1. Introduction
1.1. Contexte
1. La prochaine session ministérielle
du Comité des Ministres est prévue pour le mois de mai 2021. À cette occasion,
les ministres devraient examiner le cadre stratégique du Conseil
de l’Europe, fondé sur les propositions de la Secrétaire Générale.
2. En janvier 2021, le Président de l’Assemblée parlementaire
a proposé que l’Assemblée apporte une contribution à cette discussion.
Cette idée a été approuvée par les présidents de tous les groupes
politiques.
3. Après la présentation au Bureau de l’Assemblée, par la Secrétaire
Générale, de son Cadre stratégique pour le Conseil de l’Europe et
le «trialogue» tenu le 26 janvier 2021, le Bureau a décidé, lors
de sa réunion du 1 février 2021, de saisir la commission des questions
politiques et de la démocratie pour rapport sur «La vision de l’Assemblée
sur les priorités stratégiques du Conseil de l’Europe», le document
devant être prêt à temps pour que l’Assemblée puisse l’examiner
pendant la partie de session d’avril 2021.
4. Le 4 février 2021, la commission m’a nommé rapporteur, sous
réserve de la ratification du renvoi. L’Assemblée a renvoyé la question
à la commission lors de la réunion de sa commission permanente du 19 mars
2021.
5. Dans la cadre de la préparation de mon rapport, j’ai notamment
tenu un échange de vues avec des ambassadeurs représentant leur
gouvernement au sein du Comité des Ministres, y compris M. l’ambassadeur Rolf Mafael,
Représentant permanent de l’Allemagne, Président des Délégués des Ministres.
Je tiens à remercier mes interlocuteurs pour leur aimable coopération,
qui m’a été très utile.
1.2. Objet
et portée du rapport
6. De mon point de vue, ce rapport
offre l’occasion d’exposer et de réaffirmer le point de vue de l’Assemblée,
en tant qu’organe statutaire doté d’une compétence générale, sur
un nombre limité de questions prioritaires que nous considérons
d’importance stratégique pour le Conseil de l’Europe. Il permet
ainsi à l’Assemblée d’assumer pleinement son rôle statutaire et
sa responsabilité en tant que moteur politique de l’Organisation.
7. Cependant, le rapport n’a pas vocation à être un catalogue
des travaux de l’Assemblée dans tous les domaines examinés par ses
commissions, ni une revue exhaustive des activités du Conseil de
l’Europe. Au contraire, pour pouvoir avoir un impact, il sera axé
sur quelques questions seulement – ce qui ne veut pas dire qu’il
n’y a pas d’autres questions importantes. Le but du Conseil de l’Europe
est décrit dans le Statut de l’Organisation (1949, STE no 1),
auquel je renvoie dans les premiers paragraphes de la résolution.
8. En outre, étant donné que la réflexion stratégique sur l’avenir
du Conseil de l’Europe se poursuivra certainement bien au-delà de
la session ministérielle que le Comité des Ministres tiendra en
mai 2021, l’Assemblée doit être associée à ce processus et y contribuer
de façon positive en y apportant la dimension politique.
1.3. Éléments
de référence
9. Il convient de rappeler que
toutes les options stratégiques que nous examinons doivent contribuer
à atteindre le but statutaire du Conseil de l’Europe tel que consacré
par son acte fondateur, c’est-à-dire «… réaliser une union plus
étroite entre ses Membres afin de sauvegarder et de promouvoir les
idéaux et les principes qui sont leur patrimoine commun et de favoriser
leur progrès économique et social» (article 1 du Statut du Conseil
de l’Europe). Ce but «sera poursuivi au moyen des organes du Conseil,
par l’examen des questions d’intérêt commun, par la conclusion d’accords
et par l’adoption d’une action commune dans les domaines économique,
social, culturel, scientifique, juridique et administratif, ainsi
que par la sauvegarde et le développement des droits de l’homme
et des libertés fondamentales.» (article 1.b). «Tout membre du Conseil de
l’Europe reconnaît le principe de la prééminence du droit et le
principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction
doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Il s’engage à collaborer sincèrement et activement à la poursuite
du but [du Conseil de l’Europe].» (article 3).
