FR13CR22

AS (2013) CR 22

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Troisième partie)

COMPTE RENDU

de la vingt-deuxième séance

Mardi 25 juin 2013 à 15 h 30

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35 sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document commissions (2013) 06 Addendum 2.

Il n’y a pas d’opposition.

Ces modifications sont adoptées.

2. Élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie (suite)

LE PRÉSIDENT – Je vous rappelle, chers collègues, que vous êtes conviés à procéder à l’élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie.

La liste des candidats et leurs notices biographiques figurent dans les Doc.13212 et 13213.

Le vote a lieu dans la rotonde derrière le plateau de la présidence. Il sera clos à 17 heures.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après dans les conditions habituelles, sous le contrôle de deux scrutateurs que nous avons désignés par tirage au sort ce matin, à savoir MM. Dirk Van der Maelen et Christian Bataille. Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde derrière la présidence à 17 heures.

Le résultat du scrutin sera proclamé si possible avant la fin de la présente séance ou, à défaut, à l’ouverture de la prochaine séance.

Le scrutin est ouvert.

3. Demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Lundgren, au nom de la commission de suivi, sur le respect des obligations et des engagements de la Hongrie (Doc.13229).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance d’hier matin, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes. Je demande une nouvelle fois à chacun de s’en tenir scrupuleusement à cette durée.

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 18 heures. Nous devrons donc malheureusement interrompre la liste des orateurs vers 17 heures 10, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi)* – Notre Assemblée doit défendre l’équilibre des pouvoirs dans notre maison commune, le Conseil de l’Europe. En tant que parlementaires, nous devons être des chiens de garde, non pas pour aboyer contre nos gouvernements, mais pour les guider et les inciter à adopter des normes plus exigeantes en matière de démocratie, de prééminence du droit et de droits de l’homme, autant de valeurs que nous avons volontairement décidé d’accepter en devenant membres de l’Organisation. Nous devons nous efforcer d’aller vers le haut et non vers le bas.

Je sais que certains d’entre vous ont comparé la situation de différents pays. Mais, ne l’oubliez pas, chaque pays est unique, doit être traité en tant que tel et apprécié pour ses propres mérites. Fermer les yeux sur ce qui se passe ici ne peut pas nous servir d’excuses pour ce qui se passe ailleurs. Veillez à ce que votre décision d’ouvrir ou non une procédure de suivi pour la Hongrie nous fasse aller vers le haut.

En tant que corapporteure désignée par la commission de suivi, je peux vous donner l’assurance que nous avons investi beaucoup de temps et d’efforts pour préparer notre avis. Nous avons consulté d’innombrables documents, effectué trois visites sur place, eu plus de 80 rencontres et entretiens. En outre, nous avons bien sûr examiné soigneusement les 11 avis préparés par notre instance experte en matière constitutionnelle : la Commission de Venise. Son dernier avis sur le quatrième amendement à la Constitution hongroise conforte très clairement les conclusions de la commission de suivi, que vous trouverez dans notre rapport.

Le Conseil de l’Europe a apporté beaucoup de conseils d’experts aux autorités hongroises en matière de législation sur les médias. Malheureusement, la plupart des préoccupations mentionnées dans ces avis n’ont pas été prises en compte, ou bien les modifications n’ont concerné que quelques aspects techniques très limités.

Essayons de résumer nos conclusions. Tout d’abord en ce qui concerne la démocratie. Depuis 2010, le gouvernement actuel a utilisé le système de la majorité des deux tiers pour amender l’ancienne constitution à douze reprises et pour imposer en moins d’un an une Constitution entièrement nouvelle qui, d’ailleurs, elle-même, a déjà été amendée à quatre occasions, la dernière fois se situant au mois de mars 2013 – et d’autres changements sont à venir, nous dit-on.

Changer en permanence la Constitution transforme celle-ci en instrument de pouvoir politique, au lieu qu’elle soit un cadre pour l’organisation de l’Etat et du gouvernement. Cela mine sa légitimité démocratique.

