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Résolution 2114 (2016)
La gestion des urgences de santé publique de portée internationale
1. L’Europe et d’autres continents
ont effectué des progrès significatifs dans le domaine de la santé
ces dernières décennies. Cependant, le monde a récemment été confronté
à trois situations d’urgence de portée internationale en matière
de santé publique (liées aux virus H1N1, Ebola et Zika) avec un
impact considérable sur des droits de l’homme essentiels, notamment
le droit à la vie et le droit au meilleur état de santé susceptible d’être
atteint. Dans un monde de plus en plus globalisé, les maladies sont
davantage susceptibles de se propager très rapidement.
2. Aujourd’hui, les menaces de sécurité sanitaire émanent d’au
moins six sources: l’émergence et la propagation de nouveaux microbes;
la mondialisation des déplacements et de l’approvisionnement en
denrées alimentaires; la multiplication des pathogènes pharmacorésistants;
la libération, intentionnelle ou non, de pathogènes; l’acquisition,
la fabrication et l’utilisation d’agents biologiques à des fins
terroristes; et les catastrophes naturelles entraînant des épidémies.
Ces grands risques sanitaires peuvent menacer la sécurité et la
stabilité nationales et internationales, peser sur les économies
et mettre les systèmes de santé sous pression.
3. Le monde est terriblement mal préparé à faire face aux crises
de santé publique de portée internationale. De nouvelles méthodes
de travail pour affronter ces crises sanitaires avant qu’elles ne
se produisent doivent être explorées de façon urgente. L’architecture
actuelle du système de santé mondial a besoin d’être renforcée en
ayant au sommet une Organisation mondiale de la santé (OMS) habilitée
à agir, bien gérée et responsable, et, à la base, des systèmes nationaux
de santé efficaces, équitables et résistants. Les décisions politiques doivent
être prises de façon à changer les systèmes de santé et à protéger
efficacement la santé des personnes.
4. Tous les décideurs politiques, à tous les niveaux (y compris
l’Assemblée parlementaire, l’Union européenne et l’OMS), doivent
s’accorder pour améliorer l’état de préparation aux situations d’urgence
au niveau international, y compris par des changements législatifs.
L’Assemblée parlementaire recommande donc aux Etats membres de travailler
ensemble avec ces décideurs politiques:
4.1. pour conférer à l’OMS le rôle de chef de file dans la
gestion des urgences de santé publique de portée internationale,
et veiller à ce qu’elle dispose des pouvoirs nécessaires et d’un
financement stable pour appliquer efficacement le Règlement sanitaire
international, suivre sa mise en œuvre, et renforcer son mécanisme
de réponse rapide;
4.2. pour assurer une coopération, une coordination et un suivi
efficaces entre l’OMS, l’Union européenne, d’autres agences spécialisées
des Nations Unies, le Centre européen de prévention et de contrôle
des maladies, et les organisations internationales non gouvernementales
pertinentes;
4.3. pour participer activement à l’Assemblée mondiale de la
santé afin de garantir la bonne gouvernance de l’OMS, tout en assurant
la promotion et le suivi des efforts de réforme, y compris la transparence
dans la composition des panels d’experts;
4.4. pour bâtir des systèmes de santé résilients au niveau
national, en mettant en place des stratégies de prévention et de
gestion des grands risques sanitaires publics prévoyant notamment
un système de détection précoce, la collecte de données précises,
la disponibilité d’outils de diagnostic et de traitement, et un
suivi continu en temps réel afin d’améliorer les résultats conformément
aux recommandations internationales;
4.5. pour mettre en place une structure financière pour la
gestion des risques pandémiques qui puisse débloquer des ressources
suffisantes en vue de répondre aux besoins prioritaires, et pour
apporter un soutien financier adéquat aux programmes de promotion
de la santé publique aux niveaux local, régional, national et international;
4.6. pour promouvoir l’engagement et la mobilisation de la
communauté en tant qu’éléments essentiels de tout plan d’action pour
traiter les urgences internationales de santé publique;
4.7. pour développer des partenariats entre le secteur public
et le secteur privé, en particulier en ce qui concerne la communication,
les systèmes de gestion de l’information, la logistique, l’approvisionnement
en fournitures et matériels médicaux nécessaires, et la mobilisation
des personnels de santé;
4.8. pour créer et collaborer avec les équipes sanitaires spéciales
internationales d’intervention rapide, constituées notamment de
spécialistes de la santé publique, de médecins, d’infirmières et d’autres
agents de santé communautaires, qui devraient être dûment protégés
contre les risques et avoir suivi une formation spécifique, en veillant
à ce qu’ils puissent être évacués en toute sécurité le cas échéant;
4.9. pour faciliter la mise à disposition des connaissances
scientifiques et des informations en temps voulu pour toutes les
parties prenantes, notamment grâce à un système ouvert de partage
de données des études épidémiologiques, génomiques, cliniques et
anthropologiques, entre les universitaires et les acteurs sur le
terrain;
4.10. pour promouvoir la recherche et le développement de médicaments,
de dispositifs de diagnostic et de vaccins, dans un esprit de solidarité,
avec une recherche appropriée prête à être testée lors d’une épidémie,
en vue de créer des procédures accélérées d’autorisation et de s’assurer
que les médicaments ou vaccins ainsi mis au point sont accessibles
et abordables, en particulier pour les patients vulnérables, en
faisant des réserves appropriées de médicaments et de traitements
selon des conditions strictes de sécurité;
4.11. en cas d’urgence de santé publique engendrée par une maladie
transmissible, pour concevoir et mettre en œuvre avec soin toute
mesure de contrôle de santé publique visant à diminuer les risques susceptibles
de porter atteinte aux droits et aux libertés individuels (mise
en quarantaine, éloignement social, contrôle aux frontières et limitation
des déplacements, par exemple);
4.12. à la suite d’une urgence de santé publique, pour prévoir
des mesures de réadaptation et d’aide psychologique afin d’éviter
que les survivants ne continuent d’être discriminés et que les patients handicapés
ne soient davantage stigmatisés.
5. L’Assemblée appelle les Etats membres à joindre leurs efforts
aux actions politiques et aux changements législatifs au niveau
mondial pour promouvoir la réduction à la source des risques zoonotiques potentiels,
notamment les maladies transmises par la nourriture et les maladies
animales graves.
6. L’Assemblée reconnaît le rôle de la Direction européenne de
la qualité du médicament et soins de santé (DEQM) du Conseil de
l’Europe en tant qu’organisation contribuant à la qualité des soins
de santé, ainsi qu’à la promotion et à la protection de la santé
humaine et animale. Elle invite ainsi ses Etats membres et ses organes
directeurs à examiner la possibilité d’impliquer la DEQM dans la
prévention et le traitement des menaces de santé publique internationales
et la conception de stratégies de santé publique appropriées, en particulier
dans le domaine des médicaments, des vaccins et des outils de diagnostic,
éventuellement avec l’aide d’un prélèvement obligatoire sur les
ventes et activités.
7. L’Assemblée appelle les Etats membres à souscrire à l’objectif
international fixé par les Nations Unies de verser 0,7 % du revenu
national brut au titre de l’aide publique au développement, en vue
de renforcer les systèmes de santé de base et de permettre aux pays
les plus touchés et les plus à risque de mieux résister aux futures
urgences de santé publique.