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Résolution 2257 (2019)
Discrimination dans l’accès à l’emploi
1. Le droit au travail est un droit
fondamental, garanti par de nombreux instruments internationaux
relatifs aux droits fondamentaux, y compris la Charte sociale européenne
(révisée) (STE no 163). L’accès au marché de
l’emploi peut par ailleurs être un facteur d’intégration et de cohésion
sociale très puissant.
2. L’Assemblée parlementaire note avec préoccupation que, dans
bon nombre de pays européens, l’évolution du marché du travail tout
comme la précarisation croissante de l’emploi rendent de plus en
plus difficile pour les individus d’accéder durablement à un emploi.
De ce fait, de nombreuses personnes se retrouvent de plus en plus
souvent en situation de recherche d’emploi, cela pendant des périodes
de plus en plus longues.
3. L’Assemblée constate avec inquiétude que, pour certains, ces
problèmes sont aggravés par des discriminations fondées sur des
motifs tels que le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité de genre,
l’âge, l’origine nationale, ethnique ou sociale, l’appartenance
à une minorité nationale ou ethnique, la couleur, la langue, le patronyme,
la religion, les opinions politiques, les activités syndicales,
la grossesse, le handicap, l’état de santé ou l’apparence physique,
ou toute autre situation réelle ou supposée.
4. Les discriminations peuvent avoir des conséquences dramatiques
et impacter de manière irréversible la trajectoire professionnelle
des victimes, poussant ces dernières à renoncer à une profession
en lien avec leurs qualifications, voire à quitter leur pays pour
chercher un meilleur emploi à l’étranger. Pour les États, cela représente
un gaspillage de ressources humaines mais aussi un fléau économique
et met en exergue l’urgence d’agir pour renforcer la lutte contre
la discrimination dans l’accès à l’emploi.
5. L’Assemblée a déjà eu l’occasion de formuler des recommandations
à l’intention des États membres du Conseil de l’Europe visant à
remédier aux inégalités structurelles frappant certains groupes
au sein de nos sociétés qui ont moins facilement accès à l’emploi
que d’autres ou qui sont davantage touchés par la discrimination
dans ce domaine. Plusieurs résolutions récentes abordent ces questions,
comme la Résolution 2235
(2018) sur l’autonomisation des femmes dans l’économie,
la Résolution 2153 (2017) «Promouvoir
l'inclusion des Roms et des Gens du voyage», la Résolution 2039 (2015) «Égalité
et insertion des personnes handicapées», la Résolution 1958 (2013) sur la lutte
contre la discrimination des seniors sur le marché du travail, la Résolution 2014 (2014) «Élever
le statut de l'enseignement et de la formation professionnels»,
et la Résolution 1993
(2014) sur un travail décent pour tous.
6. Pour lutter efficacement contre les discriminations dans l’accès
à l’emploi, les États doivent prendre, d’une part, des mesures générales
afin de promouvoir l’accès à l’emploi des groupes défavorisés dans
ce domaine, et, d’autre part, des mesures visant à inciter les employeurs,
tant publics que privés, à éliminer toute forme de discrimination
de leurs processus de recrutement. Ces mesures doivent également
tenir compte du rôle grandissant joué par l’intelligence artificielle,
fondée sur des algorithmes, dans les procédures de présélection
de candidats utilisées au sein des grandes et moyennes entreprises,
et de la fonction publique.
7. Au vu de ce qui précède, l’Assemblée appelle les États membres
et observateurs du Conseil de l’Europe, ainsi que les États dont
le parlement bénéficie du statut d’observateur ou de partenaire
pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire:
7.1. afin d’identifier les mesures
les plus urgentes, à procéder à la collecte régulière de données relatives
à l’accès à l’emploi, ventilées selon un éventail de motifs de discrimination
le plus large possible, et au moins selon tous les motifs de discrimination
reconnus au niveau national;
7.2. à veiller à ce que la loi antidiscrimination soit complète,
couvrant tout motif de discrimination, et qu’elle prévoie des voies
de recours accessibles et efficaces pour les personnes victimes
de discrimination dans l’accès à l’emploi;
7.3. à adopter une politique intégrée ayant pour but de promouvoir
l'accès à l'emploi des groupes défavorisés dans ce domaine, et,
dans ce contexte:
7.3.1. à promouvoir l'accès à l'éducation
et à la formation des personnes appartenant à des groupes défavorisés
dans le domaine de l’emploi;
7.3.2. à prendre des mesures efficaces afin de faciliter le retour
à l'emploi des chômeurs de longue durée;
7.3.3. à favoriser l'apprentissage de la langue officielle ou
des langues officielles du pays ou de la région de résidence;
7.3.4. compte tenu du fait que les employeurs ont les mêmes préjugés
que la population en général, à combattre ces préjugés et à lutter
contre les stéréotypes ayant cours au sein de la population;
7.4. à prendre des mesures visant à inciter activement les
employeurs à identifier et à mettre fin à toute pratique discriminatoire
dans leurs procédures de recrutement, et, à cette fin:
7.4.1. à
rendre obligatoire pour les grandes et moyennes entreprises l’utilisation
de CV anonymes, et à encourager celles-ci à utiliser des formulaires
de candidature standardisés et à développer tout algorithme utilisé
dans ces processus, de manière à éliminer tout risque de discrimination;
7.4.2. à promouvoir les formations facultatives de sensibilisation
aux préjugés inconscients et la mise en place d’entretiens standardisés;
7.4.3. à promouvoir la mise en place par les entreprises publiques
et privées d’audits sur la diversité en leur sein;
7.4.4. à soutenir différentes méthodes d’action pouvant avoir
un impact positif indirect sur l’accès à l’emploi pour les personnes
défavorisées dans ce domaine, comme les subventions à l’emploi,
le déploiement d’intermédiaires de l’emploi ou les labels de diversité,
tout en évaluant régulièrement l’efficacité de ces mesures;
7.4.5. à mettre en place une obligation légale pour les employeurs
du secteur public de promouvoir la diversité;
7.4.6. à soutenir les initiatives volontaires des entreprises
publiques et privées visant à promouvoir la diversité en leur sein,
et à véhiculer des messages positifs sur la diversité au sein de
la société, en privilégiant en particulier les initiatives qui intègrent
des rapports réguliers sur les résultats obtenus.
7.5. en ce qui concerne les États membres du Conseil de l’Europe,
à ratifier la Charte sociale européenne (révisée) ainsi que le Protocole
additionnel à la Charte sociale européenne prévoyant un système
de réclamations collectives (STE no 158),
s’ils ne l’ont pas déjà fait.