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Rapport | Doc. 14407 | 28 septembre 2017

Suivi de la Résolution 1903 (2012): la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l'intégrité des membres de l'Assemblée parlementaire

Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles

Rapporteur : M. Ian LIDDELL-GRAINGER, Royaume-Uni, CE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 13885, Renvoi 4158 du 27 novembre 2015. 2017 - Quatrième partie de session

Résumé

Les allégations de corruption et de promotion d’intérêts formulées à l’encontre de certains membres et d’anciens membres de l’Assemblée parlementaire ont remis en cause la crédibilité des actions et des positions de l’Assemblée. Cette situation a conduit à repenser le cadre d’intégrité de l’Assemblée en réaffirmant les principes de transparence, de responsabilité, d’intégrité et de primauté de l’intérêt public, indispensables au rétablissement de la confiance du public vis-à-vis de l’institution parlementaire.

Les propositions adoptées par la commission du Règlement prévoient la révision du mécanisme actuel de supervision des principes et des règles déontologiques qui s’imposent aux membres de l’Assemblée. L’instauration d’un nouveau mécanisme permettra un examen impartial des allégations de violations des principes et règles déontologiques, et un lancement plus rapide et une conduite équitable des enquêtes sur de telles allégations. La commission a également révisé la liste des sanctions susceptibles de s’appliquer en cas de violation avérée des normes déontologiques de l’Assemblée.

En outre, la commission propose de doter l’Assemblée de règles strictes sur l’accès et la circulation des tiers dans les locaux du Conseil de l'Europe pendant les sessions et les réunions de l’Assemblée, d’instaurer un registre de transparence, et de prendre des mesures concrètes afin de ne pas permettre aux anciens membres impliqués dans des activités de conseil et de promotion rémunérée d’intérêts de bénéficier d’avantages spécifiques. L’harmonisation et la révision des règles de conduite des membres de l’Assemblée tiennent compte des recommandations formulées, à l’invitation de l’Assemblée, par le Groupe d’États du Conseil de l'Europe contre la corruption (GRECO).

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 21 septembre
2017.

(open)
1. L’Assemblée parlementaire, en tant qu’organe statutaire du Conseil de l’Europe, est appelée à promouvoir les principes des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du droit qui fondent le Conseil de l’Europe et sont le patrimoine commun des États membres. Le caractère universel des sujets débattus ne laisse pas pour autant l’Assemblée à l’abri des intérêts publics ou privés qui cherchent à influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif du processus parlementaire. Les rapports de l’Assemblée qui portent sur la situation dans les États membres, tout comme les conclusions des missions d’observation des élections conduites par l’Assemblée, parce qu’ils évaluent le niveau de respect des droits de l’homme et de la démocratie et parce qu’ils sont suivis de près par les autorités nationales, les dirigeants politiques, les médias et les divers secteurs de la société civile, ont un impact direct et manifeste sur l’image et la réputation des pays concernés, avec des conséquences sur les plans politique et économique. Enfin, le travail de l’Assemblée sur des questions de société parfois polémiques, combiné à l’absence de réglementation globale sur le lobbying, ouvre potentiellement la porte à des pressions indues et à des opportunités de corruption.
2. Les allégations de corruption et de promotion d’intérêts formulées récemment à l’encontre de certains membres ou d’anciens membres de l’Assemblée ont mis en cause, comme jamais auparavant, la crédibilité des actions et des positions de l’Assemblée. Face au risque de voir la réputation de l’Assemblée se dégrader de manière irréversible, une stratégie globale a été établie afin de prévenir les risques de corruption et de mettre en lumière les éventuelles pratiques occultes.
3. Première mesure de cette stratégie, un groupe d’enquête externe indépendant a été créé par l’Assemblée afin de mener une enquête indépendante approfondie sur les allégations de corruption et de promotion d’intérêts portées à l’encontre de certains membres ou anciens membres de l’Assemblée – son mandat a été ratifié par l’Assemblée en avril 2017 et sa composition en juin. Ce groupe, composé de personnalités ayant une haute autorité morale dans le monde juridique, a débuté ses travaux et son rapport est attendu pour la fin de l’année 2017.
4. La deuxième mesure consiste à mettre en place un cadre d’intégrité solide et cohérent au sein de l’Assemblée, avec le conseil du Groupe d’États contre la corruption (GRECO). L’Assemblée exprime sa reconnaissance au GRECO pour la diligence avec laquelle il a effectué une expertise fouillée de son cadre d’intégrité et de l’ensemble des règles et mécanismes relatifs à la déontologie des membres de l’Assemblée. Elle se félicite du rapport d’évaluation que le GRECO a adopté le 19 juin 2017 et souligne la pertinence et la qualité de ses recommandations qui ont inspiré les propositions de changements réglementaires.
5. L’Assemblée décide de mettre en place de nouvelles règles de conduite et obligations déclaratives qui permettraient, à l’avenir, de prévenir des agissements corruptifs au sein de l’Assemblée. Elle décide en outre de réviser le mécanisme actuel de supervision des principes et des règles déontologiques qui s’imposent à ses membres, qui repose actuellement intégralement sur le Président de l’Assemblée parlementaire et que le GRECO qualifie d’«excessivement discrétionnaire». L’Assemblée considère que l’instauration d’un nouveau mécanisme permettra un examen impartial des allégations de violations des principes et règles déontologiques, y compris lorsqu’elles sont révélées par des sources extérieures, et un lancement plus rapide et une conduite équitable des enquêtes sur de telles allégations. Elle décide également de réviser la liste des sanctions susceptibles de s’appliquer en cas de violation avérée des normes déontologiques de l’Assemblée.
6. L’Assemblée décide également, ainsi qu’elle l’a annoncé dans sa Résolution 2170 (2017) «Promouvoir l’intégrité dans la gouvernance pour lutter contre la corruption politique» et comme le préconise le GRECO, de se doter de règles claires sur l’accès et la circulation des tiers dans les locaux du Conseil de l'Europe pendant les sessions et les réunions de l’Assemblée, d’instaurer un registre de transparence, et de prendre des mesures concrètes afin de ne pas permettre aux anciens membres impliqués dans des activités de conseil et de lobbying rémunérées de bénéficier d’avantages spécifiques.
7. En conséquence, l’Assemblée décide de modifier le mécanisme de supervision du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire en remplaçant le chapitre “Respect du code de conduite” du Code par le nouveau chapitre suivant:
«1. La mise en œuvre du présent code relève du Président de l’Assemblée, de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles et de l’Assemblée, conformément aux compétences et responsabilités qui leur sont conférées par le Règlement et le présent code de conduite.
2. Si un membre est soupçonné d’avoir agi en violation du code de conduite, le Président de l’Assemblée peut demander des éclaircissements et des compléments d’information au membre en question, au président de sa délégation nationale, au président de son groupe politique ou au président de la commission dont le membre concerné fait partie. Le Président de l’Assemblée peut se prononcer sur des violations mineures du code de conduite si la commission du Règlement n’a pas été appelée à se prononcer sur les mêmes faits.
3. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles (ci-après «la commission») examine les allégations de violation du présent code de conduite formulées à l’encontre des membres de l’Assemblée portées à son attention par le Président de l’Assemblée, ou par au moins 20 membres de l’Assemblée représentant cinq délégations nationales au moins (en utilisant le formulaire de demande d’enquête approprié). Elle peut également lancer une enquête de son propre chef.
4. La commission se réunit à huis clos et agit dans le strict respect de la confidentialité:
4.1. lorsqu’elle décide d’ouvrir une enquête, elle informe le membre concerné et lui communique copie des éléments de preuve qui lui ont été fournies à l'appui des allégations, l’informe de ses droits et lui demande ses observations préliminaires;
4.2. elle auditionne le membre concerné ainsi que les témoins éventuels; les procès-verbaux de ces entretiens ou auditions sont confidentiels;
4.3. elle donne au membre concerné, à tous les stades de la procédure, la possibilité de commenter tous les éléments de preuve recueillis au cours de l’enquête à l'appui des allégations, y compris ceux ayant conduit à identifier un éventuel manquement à d’autres règles que celui à l’origine de la procédure; elle peut examiner tout élément de preuve fourni par le membre concerné ou entendre tout témoin susceptible de fournir des éléments de preuve pertinents à l'enquête proposé par le membre concerné;
4.4. avant de finaliser ses conclusions, elle donne au membre la possibilité de commenter des parties factuelles du projet de rapport.
5. Les membres s’engagent à coopérer, à tous les stades de l’enquête, avec la commission. Ils sont tenus de communiquer toute information ou tout document requis.
6. Si la commission constate que les allégations ne sont pas fondées, elle en informe les plaignants et le membre concerné.
7. Si la commission constate l’existence d’une violation minime du code de conduite, relevant notamment de la négligence, elle en informe le membre en l’invitant à prendre toute mesure nécessaire. La commission décide s’il y a lieu de publier la décision sur le site internet de l’Assemblée.
8. Si la commission constate l’existence d’une violation sérieuse du code de conduite, elle prépare un rapport qui comportera tous les éléments de preuve recueillis au cours de l’enquête, les observations du membre concerné, et ses conclusions. Ce rapport est publié sur le site internet de l’Assemblée. La commission décide s’il y a lieu d’imposer une sanction et détermine la sanction appropriée, conformément à l’article … [«Mesures en cas de non-respect des dispositions du code de conduite»].
9. Si la commission constate que des actes ou omissions faisant l’objet de l’enquête sont susceptibles de constituer une violation du droit pénal d’un État membre, elle en informe les autorités nationales compétentes. Elle peut décider de suspendre la procédure en cours au sein de l’Assemblée s’il s’avère que des autorités nationales mènent une enquête sur des faits identiques.»
8. L’Assemblée décide également de renforcer le devoir d’intégrité, de responsabilité et de transparence de ses membres:
8.1. en ajoutant à la fin de l’article 6.2.b du Règlement la phrase suivante: «Je déclare avoir pris connaissance du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire et m’engage à en respecter les dispositions»;
8.2. afin de mieux prévenir la corruption active, en modifiant le paragraphe 11 du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, en remplaçant les mots «Les membres s’engagent à ne pas solliciter ni accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification» par les mots «Les membres s’engagent à ne pas promettre, donner, solliciter ou accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification»;
8.3. en ajoutant, à la fin du paragraphe 14 du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, la phrase suivante: «Les formulaires de déclaration de cadeaux soumis par les membres sont publiés sur le site internet de l’Assemblée»;
8.4. en ajoutant, dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, après le chapitre «Règles de conduite», un nouveau chapitre «Déclarations d’intérêts» rédigé comme suit: «Les membres présentent à l’ouverture de chaque session de l’Assemblée, sous leur responsabilité personnelle, une déclaration d'intérêts en utilisant le formulaire approprié. La déclaration est publiée sur le site internet de l’Assemblée», et en invitant la commission du Règlement à établir le format et le contenu des obligations déclaratives.
9. L’Assemblée décide de renforcer la cohérence des dispositions relatives aux conflits d’intérêts:
9.1. en modifiant l’article 13 du Règlement de l’Assemblée «Déontologie des membres de l’Assemblée» comme suit: «Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée s’engagent à agir dans le respect des principes et des règles établis dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée et les autres textes déontologiques, annexés au présent Règlement en tant que textes pararéglementaires» [l’article 13.2 est supprimé].
9.2. en supprimant l’annexe III des textes pararéglementaires intitulé «Transparence et déclaration des intérêts des membres»;
9.3. en modifiant le paragraphe 1.1.1 du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire comme suit: «l'obligation de déclarer tout intérêt économique, commercial, financier ou autre, à titre professionnel, personnel ou familial, en relation avec le sujet du rapport [note de bas de page: Tout candidat à une fonction de rapporteur est tenu de déclarer tout intérêt susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport ou avec le pays concerné par le rapport au moment de la nomination en commission. Cette déclaration est consignée au procès-verbal de la réunion]»;
9.4. en modifiant le paragraphe 3 du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire comme suit: «Sanction du non-respect des règles: En cas de non-respect d'un ou plusieurs engagements, notamment s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration, la commission démet le rapporteur de ses fonctions et le remplace»;
9.5. en invitant le Bureau de l’Assemblée à modifier les lignes directrices sur l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire afin d’en harmoniser les dispositions avec celles du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire et du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, notamment en ce qui concerne les obligations déclaratives et le mécanisme de supervision et de sanction.
10. En outre, l’Assemblée décide de revoir son régime de sanctions, en harmonisant et en élargissant la liste des sanctions potentielles:
10.1. en ajoutant dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, après le chapitre «Respect du code de conduite», le nouveau chapitre «Mesures en cas de non-respect des dispositions du code de conduite» suivant:
«En cas d’infraction grave ou répétée aux règles de conduite par un membre donné, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles peut prendre l’une ou plusieurs des mesures suivantes: privation temporaire du droit de prendre la parole et d’être inscrit sur la liste des orateurs; privation temporaire du droit de signer un amendement, une proposition de résolution ou de recommandation ou une déclaration écrite; privation temporaire du droit d’adresser des questions au Comité des Ministres; privation temporaire du droit d’être désigné rapporteur ou interdiction temporaire d’exercer la fonction de rapporteur de commission; interdiction temporaire d’être membre d’une commission ad hoc d’observation des élections; privation temporaire du droit de se porter candidat à la présidence de l’Assemblée, à la présidence ou à la vice-présidence d’une commission ou d’une sous-commission; privation temporaire du droit de représentation institutionnelle de l’Assemblée et de ses commissions»;
10.2. en modifiant en conséquence la référence faite au code de conduite dans le paragraphe 3 des dispositions pararéglementaires sur la «Conduite des membres de l’Assemblée parlementaire durant les débats de l’Assemblée (article 22 du Règlement)».
11. En ce qui concerne l’instauration d’un cadre cohérent pour renforcer la transparence dans les relations avec les acteurs extra-institutionnels et prévenir toute influence indue des intérêts publics ou privés sur l’exercice indépendant, impartial et objectif du mandat parlementaire à l’Assemblée, l’Assemblée décide:
11.1. en ce qui concerne les règles d’accès et de circulation dans les locaux du Conseil de l’Europe pendant les sessions de l’Assemblée, de charger le Bureau de l’Assemblée de réviser ces règles, ainsi que les annexes aux règles concernées, afin d’instaurer une identification spécifique des représentants d’intérêts, ainsi qu’un mécanisme de signalement de tout comportement abusif, et, dans ce cadre, d’examiner la création d’un registre des représentants d’intérêts;
11.2. de modifier le règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire en remplaçant la dernière phrase du paragraphe 1 par la phrase suivante: «Un diplôme faisant état de ce titre lui est délivré»; en supprimant les paragraphe 2.a et 2.b relatifs aux prérogatives des associés honoraires; et en remplaçant le paragraphe 3 par le paragraphe suivant: «Au moment de l’attribution du titre d’associé honoraire, l’ancien membre de l’Assemblée signe une déclaration sur l’honneur attestant qu’il n’est pas engagé dans la représentation et la défense des intérêts d’une personne ou entité tierce devant l’Assemblée. Le titre d’associé honoraire lui sera retiré s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration»;
11.3. de modifier le règlement spécial sur le titre et les prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire en remplaçant la dernière phrase du paragraphe 1 par la phrase suivante: «Un diplôme faisant état de ce titre lui est délivré»; en supprimant les paragraphe 2.b et 2.c; et en remplaçant le paragraphe 3 par le paragraphe suivant: «Au moment de l’attribution du titre de Président(e) honoraire, l’ancien(ne) Président(e) de l’Assemblée signe une déclaration sur l’honneur attestant qu’il/elle n’est pas engagé(e) dans la représentation et la défense des intérêts d’une personne ou entité tierce devant l’Assemblée. Le titre de Président(e) honoraire lui sera retiré s’il/elle a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration»;
11.4. de charger le Bureau de recueillir de telles déclarations auprès des associés honoraires et présidents honoraires actuels;
11.5. de modifier le Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, en ajoutant le nouveau paragraphe 3 suivant: «3. Règles applicables à la publication des sources au cours de l’élaboration du rapport: la commission peut demander au rapporteur, ou le rapporteur le décider lui-même, de publier, en annexe au projet de rapport, la liste des personnes, experts, représentants d’organisations gouvernementales ou non gouvernementales consultés, rencontrés ou reçus au cours de l’élaboration du rapport».
12. L’Assemblée décide que les modifications du Règlement et des textes pararéglementaires figurant dans la présente résolution entreront en vigueur dès leur adoption. Les nouvelles dispositions relatives à l’honorariat à l’Assemblée parlementaire ainsi qu’aux prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire s’appliquent à tous les anciens membres de l’Assemblée bénéficiant de cet honorariat, dès leur adoption.
13. L’Assemblée prend note de la recommandation du GRECO relative aux conseils, à la formation et à la sensibilisation des membres aux règles de conduite, et invite la Commission du Règlement à promouvoir les bonnes pratiques dans des domaines tels que les cadeaux et avantages similaires, la participation des membres à des événements extérieurs, les voyages des membres à l’invitation de tiers et autres.
14. Enfin, l’Assemblée appelle les présidents des groupes politiques à renforcer le cadre d’intégrité des groupes politiques, et notamment à prendre dûment en compte la recommandation du GRECO relative à la révision des procédures comptables des groupes politiques et à la soumission des comptes annuels de l’ensemble des groupes politiques à l’audit externe.

