1. Introduction
1. On compte chaque année environ
1,25 millions de morts sur les routes du monde. Les accidents de
la circulation sont la huitième cause de décès au niveau mondial
et les tendances actuelles semblent indiquer qu’ils passeront au
cinquième rang des causes de décès à l’horizon 2030, soit, selon
les estimations, 2,4 millions de décès par an. Toutefois, le coût
humain des accidents de la circulation ne s’arrête pas au nombre de
tués puisque 20 à 50 autres millions de personnes s’en sortent avec
des dommages corporels non mortels mais les laissant bien souvent
handicapées
.
2. Les conséquences des accidents de la circulation pour les
victimes, leurs familles et la société dans son ensemble sont considérables.
Outre la douleur et la souffrance des familles, les besoins de santé
des personnes blessées dans ces accidents pèsent lourdement, en
termes de coût et de demande, sur des systèmes de santé qui s’efforcent
de fournir des services de qualité (traumatologie d’urgence ou autre)
tout en étant confrontés à d’autres priorités concurrentes
.
A moyen et long terme, les traumatismes dus aux accidents de la
circulation représentent une lourde charge financière pour les familles
concernées, en raison des coûts médicaux et de la perte de revenus
totale ou partielle subie dans les ménages. Pour les familles économiquement
défavorisées, le risque est de tomber dans la pauvreté. A cela s’ajoute
le coût d’une productivité réduite ou perdue pour la société dans
son ensemble, ce qui porte à des milliards d’euros par an le coût
des accidents de la route.
3. Le problème est loin d’épargner l’Europe et, bien que ce soit
le continent où l’on trouve quelques-uns des pays les plus performants
du monde en matière de sécurité routière, les accidents de la circulation
restent une question de santé publique majeure. D’après l’Organisation
mondiale de la santé (OMS), les accidents de la circulation causent
la mort prématurée de quelque 92 500 personnes chaque année dans
la Région européenne
et les deux tiers des décès
(66 %) se produisent dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire
. Ces accidents sont la principale cause
de décès chez les enfants et les jeunes adultes âgés de 5 à 29 ans.
La moitié ou presque des personnes qui perdent la vie sont des usagers
de la route vulnérables tels que les piétons, les cyclistes et les
motocyclistes. On estime également que 2,4 millions de personnes
sont si gravement blessées qu’elles doivent être hospitalisées chaque
année
. En outre, pour chaque
décès sur les routes européennes, on compte environ 4 blessés qui
souffrent d’une invalidité permanente, telles que des lésions au
cerveau ou à la moelle épinière, 8 blessés graves et 50 blessés
légers
.
4. Ces statistiques sont d’autant plus frappantes que des éléments
irréfutables montrent qu’une proportion considérable d’accidents
de la circulation pourraient être évités. A cette fin, les Nations
Unies et la Commission européenne ont récemment lancé des programmes
à long terme
. La
sécurité routière fait également partie des objectifs de développement
durable adoptés en septembre 2015. L’objectif 3 («Permettre à tous
de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout
âge») comprend, entre autres, la sécurité routière: «D’ici à 2020,
diminuer de moitié à l’échelle mondiale le nombre de décès et de
blessures dus à des accidents de la route.»
Le
but du présent rapport est de contribuer, au niveau du Conseil de
l’Europe, aux efforts déployés au niveau international et européen
en vue d’accroître la sécurité routière.
2. Sécurité routière: analyser le problème
5. La sécurité routière désigne
des méthodes et des mesures visant à réduire le risque qu’une personne qui
utilise le réseau routier soit tuée (décès)
ou
grièvement blessée (victime). Les usagers du réseau routier sont
non seulement des conducteurs mais aussi des piétons, des cyclistes,
des motocyclistes, leurs passagers et les passagers des transports
publics routiers, principalement les autobus et les tramways.
