accès à des structures d’orientation et de
formation professionnelle, au logement, aux soins de santé, à l’emploi,
aux revenus minimums, aux prestations sociales et aux retraites,
en vue de bâtir une Europe plus humaine et plus soudée;
34.16. à respecter pleinement le droit à l’éducation prévu à
l’article 2 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des Droits
de l’Homme et le droit de chacun de participer à la vie culturelle,
énoncé à l’article 15 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels;
34.17. à devenir partie à la Convention sur les droits de l’homme
et la biomédecine ainsi qu’à ses protocoles;
34.18. à viser l’éradication progressive et totale de la pauvreté;
34.19. à prendre des mesures législatives en faveur d’une gestion
conjointe et durable des ressources pour protéger l’environnement,
à promouvoir le recours à des sources d’énergie renouvelables, à
mettre en oeuvre des programmes d’économie d’énergie dans l’industrie,
les bureaux et les habitations, à encourager les transports publics
et la gestion durable de l’eau, et à mettre en place une politique agricole
axée sur la sécurité alimentaire, le bien-être des animaux et l’exploitation
durable des ressources;
34.20. de façon plus générale, à signer et/ou à ratifier tous
les principaux instruments juridiques du Conseil de l’Europe dans
le domaine des droits de l’homme, sans réserves ni déclarations interprétatives
restrictives, et à retirer celles qui ont déjà été faites;
34.21. à renforcer le rôle du Conseil de l’Europe en tant que
mécanisme efficace de coopération paneuropéenne pour protéger et
promouvoir les droits de l’homme;
34.22. à veiller à ce que la complémentarité et la recherche
de valeur ajoutée régissent les relations entre le Conseil de l’Europe
et les autres organisations et instances internationales oeuvrant
dans le domaine des droits de l’homme, et, en particulier, avec
la nouvelle Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne,
afin d’éviter des duplications d’activités et un gaspillage des
fonds publics;
34.23. à considérer l’adhésion rapide de l’Union européenne à
la Convention européenne des Droits de l’Homme comme une priorité
absolue et, pour les Etats également membres de l’Union européenne,
à prendre les mesures nécessaires afin de garantir une telle adhésion;
34.24. à faire un meilleur usage des instruments et des institutions
du Conseil de l’Europe, et à veiller à ce que les ressources de
l’Organisation soient considérablement augmentées en raison de ses réalisations
importantes dans le domaine des droits de l’homme.
35. L’Assemblée décide, en outre, en coopération étroite avec
les délégations nationales de l’Assemblée, d’inviter les commissions
compétentes des parlements des Etats membres à une conférence annuelle
des commissions parlementaires des affaires juridiques et des droits
de l’homme afin de faire le point sur les carences et progrès dans
le domaine des droits de l’homme et de l’Etat de droit, d’échanger
de bonnes pratiques et d’identifier toute amélioration nécessaire
des législations nationales ainsi que d’éventuelles actions futures
du Conseil de l’Europe dans ces domaines.
36. Au vu de la contribution significative de la société civile,
y compris des défenseurs des droits de l’homme, à la promotion et
à la protection des droits de l’homme, l’Assemblée invite son Bureau
à mettre en place un prix annuel de l’Assemblée parlementaire pour
récompenser des actions exceptionnelles de la société civile dans
la défense des droits de l’homme ainsi que les critères de sélection
des candidats.
II. La situation de la démocratie en Europe
i. Le Conseil de l’Europe, maison de la démocratie
37. L’Assemblée rappelle que le Conseil de l’Europe est la plus
ancienne institution paneuropéenne qui défende les valeurs et les
principes démocratiques. La reconnaissance et la mise en oeuvre
des principes de la démocratie, de la primauté du droit et du respect
des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont un préalable
indispensable à l’adhésion à l’Organisation.
