FR13CR10

AS (2013) CR 10

SESSION ORDINAIRE DE 2013

________________

(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la dixième séance

Lundi 22 avril 2013 à 11 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 11 h 35, sous la présidence de M.  Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Ouverture de la deuxième partie de la Session ordinaire de 2013

LE PRÉSIDENT – Je déclare ouverte la deuxième partie de la Session ordinaire de 2013.

Je salue la présence de M. Laurent Nouvion, président du Conseil national de la Principauté de Monaco, à qui je souhaite la bienvenue, de même qu’à M. le Secrétaire Général et à l’ensemble de Mmes et MM. les parlementaires. Bienvenue à Strasbourg, donc, pour cette nouvelle partie de session, importante et très riche, dont les débats auront pour thème nos valeurs ainsi que leur respect sur le continent européen, comme à l’accoutumée.

2. Allocution du Président

LE PRÉSIDENT – Depuis la dernière partie de session, je me suis personnellement beaucoup investi dans le travail sur le terrain en visitant les Etats membres où notre action est particulièrement pertinente et demandée. J’en ai ramené un certain nombre de conclusions positives que je souhaiterais partager avec vous.

Mais je tiens tout d’abord à remercier mes collaborateurs, qui ont su préparer ces déplacements avec beaucoup de soin, ainsi que celles et ceux qui, dans les pays que j’ai visités, m’ont accueilli et ont fait en sorte que tous les contacts que j’ai noués soient particulièrement fructueux, sincères et cordiaux.

Ainsi, je me suis rendu en Serbie, où j’ai salué les progrès substantiels réalisés dans la mise en œuvre des engagements et dans l’avancement sur le chemin de l’intégration européenne. J’ai pu aussi évoquer franchement et sans aucun tabou, y compris devant le Parlement serbe, la situation autour du Kosovo qui reste un problème sensible. La diplomatie parlementaire offre un potentiel énorme pour stimuler le dialogue entre les parties et, dans cette optique, j’espère que cette Assemblée ratifiera aujourd’hui les modalités de participation des élus à l’Assemblée du Kosovo à nos travaux. Je sais qu’à l’occasion de sa présentation du rapport d’activité de notre Assemblée et de la Commission permanente, M. Marcenaro abordera également la question du Kosovo.

Je salue à ce propos l’accord qui est intervenu voilà quelques jours à Bruxelles entre les deux parties et je ne peux, assurément, que saluer l’action de notre collègue Björn von Sydow, auteur du rapport qui a été présenté ici-même voilà quelques mois et qui a été voté à la quasi-unanimité par notre Assemblée. Je ne doute pas un seul instant que ce rapport a contribué à l’accord qui a été signé.

De même, je me suis réjoui de pouvoir aborder en toute franchise en Ukraine les questions les plus sensibles, en particulier avec le Président de la République. Je me félicite de ce que cet échange ait été suivi d’une première évolution positive avec la libération de M. Loutsenko. J’espère que d’autres développements positifs suivront prochainement et je poursuivrai le dialogue qui s’est instauré avec les autorités ukrainiennes afin d’avancer dans ce sens. C’est aussi ce que j’ai fait la semaine dernière à Saint-Pétersbourg lors de la réunion de l’Assemblée interparlementaire de la Communauté des Etats Indépendants, avec le président du Parlement ukrainien. Nous avons poursuivi les discussions entreprises quelque temps avant à Kiev.

Lors de mon voyage en Roumanie, j’ai salué l’acceptation par les forces politiques de la cohabitation, et donc du jeu démocratique normal. Par conséquent, je suis très heureux que la situation politique dans ce pays se soit stabilisée et fier de savoir que notre Assemblée et la Commission de Venise ont grandement contribué à cet égard à la normalisation de la situation dans ce pays. Dans ce contexte, je me réjouis de la visite durant cette session du Premier Ministre de la Roumanie, M. Ponta, qui nous permettra de continuer notre dialogue. Je ne doute pas que vous serez nombreux à lui poser des questions. Nous serons tous attentifs à ses réponses.

Je ne peux pas ne pas partager avec vous mes premières impressions sur ma visite de travail en Russie, à Saint-Pétersbourg et à Moscou. L’objectif de ce déplacement était double.

A Saint-Pétersbourg, j’ai voulu renouer les liens avec l’Assemblée interparlementaire de la Communauté des Etats Indépendants, qui coopère avec l’Assemblé depuis 1997. Je suis intervenu devant le Conseil de cette assemblée. J’ai rencontré Mme Valentina Matvienko, présidente du Conseil de la Fédération du Parlement russe et également présidente de l’AIP de la CEI, afin de discuter des modalités à mettre en œuvre pour dynamiser notre coopération. J’ai également saisi cette occasion pour rencontrer les présidents des Parlements du Kazakhstan et de la République kirghize. J’ai eu également des contacts informels avec la délégation du Parlement du Bélarus qui a participé à notre conférence conjointe avec l’AIP de la CEI. Je pense qu’il est maintenant nécessaire d’établir un dialogue, tout en précisant que notre avancement sur ce chemin n’est possible que si les autorités du Bélarus s’engagent à respecter nos valeurs et nos standards.

Tout à l’heure, M. Pietro Marcenaro reviendra sur le sujet du Bélarus. Je pense être en phase avec le Secrétaire Général sur ce sujet. Il nous semble aujourd’hui important de prendre l’initiative pour renouer le dialogue en respectant nos valeurs. La présence il y a quelques jours à Moscou du ministre biélorusse de la Culture nous a permis de poursuivre cette avancée.

A Moscou, en marge de ma participation à la Conférence européenne des ministres de la Culture, j’ai rencontré M. Narychkine, Président de la Douma d’Etat, afin d’évoquer avec lui – franchement et sans équivoques – différents aspects de notre coopération. Nous avons confirmé le rôle clé que joue la Russie au sein du Conseil de l’Europe, ainsi que les progrès que ce pays a réalisés depuis son adhésion à l’Organisation. En même temps, j’ai tenu à rappeler que l’appartenance au Conseil de l’Europe impliquait des responsabilités, notamment le devoir de respecter les obligations et les engagements pris, ainsi que celui de mettre en œuvre les résolutions adoptées par notre Assemblée. Il est extrêmement important de souligner que M. Narychkine m’a confirmé sa participation à notre partie de session d’octobre et je m’attends à un échange de vues très intéressant avec lui. Je remercie la délégation russe pour toutes les facilités qui m’ont été accordées pour avoir ce dialogue avec le Président de la Douma, M. Narychkine. Nous ne pouvions en rester là, après ce qui s’est passé au mois d’octobre dernier. La certitude de la venue de M. Narychkine doit être saluée.

Je dois aussi partager avec vous ma préoccupation concernant les récentes évolutions en Hongrie. Les derniers amendements constitutionnels, adoptés par le Parlement hongrois en mars, soulèvent de sérieuses questions relatives à leur compatibilité avec les principes de l’Etat de droit et les standards du Conseil de l’Europe. Notre commission de suivi examinera pendant cette session son avis sur l’ouverture possible de la procédure vis-à-vis de la Hongrie. Ce débat devrait nous permettre de définir, ensemble, la marche à suivre la plus adaptée à cette situation.

Mesdames et Messieurs, chers amis, chers collègues, durant cette partie de session, nous allons tenir une série de débats sur des aspects fondamentaux de la mise en œuvre de nos valeurs et de nos standards : il s’agit de la question de la violence envers les communautés religieuses, des droits des enfants et de leur protection contre la violence sexuelle et la discrimination, de la situation des jeunes et de leur accès aux droits fondamentaux, de la situation des migrants et des demandeurs d’asile et de la protection de leurs droits. Pour renforcer l’impact de notre action sur tous ces sujets, nous devons travailler en étroite collaboration avec nos partenaires de l’Union européenne. J’y vois un immense avantage politique : nous pourrons ainsi défendre nos valeurs sur tout le continent européen, avec une méthodologie unique et des objectifs identiques.