B. Exposé des motifs, par M. Liddell-Grainger, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Le 27 novembre 2015, l’Assemblée a renvoyé à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles une proposition de résolution, déposée par M. René Rouquet et d’autres membres (Doc. 13885), qui cherchaient à savoir pourquoi, nonobstant le cadre d’intégrité de l’Assemblée, «certains membres restent sous les projecteurs de la critique par un nombre d'organisations et de médias internationaux des droits de l’homme qui révèlent des cas scandaleux d'activités de corruption concernant les parlementaires, en leur qualité de membres de l'Assemblée». Les auteurs de la proposition en ont donc conclu qu’il est nécessaire de consolider davantage les règles de conduite applicables aux membres.
2. Par ailleurs, dans une lettre datée du 9 février 2016, le Président de l’Assemblée a renvoyé à la commission une réclamation de M. Valeriu Ghiletchi, membre de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, concernant un éventuel conflit d’intérêts touchant la rapporteure de la commission sur «Droits humains et questions éthiques liées à la gestation pour autrui», Mme Petra De Sutter 
			(2) 
			M. Ghiletchi soulignait
en particulier que la fonction occupée par Mme De
Sutter à la direction du département de médecine reproductive à
l’hôpital universitaire de Gand suscitait de sérieuses inquiétudes
quant au fait que ses intérêts professionnels étaient profondément
liés au sujet du rapport. Il considérait que l’absence de déclaration
faisant état de son implication dans le domaine de la gestation
pour autrui faisait naître une forte présomption de conflit d’intérêts.. Dans son courrier, le Président de l’Assemblée demande que le présent rapport clarifie la question de l’application des dispositions relatives aux conflits d’intérêts.
3. Lors d’un premier échange de vues, le 23 juin 2016, la commission a également mis en exergue la question de la violation du secret des délibérations lors de réunions de commissions tenues à huis clos et a demandé au rapporteur d’évaluer les règles existantes. Enfin, elle a considéré que le rapport devait examiner la question du lobbying et de l’influence indue des représentants d’intérêts sur les activités de l’Assemblée ainsi que les conditions de participation des organisations non gouvernementales (ONG) aux travaux de l’Assemblée et de ses commissions.
4. L’ensemble des questions soulevées appellent donc un examen de la situation actuelle quant au cadre réglementaire en vigueur et à sa mise en œuvre. Afin de déterminer la meilleure approche possible, la commission a tenu, le 13 mars 2017, une audition sur les mécanismes de mise en œuvre du cadre d’intégrité parlementaire avec la participation de Mme Kathryn Hudson, commissaire pour les normes de la Chambre des Communes du Royaume-Uni, Mme Chiara Malasomma et Mme Elisabeth Bauer, de l’Unité Transparence/Direction des Affaires interinstitutionnelles et de la Coordination législative du Parlement européen. Elle a également tenu, le 26 avril 2017, un échange de vues avec M. Marin Mrčela, Président du Groupe d’États contre la corruption (GRECO). Par ailleurs, les membres de la commission du Règlement ont été invités à soumettre leurs observations sur les modifications principales proposées par le rapporteur, y compris concernant le mécanisme de contrôle. Dix réponses (neuf venant de membres et une déposée au nom d’une délégation nationale) ont été reçues. Les propositions supplémentaires ou alternatives que les membres ont formulées ont été discutées et ajoutées au projet de résolution, quand la commission les a estimés utiles.

2. Observations concernant le cadre d’éthique actuel à l’Assemblée parlementaire

5. Au cours des dernières années, l’Assemblée parlementaire a adopté plusieurs textes ayant pour objectifs de traiter de la question des conflits d’intérêts, d’améliorer les cadres institutionnels et de promouvoir les principes de transparence, de responsabilité et d’intégrité. Pourtant, jamais au cours de son histoire l’Assemblée ne s’est trouvée dans une situation aussi aiguë de remise en cause de la légitimité de ses actions et décisions et de sa crédibilité politique.

2.1. Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire (Résolution 1903 (2012))

2.1.1. Dispositions pertinentes

6. Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée s’engagent à agir dans le respect des principes et des règles établis dans le code de conduite des membres de l’Assemblée. Ce dernier se compose de trois parties:

a. Les principes généraux de conduite qui visent à guider les membres en l’absence de réglementation ou lorsqu’ils sont confrontés à de nouvelles situations qui ne sont pas abordées dans le code de conduite.

b. Les règles de conduite, qui sont des règles détaillées, soumises à un arbitrage interne, couvrant différentes questions comme la promotion rémunérée d’intérêts; l’obligation de déclarer tout cadeau d’une valeur supérieure à € 200 accepté dans l’exercice de la fonction de membre de l’Assemblée; l’absence de conflits d’intérêts ou, à défaut, leur déclaration; l’interdiction de toucher une rémunération en contrepartie de leur décision de soutenir un amendement, une proposition de texte, une déclaration écrite ou tout autre document de l’Assemblée; l’interdiction pour les anciens membres de l’Assemblée qui deviennent lobbyistes de jouir des prérogatives liées au statut de membre associé, en ce qui concerne la diffusion des documents et l’accès aux bâtiments et aux salles de réunion.

Au titre de ces règles figure un devoir de confidentialité exigeant des membres de ne pas exploiter à des fins personnelles les renseignements confidentiels dont ils ont connaissance dans l’accomplissement de leurs fonctions.

c. Un mécanisme d’application qui confère au Président de l’Assemblée un rôle majeur pour mener des enquêtes en cas de violations alléguées du code de conduite. La commission du Règlement peut être saisie par le Président et formuler des recommandations.

Cette partie énumère également les sanctions éventuelles que peut prendre le Président de l’Assemblée, par exemple la privation temporaire du droit de prendre la parole ou d’être inscrit sur la liste des orateurs et la privation temporaire du droit de signer un amendement, une proposition ou une déclaration écrite. Par ailleurs, si le Président de l’Assemblée conclut que le membre n’a pas respecté le code de conduite, «il peut préparer une déclaration motivée qui sera lue, s’il y a lieu, devant l’Assemblée et/ou en informer le président du parlement national concerné».

7. Enfin, le Secrétaire Général de l’Assemblée a un devoir de conseil aux membres de l’Assemblée sur l’application des dispositions du code de conduite, y compris dans des cas où des situations personnelles peuvent être considérées comme étant potentiellement génératrices d’une situation de conflits d’intérêts.

2.2. Situations de conflits d’intérêts

8. Les situations de conflits d’intérêts sont régies par les articles 8 et 9 du code de conduite qui disposent que:
«8. Les membres évitent tout conflit entre, d’une part, un intérêt économique, commercial, financier ou autre, réel ou potentiel, à titre professionnel, personnel ou familial et, d’autre part, l’intérêt public dans le travail de l’Assemblée, en résolvant tout conflit en faveur de l’intérêt public; tout conflit d’intérêts que le membre ne peut résoudre sera rendu public.
9. Les membres signalent ces intérêts par une déclaration orale, lors d’une séance de l’Assemblée ou d’une réunion de commission, ainsi que dans toute autre communication pertinente.»
9. Elles sont également évoquées par les dispositions régissant la transparence et la déclaration des intérêts des membres (Résolution 1554 (2007)):
«Article 2
2.1. Avant de s’exprimer en commission ou en séance plénière sur un sujet relevant d’un domaine dans lequel ils ont un intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou concurrentiel, les membres sont encouragés à faire des déclarations d’intérêts ad hoc.
2.2. Non seulement ces déclarations servent la transparence et sont pertinentes pour les autres membres, mais elles permettent également d’informer leurs collègues et le grand public de leur expérience dans le domaine concerné.»
10. Parallèlement, des dispositions spécifiques s’appliquent aux rapporteurs de l’Assemblée. Ainsi l’article 1 des dispositions relatives à la transparence et la déclaration des intérêts des membres (Résolution 1554 (2007)) dispose que:
«1.1. Tous les candidats aux fonctions de rapporteur sont tenus de faire une déclaration orale concernant tout intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport ou avec le pays concerné par le rapport au moment de la nomination en commission.
1.2. Cette déclaration est consignée dans le procès-verbal de la réunion.»

et l’article 3 prévoit que «Les commissions sont autorisées à relever un rapporteur de ses fonctions s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration».

