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Rapport | Doc. 15301 | 31 mai 2021

Promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décision politique et publique

Commission sur l'égalité et la non-discrimination

Rapporteure : Mme Eglantina GJERMENI, Albanie, SOC

Origine - Renvoi en commission: Doc. 15067, renvoi 4503 du 7 mai 2020. 2021 - Troisième partie de session

Résumé

La participation des femmes à la prise de décision politique et publique a globalement augmenté dans les États membres du Conseil de l'Europe au cours des dernières décennies. Cependant, elles représentent encore un groupe assez homogène: les femmes des groupes sous-représentés, notamment les jeunes femmes, les femmes en situation de handicap, les femmes LBTI et les femmes roms sont moins visibles et ont moins accès aux postes de direction. Elles sont confrontées à de multiples obstacles à la participation, tels que la discrimination, le poids des préjugés, le risque de violence, la peur de la stigmatisation, les barrières au sein des partis politiques, la pression sociétale, le partage inégal des responsabilités de soins, le manque de reconnaissance de leurs compétences et le manque d'accessibilité.

Les quotas, la formation, les programmes de mentorat, l'investissement dans l'accessibilité, les mesures de sélection des candidat·e·s, les politiques sensibles au genre, la promotion de modèles et les actions visant à combattre et à prévenir la violence à l’égard des femmes en politique peuvent contribuer à accroître leur participation.

Le renforcement de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique aura un impact positif à long terme. Elle contribuera à réduire les écarts réels ou perçus entre les décideurs et les décideuses et la population. Il est grand temps que le paysage politique européen reflète mieux la diversité des sociétés européennes et s'engage plus fermement en faveur de l'égalité.

A. Projet de résolution 
			(1) 
			Projet
de résolution adopté à l’unanimité le 15 mars 2021.

(open)
1. Au cours des dernières décennies, la participation des femmes à la prise de décision politique et publique a progressé de manière significative en Europe. Les femmes ont accédé à des postes à hautes responsabilités et la parité est quasiment atteinte dans les parlements de plusieurs pays européens.
2. Ces progrès sont cependant trop lents et inégaux. En outre, les femmes en situation de handicap, les jeunes femmes, les femmes LBTI, les femmes roms, les femmes de couleur, les femmes issues de l’immigration, les femmes appartenant aux minorités et autochtones, les femmes rurales et issues de milieux socio-économiques défavorisés ont encore une participation et une représentation insuffisantes dans la prise de décision publique et politique.
3. L’Assemblée parlementaire est préoccupée par les multiples obstacles que rencontrent les femmes et qui les empêchent de participer activement à la prise de décision politique et publique. La pandémie de covid-19 n’a fait que renforcer ces obstacles, notamment pour les femmes issues de groupes sous-représentés. Le poids des préjugés et des stéréotypes, les risques de violence, l’absence de reconnaissance de leurs compétences et de leur expertise, le partage inégal des responsabilités de soins, les normes sociales, une discrimination élevée, les obstacles au sein des partis politiques, le manque de mesures ciblées et le manque d’accessibilité en général limitent la participation des femmes. De profonds changements structurels sont nécessaires pour relever ces défis et améliorer la participation des femmes de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique à tous les niveaux.
4. L’étude sur le sexisme, le harcèlement et la violence à l’égard des femmes dans les parlements d’Europe, menée en 2018 par l’Union Interparlementaire et l’Assemblée, a démontré que la violence à l’égard des femmes est très répandue dans la sphère politique. Les discours de haine et le harcèlement à l’encontre des femmes dans la vie politique et publique entravent l'engagement des femmes en politique, en particulier des femmes issues de groupes sous-représentés, qui sont confrontées à des niveaux de violence disproportionnellement plus élevés et peuvent choisir de ne pas participer par crainte d'être spécifiquement ciblées. L’Assemblée réaffirme sa détermination à combattre la violence à l’égard des femmes dans la politique, et renvoie à sa Résolution 2274 (2019) « Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel » et à l’initiative « #PasDansMonParlement » lancée par l’ancienne Présidente de l’Assemblée parlementaire, Liliane Maury Pasquier. Le renforcement de la participation à la vie politique est étroitement lié à la prévention et à la lutte contre la violence et tout doit être mis en œuvre pour y parvenir.
5. L’Assemblée rappelle sa Résolution 2222 (2018) « Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique ». Des recommandations concrètes pour renforcer la participation des personnes en situation de handicap ont été formulées dans la Résolution 2155 (2017) « Les droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique ». Les structures et systèmes politiques devraient être plus ouverts, inclusifs et attrayants pour les personnes issues de différents milieux. Une approche intersectionnelle de la prise de décision ainsi que des mesures ciblées peuvent contribuer à ne laisser personne de côté. La participation des femmes et des filles dans toute leur diversité à la prise de décision politique et publique transmettra un puissant message de reconnaissance de l’importance de sociétés inclusives, augmentera la représentativité et renforcera la légitimité et la pertinence des décisions.
6. Promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique implique une action à plusieurs niveaux. La société dans son ensemble et les partis politiques doivent faire de l’espace pour la participation et l’engagement actifs des femmes. L’Assemblée souligne que les hommes ont également un rôle important à jouer à cet égard, en luttant contre la violence et la discrimination à l’encontre des femmes dans la vie politique et en s’élevant contre les stéréotypes fondés sur le genre et le sexisme. Les hommes peuvent être des alliés et s’engager activement à promouvoir l’égalité et la participation des femmes aux postes de responsabilité. Un changement profond des mentalités et de la culture politique sont indispensables pour garantir que la prise de décision politique et publique soit plus inclusive et accessible aux personnes issues de divers milieux.
7. L'Assemblée se félicite de l'intérêt accordé dans le monde en 2021 à l'importance de la participation accrue des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision, y compris à des fonctions de direction – la participation des femmes à la politique était notamment le thème retenu par la 65ème session de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies (15-26 mars 2021). Elle se réjouit également de l’organisation du Forum Génération Égalité de l’ONU en 2021. Soutenir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique favorise le développement durable et la paix et contribue au Programme de développement durable à l’horizon 2030. Il est important de remédier à la sur-représentation des hommes et à la sous-représentation des femmes pour rendre les démocraties plus légitimes et plus responsables.
8. Compte tenu de ces considérations, l’Assemblée appelle les États membres du Conseil de l’Europe, les observateurs et les partenaires pour la démocratie:
8.1. s'agissant de prévenir et de lutter contre les stéréotypes fondés sur le genre, le sexisme, la discrimination et la violence à l’égard des femmes:
8.1.1. à signer et à ratifier, si ce n’est pas encore le cas, la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (STCE no 210), et, pour les États qui sont déjà parties à la convention, à en accélérer la mise en œuvre ;
8.1.2. à adopter des mesures pour mettre en œuvre la Résolution 2274 (2019) de l’Assemblée, « Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel » et la Résolution 2290 (2019) «Vers un agenda politique ambitieux du Conseil de l'Europe pour l'égalité de genre»;
8.1.3. à œuvrer à la mise en œuvre de la Stratégie pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2018-2023 du Conseil de l’Europe et à sensibiliser le public à la valeur ajoutée d’un environnement politique inclusif ;
8.1.4. à mettre en œuvre, sans plus attendre, la Recommandation CM/Rec(2019)1 du Comité des Ministres  sur la prévention et la lutte contre le sexisme;
8.1.5. à veiller à ce que toutes les institutions publiques appliquent une tolérance zéro pour la violence, la discrimination et les abus, notamment en ratifiant la convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) sur la violence et le harcèlement (no 190);
8.1.6. à promouvoir une éducation inclusive afin de prévenir et de lutter, dès le plus jeune âge, contre les stéréotypes fondés sur le genre et le sexisme;
8.1.7. à abroger toute législation discriminatoire à l’égard des groupes sous-représentés, qui entrave leur participation à la prise de décision politique et publique ;
8.1.8. à créer des environnements sûrs et propices à la participation en adoptant des mesures pour prévenir et combattre toutes les formes de discrimination, les discours de haine racistes et sexistes et la violence à l’égard des femmes dans la politique et allouer des ressources suffisantes à cet effet ;
8.1.9. à encourager la participation des femmes dans la sphère politique et sur le marché du travail en garantissant l’accès à des gardes d’enfants abordables et l'adoption de mesures en faveur d'un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle;
8.2. s’agissant de l’accès à la prise de décision publique et politique et à la promotion de la participation des femmes de groupes sous-représentés:
8.2.1. à mettre en œuvre la Résolution 2011 (2016) « Évaluation de l’impact des mesures destinées à améliorer la représentation politique des femmes » et la Résolution 2222 (2018) « Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique » ;
8.2.2. à mettre en œuvre la Recommandation Rec(2003)3 du Comité des Ministres sur la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique ;
8.2.3. à collecter des données ventilées et à soutenir la recherche sur la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision publique et politique et analyser la composition des parlements en adoptant une approche intersectionnelle ;
8.2.4. à établir – à titre de mesure temporaire – des quotas de participation des femmes issues de groupes sous-représentés, et appliquer des sanctions en cas de non-respect de ces quotas ;
8.2.5. à adopter une législation et des politiques pour mettre en œuvre la Résolution 2155 (2017) « Les droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique » et faire de l’accessibilité des procédures, informations et processus électoraux une priorité ;
8.2.6. à signer et à ratifier la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157) et la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local (STE no 144), s’ils ne l’ont pas encore fait;
8.2.7. à œuvrer à la mise en œuvre du Plan d'action stratégique du Conseil de l'Europe pour l'intégration des Roms et des Gens du voyage (2020-2025);
8.2.8. à plafonner le financement des campagnes électorales afin de permettre une plus ample participation et assurer l’égalité d’accès aux fonds;
8.2.9. à évaluer les besoins des femmes issues de groupes sous-représentés qui souhaitent participer à la vie politique et publique afin d’apporter un soutien adéquat, y compris pour les femmes victimes de discrimination multiple et intersectionnelle;
8.2.10. à mettre en place et financer des programmes de mentorat et de leadership destinés aux femmes issues de groupes sous-représentés ;
8.2.11. à encourager la création de réseaux ou de groupes de femmes au sein des parlements nationaux, ainsi que des parlements de jeunes ;
8.2.12. à apporter un soutien financier aux organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de l’égalité de genre, de l’inclusion et de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision publique et politique;
8.2.13. à encourager et à soutenir l'espace civique et l'engagement des organisations de défense des droits des femmes afin de demander des comptes aux responsables politiques sur les questions d'égalité de genre;
8.2.14. à coopérer avec les médias pour promouvoir des modèles issus des groupes sous-représentés et lutter contre les stéréotypes de genre et le sexisme;
8.2.15. à assurer une couverture médiatique équitable, non stéréotypée et égale des candidat·e·s et des responsables politiques, quel que soit leur genre.
9. L’Assemblée invite les partis politiques:
9.1. à promouvoir activement la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à leurs structures internes, y compris au niveau de la direction, et envisager l’introduction de quotas volontaires;
9.2. à fixer des règles pour la sélection des candidat·e·s aux élections locales, régionales ou nationales qui garantissent la prise en compte de l’égalité de genre et de la diversité ;
9.3. à analyser leur composition interne et examiner comment augmenter la participation de femmes et d’hommes issus de divers milieux et leur représentation ;
9.4. à adopter une approche sensible au genre et intersectionnelle dans le soutien aux candidat·e·s à une élection ;
9.5. à signer l'« Engagement sur la représentation politique des femmes roms et des gens du voyage » du Conseil de l’Europe et prendre des mesures concrètes pour le mettre en œuvre ;
9.6. à organiser des formations sur l’inclusion, l’intersectionnalité et l’égalité de genre pour tous leurs membres, quel que soit leur genre, et garantir leur accessibilité ;
9.7. à organiser une formation spécifique de renforcement des capacités et de la confiance sous une forme accessible aux personnes issues de groupes sous-représentés afin de consolider leurs compétences politiques ;
9.8. à s’employer à accroître la visibilité de modèles issus de la vie politique et publique, y compris dans les médias.