Comme vous le savez, je m’investis beaucoup dans le rapprochement avec l’Union européenne - l’une des deux grandes priorités de mon mandat. Dans ce contexte, je suis de près le dossier concernant l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme et, lors de mon récent déplacement à Luxembourg, j’ai pu en discuter avec le président de la Cour de Justice de l’Union européenne. Je salue la finalisation de l’instrument d’adhésion et j’espère à présent que le processus d’adhésion pourra aboutir au niveau de nos deux institutions aussi rapidement que possible. Cela marquera une grande avancée vers l’unification de l’espace de protection des droits de l’Homme sur l’ensemble de notre continent.

Dans ce contexte, je me réjouis du fait que les institutions de l’Union européenne fassent désormais systématiquement référence aux standards et aux outils du Conseil de l’Europe, à chaque fois que des manquements à nos standards sont constatés. Nous devons dès lors nous concentrer sur des actions conjointes, y compris lorsqu’il s’agit des pays membres de l’Union européenne. Inutile de « réinventer la roue », si je puis m’exprimer ainsi, et de créer des mécanismes et des organes parallèles. Le Conseil de l’Europe peut d’ores et déjà offrir une grande palette d’outils permettant de mesurer le respect de nos valeurs et d’accompagner les Etats membres.

Comme d’habitude, nous allons accueillir pendant cette session de hauts dirigeants de différents pays européens. Je n’en ferai pas une liste dans mon discours ; leurs noms figurent sur le projet d’ordre du jour de la partie de session. C’est un honneur et une grande opportunité de recevoir dans notre hémicycle autant de hautes personnalités politiques. Je compte donc sur vous pour leur réserver un accueil chaleureux et amical, et leur poser de nombreuses questions qui susciteront l’intérêt pendant nos échanges de vues.

Comme vous le savez, j’ai lancé la réflexion sur la façon de dynamiser notre Prix des droits de l’homme, afin de redonner à cette haute distinction tout son prestige et sa valeur symbolique. Je me réjouis très vivement qu’avec le soutien très fort et sans réserve de la République tchèque, ainsi que de la bibliothèque Vaclav Havel et de la fondation « Charte 77 », nous ayons pu parvenir aussi rapidement à un accord pour appeler ce prix « Prix des droits de l’homme Václav Havel ». Notre prix est ainsi symboliquement lié au nom de l’un des plus grands défenseurs des droits de l’homme qui aient existé en Europe. J’espère par conséquent que les candidats et surtout les lauréats de cette année - et des années à venir - seront à la hauteur de cet homme politique illustre et grand Européen ! Je remercie les représentants et les autorités de la République tchèque et les autorités pour l’accueil qu’ils ont réservé à cette initiative qui me tenait particulièrement à cœur.

Je vous remercie de votre attention. Je souhaite à toutes et à tous une excellente partie de session.

Permettez-moi de réparer un oubli en saluant M. le ministre des Affaires étrangères d’Andorre, Président du Comité des Ministres, qui a été particulièrement attentif aux travaux de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

3. Vérification des pouvoirs

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la vérification des pouvoirs de membres de l’Assemblée qui ont été remis au Président dans les formes prévues à l’article 6 du Règlement. Les noms des représentants et des suppléants en question figurent dans le Doc. 13176.

S’il n’y a pas de contestation, ces pouvoirs peuvent être ratifiés.

La parole est à M. Omtzigt, pour présenter une objection.

M. OMTZIGT (Pays-Bas)* – L’ancien vice-président de la délégation ukrainienne, M. Vlasenko, n’a pu se rendre à Strasbourg lors de la dernière partie de session en raison d’une décision de justice l’ayant privé de son siège de député. Je demande à la commission du Règlement d’examiner les pouvoirs de la délégation ukrainienne et rappelle que l’Ukraine est le seul pays à avoir été condamné par la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’article 18.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur Omtzigt.

Je précise que selon l’article 7.1 de notre Règlement, les pouvoirs doivent être contestés par au moins dix membres de l’Assemblée présents dans la salle et appartenant à cinq délégations nationales au moins.

En cas de contestations multiples, nous examinerons successivement les différentes contestations.

Ceux qui soutiennent la contestation des pouvoirs de M. Shevchenko peuvent-ils se lever ? Je vous remercie de bien vouloir rester debout le temps que nous puissions vous compter sans erreur.

Les pouvoirs de M. Shevchenko sont contestés pour des raisons formelles conformément aux dispositions du Règlement.

Je rappelle que les pouvoirs d’un membre ou d’une délégation qui font l’objet d’une contestation pour des raisons formelles sont renvoyés sans débat à la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, qui devra faire rapport à l’Assemblée.

J’attire votre attention sur le fait qu’en application de l’article 7.2, si la commission conclut à la ratification des pouvoirs, elle peut transmettre un avis au Président qui en donnera lecture en séance à l’Assemblée, laquelle ne pourra en débattre.

Dans le cas contraire, le rapport de la commission sera inscrit à l’ordre du jour. La Présidence vous fera des propositions relatives à son examen au moment de l’adoption du projet d’ordre du jour.

Je rappelle à l’Assemblée qu’en vertu des dispositions de l’article 7.4 du Règlement, tout membre dont les pouvoirs sont contestés siège provisoirement avec les mêmes droits que les autres représentants et suppléants jusqu’à ce que l’Assemblée ait statué. Toutefois, un tel membre ne participe à aucun vote lié à la vérification des pouvoirs qui le concernent.

4. Election de Vice-Présidents de l’Assemblée au titre de Malte, de Monaco et de la Roumanie

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle l’élection de trois vice-Présidents de l’Assemblée, au titre de Malte, de Monaco et de la Roumanie.

J’ai reçu trois candidatures dans les formes réglementaires : M. Debono Grech, pour Malte ; M. Allavena, pour Monaco ; M. Stroe, pour la Roumanie.

S’il n’y a pas de demande de vote pour un ou plusieurs candidats, les candidats proposés par les délégations nationales sont déclarés élus sans qu’il soit procédé à un scrutin.

Il n’y a aucune demande de vote.

En application de l’article 15.4 du Règlement, je déclare donc élus Vice-Présidents de l’Assemblée MM. Debono Grech, Allavena et Stroe.

5. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans les documents Commissions (2013) 04 et Addendum 1.

Il n’y a pas d’opposition à ces modifications. Elles sont donc adoptées.

6. Demande de débat d’actualité

LE PRÉSIDENT – Avant d’examiner l’ordre du jour, l’Assemblée doit se prononcer sur une demande de débat d’actualité sur « Les réfugiés syriens en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Irak, comment organiser et soutenir l’assistance internationale ? », présentée par Mme Brasseur, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe, et par M. Kox, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

Au cours de sa réunion de ce matin, le Bureau a émis un avis favorable à cette proposition. Il vous propose en outre d’inviter M. Sa’ad Hayel Srour, président de la Chambre des représentants jordanienne, à participer à ce débat.

Il n’y a pas d’objection.

Il en est ainsi décidé. Le débat d’actualité sera introduit par M. Marcenaro.

7. Adoption de l’ordre du jour

LE PRÉSIDENT – Nous en venons à l’adoption de l’ordre du jour de la présente partie de session.

Le projet d’ordre du jour a été adopté par le Bureau lors de sa réunion de ce matin. Il a été mis en distribution.

La parole est à M. Hancock pour une remarque sur ce projet.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Permettez-moi, Monsieur le Président, de souligner que le rapport de M. Volontè sur « La violence à l’encontre des communautés religieuses » ne correspond en rien au mandat confié à l’origine à la commission des questions politiques et de la démocratie. Il traite essentiellement des croyances religieuses et des préjugés qu’elles rencontrent, et les place au-dessus même des droits de l’homme et de l’Etat de droit. C’est tout à fait contraire aux principes que défend notre Organisation ! Ce rapport mériterait donc d’être retiré de l’ordre du jour.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Hancock, votre remarque fait justement partie du débat. Il a été décidé que ce rapport serait discuté mercredi.