38. Depuis sa création, il y a cinquante-huit ans, le Conseil
de l’Europe a constitué un acquis considérable dans le domaine de
la démocratie, qui forme un cadre de référence légitime pour le
développement de la démocratie. Cet acquis comprend 200 conventions,
traités et chartes, auxquels il faut ajouter les recommandations
du Comité des Ministres, les recommandations, résolutions et avis
de l’Assemblée parlementaire, les recommandations, résolutions et
avis du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe,
les rapports d’autres organes du Conseil de l’Europe, en particulier
de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission
de Venise), de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance
(ECRI) et du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO), ainsi
que les multiples rapports d’information et publications venant
à l’appui des activités du Conseil de l’Europe et les résultats
des projets interdisciplinaires.
39. L’acquis du Conseil de l’Europe dans le domaine de la démocratie
vise à apporter une aide dans l’établissement des normes, et il
s’efforce de le faire par l’élaboration d’instruments juridiques,
et à mettre en place certaines structures ou pratiques institutionnelles.
Outre ce cadre juridique, les organes du Conseil de l’Europe s’attachent
à développer les institutions et les pratiques démocratiques en
Europe en menant des activités qui donnent des lignes directrices
pour définir les priorités et cerner les problèmes en matière de démocratie.
40. Le Conseil de l’Europe a joué un rôle essentiel en accompagnant
les transformations démocratiques qui ont été engagées vers le milieu
des années 1970 et au début des années 1990, qui se poursuivent
encore dans certains pays européens, et en consolidant la démocratie
dans ses Etats membres.
41. Depuis la coopération précédant l’adhésion officielle jusqu’aux
procédures de suivi, le Conseil de l’Europe a guidé efficacement
les pays tout au long du difficile processus de démocratisation
en leur offrant son expertise, une assistance juridique et des programmes
de coopération, en mettant en évidence leurs points faibles et en
leur proposant des solutions et des remèdes concrets, conformes
aux normes démocratiques.
42. Parce qu’elle est un processus évolutif et jamais achevé,
tendant à accroître la liberté de tous les citoyens de diriger leur
propre vie, la démocratie reste un défi pour tous les Etats membres
du Conseil de l’Europe. Dans beaucoup d’entre eux, les citoyens
ne sont pas satisfaits de la situation de leur démocratie et s’efforcent
de l’améliorer en comblant les déficits démocratiques. C’est lorsqu’elle
est ancrée dans la culture des citoyens que la démocratie s’épanouit
le mieux et porte ses fruits, ce qui exige de la part de tous les
Etats membres et du Conseil de l’Europe des politiques éducatives
et culturelles qui y contribuent activement.
43. Le Forum pour l’avenir de la démocratie a été créé en 2005,
à la suite du 3e Sommet du Conseil de l’Europe, en vue d’élargir
et d’approfondir la réflexion sur certains problèmes cruciaux qui
se posent aujourd’hui en matière de démocratie dans tous les Etats
membres du Conseil de l’Europe.
ii. Les enjeux démocratiques majeurs
44. Tout en accueillant avec satisfaction les réalisations et
les progrès indéniables qui ont été obtenus dans la mise en oeuvre
des normes démocratiques sur le continent européen au cours des
dernières années, l’Assemblée est préoccupée par la multiplication
des déficits démocratiques qu’elle observe dans tous les Etats membres
du Conseil de l’Europe.
45. L’Assemblée considère avec une profonde inquiétude le mécontentement
et la désaffection politiques croissants des citoyens, dont témoignent
la baisse de la participation électorale et la déception ou l’indifférence grandissantes
à l’égard de la politique, surtout parmi les jeunes générations.
De ce fait, les gens perdent confiance dans la démocratie et le
fossé entre les institutions politiques et les citoyens ne cesse
de se creuser.
