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Résolution 1547 (2007)

Situation des droits de l’homme et de la démocratie en Europe

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 18 avril 2007 (15e séance) (voir Doc. 11203, rapport de la commission des questions politiques, rapporteur: M. Gross; voir également Doc. 11202, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Pourgourides; Doc. 11215, avis de la commission des questions économiques et du développement, rapporteuse: Mme Pirozhnikova; Doc. 11218, avis de la commission de la culture, de la science et de l’éducation, rapporteur: Mme Melo; Doc. 11219, avis de la commission de l’environnement, de l’agriculture et des questions territoriales, rapporteur: M. Platvoet; Doc. 11220, avis de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, rapporteuse: Mme Curdová; et Doc. 11221, avis de la commission du Règlement et des immunités, rapporteur: M. Cekuolis). Texte adopté par l’Assemblée le 18 avril 2007 (15e séance).

1. L’adhésion au Conseil de l’Europe, fondé en 1949, repose sur trois piliers: le principe en vertu duquel toute personne placée sous la juridiction de ses Etats membres doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la consolidation de l’Etat de droit et l’existence d’une véritable démocratie pluraliste, fondés sur les valeurs spirituelles et morales qui sont le patrimoine commun européen. Les réalisations du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits de l’homme, et dans l’établissement et le renforcement de la démocratie sont inégalées.
2. Cependant, nous ne pouvons pas nous permettre de nous contenter de l’acquis, qui a pourtant dépassé les rêves les plus optimistes des pères fondateurs de l’Organisation. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, composée de parlementaires des 46 Etats membres de l’Organisation, estime par conséquent qu’elle se doit non seulement de reconnaître les principales réalisations de l’Organisation, mais également de souligner les nouvelles missions et les défis auxquels elle est confrontée au XXIe siècle.

I. La situation des droits de l’homme en Europe

i. Le Conseil de l’Europe, gardien des droits de l’homme en Europe

3. L’Assemblée rappelle le rôle irremplaçable joué par le Conseil de l’Europe en tant que principale Organisation pour les droits de l’homme en Europe: s’il n’avait pas été fondé en 1949, il faudrait le créer aujourd’hui.
4. Le Conseil de l’Europe, qui couvre désormais presque tout le continent, est le point de référence et le gardien des droits de l’homme, de la démocratie et du respect de l’Etat de droit en Europe. Il dispose de toute une panoplie de mécanismes de contrôle efficaces, au premier rang desquels figurent la Convention européenne des Droits de l’Homme (STE n° 5), la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE n° 126), la Charte sociale européenne (STE n° 35) et la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE n° 157). Ces instruments disposent d’instances de contrôle indépendantes, telles que la Cour européenne des Droits de l’Homme (la Cour), garante exceptionnelle de la protection judiciaire internationale des droits de l’homme. Cet arsenal pour la protection des droits de l’homme a été renforcé, notamment par la création de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) et l’institution du commissaire aux droits de l’homme.
5. En plus de ses activités dans les domaines normatif et de suivi, le Conseil de l’Europe met en oeuvre des programmes de coopération, d’assistance et de sensibilisation dans les domaines juridique et des droits de l’homme, notamment sous la forme d’expertises de la législation, de développement des compétences et de formation. Ces activités, souvent réalisées en partenariat avec la Commission européenne, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), les Nations Unies et ses agences spécialisées, telles que le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), ainsi que ses partenaires non gouvernementaux, contribuent efficacement à une amélioration et une consolidation constantes des normes juridiques et de leur mise en oeuvre dans les Etats membres, renforçant ainsi la stabilité démocratique en Europe. Le rôle du Conseil de l’Europe, en stimulant et en apportant un soutien actif à la création de structures nationales indépendantes pour les droits de l’homme dans les Etats membres, illustre la contribution de l’Organisation à la consolidation des institutions des droits de l’homme en Europe.
6. L’une des plus importantes réalisations du Conseil de l’Europe, et de son Assemblée parlementaire en particulier, est l’abolition de facto de la peine de mort en temps de paix dans tous les Etats membres.
7. L’Assemblée rappelle que ces succès ont été atteints avec des ressources très limitées, le budget total du Conseil de l’Europe – y compris celui de l’Assemblée et de la Cour – étant de moins de 200 millions d’euros en 2007, ce qui représente moins de 15 % du seul budget du Parlement européen pour 2007.

