1. Introduction
1. La proposition de recommandation intitulée «Nécessité
de renforcer l’indépendance de la Cour européenne des droits de
l’homme» (
Doc. 12940) a été renvoyée par l’Assemblée parlementaire à la commission
des questions juridiques et des droits de l’homme, pour rapport,
le 30 novembre 2012. A sa réunion du 11 décembre 2012, la commission
m’a désigné rapporteur.
2. Afin que la commission soit mieux informée de la situation
présente et pour examiner comment l’indépendance de la Cour pourrait
être renforcée au mieux, j’ai demandé à deux experts, avec l’accord
de la commission, de prendre part à un échange de vues avec la commission
lors de sa réunion du 6 novembre 2013 à Paris. Il s’agit de M. Stefan
Trechsel, ancien président de la Commission européenne des droits
de l’homme et juge
ad litem au
Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), et de Mme Françoise
Tulkens, ancienne vice-présidente de la Cour européenne des droits
de l’homme et actuellement membre du groupe consultatif des Nations
Unies sur les droits de l’homme au Kosovo

.
Le greffier de la Cour, M. Erik Fribergh, a également pris part
à cette audition. Ma note introductive, intitulée «Nécessité de
renforcer l’indépendance de la Cour européenne des droits de l’homme»,
qui a été transmise aux experts avant l’audition, a servi de document
de travail

.
3. Par ailleurs, une réunion avec le Président de la Cour et
des membres du Comité sur le Statut de la Cour a eu lieu pendant
la partie de session de l’Assemblée de janvier 2014 pendant laquelle
nous avons procédé à un libre échange de vues sur un certain nombre
de sujets d’actualité abordés dans le rapport.
4. Le 7 avril 2014, à ma demande, la commission a accepté de
modifier comme suit le titre du présent rapport: «Renforcement de
l’indépendance de la Cour européenne des droits de l’homme».
2. La notion
d’indépendance et d’impartialité
5. L’autorité et la crédibilité de toute institution
judiciaire sont conditionnées par l’indépendance et l’impartialité
des juges qui la composent. Cette exigence est inscrite à l’article 6
de la Convention européenne des droits de l’homme (STE n° 5, «la
Convention»), aux termes duquel «[t]oute personne a droit à ce que
sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai
raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par
la loi». Les juridictions internationales ne font pas exception
à cette règle; leur indépendance doit être garantie afin de leur
permettre de s’acquitter effectivement de leur mission. Un observateur
a noté que «les juridictions indépendantes jouent le rôle de garant
de la crédibilité des engagements internationaux dans certains contextes
multilatéraux»

. Plus largement, les juridictions internationales
compétentes en matière de droits de l’homme servent les intérêts
des Etats à long terme en renforçant et en développant «une société
démocratique vigoureuse et dynamique»

.
«On est en dehors de la souveraineté nationale, de la séparation
et de l’équilibre des pouvoirs, d’un ordonnancement juridique hiérarchisé
ayant au sommet une constitution»

,
l’autorité des juridictions internationales et le caractère impératif
de leurs décisions pour les parties découlent avant tout du fait
qu’elles sont perçues comme indépendantes.
6. La Cour européenne des droits de l’homme («la Cour») a évalué
l’indépendance des juridictions nationales et établi un ensemble
de critères d’indépendance, qui peuvent aussi bien s’appliquer à
elle-même. Ainsi, dans l’affaire
Langborger
c. Suède, la Cour a affirmé que
«[p]our établir si un organe peut passer pour “indépendant”,
il échet de prendre en compte, notamment, le mode de désignation
et la durée du mandat de ses membres, l’existence d’une protection
contre les pressions extérieures et le point de savoir s’il y a
ou non apparence d’indépendance.
»
7. Au fil des ans, l’indépendance et l’impartialité des juges
et des agents du greffe de la Cour ont parfois été mises en cause

. Par souci de clarté et pour
éviter tout malentendu, il convient de ne pas laisser ces critiques
sans réponse. Dans le présent rapport, je me propose de passer en
revue les questions qu’il importe, à mon sens, de prendre en considération
dans ce contexte afin de déterminer comment l’indépendance de la Cour
pourrait être encore consolidée – si cela s’avère nécessaire.
3. La Cour et ses
juges: vue d’ensemble
3.1. La Cour
8. La Cour se compose de 47 juges et d’un greffe de
plus de 640 agents, dont quelque 270 juristes (voir organigramme
sur le site web de la Cour

). Ainsi que l’indique l’article 20
de la Convention, «[l]a Cour se compose d’un nombre de juges égal
à celui des Hautes Parties contractantes». Conformément à la Convention,
les juges statuent sur les affaires dans les formations suivantes:
juge unique, comités de trois juges, chambres de sept juges et la
Grande Chambre de 17 juges. Tous les arrêts prononcés sur le fond
sont rendus par une formation collégiale. Les opinions dissidentes
et/ou concordantes sont autorisées par l’article 45.2 de la Convention.
La Cour adopte certaines décisions en plénière, concernant en général
sa propre administration. Elle peut aussi, dans des cas déterminés,
formuler des avis consultatifs à la demande du Comité des Ministres.
Pour des raisons pratiques, la Cour est divisée en cinq sections,
composées chacune d’un président, d’un vice-président et de sept
à huit autres juges