46. Dans beaucoup de pays, ce phénomène est étroitement lié au
dysfonctionnement de certaines institutions politiques: les partis
politiques ont perdu une partie de leur capacité à faire le lien
entre les citoyens et l’Etat; la représentativité des parlements
est bien trop souvent sujette à caution; un grand nombre de citoyens
ont l’impression, parfois à juste titre, que les principes fondamentaux
de la démocratie tels que la séparation des pouvoirs, les libertés
politiques, la transparence et la responsabilité sont insuffisamment appliqués
ou ne le sont pas du tout.
47. Dans certaines «vieilles démocraties», le déclin d’intérêt
à l’égard des partis dominants et du parlement ne traduit pas un
manque d’intérêt pour la politique mais une appréciation critique
du travail de ces institutions. Les institutions traditionnelles
de la démocratie représentative devraient, en pareille situation,
s’ouvrir davantage à la participation citoyenne afin de surmonter
leurs propres défaillances et de remobiliser les citoyens inquiets
de leur dysfonctionnement.
48. Dans ces démocraties, il conviendrait de se demander si les
systèmes traditionnels de démocratie représentative doivent prendre
davantage en considération les changements rapides dans le domaine
de la communication et de l’accès à l’information, changements qui
entraînent l’évolution des systèmes de démocratie directe.
49. L’Assemblée est extrêmement préoccupée par les cas de violations
de normes démocratiques fondamentales dont elle a connaissance dans
un certain nombre d’Etats membres du Conseil de l’Europe. En particulier,
elle juge inquiétantes les informations faisant état de restrictions
de la liberté d’expression, de tentatives pour limiter la liberté
d’association, de l’absence d’élections libres et équitables, et
d’une dénaturation de la démocratie représentative, participative
et ouverte. De même, il apparaît que d’autres principes démocratiques
fondamentaux, dont la séparation et le contrôle des pouvoirs, ainsi
que la primauté du droit, sont insuffisamment mis en oeuvre.
50. L’Assemblée est également vivement préoccupée par les exemples
dont elle a eu connaissance d’un manque effectif de séparation des
pouvoirs et de contrôles adéquats d’éventuels abus de pouvoirs.
51. Tous les pays de notre continent – les vieilles et les jeunes
démocraties – doivent être plus attentifs à la qualité de leur démocratie,
sinon le pouvoir politique perdra ce qui est le principal acquis
d’une démocratie bien établie et en bon état de marche: sa légitimité.
52. La liberté d’expression et d’information ainsi que le pluralisme
et la diversification des médias ont une importance cruciale dans
une vraie démocratie. Il y a lieu de s’alarmer des récents assassinats
de journalistes, des restrictions imposées à des médias indépendants
et des sanctions infligées à des journalistes. Les exemples de concentration
excessive des médias sont également un motif d’inquiétude car cette
concentration est préjudiciable au pluralisme et à la diversité.
La manipulation de la publicité institutionnelle pour faire pression
sur les médias doit être fortement condamnée.
53. La tendance croissante des médias à se substituer aux partis
politiques en déterminant les priorités politiques, en monopolisant
le débat politique, en créant et choisissant les personnalités politiques
est également préoccupante. Les médias sont trop souvent des institutions
dominées par des considérations économiques qui, en faisant primer
leurs intérêts commerciaux sur le service aux citoyens et la démocratie, contribuent
inévitablement à dénaturer la démocratie. Le rôle des médias dans
la détermination des priorités politiques, la diffusion des débats
politiques et la formulation d’avis sur les personnalités politiques
souligne l’importance, pour une société démocratique, de l’existence
de médias indépendants, pluralistes et responsables.
54. Des informations faisant état de restrictions de la liberté
d’association, notamment d’obstacles bureaucratiques et de taxes
injustifiées, sont également source d’inquiétude. Dans plusieurs
pays, des groupes professionnels ou ethniques n’ont pas le droit
de s’organiser ou de former un parti politique. Or la liberté d’association
représente l’un des droits politiques les plus essentiels et une
condition fondamentale du bon fonctionnement de la démocratie.
