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Résolution 2074 (2015)
Les activités de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2014-2015
1. L’Assemblée parlementaire du Conseil
de l’Europe, élargie aux délégations des parlements nationaux des
Etats membres de l’Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE) non membres du Conseil de l’Europe et à une délégation
du Parlement européen, examine, à nouveau, les activités de l’OCDE.
2. L’an dernier, le débat de l’Assemblée élargie sur les activités
de l’OCDE en 2013-2014 s’était tenu pour la première fois sur la
base d’un rapport présenté par le Secrétaire général de l’OCDE,
M. Angel Gurría. L’exercice a été considéré comme une réussite par
tous les participants. L’Assemblée élargie félicite M. Gurría, dont
le mandat à la tête de l’OCDE a été reconduit pour les cinq années
à venir.
3. Pour le débat de cette année, l’Assemblée élargie a examiné
les activités de l’OCDE en 2014-2015 sur la base d’un rapport biennal
établi par la commission des questions politiques et de la démocratie,
et d’une sélection de rapports de l’OCDE, en particulier le rapport
de synthèse final sur l’initiative des nouvelles approches face
aux défis économiques (NAEC), que le Secrétaire général de l’OCDE
a décrit en 2013 comme «l’un des résultats les plus tangibles, les
plus visibles et les plus féconds du dialogue entre le Conseil de l’Europe
et l’OCDE». L’Assemblée élargie se réjouit de poursuivre ce dialogue.
4. L’Assemblée élargie prend acte du contexte économique mondial
dans lequel les activités de l’OCDE se sont inscrites en 2014-2015.
Les projections pour 2015 ont été revues à la baisse au vu des résultats
du premier trimestre 2015, les plus faibles depuis 2009. Les prévisions
pour 2016 sont légèrement meilleures, mais sont largement tributaires
d’une accélération progressive de la croissance de l’investissement
après des années de stagnation. Cette accélération restera cependant
plus modérée que lors de précédents cycles de reprise, reflétant
le faible gain de productivité, la persistance de l’incertitude
et de capacités excédentaires dans de nombreux secteurs, ainsi que
les freins à l’investissement engendrés par la baisse des prix du
pétrole.
5. L’Assemblée élargie prend également note de certaines tendances
à long terme, dites lourdes, telles qu’elles ressortent du rapport
de synthèse NAEC, comme le ralentissement de la productivité globale
des facteurs (PGF) et de la production économique, la hausse des
inégalités et les modèles de développement non durables, qui font
peser une «pression sur l’environnement».
6. L’Assemblée élargie note que les publications phares de l’OCDE,
qui préconisent une croissance verte et inclusive, s’intéressent
à ces tendances de fond et sont totalement en phase avec le but
principal de l’OCDE tel qu’énoncé à l’article 1 de sa convention
de 1960, «réaliser la plus forte expansion possible de l’économie et
de l’emploi et une progression du niveau de vie dans les pays membres».
7. Tout comme le Conseil ministériel de l’OCDE, l’Assemblée élargie
reconnaît le rôle important de l’OCDE dans le paysage politique
international et notamment sa contribution aux travaux du Groupe
des 7 (G7) et du Groupe des 20 (G20). L’Assemblée se félicite des
efforts constants de l’OCDE pour étoffer ses cadres et méthodes
analytiques, notamment ses outils d’analyse sur une longue durée.
Elle salue aussi le rapport de synthèse final NAEC et reconnaît
l’importance des indicateurs allant au-delà du produit intérieur
brut (PIB) et des travaux de l’OCDE portant sur les indicateurs
«Comment va la vie?» et «Croissance verte». L’Assemblée élargie
invite l’OCDE à poursuivre la généralisation de ses analyses multidimensionnelles
dans ses publications phares, notamment ses travaux sur la croissance
inclusive et l’égalité hommes-femmes.
8. L’Assemblée élargie recommande l’insertion d’une dimension
supplémentaire dans le cadre pluridimensionnel des NAEC, à savoir
les effets des externalités transfrontalières et les arbitrages
entre politiques nationales et développements internationaux.
9. L’Assemblée élargie note que le fait de promouvoir une croissance
durable n’a pas eu un impact suffisant sur la viabilité écologique
du développement économique, puisque les espèces disparaissent à
un rythme inégalé depuis l’époque des dinosaures. L’eau, les sols
et nombre de ressources naturelles sont structurellement surexploités
du fait de nos activités économiques. Nos émissions de carbone à
l’échelle mondiale peuvent provoquer des changements climatiques
catastrophiques.
