1. Introduction
1. Lors de sa réunion du 29 juin
2018, le Bureau de l’Assemblée a pris note du rapport de la commission ad
hoc sur le rôle et la mission de l’Assemblée parlementaire et a
décidé de le transmettre à la commission du Règlement, des immunités
et des affaires institutionnelles afin qu’elle examine, dans le
cadre d’un rapport à présenter à la partie de session de l’Assemblée
d’octobre 2018, «les propositions visant à conserver, modifier ou
à compléter le Règlement régissant la ratification ou la contestation
des pouvoirs et/ou les droits de représentation ou de participation
des délégations nationales» ainsi que «les propositions portant
sur les droits de vote des membres ou sur les procédures de vote
de l’Assemblée».
2. Rappelons que la commission ad hoc, instituée par une décision
du Bureau du 15 décembre 2017, avait pour objectif de mener une
réflexion associant le plus grand nombre possible d’acteurs de l’Assemblée
afin d’élaborer des propositions concrètes, relativement à la mise
en œuvre des paragraphes 16-18 de la
Résolution 2186 (2017) sur un appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin
de réaffirmer l’unité européenne, et de défendre et promouvoir la
sécurité démocratique en Europe
.
La commission ad hoc avait pour mandat:
«– de réfléchir à, et si possible
d’élaborer, des propositions visant à harmoniser les règles régissant
la participation et la représentation des États membres dans les
deux organes statutaires, tout en respectant pleinement l'autonomie
des deux organes;
– de préparer des propositions
concernant le rôle et la mission de l'Assemblée parlementaire en
tant qu’organe statutaire du Conseil de l'Europe et en tant que
forum paneuropéen de dialogue interparlementaire qui vise à avoir
un impact dans tous les États membres du Conseil de l'Europe.»
3. Si le contexte qui a amené la constitution de la commission
ad hoc du Bureau est connu et a pesé incontestablement sur le périmètre
de sa réflexion, la commission du Règlement a, quant à elle, clairement décidé
de s’affranchir de toutes considérations politiques et d’examiner
les propositions qui ont été formulées par les délégations parlementaires
et les groupes politiques de l’Assemblée en les évaluant dans une perspective
institutionnelle, plus large et de longue durée, afin de déterminer
le mode de fonctionnement de l’Assemblée pour les années à venir.
Le Règlement de l’Assemblée ne saurait être instrumentalisé: on
ne change pas une procédure pour tenter de résoudre un problème
politique. La réintégration de la Fédération de Russie au sein de
l’Assemblée parlementaire n’est ni le sujet ni l’objet du présent
rapport.
4. Pour autant, la question de la révision éventuelle des mécanismes
décisionnels de l’Assemblée est légitime, parce qu’elle permet à
l’Assemblée – à quelques mois de son 70ème anniversaire
– de s’interroger, dans le cadre d’un débat pleinement transparent,
sur la pertinence de ses procédures au regard des buts qu’elle s’est
fixés. Elle démontre ainsi, une fois encore, sa capacité à faire
évoluer sa pratique et à adapter ses instruments, si et lorsqu’elle
le juge nécessaire, afin de mieux promouvoir, en tant qu’organe
statutaire du Conseil de l'Europe, les principes et valeurs qui
sont le «patrimoine commun des peuples» de la Grande Europe (Préambule
du Statut du Conseil de l'Europe (STE no 1)).
5. Aussi le présent rapport vise-t-il à apporter un éclairage
détaillé sur les procédures existantes, dans une perspective institutionnelle
où la commission du Règlement entend formellement rappeler les pouvoirs
et compétences qui sont dévolus à l’Assemblée par le Statut de l’Organisation.
Un rappel des décisions prises par l’Assemblée au cours des trente
dernières années pour revaloriser progressivement mais assurément
ses propres mécanismes et renforcer leur efficacité et leur autorité
est indispensable, notamment parce que l’immense majorité des membres
de notre Assemblée n’a, et pour cause, pas pris part à la réflexion
de nos aînés ni eu à se prononcer sur les événements politiques
majeurs auxquels elle se rapportait.
6. Enfin, il importe de souligner que la réflexion de la commission
du Règlement se limite strictement au périmètre qui lui a été assigné
par sa saisine, à savoir, l’examen des dispositions concernant la
contestation ou le réexamen des pouvoirs des délégations nationales,
ainsi que les droits de représentation et de participation des délégations
nationales, et, dans ce cadre, les procédures de vote de l’Assemblée
et les droits de vote des membres.
2. Pouvoirs et compétences générales de
l’Assemblée parlementaire
2.1. Rappel
des dispositions statutaires
7. Le Statut du Conseil de l'Europe
stipule, à l’article 10, que «Les organes du Conseil de l’Europe
sont: i. le Comité des Ministres; ii. l’Assemblée Consultative (Parlementaire)»,
et son chapitre V détaille les compétences de l’Assemblée, «l’organe
délibérant du Conseil de l’Europe».
8. Aux termes de l’article 1er du
Statut, l’Assemblée parlementaire est, au même titre que le Comité
des Ministres, l’autre organe statutaire, chargé de contribuer à
la réalisation du but du Conseil de l'Europe («Le but du Conseil
de l’Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses [États]
Membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes
qui sont leur patrimoine commun et de favoriser leur progrès économique
et social. Ce but sera poursuivi au
moyen des organes du Conseil, par l’examen des questions
d’intérêt commun, par la conclusion d’accords et par l’adoption
d’une action commune dans les domaines économique, social, culturel,
scientifique, juridique et administratif, ainsi que par la sauvegarde et le développement des droits
de l’homme et des libertés fondamentales»).
9. En vertu de l’article 28 du Statut, l’Assemblée parlementaire
adopte son Règlement intérieur, et elle est libre de le modifier.
Les articles concernant la constitution, l’organisation et le fonctionnement
de l’Assemblée (articles 23 à 35 du Statut) ne peuvent pas être
modifiés sans son accord et tout amendement doit être approuvé par
l’Assemblée elle-même. L'article 28 du Statut confère donc à l'Assemblée
la compétence exclusive d’édicter ses propres règles. Le fait que
le Statut exige l'inclusion de certains éléments de procédure dans
le Règlement ne peut limiter les compétences de l'Assemblée à adopter
des règles qu'elle juge nécessaires pour son bon fonctionnement.