55. La représentativité du parlement est la clé d’une démocratie
représentative. A cet égard, toute forme de discrimination, qu’elle
soit fondée sur le sexe, l’appartenance ethnique ou religieuse,
ou l’origine sociale, doit être éliminée s’agissant du droit de
vote et de l’éligibilité.
56. La citoyenneté est le lien politique et juridique crucial
entre l’Etat et l’individu. Les situations d’apatridie à grande
échelle, dans certains pays, soulèvent de sérieuses préoccupations.
Des mesures visant à limiter l’apatridie et à promouvoir l’acquisition
de la citoyenneté devraient donc se poursuivre.
57. L’égalité de participation des femmes au processus décisionnel
est un signe du bon fonctionnement de la démocratie. Malheureusement,
on est loin d’avoir atteint la parité en politique. Dans certains
parlements, les femmes représentent à peine 4,4 % des députés; dans
les organes exécutifs au niveau intermédiaire et au plus haut niveau,
cette proportion est parfois plus faible encore.
58. Dans les démocraties bien établies, il ne devrait pas y avoir
de seuils supérieurs à 3 % dans les élections législatives. Ainsi,
le plus grand nombre d’opinions devrait pouvoir s’exprimer. Exclure
des groupes importants de personnes du droit d’être représentées
va à l’encontre d’un système démocratique. Dans les démocraties bien
établies, il convient de trouver un équilibre entre une représentation
équitable des opinions de la société et l’efficacité du parlement
et du gouvernement.
59. La tenue d’élections libres et équitables est un élément essentiel
d’une démocratie. Beaucoup de progrès ont été faits en matière d’établissement
des normes électorales et de suivi de leur application. Cependant,
des expériences récentes d’appréciations divergentes d’élections
dans certains pays européens montrent qu’il reste beaucoup à faire
dans ce domaine.
60. Il y a lieu d’être préoccupé par les cas signalés de manque
d’indépendance de la justice ou des parlements.
61. Il conviendrait que les Etats membres accordent une attention
à la question de savoir si la démocratie directe (par exemple les
référendums et les initiatives des citoyens) peut jouer un rôle
plus important.
62. Les principes de subsidiarité et de proportionnalité doivent
être mis en place puisqu’ils sont nécessaires pour parvenir à une
bonne gouvernance, ce qui est essentiel pour renforcer la démocratie.
63. L’Assemblée reconnaît l’importance de la démocratie locale
et régionale en tant que fondement et garant de la démocratie en
Europe, et regrette que les principes de la Charte européenne de
l’autonomie locale (STE no 122) ne soient
pas toujours véritablement appliqués. Le fait que cette charte n’ait
pas encore été approuvée est également regrettable.
64. L’Assemblée est vivement préoccupée par le fait que, dans
un certain nombre de régions géographiques d’Europe, dont un pays
– le Bélarus – et plusieurs régions d’Etats membres du Conseil de l’Europe
échappant de facto à leur contrôle, les principes démocratiques
ne sont pas appliqués.
iii. La nécessité de renforcer l’action de l’Organisation en matière de démocratie
65. Compte tenu des enjeux décrits ci-dessus, le Conseil de l’Europe
a un rôle majeur à jouer en continuant d’assister, d’encourager
et de guider ses Etats membres pour qu’ils remédient à leurs insuffisances démocratiques.
L’Assemblée invite tous les organes statutaires de l’Organisation
à accorder une attention particulière aux problèmes examinés dans
la présente résolution et son exposé des motifs.
66. L’Assemblée est convaincue que la fonction normative du Conseil
de l’Europe devrait contribuer à combler les déficits démocratiques.
Une analyse approfondie, l’inventaire des problèmes et des solutions devraient
être suivis de propositions d’actions, de recommandations de réformes
et d’orientations. En particulier, une fois les défis identifiés,
il conviendrait d’élaborer des instruments juridiques ou des lignes directrices.