B. Exposé des motifs par Mme Eglantina Gjermeni, rapporteure

(open)

1. Introduction

1. Le niveau de participation des femmes dans la prise de décision politique et publique est un indicateur majeur de l’égalité de genre et de l’autonomisation des femmes dans la société. Ces dernières décennies, la participation des femmes à la vie politique n’a cessé de progresser et des avancées concrètes ont été obtenues partout dans le monde. Dans l’Union européenne, la proportion de femmes parlementaires est plus élevée que jamais. La parité de genre est cependant loin d’être atteinte chez les représentant·e·s politiques. Dans les pays de l’Union européenne, sept parlementaires sur dix sont des hommes 
			(2) 
			<a href='https://eige.europa.eu/news/quotas-remedy-gender-inequality-can-bring-big-change-politics-and-business?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=eiges_newsletter_countdown_to_gender_equality_index_2020&utm_term=2020-10-01'>«Quotas
to remedy gender inequality can bring big change in politics and
business</a>», Institut européen pour l'égalité entre les hommes
et les femmes (EIGE), 1er juillet 2020..
2. Certains pays ont mis en place des quotas pour améliorer de manière tangible la représentation du genre sous-représenté. En Espagne, la représentation des femmes au parlement a atteint 44 %, soit davantage que l’objectif initial de 40 % 
			(3) 
			<a href='https://www.ipu.org/fr/ressources/publications/infographies/2020-03/les-femmes-en-politique-2020'>«Les
femmes en politique: 2020</a>», Union interparlementaire, «La carte UIP-ONU Femmes,
qui comprend le classement mondial des pays en fonction du nombre
de femmes à des postes exécutifs ou gouvernementaux au 1er janvier
2020». . En Suède, la parité de genre a presque été réalisée (47 %) grâce à une politique résolue d’égalité de genre et sans quotas. Mais les pays qui frisent la parité de genre dans la représentation politique demeurent une exception. Selon des données de l’ONU Femmes, il y aurait 21 % de femmes au sein des gouvernements à travers le monde 
			(4) 
			Réunion
virtuelle avec Julie Baddington, ONU Femmes New York, le 14 janvier
2021.. L’ONU Femmes estime qu’à ce rythme il faudra 130 ans pour parvenir à l’égalité de genre au niveau des chef·fe·s de gouvernement 
			(5) 
			<a href='https://www.independent.co.uk/voices/gender-quotas-politics-equality-women-b1799078.html?utm_content=Echobox&utm_medium=Social&utm_source=Twitter'>«We
need an equal number of women in politics to achieve real equality</a>», Phumzile Mlambo-Ngcuka, The Independent,
8 février 2021..
3. En 2015, le Premier ministre canadien Justin Trudeau présentait son gouvernement auquel femmes et hommes participaient de manière équilibrée, déclarant simplement que cette composition était logique « en 2015 ». La composition des gouvernements par genre est de plus en plus analysée et commentée dans les médias. Lorsque le Premier ministre Pedro Sanchez a nommé davantage de femmes que d’hommes ministres de son gouvernement en 2018 
			(6) 
			<a href='https://time.com/5304320/spain-new-government-majority-women/'>«Women
Outnumber Men in Spain's Historic New Government»</a>, Time, 9 juin
2018., il a été interrogé sur les raisons de son choix et a répondu qu’il avait choisi les personnes les plus compétentes 
			(7) 
			Un
nouveau gouvernement composé de 11 hommes et 11 femmes ministres
a été formé en janvier 2020.. La volonté politique est essentielle pour progresser.
4. La composition actuelle des parlements et des gouvernements, outre son absence d’équilibre de genre, ne reflète pas davantage la diversité de la population. En 2018, le rapport de M. Killion Munyama (Pologne, PPE/DC) intitulé «Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique» soulignait que « [l]a promotion d’une participation et d’une représentation accrues des femmes, des jeunes, des personnes issues de l’immigration, des personnes handicapées, des minorités visibles et des personnes LGBTI dans la vie politique est un moyen de garantir non seulement que les institutions sont reconnues comme reflétant véritablement la société, mais aussi que les préoccupations de cette dernière sont bien prises en compte dans les processus de prises de décisions politiques ». Dans sa Résolution 2222 (2018) «Promouvoir la diversité et l’égalité dans la vie politique», l’Assemblée se disait « convaincue qu’une plus grande représentativité des institutions élues renforcerait leur caractère démocratique, améliorerait la qualité et la légitimité de leur prise de décisions et rehausserait la confiance des citoyens dans le système politique. Cela contribuerait en outre à prévenir et combattre la discrimination, en envoyant un message fort en faveur de l’égalité et de l’inclusion ».
5. Au-delà des questions de parité de genre, il semble trop souvent que, en Europe, la participation des femmes à la prise de décision politique et publique soit quasiment réservée aux femmes blanches, très instruites et d’âge moyen élevé, comme c’est le cas pour leurs homologues masculins. Lorsqu’elle est ouverte aux femmes, la politique ne paraît pas encore ouverte à toutes les femmes. Les femmes et les hommes qui participent à la prise de décision politique et publique sont généralement issu·e·s de groupes favorisés ayant bénéficié, dès leur plus jeune âge, de conditions favorables. « À l’image des dirigeants masculins, les femmes qui parviennent à accéder aux espaces de pouvoir, tels que ceux que l’on trouve dans les processus politiques formels, proviennent en très grande majorité des élites politiques et économiques », a conclu le groupe chargé de la préparation de la 65ème session de la Commission de la condition de la femme (CSW65) 
			(8) 
			ONU Femmes, CSW65,
2021, « Participation pleine et effective des femmes à la prise
de décisions dans la sphère publique, élimination de la violence,
réalisation de l’égalité femme-homme et autonomisation de toutes
les femmes et de toutes les filles », réunion virtuelle, 5 au 8
octobre 2020, Rapport du groupe d’experts. Les conclusions concertées
de la CSW65 sont disponibles <a href='https://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/csw/65/csw65_ac_draft presented_by_the_bureau.pdf?la=en&vs=1031'>ici</a>.. La participation des femmes est étroitement liée à des caractéristiques telles que l’âge, le statut, l’origine et le niveau d’études. La discrimination double ou triple est l'un des obstacles les plus difficiles à surmonter. Nous devons par conséquent nous demander « quelles femmes » participent désormais à la prise de décision politique et publique et ce qui peut être fait pour encourager davantage de femmes issues de différents milieux à y prendre part. Il est par conséquent urgent d’examiner la question de la participation des femmes issues des groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique et de réfléchir aux mesures qui permettraient de l’accroître 
			(9) 
			Dans sa Résolution 2011 (2016) «Évaluation
de l’impact des mesures destinées à améliorer la représentation politique
des femmes», l’Assemblée recommandait une série de mesures, mais
n’abordait pas les difficultés spécifiques rencontrées par les femmes
issues de groupes vulnérables..

2. Objectifs et champ d’application du rapport

6. La proposition de résolution qui est à l'origine du présent rapport souligne que l'Assemblée devrait formuler des lignes directrices pour l’élaboration d’un ensemble d’instruments destinés à renforcer et à améliorer la participation des femmes issues de groupes vulnérables à la vie publique 
			(10) 
			«La vie
publique peut être définie, au sens large, comme le domaine dans
lequel s'inscrivent les processus politiques formels et les activités
liées aux questions publiques et politiques. Elle peut inclure,
sans s'y limiter, le travail du gouvernement, des médias, des organisations
de la société civile, des réseaux d'activistes et d'autres personnalités
qui jouent un rôle dans la vie publique. La participation des citoyens
à la vie publique peut être qualifiée de formelle et informelle.»
ONU Femmes, CSW65, 2021, op. cit., Rapport du groupe d’experts,
p. 4, <a href='https://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/csw/65/egm/csw65 egm report_final.pdf?la=en&vs=253https://www.unwomen.org/-/media/headquarters/attachments/sections/csw/65/egm/csw65%20egm%20report_final.pdf?la=en&vs=253'>EGM/2020/REPORT</a>, octobre 2020. et à tous les niveaux de prise de décision. Elle indique également qu’il convient d’encourager les États membres à collecter des données sur la participation des femmes issues de groupes vulnérables en politique et à la prise de décision.
7. La proposition de résolution fournit une description des groupes vulnérables 
			(11) 
			« Il
s'agit notamment des femmes et des jeunes filles ayant un faible
niveau d'éducation, à faible revenu, au chômage, vivant en milieu
rural, handicapées, contraintes de se marier ou mariées précocement,
appartenant à des minorités ethniques/religieuses, des femmes et
des jeunes filles réfugiées et déplacées à l'intérieur de leur pays,
des femmes et des jeunes filles vivant avec le VIH/sida et d'autres »,
proposition de résolution.. J'ai décidé de ne pas proposer une définition exhaustive, ce qui pourrait signifier que l'on néglige l'un ou l'autre groupe. Le dénominateur commun semble être que les femmes appartenant à des groupes vulnérables ou sous-représentés rencontrent plus de difficultés et ont moins d'opportunités que les autres femmes, ce qui peut entraver ou retarder leur entrée en politique et leur participation à la prise de décision politique et publique.
8. Je me suis efforcée, dans ce rapport, d’analyser pourquoi il importe que les femmes issues des groupes sous-représentés participent à la prise de décision politique et publique et quelles mesures précises peuvent être prises pour favoriser leur participation. J’ai examiné les bonnes pratiques qui pourraient être promues aussi bien au niveau local que national, notamment par les partis politiques. J’ai également passé en revue les différentes difficultés qui empêchent la participation des femmes issues de groupes sous-représentés et examiné les projets innovants qui permettent de les surmonter. La commission a approuvé ma proposition de remplacer le terme « vulnérable » par « sous-représenté » dans le titre de ce rapport.