10. L’Assemblée a exprimé son point de vue sur les choix stratégiques
pour le Conseil de l’Europe à de nombreuses occasions, en termes
tant généraux que spécifiques. Citons tout particulièrement à cet
égard la
Résolution 2277
(2019) «Rôle et mission de l’Assemblée parlementaire: principaux
défis pour l’avenir», la
Résolution
2186 (2017) «Appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin de
réaffirmer l’unité européenne, et de défendre et promouvoir la sécurité
démocratique en Europe», et la
Recommandation 2114 (2017) «Défendre l’acquis du Conseil de l’Europe: préserver
le succès de 65 ans de coopération intergouvernementale». Fondées
sur de larges consultations avec les délégations nationales, toutes
trois identifiaient déjà des priorités stratégiques pour l’Assemblée
en particulier, et pour le Conseil de l’Europe de façon générale.
11. Il convient également de mentionner les orientations politiques
données par les Chefs d’État et de gouvernement lors de leur 3e Sommet
(Varsovie, mai 2005), notamment le Plan d’action complet qui, aux
yeux de nombreux États membres, reste entièrement pertinent. Plus
récemment, les décisions politiques prises par le Comité des Ministres
à sa 129e session à Helsinki (mai 2019)
et la Déclaration d’Athènes adoptée par la Présidence du Comité
des Ministres (novembre 2020) ont fourni un cadre de la réponse
du Conseil de l’Europe aux nouveaux défis.
2. Priorités
stratégiques
12. Comme indiqué plus haut, pour
établir la liste des priorités qui me semblent primordiales pour
le Conseil de l’Europe, je m’appuie dans une très large mesure sur
les travaux anciens et en cours de l’Assemblée. En fait, pratiquement
toutes ses résolutions et recommandations visent à énoncer des positions
politiques sur divers problèmes existants et émergents, contribuant
ainsi au positionnement stratégique du Conseil de l’Europe.
13. Je suis d’avis que la priorité générale du Conseil de l’Europe
est de rester le pilier de la sécurité démocratique et d’un multilatéralisme
constructif et effectif en Europe, et de préserver et de réaffirmer
sa propre identité en tant que forum indépendant pour une coopération
et un dialogue politiques approfondis et inclusifs.
14. Le système conventionnel unique du Conseil de l’Europe, qui
compte plus de 220 instruments juridiquement contraignants et dont
les deux piliers sont la Convention européenne des droits de l’homme (STE
no 5, «la Convention») et la Charte sociale
européenne (STE no 35), est l’une des
principales forces – et un avantage comparatif – de notre Organisation.
Il constitue la base de l’ordre juridique public démocratique en
Europe. Nombre de traités appartenant à ce système sont ouverts
aux États non-membres du Conseil de l’Europe et constituent également
une source d’inspiration pour l’élaboration de lois nationales dans
le monde. Le caractère unique de ce système réside dans le fait
que la mise en œuvre de plusieurs de ses conventions fait l’objet
d’un suivi, assuré notamment par des experts indépendants, et les
États parties bénéficient d’un soutien pour remédier à toute insuffisance
constatée à cet égard. Ce système doit encore être amélioré, tant sur
le plan interne, en promouvant l’adhésion des États membres aux
conventions de l’Organisation et le respect de ces dernières, que
sur le plan externe, en encourageant les États non-membres à y adhérer.
En outre, de nouveaux instruments visant à répondre aux défis nouveaux
et émergents devraient être conçus pour lui permettre de conserver
sa pertinence.
15. La mise en œuvre de la Convention dans tous les États membres
doit rester une priorité absolue pour le Conseil de l’Europe et
ses deux organes statutaires. Cette convention incarne les valeurs
fondatrices de l’Organisation, et sa mise en œuvre requiert l’engagement
sans faille de tous les États membres au niveau national. L’autorité
de la Cour européenne des droits de l’homme (la Cour), en tant que
juridiction statuant en dernier recours pour plus de 800 millions
d’Européens, doit être défendue par tous les États membres et par le
Conseil de l’Europe de façon générale, en application du principe
de subsidiarité, qui confère la responsabilité principale de la
mise en œuvre de la Convention aux États parties, et à celui de
la responsabilité partagée, qui oblige le Comité des Ministres à
prendre des mesures efficaces pour protéger le système de la Convention.
16. En outre, conformément à la position de principe de l’Assemblée,
exprimée à de nombreuses occasions, et encore très récemment dans
la
Recommandation 2193
(2021) «La Mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des
droits de l’homme», il est important de souligner que l’exécution
de tous les arrêts de la Cour, ainsi que des mesures provisoires
prises en vertu de l’article 39 de son Règlement, doit être assurée.
