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Résolution 2146 (2017)

Renforcer le dialogue social en tant qu’instrument de stabilité et de réduction des inégalités sociales et économiques

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 25 janvier 2017 (6e séance) (voir Doc. 14216, rapport de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, rapporteur: M. Ögmundur Jónasson). Texte adopté par l’Assemblée le 25 janvier 2017 (6e séance).

1. Dans l’économie mondialisée de ce début de XXIe siècle, les partenaires sociaux – syndicats, fédérations d’employeurs et pouvoirs publics – évoluent dans un environnement complexe. Les syndicats, en particulier, sont censés représenter les intérêts des travailleurs face à des courants divers et souvent contradictoires qui ont fortement modifié leur rôle dans le dialogue social, sur le plan tant national qu’européen, et dans la société d’une manière générale.
2. Comme d’autres institutions du marché du travail, les syndicats doivent s’adapter aux évolutions rapides du monde du travail, qui exigent sans cesse des travailleurs de tous niveaux de nouvelles compétences. Ils doivent aussi répondre à la diminution du nombre d’adhérents au sein de leurs organisations et s’adapter au développement des technologies de l’information et des médias sociaux, de plus en plus utilisés comme vecteurs de communication, y compris dans les relations professionnelles. Dans plusieurs pays, le champ d’action et l’influence des syndicats, ainsi que la couverture des négociations collectives, ont diminué progressivement en raison des restrictions juridiques appliquées aux droits collectifs du travail dans le cadre des programmes d’austérité, ainsi que l’a déjà souligné l’Assemblée parlementaire dans la Résolution 2033 (2015) sur la protection du droit de négociation collective, y compris le droit de grève.
3. L’Assemblée s’inquiète des conséquences néfastes de certaines de ces tendances sur les syndicats et le dialogue social. Elle craint que la diminution de l’importance des syndicats et l’évolution de leur rôle ne contribuent à accroître les inégalités sociales et économiques, qui ne cessent déjà de se creuser. Les syndicats eux-mêmes devraient faire preuve de prudence et veiller avec le plus grand soin à toujours agir d’une manière démocratique, et à éviter de prendre des décisions contradictoires, par exemple lorsqu’ils agissent eux-mêmes en tant qu’acteurs économiques et investisseurs.
4. Tandis que les droits collectifs qu’ils défendent, notamment le droit de grève, devraient être protégés comme des éléments fondamentaux du modèle social européen, les syndicats devraient agir de manière responsable et accepter de rendre des comptes à tout moment. Les restrictions juridiques aux modes d’action des syndicats, tels que les droits de négociation collective et de grève, ne devraient être appliquées que dans le strict respect des normes internationales définies par l’Organisation internationale du travail (OIT), mais les syndicats devraient toujours utiliser leur pouvoir discrétionnaire et garder à l’esprit leurs responsabilités sociales en circonscrivant autant que possible les mouvements de grève. Le consentement interne et la confiance mutuelle entre les partenaires sociaux sur le fait que leurs intérêts respectifs soient entendus et respectés constituent un prérequis pour un dialogue social fructueux.
5. Convaincue que la nécessité d’un dialogue social solide – reposant sur un bon équilibre des pouvoirs, un dialogue ouvert et fondé sur la confiance et le plein respect des normes internationales – devrait être reconnue et que sa mise en œuvre devrait être soutenue par tous les partenaires sociaux, l’Assemblée appelle les États membres:
5.1. à ratifier et à mettre pleinement en œuvre la Charte sociale européenne (révisée) (STE no 163) et le Protocole additionnel à la Charte sociale européenne prévoyant un système de réclamations collectives (STE no 158), s’ils ne l’ont pas encore fait, et à élaborer une législation nationale du travail conforme à ces normes ou à réviser celle en place afin de la mettre en conformité;
5.2. à promouvoir et à soutenir les relations industrielles et la couverture des négociations collectives grâce à des cadres juridiques adaptés et à une action politique constructive en tant que moyens de garantir la stabilité des processus économiques et de diminuer les inégalités sociales et économiques;
5.3. à renoncer le cas échéant aux mesures qui affaiblissent le dialogue social, notamment en rétablissant les institutions de dialogue social lorsqu’elles ont été supprimées, afin de remettre le dialogue social national et les autres droits collectifs en conformité avec le Pacte international relatif aux droits sociaux et économiques, les conventions de l’OIT, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et la Charte sociale européenne;
5.4. à maintenir les limitations juridiques au droit de négociation collective et au droit de grève au strict minimum, ainsi que le prévoient les normes reconnues en Europe et au sein de l’OIT;
5.5. à sensibiliser tous les partenaires sociaux à leur rôle spécifique, à la nécessité de faire preuve de responsabilité et de rendre des comptes dans le dialogue social et l’action syndicale, ainsi qu’à la nécessité de respecter les droits sociaux individuels et collectifs, et les processus démocratiques en ce qui concerne l’action collective;
5.6. à travailler en coopération étroite pour concevoir des institutions et des politiques du marché du travail modernes, qui soient à même de s’adapter en permanence aux changements socio-économiques, et à veiller à ce que les partenaires sociaux s’attaquent conjointement aux grands enjeux, en particulier la stabilité et la croissance économiques, les tendances sociales et technologiques, une répartition plus équitable des revenus et la cohésion sociale au sein des États membres du Conseil de l’Europe.
6. Enfin, l’Assemblée appelle l’OIT à mener une évaluation comparative de la mise en œuvre de ses dispositions fondamentales de législation du travail relatives au droit de grève, portant notamment sur les conditions d’exercice du droit de grève, les services essentiels et le service minimum à préserver, et le droit individuel au travail, à la lumière des dernières dispositions adoptées en matière de politiques et de législation du travail. L’Assemblée invite par ailleurs les États parties aux conventions de l’OIT et les membres des organes de suivi de l’OIT à soutenir une telle initiative.