11. Il existe donc une exigence générale, inscrite dans le code de conduite, demandant aux membres d’éviter tout conflit d’intérêts ou, en cas d’impossibilité de le résoudre, de le rendre public, ainsi qu’une règle spéciale sur les intérêts des rapporteurs, qui exige la déclaration de toute information que d’aucuns pourraient raisonnablement considérer comme influençant les motivations du rapporteur à prendre en charge l’élaboration d’un rapport.

2.3. Autres mesures accompagnant ou renforçant le cadre déontologique

12. Un certain nombre de mesures adoptées par l’Assemblée peuvent être considérées comme contribuant à l’efficacité des dispositions sur l’éthique et la transparence.

2.3.1. Transparence des activités des membres

13. Le profil de chaque membre de l’Assemblée figurant sur le site internet de l’Assemblée, librement accessible à la consultation du public, contient la liste complète des rapports et avis qu’il ou elle a élaborés, ainsi que les déclarations, les propositions de texte ou les questions écrites dont il ou elle a été signataire tout au long de son mandat à l’Assemblée. Y figurent également les positions prises à la faveur des votes en plénière.
14. Le registre des votes en séance plénière est publié depuis 2012 sur le site internet de l’Assemblée. Ce dispositif tient compte de l’intérêt croissant du public et des médias à connaître la manière dont les parlementaires votent au sein de l’Assemblée, et s’inscrit dans une tendance significative en Europe vers davantage de transparence dans la décision publique.
15. Cette mesure n’est toutefois pas exempte de critiques, car elle permet un contrôle a posteriori du vote des membres de l’Assemblée lors des débats en séance plénière. Une telle transparence est donc susceptible de contrevenir in fine à la liberté d’expression des membres, dès lors qu’ils s’exposent à un risque de pressions accru de la part notamment de leur délégation nationale ou de leur parti politique. Les médias nationaux ont régulièrement révélé des cas de pression politique exercée sur des membres s’agissant de débats majeurs à l’Assemblée ou de décisions particulièrement cruciales. Il pourrait donc s’avérer nécessaire de répondre au besoin de protéger le vote, élément déterminant du fonctionnement du système démocratique, afin de garantir qu’il exprime librement des convictions personnelles, sans contrôle, pression ou contrainte, quels qu’ils soient. Néanmoins, à ce jour, la commission du Règlement s’est refusée à introduire dans le Règlement de l’Assemblée des modalités spécifiques de vote, qui viseraient à éviter que les membres fassent l’objet de pressions et à assurer le respect de leur liberté de pensée.

2.3.2. Financement et publication des comptes des groupes politiques

16. Depuis 1958, une partie du budget de l’Assemblée est allouée au financement du fonctionnement des groupes politiques de l’Assemblée. Actuellement, c’est la commission du Règlement qui est chargée d’examiner l’utilisation faite par les groupes politiques de leurs allocations, en élaborant une communication annuelle adressée au Bureau de l’Assemblée comportant une vérification sommaire des comptes présentés par les groupes. Ce financement public permet aux groupes de fonctionner sans recourir aux donations extérieures et, par conséquent, d’écarter les accusations de conflits d’intérêts. En effet, le financement public est vu aujourd’hui comme un outil permettant de réduire les risques de corruption dans le domaine politique, comme en témoignent les dispositifs du financement public des campagnes électorales qui se multiplient en Europe 
			(3) 
			La commission a organisé
un séminaire les 10-11 décembre 2015 à Paris sur le «Financement
des partis politiques et des campagnes électorales: législation
et mécanismes de contrôle»..

3. Bilan de la mise en œuvre

3.1. Déclaration de cadeaux

17. Tout membre ayant reçu un cadeau ou bénéficié d’un avantage similaire d’une valeur minimale de € 200 devra en effectuer la déclaration, dans un délai d’un mois, en remplissant un formulaire type 
			(4) 
			Voir
la décision adoptée par le Bureau de l’Assemblée en janvier 2013
concernant la procédure d’enregistrement des cadeaux et avantages
similaires et le formulaire type de déclaration (note AS/Bur (2012)
72 rev2). Le formulaire de déclaration des cadeaux ou avantages
similaires est accessible aux membres sur la page principale du
site extranet de l’Assemblée.. Le registre y afférent est géré par le secrétariat de la commission du Règlement. Six déclarations de cadeaux ont été reçues à ce jour, depuis l’ouverture du registre en mars 2013.

3.2. Conflit d’intérêts

18. Pour l’heure, une seule situation relative à un conflit d’intérêts potentiel a été communiquée au Président de l’Assemblée (voir la lettre de M. Ghiletchi évoquée ci-dessus, paragraphe 2, ainsi que le chapitre 7 ci-dessous). Celle-ci a été réglée dans le cadre des procédures réglementaires sus-rappelées.
19. Par ailleurs, s’agissant des membres honoraires de l’Assemblée, aucune demande d’information n’a été adressée à un membre honoraire soupçonné d’être engagé dans la représentation et la défense des intérêts d’une personne ou d’une entité, visant à clarifier sa situation. En conséquence, aucun membre honoraire ne s’est vu retirer son badge d’accès à l’hémicycle.

3.3. Sanctions

20. Des sanctions à l’encontre d’un membre de l’Assemblée ont été appliquées à une seule occasion. M. Gaudi Nagy s’est vu privé de son droit de prendre la parole et d’être inscrit sur la liste des orateurs durant la première partie de session de 2014 de l’Assemblée, à la suite de violations graves et répétées du Règlement et des principes fondamentaux de bonne conduite. En particulier, en 2012, il a exploité un incident banal qui s’était produit en séance pour lancer des attaques verbales et tenir des propos haineux à l’encontre d’une Vice-Présidente de l’Assemblée qui assurait alors la présidence de la séance. Par ailleurs, un incident l’impliquant s’était produit durant une réunion de la commission des questions juridiques et des droits de l'homme en 2013.

3.4. Transparence et déclaration des intérêts des membres (Résolution 1554 (2007))

3.4.1. En ce qui concerne l’article 1

21. Depuis l’introduction de cette disposition, tous les candidats aux fonctions de rapporteur sont tenus de faire une déclaration sur l’absence de conflits d’intérêts ou concernant l’existence d’éventuels intérêts professionnels, personnels, financiers ou économiques susceptibles d’être jugés pertinents ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport ou avec le pays concerné par le rapport au moment de la nomination en commission.
22. Les déclarations qui mettent en évidence d’éventuels intérêts doivent être consignées dans le carnet de bord ou le procès-verbal de la réunion, mais ce n’est pas toujours le cas. La formulation habituellement employée dans le carnet de bord («a entendu une déclaration d’absence de conflit d’intérêts») ou le procès-verbal («déclare l’absence de tout conflit d’intérêts») se révèle à l’usage par trop lapidaire. Les rapporteurs ont rarement mentionné l’existence de situations spécifiques, ou, s’ils l’ont fait, cela n’a pas toujours été mentionné dans le procès-verbal de la réunion. À titre d’exemple, lorsqu’il s’est présenté aux fonctions de rapporteur sur «La représentation et participation effective des parlementaires de l’opposition dans les États membres à l’Assemblée parlementaire», le candidat, M. Jordi Xuclà, a souligné que le parti politique national auquel il appartient est dans l’opposition.

3.4.2. En ce qui concerne l’article 2

23. Cette disposition encourage les membres à déclarer, avant de prendre la parole en réunion de commission ou en séance plénière, tout intérêt qui pourrait raisonnablement être considéré par d’autres comme influençant leur discours. Une disposition similaire existe à la Chambre des communes du Royaume-Uni où une telle déclaration est une obligation susceptible de déclencher une procédure disciplinaire si elle n’est pas respectée.
24. Ces déclarations spontanées sont très rares à l’Assemblée. À titre d’exemple, dans un débat sur «le statut des présidents des groupes politiques en commissions», tenu en 2012, Mme Anne Brasseur avait rappelé sa fonction de présidente du groupe ADLE.

3.4.3. En ce qui concerne l’article 3

25. Le relèvement d’un rapporteur, qui a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration, de ses fonctions a été demandé pour la première fois dans le cadre de l’élaboration du rapport intitulé «Droits humains et questions éthiques liées à la gestation pour autrui». La commission des questions sociales, de la santé et du développement durable est donc la première commission de l’Assemblée à s’être trouvée en situation de devoir juger un conflit d’intérêts potentiel d’un/e rapporteur/e. Lors de sa réunion du 27 janvier 2016, elle a examiné la question d’un éventuel conflit d’intérêts concernant la rapporteure en suivant la procédure suivante: en premier lieu, la commission a été appelée à se prononcer sur la question de l’existence d’un conflit d’intérêts (ce premier vote étant de nature procédurale devait donc se tenir à mains levées) et, dans l’affirmative, elle devait se prononcer sur l’ouverture de la procédure prévue à l’article 3 pour relever la rapporteure de son mandat (ce second vote se déroulant à bulletin secret). La commission ayant estimé, lors du premier vote à mains levées, qu’il n’y avait pas de conflit d’intérêts, elle n’a donc pas procédé à un vote sur la possibilité de démettre la rapporteure de ses fonctions 
			(5) 
			Dans
son courrier susmentionné, M. Ghiletchi a suggéré que, si un vote
devait se tenir pour relever un rapporteur de ses fonctions, il
devait 1) être secret et 2) se dérouler en deux étapes – un premier
vote pour déterminer s’il existe un conflit d’intérêts et un deuxième
vote pour déterminer si le rapporteur doit être relevé de ses fonctions. .
26. Un second cas s’est produit à la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l'Europe (commission de suivi), la délégation ukrainienne ayant demandé de retirer son mandat à l’un des corapporteurs pour le suivi du respect des obligations et engagements de l’Ukraine, au motif qu’il n’a pas respecté l’engagement de neutralité et d’impartialité auquel sont tenus les rapporteurs. Le 26 juin 2017, la commission de suivi décidait que ce corapporteur avait contrevenu au code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée et lui a retiré son mandat en conséquence.

