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Recommandation 2028 (2013) Version finale

Contrôler les retours par voie terrestre, maritime ou aérienne des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile déboutés

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 22 novembre 2013 (voir Doc. 13351, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteure: Mme Virolainen).

1. L’éloignement des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile déboutés fait partie intégrante de la politique de gestion des migrations et du contrôle aux frontières. Selon l’analyse annuelle des risques 2013 de l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l’Union européenne (Frontex), on compte environ 300 000 ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier en Europe qui ont reçu l’ordre de partir, soit une augmentation de 17 % par rapport à l’année précédente.
2. Face à cet état de fait et à l’insuffisance des dispositions concernant les éloignements forcés et plus particulièrement la procédure de contrôle en tant que telle, l’Assemblée parlementaire estime qu’il devient urgent de renforcer la dimension des droits de l’homme lors du renvoi des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile déboutés.
3. L’Assemblée constate que les retours forcés sont essentiellement gérés par les normes des droits de l’homme découlant de la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5), de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE n° 126), et de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et son Protocole facultatif (OPCAT), ainsi que des Vingt principes directeurs sur le retour forcé adoptés par le Comité des Ministres en mai 2005.
4. L’Assemblée rappelle également la Directive de l’Union européenne (2008/115/CE) relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, qui est entrée en vigueur en 2010 et qui stipule, entre autres, qu’il «est nécessaire de fixer des règles claires, transparentes et équitables afin de définir une politique de retour efficace, constituant un élément indispensable d’une politique migratoire bien gérée».
5. L’Assemblée constate que, malgré le nombre de conventions et de textes juridiques applicables, les Etats membres ne sont pas encore arrivés à élaborer des règles communes portant notamment sur la protection des personnes à éloigner par voie terrestre, maritime ou aérienne, et sur le contrôle des procédures concernées.
6. L’Assemblée est préoccupée par le fait que les personnes en attente d’éloignement sont particulièrement vulnérables et ne sont pas toujours bien informées – notamment dans une langue qu’elles comprennent – de leurs droits, de la procédure judiciaire et du système décisionnel du pays où elles sont retenues. Il faut souligner que la phase de transit constitue l’étape la plus critique de la procédure d’éloignement. C’est en effet souvent pendant cette phase qu’apparaissent les plus gros risques de mauvais traitements, en raison du recours à des mesures coercitives ou de contrainte, qui ont, dans certains cas, entraîné la mort.
7. En conséquence, l’Assemblée recommande au Comité des Ministres de charger un comité d’experts compétent:
7.1. d’élaborer des règles communes de protection des droits de l’homme qui s’imposeraient à tous les Etats pendant la procédure d’éloignement par terre, mer et air, et qui couvriraient plus particulièrement:
7.1.1. les procédures à suivre pour préparer les personnes à éloigner, et les informations à leur communiquer, y compris la fixation d’une date limite pour informer ces personnes en attente de leur renvoi;
7.1.2. la normalisation des niveaux de risque inhérents à la procédure de renvoi;
7.1.3. l’utilisation de techniques de contrainte et de mesures coercitives;
7.1.4. le contenu des programmes de formation pour les différents intervenants;
7.1.5. les expertises médicales et le rôle du personnel médical d’accompagnement dans ces retours;
7.1.6. les procédures de contrôle indépendantes, neutres, transparentes et effectives, comprenant un mandat clairement défini portant sur toute la procédure d’éloignement, du début à la fin;
7.1.7. les procédures à suivre à l’issue d’une mission d’éloignement menée à bien et également en cas d’échec d’une mission, avec notamment un compte-rendu obligatoire;
7.2. de définir un système de formation professionnelle obligatoire pour le personnel d’escorte et les personnes chargées du contrôle indépendant;
7.3. de proposer des normes de protection minimales pour les personnes renvoyées dès leur arrivée dans le pays de destination et les mesures nécessaires pour déterminer ce qu’il advient des migrants qui disparaissent à leur arrivée;
7.4. d’élaborer des lignes directrices spécifiques pour l’éloignement des enfants et des groupes vulnérables, en particulier les femmes enceintes et les personnes atteintes de maladies graves.
8. L’Assemblée invite les Etats membres du Conseil de l’Europe:
8.1. à respecter les normes internationales relatives aux retours forcés, y compris un droit de recours;
8.2. à mettre en œuvre, au niveau national, un système de contrôle efficace et coordonné des retours forcés, que ce soit par air, mer ou terre, et à coopérer pleinement avec les mécanismes internationaux de suivi;
8.3. à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller, lorsqu’ils coopèrent avec Frontex, à tenir pleinement compte des aspects relatifs aux droits de l’homme et à ce que des systèmes de contrôle efficaces soient mis en place. Cela est particulièrement important dans le cadre des vols charters de retour simple ou conjoint qui impliquent plus d’un Etat membre.