FR13CR16

AS (2013) CR 16

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la seizième séance

Jeudi 25 avril 2013 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5 sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés

de M. Andriy Shevchenko

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport présenté par Mme Vučković au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles sur la contestation, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés de M. Andriy Shevchenko (Doc. 13193).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi dernier, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes. Je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir respecter ce temps de parole.

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, vote inclus, à 10 heures 45. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 10 heures 40, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et procéder aux votes nécessaires.

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Vous avez la parole.

Mme VUČKOVIĆ (Serbie), rapporteure de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles* – Ce rapport a été élaboré à la suite de la contestation par M. Omtzigt et d’autres collègues, lundi dernier, des pouvoirs de M. Shevchenko, lequel avait été désigné pour remplacer M. Vlasenko, déchu de son mandat parlementaire national par une décision de justice de la Haute Cour administrative d’Ukraine.

La contestation de M. Omtzigt aurait pu être motivée par des raisons politiques. La commission du Règlement a donc été saisie, conformément à l’article 7 du Règlement, pour vérifier si les pouvoirs de M. Shevchenko sont conformes aux exigences du Règlement, s’ils respectent les dispositions de l’article 25 du Statut du Conseil de l'Europe et n’entraînent pas une représentation inéquitable des forces politiques nationales dans la délégation ukrainienne.

M. Shevchenko appartient au même mouvement politique que M. Vlasenko : Batkivtshchyna. Par ailleurs, il a été désigné remplaçant de M. Vlasenko par le président de ce mouvement, dans le respect des procédures de la Verkhovna Rada et sa nomination ne remet pas en cause la représentation équitable des groupes et partis politiques par rapport à la constitution actuelle de la Verkhovna Rada. La commission du Règlement a également examiné la procédure de ratification des mandats de la délégation ukrainienne en janvier 2013. Ces mandats ne devraient être renouvelés qu’à l’ouverture de la prochaine session.

Par ailleurs, ce n’est pas la première fois qu’un problème similaire se présente. La commission s’est donc inspirée des décisions prises précédemment, selon lesquelles, dans le cas où un membre de l’Assemblée a été déchu de son mandat par une décision judiciaire, et dans la mesure où toutes les voies de recours ont été épuisées, on peut considérer que la décision s’applique, mutatis mutandis, à l’Assemblée, compte tenu de l’article 25.a du Statut du Conseil de l'Europe, lequel stipule que « l’Assemblée est composée de représentants de chaque membre élus par son parlement en son sein ou désignés parmi les membres du Parlement ». L’article 25.b précise toutefois qu’il faut respecter le droit strict de l’Assemblée de décider si le mandat d’un membre a été levé de façon juste ou non, et cela dans le but de protéger ses membres.

La commission a estimé que la décision de la Haute Cour administrative d’Ukraine de révoquer le mandat de M. Vlasenko doit être respectée. Ni la commission ni l’Assemblée ne peuvent intervenir devant la Cour européenne des droits de l’homme, qui a d’ailleurs été saisie pour apprécier la validité de la décision de justice à l’origine de la déchéance du mandat de M. Vlasenko au regard des législations, réglementations et procédures nationales pertinentes ou des dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme.

La commission du Règlement n’a pas non plus observé une violation fondamentale du Statut du Conseil de l’Europe, lequel est contraignant pour les Etats membres – ce point n’a d’ailleurs pas été soulevé par M. Omtzigt et ses collègues.

Monsieur Shevchenko a été désigné par le président de son mouvement politique pour remplacer M. Vlasenko. Sa présence dans la délégation ne rompt pas l’équilibre des forces politiques au sein de la délégation ukrainienne.

Au vu de tous ces éléments, la commission du Règlement vous propose de lever le mandat de M. Vlasenko et de désigner à sa place M. Shevchenko.

LE PRÉSIDENT – Madame la rapporteure, il vous reste huit minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Brasseur, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme BRASSEUR (Luxembourg) – Je remercie Mme la rapporteure pour ce rapport exhaustif.

L’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe se rallie aux conclusions de la commission.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Walter, au nom du Groupe démocrate européen.

M. WALTER (Royaume-Uni)* – Cette Assemblée représente les citoyens de tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. Nous veillons à une sélection équilibrée des élus par chacun des parlements nationaux.

M. Vlasenko n’étant pas un membre du Parlement ukrainien et son remplaçant venant du même groupe politique, il semble clair que M. Andriy Shevchenko doit être membre légitime de cette Assemblée.

Nous sommes donc favorables au rapport.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Kox, au nom de Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. KOX (Pays-Bas)* – Cette Assemblée est un organe politique représentant des positions politiques très diverses. Pour que le débat soit juste, l’Assemblée a fixé un Règlement et la commission du Règlement est là pour vérifier sa bonne application.

C’est pourquoi je soutiens pleinement le rapport de Mme Vučković et je vous encourage à en faire de même.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Vareikis, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. VAREIKIS (Lituanie)* – Nous aurions tort d’appliquer les règles stricto sensu. Certes, les membres de l’Assemblée doivent être membres d’un parlement, mais la question de M. Omtzigt ne porte pas sur ce point. La question posée était la suivante : la décision de justice à l’encontre de M. Vlasenko a-t-elle une motivation politique ? Or le rapport répond quant à lui à une autre question : est-il justifié de le remplacer ?

On ne répond pas à la bonne question. Par ailleurs, comme l’a dit la rapporteure, ce n’est pas la première fois qu’il y a un malentendu entre un parlement national et notre Assemblée – cela s’est produit avec l’Albanie, l’Arménie et l’Ukraine. Nous ne savons pas toujours selon quels critères sont sélectionnés les membres d’une délégation au sein d’un parlement national. Parfois ces décisions s’appuient sur des motivations politiques.

A l’avenir, je suggère que nous fassions d’abord une analyse de la manière dont les délégations nationales sont composées. Ayant été membre de la commission du Règlement pendant de nombreuses années, j’ai toujours constaté qu’il existait un risque de malentendu.

Dans cette Assemblée, nous défendons les droits des enfants, des personnes âgées, des jeunes, des Roms, mais parfois il faut aussi avoir le courage de défendre les droits des parlementaires. Cela peut paraître étrange, mais nous avons des droits nous aussi.

Le cas de M. Vlasenko est assez problématique, d’ailleurs l’affaire est pendante devant un tribunal. Nos règles ne nous donnent pas la possibilité de faire plus mais soyons attentifs. En effet, les remplacements pour des raisons politiques peuvent se produire dans certains Etats membres du Conseil de l’Europe.

Je soutiens donc l’amendement au paragraphe 1 et j’insiste sur la nécessité de s’interroger sur les remplacements à motivation politique.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Gross, au nom du Groupe socialiste.

M. GROSS (Suisse)* – M. Vareikis estime que nous ne répondons pas à la bonne question. Mais peut-être la bonne question n’a-t-elle pas été adressée aux bons destinataires. La commission ne peut pas se prononcer sur la validité de la décision prise par les juges en Ukraine. En revanche, la commission de suivi et la Cour de Strasbourg pourraient éventuellement examiner la qualité de la loi ukrainienne.

J’appuie l’amendement. Il ne s’agit pas de mettre en cause la décision de la cour ukrainienne, car nous ne pouvons pas nous substituer à la Cour suprême et examiner la qualité de la loi ukrainienne. Nous devons pour l’heure nous ranger à cette décision, puis agir conformément à notre Règlement. En conséquence, je ne vois pas d’autre solution que d’appuyer le rapport.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Sobolev.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Les faits rappelés dans le rapport sont exacts. Il ne s’agit pas de savoir si M. Andriy Shevchenko est un membre du Conseil de l’Europe, car il l’était, conformément à notre Règlement. Mais nous avons dû répondre à deux autres questions.

D’abord, comment se fait-il que deux membres de l’opposition – M. Vlasenko et Mme Kondratiuk –, désignés comme membres de notre délégation nationale, n’aient pas pu participer à la partie de session de janvier ?

Ensuite, M. Vlasenko a été relevé de son mandat. Mais d’après notre Constitution, cette décision ne peut être prise que dans un seul cas de figure. La déchéance du mandat ne relève pas de nos règles. Parmi les membres de notre parlement, 22 sont membres du barreau. Il est important que ce rapport montre pourquoi M. Vlasenko a perdu son mandat.

L’affaire est portée devant la Cour européenne à Strasbourg mais elle n’aurait pas dû être portée devant la Cour suprême. D’après la réforme, il n’est pas possible de s’adresser directement à la Cour suprême en l’absence d’une décision de la Haute Cour administrative. Or, celle-ci ayant refusé à M. Vlasenko son pourvoi devant la Cour suprême, il a donc porté son cas devant la Cour de Strasbourg.

Comprenez donc qu’il est très important pour nous de dire clairement que M. Vlasenko, et nous le voyons dans la déclaration signée par les représentants des quatre grands groupes politiques à propos de l’élection directe par les citoyens, ne peut pas être déchu de son mandat par les autorités. C’est un problème qu’il nous revient de résoudre. D’où l’amendement no 1, qui n’est pas un amendement politique mais un amendement qui permettra le règlement de ce type de problèmes à l’avenir.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Popescu.

M. POPESCU (Ukraine)* – Je remercie d’entrée Mme la rapporteure pour son rapport objectif et impartial.

J’appelle votre attention sur les procédures intérieures de l’Ukraine qui nous ont permis de remplacer M. Vlasenko par M. Shevchenko. Le 28 février 2013, le comité du Règlement du Parlement ukrainien a saisi la Haute Cour parce que M. Vlasenko cumulait son mandat d’élu et ses activités d’avocat, en infraction des règles constitutionnelles qui autorisent uniquement les élus à avoir une activité d’enseignement en plus de leur mandat de député. Dans ce domaine, nous avons suivi les recommandations des experts du Conseil de l’Europe.

Le 6 mars 2013, la Haute Cour administrative ukrainienne a déchu de son mandat un élu du parti au pouvoir. La Cour a constaté que M. Vlasenko devait trancher. Il disposait donc de 90 jours, soit jusqu’au 16 novembre 2012, pour décider de se défaire de sa licence d’avocat s’il voulait rester député.

Le 28 mars 2013, le président de son parti a décidé de remplacer M. Vlasenko par son collègue. Cette décision a été ratifiée et M. Vlasenko n’était plus membre élu de Batkivtshchyna. M. Shevchenko, qui appartient au même parti politique que M. Vlasenko, a été nommé à sa place. La Haute Cour a été saisie par M. Vlasenko, mais il n’a pas pu être entendu, car la Cour avait décidé que c’était une procédure acceptable.

M. Mignon a ensuite reçu notre requête visant à remplacer M. Vlasenko par M. Shevchenko, conformément aux procédures et au Règlement de l’Assemblée. Nous vous demandons donc de voter en faveur de ce rapport et de rejeter l’amendement proposé.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Ariev.

M. ARIEV (Ukraine)* – Ce n’est pas une situation ordinaire pour moi ni pour mes collègues du parti Batkivtshchyna. Nous avons déjà discuté des pouvoirs d’un autre membre de Batkivtshchyna, mais en bénéficiant du soutien de M. Omtzigt. Vous comprenez bien que le problème ne tient pas à la personnalité de M. Shevchenko, mais au fait que son mandat est illégitime.

Le système judiciaire ukrainien a été réformé il y a trois ans pour être complètement contrôlé par l’administration du président Ianoukovitch. Vous vous souvenez sans doute des procès de Ioulia Timochenko et de Iouri Lutsenko. On pouvait effectivement reprocher n’importe quoi à n’importe qui, et le prouver. Si vous voulez être tenu pour responsable du temps qu’il a fait hier, bienvenue en Ukraine !

C’est la même chose pour M. Vlasenko, membre de l’Assemblée. En tant que défenseur de Ioula Timochenko – et non pas avocat, et la différence est là essentielle – il était trop visible pour être atteint. C’est la raison pour laquelle a été adoptée cette décision illégale, prise en violation des règles. De nombreux membres de l’Assemblée avaient d’ailleurs signé une déclaration à ce sujet. Il faut maintenant attendre la décision que rendra la Cour européenne des droits de l’homme, devant laquelle M. Vlasenko a fait appel.

Si vous vous en souvenez, une affaire de même type avait été examinée concernant le mandat de parlementaires d’Azerbaïdjan. Les mandats de MM. Baloga et Dombrovsky avaient également été contestés. L’affaire avait été initiée suite à des élections.

Cette décision n’a pas encore été exécutée, mais une semaine avant la partie de session, le mandat d’un autre membre du parti a été contesté. Cela illustre bien les tendances négatives qui s’exercent dans la politique ukrainienne. Nous devons apporter des réponses à cela.

M. Shevchenko est prêt à renoncer à ses pouvoirs de lui-même si, comme je l’espère, vous soutenez M. Vlasenko. Nous sommes favorables à ce projet de résolution, mais je vous lance un appel pour appuyer l’amendement qui a été signé par différents groupes politiques.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Orobets.

Mme OROBETS (Ukraine)* – Chers collègues, je voudrais vous demander de vous souvenir de son nom : Sergyi Vlasenko. Et souvenez-vous de son histoire, car le souvenir attaché à cet homme sera son seul recours. Un homme courageux, un avocat et un élu, qui a pris le risque de défendre une femme en danger, Mme Ioulia Timochenko. Il s’est levé pour la défendre au parlement, et c’est pour cela qu’on le punit.

C’est l’histoire du droit fondamental d’un élu qui est foulé au pied. Et voilà comment l’on peut maintenir sous le règne de la terreur un parlement national ! Comme vous le savez, cinq de nos collègues sont soumis à cette peur. En fait, vous ne savez pas quand vous aurez la permission de traverser la frontière, vous ne savez jamais si vous pourrez participer à la prochaine partie de session, celle de juin, de l’Assemblée parlementaire. Le peuple ukrainien a élu M. Vlasenko, et non la Haute Cour administrative. Ce n’est donc pas une question de légitimité de pouvoir qui se pose, mais bien la question de savoir comment empêcher la légalisation de la destruction du Parlement ukrainien.