2.2. Rappel
des dispositions réglementaires
10. En vertu du principe de la
hiérarchie des normes juridiques, le Règlement de l’Assemblée (article
28 du Statut du Conseil de l'Europe) ne saurait comporter de dispositions
qui soient contraires au Statut du Conseil de l'Europe. Le Règlement
découle du Statut de l’Organisation, et vient, par des dispositions
particulières, préciser les dispositions générales qu’il contient.
2.2.1. s’agissant
de la ratification des pouvoirs, de leur contestation et des droits
de représentation et de participation des délégations nationales
11. Ainsi, le Statut du Conseil
de l'Europe prévoit expressément la compétence de l’Assemblée pour
vérifier les pouvoirs de ses membres. Les dispositions des articles
6 et suivants du Règlement relatifs à la composition des délégations
nationales et à la vérification des pouvoirs se basent sur les articles
25, 26 et 28 du Statut
. Si
le Comité des Ministres a compétence pour décider de suspendre la
représentation d’un État membre ou de prononcer son exclusion (article
8 du Statut), l’Assemblée est, quant à elle, souveraine quant aux
conditions de représentation des parlements nationaux en son sein.
12. C’est sur l’ensemble de cette base statutaire que l’Assemblée
parlementaire a institué, depuis 1949, une procédure générale de
vérification des pouvoirs de ses membres, à l’ouverture de la session
annuelle (correspondant aux articles 6.3, 6.4, 7 et 8 du Règlement
actuel), ainsi qu’une procédure de contestation des pouvoirs dans
le courant d’une session (article 9 du Règlement), étant entendu
que c’est sur cette même base statutaire que l’Assemblée a conçu
des procédures spéciales de contestation des pouvoirs depuis 1964.
13. L’ensemble du mécanisme de contestation des pouvoirs, élaboré,
sur le plan réglementaire, au cours des trente dernières années
(voir chapitre 3 ci-après), repose sur l’article 3 et le Préambule
du Statut. Ainsi que cela a été rappelé ci-dessus (paragraphe 8),
l’Assemblée, en tant qu’organe du Conseil de l'Europe, est tenue
de mettre en place les moyens effectifs de promouvoir les buts du
Conseil de l'Europe.
14. Que la contestation des pouvoirs d’une délégation nationale
soit fondée sur des raisons formelles (article 7 du Règlement) ou
des raisons substantielles (articles 8 et 9), l’article 10 du Règlement
de l’Assemblée relatif aux décisions de l’Assemblée sur la contestation
ou le réexamen de pouvoirs ne liste que trois alternatives possibles:
«10.1.a.
la ratification des pouvoirs, ou la confirmation de la ratification
des pouvoirs,
10.1.b. la non-ratification
des pouvoirs, ou l’annulation de la ratification des pouvoirs,
10.1.c. la ratification des
pouvoirs, ou la confirmation de la ratification des pouvoirs, assortie
de la privation ou de la suspension, applicable aux membres de la
délégation concernée, de l’exercice de certains des droits de participation
ou de représentation aux activités de l’Assemblée et de ses organes.»
15. Dans ce dernier cas, la délégation parlementaire de l'État
membre concerné siège à l’Assemblée mais est privée de certains
droits de représentation et/ou de participation. Ces droits ne sont
pas énumérés dans le Règlement. Il appartient à l’Assemblée de déterminer
l’étendue de «la sanction» lorsqu’elle est amenée à se prononcer,
par voie de résolution, sur une contestation des pouvoirs (toutefois,
la commission du Règlement a, à la demande du Bureau de l’Assemblée,
établi une liste de droits de participation ou de représentation
dont les membres peuvent être privés dans le cadre de la contestation
ou du réexamen des pouvoirs – document AS/Pro (2014) 10 def).
2.2.2. s’agissant
des droits de vote des membres et des procédures de vote de l’Assemblée
16. L’Assemblée détermine librement
les procédures et conditions de vote de ses décisions, notamment
les majorités qui s’appliquent, en application des articles 29 et
30 du Statut et sous la réserve des stipulations qui y figurent.
17. Les conditions de vote des décisions de l’Assemblée sont fixées
au chapitre IX du Règlement (article 40 sur les modes de votation,
article 41 sur les majorités requises, article 42 sur le quorum,
article 43 sur le droit de vote
).
Les articles 41 à 43 demeurent inchangés depuis 1949; seule exception,
récente, l’ajout de la décision de destituer le titulaire d’un mandat
électif (article 54.7) qui s’effectue à la majorité des deux tiers
des suffrages exprimés et aux conditions de quorum.
18. Toutefois, il ressort de l’article 29 du Statut que la modification des dispositions du Règlement
relatives à la majorité requise pour le vote d’une décision nécessite
d’être approuvée par l’Assemblée à la majorité des deux tiers («(…)
les résolutions de l’Assemblée parlementaire, (…) qui ont pour objet
(…) de déterminer la majorité requise pour les résolutions ne relevant
pas des alinéas i. à iv. (…) sont prises à la majorité des deux tiers
des voix exprimées»).
19. En conséquence, toute modification par l’Assemblée de l’article
41 du Règlement devra être adoptée à la majorité des deux tiers
des votes.
20. Par ailleurs, l’Assemblée détient une compétence élective
(juges à la Cour européenne des droits de l'homme, Commissaire aux
droits de l’homme, Secrétaire Général(e) et Secrétaire Général(e)
adjoint(e) du Conseil de l'Europe, Secrétaire Général(e) de l’Assemblée
parlementaire) qui découle du Statut du Conseil de l'Europe, d’une
convention ou d’une résolution du Comité des Ministres, selon, dans
le cadre d’une procédure conjointe (ou à tout le moins partagée)
avec le Comité des Ministres. Ainsi qu’il l’a été rappelé (paragraphe
10), l’Assemblée ne saurait appliquer des procédures qui iraient
à l’encontre des dispositions statutaires.