ii. Principaux défis en matière de droits de l’homme

8. Tout en reconnaissant que des progrès importants ont été accomplis dans les Etats membres, l’écart entre les normes définies sur le papier et la réalité sur le terrain doit encore être réduit. La pleine mise en oeuvre des droits de l’homme existants, dans la vie quotidienne, est une mission inachevée. Les droits de l’homme sont d’autant plus efficacement défendus qu’ils sont ancrés dans la culture des citoyens, ce qui exige de la part de tous les Etats membres et du Conseil de l’Europe des politiques éducatives et culturelles adéquates.
9. L’Assemblée reste profondément préoccupée par le fait qu’il y a toujours des violations des droits de l’homme en Europe, y compris les plus graves.
10. Dans plusieurs pays européens, les défenseurs des droits de l’homme sont harcelés et confrontés à un climat de répression qui s’aggrave. Il est essentiel pour la protection et la promotion des droits de l’homme en Europe que les défenseurs des droits de l’homme, en particulier les organisations non gouvernementales, les avocats et les journalistes, puissent travailler sans entrave.
11. L’Etat de droit n’est toujours pas pleinement respecté dans plusieurs pays d’Europe. L’indépendance judiciaire et l’efficacité de la justice ont besoin d’être consolidées et renforcées dans de nombreux cas. De surcroît, il y a toujours des «trous noirs» géographiques où les mécanismes du Conseil de l’Europe en matière de droits de l’homme ne peuvent être pleinement mis en oeuvre. C’est le cas du Bélarus, un pays non membre, et de certaines zones dans des Etats membres dont les autorités ne sont pas reconnues internationalement et/ou qui ne sont pas de facto sous leur contrôle, comme le Haut-Karabakh, le Kosovo, la «République moldave de Transnistrie», l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie, ainsi que la partie nord de Chypre.
12. Même les violations des droits de l’homme les plus graves, comme les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, les détentions secrètes, la torture et les traitements inhumains, ont toujours cours en Europe, comme l’indique le rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée (Doc. 11202).
13. L’impunité, y compris pour ces violations des droits de l’homme les plus graves, n’a pas été éradiquée en Europe. L’impunité doit être éliminée par des enquêtes et des procédures judiciaires promptes, approfondies et impartiales.
14. Le terrorisme est l’un des principaux défis auxquels doivent faire face les sociétés ouvertes en Europe; il peut et doit être vaincu sans violation des principes mêmes des droits de l’homme, de l’Etat de droit et de la tolérance que les terroristes veulent détruire.
15. La traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, est la forme moderne de l’ancien commerce mondial des esclaves. Elle considère les êtres humains comme des marchandises que l’on peut acheter et vendre. Cette pratique est répandue en Europe et constitue une grave violation des droits de l’homme. La nouvelle Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197), ouverte à la signature en mai 2005, représente une étape majeure dans la lutte contre ce fléau.
16. Partout en Europe se trouvent des personnes dans des situations particulièrement vulnérables, dont les droits doivent être davantage protégés et renforcés.
16.1. Le traitement des personnes privées de liberté mérite plus d’attention, qu’elles soient en garde à vue, en prison, dans des hôpitaux psychiatriques ou d’autres structures de détention, telles que les «centres de rétention» pour les migrants en situation irrégulière. L’éradication de tout mauvais traitement envers les personnes détenues, y compris les cas de torture les plus graves dont l’existence a été établie par la Cour européenne des Droits de l’Homme dans différentes régions d’Europe et tout particulièrement dans le Caucase du Nord, doit rester un objectif prioritaire.
16.2. Un trop grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur de leur pays ne peuvent rentrer chez eux en toute sécurité. Les demandeurs d’asile ont des difficultés à entrer en Europe et, une fois dans un Etat membre, ils sont souvent confrontés à l’impossibilité de facto de voir leur demande traitée de façon équitable, en raison de procédures d’une complexité inacceptable; cette situation est aggravée par des différences de traitement substantielles d’un pays à l’autre. En outre, les migrants – particulièrement ceux qui sont en situation irrégulière – font souvent l’objet d’un traitement discriminatoire quant à l’accès à leurs droits économiques et sociaux.
16.3. Les droits des enfants, des personnes âgées et des personnes souffrant d’un handicap ont également besoin d’être mieux protégés.
16.4. Des efforts particuliers doivent être faits pour mieux intégrer les exclus sociaux, y compris les Roms et les Gens du voyage.
17. La violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique, est encore très répandue et doit être combattue résolument à tous les niveaux. Les mariages forcés et les mariages d’enfants, les prétendus «crimes d’honneur» et les mutilations sexuelles féminines constituent également des violations graves des droits de l’homme, qui doivent être combattues sans délai.
18. Le racisme, la xénophobie et l’intolérance n’ont pas été éradiqués et les discriminations fondées sur l’origine raciale, ethnique ou religieuse sont toujours largement présentes dans les sociétés européennes. La recrudescence de l’antisémitisme est particulièrement préoccupante, de même que la montée inquiétante de l’islamophobie.
19. La discrimination fondée sur le genre ou l’orientation sexuelle est répandue dans un certain nombre d’Etats. Le non-respect ou la restriction inacceptable de droits tels que la liberté d’expression, d’association et de réunion, fondés sur le genre ou l’orientation sexuelle, sont intolérables.
20. De même, dans de nombreux Etats membres, le respect des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou à d’autres minorités, ainsi que l’intégration des groupes minoritaires dans la société, en particulier les Roms et les Gens du voyage, restent des défis importants.
21. Les droits sociaux et économiques doivent être pleinement respectés, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation, au logement, aux soins de santé, à l’emploi, aux revenus minimums, aux prestations sociales et aux retraites. Tous les Etats membres devraient considérer qu’ils sont liés au respect de ces droits en conformité, entre autres, avec les principes énoncés dans la Charte sociale européenne révisée (STE n° 163).
22. Les droits culturels font partie intégrante des droits de l’homme, en particulier le droit à l’éducation consacré par l’article 2 du Protocole additionnel à la Convention européenne des Droits de l’Homme (STE n° 9) et le droit de chacun de participer à la vie culturelle, énoncé à l’article 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies. Les Etats membres doivent respecter ces droits et ceux prévus par la Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la valeur du patrimoine culturel pour la société (STCE no 199), ainsi que la liberté académique et l’autonomie universitaire.
23. Le Conseil de l’Europe a en outre élaboré les seules normes internationales spécifiques en matière de bioéthique dans la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine (STE n° 164), et ses protocoles.
24. Le développement durable est un autre objectif majeur européen et mondial. Toute personne devrait avoir droit à un environnement sain, viable et décent. Ce droit est interdépendant et inséparable des valeurs fondamentales de la paix et de l’Etat de droit, du respect de la dignité humaine et des droits de l’homme, de l’équité entre les générations, de la cohésion géographique et sociale, et du développement économique. Il doit être garanti si l’on veut parvenir à un développement durable, fondé sur la solidarité, pour les générations actuelles et futures.