Il n’y pas d’autres remarques.

L’ordre du jour de la présente partie de session est donc adopté.

J’attire votre attention sur le déplacement au mercredi matin du débat sur la violence à l’encontre des communautés religieuses, initialement prévu le mardi matin, et sur le déplacement au mardi matin du débat sur le dialogue post-suivi avec la Turquie, initialement prévu le mercredi matin.

8. Limitation des temps de parole

LE PRÉSIDENT – Au vu du grand nombre d’orateurs inscrits dans plusieurs débats de cette partie de session, et afin de permettre à un maximum d’entre eux d’intervenir, le Bureau propose de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes pour tous les débats de la présente partie de session, à l’exception de ceux tenus le vendredi matin.

Il n’y a pas d’opposition ?

Il en est ainsi décidé.

9. Adoption du procès-verbal de la réunion de la Commission permanente du 8 mars 2013

LE PRÉSIDENT – Le procès-verbal de la Commission permanente, qui s’est réunie à Paris le 8 mars dernier, a été distribué (Doc. AS/Per (2013) PV01).

L’Assemblée prend acte de ce procès-verbal.

10 - Discours de M. Gauck, Président de l’Allemagne

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Gauck, Président de l’Allemagne.

Monsieur le Président, permettez-moi de vous souhaiter à nouveau la bienvenue à Strasbourg et au Conseil de l’Europe, cette Organisation paneuropéenne qui symbolise la réconciliation et l’unification de l’Europe.

Pour moi, le projet européen est avant tout la mise en œuvre de nos valeurs fondamentales – les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit – sur tout le continent européen. C’est donc un immense honneur pour nous de vous accueillir aujourd’hui, en tant que Président de la République fédérale d’Allemagne, mais aussi en tant que grand défenseur des droits de l’homme.

Votre venue à Strasbourg, ville symbole de la réconciliation franco-allemande, a une double signification pour moi. Tout d’abord, elle me rappelle le cinquantième anniversaire du Traité de l’Élysée que nous célébrons cette année, traité qui entérine l’amitié éternelle entre nos deux peuples et nos deux pays, un chapitre essentiel de l’histoire européenne, sans lequel le projet de Robert Schuman et de Konrad Adenauer n’aurait jamais pu aboutir.

En même temps, votre engagement en faveur des droits de l’homme et votre combat contre le totalitarisme me rappellent un autre chapitre récent de notre histoire : celui de la chute du mur de Berlin, de la réunification allemande et des transformations démocratiques dans l’Europe centrale et orientale, un processus dans lequel le Conseil de l’Europe a joué un rôle essentiel, grâce à nos standards et à nos outils.

Par conséquent, Monsieur le Président, c’est avec un immense intérêt que nous écouterons aujourd’hui votre intervention. Je suis convaincu que votre vision de l’avenir du système paneuropéen de protection des droits fondamentaux nous aidera beaucoup dans nos travaux, afin d’assurer notamment une meilleure complémentarité entre les deux grands acteurs du processus d’intégration européenne que sont le Conseil de l’Europe et l’Union européenne.

Monsieur le Président, avant de vous donner la parole, permettez-moi de vous remercier à nouveau pour l’accueil particulièrement chaleureux que vous m’avez réservé à Berlin, lors de ma dernière visite.

Monsieur le Président, c’est avec beaucoup de plaisir que je vous cède maintenant la parole.

M. GAUCK, Président de l’Allemagne* – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, monsieur le Secrétaire Général, mesdames et messieurs les ambassadeurs, mesdames et messieurs les invités, je vous remercie de cet accueil chaleureux, de votre amabilité et de cette invitation qui m’est adressée.

Je vous remercie de m’avoir donné toutes les libertés dont un orateur peut rêver : aucun protocole strict, aucun thème imposé ni aucune marge de manœuvre prédéfinie ne les entravent aujourd’hui. La liberté de parole est un grand privilège, et pour quelqu’un de mon âge et de mon origine, c’est un cadeau historique.

J’en ferai usage, tout d’abord, pour vous remercier, membres et partenaires du Conseil de l’Europe, de votre travail, et vous apporter mon soutien pour toutes les discussions politiques parfois difficiles. Je me demande comment faire sortir cette Organisation précieuse, et pourtant méconnue, de l’ombre de l’Union européenne, pour la mettre davantage en lumière.

Après ces quelques mots de remerciement, j’aimerais vous dire que je suis venu en tant que défenseur du Conseil de l’Europe, parce que je pense que le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire méritent plus d’attention et plus de soutien pour pouvoir exercer leur mandat pleinement. Je suis venu en tant qu’allié.

Ma visite à Strasbourg est placée sous le thème des droits de l’homme. Nous avons besoin du Conseil de l’Europe aujourd’hui peut-être même plus qu’avant parce que c’est un forum important de défense des droits de l’homme. Je me tiens devant vous aujourd’hui parce que la traite des êtres humains et la prostitution forcée doivent prendre fin, parce que ceux qui sont dans l’opposition ne doivent plus craindre pour leur vie, parce qu’il ne doit plus y avoir de discrimination, quels que soient les motifs.

Permettez-moi de vous remercier pour tous vos accomplissements. Je parle en tant que chef d’Etat allemand, devant cette assemblée de l’organisation politique européenne la plus ancienne, mais aussi créée en réaction à deux terribles guerres qui ont coûté la vie à des millions d’êtres humains et qui ont divisé ce continent pendant près de cinquante ans.

L’article 1er de ses statuts précise que le Conseil de l’Europe a pour mission de réaliser le rapprochement de ses membres. Vous le savez probablement d’expérience personnelle, en 1949, cela voulait dire beaucoup : l’envie de paix, le courage de proposer la coopération politique et l’idée, difficile à faire comprendre à l’époque, que les peuples d’Europe devaient se rapprocher sur les plans économique, social et culturel. Le Conseil de l’Europe a porté la vision d’une Europe politique, et cela bien avant que l’Union européenne prenne le chemin d’une union plus politique en passant par la coopération économique et une monnaie unique et commune.

Le Conseil de l’Europe, après la fin de la guerre mondiale et la guerre froide, a développé cette force qu’il a transmise à beaucoup d’entre nous. C’est dans cette salle, devant cette Assemblée que, l’été 1989, Mikhaïl Gorbatchev, a exposé son idée de « Maison commune européenne », qui allait devenir un espoir pour l’ensemble du continent - et cela trois mois avant que la Hongrie n’ouvre ses frontières et quatre mois à peine avant la chute du mur de Berlin. L’histoire a donné raison à Gorbatchev sur ce point, les ennemis idéologiques sont devenus des partenaires et, en l’espace d’une dizaine d’années, à deux exceptions près, tous les Etats anciennement communistes sont devenus des Etats membres du Conseil de l’Europe.

Les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit sont donc devenus aussi la référence dans les Etats d’Europe centrale et orientale. Aujourd’hui, plus de 800 millions de citoyens issus de 47 pays sont représentés au Conseil de l’Europe. Il ne fait aucun doute que le Conseil de l’Europe est la plus grande maison jamais construite sur notre continent. C’est bien ce caractère paneuropéen qui distingue cette Organisation de toutes les autres institutions européennes : le Conseil de l’Europe élargit notre horizon pour englober l’ensemble du continent. Il est le gardien de nos valeurs et de nos principes, et ce bien au-delà des frontières de l’Union européenne. C’est donc pour moi un honneur de m’exprimer devant vous aujourd’hui.