6. Il est essentiel, pour les responsables politiques, de pouvoir
disposer d’informations précises pour évaluer le problème posé et
élaborer des politiques appropriées afin d’y remédier. La collecte
des données joue un rôle important dans ce contexte. Le nombre total
d’accidents, de décès et de victimes sont des indicateurs importants
pour évaluer la sécurité routière, mais les responsables politiques
doivent aussi tenir compte d’autres paramètres lors de la collecte
des données, notamment le nombre total de véhicules. En effet, même
si le nombre de décès est très faible, le taux de mortalité peut
être très élevé si on le compare au nombre total de véhicules. Un
autre indicateur important est l’utilisation des véhicules: le nombre
de «décès par milliard de véhicules-kilomètres parcourus» indique
le nombre de décès par rapport au volume de la circulation tandis que
le nombre de «décès par milliard de passagers-kilomètres» tient
également compte de l’occupation des véhicules. Seul un nombre limité
de pays collectent ces données, bien qu’elles soient pourtant le
moyen le plus précis de mesurer les tendances en matière de sécurité
routière.
7. En outre, le taux de mortalité et le nombre de victimes peuvent
dépendre beaucoup du lieu et de la période du déplacement ainsi
que des moyens utilisés pour voyager et du profil du conducteur.
Ces facteurs doivent être pris en considération lorsque des données
sont collectées en vue de déterminer avec précision les facteurs
qui influent sur la sécurité routière
. En
ce qui concerne les moyens, par exemple, les statistiques indiquent
que les décès sont moins fréquents dans les transports publics que
dans une voiture privée. En outre, si la plupart des accidents avec
dommages corporels ont lieu dans des rues urbaines, la plupart des accidents
mortels semblent se produire sur des routes rurales. En 2013, dans
l’Union européenne, la proportion d’accidents mortels par type de
voie routière était de 8 % sur les autoroutes, de 38 % dans les
zones urbaines et de 56 % sur les routes rurales
,
des statistiques qui montrent que les autoroutes de l’Union européenne
sont les voies les plus sûres par rapport à la distance parcourue.
8. En ce qui concerne les périodes de déplacement, les statistiques
indiquent que les taux d’accident peuvent varier en fonction des
mois de l’année, des jours de la semaine et des heures de la journée.
Les taux d’accident les plus élevés sont enregistrés en août, juillet
et octobre. Les week-ends présentent les taux d’accidents les plus
élevés, et la plupart des accidents se produisent entre 16 heures
et 19 heures. En outre, le risque d’accident mortel augmente de
plus en plus à l’approche de la nuit. En 2012, un accident sur 125
qui se sont produits entre 4 heures du matin et 18 heures a été
mortel, le risque de mortalité passant de 1 à 55 entre 22 heures
et 4 heures du matin
. Ces statistiques
montrent que les accidents sont plus nombreux à certaines heures
en raison de la circulation et que les accidents qui se produisent
durant des heures tardives présentent un risque particulier
,
très probablement dû, entre autres, à la consommation d’alcool et
à la fatigue.
9. Le sexe et l’âge sont également des facteurs qui comptent
dans le taux d’accidents et les statistiques de mortalité. Les hommes
sont non seulement responsables d’un plus grand nombre de collisions
mais leur première collision survient plus tôt dans leur carrière
de conducteur. Ils sont en outre plus fréquemment considérés comme
responsables de l’incident que les femmes. Les conductrices adoptent
généralement un comportement moins risqué au volant, respectent
davantage les limitations de vitesse et ont des attitudes plus positives
à l’égard des règlements et de la sécurité routière. Le taux de
mortalité est d’environ 70 % pour les conducteurs, contre seulement
35 % pour les conductrices
.
