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Résolution 1683 (2009)
La guerre entre la Géorgie et la Russie: un an après
1. Un an après
le déclenchement de la guerre tragique entre deux de ses Etats membres,
la Géorgie et la Russie, l’Assemblée parlementaire réaffirme ses
Résolutions 1633 (2008) et 1647 (2009), adoptées respectivement
le 2 octobre 2008 et le 28 janvier 2009. Elle estime que les demandes
formulées à l’endroit de la Géorgie et de la Russie, ainsi que des
autorités de facto en Abkhazie
et en Ossétie du Sud, continuent de fournir une feuille de route
transparente, impartiale et réaliste, destinée à faire face aux
conséquences de cette guerre, à l’intention non seulement des parties
concernées, mais aussi de l’Assemblée elle-même. L’Assemblée réaffirme
son attachement à l’intégrité territoriale et à la souveraineté
de la Géorgie, ainsi qu’à l’inviolabilité de ses frontières.
2. S’agissant de l’enquête internationale indépendante sur les
origines et le déroulement du conflit ouverte par l’Union européenne,
l’Assemblée note que le mandat de la mission d’enquête a été prorogé
jusqu’au 30 septembre 2009 par le Conseil européen. L’Assemblée
se félicite de la coopération constructive tant de la Géorgie que
de la Russie avec la mission, et décide de revenir sur la question
des causes et des circonstances précises du déclenchement de la
guerre après la présentation du rapport de la mission d’enquête internationale.
3. L’Assemblée est gravement préoccupée par la tension et les
provocations persistantes le long des frontières administratives
de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, qui ne peuvent que déstabiliser
la région tout entière. Elle estime que la seule manière de prévenir
l’escalade des tensions et la reprise des combats et des hostilités
est d’autoriser l’accès immédiat et sans restriction des observateurs
internationaux aux deux côtés des frontières administratives de
l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, ainsi que le déploiement dans
la région d’une nouvelle force internationale de maintien de la
paix impartiale. A cet égard, l’Assemblée:
3.1. déplore que la Russie et les autorités de facto refusent toujours d’autoriser
l’accès des observateurs de l’Union européenne en Abkhazie et en
Ossétie du Sud, et leur demande d’accorder à ces observateurs l’accès
immédiat et sans condition aux territoires qui sont de facto sous leur contrôle;
3.2. déplore la clôture de la Mission d’observation des Nations
Unies en Géorgie (MONUG) à la suite du veto opposé par la Russie
au Conseil de sécurité des Nations Unies;
3.3. regrette profondément que la proposition de la présidence
grecque de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en
Europe (OSCE) de maintenir une présence continue de l’OSCE, y compris son
opération de contrôle des forces armées, n’ait pas permis de parvenir
à un consensus, et invite la Russie à reconsidérer ses objections
à cette proposition.
4. L’Assemblée note les progrès modestes réalisés par le premier
groupe de travail, dans le cadre des pourparlers de Genève, sur
les modalités de la sécurité et de la stabilité en Abkhazie et en
Ossétie du Sud. Elle se félicite en particulier des réunions régulières
tenues entre les parties concernées à propos des mécanismes de prévention
et de règlement des incidents, mais regrette que des progrès similaires
n’aient pas été enregistrés par le second groupe de travail qui
s’est chargé des questions humanitaires et de la liberté de circulation.
5. L’Assemblée s’inquiète particulièrement du fait que la fermeture
des frontières administratives de l’Abkhazie et de l’Ossétie du
Sud, à la suite du transfert du contrôle de la frontière administrative
aux gardes-frontière russes du Service fédéral de sécurité (FSB),
conduise à un nouvel exode des Géorgiens de souche du district de
Gali en Abkhazie et de celui d’Akhalgori en Ossétie du Sud. L’Assemblée
est notamment préoccupée par les pressions accrues exercées sur
eux pour qu’ils acceptent de prendre un passeport abkhaze ou sud-ossète
et par l’absence totale à l’heure actuelle d’une présence internationale
dans ces régions. L’Assemblée invite de ce fait la Russie et les
autorités de facto d’Abkhazie
et d’Ossétie du Sud à lever toute entrave à la liberté de circulation
des citoyens géorgiens de part et d’autre des limites administratives.