Quarante-sept Etats membres, c’est certes un nombre important, mais cela constitue aussi un groupe très divers d’Etats membres. Le Conseil de l’Europe est une communauté qui s’étend de l’Atlantique au Pacifique, du cap Nord au Bosphore mais, selon l’endroit, ce Conseil de l’Europe est aussi perçu différemment, utilisé différemment, parfois aussi respecté différemment. Ainsi, l’opinion publique en Europe de l’Ouest débat de thèmes européens en lien surtout avec les institutions de l’Union européenne, et plus rarement avec le Conseil de l’Europe. À l’est du continent et autour de la Méditerranée, en revanche, le Conseil de l’Europe revêt une plus grande importance. Je me souviens bien qu’à l’époque communiste, mis à part les Nations Unies, le Conseil de l’Europe était la référence pour tous les défenseurs des droits de l’homme et pour ceux qui appartenaient à l’opposition. Plus tard, c’est aussi le Conseil de l’Europe qui a proposé à ces pays l’assistance nécessaire pour construire leurs nouvelles démocraties.

C’est donc très naturellement que je défends cette Organisation. Mais, au-delà d’en être le défenseur, j’en suis un participant actif, voire militant. Aussi, avant de tourner mon regard vers l’avenir, je tiens à réaffirmer ce qui est une évidence et qui continuera à en être une, à savoir les attentes que j’associe au Conseil de l’Europe et à son travail. Tout d’abord, les droits et les libertés sur papier ne suffisent pas. Les droits et libertés doivent être garantis dans la pratique, pas seulement dans les textes.

L’adhésion au Conseil de l’Europe est un acte volontaire, mais l’engagement pris au moment de l’adhésion doit être durable et fiable. Ceux qui appartiennent au Conseil de l’Europe ont épousé les valeurs et le cadre juridique du Conseil de l’Europe. À côté de la Convention européenne des droits de l’homme, l’Organisation compte 211 instruments juridiques – un nombre impressionnant. Les Etats membres sont tenus de transposer ces textes le plus rapidement possible dans leur cadre juridique national et les organes nationaux ne doivent pas vider de sens ce train de textes.

Cela concerne tout particulièrement les garanties inscrites à la Convention européenne des droits de l’homme. Pour que cette Convention soit crédible, il importe qu’elle soit considérée comme un patrimoine commun, et traitée comme telle. J’ai eu à signer des lois devenues nécessaires parce que l’Allemagne avait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour violation des droits de l’homme. Elles étaient devenues nécessaires pour garantir que le droit national et l’action de l’Etat soient conformes aux principes de la Convention européenne des droits de l’homme. Les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe doivent tirer toutes les conséquences qui découlent de condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme. Je souligne cette évidence parce qu’avant 1989, à l’Est, j’ai connu des temps où l’Etat ne se sentait pas tenu par ses propres lois ou par le droit international. J’ai connu une époque où les textes et la réalité se contredisaient cruellement.

C’est pour cela que j’apprécie particulièrement qu’à côté d’un espace juridique national existe aussi cet espace juridique paneuropéen. Il permet d’éloigner le danger qu’un jour, ces droits soient violés et que ces violations restent ignorées. C’est un espace commun dans lequel nous pouvons parler ouvertement et franchement de ce qui nous concerne. Et je me sens concerné lorsque je lis les rapports du Comité européen pour la prévention de la torture du Conseil de l’Europe portant sur les mauvais traitements en prison en Europe. Je me sens concerné lorsque je vois que des normes, pourtant décidées ensemble, restent lettre morte parce que l’arbitraire, la corruption, la dissimulation sont souvent bien plus fortes que les représentants courageux du Conseil de l’Europe ou de nombreuses ONG.

Les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit doivent inlassablement être exigés, faute de quoi nos valeurs et nos convictions deviendront des coquilles vides. Nous avons besoin de contrôler régulièrement nos convictions dans chaque Etat, sans en être empêchés par un gouvernement. Il est utile que les rapports de suivi du Conseil de l’Europe puissent être consultés et cités, que la Commission de Venise soit souvent sollicitée. Tout cela aide ceux qui défendent la démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’homme.

Le Conseil de l’Europe, comme nombre d’institutions, rencontre, je le sais bien, des difficultés budgétaires, mais permettez-moi de poser une exigence minimale : l’assistance pratique du Conseil de l’Europe pour la transposition des droits de l’homme en Europe ne saurait souffrir aucune économie.

J’en viens à mon deuxième point : toute politique est aussi une politique des droits de l’homme.

La guerre froide appartient, fort heureusement, à des temps révolus, mais c’est avec une grande surprise et avec horreur que nous voyons, même sous des formes atténuées, perdurer un vieux conflit. Dans les années 70 et même 80, l’Allemagne et d’autres pays ont eu du mal à dénoncer les violations des droits de l’homme en Europe de l’Est, pour ne pas compromettre le « changement par le rapprochement », comme on disait à l’époque.

Les régimes communistes ne sont plus. En Europe de l’Ouest et en Europe centrale et orientale, tous font référence aux mêmes valeurs démocratiques, mais la lutte contre les violations des droits de l’homme reste parfois controversée. De nouveau, certains prétendent que la protection des droits de l’homme est en contradiction avec la défense effective des intérêts politiques et économiques. Je ne dirai qu’une chose à ce propos : l’argument selon lequel la bonne coopération économique impose des compromis en matière de droits de l’homme me convainc encore moins aujourd’hui qu’auparavant. Les investissements exigent aussi sécurité et stabilité juridiques ; la fiabilité est une valeur très appréciée dans le monde des affaires.

À l’heure de la mondialisation, les Etats sont de plus en plus dépendants les uns des autres. Or l’évolution actuelle des relations économiques sur le continent européen le confirme : la parole critique en matière de droits de l’homme ne s’oppose pas aux échanges commerciaux. Nous voyons bien que les Etats membres du Conseil de l’Europe se sont entendus sur un cadre clair pour leur coopération. Pour parler comme les hommes d’affaires, les droits de l’homme ne sont pas négociables. Nous ne pouvons ni ne voulons abandonner ceux qui veulent faire vivre en pratique les valeurs couchées sur le papier, et cela quel que soit le pays où ils vivent.

Pour les personnes de ma génération, les accords d’Helsinki étaient la grande référence ; pour beaucoup de défenseurs des droits de l’homme, surtout dans les pays en transformation, c’est la Convention européenne des droits de l’homme. Lorsqu’un Etat membre du Conseil de l’Europe enfreint des règles qu’il a pourtant acceptées librement au moment de son adhésion, cela ne peut rester sans réaction et sans sanction. Nous avons l’obligation d’ingérence, et cela pour deux raisons : d’une part, parce que nous sommes européens et que nous nous fondons sur la Convention européenne des droits de l’homme ; d’autre part, parce que nous sommes citoyens du monde et que nous nous appuyons sur la Déclaration universelle des droits de l’homme. En effet, les droits de l’homme sont universels et indivisibles, ce qui s’accompagne d’une grande responsabilité.

En février, j’ai été invité par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève. Je me suis trouvé face à des délégués venus du monde entier, formant un public dont les profils et les expériences étaient très divers. Une fois de plus, j’ai pu mesurer les progrès extraordinaires qu’a permis de réaliser le catalogue des droits de l’homme élaboré après la seconde guerre mondiale. La vision de l’horreur humaine nous a ouvert les yeux sur l’essentiel. La communauté internationale de ceux qui ont accepté les droits de l’homme est née, non pas de luttes idéologiques, mais de crises existentielles. Nous avons compris que, là où les êtres humains perdent leurs droits, ils finissent par perdre tout : le respect mutuel, la dignité et jusqu’à la vie, ainsi que l’avenir.