3. Méthodes de travail

9. J’ai procédé à des recherches documentaires en me fondant sur les observations finales du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et sur le suivi de la Recommandation Rec(2003)3 du Comité des Ministres sur la participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision politique et publique 
			(12) 
			<a href='https://rm.coe.int/analytical-report-data-2016-/1680751a3e'>Troisième
cycle de suivi de la mise en œuvre de la Recommandation Rec(2003)3
du Comité des Ministres sur la participation équilibrée des femmes
et des hommes à la prise de décision politique et publique, Rapport
analytique – données 2016</a>.. J’ai également examiné les informations fournies par les États pour le bilan de la mise en œuvre du Programme d'action de Beijing, qui célèbre cette année son vingt-cinquième anniversaire 
			(13) 
			Examens au niveau national
des progrès accomplis et défis rencontrés dans la mise en œuvre
de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing. Rapports
nationaux: <a href='https://www.unwomen.org/en/csw/csw64-2020/preparations'>www.unwomen.org/en/csw/csw64-2020/preparations#national-level-reviews.</a>, les travaux de l’ONU Femmes, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de son Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) 
			(14) 
			<a href='https://www.osce.org/odihr/224206'>«Compendium
of Good Practices for Advancing Women’s Political Participation
in the OSCE Region</a>», OSCE, février 2016..
10. La réunion virtuelle bilatérale que j’ai tenue avec Mme Maryna Bardina (Ukraine, ADLE), à qui l’on doit la proposition de résolution, a été très fructueuse. Je souhaite également remercier Mme Yuliya Lovochkina (Ukraine, SOC) de sa contribution écrite sur la situation en Ukraine. Je remercie aussi Mme Serap Yaşar (Turquie, NI) de sa contribution écrite sur le fonctionnement de la branche dédiée aux femmes dans le parti politique AKP.
11. Le 3 novembre 2020, j'ai tenu une réunion bilatérale avec Thorsten Afflerbach et Valérie Poppe de la division Roms du Conseil de l'Europe sur la participation politique des femmes roms. J’ai également tenu des réunions le 18 décembre 2020 avec Alazne Irigoyen, co-fondatrice de la plateforme Young feminist Europe 
			(15) 
			<a href='http://www.youngfeminist.eu/'>Young feminist Europe</a>. et chercheuse à l'Université de Bilbao et le 14 janvier 2021 avec Julie Ballington de l’ONU Femmes à New York. Les 18 et 19 janvier 2021, j'ai organisé des réunions bilatérales virtuelles avec une série d'interlocutrices et d’interlocuteurs en Finlande et aux Pays-Bas les 8-10 février et 16 février 2021 
			(16) 
			Liste des réunions
tenues dans les documents d’information AS/Ega/Inf(2021)09 et AS/Ega/Inf(2021)11.. Je tiens à remercier les présidents Kimmo Kiljunen et Petra Stienen ainsi que les secrétariats de ces délégations pour le soutien qu’ils ont apporté. Le 11 février 2021, je me suis entretenue avec Alja Van Heel, Conseillère principale pour les questions de genre à l’OSCE/BIDDH. Le 17 février 2021, j’ai tenu une réunion bilatérale avec Momodou Malcolm Jallow, Rapporteur général sur la lutte contre le racisme et l’intolérance.
12. En outre, j'ai recueilli plusieurs témoignages de femmes LBT engagées dans la politique: Faika El-Nagashi, membre du Parlement autrichien, et Lilian Haak, qui est élue au conseil municipal d'Appeldorn aux Pays-Bas. J'ai également eu l'occasion de discuter avec Cianán Russel, représentant d'ILGA Europe 
			(17) 
			Ces réunions bilatérales
ont également été tenues virtuellement les 18 et 19 janvier 2021..
13. La commission a tenu une audition le 2 février 2021, avec la participation de Zeyna Hilal de l'Union interparlementaire, Alia El-Yassir, coordinatrice régionale du Bureau régional de l'ONU Femmes pour l’Europe et l’Asie centrale et Marina Bublik, une jeune femme rom engagée dans la vie politique en Ukraine.
14. J'ai également pu assister à des consultations tenues en vue de la CSW65, axée sur la participation pleine et effective des femmes et la prise de décision dans la vie publique, ainsi que l’élimination de la violence, afin de promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles.
15. Dernier point, mais non des moindres, j’ai tenu des réunions avec Bardhylka Kospira, vice-ministre à la Santé et à la Protection sociale en Albanie, le 6 février 2021, et avec Brisilda Taço, militante rom, cheffe de projet chez Romano Kham, le 9 février 2021 à Tirana, Albanie.
16. Toutes ces réunions ont largement contribué à ce rapport qui, selon moi, arrive à point nommé et est extrêmement utile pour montrer à la fois les progrès accomplis et ce qu'il reste à entreprendre. Ces nombreux entretiens enrichissants sont décrits dans le rapport et j’ai tenu compte des expériences directes et d’expert·e·s des quatre coins de l’Europe dans les recommandations formulées.