. Les juges sont affectés à une section
pour trois ans. Chaque section dispose de plusieurs formations de
chambre composées de juges de la section, qui peuvent connaître
des requêtes individuelles. Un président de section, élu par l’Assemblée
plénière de la Cour, préside les réunions de la section (et de la
chambre) dont il est membre, sauf dans des circonstances particulières
telles qu’une incapacité d’exercice ou un conflit d’intérêts

. La Cour est également dotée d’un Bureau
composé du président de la Cour, de ses vice-présidents et des présidents
de section, qui assistent le président dans la gestion de la Cour

.
3.2. Conditions d’exercice
des fonctions
9. Les conditions d’exercice des fonctions de juge sont
définies par l’article 21 de la Convention

(l’Assemblée parlementaire a également
établi des critères supplémentaires, principalement en 2004

), l’élection
des juges étant du ressort de l’Assemblée, conformément à l’article 22
de la Convention. Après leur élection, tous les juges sont tenus
de respecter la Résolution sur l’éthique judiciaire, adoptée par
la Cour en 2008
![(16)
<a href='http://www.echr.coe.int/Documents/Resolution_Judicial_Ethics_FRA.pdf'>www.echr.coe.int/Documents/Resolution_Judicial_Ethics_FRA.pdf</a>. La résolution dispose notamment que «[l]es juges exercent
leurs fonctions judiciaires indépendamment de toute autorité et
de toute influence extérieures» (article I). Voir aussi Règlement
de la Cour, article 3, «Serment ou déclaration solennelle», et article 28,
«Empêchement, déport ou dispense». La révocation des juges est régie
par l’article 23.4 de la Convention.](/nw/images/icon_footnoteCall.png)
. La qualité
d’un juge dépend de la qualité des candidats désignés par les Etats
(d’où la nécessité de mettre en place des procédures de sélection
équitables, rigoureuses et ouvertes au niveau national), question qui
a fait l’objet de plusieurs textes importants adoptés par l’Assemblée
et, plus récemment, le Comité des Ministres (voir en particulier
la
Recommandation 1649
(2004) sur les candidats à la Cour européenne des Droits de
l'Homme et la
Résolution 1646 (2009) sur la nomination des candidats et l’élection des juges
à la Cour européenne des droits de l’homme de l’Assemblée et les
Lignes directrices de 2012 du Comité des Ministres

).
3.3. Processus d’élection
10. Le processus d’élection des juges comporte plusieurs
étapes

. Dans un premier temps, l’Etat Partie
qui a été informé de la nécessité de présenter trois candidats à
la fonction de juge applique ses procédures nationales (conformément
aux lignes directrices pertinentes) pour sélectionner ses candidats.
Les curriculum vitae des candidats sont examinés par un panel consultatif
d’experts qui indique à l’Etat Partie, avant que celui-ci transmette
sa liste à l’Assemblée, si tous les candidats satisfont aux critères
prévus par l’article 21

. Conformément à l’article 22 de
la Convention, l’Etat Partie présente alors officiellement à l’Assemblée,
par l’intermédiaire de son Secrétaire Général, la liste de candidats
sélectionnés. La sous-commission de l’Assemblée sur l’élection des
juges à la Cour européenne des droits de l’homme, qui est chargée
d’examiner les listes, analyse les curriculum vitae des candidats
et procède à des entrevues avec ces derniers, en tenant compte de
leurs qualifications personnelles et de la nécessité d’assurer une
composition harmonieuse de la Cour sous l’angle des antécédents
professionnels et de l’équilibre entre les femmes et les hommes.
La sous-commission passe en revue la liste de candidats proposée
et recommande, en principe, certains d’entre eux à l’Assemblée.
Si la sous-commission propose de rejeter la liste parce que le choix
de candidats qualifiés proposé à l’Assemblée est insuffisant ou
que la liste ne comprend pas de candidats des deux sexes, et que l’Assemblée
approuve cette proposition, l’Etat Partie est invité à soumettre
une nouvelle liste de candidats

. Enfin, l’Assemblée
plénière élit un juge parmi les candidats figurant sur la liste.
Un certain nombre de résolutions et de recommandations de l’Assemblée
traitent de l’élection des juges

, ce qui a eu pour effet de rendre
progressivement ce processus plus transparent et plus efficace.
C’est la raison pour laquelle je ne proposerai pas dans le présent
rapport de modifier la procédure électorale; je me concentrerai
plutôt sur d’autres aspects du renforcement de l’indépendance de
la Cour.
3.4. Juges ad hoc
11. Si le juge élu se trouve empêché de siéger dans une
chambre, se déporte ou est dispensé, ou si pareil juge fait défaut,
un juge ad hoc peut être désigné