Même si les droits de l’homme sont perçus comme étant occidentaux et même si, de fait, ils ont été formulés sous cette forme par l’Occident, ils prennent leur source un peu partout dans le monde ; ils sont notre patrimoine universel le plus précieux. Nous les recevons à la naissance, ils sont inaliénables et se fondent sur l’idée incontournable selon laquelle c’est la condition humaine qui nous rend égaux – peu importent les différences culturelles, religieuses ou encore sociales. Celui qui renforce les droits de l’homme renforce l’humanité dans son ensemble.

Cela m’amène à mon troisième point : la concrétisation des droits de l’homme est un travail de longue haleine. Je sais que les changements sociétaux prennent du temps, surtout dans les pays en transformation. Ces Etats ont une histoire politique très différente de celle des pays européens qui sont devenus des démocraties au fil des décennies, voire des siècles. Pourtant, le faible intervalle de temps nécessaire crée parfois la surprise, comme nous l’avons vu en Europe : le changement prend forme parfois beaucoup plus rapidement qu’on ne l’espérait. Je me suis entretenu de cette question avec le Président polonais, Bronislaw Komorowski. Lorsque l’on confronte ce que nous espérions pour l’Europe il y a 25 ans à la réalité actuelle, nous avons toutes les raisons d’avoir beaucoup plus confiance en l’aptitude au changement que ne l’ont certains.

Mais il est vrai également que l’on ne saurait accepter en Europe deux poids, deux mesures en matière de droits de l’homme. Le Conseil de l’Europe veille au respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit, à l’Est comme à l’Ouest et selon les mêmes critères. Certes, il tient compte des différentes situations, ce qui est nécessaire, mais les mêmes normes s’appliquent pour tous – et je vous en remercie.

L’une des nombreuses tâches qui nous occupent actuellement est la lutte contre le racisme et l’intolérance. Le Conseil de l’Europe a même créé, en 1993, une commission chargée de ces questions. À la même époque, l’Allemagne a été ébranlée par des actes racistes, notamment dans ma ville, Rostock, ce qui a été un grand choc pour moi. Un peu plus tard a commencé une série d’assassinats commis par un groupe d’extrême droite. Les faits n’ont pas encore été tout à fait élucidés ; nous attendons avec impatience les résultats de l’enquête.

Nous voyons, partout en Europe, des discriminations et des violences qui prennent des formes très différentes. Elles peuvent être exercées par la majorité contre des minorités, mais l’inverse peut se produire ; certaines minorités peuvent aussi attaquer une majorité ou d’autres minorités. Au nombre des problèmes particulièrement graves, je compte l’exclusion des Roms. Je me félicite à cet égard que le Conseil de l’Europe ait choisi de faire sien ce sujet et qu’il souhaite apporter une réponse à toute forme de discrimination contre les Roms avec la campagne : « Dosta ! », « Assez ! ».

Nous avons besoin qu’il y ait davantage de campagnes de ce type. En Allemagne, par exemple, nous avons engagé une campagne d’affichage. Sur l’une des affiches, on peut voir une actrice très connue, avec comme texte : « Je suis musulmane dès lors que tu as quelque chose contre les musulmans. » Sur une autre, on voit un homme politique célèbre qui dit : « Je suis homosexuel dès lors que tu as quelque chose contre les homosexuels. » Il faut mener des actions coordonnées dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. La faculté de progresser dépend certes de chacun, mais aussi de l’histoire des sociétés dans leur ensemble.

Le fait de constater que la jeune génération, en Europe centrale et orientale, a confiance en elle-même et pose des exigences politiques me donne confiance à moi aussi. Certains jeunes défenseurs des droits de l’homme sont présents pour nous écouter ; ils savent ce qu’ils veulent et qui peut les aider dans leur tâche – en l’occurrence, le Conseil de l’Europe. La société civile a besoin de cette référence. Elle sait qu’elle y sera entendue et qu’elle y trouvera du soutien.

Les intérêts de la société civile devraient aussi nous intéresser dans les deux pays qui, sur ce continent, sont les seuls à ne pas être membres du Conseil de l’Europe. Je formule le souhait que la situation au Bélarus change au point que son adhésion puisse être envisagée sérieusement. Cela suppose que la peine de mort soit abolie, que les détenus politiques soient libérés et que des réformes démocratiques soient engagées. Ce serait une chose formidable.

Au Kosovo, la situation politique est différente. Qu’un accord ait été trouvé entre le Kosovo et la Serbie est tout à fait positif. Nous savons que l’Assemblée a agi en ce sens au début l’année. Nous savons aussi que le Kosovo doit encore lutter contre la corruption et la criminalité organisée. Pour le développement de ce pays, l’intégration dans la communauté internationale est importante. C’est la raison pour laquelle j’espère que tous les Etats membres du Conseil de l'Europe se diront disposés à reconnaître le Kosovo comme Etat. Les habitants du Kosovo et du Bélarus ont le droit aussi de bénéficier des valeurs du Conseil de l'Europe. Leurs droits doivent être eux aussi protégés par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette Cour qui très souvent est le dernier espoir des désespérés, ceux qui ont tout perdu et dont les droits ont été violés.

Le nombre de procédures ne cesse d’augmenter. Ensemble nous devons faire en sorte que la Cour européenne des droits de l’homme soit réformée, afin qu’elle ne meure pas de son succès. Elle doit continuer à travailler pour défendre les droits de ceux qui risquent beaucoup, parfois jusqu’à leur vie, pour exiger que leurs droits soient respectés. Certains d’entre eux sont dans le public aujourd’hui.

Chers défenseurs des droits de l’homme, chers représentants d’ONG européennes, j’aimerais vous exprimer ma grande reconnaissance. Je m’entretiendrai avec certains d’entre vous tout à l’heure, mais à tous les autres, présents ou non dans cet hémicycle, j’adresse mes remerciements. Sans votre courage, certaines des promesses du Conseil de l'Europe resteraient lettre morte. Sans votre parole, la démocratie ne pourrait survivre et sans votre solidarité, notre corps commun des valeurs universelles et indivisibles ne sauraient devenir une réalité pour tous.

C’est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs, il faut défendre l’humanité et transformer le Conseil de l'Europe en une Organisation la meilleure possible, en une communauté interne très soudée en Europe qui, en dépit des différences, favorise la cohésion. Et vers l’extérieur, en un exemple convaincant de démocratie vécue, de l’État de droit et du respect des droits universels.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur le Président, pour ce beau et grand discours. Un discours qui a touché profondément les membres de cette Assemblée, leurs applaudissements répétés en sont la preuve. Un grand discours qui fera date, je n’en doute pas un seul instant, au Conseil de l'Europe. Un grand discours qui sera, j’en suis sûr, une référence pour nos travaux futurs.

Un certain nombre d’orateurs se sont inscrits. Je vous propose, Monsieur le Président, qu’ils posent leur question par groupe de trois ou quatre. Je rappelle qu’ils disposent de 30 secondes.

La parole est à M. Volontè, pour le Groupe du Parti populaire européen.

M. VOLONTÈ (Italie)* – J’aimerais tout d’abord remercier de tout cœur le Président Gauck pour la teneur de son discours qui m’a beaucoup frappé. Il a dit à juste titre que les droits de l’homme sont pour tous les citoyens et que le Conseil de l'Europe doit être la maison qui nous accueille tous. Nous sommes face à un esprit anti-européen, notamment dans l’Europe à 27, mais qui concerne toute l’Europe. L’esprit européen a été pendant longtemps fort en Allemagne. Comment pensez-vous le revitaliser ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Lord Anderson, pour le Groupe socialiste.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Je vous salue, Monsieur le Président, ainsi que votre parcours personnel. Vous êtes un exemple, un modèle de ce qu’il y a de bien en Allemagne. Malheureusement, dans de nombreux pays de l’Europe, la perception de l’Allemagne est négative. Cela vous préoccupe-t-il ? Et comment lutter contre cette perception ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Brasseur, pour l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme BRASSEUR (Luxembourg)* – Monsieur le Président, j’aimerais vous remercier de tout cœur au nom de mon groupe pour votre engagement pour le Conseil de l'Europe. Ma question concerne la liberté religieuse, la liberté de conscience. Nous appartenons tous à des confessions différentes, certains parlementaires ne sont pas croyants. Comment voyez-vous le « vivre ensemble » des diverses confessions en Europe ?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ALLEMAGNE*– Monsieur Volontè, cet esprit anti-européen est pour moi particulièrement effrayant, comme il l’est pour d’autres Européens de ma génération qui considèrent que c’est un recul. Cela est bien entendu lié dans une grande mesure à la crise économique et financière que connaît l’Union européenne. Certes il y a des motifs rationnels, des explications économiques, mais la situation est négative pour tout le monde.