4. Obstacles à la participation

17. Lors de notre audition du 2 février 2021, Mme El Yassir, représentante d’ONU Femmes, a fait référence au rapport du Secrétaire général des Nations Unies en vue de la 65ème session de la Commission de la condition de la femme, dans lequel il est mentionné que les « femmes vivant en milieu rural, en situation de handicap, autochtones, LBTI et confrontées à des problèmes de racisme ainsi que les femmes d’ascendance africaine font partie des groupes les plus exclus de la vie publique et sont confrontées à une discrimination spécifique ». Elle regrette que les femmes en politique continuent d’être victimes de stéréotypes liés au genre et de discrimination et que des efforts suffisants n’aient pas été entrepris pour combattre les multiples formes de discrimination à l’encontre des femmes.
18. La Stratégie du Conseil de l'Europe pour l’égalité entre les femmes et les hommes 2018-2023 souligne que la réalisation « de la participation pleine et entière des femmes à la vie publique, privée et politique requiert des changements fondamentaux, des politiques, des mesures et des actions ciblées pour éliminer les obstacles sociétaux et structurels ». Ces obstacles sont en effet nombreux et revêtent diverses formes. Leur analyse nous permet de les surmonter avec efficacité.
19. Les femmes issues de groupes sous-représentés sont confrontées à de multiples obstacles et entraves à leur participation à la prise de décision politique et publique. Leur accès à l’éducation et aux services est souvent limité. Elles peuvent être victimes de discrimination en raison de leur genre, de leur identité de genre, de leur orientation sexuelle, de la couleur de leur peau, de leur origine sociale ou ethnique, de leur âge ou de leur handicap, entre autres 
			(18) 
			<a href='https://www.un.org/womenwatch/daw/cedaw/recommendations/General recommendation 25 (French).pdf'>La
Recommandation générale n° 25 du CEDEF</a> reconnaît que certains groupes de femmes, outre la discrimination
à laquelle elles sont soumises en tant que telles, peuvent être
confrontées à divers types de discrimination fondée sur d’autres
caractéristiques telles que la race, l’ethnie, la religion, le handicap,
l’âge, la classe, la caste ou d’autres considérations. Cette discrimination
frappe surtout certains groupes de femmes, et de manière ou à des
degrés différents, des hommes. Les États parties doivent envisager
de prendre des mesures temporaires spéciales pour éliminer ce type
de discrimination et la combinaison d’effets préjudiciables qu’elle
engendre.. C'est pourquoi le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDEF) a adopté une approche intersectionnelle et a reconnu que la discrimination peut être fondée sur une combinaison de motifs, ce qui produit alors une sorte de discrimination cumulative. Cette approche prend en considération les contextes historique, social et politique de la discrimination. Le CEDEF demande aux États de prendre en considération les formes de discrimination intersectionnelles auxquelles les femmes peuvent être confrontées, car toutes les femmes ne sont pas touchées de la même manière par la discrimination 
			(19) 
			CEDEF, Recommandation
générale n° 28 sur les obligations fondamentales des États parties
en vertu de l'article 2 de la Convention sur l'élimination de toutes
les formes de discrimination à l'égard des femmes, 19 octobre 2010,
par. 6-9.. La lutte contre toutes les formes de discrimination doit donc être intensifiée afin d'apporter un changement systémique. Un environnement sans discrimination est plus propice à une participation politique diversifiée et plus susceptible d'assurer une représentation de toutes et tous.
20. La violence à l’égard des femmes en politique, dans l'hémicycle, dans la rue et sur les médias sociaux peut décourager toute volonté de s'engager davantage. La crainte du harcèlement et de la violence peut décourager les candidates potentielles de se présenter aux élections. Comme le montre l'étude de l'UIP-APCE sur le sexisme, le harcèlement et la violence à l’égard des femmes dans les parlements en Europe 
			(20) 
			<a href='https://www.ipu.org/fr/ressources/publications/bulletins-thematiques/2018-10/sexisme-harcelement-et-violence-legard-des-femmes-dans-les-parlements-deurope'>Étude
de l’UIP et de l’APCE sur le Sexisme, harcèlement et violence à
l’égard des femmes dans les parlements d’Europe</a>, 2018., la violence à l’égard des femmes est répandue et généralisée dans le monde de la politique. Les femmes issues de groupes sous-représentés peuvent être attaquées pour divers motifs. Les discours de haine et le harcèlement en ligne à l’encontre des femmes dans la vie politique et publique entravent l'engagement des femmes en politique, en particulier celles qui sont issues de groupes sous-représentés. Des actions claires et fortes pour lutter contre les discours de haine, le harcèlement en ligne et la violence contre les femmes en politique contribueront sans aucun doute à renforcer la participation des femmes des groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique.
21. En général, les femmes portent le poids des préjugés et des normes sociales de la société et de leur propre famille, qui s'opposent à leur entrée en politique. On pourrait attendre d'elles qu'elles s'occupent de leur famille plutôt que de devenir une figure publique, en raison des rôles sociaux qu'elles sont censées accomplir. Comme l'a souligné Mme Yaşar dans sa contribution, «dans les zones rurales, la participation des femmes peut être plus difficile en raison du manque d'approbation des membres de la famille». Les femmes peuvent être sous-représentées en politique, en raison de la perception qu'elles sont moins qualifiées ou qu'elles ne possèdent pas suffisamment de compétences en matière de leadership. Ces stéréotypes sont liés au rôle traditionnel des femmes en tant que qu’aidantes.
22. Cette pression sociale est préjudiciable à la confiance en soi, et a souvent pour conséquence que les femmes limitent leurs ambitions, croyant qu'elles n'ont pas le profil ou ne correspondent pas au « type de personne prenant des décisions ». Elles peuvent penser qu'elles n'ont pas le profil socio-économique ou éducatif dit approprié. Cette autocensure empêche des femmes brillantes de décider d'être plus actives en politique et dans la vie publique. Le manque de confiance en soi et d'assurance constitue donc un obstacle supplémentaire majeur. Une formation et un encadrement spécifiques sont essentiels pour renforcer la confiance en soi et permettre aux femmes de se familiariser avec l'environnement politique. Dans le même temps, les parlements nationaux et régionaux devraient devenir plus sensibles à la question du genre, notamment en ce qui concerne les conditions de travail et intégrer la dimension de genre dans leur travail.
23. Le partage inégal des responsabilités domestiques et des soins peut empêcher les femmes de s'engager en politique. La participation à la prise de décision politique et publique prend du temps et le soutien de la famille au candidat ou à la candidate est important pour réussir. Les longues heures de travail, l'organisation de réunions souvent le soir et le week-end et l'absence de mesures visant à assurer la compatibilité avec la vie privée peuvent conduire à la décision de reporter l'entrée en politique de quelques années. Ces facteurs peuvent également constituer une raison de ne pas prolonger un mandat. Des politiques plus favorables à l'égalité de genre devraient être élaborées pour créer un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. La Norvège et la Suède ont adopté de bonnes pratiques pour surmonter les obstacles concrets auxquels sont confrontées les femmes en tant que qu’aidantes principales. En Norvège, l'État subventionne largement les crèches publiques et privées pour aider les femmes à assumer la charge des soins aux enfants. En Suède, les crèches sont accessibles aux femmes travaillant dans les secteurs public et privé, et sont financées en partie par des subventions du gouvernement central, en partie par les recettes fiscales et en partie par les contributions des parents; les parents ne doivent dépenser qu'entre 1 et 3 % du revenu familial pour la garde des enfants, en fonction du nombre d'enfants; et depuis 1991, tous les enfants âgés de 18 mois et plus, dont les parents travaillent ou étudient, ont accès à une place soit dans une garderie agréée, soit dans une garderie familiale agréée, soit dans une école maternelle.
24. Les femmes issues de groupes sous-représentés rencontrent également des difficultés majeures pour figurer sur les listes électorales ou pour progresser dans leur parti politique. Les partis politiques peuvent être les « gardiens » de l’accès des personnes issues de groupes sous-représentés à la vie politique. Ils font partie du problème, et doivent donc devenir une partie de la solution. Il est important d'inclure des femmes d'origines diverses sur les listes, mais les placer à des postes éligibles fait toute la différence. Le manque de financement et le manque d'investissements des partis dans les candidatures féminines constituent également des obstacles importants. La conduite d'une campagne électorale nécessite des ressources financières substantielles. Le plafonnement des dépenses électorales pourrait contribuer à attirer des candidats et candidates d'origines plus diverses. Les partis politiques devraient apporter un soutien aux femmes des groupes sous-représentés afin de s’assurer qu’elles disposent des ressources financières nécessaires.
25. Le fait que les compétences et l'expertise des femmes en général ne soient dans l’ensemble pas prises en compte par les autres politiciens ou les médias a un impact négatif sur la participation des femmes à la vie politique et publique. Les femmes sont évaluées différemment des hommes, que ce soit en tant que candidates potentielles à des postes de direction ou à des postes de prise de décision. Elles sont généralement confrontées à la double obligation de faire preuve de qualités de leadership (généralement associées aux hommes), tout en présentant les caractéristiques attendues des femmes (comme être chaleureuses et attentionnées). Les femmes candidates ou élues sont toujours interrogées sur leur situation familiale, leurs enfants ou font l'objet de commentaires sur leur apparence. Les gros titres se concentrent encore trop souvent sur ces aspects plutôt que sur les compétences, l'expertise et la contribution professionnelles. En 2021, il semble très limitatif pour les femmes d'avoir encore à répondre à ce genre de questions.
26. Le manque d'accessibilité des procédures, des informations et des structures peut rendre difficile la participation des femmes en situation de handicap à la vie publique et politique. Il existe quelques bonnes pratiques, mais elles ne sont pas généralisées et la participation des femmes en situation de handicap est encore limitée. Il convient de promouvoir davantage la participation et la représentation dans les structures décisionnelles.
27. La pandémie de covid-19 a eu un impact extrêmement négatif sur l’égalité et la non-discrimination. Dans son rapport intitulé «Garantir les droits humains en temps de crise et de pandémie: la dimension de genre, l’égalité et la non-discrimination» 
			(21) 
			Doc. 15129 et Résolution
2339 (2020) «Garantir les droits humains en temps de crise et de
pandémie: la dimension de genre, l’égalité et la non-discrimination»., Mme Petra Stienen (Pays-Bas, ADLE) souligne que la pandémie de covid-19 « a eu des répercussions sur le fonctionnement de nos démocraties et sur l’ensemble des droits humains. Du point de vue de l’égalité et de la non-discrimination, elle a mis en évidence les inégalités profondes et structurelles qui affectent nos sociétés et les a aggravées ». Les femmes issues de groupes sous-représentés ont été touchées de manière disproportionnée par la pandémie, ce qui a rendu leur engagement en politique encore plus difficile. Selon Caroline Hubbard et Saskia Brechenmacher, « les effets politiques et socio-économiques profonds de la pandémie pourraient stopper ou inverser les progrès dans le domaine de l'inclusion politique des femmes » 
			(22) 
			<a href='https://carnegieendowment.org/2020/11/17/how-coronavirus-risks-exacerbating-women-s-political-exclusion-pub-83213'>«How
the Coronavirus Risks Exacerbating Women’s Political Exclusion</a>», Caroline Hubbard et Saskia Brechenmacher, 17 novembre
2020, Carnegie Endowment for International Peace.. Elles soulignent toutes deux qu’un retour à des rôles de genre traditionnels, une plus grande précarité, des pratiques moins structurées en politique et une moindre visibilité des femmes dans les médias peuvent conduire à exclure davantage les femmes. Elles relèvent cependant aussi des exemples encourageants comme le nombre plus élevé que jamais de femmes noires briguant un mandat politique aux États-Unis en 2020, qui pourrait être directement lié à la pandémie de covid-19 qui a touché les personnes de couleur de manière disproportionnée. Il serait très intéressant, selon moi, de mener davantage de recherches pour analyser l’impact de la pandémie sur la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique.
28. Sur une note plus positive, et comme le souligne Julie Ballington (ONU Femmes), le changement peut se produire rapidement s'il existe une volonté politique forte. Nous assistons en effet à un changement aux États-Unis avec la nomination d'un cabinet plus diversifié sous l'administration Biden ainsi que d'une femme vice-présidente. L'expérience positive de plusieurs pays, en matière d'augmentation de la participation des femmes aux niveaux décisionnels, pourrait être un excellent modèle à suivre pour renforcer la participation des femmes issues de groupes sous-représentés en politique et dans les organes décisionnels publics. Le fait d'avoir plus de femmes en politique peut changer les attitudes et contribuer à remettre en question les stéréotypes.