3. Modifications
du Règlement de l’Assemblée concernant l’examen des pouvoirs des
délégations nationales – Rappel chronologique
21. Depuis 1949, l'Assemblée examine
au début de chaque session annuelle les pouvoirs des délégations nationales,
ainsi que, en cours d’année, les pouvoirs des représentants et suppléants
désignés après l’ouverture de la session, afin de vérifier si les
nominations sont conformes aux dispositions du Statut. Cet exercice
est devenu toutefois au fil des ans un «véritable test de démocratie».
22. Ainsi, à la suite de crises politiques majeures ou de coups
d’État dans certains États membres (Chypre en 1964, Grèce en 1967,
Turquie en 1981), l'Assemblée a inventé une formule ad hoc de contestation
des pouvoirs, indépendamment de toute disposition spécifique existant
dans son Règlement, afin de suivre la situation dans ces États membres,
d’évaluer leur degré de respect des valeurs et des principes fondamentaux du
Conseil de l'Europe et de prendre position sur la violation de leurs
obligations statutaires.
23. En effet, jusqu’en 1996, le Règlement de l’Assemblée ne prévoyait
qu’une procédure générale et très simple de vérification des pouvoirs
de ses membres, reposant sur le Statut du Conseil de l'Europe (articles
25, 26 et 28), se limitant à énoncer que les pouvoirs faisant l’objet
d’une réclamation ou d’une contestation étaient renvoyés à la Commission
du Règlement. Cette base s’est révélée suffisante pour permettre
à l’Assemblée d’examiner les contestations motivées par le non-respect
d’«une ou plusieurs des dispositions applicables du Statut (dont
notamment les articles 3, 25, 26), y compris les principes démocratiques
consacrées dans son préambule» (article 6 du Règlement, tel que
modifié par la
Résolution
852 (1985)).
24. Avec l’adoption de la
Résolution
1081 (1996) sur la contestation des pouvoirs de délégations nationales dans
le courant d'une session ordinaire, l’Assemblée se dote officiellement
dans le Règlement d’une procédure permettant de contester des pouvoirs
non pas uniquement à l’ouverture de la session annuelle mais en
cours d’année parlementaire. De surcroît, cette procédure très élaborée
et très complète (exigence d’une demande préalable répondant à des
conditions de dépôt et de motivation, étapes de traitement de la
demande, etc.) prévoit que l’Assemblée prenne position sur la demande
d’annulation de la ratification des pouvoirs sur la base de propositions
fixant les conséquences de la décision.
25. Ainsi l’article 6 du Règlement, en vigueur entre 1996 et 2000,
disposait que:
«L'Assemblée peut reconsidérer les pouvoirs
ratifiés dans le courant de la même session ordinaire lorsqu'une
proposition de résolution a été déposée visant à annuler la ratification.
Cette proposition doit être motivée et doit reposer:
– sur une violation grave des
principes fondamentaux du Conseil de l'Europe mentionnés à l'article
3 et dans le préambule du Statut; ou
– sur le paragraphe 9 de la Directive n° 508 (1995).»
«Le projet de texte contient,
le cas échéant, une justification pour annuler la ratification des
pouvoirs d’une délégation et des propositions relatives aux conséquences
de ce retrait, qui pourraient être les suivantes:
– privation, applicable aux
membres de la délégation concernée, du droit de présenter des documents officiels
au sens de l’article 23 du Règlement, d’assumer des fonctions et
de voter au sein de l’Assemblée et de ses organes, avec cependant
maintien du droit pour ces membres de participer et de prendre la
parole lors des parties de session de l’Assemblée et des réunions
de ses organes; ou
– privation, applicable aux
membres de la délégation concernée, de l’exercice de tout droit
de participation aux activités de l’Assemblée et de ses organes».
26. Le nouveau Règlement entré en vigueur en 2000, suite à la
révision générale de 1999, instaure trois procédures distinctes
[contestation de pouvoirs non encore ratifiés pour des raisons formelles
(article 7), contestation de pouvoirs non encore ratifiés pour des
raisons substantielles (article 8) et réexamen de pouvoirs déjà
ratifiés pour des raisons substantielles (article 9)], mais une
base unique de propositions quant à l’éventail des recommandations
envisageables, à savoir:
- soit
la ratification des pouvoirs (ou la confirmation de la ratification
des pouvoirs);
- soit la non-ratification des pouvoirs (ou l’annulation
de la ratification des pouvoirs);
- soit la privation ou la suspension, applicable aux membres
de la délégation concernée, de l’exercice de certains des droits
de participation ou de représentation aux activités de l’Assemblée
et de ses organes (avec ratification des pouvoirs ou confirmation
de la ratification des pouvoirs).
27. A la faveur de la révision du Règlement de 2014 (
Résolution 2002 (2014)), les articles correspondants (articles 7.3, 8.5 et
9.4) ont été regroupés sous un nouvel article unique, l’article
10 «Décision de l’Assemblée sur la contestation ou le réexamen de
pouvoirs» (voir paragraphe 14 ci-dessus).
28. Ces développements réglementaires sont étroitement liés à
l’instauration d’une
procédure de suivi
des obligations et des engagements contractés par les États membres,
en 1993, et à la consolidation de cette procédure depuis:
- Dans la Directive 488 (1993) sur le respect des engagements pris par les nouveaux
États membres, l'Assemblée estime que le respect des «engagements
précis formulés par les autorités des États candidats sur des questions
liées aux principes fondamentaux de l'Organisation» «est la condition
d'une participation pleine et entière des délégations parlementaires
des nouveaux États membres à ses travaux».
- Dans sa Résolution
1031 (1994) sur le respect des engagements pris par des États membres
au moment de leur adhésion au Conseil de l'Europe, l'Assemblée considère
que «tous les États membres du Conseil de l'Europe sont tenus de
respecter les obligations qu'ils ont souscrites aux termes du Statut, de
la Convention européenne des Droits de l'Homme et de toutes les
autres conventions auxquelles ils sont parties» et elle estime que
«tout manquement aux engagements librement consentis, s'il perdure, aura
des conséquences (...). A cette fin, l'Assemblée pourra utiliser
les dispositions pertinentes du Statut du Conseil de l'Europe et
de son propre Règlement».
