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Résolution 2182 (2017)

Suivi de la Résolution 1903 (2012): promotion et renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l'intégrité des membres de l'Assemblée parlementaire

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 10 octobre 2017 (31e séance) (voir Doc. 14407, rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, rapporteur: M. Ian Liddell-Grainger). Texte adopté par l’Assemblée le 10 octobre 2017 (31e séance).

1. L’Assemblée parlementaire, en tant qu’organe statutaire du Conseil de l’Europe, est chargée de promouvoir les principes des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du droit, qui fondent le Conseil de l’Europe et sont le patrimoine commun des États membres. Le caractère universel des sujets débattus ne laisse pas pour autant l’Assemblée à l’abri des intérêts publics ou privés, qui cherchent à influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif du processus parlementaire. Les rapports de l’Assemblée qui portent sur la situation dans les États membres, tout comme les conclusions des missions d’observation des élections conduites par l’Assemblée, parce qu’ils évaluent le niveau de respect des droits de l’homme et de la démocratie, et parce qu’ils sont suivis de près par les autorités nationales, les dirigeants politiques, les médias et les divers secteurs de la société civile, ont un impact direct et manifeste sur l’image et la réputation des pays concernés, avec des conséquences sur les plans politique et économique. Enfin, le travail de l’Assemblée sur des questions de société parfois polémiques, combiné à l’absence de réglementation globale sur le lobbying, ouvre potentiellement la porte à des pressions indues et à des opportunités de corruption.
2. Les allégations de corruption et de promotion d’intérêts formulées récemment à l’encontre de certains membres ou d’anciens membres de l’Assemblée ont mis en cause, comme jamais auparavant, la crédibilité des actions et des positions de l’Assemblée. Face au risque de voir la réputation de l’Assemblée se dégrader de manière irréversible, une stratégie globale a été adoptée afin de prévenir les risques de corruption et de mettre en lumière les éventuelles pratiques occultes.
3. Première mesure de cette stratégie, un groupe d’enquête externe indépendant a été créé par l’Assemblée afin de mener une enquête indépendante approfondie sur les allégations de corruption et de promotion d’intérêts portées à l’encontre de certains membres ou d’anciens membres de l’Assemblée. Son mandat a été ratifié par l’Assemblée en avril 2017, et sa composition en juin. Ce groupe, composé de personnalités ayant une haute autorité morale dans le monde juridique, a débuté ses travaux et son rapport est attendu pour la fin de l’année 2017.
4. La deuxième mesure consiste à mettre en place un cadre d’intégrité solide et cohérent au sein de l’Assemblée, avec le conseil du Groupe d’États contre la corruption (GRECO). L’Assemblée exprime sa reconnaissance au GRECO pour la diligence avec laquelle il a effectué une expertise approfondie de son cadre d’intégrité et de l’ensemble des règles et mécanismes relatifs à la déontologie des membres de l’Assemblée. Elle se félicite du rapport intitulé «Évaluation de la déontologie des membres de l’Assemblée parlementaire» que le GRECO a adopté le 19 juin 2017 et souligne la pertinence et la qualité de ses recommandations qui ont inspiré les propositions de changements réglementaires.
5. L’Assemblée décide de mettre en place de nouvelles règles de conduite et obligations déclaratives qui permettraient, à l’avenir, de prévenir toute corruption au sein de l’Assemblée. Elle décide en outre de réviser le mécanisme actuel de supervision des principes et des règles déontologiques qui s’imposent à ses membres, qui repose actuellement intégralement sur le Président de l’Assemblée parlementaire et que le GRECO qualifie d’«excessivement discrétionnaire». L’Assemblée considère que l’instauration d’un nouveau mécanisme permettra un examen impartial des allégations de violations des principes et règles déontologiques, y compris lorsque ces violations sont révélées par des sources extérieures, ainsi qu’un lancement plus rapide et une conduite équitable des enquêtes sur de telles allégations. Elle décide également de réviser la liste des sanctions susceptibles de s’appliquer en cas de violation avérée des normes déontologiques de l’Assemblée.