iii. La nécessité de renforcer les mécanismes de l’Organisation en matière de droits de l’homme

25. Au vu des défis mentionnés précédemment, l’Assemblée considère que la mission statutaire du Conseil de l’Europe est toujours aussi pertinente, si ce n’est plus, que lors de sa création en 1949. L’Organisation doit continuer à être renforcée en tant que «conscience morale» de l’Europe.
26. Afin de garantir l’efficacité à long terme de la Convention européenne des Droits de l’Homme, la mise en oeuvre du processus de réforme doit être accélérée. Une mise en oeuvre rapide du Protocole no 14 à la Convention (STCE no 194) est nécessaire, mais pas suffisante. Les droits de l’homme doivent avant tout être appliqués au niveau national.
27. Etant donné ses ressources limitées, le Conseil de l’Europe, y compris son Assemblée parlementaire, devrait se concentrer sur ses domaines d’excellence – les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit.
28. La crédibilité du Conseil de l’Europe en tant que principale organisation des droits de l’homme en Europe dépend de la capacité du Comité des Ministres, l’organe de prise de décision de l’Organisation, à prendre ses responsabilités face aux principaux défis en matière de droits de l’homme. Le consensus comme processus de décision risque de paralyser l’acquis de l’Organisation en matière de droits de l’homme.
29. Un autre défi de taille pour le système de protection des droits de l’homme de l’Organisation est le risque de duplication inutile de ses activités par des organes de l’Union européenne, qui pourrait donner lieu à des normes divergentes et entraîner de nouvelles lignes de division en Europe. Ce serait aussi un gaspillage des ressources budgétaires limitées, en cette période d’austérité générale. L’Union européenne et ses Etats membres devraient faire un meilleur usage des instruments existants du Conseil de l’Europe, l’adhésion à la Convention européenne des Droits de l’Homme étant désormais une priorité absolue. L’adhésion de l’Union européenne/Communauté européenne à la Charte sociale européenne révisée devrait également faire l’objet d’un examen attentif. La complémentarité et la recherche de valeur ajoutée devraient également régir les relations entre le Conseil de l’Europe et l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, récemment instituée.