- la Directive
508 (1995) sur le respect des obligations et engagements contractés
par les États membres du Conseil de l'Europe est ainsi libellée:
«L'Assemblée pourrait sanctionner toute rupture persistante de ces
engagements, et manque de coopération au processus de suivi, par
la non-ratification des pouvoirs d'une délégation parlementaire
nationale, au début de sa prochaine session ordinaire, conformément
à l'article 6 du Règlement» (paragraphe 9) et, «si le pays continue
à ne pas respecter ses engagements, l'Assemblée pourrait adresser
une recommandation au Comité des Ministres, lui demandant d'engager l'action
appropriée prévue par l'article 8 du Statut du Conseil de l'Europe»
(paragraphe 10).
- La Résolution
1081 (1996) sur la contestation des pouvoirs de délégations nationales
dans le courant d'une session ordinaire, susmentionnée, a institué
une procédure permettant à l’Assemblée d’annuler une ratification
des pouvoirs «en cas de violation grave des principes fondamentaux
du Conseil de l'Europe mentionnés à l'article 3 et dans le préambule
du Statut» ou de «rupture persistante de ces engagements et de manque
de coopération au processus de suivi» .
La Résolution 1081 établit les possibilités de sanctions suivantes:
«– privation,
applicable aux membres de la délégation concernée, du droit de présenter
des documents officiels au sens de l'article 23 du Règlement, d'assumer
des fonctions et de voter au sein de l'Assemblée et de ses organes,
avec cependant maintien du droit pour ces membres de participer
et de prendre la parole lors des parties de session de l'Assemblée
et des réunions de ses organes; ou
privation, applicable aux membres
de la délégation concernée, de l'exercice de tout droit de participation aux
activités de l'Assemblée et de ses organes.»
- enfin, la Résolution 1115 (1997) sur la création d'une commission de l'Assemblée pour
le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil
de l'Europe institue une commission de suivi «chargée de veiller
au respect des obligations contractées par les États membres aux
termes du Statut du Conseil de l’Europe, de la Convention européenne
des droits de l’homme et de toutes les autres conventions de l’organisation
auxquelles ils sont parties, ainsi qu’au respect des engagements
pris par les autorités des États membres lors de leur adhésion au
Conseil de l’Europe».
Il est prévu que l’Assemblée «pourra sanctionner le manque
de respect persistant des obligations et engagements contractés
et le manque de coopération dans le processus de suivi en adoptant
une résolution et/ou une recommandation, ou en refusant de ratifier
les pouvoirs d’une délégation parlementaire nationale au début de
sa session ordinaire suivante, ou en annulant des pouvoirs ratifiés
dans le courant de la même session ordinaire, conformément à l’article
6 du Règlement. Si l’État membre continue à ne pas respecter ses engagements,
l’Assemblée pourra adresser une recommandation au Comité des Ministres,
lui demandant d’engager l’action prévue par les articles 8 et 9
du Statut du Conseil de l’Europe».
Les articles 7 à 9 du Règlement ont été adaptés en conséquence.
29. Il peut paraître surprenant
que des voix s’élèvent, en 2018, pour remettre en cause, ou à tout
le moins questionner, la compétence de l’Assemblée d’édicter ses
procédures de contestation des pouvoirs des délégations nationales,
question qui n’a pas semblé émouvoir ni interpeller qui que ce soit
depuis des décennies, que ce soit dans les rangs de l’Assemblée
ou au Comité des Ministres. L’Assemblée n’a pas souvenir que le
Comité des Ministres, saisi par l’Assemblée lorsqu’elle s’est prononcée
sur la composition de délégations parlementaires en lien avec la
rupture par les États membres concernés de leurs obligations statutaires,
ait marqué une quelconque réprobation à cet égard – par exemple
par la
Résolution 361
(1968) sur la situation en Grèce, la
Recommandation 547 (1969) sur la situation en Grèce, ou encore par la
Recommandation 1444 (2000) sur le conflit en Tchétchénie.
30. Analyser 30 années de décisions de l’Assemblée pour renforcer
ses procédures, c’est convenir que cette démarche, réfléchie, continuelle
et graduelle, a clairement visé à rehausser l’Assemblée au niveau
de compétence du Comité des Ministres. Le Comité des Ministres dispose
de l’arme absolue – l’article 8 du Statut, qui lui permet de suspendre
la représentation d’un État membre ou de prononcer son exclusion
– mais il n’en a jamais fait usage, y compris dans les situations
de conflits armés, de coups d’État ou de crises politiques majeures
qui ont émaillé l’histoire européenne des États membres au cours
de ces cinquante dernières années. Les mécanismes de contestation
des pouvoirs s’appuyant sur la violation des obligations statutaires contractées
par les États ne sont que la variante parlementaire des pouvoirs
du Comité des Ministres en la matière.
31. S’il faut harmoniser les procédures entre le Comité des Ministres
et l’Assemblée parlementaire, ainsi que certains l’appellent de
leurs vœux – sans doute pas exempts d’arrière-pensées –, ce n’est
pas à l’Assemblée de dévaluer ses propres mécanismes, dès lors qu’ils
lui ont permis de réagir de manière effective aux crises, mais bel
et bien au Comité des Ministres de revaloriser les siens.
32. Les propositions de l'Assemblée pour la révision générale
du Statut du Conseil de l’Europe –
Recommandation 1212 (1993) relative à l'adoption d'un Statut révisé du Conseil
de l'Europe
– incluaient
une règle nouvelle et politiquement importante (article 20.d), stipulant
que: «Pendant la période où sa représentation à l'Assemblée est
suspendue, un membre n'aura pas le droit de vote au Comité des Ministres et
ne pourra pas en assumer la présidence». L’Assemblée pensait à Chypre,
dont l’absence de l’Assemblée pendant 19 ans n’a pas empêché son
ministre des Affaires étrangères de présider le Comité des Ministres.
Le Comité des Ministres n’a pas donné suite aux propositions de
l’Assemblée.
