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Résolution 2016 (2014) Version finale

Les menaces contre l’humanité posées par le groupe terroriste connu sous le nom d’«EI»: la violence à l’encontre des chrétiens et d'autres communautés religieuses ou ethniques

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 2 octobre 2014 (34e séance) (voir Doc. 13618, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteure: Mme Theodora Bakoyannis). Texte adopté par l’Assemblée le 2 octobre 2014 (34e séance).Voir également la Recommandation 2055 (2014).

1. L'Assemblée parlementaire est profondément choquée par les menaces que représente le groupe terroriste connu sous le signe «EI» («Daesh» en arabe), qui n'a de cesse de semer la mort et la destruction à travers l’Irak et la Syrie.
2. Elle appelle une nouvelle fois l'attention sur la situation des chrétiens et d'autres communautés religieuses et ethniques au Moyen-Orient, en général, et en Irak et en Syrie, en particulier. Au vu des derniers développements intervenus dans la région, en particulier l'attitude d'«EI», la situation de ces communautés n'est plus à qualifier dorénavant d'inquiétante, mais de désespérée. En certains endroits à présent sous le contrôle d'«EI», ces communautés ont d'ores et déjà disparu.
3. Dans ce contexte, l'Assemblée rappelle ses Recommandations 1957 (2011) sur la violence à l'encontre des chrétiens au Proche et au Moyen-Orient, et 1962 (2011) sur la dimension religieuse du dialogue interculturel; ainsi que ses Résolutions 1878 (2012) sur la situation en Syrie; 1902 (2012) sur la réponse européenne face à la crise humanitaire en Syrie; 1928 (2013) «Sauvegarder les droits de l'homme en relation avec la religion et la conviction, et protéger les communautés religieuses de la violence»; et 1940 (2013) sur la situation au Proche-Orient.
4. L'Assemblée réitère sa vigoureuse condamnation de tous les actes de violence. Elle est fermement convaincue que la première priorité doit être de mettre fin aux massacres perpétrés actuellement et que les Etats membres du Conseil de l'Europe doivent mettre tout en œuvre pour concourir à l'instauration de la paix dans la région.
5. Alarmée par des rapports faisant état de l’avance continue des forces d’«EI» sur la ville kurde de Kobané à la frontière turco-syrienne, l’Assemblée appelle la communauté internationale à réagir immédiatement pour prévenir une catastrophe humanitaire et protéger la population civile.
6. Tous les Etats du Moyen-Orient et de la communauté internationale au sens large doivent condamner d'une même voix et avec la même fermeté les actions violentes, ainsi que le nettoyage religieux et ethnique commis par «EI», et unir leurs forces pour faire face à la crise actuelle et prévenir des crises analogues. Ils doivent enquêter sur toutes les violations des droits de l'homme et veiller à ce que leurs responsables soient traduits en justice, et ne bénéficient d'aucune impunité.
7. L'Assemblée a parfaitement conscience qu'«EI» et d’autres groupes terroristes similaires qui mènent leurs actions au Moyen-Orient n'agissent pas au nom de l'islam ni ne représentent une majorité de musulmans. En effet, un grand nombre des victimes sont musulmanes. Aussi, l’Assemblée salue-t-elle la mobilisation de la communauté musulmane contre les agissements d'«EI», notamment dans le cadre de la campagne «Not In My Name» (Pas en mon nom).
8. L'Assemblée se déclare profondément préoccupée par le fait que quelque 3 000 jeunes Européens combattent aux côtés d'«EI» en Irak et en Syrie, et exhorte les Etats membres du Conseil de l'Europe à accroître leurs efforts pour les identifier ainsi que pour identifier et démanteler les filières de recrutement, en poursuivre les responsables et échanger des informations ainsi que coordonner leurs réactions face aux djihadistes qui reviennent dans leur pays. Par ailleurs, les sources de financement d'«EI» doivent être identifiées et, chaque fois que possible, neutralisées et sanctionnées.
9. L'Assemblée se félicite sans réserve de l'adoption, le 24 septembre 2014, à l'unanimité, par le Conseil de sécurité des Nations Unies, de la Résolution 2178 (2014) sur «les menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d'actes de terrorisme» qui demande instamment aux Etats membres d'empêcher leurs ressortissants de rejoindre les rangs d'«EI» en Irak et en Syrie, y compris en adaptant leur législation.