6. L’Assemblée reste profondément préoccupée par les conséquences
humanitaires de cette guerre et par conséquent:
6.1. elle réaffirme ses prises de
position sur ce point formulées dans ses Résolutions 1648 (2009)
et 1664 (2009);
6.2. elle invite la Géorgie, la Russie et les régions séparatistes
d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud à mettre en œuvre pleinement et effectivement
les six principes du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil
de l’Europe visant à protéger d’urgence les droits de l’homme et
à assurer la sécurité humanitaire, et demande plus particulièrement
à la Russie et aux autorités de facto en
Abkhazie et en Ossétie du Sud d’assurer pleinement et inconditionnellement
le droit au retour des personnes déplacées à la suite des hostilités
d’août 2008, et de respecter pleinement leurs droits de propriété;
6.3. elle en appelle aux parties au conflit concernées pour
qu’elles s’abstiennent de prendre des mesures pouvant conduire à
une nouvelle vague de déplacements intérieurs, y compris de menaces
à la sécurité, de «passeportisation» forcée, d’interférence avec
l’enseignement dans la langue maternelle, de conscription et de
restrictions à la liberté de mouvement;
6.4. elle invite à tenir compte de l’expérience du Conseil
de l’Europe sur les plans humanitaire et des droits de l’homme dans
les discussions de Genève, en particulier dans le cadre des activités
du second groupe de travail chargé des questions humanitaires et
de la liberté de mouvement.
7. L’Assemblée regrette profondément que la Russie et les régions
séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud continuent de faire
peser des restrictions excessives sur l’accès des organisations
humanitaires et internationales à ces deux régions, y compris à
des fins d’aide humanitaire, et que la Géorgie mette également en
place des restrictions d’accès. De plus, la Russie et les régions
séparatistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud continuent d’imposer
des restrictions excessives injustifiées aux populations locales
qui souhaitent traverser la frontière administrative. A cet égard,
l’Assemblée:
7.1. demeure profondément
inquiète au sujet des conséquences humanitaires de «la loi sur les territoires
occupés de Géorgie» et de son application, bien qu’elle se félicite
de la bonne volonté affichée par les autorités géorgiennes de résoudre
les problèmes soulevés par la Commission européenne pour la démocratie
par le droit (Commission de Venise) dans son récent avis sur cette
loi, et prend note des amendements qui ont été déposés au sein du
Parlement géorgien et envoyés pour avis à la Commission de Venise;
7.2. prend note des efforts de la Russie pour fournir une aide
humanitaire à l’Abkhazie et à l’Ossétie du Sud, et appelle la Russie
et les autorités de facto d’Abkhazie
et d’Ossétie du Sud à lever immédiatement toutes les restrictions
d’accès, y compris en ce qui concerne les points d’entrée, imposées
aux organisations internationales et humanitaires, et à l’aide humanitaire
dans ces deux régions;
7.3. en appelle à toutes les parties pour qu’elles assurent
un approvisionnement ininterrompu de gaz, d’eau et d’autres ressources
humanitaires de base à travers les frontières administratives, en
particulier durant les prochains mois d’hiver.
8. L’Assemblée ne peut accepter l’apparente réticence de la Géorgie
et de la Russie à enquêter de façon crédible sur les graves allégations
de violations des droits de l’homme et du droit humanitaire commises
durant et après la guerre, par leurs propres forces, ou par des
milices ou des civils se trouvant sous leur contrôle ou leur juridiction
de fait. Elle note que l’enquête de l’Union européenne couvrira
également les allégations de violations des droits de l’homme et
du droit humanitaire, ainsi que les crimes de guerre présumés commis
par les deux parties durant le conflit. C’est pourquoi:
8.1. elle décide de revenir sur cette
question, y compris sur les éventuelles conséquences pour les deux
Etats membres concernés, à la lumière des conclusions de la mission
d’enquête de l’Union européenne;
8.2. elle encourage le procureur de la Cour pénale internationale
à demander de manière officielle à la Chambre préliminaire de la
cour l’ouverture d’une enquête sur les présumés crimes de guerre
et crimes contre l’humanité perpétrés par les deux parties durant
et après les hostilités d’août 2008.