4. Contributions
des délégations nationales et des groupes politiques de l’Assemblée
aux travaux de la commission ad hoc sur le rôle et la mission de
l’Assemblée parlementaire: position de la commission du Règlement,
des immunités et des affaires institutionnelles
33. La commission du Règlement
a examiné les contributions des délégations nationales et des groupes politiques
présentées dans le cadre des travaux de la commission ad hoc sur
le rôle et la mission de l’Assemblée parlementaire
ainsi
que le rapport final de la commission ad hoc
. Elle a considéré
que les propositions formulées devaient être prises en compte non
pas d’un point de vue à court terme mais être évaluées quant à leurs
implications et conséquences sur le mode de fonctionnement effectif
de l’Assemblée sur le long terme.
34. Rappelons, une nouvelle fois, que deux questions seulement
ont fait l’objet d’un renvoi précis à la commission du Règlement:
la procédure de contestation ou de réexamen des pouvoirs des délégations nationales,
ainsi que les droits de représentation et de participation des délégations
nationales; les procédures de vote de l’Assemblée et les droits
de vote des membres de l’Assemblée.
35. Ainsi que le souligne le rapport final de la commission ad
hoc, si la quasi-totalité des contributeurs voient dans l’Assemblée
parlementaire une instance de promotion des valeurs européennes
communes que sont la démocratie, l’État de droit et les droits de
l’homme, approche qu’il convient de renforcer, les vues sont plus diverses
et même parfois divergentes s’agissant des mécanismes permettant
de garantir le respect effectif des objectifs fondamentaux et des
principes fondateurs du Conseil de l'Europe par les États membres.
4.1. Pouvoirs
et droits de représentation et de participation des délégations
nationales
4.1.1. Positions
des délégations nationales et des groupes politiques
4.1.1.1. Contestation
des pouvoirs pour des raisons formelles
36. Aucune contribution n’a remis
en question le principe de la contestation des pouvoirs pour des
raisons formelles prévue à l’article 7 du Règlement sur la base
des critères actuels de représentation équitable des groupes ou
partis politiques et de représentation de sexes.
4.1.1.2. Contestation
des pouvoirs pour des raisons substantielles
37. Les délégations nationales
et les groupes politiques ont rappelé, dans l’ensemble, leur attachement
aux instruments que l’Assemblée a développés au cours des décennies,
en tant que «gardienne» des droits de l’homme, de l’État de droit
et du pluralisme démocratique, pour s’assurer du suivi des obligations
des États membres, y compris de leurs obligations conventionnelles.
De nombreuses délégations rappellent qu’il n’est pas possible de
promouvoir la défense des normes juridiques les plus élevées en
matière de protection des droits de l’homme, de la démocratie et
de l’État de droit, si la violation des valeurs et des principes fondamentaux
que les États membres du Conseil de l'Europe se sont «statutairement»
engagés à respecter n’est pas sanctionnée.
38. Une large majorité des contributions soutient donc le mécanisme
existant, rappelant qu’il s’agit du seul mécanisme efficace dont
dispose l’Assemblée pour contrôler le respect des principes et des
valeurs du Conseil de l'Europe par les États membres, et pour agir,
à tout le moins en situation d’urgence ou dans les cas exceptionnels,
par exemple en cas de coup d’État et d’instauration d’une dictature
militaire. Un certain nombre de contributeurs redoutent qu’une révision
de ses mécanismes se traduise par un affaiblissement du rôle de l’Assemblée,
notamment de sa procédure de suivi, et appellent à faire preuve
de prudence dans les modifications qui pourraient être apportées
au Règlement. Pour certains, les engagements d’adhésion et les obligations
statutaires des États membres devraient même être encore renforcés.
4.1.2. Position
de la commission du Règlement
4.1.2.1. sur
la procédure de contestation des pouvoirs non encore ratifiés pour
des raisons formelles
40. Lors de l’échange de vues qu’elle
a tenu à sa réunion du 3 septembre 2018, la commission est convenue qu’il
n’y avait pas lieu de modifier la procédure de contestation des
pouvoirs pour des raisons formelles, telle qu’elle figure à l’article
7 du Règlement.
4.1.2.2. sur
la procédure de contestation des pouvoirs non encore ratifiés ou
de réexamen des pouvoirs déjà ratifiés pour des raisons substantielles
41. S’agissant de la contestation
ou du réexamen des pouvoirs des délégations nationales pour des
raisons substantielles, la commission a constaté, à partir des contributions
faites à la réflexion de la commission ad hoc, que, dans leur très
grande majorité, délégations nationales et groupes politiques sont
opposés à remettre en cause la procédure existante, dans son essence
et son existence. Elle constitue le seul instrument de poids de
l’Assemblée lui permettant de réagir aux atteintes graves portées
aux valeurs et principes de l’Organisation et d’agir à l’égard des
États membres pour les amener à respecter leurs obligations et engagements
statutaires et conventionnels. S’il était mis fin à cette procédure,
quelle serait la marge de décision de l’Assemblée pour agir face
à un État membre qui rétablirait la peine de mort, qui emprisonnerait
tous les parlementaires de l’opposition, qui supprimerait l’institution
parlementaire ou démantèlerait l’institution judiciaire, qui instituerait des
tribunaux d’exception, ou qui occuperait militairement un État voisin?
42. Les vues exprimées au sein de la commission sur la proposition
de durcir les conditions d’initiation d’une procédure, par un accroissement
du nombre minimum de membres qui en font la demande, ne sont pas unanimes.
43. Actuellement, une procédure de contestation des pouvoirs non
encore ratifiés (article 8.1.a) nécessite d’être initiée par au
moins 30 membres de l’Assemblée présents dans la salle des séances,
appartenant à cinq délégations nationales au moins, et une procédure
d’annulation des pouvoirs déjà ratifiés suppose le dépôt préalable
d’une proposition de résolution signée par au moins 50 membres,
appartenant à deux groupes politiques et à cinq délégations nationales
au moins (article 9.2). La commission de suivi, quant à elle, peut enclencher
l’une ou l’autre de ces procédures, sur la base d’un rapport (articles
8.1.b, 8.4, 9.1.b et 9.3).