10. L'Assemblée reconnaît, pour le déplorer, que les missions humanitaires actuelles sont insuffisantes étant donné la crise humanitaire sans précédent à laquelle nous sommes dorénavant confrontés. Elle demande par conséquent aux Etats membres du Conseil de l'Europe, aux Etats observateurs et aux Etats dont les parlements jouissent du statut de partenaires pour la démocratie auprès de l'Assemblée d'accroître les livraisons d’aide humanitaire aux camps de réfugiés en place en Irak, en Syrie, en Jordanie, au Liban et en Turquie, et d'étendre leurs programmes d'assistance.
11. En tant que voisine de la Syrie et de l’Irak, la Turquie a ouvert ses frontières à des milliers de personnes déplacées de l’Irak et de la Syrie fuyant les violences, notamment aux minorités vulnérables comme les Yazidis. Le nombre d’Irakiens et de Syriens atteint presque 1,5 million en Turquie, dont près de 250 000 ont traversé la frontière au cours des deux dernières semaines. En outre, la Turquie a mis en place des camps pour plus de 35 000 personnes déplacées dans le nord de l’Irak.
12. Il faut encourager l'inclusion à tous les niveaux, tant en Irak qu'en Syrie. Il incombe au Gouvernement irakien et aux forces de sécurité du pays de faire en sorte que les cas d'usage excessif de la force et de discrimination à l'encontre des minorités religieuses et ethniques rapportés sous le gouvernement précédent ne se répètent pas.
13. L'Assemblée demande instamment aux Etats membres du Conseil de l'Europe et à la communauté internationale en général de soutenir le Gouvernement irakien dans ses tentatives de proposer à ses citoyens une alternative crédible à l’attrait d’«EI».
14. L'Assemblée recommande en outre aux gouvernements de ses Etats membres de faire usage de leurs relations bilatérales avec les Etats concernés par «EI» pour les encourager à poursuivre le développement des droits de l'homme et des libertés civiles.
15. L’Assemblée appelle les gouvernements de tous les Etats membres à faciliter le lancement d’un processus inclusif sous la direction de la Syrie, qui conduira à une véritable transition politique sur la base du Communiqué de Genève. Ce dernier répond aux aspirations légitimes du peuple syrien pour une Syrie libre et démocratique, où chaque individu sera traité en toute égalité quelles que soient sa religion, ses croyances ou son appartenance ethnique.
16. L’Assemblée demande instamment à la communauté internationale:
16.1. d'encourager le maintien d'un statut juste et équitable pour tous les citoyens, quelle que soit leur origine religieuse ou ethnique. Ceux-ci doivent être égaux devant la loi, sans qu'une loi religieuse ne prévale sur les juridictions civiles;
16.2. d'encourager fermement les sources médiatiques de la région à se mobiliser pour le maintien de normes de «bonne pratique» et à s'abstenir par conséquent de toute incitation à la haine religieuse ou ethnique, tout en respectant la liberté et l'indépendance des médias;
16.3. de s'assurer que les conditions appropriées sont remplies pour un retour en toute sécurité des réfugiés et des personnes déplacées à l'intérieur de leur pays;
16.4. d'encourager, et d'assister chaque fois que possible, les communautés chrétiennes et d’autres communautés religieuses et ethniques, en particulier les Yazidis et les Kurdes, à prendre une part active aux discussions en cours sur l'avenir de l'Irak comme de la Syrie;
16.5. d'élaborer un programme de reconstruction des zones touchées, organisé au plan mondial et financé de manière adéquate, supervisé par les Nations Unies;
16.6. de soutenir les peuples d'Irak et de Syrie, et de défendre leurs droits fondamentaux. Dans ce contexte, toutes les actions de la communauté internationale devraient être conformes au droit international et à la Charte des Nations Unies.
17. L'Assemblée encourage par ailleurs les pays du Moyen-Orient:
17.1. à reconnaître que la démocratie seule ne suffit pas et à faire en sorte que soit garanti dans la Constitution le respect des droits de l'homme et du pluralisme, qui sont des composantes de leur propre civilisation;
17.2. à condamner sans équivoque non seulement les attaques meurtrières contre des populations innocentes, notamment des enfants et des femmes, mais aussi le recours à la violence en général, ainsi que toutes les formes de discrimination et d'intolérance fondées sur la religion et les croyances;
17.3. à coopérer pour déférer en justice, sans impunité, les auteurs de violations de droits de l'homme;
17.4. à intensifier la coopération régionale parmi tous les pays du Moyen-Orient, dans un souci de diversité pour mieux comprendre les minorités et renforcer leur position.
18. L'Assemblée décide de continuer à suivre de près, en priorité, la situation dans la région, ainsi que les conséquences humanitaires tragiques de la crise actuelle et la question des combattants terroristes étrangers.