Imprimer
Autres documents liés
Résolution 1943 (2013) Version finale
La corruption: une menace à la prééminence du droit
1. L’Assemblée parlementaire reconnaît
que la corruption reste un problème majeur en Europe, qui menace
gravement la prééminence du droit.
2. La corruption compromet le bon fonctionnement des institutions
publiques et détourne l’action des pouvoirs publics de son but,
qui est de satisfaire l’intérêt général. Elle perturbe le processus
législatif, porte atteinte aux principes de légalité et de sécurité
juridique, introduit une part d’arbitraire dans le processus décisionnel
et a un effet dévastateur sur les droits de l'homme. La corruption
mine par ailleurs la confiance des citoyens dans les institutions.
3. Le Conseil de l'Europe, son Assemblée parlementaire et ses
Etats membres doivent rester le fer de lance de la lutte contre
la corruption.
4. L’Assemblée, rappelant notamment ses recommandations et résolutions
relatives à la lutte contre la corruption (Résolution 1214 (2000)), à la bonne
conduite en matière électorale, à celle des partis politiques (Résolution 1264 (2001) et Résolution 1546 (2007)),
au conflit d’intérêts (Résolution
1554 (2007)), à la situation des droits de l'homme et
de la démocratie en Europe (Résolution
1547 (2007) et Recommandation 1791 (2007))
et au lobbying dans une société démocratique (Code européen de bonne
conduite en matière de lobbying) (Recommandation 1908 (2010)), salue
les initiatives prises par le Conseil de l'Europe dans ce domaine.
Elle se félicite notamment de l’intensification de la mise en œuvre
de la Convention pénale sur la corruption (STE no 173),
de son protocole additionnel (STE no 191)
et de la Convention civile sur la corruption (STE no 174).
Elle appelle les Etats membres du Conseil de l'Europe qui n’ont
pas encore signé ou ratifié ces instruments juridiques à le faire
sans tarder.
5. L’Assemblée salue la décision du Secrétaire Général du Conseil
de l’Europe de faire de la lutte contre la corruption l’une des
activités prioritaires du Conseil de l’Europe pour 2014-2015, notamment
dans le cadre d’un effort plus large pour restaurer la confiance
de la population envers le bon fonctionnement des institutions démocratiques.
6. L’Assemblée se félicite également des travaux menés par le
Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) et le Comité d’experts
sur l’évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des
capitaux et le financement du terrorisme (MONEYVAL), et invite instamment
les Etats membres du Conseil de l'Europe à mettre en œuvre leurs
recommandations et à encourager les Etats non membres et les autres
institutions pertinentes à le faire. L'Assemblée invite en outre
les parlements à contribuer à la mise en œuvre de ces recommandations
en mettant en place des procédures spécifiques de contrôle parlementaire,
en insistant particulièrement sur la mise en œuvre des recommandations
issues du 4e Cycle d’évaluation du GRECO, centré
sur la prévention de la corruption concernant les parlementaires,
les juges et les procureurs. Dans le cadre des efforts pour renforcer
la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit
au bénéfice de tous, l’Assemblée salue l’intention du GRECO d’examiner
la dimension de genre de la corruption et d’intégrer l’égalité des
sexes dans ses activités de suivi anticorruption.
7. L’Assemblée invite tous les Etats membres du Conseil de l’Europe
à intensifier la coopération internationale en matière de lutte
contre la corruption, notamment:
7.1. en
coopérant plus efficacement pour suivre les circuits empruntés par
les capitaux qui font l’objet de virements électroniques, en vue
de s’aider mutuellement à récupérer les fonds générés par les actes de
corruption;
7.2. en prenant des mesures énergiques contre les banques,
qui continuent à être complices des actes de corruption en aidant
leurs auteurs à dissimuler et à blanchir leurs profits illicites;
7.3. en prenant des mesures énergiques contre l’accumulation
des gains illicites.