10. En outre, en 2013, près de 15 % des personnes tuées dans des
accidents de la circulation dans les pays de l’Union européenne
étaient âgés de 18 à 24 ans. Deux tiers des jeunes tués dans ces
accidents étaient des conducteurs, et deux tiers d’entre eux conduisaient
des automobiles (les autres étant des conducteurs de cyclomoteurs
et de motos)
.Concernant
les personnes âgées, le nombre de décès survenus dans le groupe d’âge
des plus de 65 ans est supérieur à 30 %, ce qui montre que la possibilité
de survivre à un accident de la route est considérablement réduite
pour les usagers de la route âgés
. Si l’on
tient compte des distances parcourues, le taux de mortalité des
conducteurs d’automobile est plus de cinq fois plus élevé pour les personnes
âgées de plus de 75 ans que la moyenne de tous les autres âges,
tandis que leur taux de blessures est deux fois plus élevé
.
3. Stratégies
visant à accroître la sécurité routière
11. L’OMS signale que de nombreux
pays de la Région européenne appliquent des stratégies visant à améliorer
la sécurité routière et ont ainsi abaissé systématiquement la mortalité
causée par les accidents de la circulation. En fait, les pays qui
investissent dans la sécurité routière depuis de nombreuses décennies démontrent
maintenant que des stratégies efficaces peuvent faire la différence
et sauver des milliers de vies humaines. Cependant, les progrès
sont inégaux et le fardeau des accidents de la circulation est inégal
dans la région européenne. En particulier, les taux de mortalité
imputables aux accidents de la circulation varient largement d’un
pays à l’autre et sont deux fois plus élevés dans les pays à faible
revenu et à revenu intermédiaire que dans les pays à revenu élevé
(15,1 décès pour 100 000 habitants, contre 6,3 décès pour 100 000)
.
Cette inégalité peut être également observée dans l’Union européenne
où les pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède)
affichent des taux de mortalité beaucoup plus bas que les pays baltes
(Estonie, Lettonie et Lituanie) et les pays de l’Europe de l’est.
On estime que le nombre de décès dus aux accidents de la circulation
dans l’Union européenne a chuté de 45 % entre 2004 et 2013.
3.1. Lois
sur la sécurité routière, mise en œuvre effective et sensibilisation
12. Améliorer le comportement des
usagers de la route en adoptant et en appliquant des lois sur la
sécurité routière s’est avéré un mécanisme efficace pour réduire
le nombre de décès et de blessures dus aux accidents de la circulation
.
Cependant, le Rapport de situation de l’OMS sur la sécurité routière
dans le monde indique que les lois visant à traiter des facteurs
comportementaux clés (vitesse dangereuse, conduite sous l’influence de
l’alcool et de la drogue, non-utilisation des casques de moto, non-utilisation
des ceintures de sécurité et des dispositifs de sécurité pour les
enfants et utilisation d’un téléphone portable pendant la conduite)
n’ont un impact positif que si elles sont appliquées et mises en
œuvre de façon appropriée
.
13. En outre, ces lois doivent être portées à l’attention du public
et adaptées aux différents contextes afin de maximiser leur efficacité.
Il faut pour cela des ressources adéquates et des campagnes de promotion dynamiques
pour sensibiliser la société et obtenir le soutien de l’opinion
publique. Il est important de garder à l’esprit que les campagnes
de publicité visant à modifier le comportement des usagers de la
route ne sont efficaces que lorsqu’elles sont associées à une stricte
application de la loi
.A
titre d’exemple, le pourcentage de personnes portant des ceintures
de sécurité à Ivanovo (Russie) est passé de 48 % en 2011 à 74 %
en 2012, à la suite d’un renforcement des contrôles policiers et
d’une campagne organisée sur les médias sociaux
.
14. Les chercheurs semblent s’accorder sur le fait que certaines
caractéristiques déterminantes doivent être prises en compte lors
de l’élaboration d’une campagne et qu’il faut notamment analyser
quels sont les comportements les plus risqués dans un contexte et
parmi un public donnés. En fait, l’efficacité d’une campagne repose
sur une analyse préalable du contexte, qui déterminera le ton et
le contenu du message et définira le public auquel il s’adresse.