5. Participation des femmes roms à la prise de décision politique et publique

29. Les Roms et les Gens du voyage sont sous-représentés dans la vie politique aux niveaux local, national et européen. Les femmes roms sont particulièrement sous-représentées dans le paysage politique européen. La participation politique des femmes issues des communautés roms et de Gens du voyage a été le thème principal de la Sixième conférence internationale des femmes roms en 2017 
			(23) 
			<a href='https://rm.coe.int/report-draft-6th-international-roma-women-conference-strasbourg-novemb/16808b359d'>Sixième
Conférence internationale des femmes roms, «Les femmes et la représentation
politique: le cas des femmes issues des communautés roms et des
Gens du voyage</a>», 6-7 novembre 2017, Strasbourg.. Son résultat principal concerne les partis politiques, qui sont des acteurs essentiels pour assurer la participation des femmes de divers milieux à la vie politique  dans la mesure où ils décident des listes pour les élections et peuvent avoir une approche proactive dans la sélection des candidats et candidates d'origines diverses. Les partis et groupes politiques ont donc été encouragés à signer l'« Engagement sur la représentation politique des femmes roms » 
			(24) 
			<a href='https://rm.coe.int/pledge-on-political-representation-of-roma-women-/168076252b'>«Engagement
sur la participation politique des femmes roms</a>», Conseil de l’Europe, Strasbourg, 6-7 novembre 2017., déclarant qu'ils « s'engagent à promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes et la participation aux instances de décision de femmes appartenant à des groupes minoritaires et en particulier de femmes issues des communautés roms et de Gens du voyage, ainsi que leur représentation politique lors des prochaines élections européennes, nationales, régionales et locales ». Je trouve cette initiative très inspirante et je suis d'avis qu'elle devrait être davantage promue. Il a été décevant d'apprendre que seuls 13 partis politiques ont signé cet engagement jusqu'à présent. Avec ce rapport, j'ai l'intention d'encourager davantage de partis politiques à le signer et à prendre des mesures afin de le mettre en œuvre.
30. La conférence a permis de discuter de la manière dont l'autonomisation pourrait commencer une fois les défis reconnus. Des recommandations essentielles ont été formulées lors de cette conférence. Si elles visent spécifiquement à promouvoir la participation des femmes issues des communautés roms et des Gens du voyage, elles pourraient également être une source d'inspiration pour d'autres groupes de femmes. La lutte contre la discrimination structurelle est une recommandation clé et une condition préalable à la participation. Une autre recommandation importante est de proposer des initiatives de formation, de mentorat, d'orientation professionnelle, de mise en réseau des pairs et de renforcement des capacités aux femmes issues des communautés roms et des Gens du voyage qui souhaitent s'engager en politique.
31. Certaines participantes ont mentionné qu'elles étaient confrontées à un dilemme entre la préservation de leur identité culturelle en tant que Roms et la participation à un mouvement politique général. C'est pourquoi la lutte contre les stéréotypes et la discrimination est si importante. Une personne qui entre en politique ne doit pas avoir l'impression d'abandonner son identité. Nous avons donc également besoin d'une plus grande ouverture de la part des partis et de mesures spécifiques pour promouvoir la participation de personnes issues de différents milieux. L'adoption de quotas par les partis politiques pourrait avoir un impact significatif. La formation des dirigeants et dirigeantes et des partis politiques à la prise en compte de la dimension de genre dans la structure des partis politiques et dans les pratiques de recrutement et de sélection a également été évoquée comme une recommandation pertinente.
32. La Division des Roms et des Gens du voyage du Conseil de l'Europe a organisé des sessions de formation pour accroître leur participation à l'élaboration des politiques, ainsi que leur représentation politique, en mettant l'accent sur le renforcement des capacités. À mon avis, ces formations peuvent être considérées comme de bonnes pratiques qu'il convient de promouvoir. Les participantes à la formation sont sélectionnées sur la base de leurs projets et de leur motivation, et elles doivent prévoir de se présenter aux élections au niveau local, national ou européen. Les organisations de la société civile rom peuvent aussi bien suggérer des noms de candidates prometteuses qui seraient intéressées par cette formation. Elles apprennent à mener une campagne électorale, à s'exprimer en public et à obtenir le soutien des citoyens et citoyennes pendant la campagne. Une formation de suivi est également organisée sur la manière d'exercer un mandat une fois élue, ce que je trouve particulièrement important. Après leur élection au niveau national ou local, les candidates élues ont besoin de programmes de formation, de mentorat et d'accompagnement pour s'adapter à un nouvel environnement, la plupart du temps peu convivial, et pour accroître l'efficacité de leurs connaissances et compétences politiques. D'après mon expérience personnelle et professionnelle, je considère ces programmes de formation comme extrêmement importants et étroitement liés à leurs performances professionnelles. Les domaines de compétences concernés comprennent notamment la compréhension du fonctionnement formel et informel de la politique, la collecte de fonds, le travail avec les médias, le leadership, le travail en réseau, la négociation, le lobbying, le leadership et les relations entre les élu·e·s et les électeurs et électrices.
33. La sélection des participantes est très importante afin d'assurer une participation variée. Ce processus est ouvert, transparent et inclusif. Il peut y avoir certains obstacles à la participation à une formation, comme la réticence de la famille ou les critiques des pairs et des amis. La participation est également entravée par de multiples inégalités, par exemple dans l'accès à l'éducation ou des problèmes plus logistiques tels que l'éloignement et le manque de transport. Il peut être difficile pour une femme rom d'affirmer que l’on souhaite entrer en politique, participer, être visible et éventuellement voyager et devenir plus indépendante. Les organisatrices et organisateurs d’activités visant à promouvoir la participation doivent tenir compte de ces obstacles éventuels et adopter une approche sensible au caractère délicat de la question pendant le processus de sélection. Les sessions de formation sont adaptées aux besoins des femmes qui y participent.
34. J'ai lu avec intérêt qu'en 2019, sur 15 femmes roms candidates, six femmes ont été élues conseillères locales en République de Moldova. Elles avaient toutes participé à un programme de formation « Les femmes roms en politique » organisé par le Centre national rom et l’ONU Femmes. Les obstacles suivants à la participation politique des femmes roms en République de Moldova ont été recensés par le Centre national rom: la discrimination et le sexisme, les rôles des hommes et des femmes et les responsabilités familiales, les procédures bureaucratiques limitant l'enregistrement des femmes roms ayant un faible niveau d'éducation, la préférence des partis politiques pour l'inscription de candidats roms masculins plutôt que féminins sur leurs listes électorales, la tendance des partis politiques à placer les femmes roms à des postes non éligibles sur leurs listes électorales et une démotivation liée à la corruption, la manipulation politique et la situation politique instable 
			(25) 
			Natalia Duminica, «Political
participation and representation of Roma women in Moldova», CEDAW
Shadow Report, Roma National Center, janvier 2020.. Ces obstacles ont été clairement identifiés et examinés au cours de la formation, ce qui a eu un résultat positif.
35. J'ai été heureuse d'apprendre qu'Eileen Flynn a été inscrite sur la liste des 100 femmes de 2020 de la BBC en devenant la première femme de la communauté des gens du voyage irlandais à siéger au Seanad Éireann, la chambre haute du Parlement irlandais.
36. J’ai également reçu des informations sur le projet « Femmes roms: la force du changement dans les Balkans occidentaux et en Turquie », d’une durée de trois ans, mis en œuvre par Roma Active Albanie avec le soutien du réseau ERGO (European Roma Grassroots Organisations) et le financement de l’Union européenne. Ce projet vise à renforcer la participation des femmes roms dans les processus décisionnels et politiques locaux et nationaux. Une partie du projet est destinée à sensibiliser l’opinion à l’impact négatif des structures de pouvoir patriarcales sur les femmes roms et à trouver des moyens de les faire participer aux structures de la société civile et à la vie publique.
37. J’ai eu la possibilité de m’entretenir avec Brisilda Taço, lauréate en 2019 du Prix « Héros méconnus » de l’Union européenne pour l’intégration des roms dans les Balkans occidentaux et en Turquie. Elle m’a dit que les femmes roms qui veulent s’engager dans la vie publique et politique sont confrontées à une double discrimination, de la communauté rom en raison du décalage par rapport aux rôles de genre traditionnels et de la population dans son ensemble. Elle a recommandé de promouvoir des modèles positifs de jeunes filles et de femmes dans les médias, d’investir dans l’éducation en proposant des bourses d’études pré- et post-universitaires pour les filles et jeunes femmes roms, de les encourager à participer aux conseils municipaux et à des réseaux à divers niveaux.
38. Certains modèles ont effectivement émergé et pourraient être une source d'inspiration pour les femmes roms afin qu'elles participent à la vie politique et publique. Le 21 octobre 2020, Zuzana Kumanová a été nommée secrétaire d'État du ministère de la Culture de la République slovaque. Elle est la première femme rom à être nommée à un tel poste dans ce pays 
			(26) 
			<a href='http://www.romea.cz/en/news/czech/zuzana-kumanova-becomes-the-first-romani-woman-ever-appointed-to-high-office-in-slovakia'>«Zuzana
Kumanová becomes the first Romani woman ever appointed to high office
in Slovakia</a>», 21 octobre 2020.. Mme Soraya Post, citoyenne de la Suède, a été membre du Parlement européen de 2014 à 2019. Lorsqu'elle a été élue au Parlement, elle a déclaré dans une interview: « Je me mets toujours sous pression pour montrer que je suis aussi intelligente que les autres et que je peux réussir. Il y a quinze ans, j'ai décidé que je ne me sentirai plus jamais comme une citoyenne de seconde zone. Il est important de connaître ses droits, mais aussi de les appliquer » 
			(27) 
			<a href='https://www.euractiv.com/section/all/interview/roma-mep-we-need-trust-before-we-can-truly-belong/'>«Roma
MEP: We need trust before we can truly belong</a>», Euractiv, 8
octobre 2014.. Elle a été candidate pour l'Initiative féministe, un parti politique féministe suédois, qui lui a demandé de se présenter alors qu’elle présidait le Réseau international des femmes roms. Se présenter aux élections est apparu comme une étape logique, après des années d'activisme au sein de la société civile 
			(28) 
			<a href='https://www.liberation.fr/planete/2015/01/08/soraya-post-euromeenne_1176411'>«Soraya
Post. Eu(rom)éenne</a>», Anne-Françoise Hivert, Libération,
8 janvier 2015.. De manière plus générale, il est important de consolider les acquis en matière de participation des femmes à la prise de décision, de soutenir les modèles positifs et de promouvoir l'impact de leur contribution, afin d'inciter davantage de femmes et de jeunes filles à entrer en politique et à participer à la prise de décision. Lors de notre audition du 2 février 2021, Marina Bublik a partagé son expérience de jeune femme rom qui s’est présentée aux élections en Ukraine et a souligné l'importance du rôle des écoles politiques roms du Conseil de l'Europe, au-delà des sessions de formation, en offrant un réseau de soutien. Elle a trouvé la formation dispensée très bénéfique mais aimerait voir davantage de renforcement des capacités de leadership pour les femmes.

6. Les jeunes femmes sont les nouveaux moteurs du changement en politique

39.  Les chiffres de l'UIP montrent que seulement 2,2 % des parlementaires dans le monde ont moins de 30 ans, dont les femmes ne représentent qu’une petite partie  
			(29) 
			<a href='https://www.ipu.org/fr/actualites/actualites-en-bref/2020-11/lever-les-obstacles-sexistes-sur-le-chemin-des-jeunes-femmes-parlementaires'>«Lever
les obstacles sexistes sur le chemin des jeunes femmes parlementaires</a>», UIP, 20 novembre 2020.. Néanmoins, ces dernières années, de jeunes femmes politiques sont arrivées sur le devant de la scène politique et ont impressionné par leurs connaissances, leur charisme et leur courage. Alexandra Ocasio-Cortez, aux États-Unis, est l'une d'entre elles et a incité de nombreux jeunes à être plus actifs en politique. Elle a été particulièrement active durant son premier mandat au Congrès et a expliqué son action à ses partisans sur les médias sociaux presque quotidiennement. Elle les a emmenés au Congrès, ce qui a contribué à accroître leur intérêt pour la sphère politique. Elle a été réélue en novembre 2020. L'utilisation croissante des médias sociaux en politique a définitivement changé la façon dont les campagnes électorales sont menées. Avec Instagram, les photos et les discussions en direct avec les abonnés rapprochent les candidats et candidates de leurs électeurs et de leurs électrices et permettent une interaction plus directe.
40. En Finlande et en Nouvelle-Zélande, des jeunes femmes ont été nommées au poste de Premier ministre. Elles ont été félicitées pour leur gestion de la première vague de covid-19 et ont mis en avant la nécessité de mieux équilibrer vie privée et vie professionnelle. Sanna Marin et Jacinda Ardern sont toutes deux parents de jeunes enfants, ce qu'elles ne considèrent pas comme un problème les empêchant d'exercer leurs fonctions. Sanna Marin a grandi dans une famille arc-en-ciel et est devenue Première ministre à l'âge de 34 ans. Son profil est inhabituel dans la politique européenne et attire beaucoup l'attention. La majorité des du Gouvernement finlandais actuel sont des femmes et la plupart des responsables de partis sont des femmes de moins de 40 ans. Leur nomination à un niveau de responsabilité politique aussi élevé envoie un puissant message de confiance dans les capacités des jeunes générations.
41. Greta Thunberg a gagné en popularité dans le monde entier pour son activisme contre le changement climatique. Bien qu'elle ne soit pas membre d'un parti politique, elle est une militante pour la protection de l'environnement et a rencontré des dirigeant·e·s politiques dans le monde entier. Elle encourage les jeunes à s'exprimer davantage dans le cadre du dialogue social et politique. Elle est une source d'inspiration pour les jeunes générations et au-delà. Elle a été louée et attaquée dans les médias et par certains dirigeants politiques pour son action. Elle a toujours répondu de façon spirituelle et non agressive, ce qui est sa façon d'être un modèle. Je pense que ses actions ont incité davantage de jeunes femmes à s'engager en politique.
42. Les premiers engagements et vocations se trouvent souvent dans les mouvements dénonçant le changement climatique ou dans les mouvements féministes. Le manque de confiance dans la politique, considérée comme un lieu de trop nombreux compromis, fait que les jeunes hésitent à entrer en politique. La professeure Irigoyen a souligné au cours de notre échange 
			(30) 
			Réunion
tenue virtuellement le 18 décembre 2020. que les jeunes femmes ne participeraient pas systématiquement à la prise de décision politique et publique de manière traditionnelle. Des structures moins institutionnalisées sont plus susceptibles d'attirer les jeunes, et il est compréhensible que des environnements non inclusifs aux comportements sexistes ne soient pas attrayants pour les jeunes générations. Il est donc nécessaire de repenser la manière dont les espaces de décision sont construits pour garantir qu'ils soient des espaces sûrs et libres pour toutes et tous.
43. Lors de notre réunion bilatérale virtuelle avec Mme Bardina, nous avons examiné la nouvelle Boîte à outils du Conseil de l'Europe pour les autorités locales et les organisations de la société civile sur la participation des jeunes femmes et des filles appartenant à des groupes défavorisés aux processus de décision publique et politique au niveau local, qui a été mise en œuvre en Ukraine en 2020 et peut être considérée comme une bonne pratique 
			(31) 
			<a href='https://www.coe.int/fr/web/genderequality/-/new-council-of-europe-toolkit-on-participation-of-young-women-and-girls-from-disadvantaged-groups-in-political-and-public-decision-making-processes-at'>Nouvelle
Boîte à outils du Conseil de l’Europe sur la participation des jeunes
femmes et des filles appartenant à des groupes défavorisés aux processus
de décision publique et politique au niveau local</a>, Conseil de l’Europe, mars 2020..
44. La Suède, qui a fait de la promotion de l'égalité de genre une priorité au niveau national et international, a alloué des fonds spécifiquement pour promouvoir la participation politique des filles et des jeunes femmes. L'égalité de genre a été intégrée dans tous les aspects de la gouvernance et de la mise en œuvre des projets, et a eu un impact tangible 
			(32) 
			<a href='https://www.seekdevelopment.org/sites/default/files/news-pdfs/GNO_Girls_Report_2018.pdf'>«Strengthening
political participation of girls and young women</a>», Girls Report 2018, Plan International Germany (Plan
International Deutschland e.V), 2018..

