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Résolution 2113 (2016)
Après les attaques de Bruxelles, un besoin urgent de répondre aux défaillances de sécurité et de renforcer la coopération contre le terrorisme
1. L’Assemblée parlementaire est horrifiée
par les attentats terroristes perpétrés le 22 mars 2016 à l’aéroport
de Zaventem et à la station de métro de Maelbeek à Bruxelles, au
cours desquels 32 personnes ont été tuées et plus de 300 blessées,
dont 45 souffrant de blessures graves sont toujours hospitalisées.
Ces attentats sont les derniers d’une série d’actes terroristes
graves, dont ceux de Paris, d’Ankara et d’Istanbul, prenant pour
cible les Etats membres du Conseil de l’Europe. L’Assemblée déplore
la perte de vies innocentes et exprime ses condoléances et sa solidarité
aux familles des victimes ainsi qu’à tous ceux qui ont souffert
dans ces attaques inhumaines.
2. L’Assemblée réitère sa ferme condamnation du terrorisme sous
toutes ses formes, et rappelle ses résolutions antérieures relatives
au terrorisme, notamment la Résolution
2090 (2016) «Combattre le terrorisme international tout
en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe»
et la Résolution 2091
(2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Irak.
Dans ce contexte, elle note que l’organisation terroriste barbare
dénommée «Daech» a revendiqué la responsabilité des attentats à
la bombe de Bruxelles.
3. Le terrorisme se nourrit de la haine et de l’intolérance et
cherche à détruire notre système politique et les fondements mêmes
des sociétés démocratiques. Il doit être combattu avec la même détermination
où qu’il sévisse, quelles que soient les raisons avancées pour le
justifier et quelles qu’en soient les cibles. De même, notre solidarité
doit s’étendre à toutes les victimes d’actes terroristes, qu’ils
soient commis dans une grande ville européenne, ou ailleurs en Europe
ou dans le monde.
4. L’Assemblée invite instamment les chefs d’Etat à ne pas simplement
faire des déclarations solennelles après les attentats terroristes,
mais aussi à en tirer les enseignements et à agir avec détermination.
Les déclarations sont nécessaires pour réaffirmer nos valeurs mais
elles ne sont pas suffisantes pour en assurer la protection et garantir
la sécurité.
5. Tous les Etats membres du Conseil de l’Europe doivent urgemment
tirer les conclusions des événements tragiques de Bruxelles et de
ceux survenus dans d’autres villes des Etats membres, qui sont aussi la
conséquence de défaillances et lacunes aux niveaux national, international
et de l’Union européenne. La coordination dans la Région de Bruxelles-Capitale
n’a pas été suffisamment opérationnelle pour être compatible avec
les besoins modernes en matière de sécurité et doit donc être profondément
réformée.
6. L'Assemblée rappelle sa Résolution
2091 (2016) et exprime son inquiétude à propos de «l'approvisionnement»
continu de combattants étrangers en provenance de pays européens.
Elle note que, alors que la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni
en fourniraient le plus grand nombre, la Belgique, le Danemark et
la Suède ont les chiffres les plus élevés par habitant. Elle note
également avec préoccupation que la Belgique est devenue une plaque
tournante pour le recrutement de djihadistes et que la dégradation
de la position de Daech au Proche-Orient pourrait engendrer une
intensification du recrutement de djihadistes et des activités terroristes
sur le continent européen.
7. En raison du manque d'orientation politique pour assurer les
nécessaires coordination et coopération entre les diverses – et
parfois concurrentes – forces de l’ordre et de sécurité, certains
quartiers de villes européennes sont devenus des zones de non-droit
pour la police et un terrain fertile pour les extrémistes radicalisés
et les terroristes.
8. Pendant trop longtemps, les responsables gouvernementaux et
politiques en Europe ont fermé les yeux sur le manque d’intégration
et la radicalisation croissante des jeunes, et ont ignoré ou sous-estimé
l’ampleur de la menace terroriste. Nous devons à présent, de toute
urgence, procéder à une évaluation réaliste de nos éventuelles failles
de sécurité. Nos Etats ont le devoir de protéger la vie de leurs
citoyens et les valeurs fondamentales de la démocratie. Nos sociétés
doivent être prêtes à payer un prix nettement plus élevé pour la
sécurité, tout en respectant le mieux possible les libertés individuelles,
la vie privée et nos valeurs démocratiques.
9. Face aux toujours plus vastes réseaux terroristes internationaux,
une réponse paneuropéenne coordonnée est plus que jamais nécessaire.
Le terrorisme étant un phénomène international, les actions de lutte
contre ce fléau doivent dépasser les limites de l’Europe et associer
les pays tiers prêts à coopérer, notamment dans les régions voisines.