17. L’une des priorités stratégiques du Conseil de l’Europe est
l’adhésion de l’Union européenne à la Convention, afin de créer
un espace juridique commun unique qui s’étende de Reykjavik à Vladivostok,
sans exception. Cette adhésion renforcera la crédibilité de l’Union
européenne et la pertinence du Conseil de l’Europe et de la Convention
aux yeux de tous ses citoyens et États membres. Elle permettra également
de renforcer la protection des droits humains en Europe en soumettant
à la juridiction de la Cour tous les organismes publics susceptibles
de porter atteinte aux droits individuels, ce qui est un élément
fondamental de l’ordre public dans le domaine des droits humains.
Par conséquent, il est urgent de poursuivre le processus d’adhésion,
conformément aux décisions politiques déjà prises à cet effet au
plus haut niveau.
18. Dans le contexte actuel de la pandémie de covid-19, le Conseil
de l’Europe doit plus que jamais relever les défis sociaux auxquels
sont confrontées les populations de notre continent. Aussi, conformément
aux décisions prises par le Comité des Ministres à Helsinki en mai 2019,
il me paraît important d’attirer l’attention sur la nécessité de
mettre davantage l’accent sur la protection des droits économiques
et sociaux dans les travaux du Conseil de l’Europe.
19. Je suis également d’avis que l’Assemblée devrait s’associer
à l’appel du Comité des Ministres aux États membres qui ne l’ont
pas encore fait à envisager de signer et/ou de ratifier la Charte
sociale européenne révisée (STE no 163)
et son Protocole additionnel prévoyant un système de réclamations
collectives (STE no 158). Il convient
de rappeler que lors du sommet de Varsovie, en 2005, les chefs d’État
et de gouvernement ont estimé que la Charte sociale européenne révisée
devrait être considérée comme le socle minimal des droits sociaux
que tous les États membres devraient garantir.
20. Il est aussi important de promouvoir l’adhésion de l’Union
européenne au système de la Charte sociale européenne. Actuellement,
neuf membres de l’Union ne sont pas Parties à la Charte révisée.
21. Le Conseil de l’Europe a activement contribué à promouvoir
une véritable égalité et le respect de la dignité humaine, ainsi
qu’à combattre la discrimination fondée sur quelque motif que ce
soit, et il doit continuer de tout mettre en œuvre pour atteindre
ces objectifs. Ses traités novateurs, tels que les Conventions sur
la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes
et la violence domestique (STCE no 210, «Convention
d’Istanbul»), sur la protection des enfants contre l’exploitation
et les abus sexuels (STCE no 201, «Convention
de Lanzarote») et sur la lutte contre la traite des êtres humains
(STCE no 197), sont devenus des normes
et des références mondiales, et leur mise en œuvre effective doit
rester une priorité absolue. Les Stratégies pluriannuelles de l’Organisation,
tant pour l’égalité de genre que pour les droits de l’enfant, fournissent
des orientations utiles concernant les priorités sur lesquelles
il convient de se concentrer, divers outils du Conseil de l’Europe
facilitant leur mise en œuvre. A cet égard, l'Assemblée devrait
exprimer son profond regret face à toute tentative d'affaiblir le
cadre international de protection des droits humains mis en place
par les conventions du Conseil de l'Europe. Je me réfère à la déclaration
conjointe
des dirigeants du Conseil de l’Europe
en réaction au retrait annoncé de la Turquie de la Convention d’Istanbul
(21 mars 2021).
22. Le Conseil de l’Europe doit se montrer plus proactif dans
la réponse aux menaces existantes et émergentes pesant sur les sociétés
démocratiques et la sécurité démocratique en encourageant une vision contemporaine
et holistique des droits humains, y compris les droits de nouvelle
génération, tel que le droit à un environnement sûr, sain et durable,
et en évaluant l’impact de la relation essentielle entre les droits
humains et le développement.
23. Je me félicite tout particulièrement de l’importance accordée
par notre Président, Rik Daems, à cette nouvelle génération de droits
humains, et notamment à la défense de l’environnement en tant que
droit humain. Le droit à un environnement sûr, sain et durable ne
doit pas simplement faire l’objet d’une politique, mais devenir
un principe. La contribution globale que l’Assemblée apportera à
ce défi majeur en adoptant des textes contenant des propositions
émises par ses diverses commissions illustrera le caractère unique
de notre Assemblée, qui a une influence sur des questions importantes
pour tous nos citoyens.