10. Les Etats membres et non membres prennent aujourd’hui des
mesures qui vont dans le sens d’une croissance verte, mais des efforts
beaucoup plus importants devront être faits pour intégrer les priorités environnementales
dans les agendas économiques afin de promouvoir une croissance et
un bien-être durables. Le rapport de l’OCDE intitulé «Vers une croissance
verte: suivre les progrès» vise, grâce à des conseils plus ciblés
et plus cohérents sur l’action publique, à accélérer la mise en
œuvre, par les pays, de politiques en matière de croissance verte.
L’OCDE continue également d’intégrer la croissance verte dans ses travaux.
Son rapport «Aligner les politiques pour une économie bas carbone»
identifie les aspects des cadres d’action politique et réglementaire
qui ne sont pas en phase avec les objectifs liés au changement climatique dans
toute une série de domaines (investissements, fiscalité, innovation
et compétences, commerce et adaptation) et d’activités au cœur de
la politique relative au climat (électricité, mobilité urbaine et
utilisation des sols en milieu rural). Des informations pertinentes
relatives à la croissance verte sont désormais régulièrement incluses
dans les études économiques, les examens environnementaux, les examens
des politiques de l’investissement et les rapports villes et croissance
verte publiés par l’OCDE. Cela étant, il est possible de faire beaucoup
plus pour parvenir à une approche intégrée.
11. L’Assemblée élargie demande par conséquent à l’OCDE et à ses
Etats membres:
11.1. de s’engager
pour que la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21)
produise des résultats ambitieux;
11.2. de fixer des objectifs d’émissions de CO2 et
de financement climatique visant à maintenir la hausse moyenne de
la température du globe en dessous de 2°C;
11.3. de fixer des objectifs spécifiques tout aussi ambitieux
pour limiter l’utilisation de l’eau, des sols et des autres ressources
naturelles à des niveaux viables;
11.4. de protéger les espèces en danger et d’enrayer le processus
de diminution de la biodiversité;
11.5. de soutenir une «transition juste» pour les travailleurs
et les divers secteurs économiques.
12. L’Assemblée élargie reconnaît l’importance de la réduction
des inégalités et de la valeur du dialogue social pour parvenir
à une croissance plus inclusive et à des emplois de qualité. Les
travaux menés sur la qualité des emplois dans le cadre de l’initiative
NAEC fournissent déjà un cadre d’évaluation de cette qualité selon
trois grands critères: la qualité de la rémunération, la sécurité
de l’emploi et la qualité de l’environnement de travail. Ces travaux
permettront de recenser les principaux leviers d’action susceptibles
d’améliorer la qualité des emplois, dans l’optique de l’élaboration
d’une nouvelle stratégie de l’OCDE pour l’emploi.
13. L’Assemblée élargie relève que la part du travail dans le
revenu mondial a chuté de façon spectaculaire depuis 1980 et qu’elle
a baissé dans la plupart des pays de l’OCDE, tandis que celle des
revenus du capital a augmenté. Le stock des avoirs représentés par
les investissements de portefeuille transfrontaliers a enregistré une
croissance annuelle de plus de 20% en moyenne au cours des dix années
qui ont précédé la crise. Dans le même temps, le produit des investissements
a plus que triplé. Le total des actifs des multinationales (filiales étrangères)
est passé de 18% du PIB mondial en 1990 à 130% en 2013.
14. L’Assemblée élargie constate que les inégalités de revenus
sont à leur plus haut niveau dans les pays de l’OCDE depuis un demi-siècle.
Dans les économies les plus avancées, les inégalités des revenus marchands
se sont creusées autant entre 2007 et 2011 qu’au cours des douze
années précédentes. Elle constate que les inégalités dans la répartition
des richesses ont suivi la même évolution.
15. L’Assemblée élargie prend acte des récentes études qui associent
la croissance excessive du secteur financier par rapport au PIB
dans les économies avancées au ralentissement de la croissance économique
et à l’accroissement des inégalités économiques, tandis que l’accroissement
excessif du crédit a accru la vulnérabilité des économies aux crises.