La durée de la campagne est également importante et ne devrait pas dépasser
un mois afin d’être efficace. Les messages de la campagne doivent
être adaptés à la culture et au langage spécifiques du public visé
.
15. Outre les campagnes de sensibilisation, des stratégies à long
terme doivent être envisagées en vue d’inculquer aux enfants, dès
le plus jeune âge, un ensemble de connaissances, de compétences
et d’attitudes qui peuvent déterminer leur comportement futur au
volant. L’éducation à la sécurité routière (ESR) doit être encouragée
et faire partie intégrante de l’enseignement scolaire.
3.2. La
distraction au volant
16. Selon les estimations actuelles,
la distraction de l’usager de la route est un facteur qui contribue
à hauteur de 10 % à 30 % aux accidents de la route dans l’Union
européenne
.
La distraction du conducteur est définie comme étant «le fait d’avoir
détourné son attention des activités indispensables à une conduite
sans danger au profit d’une autre activité»
. Au moins
quatre critères sont liés à la probabilité qu’un accident soit lié
à la distraction: la fréquence à laquelle l’événement se produit
(l’exposition), l’initiative, c’est-à-dire le degré de contrôle
du conducteur sur le déclenchement du scénario, le rapport entre
le scénario et l’attention requise par la conduite, et le niveau
global de la distraction.
17. Plus le scénario est distrayant, plus la probabilité qu’il
débouche sur un accident est grande. De nombreux scénarios peuvent
distraire le conducteur: incidents extérieurs, contemplation du
paysage, interactions avec des passagers, réglage des systèmes de
divertissement, écoute de morceaux de musique, utilisation du téléphone
portable, utilisation de systèmes de guidage routier, consommation
de produits alimentaires ou de boissons, réglage des commandes du
véhicule, objets en mouvement dans le véhicule, tabagisme. Tous
ces facteurs peuvent entraîner une distraction physique, visuelle,
auditive ou cognitive.
18. Aux Etats-Unis, écrire des textos tout en conduisant provoque
près de 25 % des accidents de voiture. Un conducteur qui écrit des
textos est 23 fois plus susceptible de provoquer un accident: l’on
estime que cette pratique équivaut à conduire à l’aveugle pendant
cinq secondes
. Les kits «mains libres» entraînent
une diminution de l’aptitude à conduire similaire à celles des téléphones
portables
. C’est l’accroissement de la charge de
travail cognitive due à la tenue d’une conversation téléphonique
et non l’usage des mains qui augmente le risque
.
La règle d’or «moteur allumé, téléphone éteint» doit être appliquée
si l’on veut éviter d’être un danger pour les autres usagers de
la route
.
19. Une interface homme-machine bien conçue est un facteur déterminant
pour les futures mesures de sécurité routière. A l’évidence, de
nombreuses nouvelles technologies auront une grande incidence sur
le niveau de distraction (augmentation ou réduction) des conducteurs
de véhicules à moteur. Les technologies les plus prometteuses sont
la reconnaissance vocale, la biométrie, l’affichage tête haute,
l’intelligence artificielle, les systèmes d’alerte de collision
et l’automatisation des véhicules.
3.3. La
vitesse, la maladie, la fatigue, l’usage de médicaments, l’alcool
et la drogue
20. On sait qu’il existe une relation
directe entre la vitesse et les décès sur la route. Une variation
de la vitesse moyenne de 1 km/h se traduit par une variation du
nombre d’accidents se situant entre 2 % pour une route où la vitesse
est limitée à 120 km/h et 4 % pour une route où elle est limitée
à 50 km/h
et
une augmentation de 4 % à 5 % des décès
. Ce phénomène est particulièrement
dangereux pour les piétons, les cyclistes et les motocyclistes.