En un temps record, la coalition au pouvoir a d’autre part adopté plus de 30 lois dites cardinales, qui exigent une majorité des deux tiers pour être adoptées ou amendées.

La vaste utilisation des lois cardinales pour appuyer les politiques économiques, sociales, fiscales, familiales, éducatives ou autres de la majorité actuelle constitue une menace sérieuse pour la démocratie. La Commission de Venise a même indiqué, je cite : « les élections perdent de leur sens si le législateur n’est pas en mesure de changer les éléments importants de la législation qui auraient dû être mis en œuvre à la majorité simple ».

En ce qui concerne la prééminence du droit, la majorité actuelle semble vouloir exercer un contrôle sur la société hongroise au-delà du mandat reçu des électeurs. Le grand nombre d’institutions et d’instances de régulation qui ont été, soit nouvellement créées, soit réformées en profondeur par la coalition au pouvoir, souligne cette intention. J’en mentionnerai quelques-unes : l’Institution du médiateur, le Conseil des médias, l’Autorité des médias, le Comité national des élections, l’Autorité pour la protection des données, le Conseil budgétaire…

Depuis 2010, l’administration du système judiciaire a été entièrement révisée et placée sous le contrôle de la majorité au pouvoir. Plus de 300 juges ont été poussés à la retraite, l’âge de départ à la retraite ayant été baissé de 70 à 62 ans. La Cour suprême a été remplacée par la Curia et le mandat de son président a été interrompu brusquement avant son terme.

Le nouveau Bureau judiciaire national donne à son président, élu pour 9 ans, un nombre excessif de compétences. Cet office a été confirmé dans la Loi fondamentale, sans indication des limitations nécessaires et de l’équilibre nécessaire des pouvoirs. Le quatrième amendement offre à cet office une légitimité supplémentaire sans le rendre davantage responsable. L’instance suprême de l’autonomie judiciaire n’est même pas mentionnée dans la Loi fondamentale.

L’érosion de l’équilibre des pouvoirs n’est nulle part plus apparente que dans l’amputation systématique des pouvoirs et compétences de la Cour constitutionnelle. La Cour constitutionnelle n’a plus juridiction sur les questions financières et économiques, réglées par des lois cardinales, et toutes ses décisions prises avant le 1er janvier 2012 ont été déclarées nulles et non avenues ! Sa compétence en ce qui concerne les amendements constitutionnels est aujourd’hui expressément limitée à des questions de procédure.

Selon la Commission de Venise, la limitation du rôle de la Cour constitutionnelle conduit au risque que soient affectés négativement les trois piliers du Conseil de l’Europe : la séparation des pouvoirs, en tant qu’élément essentiel de la démocratie, la protection des droits de l’homme et la prééminence du droit. Ce qui est plus important encore, comme l’a aussi noté la Commission de Venise, c’est qu’il y a un schéma permanent de réactions par rapport aux décisions de la Cour constitutionnelle : les dispositions déclarées anticonstitutionnelles et annulées par la Cour constitutionnelle ont été réintroduites au niveau constitutionnel, la Cour étant empêchée de les examiner à l’avenir.

Cette amputation des compétences de la Cour constitutionnelle en matière de contrôle des dispositions qui auraient dû rester au niveau de la législation ordinaire constitue une violation du système démocratique d’équilibre des pouvoirs et de séparation des pouvoirs, selon la Commission de Venise.

En ce qui concerne les droits de l’homme, le nouveau cadre constitutionnel et juridique en Hongrie contredit à bien des égards les normes européennes et en particulier la Convention européenne des droits de l’homme. C’est particulièrement le cas s’agissant de la législation cardinale sur le système judiciaire, les élections et la reconnaissance des églises. La Cour européenne a déjà constaté une violation de la Convention dans une série de cas, telles que la taxe de 98 % ou le limogeage sans motivation des fonctionnaires.