iv. La voie à suivre

30. L’Assemblée parlementaire rappelle ses résolutions précédentes sur des questions spécifiques de droits de l’homme mentionnées dans le présent texte et dans le rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée (Doc. 11202).
31. L’Assemblée est préoccupée par le fossé existant entre les déclarations solennelles et les engagements pris par les Etats membres, y compris lors du 3e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe, tenu à Varsovie en mai 2005, et la situation dans la pratique, où les violations des droits de l’homme restent souvent sans réparation ou recours. Ce décalage porte atteinte à la crédibilité de l’ensemble de nos dirigeants nationaux, de nos instances parlementaires, de l’Organisation, ainsi qu’à celle de tout le continent européen et des valeurs universelles qu’il défend.
32. L’Assemblée considère qu’il est temps de mettre fin à l’hypocrisie et de passer de la parole aux actes. Par ailleurs, l’Assemblée considère que la méthode la plus efficace pour prévenir les violations des droits de l’homme est d’adopter une tolérance zéro à l’égard de telles violations.
33. Par conséquent, elle décide, d’abord et avant tout, de se donner pour mandat, dans ses travaux futurs, d’accorder une plus grande priorité aux droits de l’homme et à l’Etat de droit, et invite le Comité des Ministres à faire de même.
34. Elle invite également les Etats membres du Conseil de l’Europe, en particulier leurs instances parlementaires respectives, à s’employer à résoudre toutes les questions soulevées dans les rapports et les avis ayant servi de support à la présente résolution et, notamment:
34.1. à garantir la prompte et pleine mise en oeuvre de la Déclaration et du Plan d’action du Sommet de Varsovie de 2005, notamment des mesures garantissant l’efficacité permanente de la Convention européenne des Droits de l’Homme et celles visant à protéger et promouvoir les droits de l’homme et l’Etat de droit par le biais des autres institutions et mécanismes du Conseil de l’Europe;
34.2. à prendre toutes les mesures appropriées en s’efforçant réellement d’éliminer toutes les violations des droits de l’homme, en particulier les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, les détentions secrètes, la torture et les traitements inhumains, et de mener des enquêtes effectives sur ces crimes et d’en poursuivre les auteurs. A cet égard, l’Assemblée rappelle, une fois de plus, que le droit à la vie et l’interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants sont des droits auxquels il ne peut être dérogé en vertu de la Convention européenne des Droits de l’Homme;
34.3. à mettre un terme à l’impunité des auteurs de violations des droits de l’homme, en condamnant rapidement et fermement ces violations au niveau le plus élevé, en garantissant que les forces de l’ordre mènent des enquêtes transparentes, impartiales et effectives, et en rendant les autorités responsables devant les parlements;
34.4. à protéger efficacement les défenseurs des droits de l’homme et leur travail, y compris l’accès sans entrave des personnes à la Cour européenne des Droits de l’Homme;
34.5. à mettre pleinement en oeuvre, au niveau national, les droits garantis par la Convention européenne des Droits de l’Homme et les autres instruments internationaux en matière de droits de l’homme, faisant ainsi des droits de l’homme une réalité pour chacun partout en Europe;
34.6. à mettre pleinement en oeuvre les arrêts de la Cour européenne des Droits de l’Homme dans l’ordre juridique de tous les Etats membres;
34.7. à faire de l’éducation aux droits de l’homme un élément de base de l’éducation scolaire et de l’apprentissage tout au long de la vie;
34.8. à respecter pleinement les droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme, comme l’a déjà demandé l’Assemblée à de nombreuses occasions, à refuser d’expulser ou d’extrader quiconque vers un pays où il existe un risque réel pour cette personne d’être soumise à de graves violations des droits de l’homme, quelles que soient les assurances reçues, et à signer et/ou à ratifier dès que possible les conventions et instruments de l’Organisation relatifs aux droits de l’homme, y compris ceux portant sur la lutte contre le terrorisme;
34.9. à éliminer la traite des êtres humains. A cet égard, l’Assemblée invite les Etats membres à signer et/ou à ratifier au plus vite la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains afin qu’elle puisse entrer en vigueur le plus tôt possible, et, de toute façon, à mettre immédiatement en oeuvre ses dispositions les plus importantes. L’Assemblée invite également l’Union européenne à signer et à ratifier cette convention dans les meilleurs délais;
34.10. à mieux protéger les droits des personnes dans des situations particulièrement vulnérables, notamment les personnes privées de liberté, les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, les personnes disparues et les membres de leur famille, les demandeurs d’asile et les migrants, les enfants, les personnes âgées, les personnes souffrant d’un handicap, les exclus sociaux, y compris les Roms et les Gens du voyage, et à coopérer pleinement avec les instances concernées fondées par un traité et avec les autres organes oeuvrant dans ce domaine;
34.11. à lutter efficacement contre la violence domestique, les mariages forcés et les mariages d’enfants, ainsi que contre les prétendus «crimes d’honneur» et les mutilations sexuelles féminines;
34.12. s’agissant de la lutte contre la violence domestique, à poursuivre et à intensifier leurs efforts pour mettre en oeuvre le programme de la Campagne du Conseil de l’Europe pour combattre la violence à l’égard des femmes, y compris la violence domestique, sensibiliser le public et adopter des normes pour bannir la violence domestique à l’égard des femmes;
34.13. à lutter efficacement contre toutes les formes de discrimination fondées sur l’origine raciale, ethnique ou religieuse, en particulier contre la montée de l’antisémitisme et de l’islamophobie, et, à cet égard, à signer et à ratifier le Protocole no 12 à la Convention européenne des Droits de l’Homme (STE n° 177) qui prévoit une interdiction générale de la discrimination, et à mettre pleinement en oeuvre les recommandations de l’ECRI;
34.14. à mieux protéger les droits des personnes appartenant à des minorités nationales et à d’autres minorités, et à mieux garantir l’intégration des groupes minoritaires dans la société, en particulier des Roms et des Gens du voyage;
34.15. à signer et/ou à ratifier la Charte sociale européenne révisée ainsi que sa procédure de réclamation collective, et à défendre et à appliquer pleinement les droits sociaux et économiques, notamment en ce qui concerne l’accès à des structures d’orientation et de formation professionnelle, au logement, aux soins de santé, à l’emploi, aux revenus minimums, aux prestations sociales et aux retraites, en vue de bâtir une Europe plus humaine et plus soudée;
34.16. à respecter pleinement le droit à l’éducation prévu à l’article 2 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des Droits de l’Homme et le droit de chacun de participer à la vie culturelle, énoncé à l’article 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels;
34.17. à devenir partie à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine ainsi qu’à ses protocoles;
34.18. à viser l’éradication progressive et totale de la pauvreté;
34.19. à prendre des mesures législatives en faveur d’une gestion conjointe et durable des ressources pour protéger l’environnement, à promouvoir le recours à des sources d’énergie renouvelables, à mettre en oeuvre des programmes d’économie d’énergie dans l’industrie, les bureaux et les habitations, à encourager les transports publics et la gestion durable de l’eau, et à mettre en place une politique agricole axée sur la sécurité alimentaire, le bien-être des animaux et l’exploitation durable des ressources;
34.20. de façon plus générale, à signer et/ou à ratifier tous les principaux instruments juridiques du Conseil de l’Europe dans le domaine des droits de l’homme, sans réserves ni déclarations interprétatives restrictives, et à retirer celles qui ont déjà été faites;
34.21. à renforcer le rôle du Conseil de l’Europe en tant que mécanisme efficace de coopération paneuropéenne pour protéger et promouvoir les droits de l’homme;
34.22. à veiller à ce que la complémentarité et la recherche de valeur ajoutée régissent les relations entre le Conseil de l’Europe et les autres organisations et instances internationales oeuvrant dans le domaine des droits de l’homme, et, en particulier, avec la nouvelle Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, afin d’éviter des duplications d’activités et un gaspillage des fonds publics;
34.23. à considérer l’adhésion rapide de l’Union européenne à la Convention européenne des Droits de l’Homme comme une priorité absolue et, pour les Etats également membres de l’Union européenne, à prendre les mesures nécessaires afin de garantir une telle adhésion;
34.24. à faire un meilleur usage des instruments et des institutions du Conseil de l’Europe, et à veiller à ce que les ressources de l’Organisation soient considérablement augmentées en raison de ses réalisations importantes dans le domaine des droits de l’homme.
35. L’Assemblée décide, en outre, en coopération étroite avec les délégations nationales de l’Assemblée, d’inviter les commissions compétentes des parlements des Etats membres à une conférence annuelle des commissions parlementaires des affaires juridiques et des droits de l’homme afin de faire le point sur les carences et progrès dans le domaine des droits de l’homme et de l’Etat de droit, d’échanger de bonnes pratiques et d’identifier toute amélioration nécessaire des législations nationales ainsi que d’éventuelles actions futures du Conseil de l’Europe dans ces domaines.
36. Au vu de la contribution significative de la société civile, y compris des défenseurs des droits de l’homme, à la promotion et à la protection des droits de l’homme, l’Assemblée invite son Bureau à mettre en place un prix annuel de l’Assemblée parlementaire pour récompenser des actions exceptionnelles de la société civile dans la défense des droits de l’homme ainsi que les critères de sélection des candidats.

