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Résolution 2303 (2019)
Protéger et soutenir les victimes du terrorisme
1. L’Assemblée parlementaire rend
hommage à toutes les victimes qui ont été tuées, blessées et/ou traumatisées
lors d’attaques terroristes dans plusieurs États membres du Conseil
de l’Europe et dans le monde entier.
2. Dans leurs stratégies antiterroristes, les gouvernements et
les parlements doivent assurer que les victimes d’attaques terroristes,
qui ont des besoins physiques, matériels, affectifs et psychologiques spécifiques,
bénéficient d'une protection et d'un soutien adéquats, et que leur
dignité et leurs droits humains sont pleinement respectés. De plus,
il faut garantir le droit de toutes les victimes à la vérité, à
la justice et à réparation.
3. L’Assemblée note qu’un certain nombre d'instruments juridiques
existants n’ont pas été pleinement mis en œuvre ni mis en pratique
et souligne la nécessité d’une approche plus cohérente et systématique
de la protection et du soutien aux victimes du terrorisme dans tous
les États membres du Conseil de l'Europe. Elle invite donc ses États
membres, les États observateurs et les États dont le parlement bénéficie
du statut d'observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès
de l'Assemblée parlementaire:
3.1. concernant
la reconnaissance des «victimes du terrorisme»:
3.1.1. à
leur accorder une reconnaissance officielle au sein d’un cadre juridique universellement
accepté comme une catégorie particulière de victimes, reconnaissant
ainsi leur souffrance au nom de l’État visé par l’acte de terrorisme,
à identifier leurs besoins comme étant distincts de ceux des victimes
d’infractions «ordinaires» et à faciliter leur accès aux structures
de soutien, en particulier en ce qui concerne les victimes transfrontalières;
3.1.2. à envisager de procéder au recensement de toutes les personnes
touchées par un attentat, quels que soient leur nationalité et leur
statut de résident, et à les informer de leur droit d'accès à la
justice, des conditions d'indemnisation et de l'existence de services
et d'organisations de soutien;
3.1.3. à reconnaître l’importance humanitaire, juridique et stratégique
d’apporter un soutien rapide et efficace aux victimes à chaque étape
du processus de reconstruction, afin de leur donner les moyens d’agir
et de réduire au minimum les dommages causés, au niveau individuel comme
au niveau de la société;
3.2. concernant le soutien aux victimes du terrorisme à l’échelle
nationale:
3.2.1. à fournir aux victimes du terrorisme une
assistance médicale, psychologique, matérielle, juridique et sociale
appropriée, de façon urgente et sur le long terme;
3.2.2. à garantir aux victimes du terrorisme le droit à une restitution,
une réparation ou une indemnisation équitables, sans condition de
revenus et indépendamment de leur statut de résident ou de leur
nationalité, dans l’État où l’attentat a eu lieu, ainsi qu’aux membres
de leur famille proche ou aux bénéficiaires de la victime directe;
3.2.3. à veiller à ce qu’un organisme public spécialisé réponde
aux besoins des victimes d'actes terroristes en adoptant une approche
globale et empathique, axée sur les victimes;
3.2.4. à élaborer des services et des supports d’information
multilingues décrivant les services nationaux d’assistance aux victimes;
3.2.5. à veiller à ce que les organismes et organes publics et
les services sociaux, qui ne s’occupent pas spécifiquement des victimes
d’actes terroristes, mais avec lesquels celles-ci peuvent interagir,
reçoivent des financements appropriés et à ce que leur personnel
reçoive une formation adéquate et continue;
3.2.6. à assurer la coordination entre les organismes publics
compétents afin de réduire au minimum les formalités administratives
pour les victimes, d’assurer la cohérence des prestations de services
et de garantir une transparence maximale;
3.2.7. à accorder une attention particulière aux besoins spécifiques
des groupes vulnérables de victimes tels que les victimes transfrontalières,
les minorités, les femmes, les jeunes et les enfants;
3.2.8. à offrir aux victimes de terrorisme, dans la mesure du
possible, la possibilité de participer aux procédures pénales les
concernant;
3.2.9. à veiller à ce que tout soit mis en œuvre pour protéger
de manière adéquate les victimes de toute nouvelle maltraitance,
tant de la part des assaillants à l’origine de l’attaque que de
ceux ralliés à leur cause, et de toute victimisation secondaire
résultant de leurs interactions avec les autorités;
3.2.10. à défendre la dignité et la vie privée des victimes en
les informant de leurs droits en ce qui concerne les médias et le
droit de contrôler leur vie privée et leur droit à l’image, et en encourageant
la presse à respecter certaines normes d’éthique et à éviter les
reportages dégradants ou sensationnalistes, tout en respectant la
liberté de la presse;
3.2.11. à sensibiliser le public aux risques que peuvent représenter
les réseaux sociaux lorsqu’ils véhiculent des informations ou des
images privées et potentiellement choquantes concernant les victimes
ou les attentats terroristes;
3.2.12. à envisager la création de fonds humanitaires provenant
d’appels aux dons spécifiques ou, à tout le moins, en superviser
les conditions et en assurer le contrôle, afin de s’assurer que les
fonds recueillis par le public soient utilisés de manière effective
et efficiente;
3.2.13. à lutter contre les discours et les diverses formes d’incitations
des terroristes, conformément à la Résolution 2221 (2018) de l’Assemblée
sur les contre-discours face au terrorisme, par le biais de programmes
scolaires et de campagnes de sensibilisation soulignant les valeurs
suprêmes que sont la dignité humaine, la paix, la non-violence,
la tolérance et les droits humains, et en impliquant les victimes
d’actes terroristes;
3.2.14. à prendre des mesures appropriées pour parvenir à la reconnaissance
sociale et à la commémoration des victimes, par le biais des musées,
des monuments commémoratifs et des médailles, par exemple;
3.3. concernant le soutien aux victimes du terrorisme en coopération
avec la société civile:
3.3.1. à travailler en étroite collaboration
avec les organisations de la société civile telles que les associations
de victimes, de préférence dans le cadre d’un accord clair et formel,
sur des projets d’élaboration de politiques, des campagnes de sensibilisation
et de collecte de fonds ainsi que des programmes de recherche, d'éducation
et de formation;
3.3.2. à aider la société civile et, en particulier, les organisations
non gouvernementales qui apportent un soutien aux victimes du terrorisme
à améliorer l’offre de services liés à la justice en faveur des
victimes ainsi que de leur famille et ayants droit;
3.3.3. à revoir les modalités d’octroi et d’utilisation des subventions
aux organisations non gouvernementales, à consulter ces dernières
au sujet de leurs besoins, à suivre et à évaluer en permanence les
services de soutien fournis, afin de garantir une distribution effective
et efficiente des ressources;
3.4. concernant le soutien aux victimes du terrorisme à l’échelle
internationale:
3.4.1. à mettre en œuvre l’article 13 de
la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme
(STCE
n° 196) intitulé «Protection, dédommagement et aide aux victimes
du terrorisme»;
3.4.2. à mettre en œuvre, de manière proactive, les Lignes directrices
révisées du Comité des Ministres sur la protection des victimes
d’actes terroristes, du 19 mai 2017;
3.4.3. à renforcer la coopération internationale non seulement
pour lutter plus efficacement contre les organisations terroristes,
mais aussi pour mieux partager les informations entre les services
nationaux d’indemnisation, à éviter les cas de double indemnisation
ou de non-indemnisation, et à coordonner l’assistance;
3.4.4. à partager les bonnes pratiques, les expériences et l’expertise,
notamment par le biais des organisations internationales, afin que
la communauté internationale puisse apprendre de l’expérience unique
de certains États et soutenir ainsi la formation des professionnels
de l’assistance aux victimes;
3.4.5. à donner la priorité à l’amélioration du soutien aux victimes
transfrontalières du terrorisme dans les réformes à venir.
4. L’Assemblée invite l’Union européenne:
4.1. à faire en sorte que le Centre d’expertise pour les victimes
du terrorisme de l’Union européenne prenne également une dimension
paneuropéenne et coordonne ses activités avec le Conseil de l'Europe,
notamment en vue de promouvoir la pleine application de la Convention
du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme ainsi que
son protocole additionnel de 2015 (STCE n° 217) et les Lignes directrices révisées du Comité des Ministres
sur la protection des victimes d’actes terroristes;
4.2. à examiner, en concertation avec le Conseil de l'Europe,
la possibilité d'adopter une charte européenne sur les droits des
victimes du terrorisme afin de faciliter la reconnaissance, la communication
et la coordination dans la Grande Europe, et ainsi à marquer l’importance
des droits et la reconnaissance du statut de victimes du terrorisme.
5. Enfin, l'Assemblée estime que les survivants d'attaques terroristes,
ainsi que les anciens terroristes et combattants étrangers, devraient
participer activement à tous les efforts visant à prévenir la radicalisation conduisant
à l'extrémisme violent dans tous les États membres du Conseil de
l'Europe, et décide de suivre de près cette question dans ses futurs
travaux.