16. L’Assemblée élargie appelle l’OCDE à prodiguer à ses Etats
membres des conseils politiques adaptés:
16.1. pour freiner les activités financières improductives et
réformer le secteur financier afin qu’il soit au service d’une croissance
durable et inclusive de l’économie réelle;
16.2. pour accroître la part des revenus du travail dans le
PIB;
16.3. pour stopper les inégalités croissantes et promouvoir
une croissance durable et inclusive et une répartition plus équitable
des revenus, des richesses et du bien-être.
17. L’Assemblée élargie note que l’initiative sur la croissance
inclusive sera la pierre angulaire des analyses et des conseils
horizontaux de l’OCDE sur le bien-être, et permettra de relever
les enjeux ayant trait aux inégalités. Elle invite l’OCDE à intégrer
le cadre politique relatif à la croissance inclusive dans ses travaux.
Elle appelle aussi les Etats membres de l’OCDE:
17.1. à prendre des mesures pour revaloriser
les revenus faibles et intermédiaires afin de stimuler la demande
et le pouvoir d’achat des ménages;
17.2. à renforcer la négociation collective et les salaires
(minimaux), au rythme des gains de productivité;
17.3. à enrayer la progression du travail précaire, informel
ou illégal.
18. L’Assemblée élargie appelle l’OCDE à profiter de la prochaine
réunion ministérielle (janvier 2016) du Comité de l’emploi, du travail
et des affaires sociales pour inclure ces points dans la révision
de la stratégie de l’OCDE pour l’emploi de 1994.
19. L’Assemblée élargie reconnaît les chances que peut offrir
une nouvelle révolution de la production, mais aussi les problèmes
qu’elle peut entraîner en termes d’inclusion, d’emploi et de répartition
économique. L’Organisation internationale du travail (OIT) ayant
déjà indiqué que le chômage et la précarité de l’emploi dans le
secteur formel vont continuer de progresser et que l’économie informelle
va se développer, l’Assemblée élargie appelle l’OCDE à coopérer
étroitement avec cette organisation, où une commission de haut niveau
sur l’avenir du travail sera chargée de préparer un rapport pour
la conférence du centenaire de l’OIT, en 2019.
20. Au plan mondial, l’investissement public et privé n’est pas
encore revenu aux niveaux d’avant la crise. L’Assemblée élargie
reconnaît le rôle essentiel des investissements productifs pour
promouvoir une croissance durable et inclusive, stimuler la création
d’emplois et soutenir la transition vers une économie sobre en carbone
et résiliente. Elle insiste sur la nécessité de débloquer l’investissement.
Des investissements publics ciblés portant sur la création d’emplois
verts et décents sont nécessaires pour renforcer la confiance. Elle
reconnaît que l’innovation est déterminante pour accroître la productivité
et créer des emplois, et que les investissements, en particulier
dans la recherche et le développement, contribuent à la croissance
de la productivité globale des facteurs.
21. L’Assemblée élargie note les débats et controverses politiques
que suscite une nouvelle génération de traités de libre-échange
et d’investissement. Reconnaissant les bénéfices passés dus aux
avantages comparatifs de l’ouverture au commerce international,
elle souligne aussi qu’un système de commerce multilatéral ouvert,
fondé sur des règles, est un élément clé pour le développement du
secteur privé, une croissance économique durable et la création
d’emplois. Par ailleurs, certaines études indiquent que la poursuite
de la libéralisation des échanges commerciaux entraînera une nouvelle
diminution de la part du travail et accroîtra les inégalités. L’Assemblée
élargie appelle l’OCDE à analyser en profondeur les compromis entre
les différents enjeux en présence qu’entraînera la poursuite de
l’intégration économique mondiale, ainsi que les risques, coûts
et avantages potentiels d’une élimination plus poussée des barrières
non tarifaires, en particulier dans les secteurs des services et
de l’investissement.
22. L’Assemblée élargie appelle les Etats membres de l’OCDE à
ne pas se précipiter vers des accords de commerce et d’investissement
qui ne sont pas susceptibles de générer des bénéfices concrets et
substantiels pour nos économies en général et d’étudier en premier
lieu les effets des arbitrages opérés entre la croissance, la stabilité,
la durabilité, l’inclusion et l’équité. Elle appelle aussi l’OCDE
à proposer des ensembles de mesures pour les politiques commerciales
et d’investissement qui portent sur ces arbitrages et qui assurent
un bien-être maximal dans les pays membres, ainsi que dans les pays
qui sont des partenaires commerciaux et d’investissement.