24. Dans ce même domaine, nous devrions soutenir la conclusion
de la Déclaration d’Athènes selon laquelle la vie et le bien-être
sur notre planète dépendent de la capacité collective de l’humanité
à garantir à la fois les droits humains et un environnement sain
aux générations futures. Je salue le fait que les 47 États membres
du Conseil de l’Europe aient signé l’Accord de Paris, adopté en
2015 par les Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur
les changements climatiques, et que 46 d’entre eux l’aient ratifié,
s’engageant ainsi à renforcer la réponse mondiale à la menace du
changement climatique. Il est très important de travailler à l’élaboration
de nouveaux instruments juridiques visant à garantir le droit à
un environnement sûr, sain et durable pour les générations actuelles
et futures, et d’inscrire ce droit dans la loi.
25. Je pense également que nous devrions attirer davantage l’attention
sur l’importance capitale des objectifs de développement durable
(ODD) tels qu’énoncés dans le Programme 2030 des Nations Unies,
et faire de l’atteinte de ces objectifs une priorité transversale.
L’importante contribution que le Conseil de l’Europe apporte déjà
à cet effort mondial est à saluer, mais il conviendrait de lui conférer
davantage de visibilité et de la rendre plus explicite. Je fais
référence ici aux résolutions et recommandations pertinentes de
l’Assemblée
. La poursuite de la collaboration entre
les Nations Unies et le Conseil de l’Europe, dans le cadre de leurs mandats
respectifs, me semble être une priorité pour accélérer le rythme
de la mise en œuvre des ODD en vue de la réalisation du Programme 2030.
Je me réjouis donc de l’allocution du Secrétaire général des Nations Unies
à l’Assemblée, à l’invitation de notre Président, à l’occasion de
la partie de session de juin 2021.
26. Par ailleurs, en tant qu’institution normative reconnue dans
le domaine de la protection des droits humains, le Conseil de l’Europe
devrait s’adapter à la vitesse et à l’ampleur des changements sociétaux,
et s’employer à concevoir des réponses communes et à fixer de nouvelles
normes pour protéger ces droits face à des défis nouveaux et évolutifs.
27. Dans ce contexte, je suis convaincu que le Conseil de l’Europe
constitue l’enceinte appropriée pour élaborer des réponses adéquates
aux défis liés à l’émergence des nouvelles technologies, notamment l’intelligence
artificielle (IA). En effet, il est important de prévenir l’impact
négatif que leur utilisation pourrait avoir sur les droits humains,
l’État de droit et la démocratie. Les résolutions et recommandations
pertinentes
que
l’Assemblée a adoptées dans le cadre d’un débat conjoint en octobre 2020
contiennent des éléments fondamentaux pour rationaliser les travaux
du Conseil de l’Europe en cours dans ce domaine. Je voudrais rappeler,
à ce stade, le point de vue de l’Assemblée selon lequel le Conseil
de l’Europe occupe une position stratégique qui lui permet de fournir
les conseils et l’assistance nécessaires, en étroite coopération
avec d’autres institutions et organisations européennes et internationales,
en vue de l’instauration d’un cadre réglementaire global de l’IA.
28. Je tiens à attirer l’attention sur l’une des priorités de
la Présidence allemande du Comité des Ministres, à savoir la nécessité
de rapprocher l’Organisation des citoyens. Dans cette optique, je
soutiens pleinement la décision du Comité des Ministres d’examiner
d’autres possibilités pour renforcer le rôle et la participation effective
des organisations de la société civile et des institutions nationales
des droits humains dans les travaux de notre Organisation. Une attention
particulière devrait être portée au dialogue avec les jeunes et
les enfants.
29. Si le Conseil de l’Europe doit s’intéresser aux nouvelles
menaces et aux nouveaux défis, il ne doit pas pour autant laisser
de côté ses domaines d’activité traditionnels, qui revêtent une
grande importance pour de nombreux États membres, et, de fait, pour
tous les Européens. Nous devons continuer de considérer comme une
priorité la recherche de réponses communes aux problèmes sociétaux
qui menacent l’État de droit, notamment la corruption, le blanchiment
de capitaux, le terrorisme et l’extrémisme violent, en veillant
à la mise en œuvre effective des mécanismes et instruments juridiques
pertinents – ou en en créant de nouveaux, si nécessaire.