Mais nous devons avant tout chercher à mieux cohabiter en Europe. L’Allemagne est parfois présentée comme un pays cherchant à être le maître en Europe ; ce qui est totalement faux ! Il n’en est rien, ce n’est pas ce que veut l’Allemagne ! Mais il est tout de même nécessaire qu’un pays fasse mieux comprendre par les autres Etats ses propres principes directeurs. Et à cette fin il nous faut une plus grande sensibilité à la situation de toutes les régions d’Europe. Nous devons pouvoir parler de nos différences de manière à renforcer ce qui nous est commun. Or cela est impossible si nous ne nous mettons pas d’accord sur l’ordre du jour européen ! Vous-mêmes, en tant que parlementaires, vous défendez ces valeurs comme je le fais moi-même en tant que Président. Lord Anderson, l’Allemagne est effectivement perçue comme le sont parfois les Etats-Unis de manière négative. En tant que l’un des pays les plus actifs, il prête souvent le flanc à la critique.

Parfois, nous sommes perçus comme une Allemagne du passé qui n’existe plus : nous ne sommes plus au temps du Kaiser Wilhelm pour ne pas citer des personnages pires encore. Nous sommes une Allemagne européenne. Au fil des décennies, une continuité de l’idée européenne s’est instaurée. Il est nécessaire de le rappeler sans cesse à nos partenaires européens. C’est pourquoi je suis préoccupé que d’anciens préjugés viennent démentir ce qui est une réalité et une actualité tant il est vrai que l’Allemagne veut soutenir et promouvoir l’idée européenne. À cet égard, nous devons tous lutter contre de tels phénomènes. Vous le faites dans votre pays. Quant à moi, je placerai beaucoup d’énergie dans la lutte contre ces préjugés. C’est pourquoi j’estime qu’un large travail doit être engagé pour que les messages entre le Nord et le Sud soient mieux compris, car les concepts ne sont pas interprétés de la même manière, notamment en matière économique, selon que l’on parle de l’Autriche, de l’Allemagne ou de la Scandinavie. La volonté de réforme qui s’est instaurée serait utile à l’ensemble du continent, mais pour cela il faut trouver des modalités communes et parler un langage commun, non celui qu’emploie l’enseignant face à ses élèves. Je suis prêt à avoir cette démarche.

Madame Brasseur a évoqué le vivre-ensemble qui pourrait être mieux mis en œuvre si les valeurs qu’il sous-tend sont mieux défendues. J’ai l’impression que ceux qui cèdent à l’intolérance sont ceux qui ne sont pas convaincus au fond d’eux-mêmes de leur propre identité. C’est ainsi qu’ils pointent du doigt la différence de l’autre pour ne plus être eux-mêmes au centre de l’attention. Les personnes très croyantes sont prêtes à dire que ce qui leur tient à cœur est très différent de ce qui tient au cœur de l’autre. Selon moi, nous devons instaurer une relation pacifique avec l’autre et des droits identiques pour tous, car même si nous ne sommes pas animés des mêmes convictions, nous avons les mêmes droits engendrant des stratégies de respect et de tolérance à l’égard de la religion de l’autre. Il s’agit par conséquent de défendre ces valeurs dans le respect de la diversité. La diversité est un patrimoine, une ressource ; il ne faut donc pas opérer de discriminations ni jeter l’opprobre sur l’autre.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Gündeş Bakir, au nom du Groupe démocrate européen.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Une fondation de recherche a comptabilisé 187 morts liés à des violences extrémistes entre 1990 et 2005 en Allemagne. Nous sommes très préoccupés par les actes néo-nazis qui ont tué plusieurs petits commerçants Turcs et un Grec. Quelles sont les stratégies que compte mettre en œuvre l’Allemagne pour protéger ces minorités contre le racisme, la xénophobie et l’islamophobie et pour combattre efficacement des partis politiques racistes et les idéologies d’extrême droite ?

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Dragasakis, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

MDRAGASAKIS (Grèce)* – Monsieur le Président, je vous remercie pour votre déclaration dans laquelle vous avez indiqué que les droits de l’homme n’étaient ni négociables ni discutables. Au mois de juin, un rapport de l’Assemblée parlementaire soulignait que l’extrémisme était un danger pour la démocratie et les droits de l’homme. Pensez-vous que nous pouvons agir tout en continuant comme avant, avec un euro fort, sans changer notre politique et alors que tant d’inégalités prévalent au sein de l’Union européenne ?

M. REIMANN (Suisse) * – Ma question est semblable à celle de M. Volontè. En tant que voisin de l’Allemagne, je suis également préoccupé par ces manifestations d’antigermanisme. Nous pensions que cela faisait partie d’une époque révolue. Vous avez déjà répondu à cette question, Monsieur le Président, ce dont je vous remercie.

M. LE PRÉSIDENT DE L’ALLEMAGNE– Dans mon intervention, j’ai rappelé que l’Allemagne avait une expérience abominable de l’extrême droite. Voilà une dizaine d’années, pour des motifs racistes inacceptables, un groupe d’extrême droite a assassiné des personnes dont une policière. Une commission d’enquête, dont j’ai reçu les membres au Bundestag, a conclu qu’il ne s’agissait pas là d’une lacune législative, mais d’un manque de coopération entre le Bund et les Länder, dont les mandats sont différents, la police, en effet, relevant des Länder. Par ailleurs, les Länder comptent des offices de protection de la Constitution. C’est ainsi qu’en la matière, nos parlementaires considèrent que le fédéralisme est négatif. La mise en place d’une commission commune entre le Bund et les Länder s’est imposée afin de permettre une collecte de données communes. Une enquête subséquente a posé la question de savoir si les autorités avaient porté une attention suffisante à cet extrémisme. Le débat est vif et très controversé, et ne trouve pas de réponse. Je vous en livrerai une qui sans doute ne vous tranquillisera pas, mais il faut savoir que nous, Allemands, qui avons connu ce terrorisme national-socialiste sommes horrifiés, à tel point que nous n’autoriserons plus jamais qu’un tel mouvement politique ait du poids.

Quant à savoir si le parti d’extrême droite allemand devrait être ou non interdit, d’aucuns sont pour, d’autres sont contre. J’ai créé une association contre l’oubli et pour la démocratie. Des associations de citoyens en Allemagne mènent une action active, des citoyens démocrates manifestent massivement contre cet extrémisme de droite et les institutions luttent en se fondant sur la base de la primauté du droit. Cette action pourrait-elle se situer sur le plan électoral ? La question reste controversée ; en effet, dès lors que l’on interdit un parti d’extrême droite fort et qu’il se divise en groupuscules, il devient encore plus difficile de lutter contre lui.

L’extrémisme est une question menaçante. En tant que membre du Conseil de l'Europe et de l’Union européenne, ce cadre commun à nous tous, nous luttons contre ces ennemis avec les armes qui sont les nôtres dans un système démocratique. Nous ne nous déplacerons pas dans un autre champ d’action que celui-là en interdisant à ces partis d’extrême droite d’exister et en les déclarant illégaux.