23. Pour accroître les ressources nécessaires au financement des
investissements publics et assurer la viabilité et l’ «inclusivité»
de leurs politiques, les gouvernements, y compris ceux des pays
émergents, doivent aussi s’attaquer au problème de la fraude et
de l’évasion fiscales. C’est pourquoi l’Assemblée élargie:
23.1. salue les avancées du projet
OCDE/G20 de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert
de bénéfices (BEPS), et les progrès de l’échange automatique de
renseignements;
23.2. demande à tous les Etats et juridictions d’adhérer à la
Convention multilatérale de l’OCDE et du Conseil de l’Europe concernant
l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale (STE no 127)
et de l’appliquer afin d’améliorer la disponibilité, la qualité
et l’exactitude des renseignements sur les bénéficiaires effectifs;
23.3. appelle tous les pays à adopter les dispositions législatives
nécessaires pour concrétiser leur engagement d’appliquer la norme
d’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers
d’ici à 2017 ou 2018.
24. Toutes les mesures liées au projet BEPS seront parachevées
en 2015. Pour garantir que cette initiative emblématique aura bien
l’impact souhaité, les travaux futurs devront mettre l’accent sur
le soutien à apporter aux pays pour une mise en œuvre efficace et
cohérente des résultats du plan d’action BEPS, grâce à l’élaboration
d’une législation type et d’orientations techniques ainsi qu’au
suivi de l’impact des mesures BEPS sur la résolution des questions
de double imposition comme de double exonération.
25. L’Assemblée élargie encourage l’OCDE à poursuivre ses travaux
sur la conduite responsable des entreprises en continuant d’y associer
toutes les parties prenantes concernées et à s’appuyer pour cela
sur ses principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales;
elle l’appelle aussi à renforcer la performance des points de contact
nationaux prévus par les principes directeurs et à améliorer ces
derniers en révisant les lignes directrices de procédure, en approuvant
des crédits budgétaires, en accélérant le programme d’examen par
les pairs et en renforçant la cohérence des politiques.
26. La corruption d’agents publics étrangers dans les transactions
commerciales internationales reste un phénomène répandu, qui soulève
de graves problèmes moraux et politiques, nuit à la bonne gouvernance
et au développement économique, et entraîne une distorsion de la
concurrence internationale. L’Assemblée élargie reconnaît le rôle
déterminant de l’OCDE et de sa Convention sur la lutte contre la
corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales (Convention anti-corruption) dans la lutte contre
la corruption d’agents étrangers, notamment grâce à son mécanisme
rigoureux de suivi par les pairs. L’Assemblée élargie encourage
la mise en œuvre intégrale et l’application rigoureuse de la Convention
anti-corruption par toutes ses Parties. Elle appelle aussi les membres
du G20 qui ne sont pas parties à cette convention (Chine, Inde,
Indonésie et Arabie saoudite) à participer au groupe de travail
de l’OCDE sur la corruption et à envisager la possibilité d’y adhérer,
conformément au plan d’action anti-corruption du G20.
27. L’Assemblée élargie note que la crise internationale actuelle
en matière de migrations est d’une ampleur et d’une complexité sans
précédent. Elle reconnaît la contribution potentielle des migrations
internationales à la croissance, en particulier lorsque l’admission
est bien gérée et l’intégration réussie. Elle invite l’OCDE à poursuivre
ses travaux en fournissant des faits et des analyses sur les flux
migratoires et l’intégration, et sur les politiques menées dans
ces domaines, et à conseiller les pays pour trouver une réponse
à la crise actuelle.
28. L’Assemblée élargie appelle de ses vœux un programme de développement
ambitieux pour l’après-2015, l’intégration du «travail décent»,
de la conduite responsable des entreprises et du dialogue social
à la stratégie de développement de l’OCDE, ainsi qu’une action visant
à soutenir la mobilisation des ressources nationales par le partage
des connaissances et le renforcement des capacités.
29. Enfin, l’Assemblée élargie invite l’OCDE à informer sous une
forme adaptée les participants au débat élargi des suites données
aux questions soulevées dans la présente résolution, avant ou lors
du prochain débat élargi.