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Résolution 2096 (2016)
Comment prévenir la restriction inappropriée des activités des ONG en Europe?
1. L’Assemblée parlementaire rappelle
l’importance du rôle joué par une société civile dynamique dans
le bon fonctionnement de la démocratie et rend hommage à l’ensemble
des organisations non gouvernementales (ONG), dont l’action a renforcé
les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit dans leurs
Etats.
2. L’Assemblée souligne que tous les Etats parties à la Convention
européenne des droits de l’homme (STE no 5)
sont convenus de veiller au respect de la liberté de réunion et
d’association, ainsi qu’au respect de la liberté d’expression et
d’information, et par conséquent de créer un environnement propice
à l’exercice de ces libertés, selon la voie tracée par la jurisprudence
de la Cour européenne des droits de l’homme, la Recommandation CM/Rec(2007)14
du Comité des Ministres sur le statut juridique des organisations
non gouvernementales en Europe et les Lignes directrices conjointes
sur la liberté d’association adoptées en décembre 2014 par la Commission
européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise)
et le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme
de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
3. L’Assemblée réaffirme ses précédentes Résolutions 1660 (2009) et 1891 (2012) sur
la situation des défenseurs des droits de l’homme dans les Etats
membres du Conseil de l’Europe, ainsi que sa Résolution 2060 (2015), sa Recommandation 2073 (2015),
sa Résolution 1729 (2010) et
sa Recommandation 1916
(2010) sur la protection des «donneurs d’alerte».
4. L’Assemblée observe que, dans certains Etats membres du Conseil
de l’Europe, la situation de la société civile s’est profondément
détériorée ces dernières années, notamment à la suite de l’adoption
d’une législation et d’une réglementation restrictives, dont certaines
ont été vivement critiquées par la Commission de Venise, le Commissaire
aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et la Conférence des
organisations internationales non gouvernementales. Dans certains
Etats membres, les ONG se heurtent à diverses entraves à leur enregistrement,
leur fonctionnement et leur financement. Dans d’autres Etats membres,
malgré un cadre juridique adéquat, certaines ONG sont stigmatisées,
comme les défenseurs des droits de l’homme et les organisations
sentinelles. L’Assemblée s’inquiète tout particulièrement des restrictions
qui affectent la société civile en Azerbaïdjan et en Fédération
de Russie, ainsi que de la situation de la Crimée annexée et des autres
territoires qui échappent au contrôle des autorités nationales.
5. Pour ce qui est de la situation de la société civile en Azerbaïdjan,
l’Assemblée rappelle sa Résolution 2062
(2015) sur le fonctionnement des institutions démocratiques
en Azerbaïdjan et condamne une fois encore la détérioration des
conditions de travail des ONG et des militants des droits de l’homme
à la suite de la modification de la législation relative aux ONG,
qui impose des restrictions inappropriées à leurs activités. L’Assemblée
appelle l’Azerbaïdjan à modifier sa législation relative aux ONG
conformément aux recommandations de la Commission de Venise (Avis
nos 636/2011 et 787/2014) et à exécuter
pleinement et rapidement les arrêts de la Cour européenne des droits
de l’homme, notamment ceux qui concluent à la violation des libertés
d’association, de réunion et d’expression. L'Assemblée est vivement
préoccupée par la dégradation constante de la situation des droits
de l'homme en Azerbaïdjan et demande que les Etats membres du Conseil
de l'Europe accordent une importance particulière aux droits de
l'homme et aux libertés fondamentales dans le contexte de la coopération
bilatérale.
6. L’Assemblée est par ailleurs vivement préoccupée par la loi
relative aux agents étrangers, qui modifie la législation russe
applicable aux organisations à but non lucratif en obligeant les
ONG bénéficiaires d’un financement étranger à s’enregistrer en qualité
d’agents étrangers. Elle observe que des dizaines d’ONG ont été
enregistrées de manière unilatérale en qualité d’agents étrangers
par le ministre de la Justice et que le lauréat du prix des droits
de l’homme de l’Assemblée 2011, le Comité contre la torture de Nijni
Novgorod, a lui-même été contraint récemment de cesser ses activités
pour cette raison. L’Assemblée s’inquiète également de l’adoption,
en mai 2015, de la loi relative aux organisations indésirables,
dont la mise en œuvre peut entraîner la fermeture des principales
ONG internationales et étrangères qui travaillent en Fédération
de Russie. L’Assemblée appelle la Russie à modifier la législation
relative aux ONG, conformément aux Avis nos 716/2013
et 717/2013 de la Commission de Venise, et appelle les autorités
à mettre en œuvre les autres dispositions de cette législation conformément
aux normes internationales applicables au droit à la liberté d’association
et aux autres droits de l’homme pertinents.
7. L’Assemblée appelle par conséquent les Etats membres:
7.1. à mettre pleinement en œuvre
la Recommandation CM/Rec(2007)14 du Comité des Ministres;
7.2. à revoir la législation en vigueur, en vue de la mettre
en conformité avec les instruments internationaux en matière de
droits de l’homme sur le plan des droits à la liberté d’association,
de réunion et d’expression, en recourant à l’expertise du Conseil
de l’Europe, et en particulier à celle de la Commission de Venise;
7.3. à s’abstenir d’adopter toute nouvelle législation qui
aurait pour conséquence d’imposer des restrictions inappropriées
aux ONG;
7.4. à veiller à ce que les ONG participent effectivement au
processus de consultation à propos d’une nouvelle législation qui
les concerne et des autres questions qui revêtent une importance
particulière pour la société;
7.5. à garantir l’existence d’un environnement propice aux
ONG, notamment en s’abstenant de se livrer à tout harcèlement (judiciaire,
administratif ou fiscal) et à toute campagne de dénigrement;
7.6. à signer et/ou ratifier la Convention européenne sur la
reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales
non gouvernementales (STE no 124), si
tel n’est pas encore le cas.
8. Consciente de la situation précaire de la société civile sur
le territoire du Conseil de l'Europe, l’Assemblée décide de rester
saisie de la question et de continuer de lui donner la priorité,
étant donné l’urgence de surveiller le respect de la liberté d'association,
de réunion et d’expression.