II. La situation de la démocratie en Europe

i. Le Conseil de l’Europe, maison de la démocratie

37. L’Assemblée rappelle que le Conseil de l’Europe est la plus ancienne institution paneuropéenne qui défende les valeurs et les principes démocratiques. La reconnaissance et la mise en oeuvre des principes de la démocratie, de la primauté du droit et du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales sont un préalable indispensable à l’adhésion à l’Organisation.
38. Depuis sa création, il y a cinquante-huit ans, le Conseil de l’Europe a constitué un acquis considérable dans le domaine de la démocratie, qui forme un cadre de référence légitime pour le développement de la démocratie. Cet acquis comprend 200 conventions, traités et chartes, auxquels il faut ajouter les recommandations du Comité des Ministres, les recommandations, résolutions et avis de l’Assemblée parlementaire, les recommandations, résolutions et avis du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, les rapports d’autres organes du Conseil de l’Europe, en particulier de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise), de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) et du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO), ainsi que les multiples rapports d’information et publications venant à l’appui des activités du Conseil de l’Europe et les résultats des projets interdisciplinaires.
39. L’acquis du Conseil de l’Europe dans le domaine de la démocratie vise à apporter une aide dans l’établissement des normes, et il s’efforce de le faire par l’élaboration d’instruments juridiques, et à mettre en place certaines structures ou pratiques institutionnelles. Outre ce cadre juridique, les organes du Conseil de l’Europe s’attachent à développer les institutions et les pratiques démocratiques en Europe en menant des activités qui donnent des lignes directrices pour définir les priorités et cerner les problèmes en matière de démocratie.
40. Le Conseil de l’Europe a joué un rôle essentiel en accompagnant les transformations démocratiques qui ont été engagées vers le milieu des années 1970 et au début des années 1990, qui se poursuivent encore dans certains pays européens, et en consolidant la démocratie dans ses Etats membres.
41. Depuis la coopération précédant l’adhésion officielle jusqu’aux procédures de suivi, le Conseil de l’Europe a guidé efficacement les pays tout au long du difficile processus de démocratisation en leur offrant son expertise, une assistance juridique et des programmes de coopération, en mettant en évidence leurs points faibles et en leur proposant des solutions et des remèdes concrets, conformes aux normes démocratiques.
42. Parce qu’elle est un processus évolutif et jamais achevé, tendant à accroître la liberté de tous les citoyens de diriger leur propre vie, la démocratie reste un défi pour tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. Dans beaucoup d’entre eux, les citoyens ne sont pas satisfaits de la situation de leur démocratie et s’efforcent de l’améliorer en comblant les déficits démocratiques. C’est lorsqu’elle est ancrée dans la culture des citoyens que la démocratie s’épanouit le mieux et porte ses fruits, ce qui exige de la part de tous les Etats membres et du Conseil de l’Europe des politiques éducatives et culturelles qui y contribuent activement.
43. Le Forum pour l’avenir de la démocratie a été créé en 2005, à la suite du 3e Sommet du Conseil de l’Europe, en vue d’élargir et d’approfondir la réflexion sur certains problèmes cruciaux qui se posent aujourd’hui en matière de démocratie dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.