Votre dernière question, quant à elle, ne concerne pas le problème de l’extrémisme et je ne pourrai rien dire à ce sujet. Je vous invite toutefois à me faire part de ses tenants et aboutissants par écrit afin que je puisse y répondre.

Mme LĪBIŅA-EGNERE (Lettonie)* – L’Allemagne a joué un rôle moteur en impulsant la création de l’Union européenne et votre pays est également un modèle en matière de droits de l’homme. Lors de votre intervention au Château de Bellevue, vous avez lancé un appel à la défense des valeurs et, en particulier, de la tolérance. Quels sont les défis auxquels le Conseil de l’Europe sera confronté, notamment dans l’Union européenne et plus spécialement dans la zone euro ?

Mme ZIMMERMANN (France) – Le 22 février dernier, lors de votre discours sur l’Europe au Schloss Bellevue, vous avez plaidé pour que notre continent se dote d’une langue véhiculaire commune, l’anglais, afin de créer une agora européenne. Or, en tant que députée mosellane et membre de cette Assemblée, je considère que cette proposition va à l’encontre des efforts menés au sein de l’Europe pour préserver l’enseignement d’autres langues et favoriser la diversité linguistique mais aussi culturelle. Pouvez-vous préciser la position de l’Allemagne sur ce sujet important ?

M. TOSHEV (Bulgarie)* – Vous comptez, Monsieur le Président, parmi ceux qui ont une conscience vive de la division des sociétés d’Europe centrale et orientale faute que la justice ait été rendue s’agissant des crimes du communisme en raison des règles de prescription. Êtes-vous prêt à vous engager afin que des mesures législatives soient prises sur un plan européen pour mettre un terme aux délais de prescription en la matière ?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ALLEMAGNE – Dans mon intervention, j’ai insisté sur la question des droits de l’homme et sur le fait que le Conseil de l’Europe ainsi que la Cour européenne des droits de l’homme ont une grande importance pour les pays en voie de transformation. Lorsque ces derniers mettront en place des normes – d’ailleurs susceptibles de recours – le Conseil de l’Europe aura véritablement accompli sa mission.

J’ai évoqué la maison commune européenne, car la Convention européenne et la Convention universelle des droits de l’homme constituent une voie d’avenir. Il faut agir avec patience mais de façon collégiale avec des pays très divers qui ont parfois besoin de temps afin de s’adapter aux normes et aux principes de l’Etat de droit auxquels j’attache une grande importance.

Je tiens évidemment à ma chère langue allemande et je serais ravi que chacun puisse l’utiliser ! Néanmoins, je suis assez réaliste pour savoir que tel ne sera pas le cas dans les 250 prochaines années au moins ! Nous restons donc bien évidemment attachés à nos racines et à notre culture mais nous voulons aussi faciliter les échanges entre les hommes.

Même les habitants de l’ancien bloc de l’Est – Pologne, ex-Tchécoslovaquie, Roumanie, Bulgarie etc. – qui ont été forcés à apprendre la langue russe ont finalement choisi d’user de l’anglais tant cette langue est commune dans bien des domaines. Je n’y ai pas fait référence pour demander aux Britanniques d’être plus proches de l’Europe mais pour des raisons pragmatiques.

Les crimes du communisme sont en effet prescrits, mais la définition de la culpabilité ne se limite pas au seul domaine juridique. Le grand philosophe allemand Karl Jaspers a rappelé que cette notion peut se décliner sur plusieurs modes : juridique, moral, religieux, etc.

La prescription, quant à elle, constitue un important acquis juridique qui ne saurait être remis en cause mais cela ne signifie pas que la responsabilité politique ne puisse être formulée publiquement, médiatiquement et civiquement : un dictateur reste un dictateur même s’il n’est plus possible de le traduire en justice. Il importe donc de nourrir un débat public.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – J’ai confiance en votre discours, Monsieur le Président, mais aussi en votre parcours, lequel atteste de vos convictions. Il n’en reste pas moins que des décisions politiques européennes bafouent les droits économiques, sociaux et culturels de milliers de personnes. Comme par hasard, elles répondent aux exigences des banquiers. Que faire pour que la politique, notamment budgétaire, soit indépendante de la tyrannie des financiers et tienne compte des droits de tous les êtres humains ?

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan)* – De nombreux citoyens allemands d’origine turque sont victimes d’agressions. Vous sentez-vous concerné par leur sort ? Quelle mesures le Gouvernement allemand envisage-t-il de prendre afin d’empêcher de tels phénomènes ? Quid des organisations politiques extrémistes clandestines ?

Mme BULAJIĆ (Serbie)* – La crise économique menace les droits sociaux et politiques. Or la méfiance entre les citoyens et les dirigeants étant importante partout en Europe, ne conviendrait-il pas de promouvoir une approche plus éthique de la crise et de donner la parole aux citoyens ? En particulier, étant donné votre rôle politique et votre parcours professionnel, quel type de réponse politique pouvez-vous proposer pour renforcer la voix des citoyens dans le processus actuel de décision ?

M. LE PRÉSIDENT DE L’ALLEMAGNE* – Partout en Europe, surtout dans les pays durement frappés par la crise, on pose de plus en plus la question de la légitimité de ces marchés financiers devenus fous. Je me suis entretenu avec des économistes de ces questions. Peut-on parler d’une dictature des marchés ? C’est une formule que l’on utilise régulièrement dans différents pays, dans certaines familles politiques plus que d’autres. Lorsqu’on regarde la réalité européenne, on ne peut valablement employer cette notion. C’est une formule politique utile mais elle ne décrit pas fidèlement la réalité. Parler de dictature des marchés ne correspond pas à la situation. Ces marchés constituent une menace, mais il est important que la politique garde la maîtrise des choses.

Comme ancien citoyen de l’Est, je ne suis pas entièrement convaincu que plus d’intervention de l’Etat dans la vie économique engendrerait plus d’équité et plus de richesses. L’Etat a aussi causé beaucoup de problèmes. Des institutions publiques ont aussi participé à des transactions téméraires. La liberté économique est importante et les cadres juridiques sont nécessaires avec suffisamment de marge pour le déploiement de l’économie, sans saper nos valeurs sociales.

J’en viens à la question sur les Turcs en Allemagne. Ils sont bien organisés et bien intégrés. Un groupuscule d’assassins, ce n’est pas une grande organisation nationale-socialiste. Ce groupuscule compte peu de personnes. Certaines organisées dans un parti, d’autres en dehors des groupements de type associatif. C’est une préoccupation en Allemagne, mais la menace n’est pas si importante que la population turque risque sa vie.

L’Etat de droit en Allemagne est suffisamment équipé pour lutter contre le terrorisme et une idéologie qui préconise la haine. Il est très proche de toutes les normes internationales. Ces organisations nationales-socialistes constitueraient, disent certains, une menace pour l’ensemble de la population ; ce n’est pas vraiment ce que nous vivons aujourd’hui. L’Allemagne débat régulièrement du thème de l’intégration. Je participe à ces débats. Lorsque mon prédécesseur a quitté ses fonctions, je lui ai promis, ainsi qu’à l’opinion publique allemande, que le thème de l’intégration, notamment des Turcs, serait prépondérant durant mon mandat.

On m’a demandé s’il y avait un modèle éthique à opposer à la domination des marchés financiers. Je me rangerai toujours du côté de ceux qui cherchent des références pour définir au mieux ce cadre que j’ai évoqué. Je deviens sceptique lorsque j’entends des slogans anticapitalistes surannés. Je ne pense pas que ça soit très porteur pour l’avenir. Ce n’est pas parce que certains abusent des libertés données par l’économie, qu’il faut condamner et supprimer l’ensemble de la liberté économique. Nous en avons besoin mais il faut aussi que chacun respecte les règles. C’est ce cadre qui fait l’objet de débats en Europe et ailleurs.