10. A la lumière de ce qui précède, l’Assemblée appelle les autorités
compétentes des Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe,
ainsi que de ceux dont les parlements jouissent du statut de partenaire pour
la démocratie et d’observateur, et d’autres Etats voisins à garantir:
10.1. à l’échelon national:
10.1.1. l’instauration du niveau le plus élevé possible de communication,
de partage d’informations, de coordination et de coopération obligatoires
entre les divers services spéciaux et forces de l’ordre, et, le
cas échéant, la police régionale et municipale, y compris le partage
des bases de données pertinentes;
10.1.2. la mise en œuvre de mesures efficaces pour prévenir et
combattre la radicalisation; à cet égard, l’Assemblée souligne l’importance
d’une éducation inclusive, civique et laïque, et renvoie aux mesures
spécifiques dans ce domaine mises en avant dans sa Résolution 2091 (2016);
elle fait également référence au Plan d’action du Conseil de l’Europe
sur la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation conduisant
au terrorisme, qui soutient les Etats membres dans l’élaboration
de mesures appropriées dans le secteur public, en particulier dans
les écoles et les prisons, et sur internet;
10.1.3. l’intégration de diverses communautés «fermées» dans leur
environnement local afin de veiller à ce qu’elles ne deviennent
pas des zones de non-droit ou des ghettos où les règles communes
ne s’appliquent pas;
10.1.4. que des moyens appropriés soient accordés aux forces de
l’ordre et aux services de sécurité et de renseignement pour prévenir
et combattre la rhétorique inflammatoire et le discours de haine;
10.1.5. que les emblèmes et les symboles d’organisations terroristes
reconnues internationalement soient interdits;
10.1.6. la conduite d’une étude approfondie des bonnes pratiques
mises en œuvre dans les pays ayant une vaste expérience de la lutte
contre le terrorisme, notamment en ce qui concerne la sécurité des
bâtiments publics et des infrastructures de transport, ainsi que
la cybersécurité;
10.2. à l’échelon international, l’instauration d’une communication,
d’un partage d’informations, d’une coordination et d’une coopération
renforcés, efficaces et opportuns entre les forces de l’ordre, les services
spéciaux et les mécanismes internationaux compétents, dans le but
de contrôler et, le cas échéant, de prévenir les déplacements des
individus soupçonnés d’appartenir à des réseaux terroristes ou d’être
impliqués dans des activités terroristes;
10.3. à l’échelon tant national qu’international, un partage
aussi large que possible d’informations et d’expériences sur les
causes, les facteurs contributifs, le déroulement, l’action des
forces de l’ordre et la gestion postcrise des attaques terroristes
en Europe;
10.4. la facilitation d’une coopération internationale renforcée,
avec le même niveau de détermination contre toutes les entités terroristes,
pour prévenir et éliminer leurs activités, et pourchasser et traduire en
justice tous les groupes terroristes et leurs membres.
11. Au niveau de l'Union européenne, l'Assemblée souligne la nécessité
d'une stratégie de sécurité européenne ambitieuse, y compris un
meilleur échange d'informations entre les services de renseignement
et une coopération plus étroite entre les autorités policières et
judiciaires. A cet égard, l'Assemblée:
11.1. salue la récente approbation par le Parlement européen
du système des dossiers passagers (PNR – Passager Name Record),
qu’elle préconisait dans la Résolution
2031 (2015) «Attaques terroristes à Paris: ensemble,
pour une réponse démocratique», et invite tous les acteurs concernés
à étudier les moyens d’étendre l’application du PNR aux pays non
membres de l’Union européenne;
11.2. plaide en faveur d’une unité européenne commune du renseignement
pour la lutte contre le terrorisme.
12. L'Assemblée reconnaît qu'il existe actuellement un manque
de coopération, de coordination et de partage des meilleures pratiques
entre les parlementaires dans le contrôle de la défense et la politique
de sécurité, et demande instamment aux parlements des Etats membres
d’examiner les voies et moyens de résoudre ce problème, y compris
la possibilité de recréer un organe interparlementaire et/ou de
réactiver l’AESD (l’Assemblée européenne de sécurité et de défense,
l’ancienne Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale (UEO)),
pour combler le vide dans ce domaine.
13. Par ailleurs, l’Assemblée rappelle ses propositions formulées
dans ses Résolutions
2090 (2016) «Combattre le terrorisme international tout
en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe»
et 2091 (2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Irak,
qui restent hautement pertinentes, et appelle une nouvelle fois
les autorités compétentes des Etats membres et observateurs du Conseil
de l’Europe, ainsi que ceux dont les parlements jouissent du statut
de partenaire pour la démocratie et d’observateur, et d’autres Etats
voisins, à les mettre en œuvre en priorité.