Je vous demande, chers collègues, de ne pas soutenir la décision de la Haute Cour administrative visant à déchoir de son mandat M. Vlasenko. Je vous demande d’adopter notre amendement qui demande que l’on reconnaisse qu’un problème existe en Ukraine. Je vous demande de trouver le temps d’analyser cette situation en profondeur, peut-être en commission de suivi.

Je vous en conjure, sans quoi un grand pays comme le mien se retrouvera abandonné par la démocratie. Il faut lutter contre la peur, car c’est une lutte pour la liberté.

Je vous demande, chers collègues, de vous souvenir de ce nom et de cette histoire : Sergyi Vlasenko, qui est une personne courageuse, n’est plus protégé par l’immunité parlementaire et peut être emprisonné à tout moment. C’est pour cela qu’il faut absolument se souvenir de son nom et de son histoire. Les rapporteurs et les journalistes occidentaux doivent s’en souvenir. C’est l’unique chance pour mon peuple de pouvoir parler librement, ici dans cette Assemblée !

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est maintenant épuisée. J’appelle la réplique de la commission.

Madame la rapporteure, vous avez la parole.

Mme VUČKOVIĆ (Serbie), rapporteure* – Nous avons montré que nous sommes tous préoccupés par la déchéance du mandat parlementaire de M. Vlasenko et que nous ferons tous les efforts nécessaires pour défendre nos parlementaires dans les Etats membres.

Utilisons tous les outils, tous les moyens mis à notre disposition pour pouvoir examiner plus à fond cette affaire.

Dans le cadre du mandat de la commission du Règlement, nous ne pouvions pas nous livrer à une analyse d’un système judiciaire ou de décisions de justice d’un pays membre. Nous n’avions donc pas d’autre choix que de formuler la résolution comme nous l’avons fait.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles a présenté un projet de résolution sur lequel un amendement a été déposé.

Je vous rappelle que, en application de l’article 7.4 de notre Règlement, M. Shevchenko, membre de la délégation ukrainienne dont les pouvoirs sont contestés, ne peut participer aux votes.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement n° 1, déposé par MM. Sobolev, Ariev, Vareikis, Toshev, Connarty, Koszorús, Mihalovics, Mme Orobets, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, après les mots « mandat parlementaire national », à insérer les mots suivants : « à l’issue d'une procédure qui aurait été entachée de nombreuses violations et ».

La parole est à M. Sobolev pour soutenir l’amendement n°1.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Peut-être qu’il s’agit d’une situation où les deux parties soutiennent ce rapport, car il brosse un tableau excellent de la situation et nous offre un début de solution.

Notre amendement est très concret : il concerne le cas précis de M. Vlasenko qui a été démis de son mandat par notre Cour administrative contrairement aux valeurs du Conseil de l’Europe. Cet amendement permettrait de résoudre beaucoup de questions.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Popescu contre l’amendement.

M. POPESCU (Ukraine)* – Cet amendement contredit le contenu du rapport et ne trouve pas sa place dans cette résolution. Il est contreproductif et je vous demande de le repousser.

LE PRÉSIDENT – Quel est l’avis de la commission ?

Mme VUČKOVIĆ (Serbie), rapporteure* – Défavorable.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix l'amendement.

L'amendement n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13193.

Le projet de résolution est adopté (93 voix pour, 5 voix contre, 8 abstentions).

2. Les réfugiés syriens en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Irak :

comment organiser et soutenir l’aide internationale ?

Débat d’actualité

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle notre débat d’actualité sur les réfugiés syriens en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Irak : comment organiser et soutenir l’aide internationale ?

Je vous rappelle que le temps de parole de chaque intervenant a été limité à 3 minutes, à l’exception du premier orateur, M. Marcenaro, désigné par le Bureau parmi l’un des initiateurs du débat, qui dispose de 10 minutes. Si vous en êtes d’accord, puisque nous disposons d’un peu de temps, je vous propose d’accorder quatre minutes aux autres intervenants.

Il n’y a pas d’opposition ? Il en est ainsi décidé.

Je vous indique que nous devrons interrompre la liste des orateurs vers 11 heures 55 pour pouvoir écouter le discours de M. Antoni Martí, chef du gouvernement de l’Andorre.

La parole est à M. Marcenaro, premier orateur désigné par le Bureau.

M. MARCENARO (Italie)* – Monsieur le Président, le débat, qui avait été demandé par deux présidents de groupe politique, Mme Brasseur et M. Kox, a lieu après la visite il y a une quinzaine de jours de la sous-commission du Moyen-Orient en Jordanie et dans les Territoires palestiniens, notamment au camp de Zaatari, un camp situé à proximité de la frontière syrienne. Cette visite a été pour nous très impressionnante et j’aimerais vous citer quelques chiffres.

Ce camp a été inauguré le 28 juillet 2012. Quinze jours plus tard, le camp comptait déjà 30 000 personnes. En novembre : 45 000. En janvier : 65 000. Le 2 février 2013, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés y a dénombré 76 000 personnes. Le 16 avril, lorsque nous étions sur place, ce nombre était passé à quelque 140 000 personnes. Chaque jour, chaque nuit, 1 500 à 2 000 personnes arrivent dans ce camp.

C’est comme une grande ville, où vivent des personnes privées de tout, avec tous les problèmes de gestion et d’administration d’une grande ville, à quelques kilomètres de la guerre et de la frontière syrienne.

Je ne veux pas ici reprendre la discussion que nous avons déjà eue en avril 2012, lorsque l’Assemblée s’était prononcée sur le problème du conflit syrien. Nous avons également discuté en automne sur la base du rapport présenté par M. Santini au nom de la commission des réfugiés. Mais aujourd’hui nous sommes dans une situation où il n’est plus possible d’envisager une évolution positive qui permettrait de mettre fin à ce conflit.

Le tableau que nous avons sous les yeux est celui d’une aggravation du conflit. Les événements qui ont poussé tant de personnes à fuir vont se poursuivre et même s’aggraver.

En avril 2012, nous parlions de 30 000 réfugiés syriens, aujourd’hui il y en a 1 300 000 ! On en compte 450 000 réfugiés en Jordanie, 430 000 au Liban, 292 000 en Turquie, 132 000 en Irak, 50 000 en Egypte.

J’ajouterais que si nous voulions faire un comptage plus précis, nous devrions ajouter les personnes déplacées en interne qui se comptent par centaines de milliers en Syrie. Le problème concerne particulièrement les Kurdes, qui ont été déplacés vers la région kurde où il est possible de leur garantir un peu plus de protection. En revanche, d’autres personnes déplacées de l’intérieur ne bénéficient d’aucune aide internationale et se heurtent à des problèmes extrêmement sérieux.

Les difficultés de ces pays d’accueil sont immenses, plus encore lorsqu’ils sont petits, et risquent de fragiliser leur stabilité.

Il convient de tenir compte des sacrifices énormes que consentent des pays tels que la Jordanie ou le Liban pour porter assistance aux réfugiés, tant il est vrai qu’il faut fournir à ces derniers de la nourriture, de l’eau, leur prodiguer des soins de santé, offrir une formation à une population constituée pour une large part d’enfants, assurer à tous une sécurité et une légalité, leur apporter des biens matériels essentiels, des services et une organisation, le tout dans un contexte mouvant. Il convient de souligner que dans le camp de Zaatari, des activités illégales sont visibles. Des hommes viennent y recruter des mercenaires ou des enfants soldats.

Tous ces réfugiés jouent un rôle de catalyseur d’une réaction chimique : leur afflux déstabilise la région tout entière. En Jordanie, il faut leur apporter de l’aide alors que l’eau n’est pas présente en quantité suffisante pour les habitants eux-mêmes. De même, il faut fournir de l’électricité. Il faut savoir que cette aide est susceptible d’être remise en cause subitement dans ce pays qui a conclu des accords de retour avec les autorités internationales.

Le Liban ayant été fortement marqué par l’expérience des camps palestiniens, il n’a pas voulu créer de nouveaux camps ; d’autres formes d’accueil des réfugiés ont donc été organisées. Dans ce pays qui vit dans un équilibre politique extrêmement fragile et qui est au bord d’une guerre interne, un pays où l’on trouve le Hezbollah, les partisans de la Syrie de Bachar-el-Assad et ceux de l’Iran, l’afflux de réfugiés pourrait engendrer des déséquilibres.

Il nous faut rappeler à la communauté internationale ses devoirs de solidarité, en reconnaissant en premier lieu les efforts considérables consentis par la Jordanie, la Turquie et l’Irak, et en second lieu en tenant compte des aspects politiques de la question. C’est pourquoi il faut apporter un soutien politique pour empêcher que ces événements ne deviennent un facteur ultérieur de déstabilisation, ce qui est la dernière chose que nous puissions souhaiter à ces pays qui veulent la paix et la stabilité, un bien précieux que la communauté internationale doit protéger.

Je souhaite que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe lance un appel à la communauté internationale.

Je remercie les chefs des groupes politiques qui ont pris l’initiative d’ouvrir ce débat d’actualité, qui nous permettra d’honorer nos engagements.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Marcenaro, merci beaucoup pour cette introduction.

Pour des raisons pratiques, Mme Durrieu a demandé à s’exprimer en premier au titre des porte-parole des groupes politiques. Je pense, mes chers collègues, que vous n’y verrez aucun inconvénient. Je lui cède donc la parole au nom du Groupe socialiste.

Mme DURRIEU (France) – La sous-commission pour le Moyen-Orient s’est rendue sur place en commençant sa visite par la Jordanie, car il était essentiel que nous prenions toute la mesure de cette situation dramatique qui frappe l’ensemble de la région - la Syrie, la Jordanie, le Liban, la Turquie, l’Irak.

C’est un drame. Hier, nous avons déclaré que ce qui se déroule en Syrie est une tragédie. Une tragédie qui vient s’ajouter au conflit israélo-palestinien, au cœur de toutes les crises. On compte les morts et les réfugiés…

J’ai eu l’occasion de visiter les camps syriens en Turquie dans la région de Yattia. La Turquie maîtrise encore la situation dans ces camps, consentant des efforts remarquables. Je l’ai souligné aux responsables turcs chaque fois que l’occasion m’en a été offerte.

Je veux maintenant concentrer mon propos sur le camp jordanien de Zaatari. Le choc et l’émotion ont été considérables. Cent quarante mille personnes sont concentrées sur un espace de moins de dix kilomètres carrés, des camps de tentes qui ont vu passer plus de 500 000 Syriens et qui en accueillent de 2 000 à 5 000 toutes les nuits. Soixante-quinze pour cent des réfugiés sont des femmes, des enfants, des vieillards. Soixante pour cent sont âgés de moins de 18 ans. Les besoins quotidiens sont immenses : 1 million de dollars par jour, 3,5 millions de litres d’eau. Et ces besoins vont doubler !

Les soins médicaux sont assurés par trois hôpitaux : un petit hôpital français, un grand hôpital dressé par les Marocains et un troisième par les Italiens. Bravo au HCR ! Merci à la Jordanie !

Les risques d’insécurité sont immenses, la situation explosive : la colère monte chez les Jordaniens qui ne peuvent plus supporter seuls, au quotidien, ce fardeau, quelle que soit leur générosité. On risque donc de voir se fermer les frontières de la Jordanie. Nous risquons aussi d’assister à l’affaiblissement et à la déstabilisation de cet Etat, dont nous avons besoin qu’il demeure un élément de stabilité. Chacun imagine la fin qui serait dramatique : bataille de Damas, bataille pour la maîtrise des sites chimiques... Comment seraient utilisés ces sites dont on ne sait qui s’en serait emparé ? Se dessine l’éventualité de voir les armes se retourner contre les camps et les réfugiés, notamment contre le camp de Zaatari.

Nous avons eu un long entretien avec le roi de Jordanie, qui nous a expliqué que Bachar-el-Assad tomberait faute d’énergie et de nourriture, non en raison du conflit, et qu’il fallait soutenir les rebelles, ajoutant aussitôt « Pas les extrémistes ». Oui, qui donc ? L’opposition laïque constituée des minorités. Terrible situation, terrible impuissance de la communauté internationale, qui marquera l’histoire du sceau de la honte !

Il faut agir rapidement en aidant la Jordanie, la Turquie, le Liban, ces pays d’accueil des réfugiés que nous n’aurons pas su sauver.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Walter, au nom du Groupe démocrate européen.

M. WALTER(Royaume-Uni)* – Je n’ai pas été en mesure de participer à la visite de la sous-commission sur le Proche-Orient dans les camps de Jordanie. Toutefois, l’an dernier, j’ai effectué deux visites dans des camps de réfugiés en Turquie. J’en profite pour féliciter nos collègues turcs pour l’assistance qu’ils ont apportée à des centaines de milliers de Syriens.

Soixante-dix mille Syriens sont morts dans ce conflit. Quatre millions de Syriens sont considérés comme déplacés intérieurs.

Selon le Haut-Commissariat des réfugiés des Nations Unies, à la fin du mois de mars, le nombre des réfugiés syriens avait progressé parallèlement à l’escalade du conflit.

Ce sont 420 000 d’entre eux qui vivent en Jordanie, 185 000 en Turquie, 325 000 au Liban et plusieurs dizaines de milliers en Irak. On dénombre plus d’un million de réfugiés au total, ce chiffre me semblant d’ailleurs sous-estimé. La plupart sont des femmes, des enfants souffrant de traumatismes psychologiques et dont plus de 50 % ont moins de onze ans et, enfin, des vieillards. Ils pèsent d’un poids très lourd sur les pays d’accueil, sur le plan tant économique que social.

