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Résolution 2231 (2018)
Les ressortissants ukrainiens détenus par la Fédération de Russie en tant que prisonniers politiques
1. L’Assemblée parlementaire rappelle
les résolutions précédentes relatives à la situation en Ukraine,
en particulier la Résolution
1990 (2014) relative au réexamen, pour des raisons substantielles,
des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation russe, la Résolution 2034 (2015) relative
à la contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs
non encore ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie,
la Résolution 2063 (2015) relative
à l’examen de l’annulation des pouvoirs déjà ratifiés de la délégation
de la Fédération de Russie (suivi du paragraphe 16 de la Résolution 2034 (2015)),
la Résolution 2112 (2016) relative
aux préoccupations humanitaires concernant les personnes capturées
pendant la guerre en Ukraine, la Résolution 2132 (2016) relative
aux conséquences politiques de l’agression russe en Ukraine, la Résolution 2133 (2016) relative
aux recours juridiques contre les violations des droits de l’homme
commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle
des autorités ukrainiennes et la Résolution 2198 (2018) relative
aux conséquences humanitaires de la guerre en Ukraine.
2. L’Assemblée rappelle en particulier la position qu’elle a
adoptée dans les résolutions susmentionnées sur les questions qui
présentent un intérêt dans le contexte actuel:
2.1. la Crimée a été annexée illégalement
à la suite d’une occupation militaire de la Fédération de Russie,
qui, en conséquence, a l’obligation de garantir les droits de l’homme
de tous en Crimée en vertu de sa compétence extraterritoriale fondée
sur le contrôle effectif de la région;
2.2. la situation des droits de l’homme en Crimée s’est détériorée:
décès et disparitions de militants politiques ayant critiqué l’occupation
et l’annexion russes, menaces et actions contre des organisations non
gouvernementales (ONG) et des médias critiques, et harcèlement et
répression de la communauté tatare indigène de Crimée;
2.3. les habitants de la Crimée ont subi d’énormes pressions
pour qu’ils acceptent un passeport russe et renoncent à leur nationalité
ukrainienne, la nationalité russe leur ayant été imposée par les
autorités de fait;
2.4. de nombreux citoyens ukrainiens ont été placés en détention
en Crimée ou en Fédération de Russie pour des raisons politiques
ou sur la base de fausses accusations.
3. L’Assemblée est en conséquence profondément préoccupée par
les informations selon lesquelles pas moins de 70 ressortissants
ukrainiens, voire davantage – généralement considérés comme des
prisonniers politiques, y compris par le Parlement européen dans
sa Résolution, du 14 juin 2018, sur la Russie, notamment le cas
du prisonnier politique ukrainien Oleg Sentsov – sont toujours détenus
en Crimée ou en Fédération de Russie pour des motifs de nature politique
ou sur la base de fausses accusations. À titre d’exemple, elle considère
que les cas de MM. Oleg Sentsov, Volodymyr Balukh et Pavlo Hryb
en particulier correspondent à la définition qu’elle donne des prisonniers
politiques dans sa Résolution
1900 (2012) relative à la définition de prisonnier politique.
4. En ce qui concerne MM. Sentsov, Balukh et Hryb, l’Assemblée
est alarmée par les informations relatives à leurs conditions de
détention. Certaines allégations font état de torture et de traitements
inhumains dans les cas de MM. Sentsov et Balukh, et de privation
de soins médicaux essentiels au vu des affections potentiellement
graves dont souffrent M. Balukh, qui fait une grève de la faim depuis
mars 2018, et M. Hryb. M. Sentsov, qui fait aussi une grève de la
faim depuis mai 2018, aurait désormais des problèmes de cœur et de
rein; il aurait été alimenté de force par les autorités russes,
en violation possible de l’article 3 de la Convention européenne
des droits de l’homme (STE no 5).
5. L’Assemblée est également gravement préoccupée par des témoignages
détaillés faisant état de mauvais traitements et de privation de
soins médicaux dans d’autres cas de prisonniers politiques présumés.
6. L’Assemblée déplore que les mécanismes de suivi des droits
de l’homme du Conseil de l’Europe, en particulier le Comité européen
pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains
ou dégradants (CPT), n’aient pas eu la possibilité de se rendre
en Crimée pour apprécier la situation des droits de l’homme des
personnes qui y sont détenues et appelle la Fédération de Russie
à faciliter cet accès. Elle regrette également que la commissaire
aux droits de l’homme du Parlement ukrainien, Liudmyla Denysova,
se soit vu interdire récemment de rendre visite à M. Sentsov dans
la colonie pénitentiaire où il est détenu.
7. L’Assemblée s’engage à continuer d’observer la situation des
droits de l’homme en Crimée occupée et de suivre la situation des
citoyens ukrainiens détenus en tant que prisonniers politiques par
la Fédération de Russie. L’Assemblée s’engage en outre à suivre
l’exécution des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme
concernant la violation des droits de l’homme des personnes détenues
en Crimée et détenues par la Fédération de Russie.
8. L’Assemblée appelle en conséquence la Fédération de Russie:
8.1. à libérer sans plus tarder tous
les Ukrainiens détenus en Fédération de Russie et en Crimée pour des
raisons politiques ou sur la base de fausses accusations, et à s’efforcer
d’accélérer la libération des citoyens ukrainiens détenus dans les
territoires du Donbass sous le contrôle effectif de la Fédération
de Russie;
8.2. à garantir, jusqu’à leur libération, le plein respect
de leurs droits, y compris en respectant l’interdiction de la torture
et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et en garantissant
le droit d’accès à l’assistance médicale nécessaire de manière à
préserver comme il convient leur santé et leur bien-être;
8.3. à s’abstenir d’alimenter de force M. Sentsov ou tout autre
détenu, à moins que cela soit nécessaire d’un point de vue médical
pour lui sauver la vie;
8.4. à autoriser des observateurs internationaux indépendants
à contrôler l’état de santé et les conditions de détention de ces
détenus, y compris le CPT et le Comité international de la Croix-Rouge, et
à autoriser les responsables ukrainiens, notamment la commissaire
aux droits de l’homme du Parlement ukrainien, à leur rendre visite;
8.5. à abandonner la politique d’imposition de la nationalité
russe aux citoyens ukrainiens qui vivent en Crimée et ne souhaitent
pas l’obtenir, et à s’abstenir de transférer de force ces personnes
de Crimée en Fédération de Russie, y compris les personnes qui font
l’objet de mesures de droit pénal;
8.6. à lever l’interdiction pesant sur le Majlis, qui est contraire
aux normes internationales relatives à la liberté d’association,
et à permettre à ses dirigeants Moustafa Djemilev et Refat Choubarov
d’entrer en Crimée;
8.7. à mettre un terme aux persécutions et aux pressions à
l’encontre des Tatars de Crimée et de leurs représentants, y compris
les avocats et les défenseurs des droits de l’homme.