En zone urbaine, la vitesse devrait être limitée à 50 km/h. Cependant,
dans certaines zones (par exemple à proximité des écoles), elle
devrait être limitée à 30 km/h. Adapter la vitesse de conduite aux
circonstances et compenser l’erreur humaine par des vitesses limitées
est le principal moyen de contrôler le risque d’accident. L’éducation
du conducteur et la technologie sont très utiles pour favoriser
le respect des limitations de vitesse afin de réduire les accidents
et les blessures liés à la vitesse. Les limitations de vitesse doivent
être crédibles si l’on veut encourager les conducteurs à les respecter.
Elles doivent tenir compte de la route, du conducteur, du véhicule,
des interactions avec les usagers de la route, des conditions météorologiques,
des conditions de circulation
.
Il n’est pas possible de résoudre le problème uniquement en imposant
des amendes. Pour obtenir un véritable impact à long terme, ces
mesures doivent s’accompagner de campagnes de sensibilisation intenses.
21. Certains états et maladies sont dangereux pour la conduite,
notamment l’épilepsie, les troubles visuels, l’apnée du sommeil
et d’autres troubles du sommeil. Il est important que les professionnels
de la santé sensibilisent les patients qui souffrent de ces maladies
aux risques de la conduite. Il faut également que le système de
santé, notamment les services de médecine du travail
, communique avec les autorités responsables
des transports qui délivrent les permis de conduire, afin que les
visites médicales soient plus fréquentes qu’elles ne le sont actuellement
(intervalles de plusieurs années).
22. La fatigue peut être due au manque de sommeil ou à un sommeil
de mauvaise qualité. Ces deux facteurs entraînent une dégradation
de l’aptitude à conduire et contribuent dans une large proportion
aux accidents de la route (environ 10 %-20 %)
. Les
conducteurs professionnels sont la principale cible des campagnes
parce qu’ils sont exposés à la conduite prolongée, qui peut augmenter
leur fatigue, surtout lorsqu’ils ne prennent pas de pauses suffisantes.
Il conviendrait de légiférer pour imposer des horaires de travail
et de repos stricts, et les véhicules devraient être équipés de
dispositifs qui détectent la diminution de la vigilance du conducteur
due à la fatigue. Des campagnes de sensibilisation et une éducation
sur la nécessité de prendre du repos sont également nécessaires.
23. De nombreux médicaments, notamment les médicaments psychotropes,
mais aussi d’autres qui sont largement utilisés comme les médicaments
antiallergiques ou antalgiques, ont une influence sur l’aptitude
à la conduite. Il devrait être obligatoire d’expliquer leurs effets
secondaires éventuels sur la conduite sur les notices des médicaments,
voire sur leur emballage extérieur.
24. L’alcool reste la principale substance mettant en danger la
vie des usagers de la route en Europe. Environ 25 % des décès dus
aux accidents de la circulation dans cette région sont liés à l’alcool
. Même avec des niveaux
inférieurs à 0,5 g/l, la vigilance, les temps de réaction et la
détection visuelle commencent à se dégrader. Pourtant, les usagers
pensent généralement qu’ils sont encore capables de conduire en
toute sécurité. La législation doit donc préciser les limites de
l’alcoolémie, soit 0,5 mg/dl en général, mais 0,2 mg/dl ou moins
pour les nouveaux conducteurs. Cela doit s’accompagner de tests
aléatoires et plus rigoureux pour détecter la consommation de drogue
et d’alcool, ainsi que de l’installation d’antidémarreurs avec éthylomètre.
25. L’usage de drogues et de médicaments au volant, qui peuvent
éventuellement être associés à l’alcool, est devenu un enjeu majeur
pour les responsables politiques, parce que la façon dont l’utilisation
de substances psychoactives autres que l’alcool peut dégrader l’aptitude
à conduire n’est pas encore bien connue
.
C’est pourquoi il faudrait mettre en place des tests de dépistage
de drogue pour détecter les conducteurs qui sont sous son emprise.