44. La commission a donc examiné la possibilité de rendre plus
lisibles ces deux procédures et d’unifier les conditions d’une contestation
ou d’une demande de réexamen des pouvoirs, prévues à l’article 8
et à l’article 9. En s’inspirant des conditions qui s’appliquent
à une demande de quorum à l’Assemblée (article 42), les articles 8
et 9 pourraient être modifiés et regroupés sous un même article
libellé comme suit:
«a. à l’ouverture d’une session ordinaire,
sur la base d’une demande présentée par au moins un sixième des
membres de l’Assemblée, appartenant à cinq délégations nationales
au moins, présents dans la salle des séances, recommandant que ces
pouvoirs ne soient pas ratifiés;
b. au cours d’une session ordinaire,
sur la base d’une proposition de résolution présentée par au moins un
sixième des membres de l’Assemblée, appartenant à cinq délégations
nationales au moins, diffusée au moins une semaine avant l’ouverture
d’une partie de session, recommandant que ces pouvoirs soient réexaminés.»
45. En effet, les conditions figurant au Règlement pour la vérification
du quorum en séance – et celles fixant le quorum lui-même – sont
pleinement transposables: s’il faut au moins un sixième des représentants composant
l’Assemblée qui sont autorisés à voter, appartenant à cinq délégations
nationales au moins pour appuyer une demande de quorum, on peut
considérer que cette disposition est un critère valide pour l’initiation d’une
contestation des pouvoirs. De même (voir chapitre 4.3 ci-après),
on peut retenir ce même critère pour le vote de la décision de l’Assemblée
se prononçant sur une contestation des pouvoirs, qui nécessiterait
le quorum des membres de l’Assemblée (à savoir un tiers des représentants
ou suppléants autorisés à voter).
46. La commission de suivi conserve l’intégralité de ses prérogatives
réglementaires actuelles, sans changement.
4.1.2.3. sur
les critères fondant la contestation des pouvoirs non encore ratifiés
ou le réexamen des pouvoirs déjà ratifiés pour des raisons substantielles
47. Sur les critères plus précis
sur lesquels une contestation des pouvoirs devraient reposer (l’actuelle formulation
– article 8.2 du Règlement – mentionne «une violation grave des
principes fondamentaux du Conseil de l’Europe mentionnés à l’article
3 et dans le préambule du Statut» et «le manque de respect persistant
des obligations et engagements contractés par les États membres
et le manque de coopération dans le processus de suivi de l’Assemblée»),
il ne paraît pas souhaitable que la commission du Règlement se charge
– ou soit chargée – d’élaborer un catalogue de critères: d’une part,
une telle liste ne pourra en aucun cas être exhaustive, et, d’autre
part, l’exercice repose sur une évaluation politique qui doit être
laissée à la discrétion de l’Assemblée, lorsqu’elle examine les
motifs d’une demande de contestation des pouvoirs, au cas par cas.
Il va de soi qu’une telle évaluation de ce qui relève d’une «violation
grave des principes fondamentaux du Conseil de l'Europe» devra notamment
se fonder sur le référentiel existant – le corpus normatif du Conseil de
l'Europe. Cette précision pourra figurer expressément dans le projet
de résolution proposé.
4.1.2.4. sur
la procédure de contestation des pouvoirs de membres individuels
48. À l’occasion de l’échange de
vues du 3 septembre, la question de la contestation des pouvoirs
non pas d’une délégation dans son ensemble, mais d’un ou plusieurs
membres individuels a été évoquée.
49. La commission a eu l’occasion ces dernières années de discuter
de l’opportunité de modifier le Règlement s’agissant de donner suite
à une demande de contestation des pouvoirs non encore ratifiés,
pour des raisons formelles, de membres de l’Assemblée, pris individuellement,
dans le contexte de l'article 7, plus particulièrement afin de sanctionner
les actes ou les paroles de membres lorsque ceux-ci violent gravement
et avec persistance les principes et les valeurs défendues par le
Conseil d’Europe
.
50. À l’occasion d’une contestation des pouvoirs intervenue en
janvier 2013
,
la commission du Règlement avait souligné les limites du Règlement
actuel, puisque, en pratique, seul le refus d’un membre de signer
une déclaration solennelle l’exposerait à voir ses pouvoirs contestés
à titre individuel
. La commission avait considéré que «le
libellé actuel de l’article 7.1.c ne permet pas de contester les
pouvoirs d’un membre individuel de manière effective, en particulier
s’agissant de sanctionner un membre du fait de ses actions ou de
ses déclarations lorsque celles-ci sont gravement contraires et
portent atteinte de manière persistante aux principes et valeurs
défendus par le Conseil de l'Europe».
51. Dans un rapport de 2005, la commission du Règlement avait
déjà examiné la question de la contestation des pouvoirs à titre
individuel et analysé en détail les arguments plaidant en faveur
ou contre l’introduction d’une procédure visant à empêcher les membres
de parlements nationaux qui se seraient expressément identifiés
aux activités et aux programmes de partis opposés aux valeurs du
Conseil de l’Europe de devenir représentants ou suppléants à l’Assemblée
parlementaire
.
52. Dans la
Résolution
1443 (2005), l’Assemblée avait alors considéré que «l’adoption de
nouvelles dispositions réglementaires permettant de (…) contester
à titre individuel les pouvoirs de parlementaires nationaux accusés
d’activités ou de déclarations violant avec persistance les principes
fondamentaux du Conseil de l’Europe, présenterait un risque d’abus.
L’Assemblée n’a nullement intérêt à devenir le théâtre de luttes
politiques internes. (…)». Elle avait alors décidé d’insérer dans
son Règlement une disposition précisant que les pouvoirs des membres
d’une délégation nationale ne peuvent être acceptés qu’après la
signature d’une déclaration solennelle de chacun d’entre eux, à
titre individuel, affirmant leur adhésion aux objectifs et aux principes
fondamentaux du Conseil de l'Europe (la
Résolution 1503 (2006) est venue ajouter un article 6.2.b en ce sens).