Cent cinquante juges ont introduit une requête pour contester leur mise à la retraite d’office et quelque 13 000 agents de sécurité ou des forces de l’ordre se plaignent du remplacement de leurs dispositions de préretraite par une prime imposable.

Mes chers collègues, personne ne conteste que les élections de 2010 aient été libres et équitables, et que la coalition au pouvoir dispose d’un mandat clair de réforme. Mais la majorité des deux tiers ne signifie pas que le vainqueur puisse s’emparer de tous les pouvoirs et faire tout ce qui lui plait.

Nous avons vu depuis deux ans que la Constitution et les lois cardinales étaient systématiquement utilisées comme instruments politiques pour asseoir et cimenter les choix de la majorité, bien au-delà du mandat des électeurs. Ce qui affaiblit à la fois le système constitutionnel et l’équilibre de pouvoirs. D’où une grande préoccupation de notre part. L’Assemblée et le Conseil de l’Europe perdraient toute crédibilité en tant que gardiens de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme si les propositions de la commission de suivi, à savoir l’ouverture d’un suivi attentif de ce qui se passe en Hongrie, devaient être repoussées aujourd’hui.

Nous avons certes bien coopéré avec les autorités hongroises et nous nous félicitons de leur bonne volonté s’agissant de combler différentes lacunes et de se pencher sur les préoccupations manifestées par l’Assemblée. Mais nous avons aussi souvent espéré en vain ! Un suivi plus attentif nous semble donc nécessaire. La procédure de suivi est le seul mécanisme qui permette d’y parvenir.

LE PRÉSIDENT – Madame la rapporteure, il vous restera quatre minutes pour répondre aux orateurs.

Conformément au Règlement, un représentant du Bureau peut s’exprimer en son nom. Ce sera M. Walter, qui dispose de trois minutes.

M. WALTER (Royaume-Uni)* – Lors de sa dernière réunion, à Erevan, le Bureau a examiné la demande émanant de la commission de suivi visant à ouvrir une procédure de suivi pour la Hongrie. Nous avons conclu, après discussion, que l’Assemblée ne devrait pas ouvrir cette procédure, et ce à 13 voix contre 7.

La procédure de suivi est extrêmement sérieuse. Lorsqu’une demande de procédure de suivi est formulée, notre responsabilité est avant tout d’examiner cette demande avec soin et de manière objective. Nous devons adopter une approche objective, libre de tout biais politique, peser le pour et le contre, enfin nous demander si cette procédure sera plus efficace que d’autres moyens d’action.

Les préoccupations énoncées par la rapporteure, ainsi que par d’autres membres du Bureau favorables à l’ouverture d’une procédure de suivi, sont sérieuses et légitimes. Et je crois que nous sommes tous d’accord pour dire que l’adoption par la Hongrie d’une nouvelle Constitution et de plusieurs lois cardinales pose de véritables questions sur les principes et procédures démocratiques. Et que la demande d’ouvrir une procédure de suivi est motivée par le désir d’aider la Hongrie.

En revanche, nous n’avons pas tous le même point de vue sur la meilleure stratégie à adopter pour ce faire. Le Bureau considère que la Hongrie, malgré tous les défis internes qu’elle doit relever, n’appartient pas à la catégorie des pays devant faire l’objet d’une procédure de suivi.

En tant que membre à part entière de l’Union européenne, la Hongrie doit montrer qu’elle est engagée en faveur de la prééminence du droit. Elle ne compte pas de prisonniers politiques ni ne pratique de violations majeures des droits de l’homme, et même s’il existe des difficultés au plan technique, les changements constitutionnels ont recueilli un large soutien du public après les élections libres et équitables de 2010.

La Hongrie est confrontée à des questions constitutionnelles qui justifient certes un suivi juridique plus étroit ; pour autant, cela ne signifie pas que le pays doive être mis sous surveillance politique. Le Conseil de l'Europe dispose d’autres mécanismes pour effectuer un suivi des défis auxquels la Hongrie est confrontée. Il n’y a, à mon avis, pas de meilleure organisation que la Commission de Venise, d’ores et déjà impliquée dans le processus, pour guider le Gouvernement hongrois. A cela peut s’ajouter le suivi démocratique de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, dont les compétences pourraient compléter le travail d’ores et déjà entrepris.