3.4. Des
infrastructures routières et des véhicules plus sûrs
26. Même le conducteur le mieux
formé et le plus conscient peut être à la merci de l’état de la
route, sachant que les infrastructures matérielles telles que le
revêtement routier, les séparateurs ainsi que l’installation et l’entretien
d’équipements d’orientation du trafic routier sont des éléments
essentiels dans la réduction des accidents. En outre, les améliorations
technologiques présentes dans les véhicules automobiles ont un rôle important
dans la prévention et la réduction des conséquences en cas d’accident
pour faire en sorte que, lors d’une collision, la force d’impact
reste inférieure au seuil susceptible d’entraîner la mort ou des
blessures graves.
27. Les zones piétonnes ainsi que les barrières qui séparent les
voitures des vélos et de la circulation venant en sens inverse sont
essentielles. Une meilleure conception des routes, une meilleure
signalisation et l’utilisation de barrières de protection telles
que les barrières de protection en béton extrêmement résistantes qui
sont installées au centre et sur les côtés des routes peuvent réduire
le nombre de personnes qui meurent sur les accotements des routes.
Le passage à des systèmes de péage électronique peut réduire de
30 % les accidents d’autoroute qui se produisent à proximité des
péages
. Les ralentisseurs, les
feux de signalisation avec compte à rebours et les zones de ralentissement
autour des écoles sont autant de moyens de diminuer le nombre de
décès chaque année.
28. Les voitures d’aujourd’hui n’ont jamais été aussi sûres. De
fait, des études estiment que 2 % seulement des accidents sont causés
par des pannes. Les équipements de sécurité active et passive présents
dans les voitures d’aujourd’hui, tels que les systèmes électroniques
de contrôle de la stabilité, les rappels de bouclage de la ceinture
de sécurité (pour le siège du conducteur), l’assistance au freinage
d’urgence (ABS), l’adaptation intelligente de la vitesse, les antidémarreurs
avec éthylomètre, les systèmes de prévention des collisions, les régulateurs
de vitesse, les systèmes de détection de déviation de trajectoire,
la détection de piétons, la détection de crevaison, etc. empêchent
de nombreux accidents et décès.
29. En outre, l’utilisation de la technologie de surveillance
à l’intérieur du véhicule augmente rapidement en Europe et sera
peut-être finalement la technologie de référence sur tous les véhicules
. Elle peut en effet améliorer
sensiblement la qualité de la conduite et réduire les taux d’accident
et de mortalité. Les futurs véhicules devraient éviter au conducteur
d’être saturé ou distrait par des tableaux de bord affichant des informations
superflues et être à même de remplacer le conducteur si celui-ci
perd le contrôle. Les limitations de vitesse variables basées sur
des mesures automatiques de la densité du trafic ont également permis d’améliorer
la circulation et réduit le taux de collision.
3.5. Des
soins de qualité dispensés aux victimes après un accident
30. Afin d’augmenter le taux de
survie des accidentés de la route, il est essentiel de pouvoir compter
sur des secours d’urgence appropriés (y compris la sécurisation
du lieu de l’accident, les premiers secours fournis par de simples
citoyens présents sur place
et
le transport rapide à l’hôpital), de prendre en charge le traitement et
la réadaptation de longue durée des victimes d’accident, de concevoir
des systèmes de soins pré-hospitaliers rapides, notamment l’extraction
sécurisée des victimes, la mise en œuvre d’un numéro de téléphone
unique à l’échelon national (et/ou européen) en cas d’urgence et
une stratégie d’intervention coordonnée, et d’encourager la recherche-développement
en vue d’améliorer les interventions effectuées après un accident.
Il est également fondamental de proposer des systèmes efficaces
de traumatologie en appliquant les bonnes pratiques existantes et
d’évaluer la qualité des soins par le biais de programmes d’assurance
qualité. Il faut aussi assurer une rééducation précoce et offrir
un soutien aux patients blessés et aux personnes endeuillées par
des accidents de la circulation, afin de réduire autant que possible
les traumatismes physique et psychologique des victimes.
