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Résolution 2113 (2016)

Après les attaques de Bruxelles, un besoin urgent de répondre aux défaillances de sécurité et de renforcer la coopération contre le terrorisme

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 21 avril 2016 (17e séance) (voir Doc. 14031, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteur: M. Emanuelis Zingeris). Texte adopté par l’Assemblée le 21 avril 2016 (17e séance).

1. L’Assemblée parlementaire est horrifiée par les attentats terroristes perpétrés le 22 mars 2016 à l’aéroport de Zaventem et à la station de métro de Maelbeek à Bruxelles, au cours desquels 32 personnes ont été tuées et plus de 300 blessées, dont 45 souffrant de blessures graves sont toujours hospitalisées. Ces attentats sont les derniers d’une série d’actes terroristes graves, dont ceux de Paris, d’Ankara et d’Istanbul, prenant pour cible les Etats membres du Conseil de l’Europe. L’Assemblée déplore la perte de vies innocentes et exprime ses condoléances et sa solidarité aux familles des victimes ainsi qu’à tous ceux qui ont souffert dans ces attaques inhumaines.
2. L’Assemblée réitère sa ferme condamnation du terrorisme sous toutes ses formes, et rappelle ses résolutions antérieures relatives au terrorisme, notamment la Résolution 2090 (2016) «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe» et la Résolution 2091 (2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Irak. Dans ce contexte, elle note que l’organisation terroriste barbare dénommée «Daech» a revendiqué la responsabilité des attentats à la bombe de Bruxelles.
3. Le terrorisme se nourrit de la haine et de l’intolérance et cherche à détruire notre système politique et les fondements mêmes des sociétés démocratiques. Il doit être combattu avec la même détermination où qu’il sévisse, quelles que soient les raisons avancées pour le justifier et quelles qu’en soient les cibles. De même, notre solidarité doit s’étendre à toutes les victimes d’actes terroristes, qu’ils soient commis dans une grande ville européenne, ou ailleurs en Europe ou dans le monde.
4. L’Assemblée invite instamment les chefs d’Etat à ne pas simplement faire des déclarations solennelles après les attentats terroristes, mais aussi à en tirer les enseignements et à agir avec détermination. Les déclarations sont nécessaires pour réaffirmer nos valeurs mais elles ne sont pas suffisantes pour en assurer la protection et garantir la sécurité.
5. Tous les Etats membres du Conseil de l’Europe doivent urgemment tirer les conclusions des événements tragiques de Bruxelles et de ceux survenus dans d’autres villes des Etats membres, qui sont aussi la conséquence de défaillances et lacunes aux niveaux national, international et de l’Union européenne. La coordination dans la Région de Bruxelles-Capitale n’a pas été suffisamment opérationnelle pour être compatible avec les besoins modernes en matière de sécurité et doit donc être profondément réformée.
6. L'Assemblée rappelle sa Résolution 2091 (2016) et exprime son inquiétude à propos de «l'approvisionnement» continu de combattants étrangers en provenance de pays européens. Elle note que, alors que la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni en fourniraient le plus grand nombre, la Belgique, le Danemark et la Suède ont les chiffres les plus élevés par habitant. Elle note également avec préoccupation que la Belgique est devenue une plaque tournante pour le recrutement de djihadistes et que la dégradation de la position de Daech au Proche-Orient pourrait engendrer une intensification du recrutement de djihadistes et des activités terroristes sur le continent européen.
7. En raison du manque d'orientation politique pour assurer les nécessaires coordination et coopération entre les diverses – et parfois concurrentes – forces de l’ordre et de sécurité, certains quartiers de villes européennes sont devenus des zones de non-droit pour la police et un terrain fertile pour les extrémistes radicalisés et les terroristes.
8. Pendant trop longtemps, les responsables gouvernementaux et politiques en Europe ont fermé les yeux sur le manque d’intégration et la radicalisation croissante des jeunes, et ont ignoré ou sous-estimé l’ampleur de la menace terroriste. Nous devons à présent, de toute urgence, procéder à une évaluation réaliste de nos éventuelles failles de sécurité. Nos Etats ont le devoir de protéger la vie de leurs citoyens et les valeurs fondamentales de la démocratie. Nos sociétés doivent être prêtes à payer un prix nettement plus élevé pour la sécurité, tout en respectant le mieux possible les libertés individuelles, la vie privée et nos valeurs démocratiques.
9. Face aux toujours plus vastes réseaux terroristes internationaux, une réponse paneuropéenne coordonnée est plus que jamais nécessaire. Le terrorisme étant un phénomène international, les actions de lutte contre ce fléau doivent dépasser les limites de l’Europe et associer les pays tiers prêts à coopérer, notamment dans les régions voisines.