.
Tel est par exemple le cas lorsqu’un conflit d’intérêts empêche
le juge de statuer dans une affaire dont la Cour est saisie (par
exemple s’il a précédemment jugé l’affaire en qualité de juge national).
La démission ou le départ en retraite d’un juge peut également imposer de
nommer un juge ad hoc.
12. La procédure de désignation d’un juge ad hoc qui était en
vigueur avant l’adoption du Protocole n° 14 laissait à l’Etat Partie
une très grande marge d’appréciation dans le choix des juges ad
hoc pour une affaire donnée après l’ouverture de la procédure. Depuis
l’entrée en vigueur du Protocole n° 14 à la Convention européenne
des droits de l’homme (STCE n° 194), le nouvel article 26.4 de la
Convention prévoit le remplacement d’un juge par une personne –
le juge ad hoc – «choisie par le président de la Cour sur une liste soumise
au préalable par cette Partie». Cette liste contient les noms de
trois à cinq personnes remplissant les conditions exigées pour exercer
la fonction de juge ad hoc pour une période renouvelable de deux
ans

. Elle doit
être composée de personnes des deux sexes et être accompagnée des
notices biographiques

. L’article 29
modifié du Règlement de la Cour, qui est entré en vigueur le 1er juillet 2013,
a introduit des changements supplémentaires: si le président de
la Cour estime que moins de trois des personnes indiquées dans la
liste répondent aux conditions requises ou si aucune liste n’a été
soumise au moment de la communication de la requête, il est désormais
prévu que le président désigne un autre juge élu pour siéger en qualité
de juge ad hoc.
13. La commission des questions juridiques et des droits de l’homme
a réalisé en 2011 une étude approfondie du rôle et des modes de
désignation des juges ad hoc à la Cour et dans d’autres juridictions internationales.
On pourra se reporter à ce rapport

pour trouver des informations plus
détaillées sur les problèmes soulevés par le recours à des juges
ad hoc, concernant en particulier leur légitimité et leur indépendance,
ainsi que sur les solutions envisageables.
4. Indépendance des
juges de la Cour
4.1. Mandat
14. En vertu de l’article 23 de la Convention, les juges
sont élus pour un mandat de neuf ans non renouvelable, l’âge obligatoire
de départ à la retraite étant fixé à 70 ans. Cette disposition a
été introduite par le Protocole n° 14, qui est entré en vigueur
le 1er juin 2010. Auparavant, avec l’entrée
en vigueur du Protocole n° 11, les juges avaient été élus pour un
mandat de six ans renouvelable. Cette pratique avait suscité les critiques
de certains observateurs, qui craignaient que les juges ne soient
tentés de trancher les affaires dans un sens qui ne risque pas de
compromettre leurs perspectives de réélection.
15. Le Protocole n° 15 à la Convention

, lorsqu’il entrera en vigueur, remplacera
la limite d’âge de 70 ans par un nouveau critère, à savoir l’obligation
pour les candidats à la fonction de juge d’être âgés de moins de 65 ans
à la date où ils sont recommandés à l’Assemblée, ce qui portera
de facto la limite d’âge à 74 ans.
Ce changement permet d’élire des juges plus expérimentés ainsi que
des juges qui sont plus proches de la retraite dans leur pays et
par conséquent – suppose-t-on – moins susceptibles de ressentir
le besoin, pendant leur mandat à la Cour, de préparer le terrain
pour leur carrière future à l’issue de celui-ci. Inutile de préciser
que l’élection de juges plus âgés ne saurait être considérée en
soi comme une garantie de leur indépendance.
4.2. Privilèges et immunités
16. Les juges jouissent d’un degré élevé d’immunité juridique,
ce qui renforce leur indépendance. Aux termes de l’article 51 de
la Convention, «[l]es juges jouissent, pendant l’exercice de leurs
fonctions, des privilèges et immunités prévus à l’article 40 du
Statut du Conseil de l’Europe [de 1949] et dans les accords conclus
au titre de cet article». Les dispositions visées à l’article 40
du Statut figurent dans le Sixième Protocole additionnel à l’Accord
général sur les privilèges et immunités du Conseil de l’Europe (1996)

, qui est applicable tant aux juges
permanents qu’aux juges ad hoc. Voir aussi, à cet égard, la Résolution CM/Res(2009)5
du Comité des Ministres sur le statut et les conditions de service
des juges de la Cour européenne des droits de l’homme et du Commissaire
aux droits de l’homme

.
17. Les juges, leur conjoint et leurs enfants mineurs jouissent
des «privilèges, immunités, exemptions et facilités accordés, conformément
au droit international, aux envoyés diplomatiques»

, comme le prévoient également les
articles 29 à 36 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques

. Ils sont identiques aux privilèges
et immunités dont jouit le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.
Vu le rôle crucial joué par les juges et la nécessité de garantir
leur indépendance, il est apparu indispensable de leur accorder
des privilèges et immunités plus étendus qu’aux agents ordinaires
de l’Organisation, d’où la nécessité d’adopter ce Protocole