4. Lier
la sécurité routière à d’autres objectifs de santé publique
31. Le transport routier a d’autres
effets sur la santé que ceux qui sont liés aux accidents de la route,
tels que les maladies respiratoires, les maladies liées au manque
d’activité physique et les conséquences du changement climatique.
Selon l’OMS, la sédentarité accroît la mortalité, double le risque
de maladies cardiovasculaires, de diabète et d’obésité, et augmente
les risques de cancer du côlon, d’hypertension artérielle, d’ostéoporose,
de troubles lipidiques, de dépression et d’anxiété. L’inactivité
physique est désormais considérée comme le quatrième facteur de
risque de mortalité dans le monde. Les personnes physiquement actives
présentent un risque moins élevé (de 20 % à 30 %) de décès prématuré.
L’OMS recommande un niveau de 150 minutes d’activité d’intensité
modérée par semaine, ce qui peut inclure des activités quotidiennes
comme la marche ou le vélo pour aller travailler ou faire des courses.
32. Il est donc essentiel d’adopter des politiques favorisant
l’utilisation de moyens de transport alternatifs qui encouragent
l’activité physique, tels que la marche, le cyclisme et les transports
publics. Elles devraient aller de pair avec des politiques qui protègent
les marcheurs et les cyclistes, par exemple en introduisant des mesures
d’urbanisme favorisant et protégeant les cyclistes et les piétons
vulnérables, y compris des rétroviseurs éliminant les angles morts,
qui ont été rendus obligatoires dans l’Union européenne. Les piétons et
les cyclistes devraient également se voir imposer certaines obligations.
L’engagement des autorités locales chargées d’appliquer la législation
est essentiel si l’on veut améliorer la sécurité routière pour les
utilisateurs vulnérables.
33. Les statistiques relatives aux maladies imputables aux accidents
de la route et à la pollution atmosphérique due aux véhicules indiquent
que les décès liés à l’utilisation du transport routier motorisé dépassent
ceux résultant de maladies telles que le VIH, la tuberculose, le
diabète ou le paludisme
. Ces données suggèrent fortement
que le passage à une mobilité urbaine plus «verte» et plus durable
devrait être hautement prioritaire lorsqu’on élabore des stratégies
de sécurité routière, non seulement sur le plan de l’environnement,
mais aussi sous l’angle de la santé publique. En outre, des initiatives
comme le covoiturage doivent être formalisées et soutenues par les
gouvernements, car elles contribuent à réduire les émissions de carbone
et les embouteillages. Un dispositif d’analyse des tests d’émissions
polluantes des véhicules doit être mis en place. Les effets de l’accumulation
de métaux lourds issus du trafic autoroutier sur les cultures environnantes,
y compris l’impact environnemental, doivent être évalués afin de
promouvoir des technologies de transport «propres».
5. Conclusions
34. Il est important, pour identifier
les forces et les faiblesses en matière de sécurité routière et
planifier des stratégies nationales en conséquence, d’améliorer
la qualité de la collecte de données au niveau local et national,
ainsi qu’au niveau européen et international. Pour y parvenir, l’Union
européenne a mis en place un programme de données complet, auquel
toutes les parties prenantes devraient avoir accès. Les responsables de
l’élaboration des politiques devraient examiner non seulement le
nombre total d’accidents, de décès et de blessés, mais aussi d’autres
paramètres, notamment le nombre total de véhicules et l’usage du
véhicule, ainsi que des indicateurs tels que le lieu et la période
du déplacement, les moyens utilisés pour se déplacer et l’âge du
conducteur. Dans ce contexte, l’un des principaux objectifs de toute
politique concernant la sécurité routière devrait être de promouvoir
les transports publics, pas seulement pour des raisons de sécurité,
mais aussi en raison de leur efficience et de leur caractère durable.
