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Résolution 2146 (2017)
Renforcer le dialogue social en tant qu’instrument de stabilité et de réduction des inégalités sociales et économiques
1. Dans l’économie mondialisée de
ce début de XXIe siècle, les partenaires
sociaux – syndicats, fédérations d’employeurs et pouvoirs publics
– évoluent dans un environnement complexe. Les syndicats, en particulier,
sont censés représenter les intérêts des travailleurs face à des
courants divers et souvent contradictoires qui ont fortement modifié
leur rôle dans le dialogue social, sur le plan tant national qu’européen, et
dans la société d’une manière générale.
2. Comme d’autres institutions du marché du travail, les syndicats
doivent s’adapter aux évolutions rapides du monde du travail, qui
exigent sans cesse des travailleurs de tous niveaux de nouvelles
compétences. Ils doivent aussi répondre à la diminution du nombre
d’adhérents au sein de leurs organisations et s’adapter au développement
des technologies de l’information et des médias sociaux, de plus
en plus utilisés comme vecteurs de communication, y compris dans
les relations professionnelles. Dans plusieurs pays, le champ d’action
et l’influence des syndicats, ainsi que la couverture des négociations
collectives, ont diminué progressivement en raison des restrictions
juridiques appliquées aux droits collectifs du travail dans le cadre des
programmes d’austérité, ainsi que l’a déjà souligné l’Assemblée
parlementaire dans la Résolution
2033 (2015) sur la protection du droit de négociation
collective, y compris le droit de grève.
3. L’Assemblée s’inquiète des conséquences néfastes de certaines
de ces tendances sur les syndicats et le dialogue social. Elle craint
que la diminution de l’importance des syndicats et l’évolution de
leur rôle ne contribuent à accroître les inégalités sociales et
économiques, qui ne cessent déjà de se creuser. Les syndicats eux-mêmes
devraient faire preuve de prudence et veiller avec le plus grand
soin à toujours agir d’une manière démocratique, et à éviter de
prendre des décisions contradictoires, par exemple lorsqu’ils agissent eux-mêmes
en tant qu’acteurs économiques et investisseurs.
4. Tandis que les droits collectifs qu’ils défendent, notamment
le droit de grève, devraient être protégés comme des éléments fondamentaux
du modèle social européen, les syndicats devraient agir de manière responsable
et accepter de rendre des comptes à tout moment. Les restrictions
juridiques aux modes d’action des syndicats, tels que les droits
de négociation collective et de grève, ne devraient être appliquées
que dans le strict respect des normes internationales définies par
l’Organisation internationale du travail (OIT), mais les syndicats
devraient toujours utiliser leur pouvoir discrétionnaire et garder
à l’esprit leurs responsabilités sociales en circonscrivant autant
que possible les mouvements de grève. Le consentement interne et
la confiance mutuelle entre les partenaires sociaux sur le fait
que leurs intérêts respectifs soient entendus et respectés constituent
un prérequis pour un dialogue social fructueux.
5. Convaincue que la nécessité d’un dialogue social solide –
reposant sur un bon équilibre des pouvoirs, un dialogue ouvert et
fondé sur la confiance et le plein respect des normes internationales
– devrait être reconnue et que sa mise en œuvre devrait être soutenue
par tous les partenaires sociaux, l’Assemblée appelle les États
membres:
5.1. à ratifier et à mettre
pleinement en œuvre la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) et
le Protocole additionnel à la Charte sociale européenne prévoyant
un système de réclamations collectives (STE no 158),
s’ils ne l’ont pas encore fait, et à élaborer une législation nationale
du travail conforme à ces normes ou à réviser celle en place afin
de la mettre en conformité;
5.2. à promouvoir et à soutenir les relations industrielles
et la couverture des négociations collectives grâce à des cadres
juridiques adaptés et à une action politique constructive en tant
que moyens de garantir la stabilité des processus économiques et
de diminuer les inégalités sociales et économiques;
5.3. à renoncer le cas échéant aux mesures qui affaiblissent
le dialogue social, notamment en rétablissant les institutions de
dialogue social lorsqu’elles ont été supprimées, afin de remettre
le dialogue social national et les autres droits collectifs en conformité
avec le Pacte international relatif aux droits sociaux et économiques,
les conventions de l’OIT, la jurisprudence de la Cour européenne
des droits de l’homme et la Charte sociale européenne;
5.4. à maintenir les limitations juridiques au droit de négociation
collective et au droit de grève au strict minimum, ainsi que le
prévoient les normes reconnues en Europe et au sein de l’OIT;
5.5. à sensibiliser tous les partenaires sociaux à leur rôle
spécifique, à la nécessité de faire preuve de responsabilité et
de rendre des comptes dans le dialogue social et l’action syndicale,
ainsi qu’à la nécessité de respecter les droits sociaux individuels
et collectifs, et les processus démocratiques en ce qui concerne
l’action collective;
5.6. à travailler en coopération étroite pour concevoir des
institutions et des politiques du marché du travail modernes, qui
soient à même de s’adapter en permanence aux changements socio-économiques,
et à veiller à ce que les partenaires sociaux s’attaquent conjointement
aux grands enjeux, en particulier la stabilité et la croissance
économiques, les tendances sociales et technologiques, une répartition
plus équitable des revenus et la cohésion sociale au sein des États
membres du Conseil de l’Europe.
6. Enfin, l’Assemblée appelle l’OIT à mener une évaluation comparative
de la mise en œuvre de ses dispositions fondamentales de législation
du travail relatives au droit de grève, portant notamment sur les conditions
d’exercice du droit de grève, les services essentiels et le service
minimum à préserver, et le droit individuel au travail, à la lumière
des dernières dispositions adoptées en matière de politiques et
de législation du travail. L’Assemblée invite par ailleurs les États
parties aux conventions de l’OIT et les membres des organes de suivi
de l’OIT à soutenir une telle initiative.