4. Allégations de conflit d’intérêts visant les membres de l’Assemblée

4.1. Allégations provenant de sources d’information publiques

27. Depuis l’adoption de la Résolution 1903 (2012) les médias ont révélé des faits allégués de corruption impliquant des membres de l’Assemblée parlementaire 
			(6) 
			The
Guardian, «Plush hotels and caviar diplomacy: how Azerbaijan's
elite wooed MPs», 24 novembre 2013, <a href='https://www.theguardian.com/world/2013/nov/24/azerbaijan-caviar-diplomacy-for-mps'>https://www.theguardian.com/world/2013/nov/24/azerbaijan-caviar-diplomacy-for-mps;</a>The Economist,
«Azerbaijan – Heaping on the caviar diplomacy», octobre 2016, <a href='https://www.1843magazine.com/features/heaping-on-the-caviar-diplomacy'>https://www.1843magazine.com/features/heaping-on-the-caviar-diplomacy</a>.. À l’heure des réseaux sociaux et des médias en ligne, ce serait faire preuve d’une certaine naïveté de croire que les personnalités politiques peuvent encore se soustraire à la surveillance des médias et des ONG et espérer que des pratiques contraires aux règles d’éthique – comme l’acceptation de cadeaux ou d’invitations, ou l’existence d’intérêts personnels ou familiaux notamment au travers d’actifs financiers ou commerciaux – échappent à la révélation publique.
28. Un exemple notoire concerne les rapporteurs de l’Assemblée sur l’Azerbaïdjan. En 2012, l’ONG European Stability Initiative (ESI), basée à Berlin, a publié un rapport intitulé «Caviar Diplomacy: How Azerbaijan silenced the Council of Europe» 
			(7) 
			<a href='http://www.esiweb.org/pdf/esi_document_id_131.pdf'>www.esiweb.org/pdf/esi_document_id_131.pdf.</a>. Le rapport classait les membres de l’Assemblée ayant exercé des fonctions de rapporteurs sur l’Azerbaïdjan selon deux catégories: les «voix critiques» et les «défenseurs». Ces derniers étaient des «membres de l’APCE qui [s’étaient] déclarés en faveur de la situation de la démocratie en Azerbaïdjan et se félicitaient de ses élections en public et lors de réunions» de l’Assemblée parlementaire. Le rapport contenait des allégations selon lesquelles les membres ayant défendu l’Azerbaïdjan à l’Assemblée l’avaient fait dans le but d’obtenir des avantages matériels ou géopolitiques. Il indiquait également que «3 ou 4» membres du secrétariat recevaient systématiquement des cadeaux. Certaines allégations ont été réitérées dans un autre rapport publié en 2013 
			(8) 
			«A Portrait of Deception.
Monitoring Azerbaijan or why Pedro Agramunt should resign», <a href='http://www.esiweb.org/index.php?lang=en&id=156&document_ID=134'>www.esiweb.org/index.php?lang=en&id=156&document_ID=134.</a>. L’ESI n’a pas communiqué officiellement les rapports au Président de l’Assemblée. Le Secrétaire Général de l’Assemblée parlementaire a demandé à l’ESI de lui fournir les noms des membres du secrétariat qui auraient reçu des cadeaux, mais aucune information ne lui est parvenue.
29. Une autre ONG, European Platform for Democratic Elections (EPDE), a publié sa propre évaluation du déroulement des élections législatives en Azerbaïdjan en novembre 2015, en même temps qu’une «analyse de l’activité des missions internationales d’observation», dans laquelle elle souligne que «le groupe d’observation le plus important qui a effectué une déclaration biaisée attestant du déroulement démocratique de l’ensemble du processus électoral était la délégation de l’Assemblée parlementaire» 
			(9) 
			<a href='http://www.epde.org/tl_files/EPDE/EPDE PRESS RELEASES/EPDE_Final Report_ParlEl_AZ_1.11.2015_fin_EN.pdf'>www.epde.org/tl_files/EPDE/EPDE%20PRESS%20RELEASES/EPDE_Final%20Report_ParlEl_AZ_1.11.2015_fin_EN.pdf.</a>.
30. Le rapport sur «L’escalade de la violence dans le Haut-Karabakh et les autres territoires occupés en Azerbaïdjan» (janvier 2016) a été qualifié de partisan par certains membres de l’Assemblée, et cette information a été largement relayée par certains médias, en particulier en raison du choix du rapporteur qui a été désigné comme ayant des conflits d’intérêts potentiels, du fait, notamment, de son appartenance au groupe des «Conservative Friends of Azerbaijan», de sa nationalité turque et des intérêts économiques de sa femme en Azerbaïdjan 
			(10) 
			<a href='https://regnum.ru/news/polit/2014036.html'>https://regnum.ru/news/polit/2014036.html</a>; <a href='https://www.change.org/p/parliamentary-assembly-of-the-council-of-europe-pace-no-to-hate-filled-war-rhetoric-on-nagorno-karabakh-conflict-and-favoritism'>https://www.change.org/p/parliamentary-assembly-of-the-council-of-europe-pace-no-to-hate-filled-war-rhetoric-on-nagorno-karabakh-conflict-and-favoritism.</a>. De son côté, lorsqu’il avait pris ses fonctions, le rapporteur avait déclaré l’absence de conflits d’intérêts.
31. En août 2016, M. Ilgar Mamadov a publié depuis sa prison une lettre ouverte dans laquelle il met en cause l’impartialité d’un des corapporteurs sur l’Azerbaïdjan pour, entre autres, avoir accepté des signes d’hospitalité de la part du gouvernement 
			(11) 
			<a href='http://ilgarmammadov.livejournal.com/'>http://ilgarmammadov.livejournal.com/.</a>.
32. En juin 2016, le parquet de Milan a ouvert une procédure à l’encontre d’un ancien membre de l’Assemblée, M. Luca Volonté, actuellement membre honoraire, pour corruption et blanchiment d’argent, sur la base d’allégations faisant état de versements, effectués entre 2012 et 2014, pour un montant total de près de € 2,4 millions, émanant de sociétés azerbaïdjanaises, transitant par des sociétés britanniques ou établies offshore et des banques estonienne et lettone, en contrepartie de la promotion des intérêts et des positions de l’Azerbaïdjan au sein de l’Assemblée. Par une décision du 27 janvier 2017, le juge de l’audience préliminaire du tribunal de Milan a renvoyé M. Volonté devant le tribunal pour le chef de blanchiment d’argent, ne retenant pas le chef de corruption (au motif que les faits allégués ne peuvent pas être examinés par la justice compte tenu de l’immunité parlementaire qui s’applique aux actes reprochés). Par jugement du 8 juin 2017, la Cour de Cassation a annulé la seconde partie de la décision et a renvoyé l’affaire au tribunal de Milan.
33. Cette affaire a été largement discutée dans le documentaire «Caviar democracy» diffusé le 21 novembre 2016 sur la chaîne de télévision italienne RAI et mentionnée dans le rapport publié en décembre 2016 par European Stability Initiative (ESI) «The European swamp (Caviar diplomacy part 2) – Prosecutors, corruption and the Council of Europe» («Le marais européen (la diplomatie du caviar, partie 2) – Procureurs, corruption et Conseil de l'Europe»). Reprenant et étayant les éléments de l’enquête diffusée sur la RAI, le rapport formule, toujours en lien avec la promotion des intérêts et des positions de l’Azerbaïdjan au sein de l’Assemblée, des allégations de comportement entaché de corruption à l’égard d’anciens et d’actuels membres de l’Assemblée.
34. Le rapport de l’ESI, publié le 27 mars 2017, «The Biggest Scandal (the Sawicki memorandum and the way forward for the Council of Europe» («Le plus grand scandale. Le mémorandum Sawicki et le moyen d’aller de l’avant pour le Conseil de l’Europe») analyse les suites que l’Assemblée s’efforce de donner aux allégations susmentionnées – en particulier en mettant en place un organe indépendant d’enquête – et exprime l’espoir que cette affaire ne soit pas étouffée par les membres qui s’opposent à l’enquête 
			(12) 
			<a href='http://www.esiweb.org/pdf/ESI - The Biggest Scandal - 27 March 2017.pdf'>www.esiweb.org/pdf/ESI%20-%20The%20Biggest%20Scandal%20-%2027%20March%202017.pdf</a>.. Une enquête à grande échelle menée par un consortium de journalistes européens et l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), The Azerbaijani Laundromat, a conduit à de nouvelles révélations concernant des membres et anciens membres de l’Assemblée 
			(13) 
			<a href='https://www.occrp.org/en/azerbaijanilaundromat/'>https://www.occrp.org/en/azerbaijanilaundromat/.</a>.
35. Ces allégations de promotion d’intérêts formulées à l’encontre de certains membres, et peu importe dans ce contexte qu’elles s’avèrent fondées ou fausses, portent atteinte à la réputation et à la crédibilité de l’Assemblée.
36. De mon avis, l’instauration d’un mécanisme extérieur, reposant sur la compétence d’un organe indépendant et impartial, à l’instar de celui qui a fait ses preuves au Royaume-Uni, permettrait de remédier aux lacunes du mécanisme actuel de mise en œuvre du code de conduite 
			(14) 
			Dans une lettre d’information
publiée le 18 janvier 2017 (“The FIFA of human rights – beyond lip-service
on anti-corruption”), l’ESI invite les membres de l’Assemblée parlementaire
préoccupés par la corruption à soutenir la mise en place d’un bureau
permanent, indépendant et non partisan chargé d’enquêter sur toute
allégation de violation du code de conduite.. Il conviendrait de dissocier, parmi les compétences réglementaires du Président de l’Assemblée, celles qui, dans l’exercice de son mandat, permettent une lecture politique, de celles qui requièrent une stricte neutralité politique: la fonction de surveillance disciplinaire, dans laquelle le Président ne peut être à la fois juge et partie, relève incontestablement des secondes et devrait être exempte de toute marge d’appréciation discrétionnaire.

4.2. Allégations portées par des membres de l’Assemblée

37. Thierry Mariani, membre de l’Assemblée et président de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, a organisé en juillet 2014, en sa qualité de membre d’un parlement national, une visite controversée en Crimée, territoire occupé par la Fédération de Russie (il s’y est à nouveau rendu en juillet 2015 et juillet 2016). Les autorités exécutives ukrainiennes et françaises ont condamné cette visite, au cours de laquelle il a déclaré que la Crimée faisait partie de la Russie 
			(15) 
			<a href='http://www.bfmtv.com/politique/quand-thierry-mariani-defend-l-annexion-de-la-crimee-par-la-russie-903696.html'>www.bfmtv.com/politique/quand-thierry-mariani-defend-l-annexion-de-la-crimee-par-la-russie-903696.html</a>.. Certains membres de l’Assemblée parlementaire ont soulevé la question d’un éventuel conflit d’intérêts dès lors que ces déclarations contredisent les positions officielles adoptées par l’Assemblée et sa commission des migrations la même année. En outre, cette affaire soulève la question de savoir si des règles particulières doivent s’appliquer au président d’une commission, en particulier en ce qui concerne le respect des positions de celle-ci.
38. En mars 2017, le Président de l’Assemblée, M. Pedro Agramunt, le président du groupe ADLE, M. Jordi Xuclà, ainsi que le président de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, M. Alain Destexhe, se sont rendus en Syrie à l’invitation des autorités russes. Cette visite, décrite comme privée par les intéressés, a été largement médiatisée par les médias russes qui l’ont présentée comme la visite d’une délégation de l’Assemblée présidée par M. Agramunt. Cette situation a suscité des réactions indignées de nombreux membres, de plusieurs délégations et des groupes politiques, mais également des inquiétudes suite à l’annonce par les médias du changement de la position officielle de l’Assemblée telle qu’exprimée dans plusieurs résolutions sur l’annexion de la Crimée et le conflit militaire au Donbass. Elle a soulevé des questions quant à la prise en charge des frais de voyage et d’une manière générale la violation des règles du code de conduite des membres de l’Assemblée et des engagements qui s’imposent aux membres de l’Assemblée qui exercent d’importantes fonctions électives.

5. La gestion des conflits d’intérêts: perspective comparative

5.1. Définition

39. Un conflit d’intérêt n’est pas un conflit de valeurs. Il naît d’une situation dans laquelle un agent public a un intérêt personnel de nature à influer ou paraître influer sur l’exercice impartial et objectif de ses fonctions officielles 
			(16) 
			La Recommandation no R(2000)10
du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur les codes de
conduite pour les agents publics, adoptée par le 11 mai 2000.. Le conflit d’intérêts constitue à la fois un indicateur, un précurseur et une conséquence d’un agissement corruptif. La Convention des Nations Unies contre la corruption demande aux États «d’adopter, de maintenir et de renforcer des systèmes qui favorisent la transparence et préviennent les conflits d’intérêts».
40. En 2003, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a publié «les Lignes directrices de l'OCDE pour la gestion des conflits d'intérêts dans le service public» qui définissent le conflit d’intérêts comme «un conflit entre la mission publique et les intérêts privés d’un agent public, dans lequel l’agent public possède à titre privé des intérêts qui pourraient influencer indûment la façon dont il s’acquitte de ses obligations et de ses responsabilités».
41. Progressivement les législations nationales et les règlements des parlements se sont dotés de leur propre définition du conflit d’intérêts.
42. En France, le Règlement de l’Assemblée nationale définit le conflit d’intérêts comme «toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif du mandat».
43. Au Canada, un parlementaire se trouve en situation de conflit d’intérêts «lorsqu’il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne».
44. Le code de conduite des députés au Parlement européen en matière d'intérêts financiers et de conflit d'intérêts (article 3) stipule qu’un «conflit d'intérêts existe lorsqu'un député au Parlement européen a un intérêt personnel qui pourrait influencer indûment l'exercice de ses fonctions en tant que député. Il n'y a pas de conflit d'intérêts lorsque le député tire un avantage du seul fait d'appartenir à la population dans son ensemble ou à une large catégorie de personnes».
45. On constate que toutes les définitions reprennent des éléments communs: «un intérêt personnel qui guide l’action parlementaire.»

5.2. Deux approches principales à la gestion du conflit d’intérêts dans le milieu parlementaire

46. On distingue deux approches majeures. La première consiste à rendre incompatible l’exercice du mandat parlementaire avec d’autres activités professionnelles 
			(17) 
			Une étude de la question
figure dans le rapport de la Commission européenne pour la démocratie
par le droit (Commission de Venise) sur la démocratie, la limitation
des mandats et l’incompatibilité de fonctions politiques, Etude no 646/2011,
document CDL-AD(2012)027rev du 31 janvier 2013.. La deuxième autorise certaines activités en imposant aux députés de veiller à l’absence de conflits d’intérêts.

5.2.1. L’incompatibilité du mandat avec les activités accessoires

47. Un nombre de pays (par exemple l’Ukraine) ont tout simplement interdit aux députés de mener des activités professionnelles pendant la durée de leur mandat. Seules les activités d’enseignement sont parfois autorisées. La logique du dispositif est d’éliminer toutes motivations potentielles pour un conflit d’intérêts pendant l’exercice du mandat parlementaire. Toutefois, cette disposition, souvent contournée, s’est avérée ne pas être satisfaisante en soi et fait l’objet de mesures complémentaires comme la déclaration des intérêts financiers.