. Pendant et après leur mandat,
les juges jouissent de l’immunité en ce qui concerne les paroles prononcées
ou les actes accomplis dans l’exercice de leur fonction de juge.
De plus, le seul organe compétent pour lever cette immunité est
l’Assemblée plénière de la Cour, qui a le devoir de prendre cette
mesure lorsque l’immunité empêcherait que justice soit faite et
que l’immunité peut être levée sans nuire au but pour lequel elle est
accordée

.
18. Parmi les privilèges et immunités dont jouissent les juges
figurent l’immunité de juridiction (pénale, civile et administrative)
pour leurs propos, leurs écrits ou les actes commis dans l’exercice
de leurs fonctions

; l’exonération de tout impôt sur
les traitements et émoluments versés par le Conseil de l’Europe;
des privilèges concernant les facilités de change et de rapatriement
équivalents à ceux des diplomates; le droit d’importer et de réexporter
en franchise leur mobilier et leurs effets; l’immunité vis-à-vis
des dispositions limitant l’immigration

. Il semble que cette dernière disposition
devrait viser à éviter des difficultés d’immigration aux membres
de la famille des juges venant de pays non membres de l’espace Schengen
qui viennent vivre à Strasbourg.
19. Les privilèges et immunités conférés aux juges et à leur famille
ne sont pas illimités. Ils sont par nature liés à leur fonction.
Ils comportent, dans certains cas, des éléments de l’immunité de
«représentation» dont jouissent les diplomates: plusieurs Etats
fournissent par exemple aux juges des passeports diplomatiques.
Un parallèle peut être établi avec la fonction de représentation
des juges d’autres juridictions internationales et des diplomates,
par exemple la Cour internationale de justice

. Cela dit, il est clair que les
juges ne «représentent» pas les Parties contractantes comme le font
les diplomates. Il convient par ailleurs de souligner que les juges de
la Cour jouissent, contrairement aux diplomates, d’une immunité
à l’égard de l’ensemble des Etats, y compris celui dont ils ont
la nationalité.
20. Il a été proposé d’étendre l’immunité de juridiction des juges
en accordant une immunité et un passeport diplomatiques à vie aux
anciens juges et à leur famille, même pendant leur retraite

.
Bien que certains experts aient jugé ces propositions excessives,
leur justification est selon moi parfaitement rationnelle. Compte
tenu de la brièveté de leur mandat, les juges et leur famille peuvent
faire l’objet de pressions, voire de persécutions, dans leur vie
professionnelle et privée, une fois ce mandat achevé. Certains exemples
récents prouvent malheureusement que ces préoccupations ne sont
pas purement théoriques.
21. Le fait d’octroyer ou non aux juges de la Cour un passeport
diplomatique est un aspect essentiel de la mise en œuvre concrète
de leurs privilèges et immunités. Comme il n’existe à l’heure actuelle
aucun véritable «passeport du Conseil de l’Europe» uniformisé, cette
question relève de la compétence officielle des Parties contractantes.
Il s’agit d’un point assez complexe, car la législation et la pratique
relatives à l’octroi d’un passeport diplomatique varient considérablement
d’un Etat membre à l’autre. Certaines Parties contractantes prévoient
expressément dans leur réglementation que les juges de la Cour puissent
obtenir un passeport diplomatique, tandis que d’autres recourent
à des solutions ad hoc ou n’octroient aucun passeport diplomatique
aux juges. Je juge la pratique actuelle regrettable, car elle crée
une relative inégalité entre les juges et leur confère des degrés
différents de protection en fonction du droit interne qui leur est
applicable. Bien que cette question soit relativement technique,
elle s’avère essentielle pour garantir l’indépendance concrète des
juges et les considérations de subsidiarité sont ici difficilement
applicables. L’absence de cette procédure ne saurait servir d’excuse;
elle démontre plutôt la mise en œuvre impropre du Sixième Protocole.
Il serait donc souhaitable de mettre en place une pratique uniforme
dans l’ensemble des Parties contractantes, en vue d’octroyer à tous
les juges et à leur famille un passeport diplomatique national.
4.3. Sécurité sociale
et droits à pension
22. La possibilité pour les juges de bénéficier de la
sécurité sociale, y compris pour les dépenses médicales, ainsi que
d’un régime de pensions apparaît également comme un facteur d’indépendance,
puisqu’elle les affranchit de la nécessité de prendre eux-mêmes
des dispositions à cet effet.
23. Encore assez récemment, la Cour était la seule grande juridiction
internationale à ne pas être dotée d’un régime de pensions

. Le Comité des Ministres
a toutefois mis fin à cette situation par sa Résolution CM/Res(2009)5,
qui ouvre aux juges un régime de pensions équivalent à celui dont
bénéficient les agents du Conseil de l’Europe

. Ce système a
donné lieu à un certain nombre de critiques, car «la manière dont
les juges de la Cour européenne des droits de l’homme exercent leurs
fonctions, et notamment le fait qu’ils puissent être élus uniquement
pour un mandat de neuf ans, rend contestable l’idée d’une exacte
équivalence entre la situation des juges et celle des autres agents
du Conseil de l’Europe»