6. L’Assemblée décide également, ainsi qu’elle l’a annoncé dans sa Résolution 2170 (2017) «Promouvoir l’intégrité dans la gouvernance pour lutter contre la corruption politique» et comme le préconise le GRECO, de se doter de règles claires sur l’accès et la circulation des tiers dans les locaux du Conseil de l'Europe pendant les sessions et les réunions de l’Assemblée, d’instaurer un registre de transparence, et de prendre des mesures concrètes afin de ne pas permettre aux anciens membres impliqués dans des activités de conseil et de lobbying rémunérées de bénéficier d’avantages spécifiques.
7. En conséquence, l’Assemblée décide de modifier le mécanisme de supervision du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire en remplaçant le chapitre «Respect du code de conduite» du code par le nouveau chapitre suivant:
«1. La mise en œuvre du présent code relève du Président de l’Assemblée, de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, et de l’Assemblée, conformément aux compétences et responsabilités qui leur sont conférées par le Règlement et le présent code de conduite.
2. Si un membre est soupçonné d’avoir agi en violation du code de conduite, le Président de l’Assemblée peut demander des éclaircissements et des compléments d’information au membre en question, au président de sa délégation nationale, au président de son groupe politique ou au président de la commission dont le membre concerné fait partie. Le Président de l’Assemblée peut se prononcer sur des violations mineures du code de conduite si la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles n’a pas été appelée à se prononcer sur les mêmes faits.
3. La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles (ci-après «la commission») examine les allégations de violation du présent code de conduite formulées à l’encontre des membres de l’Assemblée, portées à son attention par le Président de l’Assemblée, ou par au moins 20 membres de l’Assemblée représentant cinq délégations nationales au moins (en utilisant le formulaire de demande d’enquête approprié). Elle peut également lancer une enquête de son propre chef.
4. La commission se réunit à huis clos et agit dans le strict respect de la confidentialité:
4.1. lorsqu’elle décide d’ouvrir une enquête, elle informe le membre concerné et lui communique copie des éléments de preuve qui lui ont été fournis à l'appui des allégations, l’informe de ses droits et lui demande ses observations préliminaires;
4.2. elle auditionne le membre concerné ainsi que les témoins éventuels; les procès-verbaux de ces entretiens ou auditions sont confidentiels;
4.3. elle donne au membre concerné, à tous les stades de la procédure, la possibilité de commenter tous les éléments de preuve recueillis au cours de l’enquête à l'appui des allégations, y compris ceux ayant conduit à identifier un éventuel nouveau manquement aux règles; elle peut examiner tout élément de preuve fourni par le membre concerné ou entendre tout témoin, proposé par le membre concerné, susceptible de fournir des éléments de preuve pertinents pour l'enquête;
4.4. avant de finaliser ses conclusions, elle donne au membre la possibilité de commenter des parties factuelles du projet de rapport.
5. Les membres s’engagent à coopérer, à tous les stades de l’enquête, avec la commission. Ils sont tenus de communiquer toute information ou tout document requis.
6. Si la commission constate que les allégations ne sont pas fondées, elle en informe les plaignants et le membre concerné.
7. Si la commission constate l’existence d’une violation mineure du code de conduite, relevant par exemple de la négligence, elle en informe le membre concerné en l’invitant à prendre toute mesure nécessaire. La commission décide s’il y a lieu de publier la décision sur le site internet de l’Assemblée.
8. Si la commission constate l’existence d’une violation sérieuse du code de conduite, elle prépare un rapport qui comportera tous les éléments de preuve recueillis au cours de l’enquête, les observations du membre concerné, et ses conclusions. Ce rapport est publié sur le site internet de l’Assemblée. La commission décide s’il y a lieu d’imposer une sanction et détermine la sanction appropriée, conformément à l’article … [«Mesures en cas de non-respect des dispositions du code de conduite»].
9. Si la commission constate que des actes ou omissions faisant l’objet de l’enquête sont susceptibles de constituer une violation du droit pénal d’un État membre, elle en informe les autorités nationales compétentes. Elle peut décider de suspendre la procédure en cours au sein de l’Assemblée s’il s’avère que des autorités nationales mènent une enquête sur des faits identiques.»