7. Participation et visibilité des femmes LBTI

45. La situation est très différente entre les États membres du Conseil de l'Europe en ce qui concerne la participation des femmes LBTI à la prise de décision politique et publique. Dans certains États membres, la législation anti-LGBTI complique l'engagement politique, tandis que dans d'autres, les femmes LBTI ont pu accéder à des postes de pouvoir au sein du gouvernement.
46. Les femmes transgenres, par exemple, sont discriminées en tant que femmes et en raison de leur identité de genre. Les programmes de tutorat et les groupes de soutien entre pairs peuvent les exclure. Cianán Russell a souligné que l'homophobie et la transphobie étaient aujourd'hui socialement plus acceptées que le racisme et la xénophobie 
			(33) 
			Réunion tenue virtuellement
le 18 janvier 2021.. La crainte du harcèlement et de la violence peut décourager les candidates LBTI potentielles de se présenter aux élections. Une représentation plus importante des femmes LBTI est nécessaire.
47. La question des quotas doit également être mentionnée. Fixer un objectif qui ne serait pas de 50/50, mais peut-être un peu moins donnerait de l'espace aux personnes non binaires. Il serait important de veiller à ce que nos recommandations empêchent toute discrimination future à cet égard.
48. Petra De Sutter, une femme transgenre, qui est une ancienne membre éminente de l'Assemblée et présidente de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, a été récemment nommée vice-première ministre en Belgique, choisie pour ce poste en raison de son haut niveau de compétence. Dans les médias belges, la couverture médiatique de sa nomination a présenté son expérience et son expertise passées, mais dans la presse internationale, les commentaires sur sa nomination se sont concentrés sur son identité de genre en tant que femme transgenre, et non sur ses compétences et son expérience professionnelle. Un autre exemple est celui d'Ana Brnabić, qui est la première femme ouvertement lesbienne à occuper la fonction de première ministre de Serbie. Il existe une forte volonté de faire connaître l'expertise de tout politicien ou politicienne, indépendamment de son genre ou de son parti politique. Les femmes LBTI, ainsi que toutes les femmes issues de groupes sous-représentés, doivent être plus fortes, plus compétentes et plus performantes que les autres afin d'atteindre des postes de pouvoir.
49. Lilian Haak, une femme transgenre des Pays-Bas, élue à un conseil municipal, a souligné au cours de notre réunion 
			(34) 
			Ibidem. que les femmes LBTI avaient deux batailles à mener. Elles ont dû se battre pour leur statut et pour la cause qu'elles défendent. Cela a rendu la participation à la prise de décision publique et politique encore plus difficile pour les femmes LBTI. Elle a souligné l'importance d'avoir un réseau de soutien pour les femmes qui commencent à faire de la politique.
50. Dinah de Riquet-Bons, candidate des Verts aux Pays-Bas, a déclaré qu’il est difficile pour une femme transgenre d’entrer en politique. Elle est d’origine juive et a été la cible de propos antisémites depuis qu’elle fait de la politique.
51. J'ai tenu une réunion inspirante avec Tanja von Knorring, une femme transgenre connue qui s'est présentée aux élections de 2019 en Finlande. Elle a mis en garde contre l'instrumentalisation des personnes issues de groupes sous-représentés dans les processus électoraux et a dénoncé le harcèlement sur les médias sociaux. Les défis auxquels sont confrontées la plupart des femmes en politique sont exacerbés pour les femmes issues de groupes sous-représentés. Selon elle, il n'existe pas encore suffisamment de données sur les groupes sous-représentés dans l'Union européenne et elle a donc appelé à une meilleure collecte de données. Il est nécessaire d'établir des lignes directrices dans les programmes de formation visant à renforcer la participation de femmes issues de groupes sous-représentés sur la manière dont les cours peuvent être menés avec une approche intersectionnelle.
52. J'ai trouvé particulièrement intéressants les cycles de formation à la participation en politique menés par le NDI (Institut national démocratique) dans les Balkans afin de permettre aux militants LGBT d’acquérir les compétences requises pour s’engager dans des partis politiques, au parlement et dans des organismes publics. Ces sessions ont également pour objet de préparer les participant·e·s à se présenter à une élection. Elles ont été organisées en partenariat avec le Gay and Lesbian Victory Institute basé aux États-Unis et Labris, une organisation serbe de défense des droits fondamentaux des lesbiennes.
53. Faika El-Nagashi, membre du Parlement autrichien, m'a fait part de son histoire. Elle et ses parents sont nés à l'étranger. Elle s'identifie comme une femme de couleur issue de l'immigration, lesbienne, qui a grandi dans une famille catholique et musulmane. Il est difficile de séparer ses différentes identités, ce qui l'a rendue plus vulnérable à la discrimination multiple. Malgré tous ces défis, son histoire est celle d’une réussite. Elle a souligné le rôle important des communautés qui la soutiennent ainsi que son expérience de militante. Le mentorat a été crucial dans sa carrière politique. Lorsqu'elle rencontre des candidates ou candidats potentiels, elle leur conseille de faire preuve de résilience, ce qui est essentiel pour survivre dans un environnement politique qui peut être hostile. Selon elle, les femmes ayant été élues ont un rôle majeur à jouer pour encourager les femmes issues de groupes sous-représentés à s'engager en politique.

8. La participation des femmes de couleur et des femmes issues de l’immigration

54. Je voudrais souligner que l'accession de Kamala Harris au poste de vice-présidente des États-Unis d'Amérique le 20 janvier 2021 est un changement historique. Elle est la première femme à être nommée à ce poste, ce qui est déjà révolutionnaire en soi. De plus, elle est la fille d'un père jamaïcain et d'une mère indienne, ce qui prouve aux jeunes générations que la voie est ouverte. En montrant que c'est possible, les modèles ouvrent la voie.
55. Il n’en reste pas moins que les femmes de couleur et les femmes issues de l’immigration qui s’engagent en politique sont régulièrement la cible d’attaques racistes. Kristina Stenman, médiatrice en matière de non-discrimination en Finlande, a mentionné la discrimination à l'égard des Afro-finlandais et le discours de haine, qui constituent un obstacle à la participation à la vie politique. Selon elle, il est important d'aborder les aspects genrés du racisme. Jenni Tuominen, de l'association Monika, a souligné que les femmes issues de groupes sous-représentés étaient encore assez invisibles dans la politique finlandaise. Les femmes roms et sames sont par exemple sous-représentées. Selon Mme Tuominen, il y a un niveau important de discrimination raciale et de discours de haine qui doit être combattu afin d'augmenter la participation des femmes issues de groupes sous- représentés. L'association Monika apporte un soutien aux femmes issues de l'immigration qui participent aux élections, discute du rôle des différentes institutions et prépare le terrain pour leur participation politique. Ses membres sont optimistes pour l'avenir en ce qui concerne la participation des femmes d'origines diverses à la prise de décision politique et publique.
56. Lors de notre rencontre avec les représentantes de l'Association des femmes finlandaises NYTKIS, nous avons discuté de leur programme visant à lutter contre les discours de haine et le harcèlement à l’encontre des femmes pendant les campagnes électorales. Elles ont exprimé leur inquiétude face à l'augmentation des discours de haine contre les femmes et ont regretté que le paysage politique actuel ne soit pas très diversifié, malgré la forte participation des femmes.
57. La participation des femmes de couleur et des femmes issues de l’immigration a progressé ces dernières années aux Pays-Bas. Marie-Anne von der Reijen regrette cependant qu’il leur soit plus difficile de se hisser à des fonctions de direction. Amma Asante a souligné que la norme était encore l’homme blanc, ce qui rend la situation encore plus difficile pour les femmes de couleur. Le fait de pouvoir participer aux décisions permettrait, selon elle, de comprendre le système de l’intérieur.
58. Selon Tanja Jadnanansing, conseillère municipale d’Amsterdam, les femmes issues de groupes sous-représentés ne sont pas considérées à leur plein potentiel. Elles ont beaucoup à apporter et à enseigner au reste de la population. La formation ne devrait pas être dispensée de manière paternaliste, mais en tenant compte des possibilités de contribution de chaque participant·e·s. L’emploi du terme « autonomisation » a été critiqué. Il est important d’adopter une démarche humble lorsqu’on prépare et propose des activités telles que des formations.
59. J’ai également eu un échange de vues passionnant avec Samira Rafaela, membre du Parlement européen. Elle regrette l’absence de femmes de couleur dans la politique néerlandaise et affirme ne pas être la norme au Parlement européen. On lui demande parfois si elle est l’assistante parlementaire d’un membre du parlement. Elle dit être régulièrement la cible d’attaques racistes, qui sont manifestement dissuasives pour des femmes de couleur ayant des ambitions politiques. Les femmes de couleur entendent souvent qu’elles ne sont pas assez douées pour participer à la prise de décision, ce qui est discriminatoire.