. La participation
à ce régime est aujourd’hui obligatoire; pour tous les juges élus
depuis l’entrée en vigueur du régime. Le montant de la pension correspond
à 1,75 % du traitement par année de service

. Cela étant, il semble
que la Cour soit la seule juridiction internationale dotée d’un
régime de pensions «contributif».
24. Outre leur traitement et leurs droits à pension, les juges
de la Cour bénéficient d’autres avantages: le congé de maladie et
le même congé de maternité, congé de paternité et congé d'adoption
que tout autre agent du Conseil de l’Europe, ainsi qu’une couverture
médicale et sociale

.
Mais ils ne bénéficient pas de certains avantages prévus pour les
agents, comme les allocations familiales ou le congé dans les foyers

.
25. Le niveau et le régime de protection sociale des juges varient
en fait en fonction de l’époque de leur entrée en fonction. Bien
que cette distinction soit provisoire par nature et soit appelée
à disparaître par suite du remplacement progressif des juges, la
situation actuelle est quelque peu préoccupante. En outre, l’absence de
choix laissé aux juges peut difficilement être considérée comme
une solution optimale, compte tenu de la différence considérable
de leur situation avant, et sans doute après, leur fonction à la
Cour. Le régime obligatoire pourrait ne pas être considéré par tous
les juges comme le plus adapté à leur situation. Une plus grande
souplesse dans le choix du régime de pension, ainsi que la possibilité
de quitter le régime obligatoire actuel, semblent plus adaptées
à une fonction aussi particulière et aussi cruciale que celle de
juge à la Cour européenne des droits de l’homme. Je considère qu’une
adaptation supplémentaire des régimes de sécurité sociale, en consultation
avec les juges eux-mêmes, contribuerait au renforcement de l’indépendance
des juges.
4.4. Statut après la
cessation de fonctions
26. Après la cessation de leurs fonctions à la Cour,
de nombreux juges peuvent rechercher un emploi au plan national
ou international, compte tenu de la vaste expérience qu’ils ont
acquise à la Cour ainsi que, bien souvent, avant leur élection.
27. Les anciens juges de la Cour peuvent être tributaires des
autorités de leur pays d’origine pour obtenir un poste après avoir
quitté la Cour. Selon une étude réalisée en 2006, quatre des 25 juges
de la Cour de justice de l’Union européenne avaient précédemment
exercé à la Cour européenne des droits de l’homme, tandis que deux
anciens juges et un ancien juge ad hoc avaient été présentés comme
candidats à la Cour pénale internationale

. De plus, il est intéressant
d’observer les carrières suivies et les postes occupés par un échantillon
d’anciens juges. Sur un échantillon de 30 juges ayant récemment
cessé d’exercer à la Cour (tous issus de pays différents) pour lesquels
il a été possible de recueillir des informations, plusieurs schémas
ont été mis en évidence: trois juges ont été nommés à des postes
dans des organisations internationales telles que les Nations Unies
ou dans les institutions de l’Union européenne; six ont été nommés
ou élus dans d’autres cours ou tribunaux internationaux; dix ont
été nommés ou élus juge dans une juridiction nationale ou nommés
médiateur; au moins quatre ont assuré des fonctions universitaires
pendant un certain temps; huit ont intégré leur administration nationale,
par exemple en qualité de conseiller; certains sont même devenus
des parlementaires et des ministres. Cela dit, plusieurs anciens
juges de la Cour ont eu du mal à trouver un emploi

.
Dans certains cas extrêmes, les difficultés rencontrées pourraient
être dues à la position «trop peu patriotique» adoptée par les juges
dans des affaires importantes engagées contre leur propre Etat.
En clair, une «position de principe excessive» adoptée par un juge
risque d’amener les autorités nationales à exercer des «représailles»
sur l’intéressé après la cessation de ses fonctions. Le risque qu’un
traitement similaire soit réservé à un juge en fonction peut compromettre
son indépendance.
28. Si une réforme est jugée nécessaire, plusieurs options sont
envisageables. Tout d’abord, il a été proposé que les juges cessant
leurs fonctions qui n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite
fixé par le droit national soient assurés de retrouver un poste
«d’un niveau similaire» dans l’Etat Partie

.
Ainsi, la loi britannique relative aux droits de l’homme (1998,
article 18.2) contient une disposition selon laquelle le titulaire d’une
fonction judiciaire peut accepter un poste de juge à la Cour européenne
des droits de l’homme sans avoir à renoncer définitivement à sa
fonction au Royaume-Uni

. Toutefois,
cette disposition ne prévoit pas que le juge retrouve automatiquement
son poste après avoir quitté la Cour – l’article 68.5 de la loi
sur l’accès à la justice de 1999 laisse en pareil cas au ministre
compétent le soin de prendre d’éventuelles dispositions transitoires