Il ne fait aucun doute que ces organes détiennent l’expertise et l’expérience nécessaires pour examiner les questions soulevées, recommander des solutions et travailler avec le Gouvernement hongrois afin de parvenir à un résultat satisfaisant.

Selon le Bureau, il serait plus sensé de poursuivre un processus déjà engagé et qui progresse favorablement avec la totale coopération des autorités hongroises, ce qui est essentiel.

La Hongrie a dû faire face à des critiques et a coopéré avec la Commission de Venise. Elle a pris en considération les recommandations de celle-ci et, malgré des désaccords, le Gouvernement hongrois a réitéré son engagement en faveur du dialogue, ce dont il faut se féliciter.

Entamer une procédure de suivi pourrait nuire à la confiance que nous avons réussi à instaurer jusqu’à maintenant, sans compter que nous utiliserions mal la procédure de suivi, instrument essentiel du changement dans les pays qu’elle concerne. Il n’existe pas de solution qui s’appliquerait à tous de la même manière.

Il ne s’agit pas pour autant d’ignorer les déficiences qui transparaissent au sein du processus démocratique en Hongrie ou de faire en sorte qu’un Etat membre ne respecte pas les obligations qu’emporte le fait d’être membre du Conseil de l’Europe. Il s’agit d’apporter une réponse adaptée et proportionnée au défi.

L’amendement 2 pourrait avoir pour effet de renvoyer cette question au Bureau qui se réunit vendredi prochain et par la suite devant la commission des affaires juridiques. Il s’agirait là d’une réponse appropriée et proportionnée.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur Walter.

La discussion générale est ouverte.

M. CHOPE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Je suis en total accord avec le propos de M. Walter. Nous devons, en effet, avoir une réaction adéquate et proportionnée au problème posé.

Dès 1956, je me suis intéressé à la Hongrie, car j’avais un ami dont le père travaillait à l’époque à l’ambassade britannique à Budapest. Bien entendu, on ne peut pas comparer ce qui se passe aujourd’hui à ce qui se passait en 1956. Soyons réalistes !

Je crains que nombre de préoccupations développées par certains de nos collègues ici ne servent simplement qu’à exprimer une certaine colère.

L’article 1 de l’amendement 4 à la Constitution dit que le mariage en Hongrie doit être protégé en tant qu’union d’un homme et d’une femme. Cela a créé de nombreuses réactions, au Parlement européen notamment. Mais la Commission de Venise a indiqué que, conformément à la jurisprudence de la Cour, le mariage est bien l’union d’un homme et d’une femme. Nous sommes là dans des marges d’appréciation qui reviennent aux autorités hongroises, car la Hongrie, pays libre, souverain et démocratique, a le droit de changer sa politique et de faire évoluer ses lois, de la même façon que son gouvernement élu démocratiquement peut modifier sa Constitution.

Nous avons ici pour habitude de rappeler à l’ordre les pays qui ne respectent pas les normes du Conseil de l'Europe en matière de droits de l’homme, mais ouvrir une procédure de suivi, comme cela est proposé dans le présent projet de résolution, serait aller trop loin. C’est la raison pour laquelle j’espère que nous allons adopter une approche plus ciblée et plus raisonnable.

Les autorités hongroises n’ont défié personne, ni le Conseil de l'Europe ni la Commission de Venise. Au contraire, elles se sont engagées dans des discussions constructives avec le Secrétaire Général de notre Organisation ainsi qu’avec les représentants de l’Union européenne et divers ministres de pays membres du Conseil de l'Europe. Si le Gouvernement hongrois s’était simplement montré intransigeant et avait décidé de ne pas tenir compte de nos remarques, je pourrais comprendre l’attitude de certains, mais les Hongrois se sont au contraire montrés respectueux et se sont engagés dans un vrai dialogue.