8. L’Assemblée invite également tous les Etats membres à revoir
leur législation relative à la lutte contre la corruption, en tenant
compte des principes directeurs suivants:
8.1. tous les actes de corruption active et passive doivent
être incriminés. Les infractions liées à la corruption doivent être
clairement définies et distinguées des autres infractions, telles
que l’abus de pouvoir ou l’abus d’autorité ;
8.2. la législation doit garantir l’indépendance du pouvoir
judiciaire par des procédures de recrutement et de promotion transparentes
et, si besoin est, l’utilisation de mesures disciplinaires adéquates,
appliquées par des instances qui échappent à toute ingérence politique
et autre influence indue ;
8.3. la législation doit garantir le maximum de transparence
dans la vie politique, administrative et économique:
8.3.1. en
instaurant la publication d’informations sur l’identité des propriétaires
et dirigeants de personnes morales ou de structures similaires et
sur les transferts de fonds à l’étranger, notamment vers des paradis
fiscaux notoires;
8.3.2. en renforçant le droit à l’information des actionnaires
minoritaires de sociétés privées et l’obligation démocratique de
rendre des comptes pour la gestion des entreprises publiques;
8.3.3. en adoptant des mesures de répression énergiques contre
le délit d’initié et les autres formes d’utilisation abusive des
informations confidentielles obtenues par les responsables politiques,
les fonctionnaires et les membres des instances de contrôle;
8.3.4. en adoptant et en généralisant la mise en œuvre de dispositions
rigoureuses relatives à la déclaration de patrimoine, de revenus
et d’intérêts financiers ou autres par les membres du gouvernement
et du parlement, par les dirigeants de partis politiques et de mouvements politiques
et par les fonctionnaires, les juges et les procureurs, ainsi qu’à
la création d’instances de contrôle indépendantes et à la réglementation
des activités de lobbying;
8.3.5. en facilitant la confiscation des actifs des personnes
physiques ou morales ou de structures similaires incapables de démontrer,
sur la base d’éléments solides du point de vue légal, qu’ils ont
été obtenus légalement.
9. L’Assemblée souligne que l’amélioration indispensable de la
législation doit s’accompagner d’une évolution du comportement culturel
général à l’égard de la corruption, qui doit être clairement reconnue
comme une pratique intolérable et une grave menace pour la prééminence
du droit. Elle affirme sa volonté de continuer à détecter les nouvelles
tendances en matière de transparence et de risques de corruption
au sein des parlements, en partenariat avec les organisations non
gouvernementales (ONG) et la société civile, et d’offrir aux parlements
nationaux des garanties appropriées.
10. L’Assemblée, rappelant sa Résolution 1214, demande une fois
encore à sa commission pour le respect des obligations et engagements
des Etats membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi) d’évaluer les
progrès réalisés dans la lutte contre la corruption, en tenant compte
des conséquences négatives de la corruption sur le respect des normes
du Conseil de l'Europe par ses Etats membres.
11. Elle reconnaît le rôle important joué par les médias et les
ONG, qui contribuent à faire évoluer l’attitude générale à l’égard
de la corruption et qui décèlent et dénoncent ce phénomène.
12. Afin de donner le bon exemple, l’Assemblée décide d’accorder
une attention particulière à la mise en œuvre effective de son propre
code de conduite.
13. L’Assemblée décide de renforcer la dimension interparlementaire
de la lutte contre la corruption et de promouvoir une plate-forme
de coopération ayant pour objectifs:
13.1. de promouvoir la ratification et la mise en œuvre des
conventions et des recommandations du Conseil de l'Europe en matière
de lutte contre la corruption, en particulier les recommandations
du GRECO, auprès des parlements nationaux;
13.2. de faire le point sur les initiatives nationales anticorruption,
de partager les bonnes pratiques et de réfléchir ensemble à de nouvelles
approches et méthodes de travail visant à réprimer efficacement la
corruption;
13.3. d’obtenir des informations sur les activités en cours
au sein des organismes anticorruption du Conseil de l’Europe et
sur les initiatives des autres acteurs internationaux clés dans
la lutte contre la corruption, ainsi que des statistiques et données
corrélées provenant d’ONG et de la société civile concernant un
pays donné ou les tendances de la corruption dans des domaines spécifiques.