10. A la lumière de ce qui précède, l’Assemblée appelle les autorités compétentes des Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi que de ceux dont les parlements jouissent du statut de partenaire pour la démocratie et d’observateur, et d’autres Etats voisins à garantir:
10.1. à l’échelon national:
10.1.1. l’instauration du niveau le plus élevé possible de communication, de partage d’informations, de coordination et de coopération obligatoires entre les divers services spéciaux et forces de l’ordre, et, le cas échéant, la police régionale et municipale, y compris le partage des bases de données pertinentes;
10.1.2. la mise en œuvre de mesures efficaces pour prévenir et combattre la radicalisation; à cet égard, l’Assemblée souligne l’importance d’une éducation inclusive, civique et laïque, et renvoie aux mesures spécifiques dans ce domaine mises en avant dans sa Résolution 2091 (2016); elle fait également référence au Plan d’action du Conseil de l’Europe sur la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation conduisant au terrorisme, qui soutient les Etats membres dans l’élaboration de mesures appropriées dans le secteur public, en particulier dans les écoles et les prisons, et sur internet;
10.1.3. l’intégration de diverses communautés «fermées» dans leur environnement local afin de veiller à ce qu’elles ne deviennent pas des zones de non-droit ou des ghettos où les règles communes ne s’appliquent pas;
10.1.4. que des moyens appropriés soient accordés aux forces de l’ordre et aux services de sécurité et de renseignement pour prévenir et combattre la rhétorique inflammatoire et le discours de haine;
10.1.5. que les emblèmes et les symboles d’organisations terroristes reconnues internationalement soient interdits;
10.1.6. la conduite d’une étude approfondie des bonnes pratiques mises en œuvre dans les pays ayant une vaste expérience de la lutte contre le terrorisme, notamment en ce qui concerne la sécurité des bâtiments publics et des infrastructures de transport, ainsi que la cybersécurité;
10.2. à l’échelon international, l’instauration d’une communication, d’un partage d’informations, d’une coordination et d’une coopération renforcés, efficaces et opportuns entre les forces de l’ordre, les services spéciaux et les mécanismes internationaux compétents, dans le but de contrôler et, le cas échéant, de prévenir les déplacements des individus soupçonnés d’appartenir à des réseaux terroristes ou d’être impliqués dans des activités terroristes;
10.3. à l’échelon tant national qu’international, un partage aussi large que possible d’informations et d’expériences sur les causes, les facteurs contributifs, le déroulement, l’action des forces de l’ordre et la gestion postcrise des attaques terroristes en Europe;
10.4. la facilitation d’une coopération internationale renforcée, avec le même niveau de détermination contre toutes les entités terroristes, pour prévenir et éliminer leurs activités, et pourchasser et traduire en justice tous les groupes terroristes et leurs membres.
11. Au niveau de l'Union européenne, l'Assemblée souligne la nécessité d'une stratégie de sécurité européenne ambitieuse, y compris un meilleur échange d'informations entre les services de renseignement et une coopération plus étroite entre les autorités policières et judiciaires. A cet égard, l'Assemblée:
11.1. salue la récente approbation par le Parlement européen du système des dossiers passagers (PNR – Passager Name Record), qu’elle préconisait dans la Résolution 2031 (2015) «Attaques terroristes à Paris: ensemble, pour une réponse démocratique», et invite tous les acteurs concernés à étudier les moyens d’étendre l’application du PNR aux pays non membres de l’Union européenne;
11.2. plaide en faveur d’une unité européenne commune du renseignement pour la lutte contre le terrorisme.
12. L'Assemblée reconnaît qu'il existe actuellement un manque de coopération, de coordination et de partage des meilleures pratiques entre les parlementaires dans le contrôle de la défense et la politique de sécurité, et demande instamment aux parlements des Etats membres d’examiner les voies et moyens de résoudre ce problème, y compris la possibilité de recréer un organe interparlementaire et/ou de réactiver l’AESD (l’Assemblée européenne de sécurité et de défense, l’ancienne Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale (UEO)), pour combler le vide dans ce domaine.
13. Par ailleurs, l’Assemblée rappelle ses propositions formulées dans ses Résolutions 2090 (2016) «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l'Europe» et 2091 (2016) sur les combattants étrangers en Syrie et en Irak, qui restent hautement pertinentes, et appelle une nouvelle fois les autorités compétentes des Etats membres et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi que ceux dont les parlements jouissent du statut de partenaire pour la démocratie et d’observateur, et d’autres Etats voisins, à les mettre en œuvre en priorité.