Lors d’une récente conférence qui s’est déroulée à Koweït, les pays bailleurs de fonds ont promis de débloquer 1,5 milliard de dollars à des organismes de secours qui, à ce jour, n’ont reçu que 200 millions, ce qui est inacceptable. Les nations qui se sont engagées doivent être fidèles à leur parole car, je le répète, la charge que supportent les pays d’accueil est considérable et dépasse leurs capacités.

La pression qui s’exerce sur la Jordanie, sur ses réserves d’eau, son économie, ses établissements scolaires, est énorme : 40 000 jeunes syriens y suivent des études et les services de santé sont dépassés par un afflux quotidien de 3 000 réfugiés. Si une telle cadence se maintient, ce seul pays comptera rapidement un million de réfugiés et les déséquilibres sociaux et démographiques ne pourront que s’accroître dans les Etats limitrophes.

Nous sommes tous responsables de ces pays comme nous le sommes pour mettre un terme aux violences perpétrées en Syrie. Toutes les parties impliquées dans le conflit doivent respecter la Charte des Nations Unies et la Convention des droits de l’homme. Il y a urgence humanitaire !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Kox, pour le Groupe de la Gauche unitaire européenne.

M. KOX (Pays-Bas)* – Je remercie M. Marcenaro ainsi que Mme Durrieu, qui était à la tête de notre délégation en Jordanie.

La Jordanie, l’Irak, le Liban, la Turquie ne sont pas responsables de la situation en Syrie. C’est nous, la communauté internationale, qui pensons que ces pays doivent accueillir les réfugiés alors qu’un millier de personnes quitte quotidiennement la Syrie et que leur nombre s’élèvera au total à quatre millions à la fin de l’année.

Comme nous l’avons constaté, le fardeau qu’ils supportent est très lourd. Cette crise menace en particulier la sécurité de la Jordanie, où le nombre de réfugiés augmente de jour en jour. La Turquie est, elle aussi, à bout de ressources. Pendant ce temps, le reste du monde contemple la tragédie. Les Nations Unies financent seulement une partie de l’aide alors que le système bancaire reçoit des milliards ! Quelle hypocrisie ! Les pays limitrophes de la Syrie seront bientôt submergés et il ne faut pas attendre qu’ils s’écroulent. Les promesses qui ont été faites doivent donc être tenues et la totalité des financements prévue par les Nations Unies doit être délivrée. Arrêtons de trouver des excuses !

En outre, il convient d’accroître les aides bilatérales avec ces pays afin qu’ils puissent continuer à soutenir leurs propres populations et éviter ainsi des réactions violentes. Une aide humanitaire doit leur être apportée en coordination avec les Nations Unies.

Augmentons également les pressions politiques sur le Gouvernement syrien, sur la Fédération de Russie et les États-Unis afin de parvenir à un cessez-le-feu. Cette guerre civile doit cesser !

Ceux qui pensent que ces problèmes concernent la seule Syrie se trompent. Ce village qu’est devenue la planète ne peut accepter une telle bombe à retardement.

Enfin, je souhaite que le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et le Président de notre Assemblée parlementaire se rendent dans cette région le plus rapidement possible afin de voir comment les Etats membres du Conseil de l’Europe peuvent aider ces quatre pays qu’il est de notre responsabilité de ne pas abandonner.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Santini, pour le Groupe du Parti populaire européen.

M. SANTINI (Italie)* – Au nom du Groupe du Parti populaire européen, je remercie Mme Brasseur et M. Kox, qui sont à l’origine de ce débat. Je remercie également M. Marcenaro qui nous a décrit avec passion la dramatique situation sociale, politique et humanitaire de ces quatre pays.

Un débat d’urgence a déjà été organisé ici même sur la situation syrienne par la commission que je préside mais il n’est évidemment pas inutile d’y revenir tant les chiffres dont nous disposons attestent de son aggravation. Nous pensions avoir atteint une limite, eh bien non, jour après jour, la situation se dégrade encore !

Nous sommes concernés à double titre : il nous appartient de défendre les droits de l’homme ; ce drame se déroule à deux heures de vol de l’Europe, laquelle pourrait exploser s’il devait se perpétuer.

La commission des migrations a entendu lundi un rapport de M. Vincent Cochetel, directeur du bureau pour l’Europe du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui a fait état de données mises à jour : 1,3 million de Syriens ont dû quitter leur pays, 420 000 sont au Liban, 440 000 en Jordanie, 290 000 en Turquie, 132 000 en Irak et 50 000 en Égypte ; chaque jour, 8 000 personnes fuient la Syrie. Au moment même où nous discutons, ces chiffres sont déjà obsolètes.

Parmi ces réfugiés, 70 % sont des femmes et des enfants qui fuient la violence et les tortures. Mais on ne peut pas dire que, dans les camps de réfugiés, la situation soit vraiment meilleure. Comme l’a rappelé M. Marcenaro, on y trouve beaucoup de motifs d’inquiétude.

Nous devons cependant rendre hommage à ces pays qui s’engagent beaucoup pour aider les réfugiés. Nous ne devons pas nous croiser les doigts et rester des spectateurs condescendants. Nous devons être des partenaires de ces pays et nous engager concrètement. L’Europe doit se réveiller pour enfin agir !

Comment les pays de la zone pourront-ils résister à ces pressions incroyables ? Comment éviter que ne se produise une crise politique au-delà de la crise économique et sociale ? Comment éviter l’explosion des systèmes de ces pays qui accueillent aujourd’hui les réfugiés ? Tous ces risques sont hélas bien réels.

Au-delà de nos prises de position d’aujourd’hui, nous devrons trouver des moyens concrets pour faire comprendre à ces populations que nous sommes avec elles, avec ceux qui fuient, avec ceux qui les accueillent. Nous ne voulons pas nous contenter de constater les malheurs des autres. Nous voulons agir, en particulier en utilisant dès aujourd’hui l’arme économique.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Fiala au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

Mme FIALA (Suisse)* – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, chers collègues, ce débat est très émotionnel. La guerre civile en Syrie est une véritable tragédie. En tant que membre du groupe d’experts pour les centres de détention, je me suis rendue dans de nombreux camps aux frontières de Schengen, en Grèce notamment. Plus récemment, j’ai visité la Palestine et la Jordanie.

Je remercie la commission des questions politiques et de la démocratie et la sous-commission pour le Proche-Orient de la visite très importante qu’elles ont organisée. Vous avez entendu notre collègue, Mme Durrieu, qui a fait à cette occasion un extraordinaire travail. Je lui adresse tout mon respect et mon admiration. Vous avez entendu des chiffres que je ne répèterai pas.

Je vous encourage à ouvrir votre cœur devant ce qui se passe dans cette région. Après notre passage en Jordanie et en Palestine, je ne peux qu’être d’accord avec cette phrase du ministre des Affaires étrangères de Palestine : « Un pessimiste n’est rien d’autre qu’un optimiste bien informé. » Lorsque l’on rentre chez soi après avoir vu ces camps de réfugiés, rien ne vous pousse à être optimiste. On est plutôt triste.

Si vous aviez vu de vos propres yeux ce que représente l’accueil de 500 000 réfugiés, des enfants, des personnes âgées, des malades, vous ressentiriez une grande humilité, vous perdriez toute innocence et vous seriez transformés. La catastrophe humanitaire a pris une telle ampleur qu’il est impossible d’oublier ce que nous avons vu.

La Jordanie doit accueillir chaque jour 2 000 réfugiés de plus qui se battent pour l’eau, la sécurité... Lorsque j’écoute certains discours dans mon propre pays sur les réfugiés, j’ai franchement honte.

J’ai regardé dans les yeux des Syriens qui mendiaient en Grèce dans un centre de détention. Ils préfèreraient mourir que de passer un an de plus dans ce centre. Ils ne cherchent pas à s’installer en Europe, n’ayez crainte. Ils veulent rentrer chez eux, reconstruire leurs villes, leurs maisons.

Quand vous rentrerez chez vous, chers collègues, acceptez cette responsabilité qui revient à chacun d’entre vous pour cette tragédie humanitaire. Ceux qui la subissent ont besoin de beaucoup d’argent, de notre sympathie et que nos cœurs restent ouverts.

LE PRÉSIDENT – Nous disposons d’un peu plus de temps que prévu. Si éventuellement parmi vous, mes chers collègues, certains ne sont pas inscrits sur la liste des orateurs mais souhaiteraient s’exprimer à l’occasion de ce débat très important et très sensible, vous pouvez vous faire connaître auprès du secrétariat.

La parole est à M. Dişli.

M. DIȘLI (Turquie)* – La crise humanitaire en Syrie ne concerne pas uniquement les pays voisins mais elle a des retombées sur la communauté internationale tout entière, sur le droit international et même sur la conscience internationale.

La Turquie a une frontière commune de 911 kilomètres avec la Syrie. La réaction des pays voisins a probablement atténué la gravité de la situation. En effet, si nous n’avions pas accru notre aide aux Syriens, la communauté internationale aurait assisté à bien plus de souffrances et de drames.

Le plus important, c’est de mettre un terme à ce conflit. La Turquie et d’autres pays de la région font de leur mieux pour aider les Syriens. Il incombe à la communauté internationale de mettre un terme à ces massacres.

Une réunion des ministres des Affaires étrangères du groupe des amis de la Syrie s’est tenue au palais du sultan Adil à Istanbul, le 20 avril. Elle comprenait la Turquie, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, le Qatar, l’Arabie saoudite, la Jordanie, l’Egypte, l’Italie, l’Allemagne, la France et les représentants de la coalition nationale syrienne et des forces d’opposition révolutionnaires. Les participants ont clairement exprimé leur soutien à cette coalition nationale syrienne. Ils ont affiché une volonté politique réelle de mettre un terme aux massacres en Syrie. Nous espérons que cet appel ferme recevra, de toutes les capitales du monde, une réponse tout aussi ferme.

La communauté internationale, toutes les parties concernées, devraient unir leurs forces pour mettre un terme à ce conflit en Syrie. Chaque vie innocente perdue est une tache sur la conscience de l’humanité. Il faut mettre un terme à ce régime qui massacre. Il faut aider le peuple syrien à faire entendre ses droits, tout en préservant l’intégrité, la souveraineté et l’unité nationale de la Syrie.

Le plus important, c’est d’unir nos forces pour mettre un terme à ce conflit, afin que d’autres innocents ne meurent pas.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Huovinen.

Mme HUOVINEN (Finlande)* – Mes chers collègues, nous souffrons tous ici face au spectacle de la souffrance humaine causée par la guerre civile en Syrie. Il est frustrant de constater que la communauté internationale n’a pas les moyens d’aider les réfugiés et de résoudre ce conflit.

Cette guerre dure maintenant depuis plus de deux ans. Les Nations Unies estiment que plus de 4 millions de personnes dans la région ont besoin d’assistance. Les réfugiés et les personnes déplacées sont plus de 1,3 million, dont la moitié sont des enfants et des jeunes. La guerre civile en Syrie constitue une menace pour les Syriens eux-mêmes, pour toute la région et pour la sécurité même de l’Europe.

Lors de la réunion de la commission des questions politiques, organisée à Turin en décembre dernier - et je remercie M. Marcenaro pour cette réunion très intéressante -, des images de la ville de Homs nous ont été projetées. L’une d’elles m’a particulièrement frappée. Elle montrait une petite fille, dans un hôpital, qui essayait d’éponger une flaque de sang. Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à mon propre fils, d’âge équivalent et dont la vie est bien différente...

Les guerres sont cause de terribles souffrances. Des familles sont obligées d’abandonner leurs maisons, sont dispersées, perdent des êtres chers. Les méthodes utilisées dans une guerre sont toujours cruelles, mais l’une des plus horribles est sans doute le recours à la violence sexuelle. Malheureusement, avec le harcèlement et le trafic d’êtres humains, la violence sexuelle ne touche pas seulement les zones de combat, mais aussi les camps de réfugiés.

L’année dernière, le G8 s’est réuni à Londres et les ministres des Affaires étrangères ont adopté une déclaration sur la prévention de la violence sexuelle. Ils se sont entendus sur une coopération dans ce domaine afin d’y mettre fin dans les conflits armés. Cette déclaration constitue une avancée importante et témoigne d’une prise de conscience de la gravité du problème, qui jusque-là avait trop peu fait l’objet de déclarations claires. Les ministres des Affaires étrangères du G8 se sont également entendus pour financer des enquêtes sur les crimes sexuels, pour apporter assistance aux victimes et pour constituer un groupe international d’experts envoyés dans les zones de conflit.

La communauté internationale et le Conseil de l’Europe doivent rechercher les voies et les moyens d’aider les pays confrontés à l’afflux massif de réfugiés syriens. Ainsi, nous devons garantir le respect des droits de l’homme dans les camps de réfugiés, en veillant tout particulièrement à la situation des enfants et des jeunes.

Pour conclure, je demande au Conseil de l’Europe de suivre l’exemple du G8 et d’adopter une position très ferme sur la question de la violence sexuelle dans les guerres et les conflits armés.

LE PRÉSIDENT – MM. Hancock et Makhmutov, inscrits dans le débat, n’étant pas présents dans l’hémicycle, la parole est maintenant à M. Kayatürk.

M. KAYATÜRK (Turquie)* – Une tragédie humanitaire se déroule en Syrie depuis près de trois ans, sous les yeux de la communauté internationale. Ce pays est devenu le théâtre de violations extrêmement graves des droits de l’homme. Les forces du régime de Bachar al-Assad continuent de bombarder les villes et de tuer des civils. La situation ne cesse de s’aggraver et près de 100 000 personnes ont déjà perdu la vie dans ce conflit. S’ajoutent à cela 3,6 millions de personnes déplacées sur le plan interne et une économie dévastée. Dès lors, plus de 5 millions de personnes ont aujourd’hui désespérément besoin d’assistance. Le nombre de réfugiés syriens accueillis dans les pays voisins dépasse les 1,2 million de personnes, dont 51 % sont des enfants.