67. Les procédures de suivi devraient être renforcées. En même
temps, des mesures devraient être prises pour que les Etats membres
respectent mieux les recommandations formulées dans le cadre de
ces procédures. Les parlements nationaux ont un rôle important à
jouer à cet égard et l’Assemblée devrait coopérer plus intensivement
avec eux.
68. Des projets et des programmes de coopération, y compris ceux
visant à améliorer la connaissance du public sur la Convention européenne
des Droits de l’Homme et les droits et libertés qu’elle garantit,
devraient être établis dans des domaines d’intérêt particulier pour
la démocratie.
69. La Commission de Venise devrait être dotée de ressources suffisantes
pour intensifier son action en matière de conseil et d’assistance
juridiques destinés à consolider la démocratie. De plus, elle est
encouragée à réaliser une étude afin de préciser la notion de catégories
de développement démocratique et de montrer comment cette classification
pourrait servir de point de départ pour de futures évaluations de
la situation de la démocratie en Europe et améliorer ainsi la capacité
de l’Assemblée à proposer des réformes utiles.
70. Le Forum pour l’avenir de la démocratie offre un cadre privilégié
pour approfondir la réflexion sur la démocratie, l’évaluation de
son état, la détermination des déficits démocratiques et la promotion
des principes et des bonnes pratiques démocratiques. Il convient
de lui accorder l’importance qu’il mérite et de le doter de ressources
suffisantes pour qu’il puisse poursuivre son action.
71. L’Assemblée invite le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux
du Conseil de l’Europe à poursuivre ses activités dans le domaine
de la démocratie locale et régionale, et à approfondir sa réflexion
sur les défis posés à la démocratie dans ses domaines de compétence.
72. L’Assemblée décide d’évaluer minutieusement la situation de
la démocratie en Europe, d’améliorer sa capacité à proposer les
réformes nécessaires et de tenir un débat à ce sujet régulièrement.
iv. La voie à suivre
73. La démocratie est un processus permanent d’amélioration politique
et procédurale.
74. L’Assemblée parlementaire rappelle ses précédentes résolutions
consacrées à différents aspects de la démocratie et à son fonctionnement
dans les Etats membres.
75. Elle invite tous les Etats membres à accorder l’attention
voulue aux problèmes exposés ci-dessus et à s’y attaquer dans le
but d’améliorer la situation. Il convient de remédier sans tarder
à plusieurs défaillances dans le fonctionnement de la démocratie,
qui sont mises en évidence dans la présente résolution.
76. En particulier, pour améliorer la représentativité des parlements,
il faudrait, dans chaque Etat membre du Conseil de l’Europe, réexaminer
les catégories de personnes exclues du droit de vote et n’ayant
pas la possibilité de se présenter aux élections, afin d’en limiter
le nombre. De plus, il faudrait prendre des mesures concrètes afin
d’éliminer les cas d’apatridie, d’abaisser l’âge du droit de vote,
d’octroyer le droit de vote à des non-ressortissants résidant légalement
et d’éliminer toute forme de discrimination, qu’elle soit fondée
sur l’appartenance ethnique, l’origine religieuse, sociale, ou le
sexe. Il faudrait éliminer la pratique non démocratique du vote
familial.
77. Les Etats membres devraient prendre des mesures appropriées
pour renforcer les mécanismes nationaux et internationaux visant
à favoriser une participation équilibrée des femmes et des hommes
aux décisions afin d’atteindre, d’ici à 2020, l’objectif d’un seuil
d’au moins 40 % de femmes dans les organes politiques décisionnels
aux niveaux local, régional, parlementaire ou gouvernemental.