5.2.2. Devoir de transparence

48. La seconde approche consiste à autoriser les députés à poursuivre leurs activités professionnelles (salarié ou entrepreneur) à condition que ces activités ne rentrent pas de manière apparente en conflit avec l’exercice du mandat parlementaire. Les États ont un regard différent sur ce qui pourrait être considéré comme un conflit apparent. Par exemple, l’exercice du métier d’avocat est autorisé en France ou au Portugal mais est interdit en Estonie. L’autorisation pour les députés d’exercer certaines activités professionnelles a été complétée de manière symétrique par un nombre de dispositifs de caractère déontologique, administratif ou pénal dont l’objectif est d’accroître la transparence et de traquer les situations de conflits d’intérêts.

5.3. Notion de conflit d’intérêts apparent

49. La notion du conflit d’intérêts potentiel fait son apparition dans les règlements internes. Le code de conduite des membres de l’Assemblée ou le Règlement de l’Assemblée nationale française, par exemple, évoquent un conflit d’intérêts de nature à paraître influencer l’exercice du mandat. Pour les parlementaires habitués à manier la règle de droit, cette introduction de la théorie des apparences suscite parfois l’incompréhension: ils peuvent la vivre comme une remise en cause de leur probité ou une atteinte à la liberté d’exercice de leur mandat 
			(18) 
			«Les
progrès de la déontologie à l’Assemblée nationale», 2015, p. 36.. Cependant, ce concept de conflit d’intérêts potentiel a percé et influence aujourd’hui la condition du débat politique.

5.4. Considérations tirées de la vie privée

50. Désormais, l’évaluation de l’existence du conflit d’intérêts, réel ou potentiel, tient compte du cercle familial du parlementaire. Il ne s’agit plus désormais d’évaluer si lui ou elle a agi dans son propre intérêt mais d’envisager le bénéfice potentiel que l’action peut avoir pour les membres de sa famille 
			(19) 
			Par
exemple, l’article 1 du code de déontologie de l’Assemblée nationale
française stipule que «les députés doivent agir dans le seul intérêt
de la nation et des citoyens qu’ils représentent, à l’exclusion
de toute satisfaction d’un intérêt privé ou de l’obtention d’un
bénéfice financier ou matériel pour eux ou leurs proches». (France), voire des amis 
			(20) 
			Voir
la définition de la situation de conflit d’intérêt, Article 4 de
la loi sur le conflit d’intérêts. (Canada). Cette réalité se traduit également par l’exigence pour le parlementaire de déclarer les intérêts financiers des membres de sa famille, déclaration rendue publique dans certains pays. Bien évidemment, cette exigence peut être considérée comme une immixtion dans la vie privée qui, par conséquent, doit poursuivre, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, un but légitime et être proportionnée par rapport à l’objectif recherché. Ainsi, le Conseil constitutionnel français a reconnu que l’objectif poursuivi – le renforcement des garanties de probité des membres du parlement – est légitime; toutefois, il a estimé que l’atteinte au principe de respect de la vie privée serait proportionnée pour les conjoints mais ne le serait pas pour les ascendants et descendants 
			(21) 
			Décision
no 2013-676 DC du 9 octobre 2013..

6. Les modèles de régulation existant dans les parlements

51. Les pratiques nationales ont produit trois modèles de base de régulation des conflits d’intérêts des membres du parlement.

6.1. Autorité indépendante de lutte contre la corruption

52. Le premier modèle est celui d’un mécanisme global anti-corruption, dans lequel un organe spécial d’investigation est chargé de diligenter des enquêtes visant les activités professionnelles des parlementaires, des membres du gouvernement et des fonctionnaires de haut niveau (Roumanie, Ukraine). Pour qu’un pareil organe puisse contrôler le respect des principes déontologiques (l’incompatibilité, le conflit d’intérêts) ceux-ci doivent être reflétés au préalable dans des dispositions législatives, sous forme de délits administratifs ou pénaux. L’avantage de ce modèle réside dans le respect du principe d’égalité devant la loi car les parlementaires sont mis sur un pied d’égalité avec d’autres titulaires d’une charge publique et font l’objet de procédures communes. Les difficultés liées à l'effectivité de ce modèle sont dues au paravent des immunités parlementaires: toute constatation du manquement mène à l'ouverture d'une procédure administrative ou pénale, et par conséquent, à une procédure de levée de l’immunité qui est une procédure complexe et tributaire du contexte politique.
53. Par ailleurs, l’utilisation de la législation sur la corruption pour combattre le conflit d’intérêts dans le domaine politique est souvent critiquée pour son insuffisance. Une enquête sera lancée uniquement si les faits sont «identifiables» et «prouvables», écartant ainsi «la théorie des apparences». À moins que le pot-de-vin puisse expliquer une action, il sera souvent difficile de démontrer les liens de causalité entre une action d’un parlementaire et d’autres motivations plus nuancées. C’est pourquoi cette voie est souvent complétée par un contrôle interne du respect des standards déontologiques et éthiques.

6.2. Autorégulation parlementaire

54. Le deuxième modèle repose sur l’autorégulation. La majorité des parlements nationaux en Europe, ainsi que le Parlement européen, ont adopté ce modèle de régulation. Il implique un organe parlementaire collégial (le bureau ou une commission parlementaire) qui prépare des rapports, enquête sur les manquements aux règles fixées en interne et impose des sanctions si une violation a été établie. Certaines réglementations internes permettent au parlement, une fois que l’existence d’un conflit d’intérêts a été établie par cet organe, de retirer les pouvoirs du membre, avec toutefois une possibilité subséquente pour le parlementaire concerné de saisir la Cour constitutionnelle 
			(22) 
			Cas de l’annulation
en 2006 par le Parlement géorgien des pouvoirs du député Valeri
Gelashvili pour implication dans des affaires de construction..
55. L’avantage d’un organe composé d’hommes et de femmes politiques tient à leur capacité à évaluer les comportements de leurs pairs au regard des spécificités du monde politique et parlementaire et du contexte culturel. Ce principe est retenu par plusieurs ordres professionnels où le pouvoir disciplinaire est détenu par une assemblée de confrères. S’agissant du monde parlementaire, il serait juste de penser que tout examen d’allégation de mauvaise conduite d’un parlementaire nécessite de comprendre le fonctionnement d’un organe politique, et notamment des interactions particulières que cet organe peut avoir avec les représentants de groupes d’intérêts.
56. Par ailleurs, les parlementaires sont familiers des méthodes de travail de leur propre institution et savent apprécier le degré raisonnable de diligence qu’on peut espérer attendre d’un parlementaire dans un contexte donné 
			(23) 
			Par
exemple, le comité consultatif du Parlement européen a décidé de
ne pas donner suite à une omission de déclarer la prise en charge
par le pays hôte de frais de voyage et d’hébergement des parlementaires
qui ont observé les élections dans ce pays. Les intéressés ont régularisé
leurs situations et ont fourni les lettres d’explication aussitôt
qu’ils ont été contactés par le comité. Un organe composé des parlementaires
est également bien placé pour savoir si un prêt bancaire d’un État
tiers reçu par un parti est susceptible de créer un conflit d’intérêts
eu égard du fonctionnement interne d’un parti et de l’institution
dans son ensemble. . À côté du pouvoir de contrôle, l’organe collégial peut être également doté d’un devoir de conseil pour interpréter les principes déontologiques et pallier l’absence de dispositions précises face à la multitude de situations quotidiennes. Le conseil fourni par des pairs familiers de l’environnement professionnel sera perçu comme légitime aux yeux de leurs collègues.
57. Les critiques associées à ce modèle relèvent qu’il transforme les membres du parlement en enquêteurs ou en juges exerçant un pouvoir sur leurs pairs, alors qu’ils peuvent être juges et parties du fait de leurs appartenances politiques; un tel organe collégial ne peut pas de ce fait être considéré comme indépendant et impartial. Ce mécanisme requiert en outre une approche proactive de la part des parlementaires mais surtout du président du parlement pour demander des investigations sur des cas d’allégations de conduites incompatibles avec le statut de parlementaire.
58. Malgré les critiques, ce modèle reste le plus répondu en Europe, sans doute en raison de la spécificité du fonctionnement des parlements, tributaires des principes d’autonomie et de séparation des pouvoirs. L’autorégulation est une réponse à l’appel à la promotion de valeurs éthiques dans la vie publique qui a, sans doute, des perspectives d’évolution.

6.3. Autorité parlementaire indépendante

6.3.1. Description

59. Si la plupart des parlements ont adopté un mode d’autorégulation, quelques parlements (Canada, France, Royaume-Uni) ont fait un pas supplémentaire en délégant le contrôle de conformité aux règles de conduite à une autorité indépendante. Cet organisme enquête sur des cas relevant de sa compétence et est souvent investi du devoir de conseil aux membres du parlement sur les questions liées à l'application des règles d'éthique. Les éléments d’analyse peuvent également porter sur des conduites ayant trait à des aspects ne relevant pas de la dimension publique de la vie des élus mais susceptibles, sans être en rapport avec leurs fonctions parlementaires, de porter un préjudice considérable à la réputation du parlement.
60. Il convient de noter que, malgré la délégation de certaines compétences à un organe indépendant, un organe collégial composé entièrement ou en partie de parlementaires (le Bureau de l’Assemblée nationale française ou la commission des normes de la Chambre des Communes du Royaume-Uni) intervient toutefois au stade final de la procédure (imposition de sanctions ou décision finale sur l’existence du manquement).
61. L’externalisation consistant à confier partiellement le contrôle à une autorité indépendante permet d’éviter les obstacles liés à l’autocensure dont pourrait faire l’objet un organe collégial. Afin de garantir son impartialité, les mandats des membres qui la composent ne sont pas révocables (sauf exception) et sont non renouvelables. Ce modèle a un coût lié au salaire et aux frais de fonctionnement du secrétariat.

6.3.2. Exemples nationaux

62. Etant donné que l’ouverture du monde parlementaire au contrôle extérieur est une approche nouvelle, les compétences des autorités existantes diffèrent.

– Royaume-Uni

63. Le commissaire pour les normes du Royaume-Uni a des compétences larges: superviser le fonctionnement du registre des intérêts financiers des membres et les autres registres; fournir des conseils confidentiels aux députés; conseiller sur l'interprétation du code de conduite; contrôler l'application du code de conduite et proposer, le cas échéant, des modifications; fournir des conseils et de former les parlementaires aux questions de conduite, la bienséance et l'éthique. Le commissaire ne peut pas statuer sur la violation d’une loi ou des règles d’une autre organisation. Les conclusions d’investigation, y compris le nom du parlementaire concerné et le nom du parlementaire à l’origine de l’enquête, sont consultables en ligne 
			(24) 
			<a href='http://www.parliament.uk/pcs'>www.parliament.uk/pcs.</a>.
64. Le commissaire peut être saisi par les parlementaires ou tout public 
			(25) 
			En 2015,
le commissaire pour les normes de la Chambre des communes a été
saisi de 1 174 plaintes dont seulement 12 ont été retenues comme
recevables. (sauf de plaintes anonymes); les plaintes sont déposées par une organisation ou au nom de quelqu’un. Il peut également lancer une enquête de son propre chef sur des allégations de violation du code de conduite rapportées par les médias 
			(26) 
			Memoranda from the
Parliamentary Commissioner for Standards – Complaint against Rt
Hon Sir Malcolm Rifkind QC MP and Rt Hon Jack Straw MP (allégation
de l’usage de leur position pour faire du lobbying au profit d’une
compagnie chinoise).. Toutefois, même si les conclusions de l’enquête sont fournies par un organe indépendant, les sanctions éventuelles à proposer sont décidées par une commission parlementaire (la commission sur les normes, composée de sept députés et sept personnalités publiques).

– France

65. Depuis 2013, le contrôle des conflits d’intérêts des parlementaires (Assemblée nationale) est en quelque sorte partagé entre les deux organes indépendants – le Déontologue et la Haute Autorité pour la transparence. Cette dernière a pour mission de contrôler la véracité, sous peine de sanctions pénales, des déclarations de patrimoine; elle a également un rôle de conseil. Le déontologue, quant à lui, est également investi du rôle de conseil et œuvre pour le respect et l’amélioration des règles déontologiques. Il «remet au Président et au Bureau un rapport annuel dans lequel il présente des propositions aux fins d’améliorer le respect des règles définies dans le code de déontologie et rend compte des conditions générales d’application de ces règles sans faire état d’éléments relatifs à un cas personnel. Ce rapport est rendu public» 
			(27) 
			Article 80-3, alinéa
4, du Règlement de l’Assemblée nationale, <a href='http://www.assemblee-nationale.fr/qui/deontologue-role.asp'>www.assemblee-nationale.fr/qui/deontologue-role.asp.</a>. À l’heure actuelle, le déontologue se concentre sur une approche préventive afin de mettre en garde les députés sur les éventuels risques. Même s’il a un rôle dans la procédure visant à établir un conflit d’intérêts, il n’a pas compétence pour publier des enquêtes individuelles.