9. Participation des femmes en situation de handicap

60. En 2017, l’Assemblée a adopté une résolution inédite, « Les droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique» 
			(35) 
			Résolution 2155 (2017) «Les
droits politiques des personnes handicapées: un enjeu démocratique».. Toutes les recommandations présentées dans le rapport devraient être suivies. Des mesures concrètes sont nécessaires pour permettre aux personnes en situation de handicap de participer davantage à la prise de décision politique et publique. Leur accès à la politique n’est pas encore une réalité dans les États membres du Conseil de l’Europe et, trop souvent, on attend des personnes en situation de handicap qu’elles travaillent uniquement sur les questions de handicap au sein des partis politiques.
61. Tarja Filatov, vice-présidente du Parlement finlandais, a mentionné que les partis politiques essayaient de recruter des personnes en situation de handicap en vue des prochaines élections municipales. Elle a souligné l'importance du mentorat pour les candidats et candidates.
62. Lors de notre audition, Mme El Yassir a partagé l’histoire d’Elena, une femme en situation de handicap qui est entrée récemment en politique en République de Moldova. Elena, qui est âgée de 35 ans, a essayé d’accéder à un centre médical de sa ville. Elle n’a pas pu rentrer et a été contrainte de se déplacer avec ses mains et ses genoux pour pénétrer dans le bâtiment. Elle est allée à la mairie pour solliciter de l’aide. Le maire a donné à Elena un sac de ciment et du sable et lui a dit de se débrouiller seule. Elle a décidé de prendre les choses en main et de présenter sa candidature à un poste de conseillère municipale comme candidate indépendante. Elle a trouvé des soutiens et des mentors qui l’ont aidée. Elle a bénéficié de la formation d’ONU Femmes, qui a contribué à créer le premier réseau de femmes en situation de handicap regroupant désormais 100 membres. Une campagne nationale dans les médias a contribué à lutter contre les normes sociales et attitudes négatives à l’égard des femmes en situation de handicap.
63. Lors de notre réunion, la vice-ministre, Mme Kospiri, a souligné que l’absence de stratégies sociales inclusives ou l’inefficacité de leur mise en œuvre a perpétué l’invisibilité en politique des femmes issues de groupes sous-représentés, notamment des femmes en situation de handicap. Selon elle, il faut faire obstacle aux stéréotypes sur les capacités des femmes en situation de handicap. L’engagement auprès de la société civile a été décisif dans son parcours politique. Son action vise à accroître la visibilité des personnes en situation de handicap sur la scène politique et à leur donner une tribune pour exprimer leurs besoins. L’accès aux informations, aux services, à la justice et à une éducation inclusive est indispensable à cette fin.

10. Les hommes peuvent être des alliés dans le renforcement de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés

64. Les femmes ne supportent pas seules le fardeau de la réalisation de l’égalité de genre ; il s’agit d’une responsabilité commune qui peut profiter à toutes et à tous. Il est essentiel, selon moi, d’associer les hommes dès un jeune âge, à la promotion de l’égalité de genre. Ils sont des agents potentiels du changement. Ils peuvent reconnaître que les hommes sont sur-représentés dans les institutions politiques et réclamer la participation accrue des femmes, notamment celles qui sont issues de groupes sous-représentés. Les efforts des hommes qui s’engagent dans cette voie devraient être reconnus.
65. J'ai lu avec intérêt une e-discussion électronique organisée sur iknowpolitics sur l'engagement de champions masculins pour soutenir la participation politique des femmes. Elle souligne que l'équilibre de genre en politique ne peut être atteint que «si les hommes travaillent côte à côte avec les femmes pour partager la responsabilité de briser les normes et pratiques culturelles néfastes, ainsi que les barrières institutionnelles, structurelles et juridiques qui entravent la participation politique égale et influente des femmes» 
			(36) 
			<a href='https://www.iknowpolitics.org/es/comment/19037'>«Engaging
male champions to support women’s political participation</a>», iKnowPolitics, 6 September-12 October 2017. See also <a href='https://www.iknowpolitics.org/sites/default/files/consolidated_reply_male_champions_e-discussion_december_2017_1.pdf'>Consolidated
reply of the e-Discussion on Engaging Male Champions to Support
Women’s Political Participation</a>, iKnowPolitics, International Knowledge Network of Women
in Politics, décembre 2017..
66. Le partage du pouvoir est une question difficile à aborder. Le fait d’accepter des règles, par exemple au sein d’un parti politique, qui garantissent l’égale participation des femmes et des hommes, entraîne une participation accrue des femmes. La redistribution du pouvoir sera difficile sans implication des hommes. Lors de notre réunion, M. Jallow a souligné que la sur-représentation politique des hommes et la masculinité toxique sont étroitement liées. Dès leur plus jeune âge, les hommes sont considérés comme des décideurs. Il considère que la sous-représentation des femmes est un problème systémique qui implique de modifier le système. Dans une société patriarcale, ce changement n’est pas possible sans la participation des hommes.
67. Les hommes peuvent être des alliés dans le combat pour l’égalité de genre à la maison et au travail. En partageant les soins et les activités ménagères ainsi qu'en établissant des normes égales pour les garçons et les filles au sein de la famille, les hommes jouent un rôle crucial dans la promotion de l'égalité de genre. La promotion de l’égalité en matière d’emploi, de l’égalité salariale pour un travail de valeur égale et la contribution à l’obtention d’un meilleur équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle sont des mesures qui peuvent être prises par des hommes ou des femmes occupant des postes de responsabilité. Les hommes devraient être également considérés comme des aidants et s’impliquer davantage dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Dès leur plus jeune âge, la plupart des hommes entendent qu’ils doivent être forts et se conformer à une vision stéréotypée d’une masculinité forte tandis que les femmes et les filles sont considérées comme vulnérables. Aux Pays-Bas, l’initiative « Men Engage » vise à étudier avec des hommes comment changer les comportements masculins toxiques.
68. Il arrive parfois que des mouvements de femmes s’opposent à l’implication des hommes dans les efforts de promotion de la participation des femmes. L’exclusion des hommes est, selon moi, contre-productive. Les hommes ne sont pas tous opposés à l’égalité de genre. Les mouvements de femmes peuvent également tirer profit d’une plus grande participation des hommes, et l'égalité de genre ne peut être réalisée que si les femmes et les hommes y contribuent.
69. Il faut s’attaquer aux racines des inégalités de genre pour provoquer un changement radical. Les programmes scolaires peuvent contribuer à remettre en question les stéréotypes de genre et les cadres d’apprentissage peuvent avoir une approche sensible au genre. Les médias peuvent aussi jouer un rôle important. L'éducation et les médias peuvent tous deux contribuer à changer les normes sociales.