53. En 2005-2006, la commission du Règlement avait donc considéré
que la contestation des pouvoirs à titre individuel, pour des motifs
politiques, risquait de présenter un risque d’abus à des fins de
luttes politiciennes, soit internes – entre les partis politiques
représentés au parlement national, voire de règlements de compte
personnels – soit au niveau de l’Assemblée, en ouvrant la possibilité
de prolonger sur le plan procédural des controverses politiques
(entre groupes politiques, entre représentants de délégations différentes,
etc.); la commission avait jugé que «l’Assemblée n’a aucun intérêt
à devenir le champ clos de pareils affrontements».
54. Il ne paraît donc pas utile que la commission du Règlement
examine une fois encore la possibilité de modifier le Règlement
en instituant une procédure de contestation de pouvoirs de représentants
ou de suppléants à titre individuel
.
D’autant moins que le code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire
et son mécanisme de sanctions sont susceptibles de s’appliquer aux
membres qui enfreindraient par leur comportement, leurs actions
ou déclarations, leurs obligations en la matière (paragraphe 7 du
code).
4.2. La
question des sanctions
4.2.1. Positions
des délégations nationales et des groupes politiques
55. Nombre de contributeurs à la
réflexion de la commission ad hoc du Bureau ont rappelé que l’Assemblée est
un espace commun de dialogue entre les parlementaires issus des
États membres du Conseil de l’Europe, un instrument de diplomatie
parlementaire, qui a pour philosophie générale l’inclusion et l’engagement.
56. Si certains contributeurs considèrent que l'Assemblée ne peut
rester un forum de dialogue ouvert et constructif qu’à la condition
de garantir à tous les représentants des droits égaux en ce qui
concerne la participation aux réunions, le droit de parole et le
droit de vote, la majorité des contributions s’accorde pour maintenir
la possibilité pour l’Assemblée de recourir à des sanctions, sans
lesquelles l’institution risque de perdre sa crédibilité et sa légitimité
si cette possibilité venait à être restreinte, et pour conserver
le système actuel. Par ailleurs, quelques contributions seraient
favorables à un renforcement du mécanisme de sanctions.
4.2.2. Position
de la commission du Règlement
58. Sur la question des sanctions
susceptibles de s’appliquer au titre de l’article 10.1.c du Règlement,
la commission entend souligner les points suivants:
- La procédure de contestation
des pouvoirs est étroitement liée au mécanisme
de suivi des obligations et engagements des États membres (voir
le paragraphe 13 de la Résolution
1115 (1997) modifiée, ainsi que les articles 8.1.b, 8.2.b, 8.4,
9.1.b, 9.3 du Règlement); le rapport final de la commission ad hoc
mentionne expressément (paragraphe 24, document AS/Bur/MR-PA (2018)
08) au nombre des éléments qui «pourraient offrir des perspectives
importantes pour une future révision du système de suivi», «l’introduction
de mesures plus contraignantes pour les pays qui violent de façon persistante
et sérieuse les droits de l’homme, les normes démocratiques et la
prééminence du droit, ainsi que leurs obligations et les engagements
pris envers le Conseil de l’Europe».
- S’agissant de la portée des
«sanctions», il appartient à l’Assemblée, lorsqu’elle
se prononce par voie de résolution sur une contestation des pouvoirs,
de déterminer quels sont les droits de participation et de représentation
qui font l’objet d’une suspension. Ces droits ne sont pas énumérés
dans le Règlement.
59. La commission du Règlement – qui est obligatoirement saisie
pour rapport ou pour avis de toute contestation des pouvoirs – peut
interpréter l’article 10.1 du Règlement (voir paragraphes 14 et
15), dans le cadre de sa compétence générale d’interprétation du
Règlement (article 70.2), et déterminer le périmètre des sanctions
susceptibles de s’appliquer aux membres d’une délégation nationale
dont les pouvoirs ont été contestés ou réexaminés. Ainsi, en septembre
2014, la commission du Règlement avait, à la demande du Bureau de
l’Assemblée, établi une liste de droits de participation ou de représentation
dont les membres peuvent être privés dans le cadre de la contestation
ou du réexamen des pouvoirs
.
60. La commission a donc examiné la proposition d’exclure des
sanctions possibles le retrait aux membres de l’Assemblée de leur
droit de participer à l’élection des juges à la Cour européenne
des droits de l'homme, Commissaire aux droits de l’homme, Secrétaire
Général(e) et Secrétaire Général(e) adjoint(e) du Conseil de l'Europe,
Secrétaire Général(e) de l’Assemblée parlementaire. En effet, bien
que la compétence élective de l’Assemblée relève,
dans les faits, de textes d’une valeur juridique différente (du
Statut du Conseil de l'Europe pour le/la Secrétaire Général(e),
le/la Secrétaire Général(e) adjoint(e) et le/la Secrétaire Général(e)
de l’Assemblée parlementaire, de la Convention européenne des droits
de l'homme (STE no 5) pour l’élection
des juges, et d’une résolution du Comité des Ministres pour le/la
Commissaire aux droits de l’homme), le fait que les procédures de
sélection des candidats et de leur élection relèvent d’une compétence
conjointe (ou à tout le moins partagée) avec le Comité des Ministres,
devrait amener l’Assemblée à exclure du champ des droits de participation
susceptibles d’être suspendus le droit d’élire ces personnalités.
61. L’Assemblée pourrait donc décider, dans le projet de résolution
présenté, que la privation ou la suspension de certains droits de
participation ou de représentation aux activités de l’Assemblée
ne porte pas atteinte aux droits des membres de l’Assemblée de prendre
part à l’élection des juges à la Cour européenne des droits de l'homme,
du/de la Commissaire aux droits de l’homme, du/de la Secrétaire
Général(e), du/de la Secrétaire Général(e) adjoint(e) du Conseil
de l'Europe et du/de la Secrétaire Général(e) de l’Assemblée parlementaire.
