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Résolution 2328 (2020)
Prévention de la violence et de la discrimination à l'égard des minorités religieuses parmi les réfugiés en Europe
1. Le droit
humanitaire international et les normes en vigueur en matière de
droits de l’homme reconnaissent aux réfugiés et aux demandeurs d’asile
le droit à une protection adéquate. Déracinés de leur pays d’origine,
ces migrants n’ont parfois pour tout bagage que leurs pratiques
culturelles, leurs traditions et leur foi: l’attachement à ces pratiques
joue un rôle d’autant plus important dans la conservation de leur
dignité humaine, voire de leur intégrité physique et psychologique.
2. L’Assemblée parlementaire estime que les croyances et les
pratiques religieuses des migrants et des réfugiés doivent être
prises en considération comme un facteur de réussite essentiel des
politiques d’accueil et d’intégration. Aussi l’Assemblée appelle-t-elle
les États membres du Conseil de l’Europe à exprimer leur volonté
politique d’assurer une meilleure protection aux réfugiés et aux
demandeurs d’asile en Europe, en prévenant la violence et la discrimination
fondées sur la religion.
3. La prévention de la violence et de la discrimination à l’égard
des réfugiés et des demandeurs d’asile appartenant à des minorités
religieuses en Europe exige de prendre des mesures à tous les niveaux
– international, européen, national et, surtout, local. Les États
doivent faire davantage d’efforts pour apaiser les tensions et assurer
un climat de respect et les moyens de vivre dans la dignité aux
réfugiés et aux demandeurs d’asile.
4. L’Assemblée rappelle sa Recommandation
1962 (2011) sur la dimension religieuse du dialogue interculturel
et invite les États membres à promouvoir des partenariats associant
le Conseil de l’Europe, des institutions religieuses et des organisations
humanistes et non confessionnelles, visant à favoriser l’engagement
actif de toutes les parties prenantes pour promouvoir les valeurs
fondamentales de l’Organisation, notamment dans le contexte de leurs
politiques en matière de droit d’asile.
5. Les États membres devraient promouvoir le dialogue interreligieux
et interconfessionnel dans le contexte des procédures de demande
d’asile, régler avec davantage d’efficacité et de respect pour la
dignité et les droits des réfugiés et des demandeurs d’asile les
conflits fondés sur la religion au sein des centres et des structures
d'hébergement temporaire accueillant des réfugiés, et promouvoir
les bonnes pratiques et les initiatives sur le terrain favorisant
le dialogue interreligieux et la cohabitation pacifique, d’une manière
sensible au genre. Les mesures dans ce sens devraient notamment:
5.1. favoriser le dialogue interreligieux
et interconfessionnel dans le contexte de l’asile:
5.1.1. l’Assemblée rappelle son souhait
que soit établie à l’échelle paneuropéenne une plate-forme consacrée
à la dimension religieuse du dialogue interculturel et suggère qu’une
attention particulière soit portée au dialogue interreligieux dans
le contexte des politiques en matière de droit d’asile et de migrations;
5.1.2. les États membres devraient établir des plates-formes
de dialogue interreligieux aux niveaux national et local, et en
appuyer les travaux, en veillant notamment à leur implication dans l’accueil
et l’intégration des réfugiés et des demandeurs d’asile en Europe;
5.1.3. les préjugés, le racisme et les discours de haine devraient
être combattus dans les structures d'hébergement accueillant des
réfugiés, par exemple par la mise en place de processus de dialogue
inclusif dans ces lieux faisant appel à l’expertise de tierces parties agissant
en qualité d’intermédiaires, de médiateurs spécialistes des questions
ethnoreligieuses et de facilitateurs du dialogue;
5.1.4. une formation spéciale devrait être dispensée aux médiateurs,
aux responsables de communautés et aux autres parties prenantes
concernées, y compris les bénévoles, afin de promouvoir le dialogue
interreligieux et une meilleure cohésion sociale. Cette formation
devrait inclure une dimension de la perspective de genre;
5.1.5. l’accès des réfugiés et des demandeurs d’asile placés
dans des centres d’accueil à des programmes de dialogue interconfessionnel
devrait être facilité, ce qui favorisera une meilleure compréhension
des cultures et croyances religieuses des autres et créera un espace
de confiance;
5.2. régler, avec davantage d’efficacité et de respect pour
la dignité et les droits des réfugiés et des demandeurs d’asile,
les conflits fondés sur la religion dans les centres et les structures
d'hébergement temporaire accueillant des réfugiés:
5.2.1. pour veiller au respect de la
liberté de religion, les États membres devraient dispenser une formation
spécifique au personnel des centres d’accueil et des structures
d'hébergement temporaire, afin d’améliorer ses connaissances des
différentes religions des résidents, notamment s’agissant des célébrations
religieuses, des temps de prière et des aménagements nécessaires
à la pratique de ces religions. La formation devrait aussi dispenser
un enseignement sur la médiation interreligieuse;
5.2.2. des sessions de formation et d’information devraient être
organisées à l’intention des résidents des centres d’accueil et
des structures d'hébergement temporaire, à leur arrivée et périodiquement
pendant leur séjour. Les sessions devraient porter sur le droit
international et national en matière de liberté de religion, inclure
des informations sur les pratiques religieuses dans le pays d’accueil,
comprendre des ateliers de prévention de la radicalisation et permettre les
pratiques religieuses dans le centre;
5.2.3. des procédures de plainte devraient être mises en place
dans les centres afin que les résidents puissent lutter contre la
discrimination fondée sur la religion. Des permanences téléphoniques
nationales destinées aux victimes de discrimination fondée sur la
religion pourraient être mises en place et dotées d’un personnel
formé à évaluer au mieux la situation et à réagir rapidement. Les
permanences téléphoniques devraient être en relation avec des médiateurs
interreligieux et avec la police, afin de permettre une intervention
immédiate de leur part et d’aider les victimes présumées;
5.2.4. les centres et les structures d'hébergement temporaire
accueillant des réfugiés et des demandeurs d’asile devraient disposer
d’un bureau réservé aux dépôts de plaintes et offrir la possibilité
de remplir un formulaire de plainte de manière anonyme. De plus,
le droit de porter plainte anonymement auprès de la police devrait
également être garanti par les États;
5.2.5. en cas de plainte pour agression ou discrimination fondée
sur la religion, la priorité doit être donnée à la sécurité de la
victime présumée. La plainte devrait déclencher une procédure de
protection: la victime doit être immédiatement transférée en lieu
sûr, par exemple dans un autre centre, avant la réalisation d’une
enquête approfondie. De telles procédures devraient tenir compte
de la perspective de genre;
5.2.6. les enquêtes sur les actes criminels fondés sur la religion
devraient faire partie intégrante de la formation des agents de
police. L’administration de la police devrait nommer des correspondants
au sein des préfectures de police pour régler les conflits fondés
sur la religion dans les centres et les structures d'hébergement
temporaire accueillant les réfugiés;
5.3. promouvoir les bonnes pratiques et les initiatives de
terrain favorisant le dialogue interreligieux et le vivre ensemble:
5.3.1. les bonnes pratiques et les
initiatives locales favorisant le dialogue interreligieux devraient
être promues, qu’elles mettent en contact les représentants des
différents groupes religieux auxquels appartiennent les réfugiés
et les demandeurs d’asile, ou qu’elles les mettent en contact avec
la communauté locale du pays d’accueil. Ces initiatives pourraient
inclure des réunions avec les responsables des différentes communautés
religieuses, des réunions avec les fidèles dans leurs différents
lieux de culte afin de promouvoir la connaissance mutuelle des aspects
rituels et des modalités de culte et de socialisation, et la participation
aux célébrations religieuses des différentes communautés présentes;
5.3.2. dans le contexte des demandes d’asile, la participation
active des femmes au dialogue interculturel, y compris dans sa dimension
religieuse, devrait être encouragée. L’autonomie des demandeuses
d’asile devrait être renforcée afin qu’elles agissent en actrices
du changement, conformément à la Résolution 1615 (2008) «Renforcer l'autonomie des femmes dans une société moderne
et multiculturelle» et à la Recommandation
1838 (2008) «Renforcer l'autonomie des femmes dans une société moderne
et multiculturelle» de l’Assemblée;
5.3.3. il conviendrait de sensibiliser davantage les enfants
aux points communs entre les différentes religions, afin d’encourager
le dialogue et une meilleure compréhension des autres croyances
religieuses grâce à l’éducation. Les classes pour réfugiés, tout
comme les établissements scolaires des pays d’accueil, devraient
assurer dans l’enseignement institutionnel comme dans les apprentissages
informels une éducation aux différentes religions ainsi qu’aux systèmes
de pensée non religieux.