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Résolution 2175 (2017)
Les migrations, une chance à saisir pour le développement européen
1. Le développement économique de
l'Europe dépend de sa capacité à mieux utiliser les compétences
et les talents des personnes, et à promouvoir des technologies et
des entreprises innovantes. Dans un contexte de crise politique
et économique en Europe, tout doit être mis en œuvre pour construire
des sociétés cohésives permettant à chacun de leurs membres de participer
pleinement et activement à leur développement et à leur croissance
économique.
2. Le nombre de migrants, y compris les réfugiés et les migrants
économiques, a considérablement augmenté ces dernières années, représentant
un certain nombre de défis et d'opportunités pour l'Europe. L'absence
d'une politique migratoire coordonnée au niveau européen a favorisé
la montée des peurs irrationnelles au sein de la population européenne,
lesquelles ont ensuite été exploitées par certaines forces politiques
et certains médias qui ont présenté une image déformée de la migration,
qui serait une menace.
3. L'Assemblée parlementaire est vivement préoccupée par cette
approche négative des migrations. En fait, il existe un écart entre
la réalité de la situation économique et démographique de l'Europe
et la perception négative générale des conséquences des migrations.
Les pénuries de main-d'œuvre dans un certain nombre de secteurs,
notamment l'agriculture, la construction, l'hôtellerie, la restauration,
l'informatique et les services financiers, ainsi que le vieillissement
de la population dû à la fois à une augmentation de l'espérance
de vie et à de faibles taux de natalité sont autant de facteurs
qui entraînent une réduction significative de la part de la population
en âge de travailler et qui montrent que les migrations pourraient
être très bénéfiques pour l'Europe si seulement les mesures politiques
nécessaires étaient mises en œuvre.
4. Au cours de la dernière décennie, selon l’Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE), les migrants
ont représenté 70 % de l’augmentation de la main-d’œuvre en Europe. Ces
dernières années, ils ont représenté 15 % des nouvelles entrées
sur le marché du travail dans des domaines d’expertise à forte croissance,
tels que la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques. Dans
certains pays européens, la population n’a pu augmenter ces dernières
années que grâce aux afflux migratoires. De plus, les migrants apportent
de la diversité aux pays européens, contribuent aux échanges culturels et
ont un impact important sur les arts, le sport, la mode, les médias
et la gastronomie.
5. L’Assemblée estime qu’il est urgent de lutter contre la rhétorique
négative entourant les migrations et de porter à l’attention du
public la preuve économique de leurs avantages pour la société européenne.
Tous les acteurs publics et privés devraient participer à l’élaboration
de nouvelles politiques migratoires pour l’Europe, fondées sur des
données factuelles, réalistes et porteuses d'avenir, et centrées
sur son potentiel de développement.
6. L’Assemblée considère qu’il est nécessaire, pour tirer le
meilleur parti des migrations en Europe, d’éliminer un certain nombre
d’obstacles bureaucratiques et toutes les formes de discrimination
ouverte ou dissimulée envers les migrants, qui freinent sensiblement
leur intégration dans les sociétés d’accueil.
7. Elle considère également que, pour prendre l’avantage sur
la concurrence mondiale et attirer les meilleurs spécialistes, les
pays européens doivent renforcer la transparence sur le marché du
travail et créer davantage de voies légales et sûres de migration
vers l’Europe.
8. L'Assemblée souligne que, pour exploiter les avantages des
migrations, il faudrait mettre en œuvre des politiques bien conçues,
notamment au niveau local, qui favoriseraient la connaissance des
différentes cultures et traditions tout en intégrant les migrants
dans les sociétés d'accueil. Ces politiques permettraient de prévenir
les risques de conflits et de rompre avec l’image négative des migrants.