30. Même si le suivi des obligations et des engagements des États
membres est souvent perçu comme une sanction ou une punition, je
suis fermement convaincu qu’il constitue un moyen extrêmement important
de garantir, par le biais d’une action coopérative, que tous les
États membres respectent les obligations auxquelles ils ont souscrit
de leur plein gré en devenant membres de notre Organisation. Cependant,
il est vrai que la conduite simultanée de nombreux processus de
suivi par divers organes et institutions peut entraîner une certaine
fatigue ou lassitude à l’égard du suivi. Je pense que l’Assemblée
devrait renouveler son appel, déjà soutenu par le Comité des Ministres
lors de la session qu’il a tenue à Helsinki en mai 2019, à une coordination
plus intense et plus structurée entre les activités de suivi de
l’Assemblée, du Comité des Ministres, du ou de la Secrétaire Général•e
et du ou de la Commissaire aux droits de l’homme, ainsi que des
différents mécanismes et organes spécialisés de suivi et de conseil
de l’Organisation, sans préjudice de leur indépendance. Plus généralement,
il serait utile d’envisager des moyens de coordonner plus efficacement
les activités de suivi avec les autres organisations internationales,
notamment les Nations Unies, pour renforcer les synergies, éviter
les doublons inutiles et alléger l’obligation de rapport qui pèse
sur les États membres. Conformément à mon rapport sur le rôle et
la mission de l’Assemblée parlementaire, j’indique dans la présente résolution
que l’Assemblée est disposée à engager un dialogue institutionnel
constructif et qu’elle procédera à une évaluation de ses propres
activités de suivi.
31. Pour consolider son rôle en tant que pilier de l’ordre démocratique
coopératif en Europe, notre Organisation devrait continuer de développer
une coopération efficace et durable avec d’autres organisations multilatérales,
en Europe et au-delà. Nous devrions nous employer plus activement
à promouvoir le rayonnement mondial de nos instruments juridiques,
dont bon nombre présentaient un caractère novateur, notamment auprès
des plateformes internationales pertinentes telles que les Nations
Unies. Je suis également d’avis que le Conseil de l’Europe devrait
approfondir la réflexion sur son action extérieure et sortir de
l’approche de la «proximité géographique» en cherchant à établir
des partenariats avec les États et organisations qui partagent des
valeurs et principes identiques ou similaires.
32. Comme cela a déjà été souligné par le passé, le caractère
unique de notre Organisation tient essentiellement au fait qu’elle
dispose d’un organe parlementaire statutaire composé de membres
des parlements nationaux, reflétant tout le spectre des opinions
politiques, y compris l’opposition. C’est là un atout, dont il convient
de tirer parti pour l’ensemble de l’Organisation lors de l’identification
des priorités pour les années à venir.
33. Je suis d’avis que l’Assemblée et les parlements nationaux
devraient jouer un rôle plus important et il conviendrait de renforcer
leur contribution en tant que garants des valeurs fondamentales
de l’Organisation, notamment en promouvant les conventions fondamentales
du Conseil de l’Europe au sein des pays et des parlements nationaux,
en vue de renforcer l’impact de ces instruments sur les processus
législatifs et politiques nationaux. Dans cette optique, il faudrait
entre autres permettre aux parlementaires de participer à la mise
en œuvre effective des conventions du Conseil de l’Europe en exerçant
un contrôle sur les suites données aux conclusions émises dans le
cadre des procédures de rapport. L’Assemblée pourrait par exemple
organiser régulièrement des débats sur les rapports et conclusions
des organes conventionnels de contrôle, ainsi que sur les résolutions
et recommandations adoptées par le Comité des Ministres.
34. Tout en conservant son indépendance politique et institutionnelle
et en menant ses travaux en tant qu’organe parlementaire de l’Organisation,
l’Assemblée devrait chercher à mettre en place des synergies efficaces
avec les activités du Comité des Ministres et les branches intergouvernementales
de l’Organisation. Elle peut apporter une contribution générale
et thématique significative aux travaux menés dans tous les domaines
prioritaires de l’Organisation. La poursuite d’un «trialogue» régulier,
constructif et efficace entre le Comité des Ministres, la Secrétaire
Générale et l’Assemblée parlementaire doit être considérée comme
un moyen de garantir la pertinence stratégique du Conseil de l’Europe.