78. L’Assemblée rappelle également que, dès les débuts de l’intégration
européenne, le droit de former une opposition politique a été considéré
comme un élément essentiel d’une démocratie véritable. Elle note
que de plus en plus de droits sont conférés à l’opposition parlementaire
en relation avec la création de commissions d’enquête, la convocation
de séances spéciales du parlement et la possibilité de pouvoir saisir
la Cour constitutionnelle. Dans certains pays, il est proposé également
d’accorder ces droits à des partis politiques ou groupes politiques
individuels de l’opposition. Les partis de l’opposition et leurs
membres ne sauraient réclamer que des droits et des ressources,
mais devraient aussi faire preuve de responsabilité et de leur volonté
de les utiliser et de faire au mieux pour accroître l’efficacité
du parlement tout entier. Ils ne devraient pas se borner à jouer
uniquement leur rôle naturel, mais peut-être insuffisant, de critiquer
le pouvoir. Toutefois, la majorité parlementaire porte également
la responsabilité de respecter le droit de la minorité d’exprimer
son désaccord avec les décisions de la majorité et de promouvoir
des politiques alternatives.
79. Afin d’assurer une représentativité maximale des organes élus,
il faudrait considérer favorablement l’octroi du droit de vote,
au moins au niveau local, aux ressortissants des Etats membres du
Conseil de l’Europe résidant légalement dans un autre Etat membre
et aux personnes ayant perdu leur citoyenneté involontairement.
80. La question des différentes formes de vote à distance (y compris
le vote électronique) devrait faire l’objet d’un examen attentif
en vue d’en clarifier toutes les implications et les défis potentiels.
81. Les droits participatifs de tous les citoyens devraient être
renforcés. En particulier, il faudrait envisager d’instaurer des
éléments de démocratie directe, comme le droit de demander un référendum
ou de proposer une initiative législative. Ces éléments doivent
être conçus avec soin afin d’améliorer le caractère représentatif de
la démocratie et d’accroître les capacités d’intégration et d’apprentissage
de nos pays et de nos sociétés.
82. Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, les partis
politiques ont la responsabilité d’assurer une représentation équitable
des minorités dans les institutions élues, en tenant compte du principe
de la proportionnalité. Il n’existe pas de méthode unique pour atteindre
cet objectif et un assortiment de mesures est disponible.
83. Seul le strict respect des principes de bonne gouvernance
peut empêcher la corruption d’infiltrer les institutions démocratiques
et de les dénaturer. Le Conseil de l’Europe devrait insister sur
la nécessité de la mise en oeuvre d’un cadre juridique complet et
de son application, de la poursuite effective des délinquants et de
l’adaptation permanente des institutions afin qu’elles résistent
mieux à la criminalité économique.
84. Toutes les restrictions à la liberté d’expression doivent
être conformes à la Convention européenne des Droits de l’Homme
et à la jurisprudence de la Cour; il faut veiller au pluralisme
des médias et prendre des mesures pour prévenir et démanteler leur
concentration. Le Conseil de l’Europe doit mettre en place un mécanisme
spécifique de suivi de la liberté d’expression et des médias qui
examinera la situation dans tous les Etats membres du Conseil de
l’Europe.
85. A l’heure actuelle, peu d’Etats membres du Conseil de l’Europe
disposent de lois réglementant la question du lobbying. Le Conseil
de l’Europe devrait contribuer au débat sur la nécessité de se doter d’instruments
adaptés aux niveaux national et européen, et, pour sa part, il devrait
élaborer des principes directeurs concernant le lobbying.
86. L’éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits de
l’homme est un important facteur de la protection et de la promotion
effectives des droits de l’homme et de la démocratie. Le Conseil
de l’Europe devrait renforcer son action dans ce domaine à la lumière
des résultats et de l’évaluation de l’Année européenne de la citoyenneté
par l’éducation de 2005. Cette action devrait être renforcée par
l’élaboration et la mise en oeuvre de programmes nationaux dans
ce domaine.
87. Les collectivités territoriales devraient être dotées de toutes
les compétences, responsabilités et moyens nécessaires permettant
de mettre en oeuvre de manière efficace les politiques sectorielles
dans le plein respect des principes de subsidiarité et de bonne
gouvernance, et au bénéfice du citoyen européen.