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Résolution 2276 (2019)
Halte aux propos et actes haineux dans le sport
1. La haine et l’intolérance sont
répandues aujourd’hui en Europe, et le monde du sport, qui reflète
la société dans son ensemble, n’est pas épargné par cette réalité.
Bien au contraire, diverses formes de haine et d’intolérance, comme
l’afrophobie, l’antisémitisme, l’homophobie et la transphobie, l’islamophobie,
le racisme, le sexisme et la xénophobie, trouvent souvent un terreau
fertile dans les milieux sportifs, ce qui conduit à des violences
verbales et physiques. Cela interfère avec l'esprit de compétition,
qui est un élément naturel du sport, en le salissant et en le dénaturant.
2. Les agressions verbales sont courantes dans le monde du sport
sous la forme d’insultes et de slogans scandés qui peuvent constituer
un discours de haine et une incitation à la violence. Les abus peuvent
aussi revêtir des formes écrites, visuelles ou allusives, avec le
recours à des objets symboliques, une iconographie extrémiste ou
la dégradation des symboles des équipes adverses. Ces phénomènes
surviennent le plus souvent en groupe, parmi les supporters, mais
ils ont lieu aussi sur les terrains où les joueurs, les entraîneurs ou
les arbitres peuvent en être les auteurs ou les victimes.
3. L’Assemblée parlementaire condamne la haine et l’intolérance
sous toutes leurs formes et considère qu’il ne faut pas sous-estimer
l’impact du discours de haine. Ces dernières années, bien que l’on
assiste à une prise de conscience de ce problème et de la nécessité
de le traiter, beaucoup reste à faire pour le combattre efficacement
dans l’environnement du sport. Il faut en outre prévenir et pallier
le danger des tentatives de manipulation des supporters sportifs
par des populistes et autres idéologues pour promouvoir leurs intérêts électoraux
et politiques.
4. Le Conseil de l'Europe s’est attaqué au discours de haine
dans le domaine du sport par le biais de diverses activités, notamment
la campagne du Mouvement contre le discours de haine du secteur
de la jeunesse, en coopération avec l’Accord partiel élargi sur
le sport (APES).
5. L’Assemblée se félicite des Protocoles d’accord signés en
2018 entre le Conseil de l’Europe, l’Union des associations européennes
de football (UEFA) et la Fédération internationale de football association
(FIFA) qui offrent une base solide de coopération pour promouvoir
les droits humains, l’intégrité, la bonne gouvernance et la non-discrimination
dans le football, qui reste de loin le sport le plus populaire en
Europe; et du fait que le premier protocole mentionne explicitement
le discours de haine parmi les manifestations de discrimination
que les États membres sont tenus de prévenir et combattre.
6. L’Assemblée est consciente du fort potentiel qu’a le sport
pour changer les mentalités. Elle est persuadée que le sport devrait
être avant tout un instrument de promotion et de transmission de
valeurs comme le fair-play, le respect mutuel et la tolérance, en
plus d'être une activité bénéfique pour le développement personnel
et la santé, et une forme de loisir accessible à tous. Il ne devrait
y avoir dans le sport aucune place pour les préjugés et la violence,
ni pour la manipulation des sentiments des supporters.
7. L’Assemblée rappelle sa Résolution
2131 (2016) «Le sport pour tous: un pont vers l'égalité,
l'intégration et l'inclusion sociale», en particulier concernant
la nécessité de mettre en place des mécanismes pour surveiller de
manière régulière et systématique la discrimination dans le domaine
du sport.
8. L’Assemblée considère que l’éducation est primordiale dans
la prévention de la haine et de l’intolérance, notamment dans le
monde du sport, et qu’il faut accorder une attention particulière
au rôle des écoles dans la transmission des valeurs de tolérance
et de respect de la dignité humaine.
9. L’Assemblée soutient la Convention du Conseil de l’Europe
sur une approche intégrée de la sécurité, de la sûreté et des services
lors des matches de football et autres manifestations sportives
(STCE no 218) et invite tous les États
membres qui ne l’ont pas fait à la signer et à la ratifier.
10. À la lumière de ce qui précède, l’Assemblée appelle les États
membres du Conseil de l’Europe:
10.1. à
promouvoir la recherche et la collecte de données sur le discours
de haine et les crimes motivés par la haine dans les milieux sportifs.
Il convient que les données soient comparables et ventilées par lieu
géographique, sport, victimes et auteurs – avec une distinction
entre les sportifs (amateurs et professionnels) et les spectateurs
– et les motifs de discrimination;
10.2. à intégrer dans leurs plans ou stratégies nationaux contre
le discours de haine et les crimes motivés par la haine des mesures
spécifiques de lutte contre ces problèmes dans les milieux sportifs;
10.3. à renforcer la coopération avec les organisations sportives
en matière de haine et d’intolérance, y compris sur le signalement
et l’enregistrement des incidents, les activités d’information et
de sensibilisation ciblant les athlètes, les agents et les cadres
des organisations sportives, ainsi que le grand public;
10.4. à veiller à ce que des mécanismes de signalement soient
disponibles pour les victimes de propos haineux ou de discrimination
dans le monde du sport, à la fois pour protéger les victimes et
pour assurer un suivi régulier du phénomène;
10.5. à lutter contre l’impunité en assurant l’application systématique
des sanctions administratives et pénales existantes contre le discours
de haine dans l’environnement sportif, et en exploitant les technologies
disponibles sur les terrains de sport pour identifier les auteurs;
10.6. à mener des campagnes de sensibilisation ciblant le grand
public sur les dangers du discours de haine, les mécanismes de signalement
disponibles et l’importance de lutter contre l’impunité en signalant
les incidents;
10.7. à intégrer l'éthique sportive dans les programmes scolaires,
dans le cadre de l’éducation à la citoyenneté; à offrir aux professeurs
d'éducation physique et aux entraîneurs sportifs une formation pour repérer
la discrimination et la violence ciblant les athlètes, que ce soit
au niveau amateur ou professionnel, et pour y réagir;
10.8. à encourager les médias à diffuser une information pluraliste
et impartiale sur les athlètes et leur performance, en particulier
ceux qui sont les plus exposés à la haine, et à faire des comptes
rendus exacts et non tendancieux sur les incidents de discours de
haine et les crimes motivés par la haine.
11. L’Assemblée appelle les fédérations sportives et les autres
organisations sportives:
11.1. à
intégrer l'égalité et la non-discrimination dans leurs activités,
et à promouvoir les valeurs démocratiques; à prévenir et à combattre
les discours de haine, et, dans ce but, à renforcer la coopération
avec les clubs de supporters, les organisations de la société civile,
les médias et les établissements d’enseignement;
11.2. à nommer des athlètes remarquables «ambassadeurs de l'égalité
et de la non-discrimination»;
11.3. à exiger que tous les joueurs s’engagent formellement
à s’abstenir de propos haineux et de toute manifestation de haine
et d’intolérance;
11.4. à dispenser à tous les joueurs et personnels une formation
sur la manière d’identifier, de prévenir et de combattre le discours
de haine et l’intolérance;
11.5. à promouvoir des programmes éducatifs pour les supporters
et les clubs de fans sportifs afin de prévenir le discours de haine
dans les stades pendant les matches.
12. L’Assemblée affirme que le sport ne devrait pas se résumer
à une compétition, mais qu’il devrait également offrir un environnement
dans lequel des personnes de toutes origines et de tous les milieux
peuvent trouver un terrain d’entente et se côtoyer harmonieusement
dans la diversité.