ii. Les enjeux démocratiques majeurs

44. Tout en accueillant avec satisfaction les réalisations et les progrès indéniables qui ont été obtenus dans la mise en oeuvre des normes démocratiques sur le continent européen au cours des dernières années, l’Assemblée est préoccupée par la multiplication des déficits démocratiques qu’elle observe dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.
45. L’Assemblée considère avec une profonde inquiétude le mécontentement et la désaffection politiques croissants des citoyens, dont témoignent la baisse de la participation électorale et la déception ou l’indifférence grandissantes à l’égard de la politique, surtout parmi les jeunes générations. De ce fait, les gens perdent confiance dans la démocratie et le fossé entre les institutions politiques et les citoyens ne cesse de se creuser.
46. Dans beaucoup de pays, ce phénomène est étroitement lié au dysfonctionnement de certaines institutions politiques: les partis politiques ont perdu une partie de leur capacité à faire le lien entre les citoyens et l’Etat; la représentativité des parlements est bien trop souvent sujette à caution; un grand nombre de citoyens ont l’impression, parfois à juste titre, que les principes fondamentaux de la démocratie tels que la séparation des pouvoirs, les libertés politiques, la transparence et la responsabilité sont insuffisamment appliqués ou ne le sont pas du tout.
47. Dans certaines «vieilles démocraties», le déclin d’intérêt à l’égard des partis dominants et du parlement ne traduit pas un manque d’intérêt pour la politique mais une appréciation critique du travail de ces institutions. Les institutions traditionnelles de la démocratie représentative devraient, en pareille situation, s’ouvrir davantage à la participation citoyenne afin de surmonter leurs propres défaillances et de remobiliser les citoyens inquiets de leur dysfonctionnement.
48. Dans ces démocraties, il conviendrait de se demander si les systèmes traditionnels de démocratie représentative doivent prendre davantage en considération les changements rapides dans le domaine de la communication et de l’accès à l’information, changements qui entraînent l’évolution des systèmes de démocratie directe.
49. L’Assemblée est extrêmement préoccupée par les cas de violations de normes démocratiques fondamentales dont elle a connaissance dans un certain nombre d’Etats membres du Conseil de l’Europe. En particulier, elle juge inquiétantes les informations faisant état de restrictions de la liberté d’expression, de tentatives pour limiter la liberté d’association, de l’absence d’élections libres et équitables, et d’une dénaturation de la démocratie représentative, participative et ouverte. De même, il apparaît que d’autres principes démocratiques fondamentaux, dont la séparation et le contrôle des pouvoirs, ainsi que la primauté du droit, sont insuffisamment mis en oeuvre.
50. L’Assemblée est également vivement préoccupée par les exemples dont elle a eu connaissance d’un manque effectif de séparation des pouvoirs et de contrôles adéquats d’éventuels abus de pouvoirs.
51. Tous les pays de notre continent – les vieilles et les jeunes démocraties – doivent être plus attentifs à la qualité de leur démocratie, sinon le pouvoir politique perdra ce qui est le principal acquis d’une démocratie bien établie et en bon état de marche: sa légitimité.
52. La liberté d’expression et d’information ainsi que le pluralisme et la diversification des médias ont une importance cruciale dans une vraie démocratie. Il y a lieu de s’alarmer des récents assassinats de journalistes, des restrictions imposées à des médias indépendants et des sanctions infligées à des journalistes. Les exemples de concentration excessive des médias sont également un motif d’inquiétude car cette concentration est préjudiciable au pluralisme et à la diversité. La manipulation de la publicité institutionnelle pour faire pression sur les médias doit être fortement condamnée.
53. La tendance croissante des médias à se substituer aux partis politiques en déterminant les priorités politiques, en monopolisant le débat politique, en créant et choisissant les personnalités politiques est également préoccupante. Les médias sont trop souvent des institutions dominées par des considérations économiques qui, en faisant primer leurs intérêts commerciaux sur le service aux citoyens et la démocratie, contribuent inévitablement à dénaturer la démocratie. Le rôle des médias dans la détermination des priorités politiques, la diffusion des débats politiques et la formulation d’avis sur les personnalités politiques souligne l’importance, pour une société démocratique, de l’existence de médias indépendants, pluralistes et responsables.
54. Des informations faisant état de restrictions de la liberté d’association, notamment d’obstacles bureaucratiques et de taxes injustifiées, sont également source d’inquiétude. Dans plusieurs pays, des groupes professionnels ou ethniques n’ont pas le droit de s’organiser ou de former un parti politique. Or la liberté d’association représente l’un des droits politiques les plus essentiels et une condition fondamentale du bon fonctionnement de la démocratie.
55. La représentativité du parlement est la clé d’une démocratie représentative. A cet égard, toute forme de discrimination, qu’elle soit fondée sur le sexe, l’appartenance ethnique ou religieuse, ou l’origine sociale, doit être éliminée s’agissant du droit de vote et de l’éligibilité.
56. La citoyenneté est le lien politique et juridique crucial entre l’Etat et l’individu. Les situations d’apatridie à grande échelle, dans certains pays, soulèvent de sérieuses préoccupations. Des mesures visant à limiter l’apatridie et à promouvoir l’acquisition de la citoyenneté devraient donc se poursuivre.
57. L’égalité de participation des femmes au processus décisionnel est un signe du bon fonctionnement de la démocratie. Malheureusement, on est loin d’avoir atteint la parité en politique. Dans certains parlements, les femmes représentent à peine 4,4 % des députés; dans les organes exécutifs au niveau intermédiaire et au plus haut niveau, cette proportion est parfois plus faible encore.
58. Dans les démocraties bien établies, il ne devrait pas y avoir de seuils supérieurs à 3 % dans les élections législatives. Ainsi, le plus grand nombre d’opinions devrait pouvoir s’exprimer. Exclure des groupes importants de personnes du droit d’être représentées va à l’encontre d’un système démocratique. Dans les démocraties bien établies, il convient de trouver un équilibre entre une représentation équitable des opinions de la société et l’efficacité du parlement et du gouvernement.
59. La tenue d’élections libres et équitables est un élément essentiel d’une démocratie. Beaucoup de progrès ont été faits en matière d’établissement des normes électorales et de suivi de leur application. Cependant, des expériences récentes d’appréciations divergentes d’élections dans certains pays européens montrent qu’il reste beaucoup à faire dans ce domaine.
60. Il y a lieu d’être préoccupé par les cas signalés de manque d’indépendance de la justice ou des parlements.
61. Il conviendrait que les Etats membres accordent une attention à la question de savoir si la démocratie directe (par exemple les référendums et les initiatives des citoyens) peut jouer un rôle plus important.
62. Les principes de subsidiarité et de proportionnalité doivent être mis en place puisqu’ils sont nécessaires pour parvenir à une bonne gouvernance, ce qui est essentiel pour renforcer la démocratie.
63. L’Assemblée reconnaît l’importance de la démocratie locale et régionale en tant que fondement et garant de la démocratie en Europe, et regrette que les principes de la Charte européenne de l’autonomie locale (STE no 122) ne soient pas toujours véritablement appliqués. Le fait que cette charte n’ait pas encore été approuvée est également regrettable.
64. L’Assemblée est vivement préoccupée par le fait que, dans un certain nombre de régions géographiques d’Europe, dont un pays – le Bélarus – et plusieurs régions d’Etats membres du Conseil de l’Europe échappant de facto à leur contrôle, les principes démocratiques ne sont pas appliqués.