. Ce type de disposition me paraît
cependant représenter une bonne pratique, qui mérite d’être diffusée
et peut servir de modèle aux autres Parties contractantes, tout
au moins pour les juges qui exerçaient déjà des fonctions de juge
avant leur élection à la Cour.
29. Même si, dans bien des cas, il serait vraisemblablement difficile
de garantir un poste équivalent à celui de juge à la Cour (notamment
en raison de la pratique de la nomination à vie des titulaires de
fonctions judiciaires dans certains pays), une solution pourrait
consister à suspendre le poste du juge lors de sa prise de fonctions
à Strasbourg, de façon à ce qu’il puisse le retrouver à l’issue
de son mandat (comme cela est apparemment possible en Allemagne,
en Andorre, en Belgique, en Espagne, en Croatie, au Danemark, en Estonie,
en Finlande, en Grèce, en Italie, à Monaco et en Serbie, ainsi que,
dans la pratique, en Autriche, en Slovénie et en République tchèque,
bien que la législation de ces pays ne comporte pas de dispositions
claires à ce propos). Cette formule pourrait être viable dans le
cas de juges qui ont déjà exercé dans le système judiciaire national
et, dans certains cas, en qualité d’universitaires, mais s’avérerait
plus difficile à appliquer dans d’autres situations, par exemple
dans le cas de juges qui exerçaient précédemment des activités d’avocats.
Il serait également envisageable d’accorder aux juges, après la
cessation de leurs fonctions, le bénéfice des augmentations de traitement
et des promotions qu’ils auraient acquises. Les organisations concernées
ou les Etats eux-mêmes pourraient être encouragés à mettre en place
de tels dispositifs, tout au moins pour les juges, les procureurs
et les fonctionnaires, sans omettre de réfléchir aux solutions qui
pourraient être apportées à la situation des juges qui occupaient
d’autres fonctions avant leur élection à la Cour.
30. Il a également été proposé de comptabiliser le mandat d’un
juge à la Cour dans ses annuités nationales

, aussi bien générales
que professionnelles (par exemple judiciaires ou diplomatiques,
si la réglementation nationale le prévoit). Cette mesure est particulièrement
pertinente pour les Etats où, au regard du droit interne du travail,
un juge élu est considéré comme sans emploi

; elle permettrait
aux anciens juges de la Cour d'opter, s'ils le souhaitent, pour
le régime de pension national.
31. A cet égard, il convient de mentionner une importante évolution
survenue récemment. Sur la base d’une analyse comparative réalisée
par la Cour, son Président a porté à l’attention du Comité des Ministres
la question du statut des juges après cessation de leurs fonctions.
Dans une décision en date des 19 et 20 mars 2014, les Délégués des
Ministres ont invité les Etats Parties à la Convention «à répondre
de manière appropriée à la situation des juges de la Cour, une fois
leur mandat expiré, en veillant à garantir, dans la mesure du possible
dans le cadre du droit national applicable, que les anciens juges
aient l’opportunité de maintenir leurs perspectives de carrière
à un niveau correspondant aux fonctions qu’ils ont exercées». Le Comité
des Ministres compte reprendre l’examen de ces questions avant la
fin décembre 2015

. L’harmonisation des
réglementations nationales en vigueur dans l’ensemble des Parties
contractantes dans un sens conforme à l’approche précitée serait,
selon moi, extrêmement souhaitable. C’est la raison pour laquelle
je tiens à saluer vivement cette décision du Comité des Ministres.
32. Certains experts ont récemment indiqué que la fixation d’un
âge minimum pour les candidats à la Cour pourrait aussi atténuer
la nécessité pour eux d’obtenir un emploi après la cessation de
leurs fonctions à la Cour. Le changement de l’âge du départ à la
retraite des juges prévu par le Protocole n° 15, qui permettrait aux
juges d’exercer leurs fonctions jusqu’à l’âge de 74 ans, pourrait
également, dans une certaine mesure, contribuer à remédier à ce
problème

. Je considère que
la fixation d’un âge minimum limiterait excessivement le choix des
candidats des Parties contractantes et risquerait de produire un
effet contraire au but visé par l’Assemblée, c’est-à-dire la garantie
de la nomination des meilleurs candidats possibles. Dans plusieurs
Etats de l’ancien bloc communiste, ce sont précisément les jeunes
candidats qui peuvent présenter la formation, la carrière et l’expérience
pratique les plus adaptées à l’exercice de fonctions à la Cour.
La limitation artificielle de l’âge de candidature pourrait ainsi
empêcher la nomination de ces excellents candidats. Je ne puis donc souscrire
à la proposition qui vise à fixer un âge minimum obligatoire. Cela
dit, je reconnais indéniablement que l’expérience professionnelle
d’un candidat revêt une importance capitale dans l’appréciation
d’une candidature.
5. Le Greffe de la
Cour
33. En vertu de l’article 24 de la Convention européenne
des droits de l’homme, «[l]a Cour dispose d’un greffe dont les tâches
et l’organisation sont fixées par le règlement de la Cour».
34. Le Greffe a pour rôle de fournir un soutien juridique et administratif
à la Cour dans l’exercice de ses fonctions judiciaires en traitant
et en préparant en vue d’une décision les requêtes introduites devant
la Cour par des particuliers ainsi que les requêtes interétatiques.
Comme indiqué plus haut, il se compose de juristes, d’agents administratifs
et techniques et de traducteurs. A l’heure actuelle, quelque 640 agents
travaillent au Greffe, dont 270 juristes et 370 agents d’appui qui
sont tous, bien entendu, agents du Conseil de l’Europe (voir organigramme
sur le site web de la Cour