Il faudrait en outre mettre en place un système de «permis de conduire
à l’essai» pour les jeunes conducteurs
,
tandis que les personnes d’un certain âge devraient être soumises
à des examens de conduite périodiques et à des examens médicaux
destinés à évaluer si elles sont toujours aptes à conduire.
35. Les stratégies visant à accroître la sécurité devraient s’appuyer
sur des textes de lois complets visant les principaux facteurs de
risque comportementaux (vitesse dangereuse, conduite sous l’influence
de l’alcool ou de la drogue, non-utilisation du casque de moto,
de la ceinture de sécurité et des sièges pour enfants pendant la
conduite) et prévoir une application effective de la législation.
Pour prévenir les comportements à risque, l’éducation à la sécurité
routière devrait être intégrée aux programmes scolaires dès le plus
jeune âge et mobiliser toutes les parties prenantes. Il faudrait
également organiser des campagnes de sensibilisation bien conçues,
car il est prouvé qu’elles débouchent sur des résultats positifs
et permettent de réduire le nombre de blessures et de décès dus
aux accidents de la circulation.
36. Il conviendrait également d’étudier les nouveaux facteurs
de risque comportementaux tels que l’usage de drogues et l’utilisation
inappropriée des téléphones portables, notamment la rédaction de
textos au volant, ainsi que d’autres comportements détournant l’attention
du conducteur
. En
fait, la distraction au volant est une menace grave et croissante
pour la sécurité routière. En effet, vu le nombre croissant de personnes
qui utilisent des téléphones portable pendant la conduite et le
rapide développement de nouveaux systèmes de communication embarqués
dans les véhicules, ce problème risque fort de s’aggraver au niveau
mondial dans les années à venir.
37. La conception d’infrastructures routières plus sûres (par
exemple trottoirs et passages sur les routes utilisées par les piétons,
ralentisseurs, feux pour piétons à compte à rebours, zones de ralentissement
autour des écoles, séparation des flux de circulation rapide et
des flux de cyclistes et de piétons), l’amélioration des dispositifs
de sécurité des véhicules (par exemple systèmes de freinage antiblocage
obligatoires, rappels de bouclage des ceintures de sécurité, installation
de coussins gonflables) et les soins dispensés aux victimes après
un accident de la circulation, sont des interventions tout aussi
importantes pour accroître la sécurité routière. En outre, les politiques
visant à favoriser l’utilisation de modes de déplacement non motorisés
tels que le vélo et la marche devraient être encouragées.
38. Les gouvernements devraient encourager la création de partenariats
multisectoriels et la désignation d’organismes chefs de file ayant
la capacité de mettre en place des programmes complets de collecte
de données sur la sécurité routière afin d’élaborer des stratégies,
des plans et des objectifs nationaux en matière de sécurité routière,
de piloter et de suivre leur mise en œuvre et de veiller à leur
efficacité. L’objectif d’un système de transport amélioré devrait
être de fournir durablement des moyens de transport accessibles, abordables,
sûrs et rapides. L’aménagement urbain devrait prendre en compte
les besoins de tous les usagers de la route.
39. Il faudrait évaluer précisément l’incidence des accidents
de la route sur l’ensemble de la société afin que les responsables
politiques allouent des budgets suffisants aux mesures de sécurité
routière (selon les Nations Unies, 10 % du budget prévu pour les
infrastructures routières devrait être investi dans la sécurité)
et que des normes minimales puissent être établies. Dans tous les
pays, les gouvernements nationaux et les autorités locales et régionales
doivent soutenir des projets pilotes et l’application des normes
ISO 39001 aux systèmes de gestion de la sécurité routière.
40. La sécurité routière est une responsabilité partagée entre
les différents ministères, les intervenants et les autorités, du
niveau local au niveau international. Toute politique de sécurité
routière doit avoir une approche globale, compte tenu de l'importance
de la coordination nécessaire entre tous les acteurs impliqués, y
compris les pouvoirs publics, les entreprises et les usagers de
la route.