iii. La nécessité de renforcer l’action de l’Organisation en matière de démocratie

65. Compte tenu des enjeux décrits ci-dessus, le Conseil de l’Europe a un rôle majeur à jouer en continuant d’assister, d’encourager et de guider ses Etats membres pour qu’ils remédient à leurs insuffisances démocratiques. L’Assemblée invite tous les organes statutaires de l’Organisation à accorder une attention particulière aux problèmes examinés dans la présente résolution et son exposé des motifs.
66. L’Assemblée est convaincue que la fonction normative du Conseil de l’Europe devrait contribuer à combler les déficits démocratiques. Une analyse approfondie, l’inventaire des problèmes et des solutions devraient être suivis de propositions d’actions, de recommandations de réformes et d’orientations. En particulier, une fois les défis identifiés, il conviendrait d’élaborer des instruments juridiques ou des lignes directrices.
67. Les procédures de suivi devraient être renforcées. En même temps, des mesures devraient être prises pour que les Etats membres respectent mieux les recommandations formulées dans le cadre de ces procédures. Les parlements nationaux ont un rôle important à jouer à cet égard et l’Assemblée devrait coopérer plus intensivement avec eux.
68. Des projets et des programmes de coopération, y compris ceux visant à améliorer la connaissance du public sur la Convention européenne des Droits de l’Homme et les droits et libertés qu’elle garantit, devraient être établis dans des domaines d’intérêt particulier pour la démocratie.
69. La Commission de Venise devrait être dotée de ressources suffisantes pour intensifier son action en matière de conseil et d’assistance juridiques destinés à consolider la démocratie. De plus, elle est encouragée à réaliser une étude afin de préciser la notion de catégories de développement démocratique et de montrer comment cette classification pourrait servir de point de départ pour de futures évaluations de la situation de la démocratie en Europe et améliorer ainsi la capacité de l’Assemblée à proposer des réformes utiles.
70. Le Forum pour l’avenir de la démocratie offre un cadre privilégié pour approfondir la réflexion sur la démocratie, l’évaluation de son état, la détermination des déficits démocratiques et la promotion des principes et des bonnes pratiques démocratiques. Il convient de lui accorder l’importance qu’il mérite et de le doter de ressources suffisantes pour qu’il puisse poursuivre son action.
71. L’Assemblée invite le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe à poursuivre ses activités dans le domaine de la démocratie locale et régionale, et à approfondir sa réflexion sur les défis posés à la démocratie dans ses domaines de compétence.
72. L’Assemblée décide d’évaluer minutieusement la situation de la démocratie en Europe, d’améliorer sa capacité à proposer les réformes nécessaires et de tenir un débat à ce sujet régulièrement.