M. HUNKO (Allemagne) porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne*– Je m’exprime comme représentant de mon groupe, mais également en tant que l’un des premiers signataires de la Résolution de 2011 par laquelle nous demandions l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie.

Je remercie tout d’abord Mme Lundgren pour son excellent rapport.

Depuis deux ans et demi, la commission de suivi évoque la situation de la Hongrie. Nous avons pris connaissance de onze avis de la Commission de Venise, dont le dernier, relatif au quatrième amendement, date d’il y a à peine une semaine. Tous étaient particulièrement critiques quant au respect de l’équilibre entre les pouvoirs, notamment entre l’organe législatif et la Cour constitutionnelle.

En novembre 2012, une loi a été adoptée qui pénalise les sans-abri. Les personnes sans abri arrêtées à deux reprises doivent aller en prison ou verser une amende de 500 euros. La Cour constitutionnelle a estimé que cette loi était contraire à la dignité des sans-abri et qu’elle violait la Constitution. Le pouvoir a alors modifié la Constitution pour intégrer, à la majorité des deux tiers, ladite loi dans la Constitution ! Il est déjà problématique d’adopter une telle loi, mais plus encore de l’inscrire dans la Constitution ! Il s’agit d’un véritable abus, que la Commission de Venise a signalé.

Examinons maintenant les arguments que l’on nous oppose. On nous dit que la situation des pays où l’on torture et où l’on emprisonne pour des motifs politiques est encore plus problématique. Certes, mais nous ne pouvons adopter de tels critères. Nous ne saurions en effet mesurer le respect de la prééminence du droit et de l’Etat de droit en nous référant au niveau le plus bas. Nous devons au contraire viser au plus haut.

On a également prétexté qu’il n’était pas question de sanctionner le Gouvernement hongrois et que la procédure de suivi ne serait donc pas le bon outil, alors que c’est au contraire celui dont le Conseil de l’Europe s’est doté pour pouvoir, dans le cadre d’une procédure ordonnée, faire le point sur la situation d’un pays. La procédure de suivi, je le répète, avant de conduire éventuellement à des sanctions, sert à orienter et à guider.

Je lance donc un appel à notre sens des responsabilités. Si nous votons contre le projet de résolution, nous serons moins pris au sérieux. Si nous n’adoptons pas ce rapport, notre voix sera moins entendue à l’avenir, notamment par l’Union européenne.

Votez ce texte à la fois dans l’intérêt de la Hongrie et dans celui de l’Assemblée parlementaire.

M. VOLONTÈ (Italie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je ne suis le chien de garde de personne : je suis un simple député qui, comme un grand nombre d’entre vous ici, a la passion des droits de l'homme. Nous ne sommes pas des chiens qui mordent leurs camarades de banc du Conseil de l’Europe.

De plus, comme cela a déjà été souligné, la Hongrie a beaucoup coopéré tout au long de ces dernières années. Convient-il dès lors d’ouvrir une procédure de suivi pour ce pays ? Soyons raisonnables !

Il aurait fallu d’ailleurs évoquer tous les avis de la Commission de Venise. Or, jusqu’en janvier 2013, celle-ci a simplement souligné le fait que la Hongrie s’était montrée très coopérative et que de grands progrès avaient été réalisés pour corriger les points incriminés.

Il n’est pas non plus inutile de rappeler que l’ouverture d’une procédure contre la Hongrie a pour origine une dénonciation publique opérée par les médias. Or quels sont exactement les faits ? En Hongrie, une coalition disposant de la majorité des deux tiers a modifié la Constitution. Si c’est un péché mortel dans une démocratie, il faut alors demander à nos gouvernements d’amender la Convention pour interdire dorénavant aux pays membres du Conseil de l’Europe d’avoir des majorités de plus des deux tiers !