La Turquie fait de son mieux pour faire face à cette catastrophe humanitaire. Le nombre de réfugiés syriens en Turquie atteint aujourd’hui 200 000 personnes. La Turquie a déjà dépensé près de 1,5 milliard de dollars pour leur venir en aide.

Mes chers collègues, mon pays se félicite de la constitution de la Commission d'enquête internationale indépendante sur la Syrie par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. La situation syrienne n’est plus tenable et une solution doit être trouvée pour garantir immédiatement la sûreté et la sécurité du peuple syrien. Quant aux responsables de cette tragédie humanitaire, ils doivent savoir qu’ils ne bénéficieront d’aucune impunité et qu’ils devront assumer les conséquences de la guerre.

Les Syriens sont tout à fait capables de se doter d’un système démocratique et de résister aux groupes extrémistes. Le problème de la Syrie n’est pas ce que pourront faire demain ces groupes radicaux, mais ce que fait aujourd’hui le régime brutal de Bachar al-Assad.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Memecan.

Mme MEMECAN (Turquie)* – La situation de la Syrie est chaque jour plus cruelle. D’après le HCR, il y a aujourd’hui plus de 1 million de réfugiés dans la région.

Je me suis rendue dans des camps en Turquie et en Jordanie. En Turquie, nous considérons les réfugiés syriens comme nos invités. La Jordanie fait également tout son possible pour les accueillir dignement. Les enfants vont à l’école et nous cherchons à ce que les adultes utilisent au mieux le temps qu’ils passent dans les camps. La Turquie compte actuellement près de 300 000 réfugiés syriens, et 200 000 vivent dans des villes, chez des amis.

La Jordanie, quant à elle, accueille plus de 100 000 réfugiés syriens et continue de répondre aux besoins des nouvelles vagues de réfugiés, en les logeant, en les nourrissant et en les soignant. Malheureusement, les ressources de nos pays sont limitées et le fonctionnement des camps est très coûteux. Le montant dépensé par la Turquie pourrait bientôt approcher 1,5 milliard de dollars. Les administrateurs du HCR évaluent le coût de fonctionnement d’un camp à 1 million de dollars par jour.

Je vous demande de transmettre ces chiffres à vos gouvernements afin qu’ils contribuent eux aussi. En effet, combien de journées ont-elles été financées par la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni ? Posez la question à vos gouvernements et à vos peuples pour qu’ils nous aident à faire face à ce drame. Même si c’est une somme importante, chaque million de dollars que vous donnez ne pourra financer qu’une journée dans un seul camp en Jordanie. Faites donc preuve de générosité !

Nos pays essaient d’atténuer la souffrance des réfugiés. Sans cette aide, les réfugiés souffriraient encore plus. Quel que soit le coût, nous sommes décidés à ne pas laisser les réfugiés livrés à leur destin. Nous les aiderons à vivre dans la dignité.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Shlegel.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Comme on le sait, les réfugiés ne viennent pas de nulle part. Je voudrais donc, pour ma part, examiner avec vous les causes de leur apparition. Or, sur ce thème, l’hypocrisie et le nombre de mensonges proférés sont saisissants. On considère très généralement que l’Europe et la société occidentale sont civilisées et qu’elles promeuvent les idéaux de la démocratie et des droits de l’homme. Quels sont cependant les objectifs de l’Europe en Syrie ?

S’agit-il de construire la démocratie ? Allez donc dire cela en Libye, en Irak, au Qatar ou en Arabie Saoudite ! On vous rira au nez.

S’agit-il de défendre les droits de l’homme ou de lutter contre la catastrophe humanitaire ? Allez raconter cela aux parents ayant perdu leurs enfants ou aux personnes ayant perdu toute leur famille, ainsi que leur travail et dont la vie est brisée pour de nombreuses années !

Peut-être alors l’Europe, ou une partie d’entre elle, souhaite-t-elle lutter contre le terrorisme en Syrie ? Eh bien, non. C’est même le contraire : comme en Libye, on aide en fait les terroristes, on leur livre des armes et on les nomme « insurgés » – c’est d’ailleurs le nom que l’on donnait aux combattants tchétchènes. Or on a bien vu, à Beslan et à Nord-Ost, à quel point ils étaient des « insurgés ». N’est-il pas cynique de les appeler ainsi ?

Peut-être pensez-vous que cela ne vous concerne pas, mais je suis persuadé que la moitié au moins des Etats membres du Conseil de l’Europe pourrait connaître le même sort. Attendez dix ou quinze ans et vous verrez ! Doutez-vous qu’il soit possible qu’on fasse un jour sauter dans vos rues des cocottes-minute bourrées d’explosifs ? Eh bien, j’ai une mauvaise nouvelle : on ne peut pas se mettre d’accord avec les terroristes. Tous les moyens déployés pour aider et armer les combattants auront inévitablement pour conséquence de faire couler le sang de civils innocents.

Si l’Europe ne construit pas la démocratie, si elle ne défend pas les droits de l’homme et ne lutte pas contre le terrorisme mondial, que fait-elle donc en Syrie ? Une partie des pays européens ne fait rien ; ils se contentent d’observer. Or on sait bien que ceux qui se contentent d’observer deviennent un jour victimes. L’autre partie, quant à elle, s’ingère activement et aide les terroristes. Il ne s’agit pourtant pas du tout d’une guerre civile en Syrie : c’est sous le masque d’une prétendue guerre civile que des pays tiers agressent cet Etat pour avoir accès à certaines ressources, comme cela a déjà été le cas en Libye. Il en a d’ailleurs été de même en Irak, où l’on prétendait chercher des armes chimiques et où, autant que je sache, l’on n’a jamais rien trouvé d’autre que du pétrole bon marché.

Nous représentons tous nos citoyens, dont la plupart sont des gens normaux, qui travaillent, ont des enfants qu’ils élèvent et voyagent. Les dizaines de Syriens morts étaient comme nos électeurs ; c’est d’ailleurs la même chose pour les réfugiés, qui n’ont plus de toit sur la tête et sont livrés aux ambitions destructrices de la politique inhumaine de certains Etats. Il est indispensable de cesser d’apporter de l’aide aux combattants. Il faut aussi, et avant toute autre chose, nommer les choses par leur nom. Je vous exhorte à le faire, je vous demande de faire preuve de courage. Demandez à ce que l’on mette un terme aux actes de violence.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Lord Anderson.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – Si l’on parle d’intervention extérieure, cela concerne aussi la Russie, qui apporte son soutien au régime syrien pour des raisons tenant à sa propre sécurité.

La Russie et l’Iran alimentent ce régime brutal qui, selon tous les critères internationaux, opprime son peuple. Le Conseil de sécurité des Nations Unies est paralysé, en grande partie du fait de la position de la Russie. Nous connaissons la tragédie que vivent les pays limitrophes du fait du grand nombre de réfugiés qui afflue vers eux. Il est vrai que se pose aussi le problème de ceux qui sont restés en Syrie. Ce sont là autant de problèmes que la communauté internationale ne peut pas régler, ce qui explique d’ailleurs l’ampleur de la crise, fort bien décrite par Mme Durrieu et M. Marcenaro.

Je reviens de la visite de la sous-commission avec un certain nombre d’impressions.

D’abord, je veux dire mon admiration pour le travail humanitaire qui est accompli sur place. Je salue l’effort considérable accompli par la Jordanie, qui est un petit pays, pour accueillir un grand nombre de réfugiés, qui pèsent lourdement sur les ressources du pays en termes d’énergie et d’éducation.

Ensuite, il faut souligner l’incapacité de la communauté internationale à tenir ses promesses : seul un tiers des fonds promis au HCR est arrivé.

Enfin, cette aide n’est qu’un emplâtre sur une jambe de bois ; il faut trouver une solution politique – or nous n’en voyons pas. Nous savons bien qu’un compromis est impossible car, en cas de guerre, on gagne ou on perd.

Que fait la communauté internationale pour préparer l’après-Assad ? En effet, un jour, la fin viendra – probablement lorsque la Russie aura compris qu’elle a misé sur le mauvais cheval. Le jour où le régime tombera, il y aura une nouvelle vague de réfugiés. Il est certain que le régime qui succédera à celui d’Assad héritera d’un pays détruit. De fait, les images que nous voyons à la télévision, qui sont filmées par des journalistes très courageux, montrent un véritable désert. Or il faudra reconstruire sur ce désert. Pour ce faire, il faudra un effort international massif. Je réitère donc ma question : préparons-nous l’après-Assad ? Vu ce que nous avons été capables de faire jusqu’à présent, quelle confiance peut-on avoir pour l’avenir ? J’espère que, lorsque nous rentrerons dans nos parlements nationaux, nous poserons à nos gouvernements cette question très simple : « Que faites-vous pour dégager les ressources qui seront nécessaires pour reconstruire sur ce désert qui restera à la fin du conflit ? »

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Sabella.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Lorsque la sous-commission sur le Proche-Orient s’est rendue en Jordanie et en Palestine, il est apparu que l’une des principales préoccupations était la situation des réfugiés syriens. Toutefois, il y en a une autre : le conflit israélo-palestinien et l’occupation de la Palestine par Israël.

Certes, l’Assemblée est préoccupée par l’urgence de la situation en Syrie, mais le soutien aux réfugiés syriens doit être mené de front avec le programme d’aide à la Syrie. M. Kox a demandé avec raison au Secrétaire Général et au Président Mignon de se rendre en Syrie pour trouver une solution à cette tragédie et contribuer à rétablir la stabilité du pays.

Nous sommes également préoccupés par la situation en Jordanie. En effet, la Jordanie a reçu une nouvelle vague de réfugiés, comme la Turquie et l’Irak, et les conséquences politiques peuvent être gravissimes. Les Nations Unies affirment que les financements ne sont pas suffisants pour accueillir les réfugiés de plus en plus nombreux. Il est urgent d’agir.

Par ailleurs, le Liban accueille 40 000 réfugiés palestiniens. L’Autorité palestinienne a versé près de 12 millions de dollars pour soutenir ces réfugiés, ce qui la place dans une situation très délicate.

Nous demandons au Conseil de l’Europe de soutenir la Jordanie. Cette crise aura un coût indirect très important pour les Etats de la région mais aussi pour les Etats membres du Conseil de l’Europe.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Blanco.

Mme BLANCO (Espagne)* – Je remercie M. Marcenaro pour son très complet exposé introductif.

Je remercie également M. Santini, le président de la commission des migrations, pour son travail. Comme l’ont montré les chiffres transmis par le Haut-Commissaire des Nations Unies aux réfugiés, chaque jour, 8 000 personnes, principalement des femmes et des mineurs, passent les frontières de la Syrie, le nombre de réfugiés dans les quatre pays limitrophes s’élève à 1,3 million de personnes, et l’on compte 4 millions de personnes déplacées qui ne jouissent d’aucune protection internationale.

M. Guterres, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, a reconnu que la communauté internationale n’a pas atteint les objectifs budgétaires fixés pour protéger les réfugiés et les personnes déplacées.

Tout cela nous ramène vingt ans en arrière, à la guerre des Balkans, au cours de laquelle la communauté internationale a pu, pour la première fois, sur la base d’un accord, fixer des quotas de personnes réfugiées et déplacées victimes de cette guerre. L’Europe tout entière avait reconnu ces quotas et chaque pays d’Europe a accueilli, pendant la durée de la guerre, un nombre important de réfugiés. Ainsi, les pays limitrophes des Balkans n’ont pas eu toute la charge de cette crise, contrairement à ce qui se passe aujourd’hui en Jordanie ou en Turquie.

Nous devons demander à nos gouvernements s’ils ont respecté leurs obligations financières à l’égard du Haut-Commissariat des Nations Unies et s’ils ont donné les moyens au Haut-Commissaire de mettre en place un système permettant de fixer des quotas pour ces personnes innocentes.

Je souhaite enfin vous faire part de la lettre d’une Syrienne que j’ai reçue il y a quelques jours. Voici ce qu’elle écrit : « Mon cœur saigne en voyant qu’il n’y a pas de réponse pour tous ces blessés, tous ces morts, tous ces exilés, partis dans les larmes et dans le sang. Il faut lancer un appel à la communauté internationale et à l’Europe. Donnez-nous un lieu sûr, écoutez-nous ! »

Ce courrier avait été adressé par cette femme à de nombreux responsables politiques. Il faut prendre en compte la situation des réfugiés et des personnes déplacées en Syrie.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Yatim.

M. YATIM (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Le peuple syrien continue à payer chaque jour, de son sang, le prix de son combat pour la liberté, dans l’espoir d’un changement démocratique permettant à toutes les composantes de la société de décider de leur destinée.

Violations de droits de l’homme, assassinats, mauvais traitements infligés aux populations civiles innocentes, toutes sortes d’abus dont les victimes sont des femmes, des enfants, sacrilèges de lieux de cultes – mosquées, églises –, destruction du patrimoine culturel, toutes sortes de barbaries que commettent les milices proches du pouvoir ont conduit à un exode massif des populations vers les pays voisins.

Fidèle à ses valeurs démocratiques et humaines, le Maroc a déployé, depuis le déclenchement du conflit, de grands efforts pour parvenir à une sortie de crise dans le cadre d’une approche proactive et responsable.

Dès le début de la crise, le Maroc a affiché son attachement à un règlement politique au travers d’une véritable transition démocratique, et a plaidé pour la mise en place d’un gouvernement puissant et crédible.

Le Maroc a confirmé son engagement en faveur du peuple syrien en accueillant le 12 décembre dernier la 4e réunion des Amis de la Syrie. Sur le plan humanitaire, le Maroc a déployé un hôpital médico-chirurgical dans le camp de Zaatari. Des dons en produits alimentaires, médicaments ainsi que des couvertures ont été également acheminés vers ce camp au profit des réfugiés syriens et tout particulièrement des personnes âgées et des enfants.