– Canada

66. Le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, nommé par le gouvernement après consultation des partis politiques, enquête sur des infractions présumées à la Loi sur les conflits d’intérêts et au Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Il établit un rapport qui est rendu public. On appelle «études» les procédures menées en vertu de la Loi, et «enquêtes» celles menées en vertu du Code. Dans certains cas, une personne peut faire l’objet d’une enquête en vertu des deux régimes. Le commissaire peut être saisi par un parlementaire ou initier une étude de son propre chef 
			(28) 
			<a href='http://ciec-ccie.parl.gc.ca/FR/Pages/default.aspx'>http://ciec-ccie.parl.gc.ca/FR/Pages/default.aspx.</a>.

7. La gestion des conflits d’intérêts à l’Assemblée parlementaire: le cas des rapporteurs

67. Aucune des dispositions réglementaires n’interdit à un membre d’accepter un mandat de rapporteur si il ou elle détient un intérêt particulier en relation avec le sujet du rapport. L’interdiction totale d’être désigné rapporteur en cas de liens professionnels ou partisans avec un sujet spécifique engendrerait des situations dans lesquelles, par exemple, les membres de l’Assemblée issus du monde médical ne seraient pas autorisés à prendre en charge l’établissement de rapports traitant de questions liées à la santé. Soutenir que des spécialistes expérimentés ne peuvent traiter de sujets hautement techniques au sein de notre Assemblée nuirait à l’évidence à la qualité des rapports. Une telle position serait également en contradiction avec l’esprit général des règles sur la «Transparence et déclaration des intérêts des membres» (Résolution 1554 (2007)) qui autorisent les membres à s’exprimer en commission ou en séance plénière sur un sujet relevant d’un domaine dans lequel ils ont un intérêt à condition d’en avoir fait au préalable la déclaration.
68. La déclaration d’intérêts a pour objectif d’accroître la transparence, de permettre à une commission de prendre en toute connaissance de cause la décision de nommer un membre rapporteur, et d’évaluer les raisons sous-tendant la volonté d’un membre de prendre en charge l’élaboration d’un rapport. L’absence de conflit d’intérêts réel ou potentiel équivaut à faire preuve d’une neutralité absolue ce qui, à proprement parler, est impossible dans un environnement politique. S’agissant plus spécifiquement du cas de Mme De Sutter, le rapporteur note que cette dernière a, lorsqu’elle a accepté son mandat de rapporteure, signalé oralement sa fonction de chef du département de médecine reproductive à l’hôpital universitaire de Gand. La commission a décidé de lui confier l’élaboration du rapport en toute connaissance de cause. Au demeurant, ainsi qu’il a été indiqué plus haut (paragraphe 25), la commission des questions sociales a jugé qu’il n’existait aucun conflit d’intérêt concernant sa rapporteure.
69. S’agissant de la procédure à suivre en commission, en application de l’article 3 des dispositions sur la transparence et la déclaration des intérêts des membres, la commission du Règlement ne peut que confirmer – puisque le Président de l’Assemblée lui a soumis cette question, dans son courrier du 9 février 2016 – que la procédure suivie par la commission des questions sociales était parfaitement conforme aux dispositions réglementaires.
70. Il va sans dire que l’efficacité des dispositions relatives à la divulgation des conflits d’intérêts dépend de la bonne foi des rapporteurs. De l’avis du rapporteur, le cadre réglementaire actuel fournit des garanties suffisantes permettant aux commissions de s’acquitter de leur responsabilité concernant la nomination des rapporteurs, le déroulement de leur mandat et l’examen de toute allégation de conflit d’intérêts les concernant.

8. La réglementation des activités des lobbyistes et les registres de transparence

71. Au cours des discussions sur le rapport, la commission m’a demandé de fournir des informations sur l’implication des lobbyistes et des ONG dans le travail du Conseil de l’Europe, et en particulier de l’Assemblée, avant d’envisager un cadre réglementaire de transparence. Des éléments d’information ont déjà été fournis par Mme Chiora Taktakishvili dans son avis sur le rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme «Transparence et ouverture des institutions européennes» 
			(29) 
			Doc. 14096..

8.1. Type d’acteurs extra-institutionnels intervenant dans les activités du Conseil de l'Europe

8.1.1. Acteurs économiques

72. Même si les droits de l’homme, et non les considérations économiques, constituent la vocation première de l’Organisation, le Conseil de l’Europe traite indirectement de plusieurs questions qui peuvent avoir un impact considérable sur les modèles économiques existants. Ainsi, les recommandations du Comité des Ministres sur la manière de gérer les données à caractère personnel, et notamment la collecte de données en ligne, peut affecter l’industrie de la publicité en ligne, qui pèse plusieurs milliards d’euros. Des recommandations relatives à l’Internet, y compris sur le filtrage, le blocage et la suppression de contenus illicites, supposent des obligations supplémentaires et coûteuses pour les fournisseurs d’accès. Les travaux du Conseil de l’Europe sur la bioéthique, qui mettent l’accent sur les droits des personnes, l’identité et la dignité, affectent les secteurs de la recherche biologique et médicale ainsi que les avancées technologiques du domaine de la santé (génétique, transplantation, biobanques, technologies émergentes, nouvelles technologies de modification du génome, etc.), dans lesquelles le secteur privé a consenti des investissements considérables.
73. Les lobbies du monde de l’industrie et du commerce accordent également une certaine attention aux travaux de l’Assemblée. Ainsi, le rapport «Gestion de la pandémie H1N1: nécessité de plus de transparence» 
			(30) 
			Doc. 12283, Résolution
1749 (2010) et Recommandation
1929 (2010)., le rapport sur «Le danger potentiel des champs électromagnétiques et leur effet sur l'environnement» 
			(31) 
			Doc. 12608 et Résolution
1815 (2011). ou celui sur «La santé publique et les intérêts de l’industrie pharmaceutique: comment garantir la primauté des intérêts de santé publique?» 
			(32) 
			Doc. 13869 et Résolution
2071 (2015). ont fait l’objet de nombreuses observations des lobbyistes de l’industrie pharmaceutique et du monde de l’informatique, respectivement. Etant donné le large éventail de domaines couverts par leur mandat (biodiversité, ressources naturelles, énergie, transports, tourisme, santé, sécurité alimentaire, pollution, catastrophes technologiques, etc.), les membres de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable ont plus de chances d’être contactés par les lobbies de l’industrie et du monde des affaires.

8.1.2. Acteurs non économiques

74. L’Assemblée parlementaire, et pratiquement tous les comités directeurs et organes de suivi du Conseil de l’Europe collaborent, d’une manière ou d’une autre, avec des organisations (internationales) non gouvernementales (O(I)NG). Ces dernières sont souvent qualifiées d’alliés naturels du Conseil de l’Europe, parce qu’elles partagent généralement les valeurs fondamentales et les objectifs généraux de l’Organisation. Dans l’ensemble, les O(I)NG sont envisagées comme des organisations agissant dans l’intérêt du public et qui ne sont financées ni par un État, ni par un promoteur unique. Elles constituent des sources d’information, mais peuvent aussi jouer un rôle proactif dans l’élaboration d’un document juridique ou dans la diffusion des normes du Conseil de l’Europe. Ainsi, le processus d’élaboration de la Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210, «Convention d’Istanbul») a été lancé suite aux initiatives d’ONG qui ont mobilisé plusieurs acteurs du Conseil de l’Europe – et en particulier les représentations permanentes, l’Assemblée parlementaire et le Comité directeur pour les droits de l'homme – pour lancer le processus, et qui sont aujourd’hui très actifs dans le suivi de l’application des dispositions de ce traité.

8.2. Définition de critères et de procédures communs pour la sélection d’O(I)NG partenaires

75. L’actuelle coopération entre les différentes instances du Conseil de l’Europe et les O(I)NG apparaît comme une réussite. Toutefois, la Direction de l'Audit interne du Conseil de l’Europe a récemment formulé quelques recommandations sur la manière d’améliorer l’apport des O(I)NG pour les activités de l’Organisation, et a proposé de définir les procédures communes de sélection des ONG partenaires 
			(33) 
			«Evaluation
de la coopération entre les (I)NGOs et le Conseil de l’Europe dans
l’établissement des normes et de la supervision» (en anglais), Rapport
d’évaluation, 22 avril 2016.: «Afin de garantir durablement la haute valeur ajoutée de la contribution des ONG, le Conseil de l’Europe doit donc optimiser sa sélection des ONG, utiliser avec souplesse les bonnes pratiques de coopération avec celle-ci, et promouvoir leur contribution en facilitant leur accès aux informations et en prenant l’initiative de les contacter.» Le rapport évoque aussi un déséquilibre géographique ainsi que la difficulté de faire participer les organisations de jeunesse au suivi par manque d’informations de part et d’autre.
76. Le choix des ONG dépend du type d’activité menée par chaque instance intergouvernementale du Conseil de l'Europe. Les activités normatives, qui s’efforcent de définir des normes communes, s’appuieraient de préférence sur de grandes ONG internationales capables de présenter des positions consolidées ou de réaliser des analyses comparatives. Les mécanismes de suivi sont plus intéressés par des ONG nationales possédant une connaissance spécifique de leur pays. Dans la sélection d’O(I)NG, les critères de l’Assemblée parlementaire sont comparables à ceux du secteur intergouvernemental et dépendent fortement des rapports en cours d’élaboration. Les échanges de l’Assemblée avec des ONG sont indiqués sur les ordres du jour et les procès-verbaux des commissions, et sont souvent publiés; les rapports finaux mentionnent généralement les acteurs extérieurs qui ont contribué à leur élaboration.
77. Le Secrétaire Général a proposé de réviser, en consultation avec la conférence des OING, les lignes directrices sur le statut participatif des OING 
			(34) 
			«La
situation de la démocratie, des droits de l'homme et de l'État de
droit en Europe», rapport du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe,
2015, p. 11. au sein du Conseil de l’Europe, ce qui pourrait offrir une bonne occasion de structurer les relations des ONG avec l’Organisation.

8.3. Accès aux locaux du Conseil de l’Europe pour les acteurs extérieurs à l’institution

78. Au Conseil de l’Europe, il n’existe pas d’équivalent en termes de Registre de transparence commun, sans doute en raison du peu d’activité des lobbyistes professionnels et des méthodes de travail de l’Organisation. Les représentants reçoivent un badge temporaire d’accès aux locaux, sur demande des délégations nationales ou des groupes politiques.
79. Dans sa Résolution 1903 (2012), l’Assemblée a pris note du problème des «représentants d’intérêts», agissant au nom d’entités privées ou d’États, qui exercent des pressions sur ses membres jusque dans l’enceinte du Palais de l’Europe. Elle a considéré que des «procédures claires et transparentes» devraient être introduites pour réglementer leur accès à l’Assemblée. Elle a ainsi chargé le Bureau de «réviser les règles d’accès au Palais de l’Europe et d’utilisation des locaux, ainsi que les annexes aux règles concernées». Des réunions ont été tenues avec les services concernés qui ont mis en exergue une difficulté d’assurer la mise en œuvre effective du respect des espaces restreints à la circulation des personnes extérieures à l’Assemblée comme, par exemple, le bar des parlementaires.
80. J’estime que ce problème doit être abordé non pas du point de vue des restrictions d’accès mais du point de vue de la transparence. Les activités des groupes d’intérêts sont protégées par la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5) qui accorde une place importante au pluralisme des idées pour le développement de la démocratie 
			(35) 
			Report
on the Role of Extra-Institutional Actors in the Democratic System
(Lobbying), Commission de Venise, 2013.. L’intensité des cadres réglementaires existants, classés en fonction des informations révélées et des moyens de contrôle, pourrait aller de «faible» (Parlement européen, France) jusqu’à «fort» (Canada, États-Unis) 
			(36) 
			Ibid..
81. Le Parlement européen accorde aux organisations qui sont inscrites au registre de transparence l’accès à ses bâtiments, la possibilité de participer en tant qu’orateurs lors des auditions de commissions, co-organiser des événements avec les députés et se voir transmettre des informations sur les travaux du parlement. En contrepartie, les informations suivantes sont exigées. Chaque organisation doit identifier ses coordonnées, la personne juridiquement responsable, la personne chargée des relations avec l'Union européenne, les objectifs et missions, les activités spécifiques couvertes par le registre et le nombre de personnes y participant, le nom des personnes accréditées pour accéder aux bâtiments, les domaines d'intérêt et la composition et affiliation. Elles doivent également signer un code de conduite.
82. Une association doit être classée parmi les catégories suivantes:
i. cabinets de consultants spécialisés/cabinets d'avocats/consultants agissant en qualité d'indépendants;
ii. «représentants internes», groupements professionnels et associations syndicales et professionnelles;
iii. organisations non gouvernementales;
iv. groupes de réflexion, organismes de recherche et institutions académiques;
v. organisations représentant des églises et des communautés religieuses;
vi. organisations représentant des autorités locales, régionales et municipales, autres entités publiques ou mixtes, etc.
83. Je pense que l’Assemblée doit s’inspirer de ce modèle eu égard aux règles de fonctionnement et du fait que la procédure d’enregistrement doit tenir compte des avantages offerts aux groupes en contrepartie. Toutefois, contrairement au Parlement européen, les groupes ne vont pas obtenir le droit de s’exprimer en commission à moins d’y être expressément invités dans le cadre d’une audition, par exemple, ni recevoir les documents relatifs aux travaux d’une commission.
84. En outre, j’estime nécessaire de définir les règles du jeu équitables pour des organisations ou des associations indépendamment des liens d’affinité qu’elles pourraient avoir avec les délégations nationales ou les groupes politiques leur permettant de se faire inviter directement et ainsi d’éviter l’enregistrement.
85. Je propose, à ce stade, d’adopter une approche unique, ce qui permettrait de rendre consultable en ligne toutes les demandes de badges, déposées soit directement par une organisation soit par une délégation ou un groupe politique au nom d’une organisation qui contiendraient les informations suivantes: ses coordonnées, les objectifs et missions de l’organisation, le financement, le nom de la personne juridiquement responsable, le nom de la personne qui demande le badge. Des badges de catégorie unique seront délivrés à ces personnes.

