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Résolution 2128 (2016)

La violence envers les migrants

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 24 juin 2016 (27e séance) (voir Doc. 14066, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteur: M. Andrea Rigoni). Texte adopté par l’Assemblée le 24 juin 2016 (27e séance).

1. L’Assemblée parlementaire est vivement préoccupée par l’intensification des violences à l’encontre des migrants en Europe, qui revêt des formes comme les agressions physiques, l’exploitation par le travail, la traite, le harcèlement et les abus sexuels, la discrimination et le discours de haine.
2. Malheureusement, très peu de gouvernements européens prennent des mesures actives de lutte contre les causes premières des violences à l’égard des migrants. En outre, au cours de la récente crise économique, les partis et les médias populistes ont largement diffusé des propos hostiles aux migrants, provoquant stigmatisation, intolérance et xénophobie. L’instauration de politiques de plus en plus restrictives envers les migrants et de mesures plus dures contre l’immigration clandestine aggrave encore la situation.
3. L'Assemblée est profondément inquiète du sort des femmes et des enfants migrants, qui sont particulièrement vulnérables aux différentes formes de violences et d’abus, y compris sexuels, surtout dans les centres de rétention ou dans les lieux à forte concentration de migrants. Ces groupes devraient bénéficier d’une protection spéciale de la part des pays d’accueil, par le biais d’installations pour les accueillir en toute sécurité ainsi que d’alternatives à leur rétention.
4. L’Assemblée estime que l’ouverture de voies régulières de migration, la lutte contre l’exploitation des migrants sur le marché du travail, la promotion d’une image positive des migrants dans les déclarations politiques et dans les médias, ainsi que l’élaboration de programmes d’intégration sociale constituent les moyens les plus efficaces pour combattre la violence à l’encontre des migrants en Europe.
5. L’Assemblée appelle de ce fait tous les Etats membres du Conseil de l'Europe à placer la protection des droits de l'homme des migrants en tête des priorités de la gestion des flux migratoires et à combattre le racisme, la discrimination et le discours de haine, car ils engendrent des violences contre les migrants. Elle demande tout particulièrement aux Etats membres qui ne l’ont pas encore fait:
5.1. par des mesures législatives:
5.1.1. de s’assurer que les auteurs de violences envers les migrants sont poursuivis quel que soit le statut des victimes;
5.1.2. d'envisager la possibilité de réexaminer et de modifier la législation nationale pour garantir que l’immigration clandestine ne constitue pas une infraction pénale;
5.1.3. de renforcer la législation nationale contre le discours de haine, la discrimination et la xénophobie, et, notamment, de veiller à ce que toute forme d’incitation à la discrimination raciale soit érigée en infraction pénale;
5.1.4. d’amender la législation nationale pour accorder à tous les migrants victimes de violences une égalité d’accès à la justice;
5.1.5. de modifier la législation pénale nationale, afin que les «crimes de haine» soient poursuivis au titre d’infraction pénale spécifique;
5.1.6. d’inscrire dans le droit du travail national des dispositions spéciales pour sanctionner les employeurs qui ont commis des actes de violence ou des agissements illicites à l’encontre de migrants, y compris des refus de verser le salaire ou des licenciements abusifs;
5.1.7. de ratifier la Convention internationale de 1990 des Nations Unies sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille;
5.1.8. de ratifier et de pleinement mettre en œuvre la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210, «Convention d’Istanbul») pour que la protection des femmes migrantes soit garantie dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe;
5.1.9. de ratifier et de pleinement mettre en œuvre la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (STCE no 201, «Convention de Lanzarote») afin d’assurer la protection des enfants migrants contre de tels abus;
5.2. par une protection et une assistance aux victimes de violences:
5.2.1. de mettre en place des mesures pour garantir la sécurité des migrants pendant les procédures pénales;
5.2.2. d’assurer les soins nécessaires aux victimes (traitements médicaux, assistance psychologique et sociale) sans établir de discrimination en raison du statut de migrant des victimes et en accordant une attention particulière aux groupes vulnérables (femmes, enfants et personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT));
5.2.3. de garantir que les personnes victimes de violences dans les centres de rétention ont accès à l'aide judiciaire et peuvent déposer plainte;
5.2.4. de promouvoir des solutions alternatives à la rétention de migrants, notamment pour les enfants;
5.2.5. d’informer les migrants victimes de violences de leurs droits et des recours disponibles, et de diffuser des informations sur les services sociaux par le biais de services d'assistance ou de brochures, par exemple, de manière à ce qu’ils puissent bénéficier d’une assistance;
5.3. par la prévention de la violence grâce à l’information, à la sensibilisation et à l’intégration:
5.3.1. en collaboration avec les organisations non gouvernementales, de collecter, d’analyser et de systématiser les informations sur les violences commises à l’encontre des migrants, et de les partager avec toutes les institutions concernées;
5.3.2. d’offrir aux agents des forces de l’ordre, aux autorités judiciaires et aux procureurs une formation sur la manière de traiter les crimes de haine et d’assister les victimes;
5.3.3. de soutenir les activités des organisations non gouvernementales qui s’occupent des migrants victimes de violences et favorisent leur intégration;
5.3.4. de sensibiliser les migrants et les collectivités locales d’accueil aux traditions culturelles et religieuses, promouvant ainsi la tolérance et l’intégration sociale des migrants.
6. L’Assemblée estime que les collectivités locales jouent un rôle important dans la prévention des violences à l’encontre des migrants. Par conséquent, les Etats membres du Conseil de l'Europe sont invités à doter les autorités locales des compétences nécessaires pour promouvoir l’intégration des migrants par des programmes de logement, d’intégration sociale et de création d’emplois.