La visite du Roi du Maroc à ce camp, la première du genre pour un chef d’Etat, l’acheminement d’aide en faveur des populations syriennes déplacées au camp Gaziantep, en Turquie, sous forme de tentes conçues pour résister au froid hivernal manifestent le souci de solidarité du Maroc envers le peuple syrien.

Je veux enfin, au nom de ma délégation, saluer le sacrifice des peuples turc et jordanien et de leurs gouvernements respectifs qui ne cessent de démontrer leur solidarité et assistance aux réfugiés.

Je veux aussi faire appel à notre conscience parlementaire : agissons tous en faveur du peuple syrien ; exerçons les pressions nécessaires sur nos gouvernements pour que ceux-ci et les instances internationales assument leurs responsabilités dans le soutien du peuple syrien.

Je vous remercie de votre attention.

LE PRÉSIDENT – C’est nous qui vous remercions, Monsieur, de vous exprimer, en tant que partenaire pour la démocratie, sur un sujet aussi sensible.

En l’absence de Mme El Ouafi, inscrite dans le débat, la parole est maintenant à M. Ariev.

M. ARIEV (Ukraine)* – Ces dernières années, bon nombre de conflits ont appelé l’attention sur les réfugiés et la communauté internationale, très souvent, ne réagit pas assez rapidement. Prenez la guerre en Irak, les affrontements en Libye, la Syrie, tous ces exemples montrent que la société internationale n’est pas prête à réagir rapidement à des catastrophes humanitaires.

Le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations Unies se concentre principalement sur les affaires courantes. Certes, c’est important, mais cela ne répond pas à la nécessité d’une réaction rapide, et pas seulement en situation d’urgence.

L’origine du conflit en Syrie est la lutte pour le droit d’avoir le choix, le choix de voter pour un dirigeant. Ce sont des luttes pour les droits de l’homme et, malheureusement, beaucoup de victimes espéraient qu’il en soit ainsi.

Si nous voulons respecter les principes humanitaires, il faut essayer d’éviter les souffrances. C’est bien de faire des enquêtes, mais il faut regarder l’avenir.

Ma proposition est la suivante : en premier lieu, créer des forces d’aide aux réfugiés et, en second lieu, élaborer une convention permettant de venir en aide aux réfugiés. Tout Etat signataire de cette convention autoriserait l’entrée des réfugiés sur son territoire, car il faut pouvoir réagir à des situations d’urgence. Si vous en êtes d’accord, cette proposition pourrait être discutée plus avant au niveau international.

Il faut essayer de mettre en place des procédures systématiques destinées à éviter les conflits à l’avenir. Le prochain conflit éclatera on ne sait pas où ni quand, mais le sujet doit être abordé.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Schennach.

M. SCHENNACH (Autriche)* – La catastrophe humanitaire et les flots de réfugiés qui se déversent sur les pays limitrophes de la Syrie ont été décrits dans toute leur horreur, et je voudrais maintenant appeler votre attention sur un autre aspect de la question – je demande la compréhension de nos collègues britanniques et français.

L’Autriche boycotte toute livraison d’armes, y compris à la Syrie, car si cela fait longtemps que l’Autriche fournit un contingent, elle veut empêcher l’explosion de ce conflit vers Israël.

Des troupes autrichiennes ont été impliquées dans des escarmouches et, il y a deux ans, des soldats ont été enlevés au Liban. On ne peut pas prendre de risques. En Syrie, le Gouvernement croate a décidé de retirer ses soldats. A l’heure actuelle, les troupes autrichiennes et les quelques soldats qui sont restés sont là pour essayer de trouver une solution à la situation. Il faut plus de solidarité, car ce conflit risque de déborder et de prendre une ampleur effrayante. Il faut des forces de la paix en Syrie, mais aussi au Liban. Il faut absolument gonfler les contingents sur place, où nous sommes avec les Italiens.

Il convient de mieux saisir la dimension humanitaire de ce conflit. Il faut transmettre ce message à vos gouvernements. On ne peut accepter que l’embargo sur les armes soit levé en Syrie, quel que soit leur destinataire. L’Armée libre de Syrie (ALS) n’est pas une entité homogène. Il y a des milices d’Al Qaida armées et d’autres qui luttent dans l’Armée libre de Syrie. Les Kurdes, les Chaldéens et les chrétiens de Syrie essaient de maintenir leurs territoires libres des soldats de l’armée ordinaire syrienne ainsi que de l’ASL. Ces groupes sont ensuite protégés par d’autres milices.

Le contingent de soldats de la paix des Nations Unies doit donc être maintenu. C’est une situation très difficile. Je sais que l’Autriche rencontre d’extrêmes difficultés à livrer les équipements et autres matériels à nos troupes le long du Golan.

La Jordanie a connu différentes vagues de réfugiés. N’oubliez pas que deux millions de réfugiés irakiens se sont déversés en Syrie pendant le conflit en Irak et cinq cent mille en Jordanie. Aujourd’hui, s’ajoutent les réfugiés syriens, et le roi de Jordanie a réagi par la dissolution du parlement parce qu’effectivement, cela crée des déséquilibres au niveau social. Les institutions sont ébranlées en Jordanie. On déséquilibrerait encore plus ce pays si l’on retirait les troupes onusiennes.

Il faut absolument maintenir l’embargo sur la livraison d’armes en Syrie.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Mme Kapetanović.

Mme KAPETANOVIĆ (Bosnie-Herzégovine)* – En tant que citoyenne de Bosnie-Herzégovine, je crois avoir le droit de dire que je sais exactement ce que c’est que d’avoir plus d’un million de réfugiés, et quelles sont leurs souffrances. La plupart de ceux qui sont partis ne sont jamais rentrés de tous ces pays qui nous ont aidés et qui les ont accueillis – ce que nous apprécions, bien sûr.

En tant que médecin spécialisé en anesthésiologie et réanimation, je sais exactement à quoi ressemble le sang des victimes innocentes puisque, pendant cinq ans, j’ai eu à les soigner et parfois à les voir mourir.

Je suis entièrement d’accord avec M. Dişli et d’autres collègues lorsqu’ils parlent des mesures d’intervention. Je tiens à dire que la Turquie est un pays qui est connu pour sa disponibilité à aider et pour l’hospitalité qu’il a offerte, hier, aux citoyens bosniaques et, qu’il offre aujourd’hui aux réfugiés syriens.

M. Dişli a lancé un appel auquel, je pense, beaucoup de collègues s’associeront. Cet appel doit devenir celui de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à la communauté internationale. C’est un message fort que nous lui adressons afin de venir en aide au peuple syrien en trouvant une issue à cette guerre. Chaque être humain a droit à la vie et il n’y a aucune différence entre nous. Nous sommes tous des êtres humains. Je vous demande donc, je vous supplie même, de ne pas autoriser que la communauté internationale soit aussi lente dans son intervention que cela a été le cas en Bosnie-Herzégovine, qui a connu la tragédie de Srebrenica. Je ne souhaite cela à personne, nulle part dans le monde !

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Díaz Tejera.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Ce n’est pas tellement que l’on soit lent, c’est qu’au fur à mesure que l’on avance, l’on a affaire à de nouvelles tragédies.

Des tragédies humanitaires telles que celle-là, nous en avons connu tout au long de l’histoire. Ce qui est important, c’est moins l’évaluation de ce qui se fait, que la détermination des mécanismes à mettre en place pour réagir rapidement. L’élément temps est évidement important.

Au niveau international, il existe des mécanismes de prévention de crise, mais comme pour bon nombre d’autres normes, la difficulté est de faire en sorte que ces normes soient traduites dans les faits et aient une incidence sur la vie des personnes concernées par les conflits. Car tout cela prend beaucoup de temps.

Le plus important est de mettre un terme aux massacres. Ensuite, il convient d’aider les réfugiés et les blessés. Enfin, il importe de reconstituer l’Etat tel qu’il existait avant le conflit. Pour ce faire il existe de nombreux mécanismes, mais nous devons veiller à ce qu’ils s’appliquent rapidement.

Que pouvons-nous faire pour cela au Conseil de l'Europe ? Que pouvons-nous exiger de nos gouvernements ? Nous devons respecter les engagements en fonction de nos moyens. Nous devons demander davantage aux grands pays.

En tant qu’Assemblée parlementaire, nous devons réfléchir à ce que nous pouvons faire afin d’être plus utiles. Bien entendu, il est indispensable d’échanger, d’établir des rapports, mais il existe peut-être d’autres formes de coopération pour aider ceux qui sont sur le terrain.

C’est la raison pour laquelle je fais des propositions concrètes à appliquer, soit au niveau national, soit ici. Nous ne devons pas simplement parler, nous devons agir.

Il n’y a pas de démocratie sans partis politiques ni parlementaires. Heureusement qu’il y a la politique, cela permet d’appeler l’attention sur les problèmes.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Marcenaro, pour conclure notre débat d’actualité.

M. MARCENARO (Italie)* – Je remercie tous ceux qui ont pris la parole. Ce débat a permis à l’Assemblée de manifester une prise de conscience commune de nos responsabilités et de nos devoirs face à une situation aussi difficile.

Je ne reprendrai pas la discussion sur la situation en Syrie, je ne répondrai donc pas à M. Shlegel qui a proposé une posture que même les plus arriérés des diplomates russes n’osent plus soutenir aujourd’hui.

S’il faut travailler pour rétablir les conditions politiques pour permettre le retour des réfugiés dans leur maison, eh bien ! nous avons le devoir d’agir. Mais il y a un fossé entre les engagements pris par la communauté internationale et leur concrétisation sur le terrain. Il est préoccupant de constater que face à des événements d’une telle gravité, la communauté internationale n’est pas à la hauteur de ses engagements. Et je reste convaincu que la situation va encore s’aggraver. Sans parler des raisons humanitaires il y aurait bien des raisons d’intervenir.

Monsieur le Président, l’Assemblée parlementaire, le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe et vous-même pourriez, dans les jours à venir, devenir les porteurs de notre débat dans les enceintes internationales où la question sera évoquée. Et chacun d’entre nous doit s’en faire l’écho dans son propre parlement et dans son propre environnement.

Je suis convaincu que nous aurons à reparler de conflit, car malheureusement, ne nous faisons pas d’illusion, il ne s’éteindra pas prochainement.

J’espère toutefois que, la prochaine fois, nous débattrons sur la base d’un bilan moins négatif que celui qui a été rappelé aujourd’hui.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie M. Marcenaro ainsi que tous les intervenants, même s’il est vrai que, eu égard à l’importance de ce débat, j’aurais préféré que l’hémicycle soit davantage garni. Nous débattons là d’un sujet qui relève de la compétence directe de l’Assemblée parlementaire et du Conseil de l'Europe. Ce débat fait suite à celui que nous avons eu en urgence sur la situation des migrants en situation irrégulière, que nous n’avons pas hésité à qualifier de catastrophe humanitaire. Dans le cas qui nous occupe aujourd’hui, nous ne sommes pas loin de cette situation.

Un certain nombre d’appels ont été lancés, je les ai reçus. Je m’engage à porter ce débat au-delà de cette enceinte et à faire référence à tout ce qui a été dit, car je crois qu’il est de notre responsabilité collective de sensibiliser nos gouvernements et tous nos interlocuteurs internationaux qui doivent, chacun dans leur pays, prendre leurs responsabilités.

Il n’y a pas de vote à l’issue d’un débat d’actualité – je remercie M. Kox qui a souhaité ce débat – mais rien n’empêche le Bureau de décider de demander à la commission compétente d’établir un rapport.

Je vous remercie les uns et les autres pour l’excellente tenue de ce débat qui est maintenant clos.

3. Discours de M. Martí, chef du Gouvernement de l’Andorre

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Martí, chef du gouvernement de l’Andorre.

Monsieur le Premier ministre, je vous souhaite la bienvenue. C’est un très grand honneur pour moi de vous accueillir à Strasbourg. Nous considérons votre présence comme un acte de reconnaissance fort, car l’Andorre assume la présidence du Comité des Ministres. Nous avons entendu avec grand plaisir il y a quelques jours votre ministre des Affaires étrangères. Aujourd’hui, c’est vous qui avez jugé utile de faire le déplacement pour, en quelque sorte, conclure la présidence du Comité des Ministres, ce dont je vous sais gré. C’est une reconnaissance de la qualité du travail réalisé par votre ambassadeur. Je me tourne vers Mme la présidente de la délégation d’Andorre au Conseil de l’Europe qui n’a pas ménagé sa peine pour nous accueillir dans des conditions exceptionnelles chez vous, à Andorra la Vella.

Je voudrais vous féliciter, au nom de l’Assemblée parlementaire, pour cette présidence particulièrement réussie, que vous avez assumée avec grande compétence.

Le thème de l’éducation à la citoyenneté démocratique et aux droits de l’homme est un élément essentiel du bon fonctionnement de notre modèle de « vivre ensemble ». Je me réjouis également du fait que l’action en faveur des jeunes soit une autre priorité de la présidence d’Andorre, car les initiatives que vous soutenez s’inscrivent parfaitement dans la dynamique que nous avons initiée, notamment par l’organisation de la deuxième Assemblée des jeunes du Conseil de l’Europe qui s’est tenue ici même, dans cet hémicycle, et qui a précédé le premier Forum mondial pour la démocratie que nous avons organisé.

Monsieur le Premier ministre, permettez-moi également de souligner l’excellente coopération que nous entretenons avec votre ministre des Affaires étrangères, M. Saboya Sunyé, qui a présidé le Comité des Ministres. Plus qu’une coopération, ce fut une complicité, un grand plaisir de travailler avec votre ministre des Affaires étrangères. Ce fut également un plaisir de participer à ses côtés à notre événement annuel qui a eu lieu à New York, en marge de la session plénière de la commission sur la condition de la femme des Nations Unies, consacré cette année à la promotion de la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique – un sujet auquel je suis particulièrement sensible. Je salue notre Secrétaire Générale adjointe du Conseil de l’Europe qui s’est fortement engagée sur ce thème. Elle était présente à New York avec votre ministère des Affaires étrangères. L’occasion m’est donnée de la remercier pour son engagement.