8. L’Assemblée décide également de renforcer le devoir d’intégrité, de responsabilité et de transparence de ses membres:
8.1. en ajoutant, à la fin de l’article 6.2.b du Règlement, la phrase suivante: «Je déclare avoir pris connaissance du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire et m’engage à en respecter les dispositions.»;
8.2. afin de mieux prévenir la corruption active, en modifiant le paragraphe 11 du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, en remplaçant les mots «Les membres s’engagent à ne pas solliciter ni accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification» par les mots «Les membres s’engagent à ne pas promettre, donner, solliciter ou accepter de rémunération, d’indemnité ou de gratification»;
8.3. en ajoutant, à la fin du paragraphe 14 du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, la phrase suivante: «Les formulaires de déclaration de cadeaux soumis par les membres sont publiés sur le site internet de l’Assemblée»;
8.4. en ajoutant, dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, après le chapitre «Règles de conduite», un nouveau chapitre «Déclarations d’intérêts» rédigé comme suit: «Les membres présentent à l’ouverture de chaque session de l’Assemblée parlementaire, sous leur responsabilité personnelle, une déclaration d'intérêts en utilisant le formulaire approprié. La déclaration est publiée sur le site internet de l’Assemblée», et en invitant la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles à établir le format et le contenu des obligations déclaratives.
9. L’Assemblée décide de renforcer la cohérence des dispositions relatives aux conflits d’intérêts:
9.1. en modifiant l’article 13 du Règlement de l’Assemblée «Déontologie des membres de l’Assemblée» comme suit: «Dans l’exercice de leurs fonctions, les membres de l’Assemblée s’engagent à agir dans le respect des principes et des règles établis dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée et dans les autres textes déontologiques, annexés au présent Règlement en tant que textes pararéglementaires» [l’article 13.2 est supprimé];
9.2. en supprimant l’annexe III des textes pararéglementaires intitulée «Transparence et déclaration des intérêts des membres»;
9.3. en modifiant le paragraphe 1.1.1 du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire comme suit: «l’obligation de déclarer tout intérêt économique, commercial, financier ou autre, à titre professionnel, personnel ou familial, en relation avec le sujet du rapport [note de bas de page: Tout candidat à une fonction de rapporteur est tenu de déclarer tout intérêt susceptible d’être jugé pertinent ou d’entrer en conflit avec le sujet du rapport ou avec le pays concerné par le rapport au moment de la nomination en commission. Cette déclaration est consignée au procès-verbal de la réunion]»;
9.4. en modifiant le paragraphe 3 du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire comme suit: «Sanction du non-respect des règles: En cas de non-respect d'un ou plusieurs engagements, notamment s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration, la commission démet le rapporteur de ses fonctions et le remplace»;
9.5. en invitant le Bureau de l’Assemblée à modifier les Lignes directrices pour l’observation des élections par l’Assemblée parlementaire afin d’en harmoniser les dispositions avec celles du Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire et du Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, notamment en ce qui concerne les obligations déclaratives et le mécanisme de supervision et de sanction.
10. En outre, l’Assemblée décide de revoir son régime de sanctions, en harmonisant et en élargissant la liste des sanctions potentielles:
10.1. en ajoutant dans le Code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, après le chapitre «Respect du code de conduite», le nouveau chapitre «Mesures en cas de non-respect des dispositions du code de conduite» suivant:
«En cas d’infraction grave ou répétée aux règles de conduite par un membre donné, la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles peut prendre l’une ou plusieurs des mesures suivantes: privation temporaire du droit de prendre la parole et d’être inscrit sur la liste des orateurs; privation temporaire du droit de signer un amendement, une proposition de résolution ou de recommandation ou une déclaration écrite; privation temporaire du droit d’adresser des questions au Comité des Ministres; privation temporaire du droit d’être désigné rapporteur ou interdiction temporaire d’exercer la fonction de rapporteur de commission; interdiction temporaire d’être membre d’une commission ad hoc d’observation des élections; privation temporaire du droit de se porter candidat à la présidence de l’Assemblée, à la présidence ou à la vice-présidence d’une commission ou d’une sous-commission; et privation temporaire du droit de représentation institutionnelle de l’Assemblée et de ses commissions»;
10.2. en modifiant en conséquence la référence faite au code de conduite dans le paragraphe 3 des dispositions pararéglementaires sur la «Conduite des membres de l’Assemblée parlementaire durant les débats de l’Assemblée (article 22 du Règlement)».