35. Il convient de rappeler que la qualité de membre de la plus
ancienne et plus grande organisation d’Europe fondée sur un traité
ne doit pas être considérée comme accordée gratuitement et sans
contrepartie. L’appartenance et la participation aux structures
paneuropéennes uniques du Conseil de l’Europe confère, et devrait
continuer de conférer, un large éventail d’avantages mesurables
et durables à tous les États membres, à de nombreux égards et dans
de nombreux domaines. En échange, ces derniers sont tenus de respecter pleinement
leurs obligations statutaires, dans l’intérêt tant de leur propre
population que de l’ensemble de la communauté des Européens réunis
sous l’égide de notre Organisation.
36. La nouvelle procédure conjointe adoptée en janvier 2021 par
l’Assemblée, qui permet aux deux organes statutaires du Conseil
de l’Europe, l’Assemblée et le Comité des Ministres, et à son/sa
Secrétaire Général•e d’agir de concert en cas de violation flagrante
par un État membre des obligations qu’il a contractées en vertu du
Statut, peut jouer un rôle significatif tant dans la prévention
de telles violations que dans la recherche de moyens d’y mettre
un terme ou d’y remédier.
37. En outre, il est nécessaire d’attirer davantage l’attention
sur les implications de l’adhésion à l’Organisation, tant en termes
d’avantages pour les États membres et leurs citoyens que d’obligations.
Il faut expliquer très clairement ce que le Conseil fait et peut
faire en faveur de ses États membres et de leurs citoyens, tandis
que les États membres devraient se demander quelle contribution
ils pourraient apporter au Conseil de l’Europe en partageant des
valeurs communes. Il est évident que la protection et la promotion
de l’État de droit, des droits humains et de la démocratie bénéficient
à l’ensemble des États membres et de leurs citoyens.
38. L’Assemblée devrait renouveler son appel aux gouvernements
des États membres à envisager toutes les options possibles pour
assurer la viabilité financière de l’Organisation de sorte à lui
permettre de conserver toute son efficacité et sa pertinence politique.
Si la décision des États membres d’abandonner la politique de «croissance
nominale zéro» et de revenir à une «croissance réelle zéro» pour
l’exercice biennal en cours est à saluer, il convient de rappeler
la position de longue date de l’Assemblée selon laquelle les États
membres devraient investir davantage dans la sécurité démocratique
telle qu’incarnée par le Conseil de l’Europe, et, par conséquent,
en assurer un meilleur financement. Sans stabilité financière, l’Organisation,
et notamment son cadre conventionnel unique, aura moins d’impact.
L’existence même du Conseil de l’Europe, et les bénéfices qu’il
apporte aux États membres, sont bien supérieurs à son coût financier.
Nous devrions considérer comme une priorité stratégique le fait
d’amener les États membres à prendre conscience de cela et de les
convaincre qu’une augmentation du budget du Conseil de l’Europe,
même modeste, peut ouvrir d’énormes possibilités pour améliorer
l’efficacité et la productivité de l’Organisation.
39. Je suis d’avis que nous devrions soutenir la proposition d’adopter
une perspective stratégique quadriennale tournée vers l’avenir.
En effet, il est important de construire une perspective à plus
long terme pour les priorités fondamentales, tout en prévoyant suffisamment
de souplesse pour faire face aux défis imprévus susceptibles d’apparaître
pendant cette période, y compris concernant les recommandations
de l’Assemblée. Il est également important de se concentrer sur
des domaines dans lesquels le Conseil de l’Europe a une valeur ajoutée
et de ne pas disperser nos ressources, sous peine de perdre de notre
pertinence par manque de capacité à assurer le suivi et à soutenir
la mise en œuvre des conventions fondamentales du Conseil de l’Europe.
3. Conclusions
40. Sur la base de ce qui précède,
j’ai préparé un projet de résolution suggérant la position de l’Assemblée sur
les questions prioritaires présentant une importance stratégique
pour le Conseil de l’Europe pour les années à venir.
41. Un projet de recommandation visant à porter le message de
l’Assemblée à l’attention du Comité des Ministres à la veille de
la session ministérielle qu’il tiendra en mai 2021 a également été
élaboré.
42. L’Assemblée devrait poursuivre sa réflexion stratégique sur
l’avenir du Conseil de l’Europe et les moyens de renforcer sa pertinence
politique et sa position prééminente en tant que forum politique
européen de premier plan.