Il est évidemment très utile de réfléchir à une approche éthique nouvelle. C’est le cas dans certaines universités aux Etats Unis. Beaucoup d’articles publiés parlent de cette confiance perdue ou mise à mal dans l’économie. Les questions qui se posent sont de plus en plus de nature éthique. C’est impressionnant de voir le nombre de publications sur ce sujet. Cela prouve qu’il y a un éveil des citoyens face à cette économie et aux principes qui la sous-tendent.

Il ne faut pas s’en tenir à un discours anticapitaliste. Ceux qui représentent les salariés, les syndicats et tous les autres groupements pourraient être davantage impliqués dans ces discussions. Il faut renforcer les syndicats au lieu de les affaiblir. Or la tendance en Europe c’est de minorer l’importance de l’activité syndicale, car peu d’ouvriers sont syndiqués.

Il n’y a pas que l’approche morale. Il faut aussi tenir compte des intérêts économiques des uns et des autres, notamment des travailleurs, des salariés. Tous ces intérêts doivent être respectés par la politique. Nous devons engager le dialogue avec nos citoyens pour être tous des acteurs et non des victimes des grands « méchants » de l’économie.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur le Président, pour votre intervention tout à fait remarquable qui fera date dans l’histoire du Conseil de l’Europe et de notre Assemblée. Vous avez eu des paroles encourageantes pour notre travail depuis 1949 et cela nous incite à le poursuivre. Nous avons été très honorés de votre présence et de vos réponses à nos questions.

Nous avons terminé avec les questions. Il y avait encore beaucoup d’intervenants. Il faudra revenir pour donner satisfaction à tous nos collègues !

11. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi à 15 heures, avec l’ordre du jour que nous avons adopté ce matin.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 10.

SOMMAIRE

1. Ouverture de la deuxième partie de la Session ordinaire de 2013

2. Allocution du Président

3. Vérification des pouvoirs

Orateur : M. Omtzigt

4. Élection de Vice-Présidents de l’Assemblée au titre de Malte, de Monaco et de la Roumanie

5. Modifications dans la composition des commissions

6. Demande de débat d’actualité

7. Adoption de l’ordre du jour

8. Limitation des temps de parole

9. Approbation du procès-verbal de la réunion de la Commission permanente du 8 mars 2013

10. Discours de M. Gauck, Président de l’Allemagne

Questions : MM. Volontè, Lord Anderson, Mmes Brasseur, Gündeş Bakir, MM. Dragasakis, Reimann, Mmes Lībiņa-Egnere, Zimmermann, MM. Toshev, Díaz Tejera, Mmes Pashayeva, Bulajić

11. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA

Karin ANDERSEN*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB/Pieter Omtzigt

Volodymyr ARIEV

Mörður ÁRNASON*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Þuriður BACKMAN*

Daniel BACQUELAINE*

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE

Gérard BAPT/Jean-Pierre Michel

Gerard BARCIA DUEDRA

Doris BARNETT/Frank Schwabe

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI*

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET*

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL

Gerold BÜCHEL

Patrizia BUGNANO*

André BUGNON

Natalia BURYKINA/Tamerlan Aguzarov

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU

Mikael CEDERBRATT/Kerstin Lundgren

Otto CHALOUPKA

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU*

Christopher CHOPE*

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE/Jānis Dombrava

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH/Grzegorz Czelej

James CLAPPISON

Deirdre CLUNE

Agustín CONDE*

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA*

Carlos COSTA NEVES*

Joseph DEBONO GRECH

Armand De DECKER*

Roel DESEYN/Dirk Van Der Maelen

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ*

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER*

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI*

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA*

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV/Anvar Makhmutov

Doris FIALA/Eric Voruz

Daniela FILIPIOVÁ/Miroslav Krejča

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ/Kateřina Konečná

Gvozden Srećko FLEGO*

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON/Maryvonne Blondin

Béatrice FRESKO-ROLFO

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC/József Nagy

Sir Roger GALE

Tamás GAUDI NAGY*

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Paolo GIARETTA*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI/ Zbigniew Girzyński

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM/Ingjerd Schou

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Gergely GULYÁS

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI*

Norbert HAUPERT

Alfred HEER

Martin HENRIKSEN/Mette Reissmann

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER*

Andrej HUNKO

Susanna HUOVINEN/Riitta Myller

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIĆ/Vesna Marjanović

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/Jacques Legendre

Gediminas JAKAVONIS

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI/Carmen Quintanilla

Michael Aastrup JENSEN

Mogens JENSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Katarina Rakić

Birkir Jón JÓNSSON*

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN/Jouko Skinnari

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI*

Marietta KARAMANLI*

Ulrika KARLSSON*

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH/Jadwiga Rotnicka

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Attila KORODI

Alev KORUN*

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO/Nermina Kapetanović

Dmitry KRYVITSKY*

Václav KUBATA/Dana Váhalová

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT/Christian Bataille

Igor LEBEDEV/Olga Kazakova

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT*

François LONCLE*

Jean-Louis LORRAIN/Bernard Fournier

George LOUKAIDES

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ/Ismeta Dervoz

Philippe MAHOUX

Gennaro MALGIERI/Renato Farina

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI/André Schneider

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA*

Frano MATUŠIĆ*

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Michael Connarty

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV/Leonid Kalashnikov

Nursuna MEMECAN*

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Stefana Miladinović

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG/Viola Von Cramon-Taubadel

Rubén MORENO PALANQUES

Patrick MORIAU*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH/Fernand Boden

Lev MYRYMSKYI/Serhiy Labaziuk

Philippe NACHBAR

Oľga NACHTMANNOVÁ

Marian NEACŞU*

Aleksandar NENKOV*

Pasquale NESSA*

Fritz NEUGEBAUER*

Baroness Emma NICHOLSON

Elena NIKOLAEVA/Alexander Sidyakin

Aleksandar NIKOLOSKI*

Mirosława NYKIEL

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE

Liliana PALIHOVICI*

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG

Danny PIETERS/Sabine Vermeulen

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN/Nikolaj Villumsen

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS

Eva RICHTROVÁ

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT

Ilir RUSMALI*

Pavlo RYABIKIN*

Rovshan RZAYEV/Sevinj Fataliyeva

Giacomo SANTINI

Giuseppe SARO*

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER/Maximilian Reimann

Damir ŠEHOVIĆ

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL*

Arturas SKARDŽIUS

Ladislav SKOPAL

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV*

Christoph STRÄSSER

Karin STRENZ

Ionuţ-Marian STROE

Giacomo STUCCHI*

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW/Lennart Axelsson

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI*

Chiora TAKTAKISHVILI*

Vyacheslav TIMCHENKO/Robert Shlegel

Romana TOMC/Iva Dimic

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI/Konstantinos Triantafyllos

Tomáš ÚLEHLA/Pavel Lebeda

Ilyas UMAKHANOV*

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS*

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Mark VERHEIJEN

Anne-Mari VIROLAINEN

Luigi VITALI*

Luca VOLONTÈ

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON

Katrin WERNER

Karin S. WOLDSETH/Øyvind Vaksdal

Gisela WURM*

Karl ZELLER*

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Svetlana ZHUROVA/Anton Belyakov

Emanuelis ZINGERIS/Egidijus Vareikis

Guennady ZIUGANOV/Vassiliy Likhachev

Naira ZOHRABYAN*

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Monténégro*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Corneliu Mugurel COZMANCIUC

Darina GABÁNIOVÁ

Cheryl GILLAN

Gerardo GIOVAGNOLI

Rainer GOPP

Spyridon TALIADOUROS

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Sladan ĆOSIĆ

Juan BUENO TORIO

Ernesto GÁNDARA CAMOU

Miguel ROMO MEDINA

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Hassan BOUHRIZ

Omar HEJIRA

Bernard SABELLA