AS (2012) CR 08
Addendum 1

SESSION ORDINAIRE DE 2012

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la huitième séance

Jeudi 26 janvier à 15 h 30

ADDENDUM 1

Faire progresser les droits des femmes dans le monde

Promouvoir la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique

Les interventions suivantes ont été communiquées au Service de la séance pour publication au compte rendu par des orateurs qui, inscrits et présents en séance, n’ont pu être appelés à les prononcer faute de temps.

M. LORRAIN (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, en dépit des efforts de sensibilisation menés ces dernières années et du renforcement de l’arsenal juridique dans plusieurs pays, les chiffres des violences à l’égard des femmes restent, aujourd’hui encore, édifiants. Meurtres, viols, violences domestiques à la fois physiques et psychologiques, prostitution, harcèlement au travail, infanticide des filles, mutilations génitales : tous ces phénomènes demeurent omniprésents. En France, pour parler d’un cas que je connais, on estime qu’une femme meurt tous les trois jours du fait de violences conjugales.

Cette situation n’a que trop duré. Bien sûr, il est vrai que ces violences trouvent souvent leur origine dans des préjugés socioculturels, plaçant la femme dans une position prétendument inférieure à l’homme. D’aucuns pourraient alors se dire qu’il convient seulement d’attendre que les mentalités évoluent. Je ne souscris pas à cette idée. En tant que parlementaires, nous savons fort bien que la loi, en fixant des interdits, contribue justement à faire évoluer les sociétés sur certaines questions. C’est pourquoi l’adoption de conventions internationales, de textes législatifs en matière de lutte contre les violences faites aux femmes m’apparaît indispensable.

Cela fait de nombreuses années que je milite en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes, à la fois au niveau local avec le conseil général du Haut-Rhin et les associations, et au niveau national, en ayant été membre de la délégation aux droits des femmes dès sa création au parlement en 1999. J’ai pu observer, au cours de mon expérience, que l’adoption d’un certain nombre de textes de loi en France avait contribué à briser peu à peu la loi du silence. Le nombre de plaintes déposées dans mon pays au cours des dernières années n’a cessé d’augmenter. Cela ne signifie pas forcément – heureusement ! – que les violences faites aux femmes connaissent une augmentation, mais plutôt que nous brisons progressivement un tabou. Les femmes ne doivent plus avoir honte des violences qu’elles subissent. Elles doivent se sentir en confiance, protégées, entourées, pour pouvoir se livrer.

Cela suppose l’adoption, dans tous les États, d’un arsenal juridique fondé sur trois volets indissociables : la protection des victimes, la répression des auteurs et la prévention des violences. Je me félicite à cet égard que la Convention du Conseil de l’Europe n’ait oublié aucun de ces aspects.

La violence et, bien souvent, la simple menace de violence, sont l’un des plus abominables obstacles à la pleine égalité des femmes.

M. SALLES (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, je tiens à saluer l’excellent rapport de Mme Lydie Err sur la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes.

Il est parfaitement inacceptable qu’au XXIsiècle les femmes n’aient pas des droits équivalents à ceux des hommes. Les traditions familiales, les facteurs historiques, les conservatismes religieux en sont les premiers responsables, mais pas uniquement. La volonté politique, intacte, permet l’émancipation des femmes de leur condition, je dirais même qu’elle est la condition première de celle-ci.

Je prendrai l’exemple de la Tunisie. En Tunisie, le statut de la femme est le statut le plus avancé dans les pays du Maghreb. Pas uniquement parce que les femmes ont un haut niveau de qualification professionnelle, accèdent aux études supérieures, s’émancipent des tutelles patriarcales et familiales. Ce statut avancé est la conséquence des lois votées par le Président Bourguiba qui ont défini un cadre juridique émancipateur que les femmes ont pu dès lors faire leur.

Sans ce statut émancipateur la femme tunisienne serait encore une mineure juridique, comme l’est la femme dans de nombreux pays méditerranéens. Les femmes tunisiennes ont, par ailleurs, été les premières à participer à la révolution tunisienne.

L’émancipation des femmes ne se fera pas sans le recours à des lois définissant un statut juridique équivalent à celui de l’homme. Nous devons dès lors nous montrer vigilants à ce que le vent de la démocratie qui a soufflé sur les pays arabes soit également porteur d’un « printemps des femmes ».

Il faudra observer avec attention le nouveau statut des femmes car ce n’est pas uniquement de leur avenir qu’il s’agit mais également de celui de la démocratie.

Le statut juridique des femmes devrait d’ailleurs être un critère à part entière de l’avancée démocratique d’un pays. Critère à la fois pour déterminer que le principe d’égalité est bien respecté mais aussi pour étudier comment il est mis en œuvre. Il n’y a pas que les jeunes démocraties qui devraient être étudiées à l’aune de ce critère.

M. SCHNEIDER (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, je félicite chaleureusement la rapporteure, Mme Lydie Err, pour l’excellent rapport qu’elle a écrit sur la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes.

Il ne vous aura pas échappé que c’est un homme qui s’exprime sur ces questions et qui reste néanmoins un fervent partisan de la promotion d’une égalité réelle entre les hommes et les femmes.

Elisabeth Badinter, dans son ouvrage Qu’est-ce qu’une femme ?, montre que le débat philosophique qui avait animé Diderot et Mme d’Epinay sur la nature de la femme à partir de la dissertation d’un obscur théologien est toujours d’actualité. Si le philosophe et la romancière s’accordent pour ne pas différencier la nature de la femme de celle de l’homme dans ce qui pourrait apparaître comme les prémisses d’un féminisme d’avant la lettre, la nature reste le prétexte explicatif, pour cet obscur théologien, pour justifier une réalité sociale se traduisant par une inégalité en droit entre les hommes et les femmes.

Ce qui pourrait apparaître donc comme une réalité d’un autre âge reste malheureusement largement toujours une explication répandue, celle d’une supposée nature inférieure des femmes. Tant que cette explication perdurera, les politiques pour promouvoir l’égalité entre les sexes seront vaines ! Car c’est à la racine qu’il faut agir ! Il faut extraire l’erreur de jugement qui consiste à penser que les différences physiques, aisément constatables, sauraient fonder une inégalité sociale.

Seules l’éducation et les politiques éducatives pourront combattre ces préjugés stupides ! Seules des campagnes d’information permettront de faire progresser les droits des femmes ! Seule la promotion de femmes à des postes visibles pour en faire des modèles à imiter permettra que le droit des femmes progresse dans le monde.