iv. La voie à suivre

73. La démocratie est un processus permanent d’amélioration politique et procédurale.
74. L’Assemblée parlementaire rappelle ses précédentes résolutions consacrées à différents aspects de la démocratie et à son fonctionnement dans les Etats membres.
75. Elle invite tous les Etats membres à accorder l’attention voulue aux problèmes exposés ci-dessus et à s’y attaquer dans le but d’améliorer la situation. Il convient de remédier sans tarder à plusieurs défaillances dans le fonctionnement de la démocratie, qui sont mises en évidence dans la présente résolution.
76. En particulier, pour améliorer la représentativité des parlements, il faudrait, dans chaque Etat membre du Conseil de l’Europe, réexaminer les catégories de personnes exclues du droit de vote et n’ayant pas la possibilité de se présenter aux élections, afin d’en limiter le nombre. De plus, il faudrait prendre des mesures concrètes afin d’éliminer les cas d’apatridie, d’abaisser l’âge du droit de vote, d’octroyer le droit de vote à des non-ressortissants résidant légalement et d’éliminer toute forme de discrimination, qu’elle soit fondée sur l’appartenance ethnique, l’origine religieuse, sociale, ou le sexe. Il faudrait éliminer la pratique non démocratique du vote familial.
77. Les Etats membres devraient prendre des mesures appropriées pour renforcer les mécanismes nationaux et internationaux visant à favoriser une participation équilibrée des femmes et des hommes aux décisions afin d’atteindre, d’ici à 2020, l’objectif d’un seuil d’au moins 40 % de femmes dans les organes politiques décisionnels aux niveaux local, régional, parlementaire ou gouvernemental.
78. L’Assemblée rappelle également que, dès les débuts de l’intégration européenne, le droit de former une opposition politique a été considéré comme un élément essentiel d’une démocratie véritable. Elle note que de plus en plus de droits sont conférés à l’opposition parlementaire en relation avec la création de commissions d’enquête, la convocation de séances spéciales du parlement et la possibilité de pouvoir saisir la Cour constitutionnelle. Dans certains pays, il est proposé également d’accorder ces droits à des partis politiques ou groupes politiques individuels de l’opposition. Les partis de l’opposition et leurs membres ne sauraient réclamer que des droits et des ressources, mais devraient aussi faire preuve de responsabilité et de leur volonté de les utiliser et de faire au mieux pour accroître l’efficacité du parlement tout entier. Ils ne devraient pas se borner à jouer uniquement leur rôle naturel, mais peut-être insuffisant, de critiquer le pouvoir. Toutefois, la majorité parlementaire porte également la responsabilité de respecter le droit de la minorité d’exprimer son désaccord avec les décisions de la majorité et de promouvoir des politiques alternatives.
79. Afin d’assurer une représentativité maximale des organes élus, il faudrait considérer favorablement l’octroi du droit de vote, au moins au niveau local, aux ressortissants des Etats membres du Conseil de l’Europe résidant légalement dans un autre Etat membre et aux personnes ayant perdu leur citoyenneté involontairement.
80. La question des différentes formes de vote à distance (y compris le vote électronique) devrait faire l’objet d’un examen attentif en vue d’en clarifier toutes les implications et les défis potentiels.
81. Les droits participatifs de tous les citoyens devraient être renforcés. En particulier, il faudrait envisager d’instaurer des éléments de démocratie directe, comme le droit de demander un référendum ou de proposer une initiative législative. Ces éléments doivent être conçus avec soin afin d’améliorer le caractère représentatif de la démocratie et d’accroître les capacités d’intégration et d’apprentissage de nos pays et de nos sociétés.
82. Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, les partis politiques ont la responsabilité d’assurer une représentation équitable des minorités dans les institutions élues, en tenant compte du principe de la proportionnalité. Il n’existe pas de méthode unique pour atteindre cet objectif et un assortiment de mesures est disponible.
83. Seul le strict respect des principes de bonne gouvernance peut empêcher la corruption d’infiltrer les institutions démocratiques et de les dénaturer. Le Conseil de l’Europe devrait insister sur la nécessité de la mise en oeuvre d’un cadre juridique complet et de son application, de la poursuite effective des délinquants et de l’adaptation permanente des institutions afin qu’elles résistent mieux à la criminalité économique.
84. Toutes les restrictions à la liberté d’expression doivent être conformes à la Convention européenne des Droits de l’Homme et à la jurisprudence de la Cour; il faut veiller au pluralisme des médias et prendre des mesures pour prévenir et démanteler leur concentration. Le Conseil de l’Europe doit mettre en place un mécanisme spécifique de suivi de la liberté d’expression et des médias qui examinera la situation dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.
85. A l’heure actuelle, peu d’Etats membres du Conseil de l’Europe disposent de lois réglementant la question du lobbying. Le Conseil de l’Europe devrait contribuer au débat sur la nécessité de se doter d’instruments adaptés aux niveaux national et européen, et, pour sa part, il devrait élaborer des principes directeurs concernant le lobbying.
86. L’éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits de l’homme est un important facteur de la protection et de la promotion effectives des droits de l’homme et de la démocratie. Le Conseil de l’Europe devrait renforcer son action dans ce domaine à la lumière des résultats et de l’évaluation de l’Année européenne de la citoyenneté par l’éducation de 2005. Cette action devrait être renforcée par l’élaboration et la mise en oeuvre de programmes nationaux dans ce domaine.
87. Les collectivités territoriales devraient être dotées de toutes les compétences, responsabilités et moyens nécessaires permettant de mettre en oeuvre de manière efficace les politiques sectorielles dans le plein respect des principes de subsidiarité et de bonne gouvernance, et au bénéfice du citoyen européen.