11. En ce qui concerne l’instauration d’un cadre cohérent pour renforcer la transparence dans les relations avec les acteurs extra-institutionnels et prévenir toute influence indue des intérêts publics ou privés sur l’exercice indépendant, impartial et objectif du mandat parlementaire à l’Assemblée, l’Assemblée décide:
11.1. en ce qui concerne les règles d’accès et de circulation dans les locaux du Conseil de l’Europe pendant les sessions de l’Assemblée, de charger le Bureau de l’Assemblée de réviser ces règles, ainsi que les annexes aux règles concernées, afin d’instaurer une identification spécifique des représentants d’intérêts, ainsi qu’un mécanisme de signalement de tout comportement abusif, et, dans ce cadre, d’examiner la création d’un registre des représentants d’intérêts;
11.2. de modifier le règlement spécial sur l’honorariat à l’Assemblée parlementaire en remplaçant la dernière phrase du paragraphe 1 par la phrase suivante: «Un diplôme faisant état de ce titre lui est délivré»; en supprimant les paragraphes 2.a et 2.b relatifs aux prérogatives des associés honoraires; et en remplaçant le paragraphe 3 par le paragraphe suivant: «Au moment de l’attribution du titre d’associé honoraire, l’ancien membre de l’Assemblée signe une déclaration sur l’honneur attestant qu’il n’est pas engagé dans la représentation et la défense des intérêts d’une personne ou entité tierce devant l’Assemblée. Le titre d’associé honoraire lui sera retiré s’il a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration»;
11.3. de modifier le règlement spécial sur le titre et les prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire en remplaçant la dernière phrase du paragraphe 1 par la phrase suivante: «Un diplôme faisant état de ce titre lui est délivré»; en supprimant les paragraphes 2.b et 2.c; et en remplaçant le paragraphe 3 par le paragraphe suivant: «Au moment de l’attribution du titre de Président(e) honoraire, l’ancien(ne) Président(e) de l’Assemblée signe une déclaration sur l’honneur attestant qu’il/elle n’est pas engagé(e) dans la représentation et la défense des intérêts d’une personne ou entité tierce devant l’Assemblée. Le titre de Président(e) honoraire lui sera retiré s’il/elle a omis de déclarer un intérêt pertinent ou fait une fausse déclaration»;
11.4. de charger le Bureau de recueillir de telles déclarations auprès des associés honoraires et des présidents honoraires actuels;
11.5. de modifier le Code de conduite des rapporteurs de l’Assemblée parlementaire, en ajoutant le nouveau paragraphe 3 suivant: «3. Règles applicables à la publication des sources utilisées au cours de l’élaboration du rapport: la commission peut demander au rapporteur, ou le rapporteur le décider lui-même, de publier, en annexe au projet de rapport, la liste des personnes, experts et représentants d’organisations gouvernementales ou non gouvernementales consultés, rencontrés ou reçus au cours de l’élaboration du rapport».
12. L’Assemblée décide que les modifications du Règlement et des textes pararéglementaires figurant dans la présente résolution entreront en vigueur dès leur adoption. Les nouvelles dispositions relatives à l’honorariat à l’Assemblée parlementaire ainsi qu’aux prérogatives de Président(e) honoraire de l’Assemblée parlementaire s’appliquent dès leur adoption à tous les anciens membres de l’Assemblée bénéficiant de cet honorariat.
13. L’Assemblée prend note de la recommandation du GRECO relative aux conseils, à la formation et à la sensibilisation des membres aux règles de conduite, et invite la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles à promouvoir les bonnes pratiques dans des domaines tels que les cadeaux et avantages similaires, la participation des membres à des événements extérieurs, et les voyages des membres à l’invitation de tiers.
14. Enfin, l’Assemblée appelle les présidents des groupes politiques à renforcer le cadre d’intégrité de ces groupes, et notamment à prendre dûment en compte la recommandation du GRECO relative à la révision des procédures comptables des groupes politiques et à la soumission des comptes annuels de l’ensemble des groupes politiques à l’audit externe.