9. Règles d’intégrité applicables au personnel

86. Le cadre de prévention de la corruption et des fraudes applicable au personnel du Conseil de l’Europe se compose de plusieurs documents.
87. L’Arrêté no 1296 du 18 décembre 2008 relatif à l’acceptation de rétributions, cadeaux, décorations ou distinctions, invitations et autres avantages provenant de sources extérieures à l’Organisation exige des membres du Secrétariat qu’ils refusent d’accepter tout avantage qui pourrait être raisonnablement interprété comme affectant leur jugement ou les plaçant dans une position ambiguë. Les cadeaux d’une valeur n’excédant pas € 100 peuvent être acceptés dès lors que: 1) ils constituent une pratique normale dans le cadre du protocole; et 2) ont été signalés par le membre concerné à son supérieur hiérarchique.
88. L’Arrêté no 1327 du 10 janvier 2011 relatif à la vigilance et à la prévention en matière de fraude et de corruption exige des agents qu’ils signalent les faits présumés de fraude ou de corruption. Ces règles s’appliquent également aux fonctionnaires hors cadre et à toute personne qui, sans avoir la qualité de personne relevant de l’effectif du Secrétariat Général du Conseil de l’Europe, intervient dans les activités de l’Organisation, quel que soit le lieu où elles se tiennent. Elles visent notamment, mais non exclusivement, les juges de la Cour européenne des droits de l’homme, le Commissaire aux droits de l’homme, les membres de l’Assemblée parlementaire et du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, les membres des représentations permanentes, les stagiaires, les experts, les consultants et les employés de sociétés extérieures.
89. La Direction de l’audit interne est habilitée à recevoir des informations relatives à des faits de fraude ou de corruption et à prendre les mesures qui s’imposent. Elle enquête à la demande du Secrétaire Général ou de sa propre initiative.

10. Le rapport d’expertise du GRECO

90. Lors de sa réunion plénière du 19 juin 2017, le GRECO a adopté un rapport d’expertise «Evaluation de la Déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe» 
			(37) 
			<a href='https://rm.coe.int/evaluation-de-la-deontologie-des-membres-de-l-assemblee-parlementaire-/1680728009'>https://rm.coe.int/evaluation-de-la-deontologie-des-membres-de-l-assemblee-parlementaire-/1680728009.</a>. Ce rapport, basé sur la méthodologie du GRECO et son expertise recueillie dans le cadre du 4ème cycle d’évaluation (la prévention de la corruption dans les parlements), m’a conforté dans mes propositions de modifications du Règlement.
91. L’expertise préconise de consolider et d’harmoniser les divers codes et lignes directrices sur la conduite des membres de l’Assemblée dans un texte unifié de portée obligatoire; de renforcer les dispositions sur les conflits d’intérêts; d’établir un système de déclaration des intérêts financiers qui est une mesure clé pour la détection des conflits d’intérêts potentiels.; d’élaborer des procédures rigoureuses pour la déclaration des cadeaux; de réviser le régime s’appliquant aux anciens membres impliqués dans des activités de lobbying; d’instaurer un cadre solide sur les relations avec les lobbyistes et autres tiers cherchant à influencer le processus parlementaire; de mettre en place un mécanisme cohérent et effectif du contrôle du respect des règles de conduite, y compris un organe de surveillance indépendant; d’instaurer des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives; et, enfin, de développer des mesures de sensibilisation et de formation des membres aux règles de conduite. Le GRECO a notamment mis en exergue la nécessité de mettre en place un système de déclaration d’intérêts financiers et de soumettre l’obligation de déclaration des cadeaux et autres avantages à des procédures rigoureuses, d’où la nécessité de réviser les obligations déclaratives et les formulaires.
92. L’accès libre aux locaux et aux documents pour les membres honoraires qui exercent des activités de conseil et de lobbying doit être interdit. Il serait également nécessaire d’instaurer un cadre «solide et cohérent sur les relations avec les lobbyistes et autres tiers cherchant à influencer le processus parlementaire». Les membres doivent également être dûment sensibilisés et formés à la conduite attendue de leur part.
93. Dans son rapport, le GRECO relève, dans un chapitre consacré à «l’utilisation abusive des ressources publiques», que les groupes politiques bénéficient d’un financement par le budget de l’Assemblée mais que, d’une part, les états financiers annuels soumis par chaque groupe relativement à l’utilisation de leur allocation restent confidentiels et que, d’autre part, ils «ne sont pas tenus de signaler les appuis financiers ou autres aides supplémentaires (et leur utilisation) dont ils pourraient bénéficier d’une source autre que l’Assemblée». Le GRECO recommande donc de «revoir les procédures comptables des groupes politiques afin que (i) ceux-ci soient tenus de faire rapport sur les soutiens légitimes de sources autres que l’Assemblée parlementaire, ainsi que sur l’utilisation de ces soutiens, et de rendre publics leurs états financiers; (ii) les comptes annuels de l’ensemble des groupes politiques soient soumis à l’audit externe.»
94. Enfin, mes propositions concernant la révision du mécanisme de mise en œuvre du code de conduite vont dans le sens des propositions du GRECO qui recommande la mise en place d’un organe de surveillance impartial et indépendant.

11. Propositions nécessitant des modifications réglementaires

11.1. La mise en place d’un nouveau système de contrôle de la mise en œuvre du Code de conduite

95. Après avoir examiné les différents modèles existants dans certains parlements nationaux (France, Royaume-Uni, Canada) et au Parlement européen, en particulier en ce qui concerne les procédures d’ouverture et de conduite de l’enquête, je propose de mettre en place un système renforcé de détection et d’investigation relatif aux violations alléguées du Code de conduite. La proposition est largement inspirée par le système qui existe actuellement à la Chambre des Communes du Royaume-Uni, qui a fait ses preuves et est considéré par tous comme impartial et efficace.
96. Je propose que l’Assemblée confie l’examen des demandes relatives aux violations présumées du Code de conduite et les enquêtes éventuelles à un organe indépendant chargé du respect des normes élu par les membres selon une procédure qui sera établie par le Bureau. L’initiative de l’enquête ne sera plus de la compétence discrétionnaire du Président de l’Assemblée. Même si le Président pourra toujours demander l’ouverture d’une enquête auprès de cet organe, cette possibilité sera également confiée aux membres de l’Assemblée et à l’organe d’enquête (agissant de sa propre initiative, par exemple sur la base d’allégations en provenance de sources ouvertes considérées comme suffisamment crédibles).
97. Je propose également de mettre en place un système graduel des suites à donner aux résultats d’une enquête. Toutes les enquêtes ne donneront pas lieu à un examen subséquent par l’Assemblée et à des sanctions. Par exemple, en cas de violation mineure des règles ou en cas de bonne foi (comme l’omission de déclaration d’un cadeau), l’organe d’enquête pourrait inviter le membre à rectifier la violation.
98. Si l’organe d’enquête considère qu'il y a eu violation sérieuse des règles impossible à rectifier ou que la question soulève des questions importantes, il enverra un rapport à une commission ad hoc de l’Assemblée constituée en vertu de l’article 44.4.a du Règlement. La commission ad hoc de l’Assemblée examinera le rapport et arrivera à sa propre conclusion sur la question de savoir s'il y a eu violation des règles. Elle publiera et soumettra à l’Assemblée son propre rapport, en présentant ses conclusions et ses motifs et en recommandant des sanctions éventuelles. C’est à l’Assemblée qu’il reviendra en dernier lieu de se prononcer sur les violations des règles et les sanctions à prendre.
99. Au cours de la discussion, les membres de la commission ont formulé quelques réserves concernant le modèle où la place centrale sera attribuée à un organe indépendant en mettant en exergue des raisons budgétaires 
			(38) 
			À
titre d’exemple le budget du groupe d'enquête externe indépendant
crée par l’Assemblée en juin 2017 s’élève à € 120 000 pour six mois
de travail (ne comprend aucuns coûts salariaux). Le budget annuel
du Commissaire aux normes britannique s’élève à un total de ₤ 433 971,
comprenant les coûts liés à l’emploi de cinq personnes à temps plein
et deux personnes à temps partiel sur l’ensemble des fonctions exercées
par le Commissaire (le personnel étant principalement chargé de
la tenue des quatre registres déclaratifs, dont le registre des
intérêts des membres de la Chambre des Communes); la part du budget
affecté aux enquêtes relatives à la violation du Code de conduite
ne dépasse pas ₤ 200 000. et organisationnelles. Il a été avancé que dans le cadre du climat budgétaire actuel, la création d’un nouvel organe se fera aux dépends de la réduction des activités traditionnelles de l’Assemblée et ce, sans qu’il soit prouvé qu’un organe de l’Assemblée ne puisse pas exécuter la même tâche, comme c’est le cas dans de nombreux parlements nationaux. Les membres se sont prononcés en faveur de l’élargissement du rôle de la commission du Règlement afin que lui soit confiée une mission d’enquête, la compétence de demander l’ouverture d’une enquête et de recommander des sanctions. De mon point de vue, la proposition de faire de la commission du Règlement un organe d’investigation ne cadre pas avec l’idée principale d’avoir un organe indépendant d’enquête.

11.2. Liens entre les procédures ouvertes respectivement au titre du Code de conduite et du droit pénal national

100. Je propose que les autorités nationales compétentes soient informées de l’existence d’une éventuelle infraction pénale si l’autorité chargée d’enquêter sur un manquement au Code de conduite décide, pendant ses investigations, que des actes ou omissions susceptibles de constituer un manquement au Code de conduite de l’Assemblée pourraient également constituer une violation du droit (pénal) d’un État membre. Par ailleurs, même si les principes généraux du droit ne s’opposent pas à ce qu’une procédure pénale et une procédure disciplinaire soient engagées simultanément à l’encontre de la même personne pour les mêmes faits, je propose que l’enquête de l’Assemblée soit suspendue lorsque des autorités nationales ont ouvert une enquête pénale portant sur les mêmes faits jusqu’à ce que le ministère public se prononce définitivement sur les charges retenues.

11.3. Garanties procédurales

101. Nombre de membres s’interrogent sur les garanties procédurales dont un membre de l’Assemblée mis en cause doit bénéficier. Il est important que l’enquête se déroule selon les principes procéduraux reconnus. D’un autre côté, il ne s’agit pas en l’espèce d’une procédure pénale. Même si certaines des règles relevant de la notion de «procès équitable» restent applicables aux procédures disciplinaires, leur transposition à ce type de procédure n'est cependant pas toujours évidente. Les règles de déontologie relèvent d'un modèle procédural autonome et empêchent une transposition pure et simple des règles applicables aux procès pénaux, sous peine de compromettre l'efficacité de la procédure disciplinaire et de nier sa spécificité. Les garanties de la procédure de contrôle interne pourraient dès lors être définies sur la base des principes généraux établis par la Convention européenne des droits de l'homme pour les procédures non pénales, à savoir:
  • une procédure contradictoire (permettre à la personne mise en cause de connaître et de commenter les observations présentées ou les preuves produites);
  • l'égalité des armes (fournir à chaque partie une possibilité raisonnable de faire entendre sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à l'autre partie);
  • la présence et la publicité.