9. L'Assemblée est convaincue que, pour faciliter des migrations
mutuellement bénéfiques en Europe, les États membres devraient prendre
des mesures concrètes dans des domaines qui ont une incidence positive sur
ce processus. Par conséquent, elle recommande aux États membres:
9.1. d’améliorer la législation nationale:
9.1.1. en simplifiant les procédures de migration pour les travailleurs
qualifiés dont les compétences répondent aux besoins économiques
nationaux;
9.1.2. en élaborant des règlements clairs sur l'emploi des migrants
non qualifiés et des travailleurs saisonniers et domestiques, ainsi
qu'en offrant des perspectives d'emploi et en mettant en œuvre des
mesures d'intégration visant spécialement les migrants peu qualifiés
et peu instruits, et en garantissant que les migrants bénéficient
des mêmes conditions de travail et de rémunération que les ressortissants
nationaux pour un travail de valeur égale;
9.1.3. en raccourcissant la procédure d’asile et en envisageant
d’accorder aux demandeurs d’asile l’accès au marché du travail avant
même l’achèvement de la procédure;
9.1.4. en introduisant le droit de vote et de se présenter aux
élections locales pour tous les migrants réguliers qui ont résidé
au moins cinq ans dans le pays hôte;
9.1.5. en introduisant des dispositions pertinentes sanctionnant
la discrimination à l'égard des migrants;
9.2. de faciliter l'accès des migrants au marché du travail:
9.2.1. en élaborant des politiques et des plans d'action qui
favorisent l'inclusion des femmes migrantes dans le marché du travail
et répondent à leurs besoins spécifiques;
9.2.2. en améliorant les conditions d’accueil pour les étudiants
et les chercheurs les plus brillants issus de pays non européens,
et en leur proposant des offres d’emploi attrayantes;
9.2.3. en encourageant une coopération efficace entre les gouvernements
et les milieux d’affaires pour concevoir et financer les formations
professionnelles pour les migrants;
9.2.4. en soutenant les initiatives commerciales des migrants
en proposant des microcrédits;
9.2.5. en invitant des représentants des secteurs public et privé
ainsi que des syndicats et des organisations de migrants à participer
à la révision des politiques migratoires nationales;
9.3. de promouvoir des sociétés inclusives en créant les conditions
nécessaires à la participation pleine et active des migrants à tous
les domaines de la vie:
9.3.1. en promouvant des programmes
nationaux de régularisation ciblés en faveur des migrants irréguliers;
9.3.2. en encourageant et en soutenant financièrement des initiatives
locales, notamment des initiatives d’organisations de migrants visant
à améliorer la participation des migrants à la vie des communautés
locales;
9.3.3. en donnant à tous les migrants la possibilité d’accéder
gratuitement à des cours d'orientation civique dans le pays d’accueil;
9.3.4. en offrant aux migrants des possibilités d’apprentissage
des langues;
9.3.5. en veillant à ce que des cours de langue et d’éducation
à la citoyenneté soient organisés pour les demandeurs d’asile et
les réfugiés;
9.3.6. en élaborant des programmes éducatifs dans les écoles
pour favoriser la connaissance des différentes cultures, langues
et religions;
9.3.7. en garantissant l'accès à des services de santé adaptés
et abordables à l'ensemble des migrants, quel que soit leur statut
juridique;
9.3.8. en encourageant les migrants à participer activement aux
activités des partis politiques, des syndicats et des associations
de migrants et de diasporas;
9.3.9. en facilitant les processus de naturalisation des migrants
résidant dans le pays d’accueil depuis au moins cinq ans;
9.4. de coopérer pour créer un système européen qui faciliterait
la protection sociale de tous les travailleurs migrants et de leur
famille, qui protégerait les droits sociaux et économiques fondamentaux que
la Charte sociale européenne (STE no 35)
garantit et qui s’appuierait sur les normes du Code européen de
sécurité sociale (STE no 48) et de son
Protocole (STE no 48A).
10. L’Assemblée encourage le Conseil de l’Europe, l’Organisation
internationale pour les migrations, l’Organisation de coopération
et de développement économiques, et l’Union européenne à renforcer
leur coopération afin de promouvoir une image positive des migrants
en Europe en développant des activités communes dans les domaines
du développement humain, économique et social.