Nous allons à présent écouter votre intervention avec grand intérêt et réfléchir à la façon de poursuivre la mise en œuvre de ces initiatives.

Vous aurez ensuite l’occasion de répondre à quelques questions.

C’est avec beaucoup de plaisir, Monsieur le Premier ministre, que je vous cède la parole.

M. MARTI, chef du Gouvernement de l’Andorre – Monsieur le Président, Madame la Secrétaire Générale adjointe, Mesdames, Messieurs les parlementaires, Mesdames, Messieurs, c'est un grand honneur et un moment de profonde émotion pour moi, en tant que citoyen andorran et chef du gouvernement de la principauté d'Andorre, de participer à cette deuxième partie de session de l'Assemblée parlementaire alors que l'Andorre préside le Comité des Ministres.

En effet, l'Andorre est membre du Conseil de l'Europe depuis bientôt 20 ans, mais elle assume pour la première fois la présidence du Comité des Ministres de cet organisme qui fut, pendant des décennies, une référence et qui le reste pour ce qui est de l'entente entre les peuples, la diffusion des valeurs démocratiques et le respect des droits fondamentaux.

Si la présidence du Comité des Ministres suscite en moi une telle émotion, c'est parce qu'il n'y a pas si longtemps, la personnalité juridique de la principauté d'Andorre ne nous donnait pas une reconnaissance internationale, alors même que l'Andorre est l’un des Etats les plus anciens d'Europe et des plus stables du point de vue institutionnel. Effectivement, jusqu'à l'adoption par référendum de la Constitution de 1993, notre ancien pays était considéré comme une sorte de « rara avis ».

L'adhésion de l'Andorre aux Nations Unies, et peu après au Conseil de l'Europe, a été le point culminant des aspirations de générations d'Andorrans qui souhaitaient voir la principauté d'Andorre pleinement intégrée dans la communauté internationale. Nous pouvons affirmer sans aucun doute que cela fait 20 ans que l'Andorre, grâce à sa Constitution, grâce à son adhésion aux Nations Unies et à son entrée au Conseil de l'Europe, a réussi enfin à homologuer son système politique.

L'adhésion de notre pays à cette Assemblée qui accueille les peuples du vieux continent, a été particulièrement significative. Il n'est peut-être pas inutile de rappeler que si une demande individuelle contre l'Andorre, auprès de la Cour européenne des droits de l'homme en 1989, a été le catalyseur de l’engagement du processus constitutionnel interne, les travaux de cette Assemblée ont été un authentique moteur tant pour les travaux qui ont mené à l'adoption de la Constitution que pour son corollaire, l'homologation internationale de l'Andorre.

Nous pouvons donc dire que le Conseil de l'Europe a joué un rôle important, sinon déterminant, dans l'évolution de la coprincipauté, et ce, non pas uniquement à l'origine, mais encore à travers l'écoute et le suivi des différents rapports et recommandations adoptés tant par votre Assemblée que par la transposition en normes internes des textes adoptés par le Comité des Ministres au cours des deux dernières décennies.

Tout au long de ses plus de 60 ans d'histoire, le Conseil de l'Europe, avec son système conventionnel, a permis de donner tout son sens à la fameuse citation de Voltaire qui, aujourd'hui, semble plus que jamais prophétique : « Je voudrais que tout homme public, quand il est près de faire une grosse sottise, se dise toujours en lui- même : l'Europe te regarde ».

Aujourd’hui, après un demi-siècle de paix et de démocratie en Europe occidentale, le souvenir des deux guerres mondiales se dissipant peu à peu, il pourrait sembler que des institutions comme celle-ci pourraient ne plus avoir leur raison d'être. Cependant, les remous économiques et financiers ont montré à quel point l'équilibre sur lequel reposent nos sociétés est fragile, à quel point les crises se prêtent à renforcer les ennemis des droits de l'homme et de la démocratie.

Mesdames et Messieurs, l'engagement de la principauté d'Andorre envers la construction européenne et plus particulièrement envers la consolidation des droits de l'homme, la solution dialoguée des conflits et la démocratie, est un engagement sans équivoque. Il s'agit d'un pari qui remonte à la genèse même de l'Etat andorran, à la fin du XIIIe siècle.

En 1278, après des siècles d'affrontements, l'accord signé entre l'évêque d'Urgel et le comte de Foix pour la souveraineté sur les Vallées d'Andorre créa un équilibre institutionnel unique qui a résisté jusqu'à aujourd'hui à tous les avatars de l'histoire. Un équilibre qui a fait de l'Andorre une oasis de paix et de respect des libertés les plus essentielles au sein d'une Europe convulsée. Pendant des siècles, les Andorrans, tout en restant les vassaux de nos coprinces, ont bénéficié d'espaces plus importants de liberté que la plupart de nos voisins. En des temps plus récents, l'Andorre a été un refuge et un pays d'accueil pour de nombreux persécutés par les conflits au-delà de nos frontières, en particulier durant la guerre civile espagnole et la seconde guerre mondiale.

D’une manière peut-être rudimentaire, l'Andorre était parvenue à incarner l'esprit de concorde et le respect des droits et libertés dont le Conseil de l'Europe est aujourd'hui l'emblème. La présidence andorrane a commencé presque jour pour jour dix-huit ans après notre adhésion à ce dernier. Comme notre ministre des Affaires étrangères, M. Gilbert Saboya, l'a souligné à Tirana le 9 novembre dernier, cela constitue en quelque sorte une façon de célébrer notre majorité sur un plan international. Cette présidence est arrivée à un moment crucial pour la principauté d'Andorre, moment presque aussi déterminant, oserais-je dire, que le processus qui mena à l'adoption de la Constitution en 1993.

Si, il y a près de vingt ans, le système politique et institutionnel de l’Andorre était reconnu internationalement, le moment est maintenant venu de garantir la reconnaissance de son système économique. L'homologation économique de la principauté d'Andorre : voilà le grand défi auquel les Andorrans ont été confrontés au cours de ces vingt dernières années, défi que ce gouvernement tient à relever !

Le modèle de croissance bâti au cours de la seconde moitié du XXe siècle en Andorre a connu un succès sans précédent. Il a rapidement transformé une économie rurale de montagne en une économie moderne de services fondée sur le commerce, le tourisme et le secteur financier. Ce modèle fut à l’origine de grandes richesses et de confort pour les Andorrans ainsi que pour tous les habitants venus essentiellement des pays voisins.

Cependant, au moment même où nous nous proposions de moderniser nos institutions, certains signes annonçaient déjà l'épuisement de ce modèle de croissance. Les secteurs traditionnels de l'économie andorrane resteraient essentiels pour l’avenir mais il était indéniable qu'il fallait les compléter et y apporter de nouvelles alternatives viables.

Mesdames et Messieurs, le défi actuel de l'Andorre demeure la reconversion de son modèle de croissance économique, lequel a très bien fonctionné mais qui comporte trois lacunes fondamentales : il s’agit d’un modèle excessivement fermé, presque endogamique ; il n’est pas homologable sur le plan international et, enfin, il est encore très peu diversifié. Depuis des années, les gouvernements andorrans successifs ont entrepris de nombreux efforts afin de corriger toutes ces faiblesses qui, par ailleurs, sont étroitement connexes.

Avant d’évoquer les progrès accomplis en matière économique au cours de ces dernières années et de présenter quelques projets à venir, permettez-moi une brève référence au passé, car il serait injuste d'accuser les générations qui nous ont précédés d'avoir construit une Andorre excessivement fermée et peu transparente. Il est en effet fort probable que cette Andorre était le meilleur bastion possible dans une Europe très différente de celle que, fort heureusement j'espère, nous pourrons léguer à nos enfants. C'était notre réponse à un monde très dissemblable de celui que nous connaissons actuellement.

Il va sans dire que l'Andorre des exceptions et des privilèges, de la fermeture sur soi et de l'exceptionnalité n'a guère plus sa place au XXIe siècle, raison pour laquelle depuis quelques années nous nous efforçons de renforcer et de construire de nouvelles bases pour la compétitivité. L'ouverture économique ne peut être ni entreprise ni comprise, si j'ose dire, sans une homologation de cette économie.

En effet, quelle était la situation initiale de l'Andorre ? Une économie fondée sur trois secteurs qui avaient fait leurs preuves mais qui restaient repliés sur eux-mêmes, repli résultant principalement d'un manque de transparence dans le domaine fiscal même si, dans les faits, le secteur financier andorran a toujours coopéré dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ou d'autres activités criminelles. En Europe, et bien au-delà, on en était bien conscient et, en ce sens, l'Andorre n'a jamais posé de problèmes.

Néanmoins, les progrès les plus significatifs de ces dernières années concernent la coopération dans la lutte contre la fraude fiscale. Depuis la signature de la Déclaration de Paris, en 2009, par laquelle la principauté d'Andorre s’est engagée à progresser sur le plan administratif dans l'échange d'informations fiscales, notre pays a signé une vingtaine d'accords en la matière, ce qui a permis de commencer à négocier et de signer des accords bilatéraux afin d'éliminer la double imposition qui pénalisait les exportations de services depuis l'Andorre. Exceptionnalité et repli sont étroitement liés, comme le sont homologation et ouverture.

Parallèlement à la signature de ces divers accords d'échange et d'information fiscale, mais aussi au premier accord bilatéral avec la République française pour éviter la double imposition, lequel a été paraphé l'année dernière et signé récemment, l'Andorre a mis en place un nouveau modèle fiscal pleinement homologable par les systèmes fiscaux européens.

Afin d'appréhender l'ampleur des réformes que l'Andorre mène à un rythme soutenu, il faut se rendre compte que, voilà deux ans encore, notre système fiscal était quasi-exclusivement fondé sur des impôts indirects taxant principalement les importations de marchandises et les prestations de services.

Sont entrés en vigueur, en 2011, l'impôt sur le revenu des non-résidents fiscaux, au mois de janvier 2012, l'impôt sur les sociétés et l'impôt sur les activités économiques et, au mois de janvier dernier, la refonte de tous les impôts indirects sous forme d'un seul impôt général indirect équivalent aux taxes sur la valeur ajoutée existant dans la plupart des pays.

De plus, le gouvernement que je préside s’est engagé à présenter au parlement avant cet été un projet de loi régulateur de l'impôt sur le revenu des personnes physiques mais, aussi, sur les revenus du travail et du capital, l'objectif étant d'achever l'architecture d'un nouveau système fiscal andorran avant la fin de l'actuelle législature, en 2015.

Finalement, en quatre ans, l'Andorre sera passée d'un système fiscal plutôt sui generis et fondé essentiellement sur la taxation indirecte à un système fiscal complètement homologable, comportant un équilibre raisonnable entre imposition directe et indirecte, avec des bases fiscales larges afin d'éviter les lacunes et un type d'imposition capable de garantir la compétitivité de notre économie.

J’ose dire que peu de pays sont capables de mettre en place une réforme de cette envergure pendant un tel laps de temps. Nous sommes un petit pays mais cela ne signifie pas que nous ne soyons pas capables de fournir de grands efforts !

Mesdames et Messieurs, l’engagement de l'Andorre en faveur de la transparence et de la coopération est clair, sincère, ferme, et je ne vois pas comment il serait possible de revenir en arrière. Le fruit de cet engagement, matérialisé par la mise en place d'un système fiscal homologable, doit être la signature d'accords bilatéraux pour éviter la double imposition. Comme je viens de le rappeler, la République française et la principauté d'Andorre ont signé un accord de ce type il y a quelques semaines. Nous espérons que les négociations ouvertes avec l'Espagne se poursuivront et qu'elles porteront leurs fruits, tout comme celles engagées avec le Portugal.

La signature de ces accords se veut la clé de voûte de notre nouveau modèle économique et signifie tout à la fois l'homologation de notre économie et le ciment d'une base solide permettant une ouverture économique avec les garanties nécessaires.

Si le premier défi de l'Andorre était de passer de l'exceptionnalité à l'homologation, le second défi est de remplacer la fermeture par l’ouverture. Lorsqu'il y a deux ans, mon équipe et moi-même avons commencé à assumer la responsabilité de gouverner, l'économie andorrane était considérée comme l'une des plus fermées d'Europe, voire du monde : dans la plupart des secteurs, la participation de capitaux étrangers dans nos sociétés était limitée à 49 %, et les résidents étrangers avaient besoin d'une période de 10 à 20 ans de résidence, en fonction de leur nationalité, pour accéder à la plénitude des droits économiques.

Afin de renverser cette situation, au mois de juin de l'année dernière, le parlement a approuvé une modification substantielle du régime des investissements étrangers, permettant une participation étrangère pouvant aller jusqu'à 100 % du capital des sociétés et ce, dans tous les secteurs. Par ailleurs, ont été levés les obstacles existants pour ce qui est de la création et de la participation des entreprises et des professionnels étrangers, en particulier en octroyant la plénitude des droits économiques à tous les résidents dès leur premier jour de résidence dans la principauté. Vous voyez, Mesdames et Messieurs les parlementaires, le grand effort qu’accomplit la principauté d’Andorre.

Nous espérons que les implications et les effets de ce changement radical de modèle pourront être observés dans les prochaines années. Ce que nous pouvons affirmer dès à présent, c'est qu'il s'agit d'une preuve évidente de l'engagement de l'Andorre pour une intégration de notre économie dans la mouvance de celles de notre entourage sur la base de la coopération, la transparence et l'équité.