11.4. Renforcement du devoir de transparence

102. Il me paraît nécessaire avant tout d’accroître la prise de conscience par les membres de l’Assemblée des valeurs et des règles du Code de conduite et d’exiger un engagement ferme des membres de l’Assemblée envers le respect du Code de conduite. Par conséquent, je propose que la déclaration écrite prévue par l’article 6.2.b du Règlement que chaque membre signe soit complétée par la phrase suivante: «Par ailleurs, je prends connaissance et m’engage à respecter le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire.»
103. Ma deuxième proposition concerne les déclarations, qui constituent la pierre angulaire du système d’intégrité parlementaire. Les informations relatives aux activités professionnelles, à une participation financière, aux mandats et responsabilités exercés dans une entité commerciale ou à but non-lucratif sont essentielles dans la gestion des conflits d’intérêts potentiels en relation avec une activité donnée au sein de l’Assemblée. Les obligations déclaratives sont devenues, avec l’appui du GRECO, une norme non réfutable de transparence en Europe.
104. Par conséquent, je propose de mettre en place une obligation pour les membres de l’Assemblée de rendre publiques leurs occupations. Les membres de l’Assemblée doivent ainsi décrire leurs activités professionnelles, y compris les postes qu’ils occupent au sein d’un conseil d’administration, leur appartenance, lien et participation dans des groupes d’amitié parlementaires, des entités publiques, des organisations non gouvernementales, ou encore une intervention lors d’une conférence. La proposition alternative formulée au cours de la discussion était de rajouter sur la page web des membres de l’Assemblée leurs déclarations d’intérêts effectuées en vertu de la législation nationale. Toutefois, à l’heure actuelle, certains parlements ne disposent pas d’une telle obligation. Une difficulté subsidiaire concerne la multitude des langues dans lesquelles ces déclarations sont effectuées et les informations y étant contenues. Un formulaire unique pour l’ensemble des membres de l’Assemblée disponible en anglais et en français, serait une solution efficace. Toutefois, je préfère laisser au Bureau de l’Assemblée le soin d’élaborer le formulaire de déclaration et son contenu.
105. Par ailleurs, je propose de mettre en place, en application de l’article 14 du code de conduite, une déclaration de participation de membres à des manifestations organisées par des tiers. La déclaration doit être remplie par un membre qui a participé en qualité de membre de l’Assemblée parlementaire à une manifestation organisée par un État, y compris par son parlement, ou un organisme autre que le Conseil de l’Europe que sa participation soit autorisée ou non par le Bureau de l’Assemblée. Par ailleurs, si le membre le souhaite, il pourrait déclarer sa participation à des manifestations organisées par des tiers auxquelles il a participé en sa qualité d’élu national.

11.5. Relations avec les lobbyistes et autres tiers cherchant à influencer le processus parlementaire

106. Généralement, une réglementation sur le lobbying couvre deux séries d’aspects. Le premier type couvre les obligations des lobbyistes et autres tiers qui ne sont pas forcément des lobbyistes au sens commun (personnalités et représentants d’affaires, ONG, syndicats et autres qui n’exercent que ponctuellement des pressions et/ou n’auraient pas un statut de lobbyistes). Le deuxième type touche aux obligations et à la conduite des parlementaires (qui sont la cible des lobbies).
107. Afin de couvrir les deux types d’obligations, je propose les mesures suivantes:
  • Premièrement, pour autant que cela concerne des lobbyistes, je propose d’adopter une approche unique qui permettrait de rendre consultable en ligne toutes les demandes de badges déposées à chaque session, soit directement par une organisation, soit par une délégation ou un groupe politique au nom d’une organisation et qui contiendraient les informations suivantes: ses coordonnées, les objectifs et missions de l’organisation, le financement, le nom de la personne juridiquement responsable, le nom de la personne qui demande le badge. Les badges ainsi délivrés comporteront une mention unique. Une consultation préalable auprès du commissaire de protection des données du Conseil de l’Europe est nécessaire pour déterminer les règles et la publication des données personnelles. Cette approche a reçu un large soutien des membres de la commission.
  • Deuxièmement, en qui concerne la conduite des membres, je propose de rendre publics, sur une base volontaire, les contributeurs qui ont participé à l’élaboration d’un rapport de l’Assemblée. Le rapporteur pourrait, s’il le souhaite, rendre publique la liste des organisations consultées. Une pratique similaire non contraignante existe au Parlement européen (empreintes législatives) et a été mise en pratique dans le cadre du rapport sur la proposition de la directive «tabac» 
			(39) 
			Rapport
du 24 juillet 2013 sur la proposition de directive du Parlement
européen et du Conseil relative au rapprochement des dispositions
législatives, réglementaires et administratives des États membres
en matière de fabrication, de présentation et de vente du tabac
et de ses produits., le rapport sur une feuille de route vers une économie compétitive à faible intensité de carbone à l'horizon 2050, et autres.

11.6. Sanctions

108. Le code de conduite dispose d’une grille de sanctions progressives. La moins lourde consiste à ce que le Président de l’Assemblée lise publiquement, à l’Assemblée une déclaration motivée énonçant les résultats de l’enquête menée à l’encontre du membre concerné. En présence d’un manquement grave ou répété aux règles de conduite, l’intéressé peut se voir infliger une suspension de plusieurs droits touchant à sa participation aux travaux de l’Assemblée: privation temporaire du droit de signer un amendement, une proposition ou une déclaration écrite; privation temporaire du droit de prendre la parole et d’être inscrit sur la liste des orateurs. Des sanctions telles que la déchéance ou le retrait du mandat – perçues comme des sanctions suffisamment efficaces et dissuasives par le GRECO – ne sont pas conformes à la procédure de l’Assemblée de nomination des membres, basée sur le Statut du Conseil de l’Europe (STE no 1) et le Règlement de l’Assemblée. Toutefois, certains membres de la commission ont exprimé leur souhait de voir la liste des sanctions élargie.

11.7. Harmonisation des dispositions relatives aux conflits d’intérêts et à la déclaration d’intérêts

109. Dans sa lettre du 9 février 2016, le Président de l’Assemblée a demandé que le présent rapport clarifie la question de l’application des dispositions relatives aux conflits d’intérêts en lien, notamment, avec le contenu de la déclaration et la procédure de vote visant à établir si une disposition relative au conflit d’intérêts a été respectée. Par ailleurs, dans son rapport d’évaluation le GRECO a également recommandé de renforcer et d’harmoniser les dispositions sur les conflits d’intérêts.
110. Selon le libellé actuel, les commissions demandent au candidat à un rapport de déclarer «l’absence de conflits d’intérêts». Cette formule peut paraître inexacte et éloignée des stipulations du Code de conduite (article 3) qui n’imposent pas aux membres d’être exempts de tout conflit d’intérêts, mais de déclarer tout intérêt dans le respect du principe de transparence. Par conséquent, je propose de modifier le paragraphe 1.1.1 du Code de conduite afin que le président de la commission demande au candidat à un rapport de déclarer «tout intérêt professionnel, personnel, financier ou économique susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport». Cette déclaration doit être consignée au procès-verbal de la réunion.
111. Les textes pararéglementaires (article 3 des dispositions sur la transparence et la déclaration des intérêts des membres, article 3 du Code de conduite des rapporteurs) prévoient qu’un rapporteur peut être relevé de ses fonctions s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration, ou s’il a enfreint les règles de conduite. Actuellement, la procédure de relèvement d’un rapporteur de ses fonctions doit s’opérer en deux temps, en suivant les prescriptions du Règlement de l’Assemblée (article 47.2): en premier lieu, la commission doit se prononcer sur l’existence d’un conflit d’intérêts (ce premier vote étant de nature procédurale, il se tient à mains levées) et, dans l’affirmative, elle se prononce, par un second vote, sur le relèvement du rapporteur de son mandat (cette décision de démettre le rapporteur de ses fonctions se déroule par scrutin secret). Peut-être y a t-il matière à réflexion pour simplifier cette procédure et la ramener à un vote unique.
112. Le cadre actuel d’intégrité s’est construit progressivement dans le temps, pendant plusieurs années, sur la base de résolutions successives. Certains textes comportent des dispositions identiques ou similaires. En particulier, les articles 1 et 3 de l’annexe III «Transparence et déclaration des intérêts des membres» ont été intégrés dans le code de conduite pour les rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, à l’article 1.1.1 et à l’article 3, respectivement. En outre, son article 2 a été repris dans l’article 9 du code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire. Par conséquent, le rapporteur propose de supprimer ce texte et de modifier en conséquence l’article 13 du Règlement qui s’y réfère.

12. Propositions ne nécessitant pas de modifications réglementaires

12.1. Rendre publiques les déclarations de cadeaux et de voyage

113. Toujours dans le mouvement général vers plus de transparence, je propose que l’Assemblée se prononce sur l’opportunité de publier sur le site web de l’Assemblée les déclarations des cadeaux et avantages similaires des membres, ainsi que de rendre publiques les déclarations à des manifestations organisées par des tiers.

12.2. Déclaration sur l’honneur des membres honoraires

114. Il a été fait mention de cas d’anciens membres de l’Assemblée, devenus membres honoraires, impliqués dans la représentation ou la défense, déclarée ou non, des intérêts de tiers. En devenant membres honoraires, ces personnes obtiennent notamment un droit d’accès au Palais de l’Europe et à l’hémicycle. Certains utilisent les facilités attachées à ces prérogatives de membres honoraires à des fins personnelles, comme promoteurs rémunérés d’intérêts. L’article 16 du Code de conduite, ainsi que l’article 3 du Règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire, interdisent déjà ces pratiques. Il convient désormais de trouver un moyen efficace d’appliquer cette disposition. Je propose de faire signer aux membres honoraires, au moment de l’attribution du statut, une déclaration sur l’honneur par laquelle ils affirment ne pas être engagés dans la représentation et la défense des intérêts de tiers. Par ailleurs, cette déclaration doit être recueillie auprès des associés honoraires actuels.

12.3. La sensibilisation des membres de l’Assemblée à leurs obligations éthiques

115. Pour donner suite aux recommandations du GRECO relatives à la sensibilisation des membres de l’Assemblée au code de conduite, je propose que le Secrétariat prépare des fiches thématiques détaillant de manière pratique les dispositions existantes sur les thématiques comme les cadeaux et avantages similaires, la participation des membres à des colloques et conférences, les voyages des membres à l’invitation de tiers et autres.

13. Conclusions

116. La commission du Règlement a débattu des propositions relatives aux modifications qui pourraient être apportées au cadre d’intégrité de l’Assemblée, recommandées par le rapporteur, à plusieurs reprises au cours des réunions qu’elle a tenues en 2016 et 2017. Le projet de résolution adopté le 21 septembre 2017 est l’aboutissement d’une longue réflexion au cours de laquelle la commission a pris en considération la position de ses membres, l’avis d’experts ainsi que les recommandations du GRECO.

Annexe – Demande d'enquête en vertu du paragraphe 17 du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

(open)

A. Identité du membre visé par les allégations

Veuillez identifier le membre qui aurait contrevenu aux dispositions du Code:

Nom

 

Titre

 

Adresse

 

Téléphone

 

Courriel

 

B. Motifs de la demande d’enquête

Veuillez énoncer les allégations relatives au non-respect par un membre de ses obligations en vertu du Code, en précisant les dispositions du Code en cause ainsi que les motifs raisonnables sous-tendant ces allégations:

Infraction alléguée

 

Liste des activités ou des faits pertinents appuyant vos motifs raisonnables de croire que le Code a été enfreint

 

Dispositions pertinentes du Code

 

Veuillez joindre toute documentation connexe à votre demande d’enquête.

Veuillez indiquer si vous joignez des documents à la présente demande:

Oui …

Non …

[Ajouter des feuilles au besoin]

C. Attestation

Nous, soussignés, membres de l’Assemblée, avons des motifs raisonnables de croire qu’un membre de l’Assemblée n’a pas respecté ses obligations aux termes du Code de conduite et entendons saisir par la présente requête l’organe de l’Assemblée chargé des enquêtes.

Nous faisons la présente demande d'enquête de bonne foi et attestons que toute l'information fournie est, à notre connaissance, véridique et exacte.

Nous comprenons qu'il nous incombe de fournir à l’organe d’enquête toute l'information requise dans le présent formulaire et d’y joindre toute documentation pertinente en notre possession qui pourrait appuyer notre demande.

Date

Nom

Délégation

Groupe politique

Signature

1.

     

2.

     

3.

     

4.

     

5.

     

6.

     

7.

     

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9.

     

10.

     

11.

     

12.

     

13.

     

14.

     

15.

     

16.

     

17.

     

18.

     

19.

     

20.