Le peuple hongrois s’est engagé dans un effort sérieux de réforme de sa Constitution. Comment peut-on l’en critiquer ? Il y a trois ans à peine, le fait que la Hongrie disposât encore d’une Constitution soviétique ne scandalisait personne. Et ce serait sa nouvelle Constitution qui saperait les trois piliers du Conseil de l’Europe dans un de ses Etats membres ? Faisons preuve d’objectivité !

Voter contre la demande qui nous est faite, ce ne serait offenser ni la Hongrie ni le Conseil de l’Europe. Ce serait au contraire faire un pas en direction d’une évaluation à la fois plus sérieuse et plus objective.

Oublions les raisons qui ont conduit, il y a deux ans, certains dirigeants politiques à demander une intervention urgente. Revenons-en à un débat moins politisé. Faisons avec sérieux notre devoir en prenant acte de l’évolution positive du peuple hongrois. Il faut rejeter la demande d’ouverture de la procédure de suivi.

M. von SYDOW (Suède), porte-parole du Groupe socialiste* – Il ne s’agit pas ici d’attaquer la Hongrie mais au contraire d’ouvrir une procédure de suivi par respect pour la Hongrie.

Il est tout à fait raisonnable que la majorité des deux tiers suffise à modifier la Constitution hongroise : ce qui pose problème, c’est que cette majorité des deux tiers puisse être réunie par un seul parti représenté au Parlement. Toute réforme de la Constitution doit impérativement prévoir des négociations avec l’opposition en vue de dégager un compromis.

Un autre garde-fou consiste dans le recours aux institutions internationales : la Cour européenne des droits de l'homme, la Commission de Venise, ainsi que les différentes institutions de l’Union européenne. Les restrictions qu’on s’impose à soi-même sont rarement attractives. Toutefois, afin de dégager le consensus national, il faut parfois s’imposer d’importantes restrictions lorsque les temps sont durs.

Il ne s’agit pas ici de faire deux poids deux mesures. La Suède, mon pays, fait l’objet de critiques assez vives de la part du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) et d’autres instances du Conseil de l’Europe. Il n’est pas facile pour un pays de s’adapter : cela demande toujours du temps. Toutefois, la Suède s’adapte aux critiques du GRECO.

Le Groupe socialiste appuie pleinement le rapport ainsi que l’intervention liminaire de la rapporteure.

Des discussions ont eu lieu entre les partisans de la procédure de suivi et ceux de l’amendement 2, qu’a présenté M. Robert Walter au nom du Bureau. Il faut choisir. Nous sommes pour le suivi.

Mme REPS (Estonie), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Le rapport, qui est très clair et s’appuie sur des faits, établit très clairement que la nouvelle Constitution détériore l’équilibre qui existait auparavant et qu’elle sape les principes fondamentaux du Conseil de l’Europe : la démocratie, la prééminence du droit et le respect des droits de l'homme. Amnesty International et la Commission de Venise arrivent à la même conclusion et un groupe d’experts indépendants confirme chaque point du rapport. Le quatrième amendement de la nouvelle Constitution risque de saper en Hongrie ces piliers du Conseil de l’Europe que sont la démocratie, la prééminence du droit et les droits de l'homme.

Les débats au sein de la commission ont montré à quel point l’Assemblée parlementaire est divisée sur le sujet. Les commissaires ont dû voter deux fois.

Je suis défavorable à l’amendement 2, qui sape tout le travail que nous avons réalisé.

Je rappelle en effet que la procédure de suivi est un mécanisme permettant d’assurer le suivi de la situation dans un pays donné. Il ne s’agit ni d’humilier ni encore moins de sanctionner ce pays.

La communauté internationale devrait bien suivre ce que nous sommes en train de faire ici. Si nous ne décidons pas nous-mêmes d’utiliser nos propres mécanismes de suivi pour engager un dialogue avec la Hongrie, d’autres, comme la Commission européenne, se sentiront obligés de le faire, ce qui ne fera qu’affaiblir notre Organisation. Cela ne peut être le souhait de l’Assemblée aujourd’hui.