A cet égard, il convient de préciser clairement que seuls les membres
de l’Assemblée peuvent prendre part à une élection: dès lors, les
membres d’une délégation qui seraient privés de certains de leurs droits
de participation et de représentation consécutivement à une décision
formelle de l’Assemblée, y compris de leur droit de vote, pourront
prendre part à l’élection des personnalités susmentionnées. En revanche,
tout parlement dont les pouvoirs n’auraient pas été ratifiés par
l’Assemblée ou qui, par choix volontaire, ne serait pas représenté
à l’Assemblée par une délégation, ne peut revendiquer de prendre
part à ces élections.
4.3. Processus
décisionnel (règles de vote, telles que quorum ou majorité requise)
4.3.1. Positions
des délégations nationales et des groupes politiques
62. Ainsi que le mentionne le rapport
final de la commission ad hoc, certains contributeurs ont évoqué
la nécessité de renforcer la légitimité et l’intégrité du processus
décisionnel global au sein de l’Assemblée
, notamment
par l’instauration d’un quorum pour tous les votes en plénière,
et d’autres ont avancé des propositions visant spécifiquement à
durcir les conditions de vote d’une décision de l’Assemblée en matière
de contestation des pouvoirs d’une délégation (article 10.1 du Règlement)
.
4.3.2. Position
de la commission du Règlement
63. La commission du Règlement
a considéré qu’elle examinerait, à ce stade de sa saisine, la question
des procédures de vote uniquement en relation avec la procédure
de contestation ou de réexamen des pouvoirs.
64. Revaloriser les conditions de vote d’une décision de l’Assemblée
aussi fondamentale pour les délégations nationales concernées, qui
s’appliqueraient tout autant aux contestations des pouvoirs pour
des raisons formelles que pour des raisons substantielles, démontrant
ainsi de manière incontestable que les décisions adoptées bénéficient
du soutien d’une très nette majorité des membres de l’Assemblée,
ne peut que contribuer à renforcer la position institutionnelle
et la visibilité politique de l’Assemblée.
65. Dans la mesure où le Règlement dispose (article 41.a) que
les décisions les plus importantes (adoption d’une recommandation
ou d’un avis au Comité des Ministres, création d’une commission,
destitution du titulaire d’un mandat électif, adoption de la procédure
d’urgence, notamment) sont prises à la majorité des deux tiers des
votants, il semble logique que la même majorité s’applique à la
décision de l’Assemblée de se prononcer sur les pouvoirs contestés
d’une délégation.
66. On rappellera que la procédure de destitution du/de la Président(e)
et des Vice-Président(e)s de l’Assemblée, que l’Assemblée a instaurée
dans son Règlement en 2017 (article 54.7), prévoit que la décision est
prise à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés et aux
conditions de quorum fixées par l’article 42.3.
67. La commission du Règlement s’est donc prononcée sur les propositions
suivantes:
- modifier l’article
10 («Décision de l’Assemblée sur la contestation ou le réexamen
de pouvoirs») et l’article 41.a du Règlement («Majorités requises»)
afin que la décision de l’Assemblée se prononçant sur une contestation
ou un réexamen des pouvoirs d’une délégation nationale, que ce soit
pour des raisons formelles ou pour des raisons substantielles, requière
le quorum des représentants
composant l’Assemblée (à savoir un tiers des représentants ou suppléants
autorisés à voter) et la majorité des deux tiers des votants);
- déterminer, à l’article 10 du Règlement, quelles sont
les conséquences du rejet d’un projet
de résolution portant sur la contestation ou le réexamen
des pouvoirs – à savoir qu’un projet de résolution qui ne recueillerait
pas la majorité des deux tiers des votants et/ou ne satisferait
pas aux conditions de quorum n’est
pas adopté, et qu’en conséquence les pouvoirs de la délégation nationale
concernée sont alors considérés ratifiés ou confirmés.
5. Conclusions
68. La commission du Règlement
a examiné l’opportunité de modifier les dispositions pertinentes
du Règlement, dans le cadre strict de sa saisine, à savoir:
- les dispositions relatives à
la contestation ou au réexamen des pouvoirs des délégations nationales, ainsi
qu’aux droits de représentation et de participation des délégations
nationales;
- les dispositions relatives aux procédures de vote de l’Assemblée
et aux droits de vote des membres.
69. Il convient de rappeler que toutes les autres propositions
formulées dans le cadre des travaux de la commission ad hoc du Bureau
visant à modifier le Règlement de l’Assemblée ou à rationaliser
les travaux de l’Assemblée seront étudiées dans le cadre d’un rapport
séparé de la commission.
70. Ce rapport comporte un projet de résolution proposant de:
- renforcer la cohérence des procédures
de contestation ou de réexamen des pouvoirs des délégations nationales
pour des raisons substantielles, en fusionnant les actuels articles
8 et 9 du Règlement en un article unique, en unifiant les conditions
d’initiation de telles procédures, et en les renforçant;
- renforcer la légitimité de l’Assemblée et l’autorité des
décisions de l’Assemblée lorsqu’elle se prononce sur une contestation
ou un réexamen des pouvoirs d’une délégation nationale, que ce soit
pour des raisons formelles ou pour des raisons substantielles, en
stipulant que ces décisions requièrent le quorum des membres de
l’Assemblée (à savoir un tiers des représentants ou suppléants autorisés
à voter) et la majorité des deux tiers des votants;
- restreindre la portée des sanctions encourues par les
membres des délégations dont les pouvoirs ont été ratifiés mais
dont l’exercice de certains droits de participation ou de représentation
aux activités de l’Assemblée a été suspendu.
71. A cet égard, il est rappelé que l’Assemblée devra adopter
le projet de résolution présenté avec une majorité des deux tiers
des votants, conformément à l’article 29 du Statut du Conseil de
l'Europe qui oblige l’Assemblée à approuver
à la majorité des deux tiers toute modification des dispositions
du Règlement qui touche à la majorité requise pour le
vote d’une décision.
72. Ce rapport comporte également un projet de recommandation
invitant le Comité des Ministres à conduire sa propre réflexion
sur l’efficacité de ses procédures, dans l’esprit de la
Résolution 2186 (2017) sur un appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin
de réaffirmer l’unité européenne, et de défendre et promouvoir la
sécurité démocratique en Europe, qui appelle à renforcer la cohérence
des règles entre le Comité des Ministres et l’Assemblée parlementaire.