).
35. Le Greffe est dirigé, sous l’autorité du président de la Cour,
par le greffier, qui est élu par l’Assemblée plénière de la Cour
(article 25.
e de la Convention).
Le greffier est assisté par un ou plusieurs greffiers adjoints (un
seul actuellement), également élu(s) par l’Assemblée plénière. Les
autres agents du Greffe sont nommés par voie administrative comme
les autres agents du Conseil de l’Europe

.
Le Greffe de la Cour jouit d’une certaine autonomie administrative
au sein de l’Organisation.
36. Chacune de cinq sections judiciaires de la Cour est assistée
par un greffier de section et un greffier adjoint de section. Les
sections sont subdivisées en 31 divisions chargées du traitement
des requêtes, chacune étant appuyée par une équipe administrative.
Les juristes du Greffe sont affectés à l’une des divisions en fonction
de leur connaissance de la langue et du système juridique concerné.
Ils sont chargés de la correspondance avec les parties sur les questions
de procédure, préparent les dossiers et rédigent des notes sur l’irrecevabilité,
des communiqués, des projets de décision et des projets d’arrêt

.
37. Les agents du Greffe sont des agents du Conseil de l’Europe,
soumis au Statut du personnel de l’Organisation. Les juristes sont
recrutés sur la base de contrats à durée indéterminée, de contrats
à durée déterminée ou d’accords de mise à disposition passés avec
les gouvernements des Etats Parties. Les juristes sous contrat à
durée déterminée ou indéterminée sont recrutés sur concours. Il
existe aussi des contrats à durée déterminée spécifiques, d’une
durée maximale de quatre ans, proposés dans le cadre du «système
des juristes assistants», qui permet à des professionnels du droit
en début de carrière d’acquérir une expérience à la Cour.
38. A la différence du recrutement des juristes «ordinaires»,
il n’y a pas de procédure normalisée pour la sélection des juristes
mis à disposition; il semble que chaque Etat applique une procédure
de sélection ou de désignation qui lui est propre. Cela étant, la
Cour a établi des lignes directrices applicables aux mises à disposition
et détermine elle-même quelles personnes peuvent être acceptées
dans ce cadre, comme l’explique la note d’information du Greffier
sur la mise à disposition de juristes nationaux, qui figurait en
annexe de la note introductive consacrée à cette question

.
39. Si la mise à disposition de juristes nationaux auprès du Greffe
est pratiquée depuis de longues années, celle-ci a sensiblement
augmenté depuis la Déclaration d’Interlaken du 19 février 2010.
Dans cette déclaration, la Conférence à haut niveau sur l’avenir
de la Cour européenne des droits de l’homme a appelé les Etats Parties
à la Convention à envisager la possibilité de mettre à disposition
des juges nationaux et d’autres juristes indépendants de haut niveau
au Greffe de la Cour, dans le cadre des efforts pour améliorer la connaissance
des normes de la Convention au sein des autorités nationales et
mettre en œuvre la Convention au niveau national

. Cet appel a été réitéré dans la
Déclaration d’Izmir du 27 avril 2011

et dans la Déclaration de Brighton
du 19 avril 2012

. A l’heure actuelle, 58 juristes
sont mis à la disposition du Greffe de la Cour

.
40. Il est à noter, à cet égard, que la Cour a dû remédier à quelques
inquiétudes au sujet du travail d’une certaine catégorie de juristes
mis à disposition. Certains jugeaient en effet problématique le
fait qu’ils aient accès à des informations confidentielles ou à
diffusion restreinte et qu’ils disposent d’un pouvoir décisionnel de
fait. Le greffier a répondu de façon circonstanciée à ces interrogations