9. L’Assemblée condamne la Russie et les autorités de facto d’Ossétie du Sud pour ne
pas avoir mis résolument un terme au nettoyage ethnique des Géorgiens
de souche qui, aux dires de tous, a eu lieu en Ossétie du Sud durant
et après la guerre, et pour ne pas avoir sérieusement enquêté sur
ce sujet ni traduit leurs auteurs en justice. Elle rappelle que,
au regard du droit international, la Russie porte la responsabilité
des violations des droits de l’homme et du droit humanitaire dans
ces régions, qui se trouvent sous son contrôle de facto.
10. L’Assemblée déplore le fait que, un an après les hostilités
d’août 2008, peu de progrès tangibles aient été enregistrés pour
faire face aux conséquences de cette guerre et que, dans plusieurs
régions, la situation ait même régressé. Alors que la Géorgie s’est
conformée, sinon à la totalité, du moins à la plupart des demandes
de l’Assemblée exprimées dans ses Résolutions 1633 (2008) et 1647
(2009), la Russie n’a pas satisfait à la grande majorité des principales
demandes formulées dans ces résolutions.
11. L’Assemblée a pleinement conscience de l’argument de la Russie
selon lequel son non-respect des demandes de l’Assemblée est directement
lié à sa position divergente quant au statut des deux régions. L’Assemblée
souligne que la plupart de ses demandes n’ont aucun rapport avec
le statut des deux régions et ne peut donc pas comprendre que la
Russie n’ait pas réussi à se conformer à ces demandes. Par conséquent, elle
estime que le non-respect de ses demandes souligne, de la part de
la Russie, un manque de volonté politique de faire face aux conséquences
de la guerre de la manière qui incombe à un Etat membre du Conseil de
l’Europe. En outre, l’Assemblée regrette profondément que les dirigeants
à la fois de la Douma d’Etat et du Conseil de la Fédération, ainsi
que les membres de la délégation russe auprès de l’Assemblée, se
soient publiquement opposés aux demandes de l’Assemblée, et aient
rejeté la possibilité, pour la Russie, de s’y conformer.
12. En conséquence, tout en soulignant la nécessité et l’importance
que la Fédération de Russie satisfasse intégralement à toutes ses
demandes formulées dans ses Résolutions 1633 (2008) et 1647 (2009), l’Assemblée
demande en particulier la pleine application de l’accord de cessez-le-feu
conclu sous les auspices de l’Union européenne, concernant notamment
le retrait des troupes sur les positions d’avant le conflit et la recherche
de nouvelles modalités internationales pour le maintien de la paix
et les forces de police. Elle exhorte instamment les autorités russes,
avant la fin de l’année:
12.1. à
accorder aux observateurs de l’Union européenne un accès sans restriction
à l’Abkhazie et à l’Ossétie du Sud conformément au paragraphe 22.2
de la Résolution 1633
(2008) et au paragraphe 9.8 de la Résolution 1647 (2009);
12.2. à octroyer aux civils géorgiens une liberté de circulation
leur permettant de franchir les limites administratives, et à lever
les restrictions – y compris aux points d’entrée – à l’accès des
deux régions pour les organisations internationales et humanitaires
ainsi que pour l’aide humanitaire;
12.3. à reconnaître officiellement et effectivement à toutes
les personnes déplacées, y compris celles déplacées au cours de
la guerre de 2008, le droit au retour, dans la sécurité et la dignité,
dans leur lieu de résidence d’origine en Abkhazie et en Ossétie
du Sud conformément aux paragraphes 9.9 et 9.11 de la Résolution 1647 (2009);
12.4. à ouvrir une enquête crédible sur les actes présumés de
nettoyage ethnique commis par les forces d’Ossétie du Sud alliées,
ou par des civils placés sous leur contrôle et leur juridiction
de fait, et à mettre en œuvre des mesures pour réparer ces actes
ou, si cela est impossible, à prévoir des compensations;
12.5. à soumettre pour avis à la Commission de Venise la loi
portant modification de la loi sur la défense de la Fédération de
Russie et à appliquer intégralement les recommandations que la commission
pourra formuler.
13. L’Assemblée invite sa commission de suivi à contrôler les
suites données par la Géorgie et la Russie aux demandes de l’Assemblée,
et à proposer toute nouvelle mesure à prendre par l’Assemblée si
la situation l’exige, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre
du paragraphe 12 de la présente résolution.