Nous sommes convaincus qu'une meilleure intégration des économies à l'échelle internationale se traduit nécessairement par un renforcement des liens entre les peuples et par une égalisation progressive des droits des citoyens et de leurs conditions de vie. Nous croyons fermement que les droits de l'homme, la démocratie et l'Etat de droit peuvent s'enraciner davantage là où il y a un progrès économique, une génération de richesses, surtout une création d'opportunités pour tous et une distribution équitable des charges sociales et des impôts. C'est pour cela que notre pari pour une économie plus homologable et ouverte s'inscrit dans la perspective de notre engagement permanent pour une meilleure coopération au niveau institutionnel.

Mesdames et Messieurs, lorsque j'ai évoqué les faiblesses de l'ancien modèle de croissance andorran, j'ai parlé d'une économie peu homologable, excessivement fermée et peu diversifiée. Si l'homologation et l'ouverture vont de pair, la diversification en est le fruit.

Par le biais de la diversification économique, l'Andorre devra affirmer ses différences et ses avantages compétitifs et, en définitive, trouver ses points forts et ses points faibles. Car dans le fond, notre pari est celui de passer de l'exceptionnalité à la compétitivité. Nous savons que pour être compétitifs, nous avons besoin d'une économie ouverte et intégrée, et qu'une économie ouverte et intégrée requiert de la coopération et de la transparence, mais nous savons aussi que ce n'est pas suffisant. Nous devons maintenir et renforcer nos avantages compétitifs. Et je dis bien des avantages compétitifs licites, et non pas des exceptions.

Je devine à quel avantage compétitif vous êtes en train de penser : à une fiscalité moindre. Il est vrai que l'Andorre est, et sera, un pays à la fiscalité modérée ; homologable et sans lacunes, mais avec des taux modérés.

C'est ainsi, et c'est légitime qu'il en soit ainsi : c'est notre engagement pour des services efficaces et un secteur public bien dimensionné. Lorsque nous demandons aux investisseurs étrangers ce qui suscite leur intérêt pour l'Andorre, nous obtenons des réponses très diverses. Cependant, la fiscalité modérée est rarement évoquée comme une raison déterminante. C'est pour cela que lorsque nous parlons des avantages compétitifs, nous les associons directement aux potentialités de diversification de notre économie. A titre d'exemple, citons les secteurs commercial et touristique dans lesquels nous avons beaucoup d'expérience. L'Andorre, dont la population compte à peine 70 000 habitants, reçoit chaque année 8 millions de visiteurs attirés par le tourisme de neige et de montagne et par les possibilités d'achats. Dans un espace réduit, l'Andorre concentre des commerces, des hôtels, des restaurants, des centres de bien-être, des pistes de ski, des installations de loisirs.... Cela nous a fait penser que notre pays avait les ingrédients adéquats pour développer des projets de nouvelles technologies de la communication et de l'information, en particulier ceux qui sont en relation avec le commerce et le tourisme, nos principaux piliers économiques.

Ainsi, de l'union du puissant secteur touristique andorran avec le secteur de la santé et du bien-être découle un pari pour le tourisme de santé, par exemple. Dans les deux cas, la logique est la même : à partir des secteurs solidement ancrés dans notre pays, nous diversifions l'économie avec l'ouverture de nouveaux domaines.

Lorsque nous parlons d'avantages compétitifs, c'est cela. Car les pays à fiscalité modérée, en Europe et dans le monde, sont nombreux. Cependant, l'Andorre jouit d'autres atouts, nous accueillons un volume de touristes 100 fois supérieur à notre population. L'Andorre présente une grande concentration de commerces, d'infrastructures hôtelières et de diverses activités de loisirs. C'est un pays où le monde urbain côtoie le monde rural, le tout dans un espace très réduit.

C'est la raison pour laquelle nous disons oui à l'homologation. Par contre, nous disons non à l'homogénéisation.

Les Andorrans souhaitent préserver leur identité, tout comme ils l’ont fait pour homologuer leur système politique, il y a 20 ans. Notre Constitution préserve aussi bien notre structure territoriale que notre architecture institutionnelle particulière, unique au monde, la coprincipauté parlementaire, mise en place tout au long de plus de sept siècles d'histoire. Nous souhaitons aujourd'hui continuer à avancer sur le chemin de la coopération et de l'homologation mais en essayant de ne pas perdre notre authenticité. Nous voulons, au contraire, la renforcer car, en fin de compte, n'est-ce pas là aussi la philosophie du processus de construction européenne dont le Conseil de l'Europe est la figure de proue ? Unir les efforts et construire des ponts pour garantir le droit à la différence tout en ayant un système de valeurs communes capable de nous permettre de vivre ensemble en harmonie.

Mesdames et Messieurs, j'ai parlé des efforts de mon pays pour la transparence et la coopération, de la rapidité avec laquelle a été approuvée et mise en place la réforme fiscale, du changement de paradigme que suppose l'ouverture économique et du défi que représente la diversification de notre modèle de croissance.

Je dois ainsi faire référence, comme vous vous en doutez, à la relation de l'Andorre avec l'Union européenne. Depuis 1986, année où l'Espagne a formalisé son entrée dans le Marché commun, l'Andorre est une île au sein de l'Union européenne. L'entrée de notre voisin du sud dans la Communauté économique européenne fut déjà interprétée par beaucoup d'analystes comme le détonateur des grands changements qui devaient avoir lieu dans l'économie andorrane. Le gouvernement de l'époque prit conscience de ces signes et s'empressa de négocier et de conclure un accord douanier avec la CEE, qui fut signé en 1990, établissant ainsi une union douanière entre la principauté et les pays de l'Union européenne, le Marché commun à l'époque.

Après cet accord, ont suivi l'Accord de coopération de 2003 et l'Accord sur la fiscalité de l'épargne de 2004. Plus récemment, en juin 2011, l'Andorre a signé un accord monétaire avec l'Union européenne, qui officialise l'utilisation de l'euro dans la principauté et constitue un premier pas pour explorer une relation plus étroite entre notre pays et nos voisins européens.

La voie de l'adhésion est aujourd'hui écartée car il s'agit d'une option impossible à assumer pour un pays de dimension territoriale réduite comme l'Andorre. Nous nous employons à rechercher une structure telle que l'Espace économique européen (EEE) ou quelque chose de similaire, mais adaptée aux petits Etats. Nous nous félicitons des bonnes intentions de l'Union dans ce sens et nous étudions les possibilités qu'offre le Traité de Lisbonne afin de rechercher une solution stable aux relations de l'Andorre et des pays à caractéristiques similaires.

Néanmoins, le processus de réformes andorran serait incomplet s'il n'était pas accompagné d'une plus grande participation de notre pays au marché intérieur européen. De la même manière, la construction européenne ne serait pas achevée si elle renonçait à trouver une solution pour les pays tiers de petite dimension territoriale qui, comme l'Andorre, sont profondément européens.

Nous avons besoin de la compréhension, de la complicité et de l'aide de nos voisins européens. Au cours de ces dernières années, comme je vous l'ai déjà dit, l'Andorre a fourni d'importants efforts. Elle s'est tournée vers la transparence et la coopération ; nous savons que ce chemin doit être poursuivi au jour le jour. Nous avons bâti un modèle fiscal complètement nouveau en très peu de temps et, bien qu'il s'agisse d'une question politique interne, nous le faisons avec un clair esprit de coopération. Nous avons mené à terme une profonde ouverture économique et une extension des droits pour les résidents étrangers. Nous sommes en train de travailler pour définir un nouveau modèle de relations entre notre pays et l'Union européenne.

L'Europe doit prendre conscience de ces changements et du rythme accéléré des réformes. Si nous croyons vraiment au multilatéralisme, si l'Europe n'y croit pas, qui y croira ? Si nous pensons vraiment que tous les pays sont ici, dans cette Assemblée et dans d'autres, sur un pied d'égalité, malgré leurs différences et leurs caractéristiques, si nous croyons en ces principes fondamentaux du concert des nations européennes, alors nous ne pouvons renoncer à ce que tous les pays puissent trouver leur place en Europe.

Mesdames et Messieurs, au XVIIIe siècle, le politicien andorran Antoni Fiter i Rossell conseillait dans son livre Maximes de maintenir en mauvais état les chemins qui conduisaient vers la Vallée d'Andorre. Il serait ainsi, disait l'auteur, très difficile pour les armées étrangères d'envahir notre pays. Celui-ci suggérait aussi d'être très prudent concernant l'installation des étrangers en Andorre. Ces conseils étaient judicieux il y a 300 ans. Cependant, le développement économique de l'Andorre au cours du XXe siècle n'aurait pu avoir lieu sans la construction de routes modernes qui nous relient à la France et l'Espagne. Par ailleurs, les dizaines de milliers d'étrangers qui se sont établis en Andorre, qui y ont trouvé des opportunités qu'ils ne trouvaient pas chez eux et qui sont aujourd'hui Andorrans pour la plupart, ont indéniablement contribué au progrès économique et social de notre pays.

Nous sommes passés d'une Andorre fermée et repliée sur elle-même à une Andorre ouverte, transparente et coopérante. Cela fera bientôt vingt ans, le Président du Parlement andorran se présentait devant l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe pour formaliser l'entrée de notre pays dans le concert européen des nations. A l'époque, l'Andorre se présentait à l'Europe comme un ancien pays qui avait trouvé sa place dans la communauté internationale. Aujourd'hui, nous nous voulons un pays qui est en train de trouver sa place dans une économie globale ; une économie qui se doit d'être de plus en plus intégrée et fondée sur les principes de transparence et d'équité.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur Martí. Je vais à présent donner la parole aux parlementaires qui se sont inscrits pour vous poser une question. Ils disposent chacun de trente secondes.

La parole est à M. Beneyto, au nom du Groupe du Parti populaire européen.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je voudrais tout d’abord, au nom de mon groupe et de la délégation espagnole, vous souhaiter un grand succès, Monsieur Martí, pour la présidence de l’Andorre du Comité des Ministres.

A quel stade en sont les négociations avec l’Espagne pour l’introduction de l’impôt sur le revenu ? Des accords avec des pays tiers dont les ressortissants possèdent des dépôts importants en Andorre sont-ils négociés ? Je pense par exemple à la Fédération de Russie.

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – Je vous remercie pour vos vœux de succès, Monsieur le député.

D’ici le 21 juin, un projet de loi doit être déposé au Parlement de l’Andorre, conformément à la volonté du gouvernement, afin d’aboutir en 2014-2015. Les négociations avec l’Espagne se passent bien, même mieux que d’habitude. Nous avons une grande complicité avec le Gouvernement espagnol. J’ai eu l’occasion de rencontrer à plusieurs reprises le Premier ministre de l’Espagne pour évoquer cette question et nous avons fixé un calendrier.

Nous sommes fermement décidés à régler correctement nos relations avec les autres pays, notamment la France et le Portugal. Le parlement a évidemment un rôle important à jouer dans ce contexte. Il sera prochainement saisi de ce sujet. Avec l’Espagne et le Portugal, nous avons des traités particuliers.

Les négociations entre l’Andorre et l’Espagne devraient aboutir rapidement, avec de la bonne volonté. Il est très important qu’un accord soit trouvé.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Rouquet, au nom du Groupe socialiste.

M. ROUQUET (France) – La présidence andorrane du Conseil de l’Europe s’achève bientôt. De l’avis général, elle a été extrêmement fructueuse. Nous ne pouvons que vous en remercier.

Monsieur le chef du Gouvernement de l’Andorre, c’est sous votre présidence qu’un accord final a été trouvé pour l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme. Quelles sont les étapes, et éventuellement les obstacles, qu’il reste à franchir pour que le processus d’adhésion arrive à son terme ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – Je vous remercie de vos aimables paroles pour la présidence de l’Andorre. En effet, des avancées significatives ont eu lieu sous notre présidence, mais les efforts étaient engagés depuis longtemps.

L’accord soutenu par le Conseil de l’Europe est très positif mais nous devons attendre la décision de l’Union européenne pour qu’il soit formalisé.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Xuclà, au nom de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe.

M. XUCLÀ (Espagne)* – Je vous félicite, M. le chef du gouvernement, pour votre excellente présidence du Conseil de l’Europe, durant laquelle vous avez mis l’accent sur l’éducation. Pourriez-nous nous indiquer des exemples concrets des dispositifs mis en place en Andorre pour permettre à l’éducation de faire avancer les valeurs démocratiques, les droits de l’homme et le pluralisme notamment linguistique de votre pays ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE* – La présidence s’est concentrée sur les valeurs du Conseil de l’Europe créé il y a 60 ans. Comme dans bon nombre d’autres pays, l’éducation est un sujet primordial.

En ces temps de crise, ce n’est que grâce à l’éducation que nous trouverons des solutions. J’entends « éducation » au sens large, c’est-à-dire en étroite relation avec la défense des droits de l’homme, des droits sociaux et politiques.

En Andorre, notre enseignement public fonctionne assez bien. Il présente la particularité d’être réparti en trois systèmes relativement équilibrés en termes d’effectifs : les systèmes espagnol et français, complétés plus récemment par le système andorran.

LE PRÉSIDENT – La parole est à Sir Roger Gale, au nom du Groupe démocrate européen.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Monsieur le chef du gouvernement, la présidence andorrane arrivant à son terme, pourriez-vous nous dire ce que vous avez entrepris auprès de pays comme la France et Malte, qui maintiennent sans procès des prisonniers en liberté surveillée, alors que ceci est contraire à la Convention de Genève ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – La question est difficile. Je n’y apporterai pas une réponse politique.

Il existe de nombreux petits ou grands conflits en Europe, depuis longtemps. Le seul moyen de les régler, c’est le dialogue. Je viens d’un pays qui connaît une situation stable depuis sept siècles grâce au dialogue. Ce principe est ancré dans l’Etat andorran : quand on est très petit, il faut avoir l’intelligence de savoir dialoguer. L’éducation, les droits de l’homme et le dialogue sont des préceptes profondément inscrits dans l’histoire de notre pays, c’est pourquoi nous avons tenu à les mettre en avant durant notre présidence.