11. Mesures concrètes pour améliorer la participation

70. L'amélioration de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique nécessite une multitude de mesures et une forte volonté politique. Les partis politiques doivent reconnaître leurs lacunes en matière de représentativité et prendre des mesures concrètes pour recruter des candidats et candidates aux profils variés et garantir une participation et une représentation inclusives. Le système éducatif doit veiller à inclure dans ses programmes des informations sur la contribution des femmes à l'histoire et à la politique et à mettre en lumière des exemples pouvant servir de modèles en vue d’inspirer des nouvelles générations. Pour s’opposer aux normes sociales et promouvoir des sociétés inclusives du point de vue du genre, il faut lutter, dès le plus jeune âge, contre les stéréotypes fondés sur le genre. La norme du leadership uniquement masculin doit être remise en question.
71. Il ne peut y avoir de participation accrue des candidates et candidats issu·e·s de groupes sous-représentés si aucune autre mesure n'est prise pour prévenir et combattre la discrimination. La législation discriminatoire à l'encontre d'un groupe sous-représenté, tel que les personnes LGBTI, doit être abrogée afin d'ouvrir la voie à la participation. Une législation antidiscriminatoire forte doit être mise en œuvre, si ce n'est pas encore le cas.
72. Il convient également de prendre des mesures résolues pour prévenir et combattre le discours de haine, le sexisme et la violence à l'égard des femmes en politique, qui affectent leur volonté de s'engager et de continuer à participer à la vie politique et à la prise de décision publique. Les recommandations formulées dans le rapport de Mme Thorhildur Sunna Ævarsdóttir « Pour des parlements sans sexisme ni harcèlement sexuel » 
			(37) 
			Résolution 2274 (2019) «Pour des parlements
sans sexisme ni harcèlement sexuel». restent valables et devraient être mises en œuvre sans plus attendre. Des environnements sûrs et propices à l’égalité de genre contribuent à augmenter la participation des femmes à la prise de décision politique et publique.
73. La collecte de données ventilées sur la participation des femmes issues de groupes sous-représentés doit être encouragée et les mesures doivent être adaptées aux résultats. Les parlements pourraient étudier comment intégrer différents groupes de personnes. Davantage de recherches sont nécessaires dans le domaine des démocraties inclusives, de l’intersectionnalité et de la manière dont elle est liée et a un impact sur les rôles de leadership des femmes, du rôle des hommes dans la promotion de la participation des femmes et des origines socio-économiques des femmes en politique. Une analyse de l’ensemble de la sphère politique et de la représentation et de la participation des groupes sous-représentés pourrait être également indiquée. D'autres travaux de recherche sont également nécessaires pour déterminer comment augmenter la représentation des femmes dans les organes élus au niveau local et le nombre de femmes maires.
74. L'utilisation de quotas peut être un point de départ du changement. Ils pourraient être mis en place pour les jeunes candidats et candidates avec une composante de genre. On pourrait également exiger que sur les trois premières femmes d'une liste, une soit issue d'un groupe sous-représenté. Les personnes non binaires doivent également être prises en compte lorsqu’il est question de quotas afin d’éviter toute discrimination supplémentaire. Des objectifs assortis de délais peuvent aider à obtenir des résultats positifs. Des sanctions efficaces en cas de non-respect des quotas législatifs doivent être appliquées. Les quotas pourraient être une mesure temporaire pour provoquer un changement important, mais ils ne suffisent pas à eux seuls à changer un système. Ils doivent être accompagnés de politiques inclusives et sensibles à la dimension de genre, d’une budgétisation sensible au genre et d’une législation appropriée. Les quotas doivent être considérés comme un minimum et non pas comme un objectif.
75. La communication stratégique incitant à voter pour des femmes peut également avoir un impact positif. Aux Pays-Bas, l’initiative « Voter pour une femme » créée par Devika Partiman en 2017 est très inspirante. Elle appelle les femmes et les hommes à effectuer un vote stratégique pour une femme qui n’est pas nécessairement en tête de liste (vote préférentiel) et a été largement partagée sur les réseaux sociaux. Cette stratégie a contribué à l’élection de plus de 150 femmes.
76. Les partis politiques peuvent prendre des mesures spécifiques pour encourager la participation des femmes issues de groupes sous-représentés. Les règles de sélection des candidats et candidates peuvent garantir la prise en compte de la diversité. Les partis peuvent analyser leur composition et le profil des candidats et candidates et organiser des discussions sur la manière d'accroître la participation et la représentation. L’OSCE/BIDDH a élaboré un outil en ligne permettant aux partis politiques de réaliser leur propre audit de genre, qui comprend une question sur la participation des différents groupes de femmes 
			(38) 
			OSCE/ODIHR gender audit, <a href='http://genderaudit.osce.org/'>http://genderaudit.osce.org.</a>. Les plans d'action pour l'égalité de genre des partis politiques pourraient être un instrument utile pour garantir leur responsabilité en la matière. Les partis décident également de l'allocation des ressources pour les campagnes électorales et devraient utiliser une approche sensible au genre pour soutenir les candidats et candidates. Les partis politiques devraient promouvoir les candidatures de femmes issues de groupes sous-représentés par l'adoption de programmes de formation spéciaux, le recrutement et des incitations financières. Il importe également de garantir que les femmes, une fois élues, conservent leur poste et que des mesures soient prises dans ce sens 
			(39) 
			<a href='https://www.osce.org/odihr/224206'>«Compendium
of Good Practices for Advancing Women’s Political Participation
in the OSCE Region</a>», OSCE, février 2016..
77. Une autre recommandation vise à faire de l’accessibilité pour toutes les femmes et les filles une priorité. La participation des femmes en situation de handicap doit être davantage soutenue. Les partis politiques devraient s’adapter aux besoins des personnes en situation de handicap et être plus inclusifs.
78. Le développement de la garde d'enfants pour toutes et tous, y compris pour les femmes qui participent à la prise de décision politique et publique, peut être une incitation. La sensibilisation au partage des responsabilités parentales pourrait représenter une aide. Il convient de promouvoir des politiques familiales favorables à l'égalité de genre. Il est important d'investir dans l'éducation civique à l'école et dans l'éducation des adultes sur l'égalité de genre, l'inclusion et la non-discrimination pour parvenir à un changement profond des mentalités en faveur d'une société plus égalitaire et plus inclusive. Accroître l'autonomie économique des femmes issues de groupes sous-représentés et améliorer leur accès à l'éducation, à la santé et aux services sociaux sont autant d'éléments qui contribuent à leur engagement dans la vie publique et politique.
79. Les formations formelles et informelles sont importantes et ont un grand impact sur leurs performances professionnelles. Il est important que les femmes reçoivent une formation avant d'entrer en politique, pendant leur campagne en tant candidates et pendant leur mandat. Des programmes de tutorat créatifs peuvent jouer un rôle important en renforçant leur confiance, leurs connaissances et leurs compétences en matière de politique et de prise de décision. Des rencontres avec des femmes dirigeantes qui ont réussi, qui partageraient des histoires de réussite, des expériences personnelles en termes de réalisation d'objectifs, de conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle, de la manière de gérer un environnement non convivial en politique, de la manière de gérer les discours de haine, pourraient également être motivantes et encourageantes. La formation à la préparation des campagnes électorales, à la conduite des mandats, au renforcement de la confiance, à la collecte de fonds, à la définition de l'agenda, à la mise en réseau, à la formation de groupes et d'alliances, à la négociation et au leadership, aux médias sociaux et aux nouvelles technologies sont des outils utiles qui nécessitent des ressources financières suffisantes. Pour que la formation soit adaptée à leurs besoins, il faudrait interroger les femmes issues de groupes sous-représentés sur leurs besoins, leurs souhaits et l’idée qu’elles se font de leur contribution à la prise de décision politique et publique. J’ai été informée qu’au Kosovo* 
			(40) 
			*Toute
référence au Kosovo dans ce texte, que ce soit le territoire, les
institutions ou la population, doit se comprendre en pleine conformité
avec la Résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies
et sans préjuger du statut du Kosovo., le NDI a repensé ses programmes pour soutenir les femmes et les jeunes et a organisé une formation utilisant la technologie pour soutenir leur activité politique 
			(41) 
			Information
communiquée par Mme Ana Kadovic, Directrice
résidente, NDI/Albanie le 17 février 2021..
80. Les groupes parlementaires féminins agissent à la fois comme soutien aux femmes parlementaires et comme mécanismes permettant d'influencer l'élaboration des politiques. Les groupes nationaux et locaux de femmes parlementaires, de membres de mouvements de femmes et d'hommes sensibles à la dimension de genre peuvent travailler ensemble sur des programmes communs, et œuvrer consciemment pour l'égalité de genre et le renforcement de l'engagement des femmes des groupes sous-représentés dans la politique et la vie publique. Il n'y aura pas de progrès en matière d'égalité de genre sans une plus grande implication des hommes députés. La formation des hommes à l'égalité de genre peut également apporter une contribution positive et sensibiliser à l’importance de l’égalité et de l’inclusion. De manière plus générale, l'application d'une optique de genre intersectionnelle à l'élaboration des politiques devrait devenir un réflexe, de même que la budgétisation sensible au genre.
81. Les médias ont également un rôle important à jouer pour promouvoir une culture de l'égalité de genre et de la diversité. Des campagnes stratégiques devraient être organisées pour remettre en question les stéréotypes de genre, offrir un espace aux femmes de tous les groupes dans les médias et pour rendre visibles leur contribution et leur participation dans tous les domaines de la vie. Il convient de promouvoir des modèles positifs afin de garantir que davantage de femmes et de filles participent à la vie publique. La contribution des femmes à la politique et à l'économie politique devrait être plus visible.
82. Dans de nombreux pays, les organisations de promotion des droits des femmes soutiennent fermement la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique aux niveaux local, régional et national. Je considère les mouvements et les organisations de promotion des droits des femmes comme essentiels à la lutte pour une participation et une représentation égales. Elles sont essentielles pour motiver et faire participer les femmes à la vie publique et à la politique, en mobilisant leur pouvoir collectif pour exiger des comptes et des changements, et pour ces raisons leur expérience et leur expertise pourraient être utilisées pour soutenir les femmes des groupes sous-représentés. Les gouvernements devraient allouer en priorité des fonds aux organisations qui travaillent pour les femmes, en particulier les femmes des groupes sous-représentés. En général, les partenariats entre les gouvernements et la société civile peuvent contribuer à faire progresser la participation. J'ai trouvé très intéressant qu'en Finlande, les organisations de protection des droits des femmes soient assez fortes pour fournir des programmes et des parrainages destinés à renforcer la participation des femmes.
83. Il devrait être également reconnu officiellement que les institutions publiques, les parlements et les partis politiques ont la responsabilité de rendre les démocraties plus inclusives, comme l’a souligné Alja van Heel 
			(42) 
			Réunion
tenue virtuellement le 11 février 2021.. La participation des femmes à tous les niveaux de la prise de décision devrait être considérée comme cruciale pour améliorer leur nature représentative, leur responsabilité et la qualité des démocraties, ainsi que pour rendre les programmes d'élaboration des politiques plus sensibles au genre.

12. Conclusions

84. De nombreux obstacles s’opposent à la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décision publique et politique. L'investissement dans l'éducation et la formation, ainsi que, plus spécifiquement, dans l'éducation civique, peut conduire à l'expression de l'intérêt de candidates et candidats potentiels. Pour être efficace, pertinent et poursuivre sa noble mission de servir les intérêts de la population, le monde de la politique doit s'ouvrir davantage aux femmes des groupes sous-représentés et fournir à tous les citoyens les outils nécessaires pour participer efficacement à la politique et exercer leurs droits.
85. Il est important d’adopter une approche intersectionnelle et de faire en sorte que le paysage politique européen commence à mieux refléter la diversité des sociétés européennes. Divers outils sont à notre disposition et il est de notre responsabilité de provoquer le changement, au niveau individuel et au sein des structures de nos partis politiques. Nous devons montrer clairement que la diversité ne doit cependant pas être instrumentalisée et être une simple façade. Les femmes et hommes issus de groupes sous-représentés qui participent à la prise de décision politique et publique ne représentent pas uniquement un groupe ; elles et ils apportent une nouvelle vision et leur expertise dans de nombreux domaines.
86. La participation accrue des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique aura un impact important et positif à long terme. Avoir davantage de femmes de groupes sous-représentés qui participent à la prise de décision politique et publique signifie plus de participation et de représentativité. Cela contribue à accroître la confiance du grand public dans les décideurs et les décideuses et à réduire les écarts réels et/ou perçus entre les décideurs et les décideuses et la population. Elle a ainsi la garantie que ses besoins sont pris en compte. L’ensemble du système démocratique s’en trouve renforcé. Comme l'a déclaré le groupe d'experts chargé de préparer la CSW65, « [l]a représentation des femmes dans la vie publique est plus significative lorsqu'elle reflète les femmes dans toute leur diversité et qu'elle s'attaque aux modèles transversaux d'inégalité entre les différents groupes de femmes. Les femmes sont diverses par leur situation sociale, leurs valeurs, leur statut économique, leurs idéologies politiques et leurs expériences vécues. Les décideurs politiques, les militants et les législateurs qui souhaitent faire progresser des changements substantiels au profit de toutes les femmes doivent également reconnaître que la cécité face aux spécificités des besoins et aux inégalités entre et parmi les différents groupes de femmes peut causer plus de mal que de bien » 
			(43) 
			 ONU Femmes, CSW65,
2021, Rapport du groupe d’experts, op. cit..
87. Selon moi, assurer une composition équilibrée des parlements aux niveaux central et local ainsi que des gouvernements est un premier pas, mais l’inclusivité devrait également être prise en compte. Une transformation institutionnelle et structurelle plus large devrait être prévue pour faire en sorte de n’oublier personne. La voix des femmes dans la prise de décision politique, dans les communautés, dans les parlements et dans les négociations de paix doit être considérée comme essentielle pour soutenir et maintenir des sociétés prospères et pacifiques.
88. Des progrès continus en ce qui concerne la participation des femmes à la politique et à la prise de décision publique ne peuvent être réalisés qu'en garantissant des mécanismes de responsabilisation solides qui soutiennent la mise en œuvre des engagements internationaux. L'absence de mécanismes de responsabilisation solides pourrait devenir un autre obstacle au renforcement de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à tous les niveaux de la prise de décision.
89. La participation égale des femmes dans les parlements aux niveaux national et local est cruciale pour améliorer la nature représentative, la responsabilité et la qualité des démocraties. Pour renforcer nos démocraties, il est essentiel de les rendre plus inclusives. Il pourrait être nécessaire de repenser ses structures pour atteindre cet objectif. La lourde tâche du renforcement de la participation ne devrait pas incomber uniquement aux femmes, mais à la société dans son ensemble. Les institutions et les partis politiques doivent leur laisser de la place pour participer et s’engager. Les hommes ont également la responsabilité de permettre et promouvoir le changement et de se montrer les alliés de l’égalité de genre. De profonds changements structurels sont nécessaires pour garantir davantage de participation, d’égalité et d’inclusivité dans la prise de décision publique et politique. L’heure est venue de relever ce défi et de redoubler d’efforts pour éliminer les disparités de genre.