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Résolution 2266 (2019)

Protéger les droits de l’homme pendant les transfèrements de détenus

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 1er mars 2019 (voir Doc. 14828, rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, rapporteur: M. Emanuel Mallia).Voir également la Recommandation 2147 (2019).

1. Les détenus figurent parmi les personnes les plus vulnérables aux violations de leurs droits fondamentaux. La Cour européenne des droits de l’homme («la Cour») a souligné que les autorités avaient «l’obligation de protéger» à tout moment les personnes en détention.
2. Les conditions inacceptables de transfèrement des détenus peuvent s’apparenter à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, contraires à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5, «la Convention») ou, dans des situations extrêmes, à des disparitions forcées (au sens de l’article 2 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées).
3. Les normes internationales relatives aux conditions de transport satisfaisantes des détenus dans le respect de leur dignité humaine – notamment la jurisprudence de la Cour, les Règles pénitentiaires européennes de 2006, l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus, de 2015, et les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) – sont de plus en plus claires. Pourtant, les arrêts de la Cour et les rapports pertinents du CPT, ainsi que les travaux des mécanismes nationaux de prévention et des organisations non gouvernementales, montrent que ces normes sont soit insuffisamment connues et comprises, soit mal appliquées dans un certain nombre d’États membres du Conseil de l’Europe.
4. Afin de garantir que tous les détenus sont protégés contre les traitements inhumains ou dégradants pendant leur transfèrement, l’Assemblée parlementaire invite instamment les États membres du Conseil de l’Europe:
4.1. à mettre leur pratique et leur cadre juridique nationaux en conformité avec les normes internationales en vigueur en matière de transfèrement;
4.2. à éviter tout traitement non conforme aux normes ou discriminatoire des détenus pendant leur transfèrement, en veillant à ce que:
4.2.1. les détenus soient exposés aussi peu que possible à la vue du public, et leur anonymat préservé;
4.2.2. des conditions matérielles et de sécurité adéquates soient respectées dans tous les moyens de transport des détenus;
4.2.3. un espace adéquat soit prévu pour le transport des détenus dans des conditions humaines, conformément aux recommandations du CPT;
4.2.4. la satisfaction des besoins élémentaires et l’organisation de pauses de confort soient prévues, si besoin est;
4.2.5. le transfèrement des détenus soit effectué pendant une durée strictement limitée et utilise les plus courts trajets disponibles, en évitant tout retard inutile;
4.2.6. des cellules adéquates soient mises à la disposition des détenus en transit dans les prisons, si nécessaire;
4.2.7. tout transfèrement soit effectué sur la base d’un ordre ou d’une décision émis par une autorité compétente à la suite d’une évaluation et d’un programme complets pour chaque cas individuel;
4.2.8. la santé des détenus soit préservée pendant les transfèrements;
4.2.9. certaines catégories de détenus soient séparées des autres détenus pendant le transport, s’il y a lieu;
4.2.10. une escorte adéquate soit fournie aux détenus, en veillant, le cas échéant, à la présence de personnel médical, féminin et/ou formé à travailler avec des enfants, selon les besoins;
4.3. à veiller à ce que toute restriction imposée aux détenus durant leur transport se limite à ce qui est strictement nécessaire et soit proportionnée au but légitime poursuivi par cette restriction, notamment en garantissant que:
4.3.1. le recours à la force et aux instruments de contention se limite toujours à ce qui est strictement nécessaire, pendant la plus brève durée possible, en assurant une évaluation individuelle des risques pour tout recours aux moyens de contention;
4.3.2. les moyens de contention interdits par les normes du Conseil de l’Europe ou les autres normes internationales, comme les chaînes, les fers et les ceintures électriques neutralisantes, ou les dispositifs utilisés pour empêcher les détenus de voir, ne soient jamais utilisés;
4.4. à veiller à ce que des informations détaillées et actualisées soient consignées sur la localisation de tous les détenus pendant leur transfèrement et soient mises, s’il y a lieu, à la disposition des tiers, notamment en s’assurant:
4.4.1. que tout détenu faisant l’objet d’un transfèrement en soit avisé au préalable et suffisamment informé, dans une langue qu’il comprend;
4.4.2. que les détenus soient autorisés à informer immédiatement leur famille de leur transfèrement dans un autre établissement;
4.4.3. qu’un registre officiel actualisé des détenus soit conservé et rendu facilement accessible à toute autorité judiciaire ou toute autre autorité compétente, et que toutes les informations pertinentes issues de ce registre soient mises à la disposition des familles et des avocats qui souhaitent savoir où se trouvent des détenus;
4.4.4. que les communications avec le monde extérieur qui concernent les transfèrements puissent uniquement faire l’objet des restrictions et du contrôle nécessaires aux exigences de sûreté et de sécurité, et que ces restrictions autorisent néanmoins un niveau minimal acceptable de contact;
4.5. à former l’ensemble du personnel des forces de l’ordre, du personnel pénitentiaire ou de tout autre personnel de la justice pénale, ainsi que tout contractant privé chargé du transport des détenus, au respect de la dignité et des droits humains des détenus pendant leur transfèrement;
4.6. à veiller à ce que les conditions de transfèrement des détenus soient soumises au contrôle des mécanismes nationaux de prévention et des autres organes dûment qualifiés, et à ce que tous les détenus aient accès à un recours effectif en cas de violation alléguée de leurs droits pendant les transfèrements;
4.7. à signer et à ratifier, s’ils ne l’ont pas encore fait, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.