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Résolution 2268 (2019)

La coopération pour le développement: un outil de prévention des crises migratoires

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Texte adopté par la Commission permanente, agissant au nom de l’Assemblée, le 1er mars 2019 (voir Doc. 14830, rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, rapporteur: M. Pierre-Alain Fridez).

1. Le XXIe siècle confronte les pays en développement, en particulier sur le continent africain, à des défis toujours plus importants, liés à la croissance démographique, au changement climatique et à l’instabilité politique, ainsi qu’à l’insuffisance des infrastructures, et exacerbés par la fracture numérique. Ces phénomènes se sont notamment traduits par le déplacement massif de populations, tant sur le continent que vers l’Europe.
2. Motivés par des considérations humanitaires, mais aussi par la reconnaissance que les marchés de biens et les réserves de ressources naturelles indispensables que ces pays représentent nécessitent des sociétés stables et le maintien d’un certain niveau de vie, les pays européens ont toujours apporté un soutien important aux régions sous-développées. Les liens économiques et culturels avec les anciens protectorats et colonies jouent souvent un rôle dans la définition des préférences. Ces dernières années, comme le note l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le financement du développement a régulièrement augmenté.
3. Les travaux des organisations internationales, en particulier des Nations Unies, ont beaucoup contribué à changer l’attitude des donateurs et des bénéficiaires en transformant la notion d’aide en approches multisectorielles qui impliquent une véritable coopération pour le développement. En outre, l’élimination de la pauvreté est au centre du Programme de développement durable des Nations Unies à l‘horizon 2030, selon lequel le monde entier devrait s’engager sur la voie d’un développement plus prospère et durable. En adoptant ce programme, les États membres se sont engagés à coopérer pour faire en sorte que les migrations se déroulent en toute régularité, dans la sécurité et en bon ordre. Cette coopération devra aussi s’attacher à renforcer la résilience des communautés d’accueil, notamment dans les pays en développement. L’objectif 10 du programme vise à «réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre».
4. La coopération pour le développement a un double objectif dans le cadre des migrations en Afrique: permettre, en premier lieu, de donner les moyens aux pays les plus stables de gérer l’arrivée, l’accueil et l’intégration de migrants originaires de pays limitrophes touchés par des conflits ou par la pauvreté et, en second lieu, donner l’espoir d’un avenir viable dans leur propre pays à des personnes qui, dans le cas contraire, migreraient vers l’Europe. À plus long terme, les investissements dans l’éducation, la santé et le développement social et culturel de la communauté contribuent également à une certaine régulation démographique, en particulier en offrant aux femmes une alternative à leurs rôles domestiques traditionnels.
5. Les politiques de l’Union européenne en matière de développement, fondées sur les objectifs des Nations Unies, font de l’Union européenne et de ses États membres les pourvoyeurs de 50 % de l’aide mondiale au développement. Le récent renforcement des mesures de sécurité et de contrôle aux frontières, ainsi que le soutien financier apporté aux pays pour la gestion des migrations ne doivent pas entraîner une réduction proportionnelle des financements de la gouvernance et des communautés locales ni réduire le budget alloué aux programmes de développement durable.
6. Compte tenu de l’importance du développement de la coopération pour les migrations, l’Assemblée parlementaire invite les États membres:
6.1. au niveau international:
6.1.1. à coopérer pour réaliser les Objectifs de développement durable des Nations Unies, en particulier l’objectif 10 «Réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre» ainsi que la cible 10.7 «Faciliter la migration et la mobilité de façon ordonnée, sans danger, régulière et responsable, notamment par la mise en œuvre de politiques de migration planifiées et bien gérées»;
6.1.2. à contribuer à la mise en œuvre du Pacte mondial des Nations Unies pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, pour les pays qui en sont signataires, et, dans ce contexte, à la mise en œuvre des objectifs spécifiques 18, 19 et 20 sur le perfectionnement des compétences, les conditions permettant aux migrants et aux diasporas de contribuer pleinement au développement durable dans tous les pays, et les envois de fonds plus rapides, plus sûrs et moins coûteux;
6.1.3. à utiliser les outils et les programmes d’organisations internationales telles que les Nations Unies, l’OCDE et l’Union européenne pour mieux coordonner leur coopération pour le développement, et à évaluer les besoins et la mise en œuvre;
6.2. au niveau national:
6.2.1. à poursuivre et à intensifier leur coopération pour le développement, et à diversifier le financement, en mettant l’accent sur des programmes durables pour l’éducation, la santé et les infrastructures, étant entendu que les résultats ne peuvent produire d’effet que sur le long terme;
6.2.2. à ne pas poser de conditions à la coopération pour le développement, telles que des retours sur investissement, l’accès à des marchés et à des ressources ou la gestion des migrations; ni à appliquer des «règles du bâillon» qui éliminent certaines formes d’assistance pour des raisons idéologiques, en particulier dans le domaine des droits des femmes aux soins de santé et en matière de reproduction;
6.2.3. à investir en particulier dans l’éducation pour renforcer les compétences, la résilience, l’employabilité et la capacité d’adaptation de manière innovante des jeunes et des générations futures, et pour aider ces derniers à comprendre les défis mondiaux actuels et à les relever;
6.2.4. à utiliser les liens historiques et linguistiques avec les pays en développement pour faciliter la coopération, et à tenir compte, par ailleurs, des régions du monde, comme le Sahel, qui sont laissées pour compte car elles n’ont pas de liens solides avec l’Europe ni d’intérêt économique particulier;
6.2.5. à se tenir prêts à réagir rapidement à des situations d’extrême pauvreté causées par des conflits ou par la sécheresse, et à faire en sorte que les programmes de développement soient adaptés aux régions et aux communautés auxquelles ils sont destinés et qu’ils tiennent compte de leurs préoccupations, en utilisant les listes de référence internationales pour le développement établies par les Nations Unies et l’OCDE;
6.3. au niveau des régions et de la société civile:
6.3.1. à comprendre l’importance de projets à petite échelle adaptés aux besoins spécifiques immédiats et, par conséquent, à favoriser les initiatives de la société civile, les partenariats et les échanges physiques qui bénéficient à toutes les parties sur les plans social et culturel, et qui offrent des possibilités de renforcement des capacités;
6.3.2. à mettre en œuvre des politiques qui encouragent et soutiennent les organisations de la société civile et les initiatives privées visant à coopérer avec les pays en développement, notamment les mesures de réduction d’impôts, la facilitation des envois de fonds et le développement des relations entre les communautés des diasporas et leur pays d’origine.
7. En outre, l’Assemblée invite tous les États membres à œuvrer, à l’échelle mondiale, pour limiter le changement climatique qui, selon les estimations, obligera près de 50 millions de personnes à quitter leur foyer dans les pays africains à l’horizon 2050.