. Certaines ONG m’ont néanmoins indiqué
que la situation demandait encore à être clarifiée. En tout état
de cause, il semble clair qu’un certain nombre de questions essentielles,
pertinentes pour la mise à disposition, ne sont pas encore réglées
et qu’elles doivent l’être avec une grande attention et beaucoup
de précautions. La Cour veille soigneusement, au sein de ses services
– espérons qu’il en sera toujours ainsi – à accepter uniquement
la mise à disposition de juristes suffisamment qualifiés, diligents
et consciencieux, ainsi qu’à ce que le travail de ces juristes mis
à disposition soit conforme aux exigences rigoureuses de la Convention,
du Règlement de la Cour et des bonnes pratiques.
41. Le travail effectué par le Greffe est capital pour garantir
l’efficacité de l’action de la Cour, notamment pour trier les requêtes
et traiter les requêtes recevables dans un délai raisonnable («une
justice qui tarde à être rendue équivaut à un déni de justice»,
selon William Gladstone). La disponibilité des ressources est tout
aussi cruciale à cet égard et les considérations budgétaires, tant
au niveau du Conseil de l’Europe qu’à l’échelon national, doivent
être prises en compte par la Cour et son Greffe lorsqu’ils évaluent
leurs besoins.
42. Le Greffe a notamment la particularité d’employer une partie
de ses agents (les «juristes de grade B») sur la base de contrats
de quatre ans non renouvelables. Ce principe ne souffre aucune exception
et le mérite des intéressés n’est pas pris en compte. Cette politique
se justifierait par la nécessité de diffuser les normes et l’expérience
de la Cour dans les ordres juridiques nationaux des Parties contractantes.
Après quatre années d’expérience professionnelle au contact des
requêtes, les juristes sont considérés comme des «ambassadeurs»
chargés de transmettre les valeurs des normes de la Convention européenne
des droits de l’homme dans leurs juridictions nationales respectives.
De ce fait, tous les quatre ans, la Cour doit former de nouveaux
juristes inexpérimentés, ce qui n’est sans doute pas le meilleur
moyen de gérer l’arriéré d’affaires. L’indépendance de ces juristes
risque d’être compromise: «Il semble logique que les juristes cherchent
un nouvel emploi au cours de la dernière année de leur contrat à
la Cour. Leurs perspectives de carrière peuvent dépendre de diverses
considérations, y compris de leur loyauté à l’égard d’une institution
publique ou d’une entité privée précise

.»
Je considère que la politique de non renouvellement des contrats
des juristes de grade B devrait être évaluée de façon approfondie
et éventuellement reconsidérée.
6. Conclusions
43. ll ressort clairement de ce qui précède que, malgré
les diverses mesures prises au fil des ans pour renforcer l’indépendance
de la Cour, la situation peut encore être améliorée. Les Etats Parties
et l’Assemblée devraient accorder davantage d’attention à la situation
des anciens juges de la Cour après la cessation de leurs fonctions
(c’est-à-dire à l’issue de leur mandat de neuf ans). Il est inadmissible
que certains d’entre eux aient eu des difficultés à trouver un emploi
satisfaisant à l’issue de leur mandat. Il est rassurant que le Comité
des Ministres se soit désormais saisi de cette question. L’Assemblée
devrait également soutenir l’appel lancé par le Comité des Ministres
aux Etats membres en faveur de la prise de mesures adéquates pour
garantir un emploi satisfaisant aux anciens juges de la Cour à l’expiration
de leur mandat. Ces dispositions peuvent varier selon la fonction
occupée par l’intéressé avant son élection en qualité de juge à
la Cour.
44. Il convient de consolider les privilèges et immunités des
juges, qui sont autant de garanties de leur indépendance. Il importe
que tous les Etats Parties à la Convention européenne des droits
de l’homme soient liés par le Sixième Protocole additionnel à l’Accord
général sur les privilèges et immunités. A cet égard, j’ai le plaisir
d’annoncer que, suite à la demande spécifique que j’ai adressée
aux autorités de l’Azerbaïdjan, du Portugal et de Saint-Marin en
février 2014, ces trois Etats m’ont indiqué que la ratification
du Protocole devrait intervenir dans un avenir assez proche. Les
mesures prises à l’échelon national pour mettre en œuvre concrètement
ces garanties devraient être harmonisées, conformément à l’esprit
de la
Résolution 1914
(2013) de l’Assemblée. Une pratique uniformisée devrait notamment
être mise en place dans l’ensemble des Parties contractantes pour
l’octroi de passeports diplomatiques nationaux à tous les juges
et à leur famille
45. Le régime de sécurité sociale des juges devrait être davantage
amélioré et rationalisé. Il convient d’assouplir le choix du régime
de pension (international, national ou les deux à la fois) des juges
et de leur donner la possibilité de quitter le régime obligatoire
actuel sur la base de dispositions transitoires précises, qui définissent
le transfert et/ou le retour des fonds capitalisés.
46. Il peut être utile de procéder à une réévaluation de l’organisation
du travail du Greffe de la Cour, notamment à l’égard de la politique
de contrats non renouvelables des juristes assistants et de la nécessité d’accorder
davantage d’attention aux critiques formulées par certaines ONG,
qui dénoncent le manque de transparence, notamment, des mises à
disposition. J’aimerais faire remarquer que l’Auditeur externe,
c’est-à-dire le président de la chambre régionale d’Alsace de la
Cour des comptes française, a déclaré, en présentant son rapport
au Comité d’audit du Conseil de l’Europe le 14 juin 2012, que «la
Cour [était] l’un des organes les plus performants que ses services
aient jamais audités»

.
Mais
cette évaluation positive ne devrait pas devenir une raison de négliger
certaines questions soulevées dans le présent rapport. La Cour est
certes «le joyau de la couronne» du Conseil de l’Europe en sa qualité
d’organisation de protection des droits de l’homme, mais la poursuite
de l’amélioration de son action, dont le renforcement de l’indépendance
des juges est un aspect essentiel, doit demeurer une priorité majeure
pour l’ensemble des organes de notre Organisation.