Nous ne pourrons résoudre aucun conflit européen si nous abandonnons le dialogue. Et il existera toujours des problèmes si l’on adopte des attitudes extrémistes, si l’on refuse de s’asseoir autour d’une table pour discuter.

Voici m’on opinion et je pense qu’elle est partagée par la majorité des parlementaires auxquels j’ai l’honneur de m’adresser aujourd’hui.

LE PRÉSIDENT – La parole est à M. Papadimoulis, au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne.

M. PAPADIMOULIS (Grèce)* – Monsieur, je vous souhaite beaucoup de succès pour la fin de votre présidence.

La crise ne fait qu’accroître les inégalités, renforce l’extrême droite et affaiblit les valeurs du Conseil de l’Europe. Comment pensez-vous faire face à ces menaces contre la démocratie et ces inégalités ?

Il y a quelques jours, l’Union européenne a puni un petit pays comme Chypre en appliquant aux banques une mesure inédite. Comment la présidence d’un petit pays comme le vôtre réagit-elle à cela ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – La présidence andorrane ne peut pas régler ce conflit, c’est au Conseil de l’Europe dans sa globalité de le faire.

Nous traversons une période très difficile au niveau politique. Mais tout se jouera sur la cohésion sociale, et surtout sur la pédagogie parce qu’en ces temps, où tous émettent des critiques systématiques, il faut réellement faire œuvre de pédagogie pour expliquer aux citoyens que le mal ne durera pas un siècle.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Il y a deux ans, j’ai eu l’occasion de visiter le parlement de votre pays et j’ai été très impressionné par l’attachement de votre pays aux valeurs démocratiques.

En tant que chef du gouvernement, et puisque vous assurez la présidence du Comité des Ministres, comment pourriez-vous aider le Conseil de l’Europe à renforcer les droits des minorités nationales traditionnelles et leur volonté d’autonomie territoriale ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE* – Comme moi, vous savez bien que la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales couvre les droits individuels des personnes issues de minorité et non la minorité elle-même. Mais l’important, quand des minorités sont installées dans d’autres pays – et que ces minorités représentent une part importante de la population du pays –, est que les droits soient respectés et surtout que s’établisse un dialogue franc. Car sans un dialogue franc, il n’est pas possible d’éviter des problèmes en Europe. Dans certains pays, les minorités sont représentées au parlement et cela a un effet déterminant sur la démocratie.

Mais, comme je le disais précédemment, il n’y aura pas de cohésion sociale s’il y a des problèmes de racisme liés aux origines des personnes. L’Europe ne s’est pas construite pour en arriver là. Si l’on ne comprend pas les valeurs essentielles qui ont guidé la construction européenne, on n’a rien compris de ce qu’est l’Europe.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Je viens des Canaries, mais je prends rapidement votre accent, Monsieur le Cap de Govern. Je voudrais commencer en vous marquant mon affection car, je l’ai dit très souvent, vous êtes un excellent pédagogue qui expliquez les choses de façon très pratique. Je voudrais vous en faire compliment.

Ici, d’aucuns prétendent être à la tête de la lutte contre le blanchiment d’argent et les paradis fiscaux, mais ce n’est que dans la pratique que l’on peut voir comment lutter contre les paradis fiscaux. Le double du produit intérieur brut du Japon et des Etats-Unis est placé dans des paradis fiscaux. Que pourrions-nous, que devrions-nous faire, selon vous, pour lutter contre ces paradis fiscaux ? Au moment même où je vous demande cela, il y a 6 millions de chômeurs en Espagne.

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE* – Monsieur le député, je vous répondrai tout d’abord qu’il faut prendre au sérieux les engagements internationaux. L’Andorre a signé des conventions pour l’échange d’informations avec votre pays, avec la France et les Etats-Unis. Lorsqu’un Etat signe un engagement, il doit le tenir. C’est la première vérité à rappeler.

Ensuite, l’Andorre – et cela mérite d’être expliqué devant votre haute Assemblée – a, en moins de cinq ans, mis en place un nouveau modèle fiscal. Il faut une grande volonté politique pour y parvenir, car cela ne peut se faire sans une forte volonté politique de la part de tous.

La pression fiscale est un problème dans de nombreux pays. On évoque souvent l’Andorre, mais je rappelle que l’Andorre est très déterminée à respecter ses engagements internationaux. Et d’ailleurs, dois-je le souligner, l’Andorre ne figure sur aucune liste de l’OCDE. Nous sommes un pays qui se veut coopérant et nous continuerons dans la voie qui est celle que je vous ai décrite, celle de la transparence et d’une fiscalité « homologable », comme nous l’appelons.

Je respecte infiniment votre Assemblée et j’ai voulu vous expliquer très ouvertement et franchement tous les efforts que nous faisons. Quand on recherche la vérité, on doit également mentionner le concept d’équité entre tous les citoyens et, pour bien faire les choses, il faut respecter les normes, les standards et les dispositions légales et règlementaires. Je suis très heureux, comme le rappelait votre collègue espagnol, des excellentes relations que nous entretenons avec son pays.

M. BATAILLE (France) – Monsieur le chef du gouvernement, l’Andorre a ratifié la Charte sociale européenne révisée le 12 novembre 2004. En revanche, elle n’a pas accepté le Protocole additionnel prévoyant un système de réclamation collective. Or c’est grâce à ce système que les partenaires sociaux et les ONG peuvent s’adresser directement au Comité européen des droits sociaux pour lui demander de statuer sur une éventuelle violation de la Charte.

Pouvez-vous nous dire si l’Andorre envisage d’accepter prochainement le système de réclamation collective ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – Monsieur le député, votre question est très intéressante. Ce que vous venez de dire est exact, il n’est pas moins vrai que l’Andorre doit faire des efforts en la matière.

Je le dis devant votre Assemblée, mais j’ai eu l’occasion de le dire également au Parlement andorran, l’Andorre légifèrera cette année sur le droit de grève et pour que plus de garanties soient accordées aux syndicats.

Mon intervention était très axée sur l’économique. Je vous suis donc très reconnaissant de votre question parce que tout ne se joue pas au niveau économique. Il y a des aussi des questions sociales et des revendications légitimes des travailleurs, qu’il faut bien garantir dans la constitution andorrane. Ils ont le droit de faire grève s’ils veulent. Je pense qu’il faut légiférer pour organiser cela au plus tôt. C’est une autre des priorités du gouvernement dont j’ai l’honneur d’être le chef.

On parle très souvent d’économie et de paradis fiscaux, alors que l’Andorre n’en est pas un. Je pense avoir donné à votre question, qui était très directe, une réponse très claire.

M. REISS (France) – Monsieur le chef du gouvernement, depuis l’adhésion de l’Andorre au Conseil de l’Europe, vos gouvernements successifs n’ont pas ménagé leurs efforts pour intégrer pleinement la Principauté dans le système conventionnel de protection des droits de l’homme.

Andorre a signé le 29 juin 2012, la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels ; puis, le 22 février 2013, la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

Pensez-vous qu’Andorre sera en mesure de ratifier rapidement ces conventions sachant que, pour la seconde, le nombre de ratifications requises pour son entrée en vigueur n’a pas encore été atteint ?

M. LE CHEF DU GOUVERNEMENT DE L’ANDORRE – Je crois que le ministre des Affaires extérieures d’Andorre s’est exprimé clairement, mais c’est aussi un plaisir de me prononcer sur le sujet en tant que chef du gouvernement. Il est dans notre intention de faire passer ces lois devant le parlement au cours de cette année.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le chef de gouvernement, nous en avons terminé avec les questions auxquelles vous avez répondu avec une grande compétence. Nous avons aussi beaucoup apprécié votre intervention particulièrement instructive.

Je vous remercie de nouveau pour la présidence que vous avez assumée avec beaucoup de savoir-faire. Permettez-moi de souhaiter bonne chance à ceux qui vont vous succéder, donc à l’Arménie puisque c’est elle qui va, durant six mois, présider notre Comité des Ministres.

4. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 heures.

SOMMAIRE

1. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés de M. Andriy Shevchenko

Présentation par Mme Vučković du rapport de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles (Doc.13193)

Orateurs : Mme Brasseur, MM. Walter, Kox, Vareikis, Gross, Sobolev, Popescu, Ariev, Mme Orobets

Réponse de Mme la rapporteure

Vote sur un projet de résolution

2. Les réfugiés syriens en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Irak : comment organiser et soutenir l’aide internationale ? (débat d’actualité)

Orateurs : M. Marcenaro, Mme Durrieu, MM. Walter, Kox, Santini, Mme Fiala, M. Dişli, Mme Huovinen, M. Kayatürk, Mme Memecan, M. Shlegel, Lord Anderson, M. Sabella, Mme Blanco, MM. Yatim, Ariev, Schennach, Mme Kapetanović, MM. Díaz Tejera, Marcenaro

3. Discours de M. Marti, chef du gouvernement de l’Andorre

Questions : MM. Beneyto, Rouquet, Xuclà, Sir Roger Gale, MM. Papadimoulis, Gaudi Nagy, Díaz Tejera, Bataille, Reiss

4. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA

Karin ANDERSEN/Ingjerd Schou

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Mörður ÁRNASON*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Þuriður BACKMAN*

Daniel BACQUELAINE/Kristien Van Vaerenbergh

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE*

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Sílvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI*

Robert BIEDROŃ*

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL*

Eric BOCQUET*

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ

António BRAGA

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL*

Gerold BÜCHEL/Rainer Gopp

Patrizia BUGNANO/Giuliana Carlino

André BUGNON

Natalia BURYKINA*

Sylvia CANEL*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT

Otto CHALOUPKA

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Corneliu Mugurel Cozmanciuc

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA*

Carlos COSTA NEVES

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER/Ludo Sannen

Roel DESEYN

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ*

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER*

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO*

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON*

Béatrice FRESKO-ROLFO

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC/József Nagy

Sir Roger GALE

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI*

Paolo GIARETTA*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI*

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER*

Gergely GULYÁS*

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU*

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI*

Mike HANCOCK*

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI

Norbert HAUPERT

Alfred HEER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Martin HENRIKSEN

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD*

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN*

Anette HÜBINGER*

Andrej HUNKO*

Susanna HUOVINEN

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIĆ*

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI/Imer Aliu

Tadeusz IWIŃSKI/Łukasz Zbonikowski

Denis JACQUAT*

Gediminas JAKAVONIS

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI/Carmen Quintanilla

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Birkir Jón JÓNSSON*

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI*

Marietta KARAMANLI*

Ulrika KARLSSON

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH/Marek Krząkała

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Attila KORODI

Alev KORUN

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO/Nermina Kapetanović

Dmitry KRYVITSKY*

Václav KUBATA/Dana Váhalová

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT/Christian Bataille

Igor LEBEDEV/Olga Kazakova

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT/Sophie Løhde

François LONCLE/Philippe Bies

Jean-Louis LORRAIN/Bernard Fournier

George LOUKAIDES

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ/Ismeta Dervoz

Philippe MAHOUX*

Gennaro MALGIERI*

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA/Riitta Myller

Frano MATUŠIĆ*

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Michael Connarty

Ermira MEHMETI DEVAJA

Ivan MELNIKOV*

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Frédéric Reiss

Djordje MILIĆEVIĆ*

Federica MOGHERINI REBESANI*

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG*

Rubén MORENO PALANQUES

Patrick MORIAU*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Alejandro MUÑOZ-ALONSO

Lydia MUTSCH

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR

Oľga NACHTMANNOVÁ

Marian NEACŞU

Aleksandar NENKOV*

Pasquale NESSA*

Fritz NEUGEBAUER*

Baroness Emma NICHOLSON*

Elena NIKOLAEVA/Robert Shlegel

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL*

Judith OEHRI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE*

Liliana PALIHOVICI*

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG*

Danny PIETERS*

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN*

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT/Joe Benton

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS/Ester Tuiksoo

Eva RICHTROVÁ

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE/Yves Pozzo Di Borgo

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT*

Ilir RUSMALI*

Pavlo RYABIKIN*

Rovshan RZAYEV*

Giacomo SANTINI

Giuseppe SARO*

Kimmo SASI/Jaana Pelkonen

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER*

Urs SCHWALLER

Damir ŠEHOVIĆ/Draginja Vuksanović

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN*

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL*

Arturas SKARDŽIUS

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV*

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Giacomo STUCCHI*

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW/Jonas Gunnarsson

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Melinda SZÉKYNÉ SZTRÉMI/Imre Vejkey

Chiora TAKTAKISHVILI*

Vyacheslav TIMCHENKO

Romana TOMC/Iva Dimic

Lord John E. TOMLINSON

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI/Konstantinos Triantafyllos

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV/Alexander Burkov

Giuseppe VALENTINO*

Miltiadis VARVITSIOTIS/Spyridon Taliadouros

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Mark VERHEIJEN/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Anne-Mari VIROLAINEN

Luigi VITALI*

Luca VOLONTÈ

Vladimir VORONIN*

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ*

Zoran VUKČEVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Katrin WERNER*

Karin S. WOLDSETH/Øyvind Vaksdal

Gisela WURM*

Karl ZELLER/Paolo Grimoldi

Barbara ŽGAJNER TAVŠ/Polonca Komar

Svetlana ZHUROVA*

Emanuelis ZINGERIS/Egidijus Vareikis

Guennady ZIUGANOV/Vassiliy Likhachev

Naira ZOHRABYAN/Zaruhi Postanjyan

Levon ZOURABIAN*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Monténégro*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Terence FLANAGAN

Kerstin LUNDGREN

Observateurs

Mr Juan BUENO TORIO

Eloy CANTU SEGOVIA

Ernesto GÁNDARA CAMOU

Partenaires pour la démocratie

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Omar HEJIRA

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM