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Résolution 2303 (2019)

Protéger et soutenir les victimes du terrorisme

Auteur(s) : Assemblée parlementaire

Origine - Discussion par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (32e séance) (voir Doc. 14957, rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie, rapporteure: Mme Marietta Karamanli). Texte adopté par l’Assemblée le 2 octobre 2019 (32e séance).Voir également la Recommandation 2164 (2019).

1. L’Assemblée parlementaire rend hommage à toutes les victimes qui ont été tuées, blessées et/ou traumatisées lors d’attaques terroristes dans plusieurs États membres du Conseil de l’Europe et dans le monde entier.
2. Dans leurs stratégies antiterroristes, les gouvernements et les parlements doivent assurer que les victimes d’attaques terroristes, qui ont des besoins physiques, matériels, affectifs et psychologiques spécifiques, bénéficient d'une protection et d'un soutien adéquats, et que leur dignité et leurs droits humains sont pleinement respectés. De plus, il faut garantir le droit de toutes les victimes à la vérité, à la justice et à réparation.
3. L’Assemblée note qu’un certain nombre d'instruments juridiques existants n’ont pas été pleinement mis en œuvre ni mis en pratique et souligne la nécessité d’une approche plus cohérente et systématique de la protection et du soutien aux victimes du terrorisme dans tous les États membres du Conseil de l'Europe. Elle invite donc ses États membres, les États observateurs et les États dont le parlement bénéficie du statut d'observateur ou de partenaire pour la démocratie auprès de l'Assemblée parlementaire:
3.1. concernant la reconnaissance des «victimes du terrorisme»:
3.1.1. à leur accorder une reconnaissance officielle au sein d’un cadre juridique universellement accepté comme une catégorie particulière de victimes, reconnaissant ainsi leur souffrance au nom de l’État visé par l’acte de terrorisme, à identifier leurs besoins comme étant distincts de ceux des victimes d’infractions «ordinaires» et à faciliter leur accès aux structures de soutien, en particulier en ce qui concerne les victimes transfrontalières;
3.1.2. à envisager de procéder au recensement de toutes les personnes touchées par un attentat, quels que soient leur nationalité et leur statut de résident, et à les informer de leur droit d'accès à la justice, des conditions d'indemnisation et de l'existence de services et d'organisations de soutien;
3.1.3. à reconnaître l’importance humanitaire, juridique et stratégique d’apporter un soutien rapide et efficace aux victimes à chaque étape du processus de reconstruction, afin de leur donner les moyens d’agir et de réduire au minimum les dommages causés, au niveau individuel comme au niveau de la société;
3.2. concernant le soutien aux victimes du terrorisme à l’échelle nationale:
3.2.1. à fournir aux victimes du terrorisme une assistance médicale, psychologique, matérielle, juridique et sociale appropriée, de façon urgente et sur le long terme;
3.2.2. à garantir aux victimes du terrorisme le droit à une restitution, une réparation ou une indemnisation équitables, sans condition de revenus et indépendamment de leur statut de résident ou de leur nationalité, dans l’État où l’attentat a eu lieu, ainsi qu’aux membres de leur famille proche ou aux bénéficiaires de la victime directe;
3.2.3. à veiller à ce qu’un organisme public spécialisé réponde aux besoins des victimes d'actes terroristes en adoptant une approche globale et empathique, axée sur les victimes;
3.2.4. à élaborer des services et des supports d’information multilingues décrivant les services nationaux d’assistance aux victimes;
3.2.5. à veiller à ce que les organismes et organes publics et les services sociaux, qui ne s’occupent pas spécifiquement des victimes d’actes terroristes, mais avec lesquels celles-ci peuvent interagir, reçoivent des financements appropriés et à ce que leur personnel reçoive une formation adéquate et continue;
3.2.6. à assurer la coordination entre les organismes publics compétents afin de réduire au minimum les formalités administratives pour les victimes, d’assurer la cohérence des prestations de services et de garantir une transparence maximale;
3.2.7. à accorder une attention particulière aux besoins spécifiques des groupes vulnérables de victimes tels que les victimes transfrontalières, les minorités, les femmes, les jeunes et les enfants;
3.2.8. à offrir aux victimes de terrorisme, dans la mesure du possible, la possibilité de participer aux procédures pénales les concernant;
3.2.9. à veiller à ce que tout soit mis en œuvre pour protéger de manière adéquate les victimes de toute nouvelle maltraitance, tant de la part des assaillants à l’origine de l’attaque que de ceux ralliés à leur cause, et de toute victimisation secondaire résultant de leurs interactions avec les autorités;
3.2.10. à défendre la dignité et la vie privée des victimes en les informant de leurs droits en ce qui concerne les médias et le droit de contrôler leur vie privée et leur droit à l’image, et en encourageant la presse à respecter certaines normes d’éthique et à éviter les reportages dégradants ou sensationnalistes, tout en respectant la liberté de la presse;
3.2.11. à sensibiliser le public aux risques que peuvent représenter les réseaux sociaux lorsqu’ils véhiculent des informations ou des images privées et potentiellement choquantes concernant les victimes ou les attentats terroristes;
3.2.12. à envisager la création de fonds humanitaires provenant d’appels aux dons spécifiques ou, à tout le moins, en superviser les conditions et en assurer le contrôle, afin de s’assurer que les fonds recueillis par le public soient utilisés de manière effective et efficiente;
3.2.13. à lutter contre les discours et les diverses formes d’incitations des terroristes, conformément à la Résolution 2221 (2018) de l’Assemblée sur les contre-discours face au terrorisme, par le biais de programmes scolaires et de campagnes de sensibilisation soulignant les valeurs suprêmes que sont la dignité humaine, la paix, la non-violence, la tolérance et les droits humains, et en impliquant les victimes d’actes terroristes;
3.2.14. à prendre des mesures appropriées pour parvenir à la reconnaissance sociale et à la commémoration des victimes, par le biais des musées, des monuments commémoratifs et des médailles, par exemple;
3.3. concernant le soutien aux victimes du terrorisme en coopération avec la société civile:
3.3.1. à travailler en étroite collaboration avec les organisations de la société civile telles que les associations de victimes, de préférence dans le cadre d’un accord clair et formel, sur des projets d’élaboration de politiques, des campagnes de sensibilisation et de collecte de fonds ainsi que des programmes de recherche, d'éducation et de formation;
3.3.2. à aider la société civile et, en particulier, les organisations non gouvernementales qui apportent un soutien aux victimes du terrorisme à améliorer l’offre de services liés à la justice en faveur des victimes ainsi que de leur famille et ayants droit;
3.3.3. à revoir les modalités d’octroi et d’utilisation des subventions aux organisations non gouvernementales, à consulter ces dernières au sujet de leurs besoins, à suivre et à évaluer en permanence les services de soutien fournis, afin de garantir une distribution effective et efficiente des ressources;
3.4. concernant le soutien aux victimes du terrorisme à l’échelle internationale:
3.4.1. à mettre en œuvre l’article 13 de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme (STCE n° 196) intitulé «Protection, dédommagement et aide aux victimes du terrorisme»;
3.4.2. à mettre en œuvre, de manière proactive, les Lignes directrices révisées du Comité des Ministres sur la protection des victimes d’actes terroristes, du 19 mai 2017;
3.4.3. à renforcer la coopération internationale non seulement pour lutter plus efficacement contre les organisations terroristes, mais aussi pour mieux partager les informations entre les services nationaux d’indemnisation, à éviter les cas de double indemnisation ou de non-indemnisation, et à coordonner l’assistance;
3.4.4. à partager les bonnes pratiques, les expériences et l’expertise, notamment par le biais des organisations internationales, afin que la communauté internationale puisse apprendre de l’expérience unique de certains États et soutenir ainsi la formation des professionnels de l’assistance aux victimes;
3.4.5. à donner la priorité à l’amélioration du soutien aux victimes transfrontalières du terrorisme dans les réformes à venir.
4. L’Assemblée invite l’Union européenne:
4.1. à faire en sorte que le Centre d’expertise pour les victimes du terrorisme de l’Union européenne prenne également une dimension paneuropéenne et coordonne ses activités avec le Conseil de l'Europe, notamment en vue de promouvoir la pleine application de la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme ainsi que son protocole additionnel de 2015 (STCE n° 217) et les Lignes directrices révisées du Comité des Ministres sur la protection des victimes d’actes terroristes;
4.2. à examiner, en concertation avec le Conseil de l'Europe, la possibilité d'adopter une charte européenne sur les droits des victimes du terrorisme afin de faciliter la reconnaissance, la communication et la coordination dans la Grande Europe, et ainsi à marquer l’importance des droits et la reconnaissance du statut de victimes du terrorisme.
5. Enfin, l'Assemblée estime que les survivants d'attaques terroristes, ainsi que les anciens terroristes et combattants étrangers, devraient participer activement à tous les efforts visant à prévenir la radicalisation conduisant à l'extrémisme violent dans tous les États membres du Conseil de l'Europe, et décide de suivre de près cette question dans ses futurs travaux.