De nombreuses personnes estiment qu’il y a deux poids, deux mesures. Ce serait le cas si aucune mesure n’était prise alors que les préoccupations sont extrêmement sérieuses. Comment pourrions-nous justifier que d’autres pays fassent l’objet d’une procédure de suivi s’il n’y en a pas pour la Hongrie, qui suscite tant de préoccupations ? Ne pas ouvrir cette procédure affaiblirait celle-ci ainsi que la crédibilité de notre Organisation.

Quel que soit le parti auquel nous appartenons, nous devons d’abord être loyaux envers la démocratie, la prééminence du droit et les droits de l’homme.

LE PRÉSIDENT – Madame la rapporteure, poursuivons-nous le débat général ou souhaitez-vous répondre maintenant ?

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Nous poursuivons.

Mme BAKOYANNIS (Grèce)* – Mes chers collègues, il est vrai que nous sommes divisés. J’ai suivi toute cette affaire de très près, le premier groupe de suivi, le deuxième, le rapport sur la Hongrie. Très honnêtement, j’ai le sentiment que nous n’acceptons pas que le peuple hongrois ait pu décider à une majorité des deux tiers. Rappelons que la loi électorale n’a pas été écrite par l’actuel gouvernement mais par l’ancien. Nous aimerions tous obtenir une majorité des deux tiers ! Cette majorité a le droit de prendre des décisions – c’est cela, la démocratie. Elle peut aussi changer la Constitution. Dans mon pays, on n’a jamais eu une telle majorité. Si nous pouvions en avoir une, nous aimerions nous doter d’universités privées, ce que la Constitution grecque nous interdit actuellement.

Nous pouvons être préoccupés par certaines choses qui se passent en Hongrie. La Commission de Venise a fait des remarques très sévères. Qu’attendions-nous du Gouvernement hongrois ? Qu’il corrige le tir, ce qu’il a fait entre le premier et le troisième groupe de suivi, avec beaucoup de changements et de décisions.

Aujourd’hui, certains souhaitent ouvrir une procédure de suivi pour la Hongrie. Et pour la Géorgie alors ? Hier, un collègue géorgien se demandait si un membre de l’opposition était mort en Hongrie ou si le chef de l’opposition avait été jeté en prison. C’est pour ce genre de situation qu’il faut une procédure de suivi. S’agissant de la Hongrie, membre de l’Union européenne, je crois fermement que nous n’avons pas besoin de cette procédure qui a forcément quelque chose d’insultant.

L’amendement 2 de M. Walter va dans la bonne direction. Nous devons regarder de près ce qui se passe en Hongrie mais sans ouvrir une procédure de suivi pour ce pays, qui est, je le répète, membre de l’Union européenne. Bien d’autres pays mériteraient davantage une telle procédure.

M. RECORDON (Suisse) – Chers collègues, je suis un peu déçu, voire inquiet, de constater au fil des sessions que le souci des droits de l’homme se banalise même dans cette Assemblée. Je comprends la réaction émotionnelle qu’on peut avoir lorsque son pays est mis en cause. Je n’en ai pas été complètement exempt lorsque le mien l’a été sur des questions financières. Je dois cependant reconnaître que, malgré certaines exagérations, c’était à juste titre.

Monsieur von Sydow a rappelé que parfois la Suède elle-même est dans le collimateur.

Une procédure de suivi pose-t-elle à ce point un problème qu’il faille faire passer les intérêts émotionnels d’un pays, voire nationaux, je n’ose pas dire nationalistes, avant la défense des droits de l’homme ? Une procédure de suivi ne peut-elle être ouverte que s’il y a des morts ?

Il y a eu en Europe des dérives qui ont pu aboutir à des pertes de vies, y compris dans des pays réputés très démocratiques, mais c’était ponctuel et dans un cadre très spécifique. Ce qui frappe dans le cas hongrois, c’est que, sur de nombreux plans, la liberté d’expression, le racisme, l’antisémitisme même, on banalise les violations des droits. C’est extrêmement inquiétant et cela constitue un très mauvais exemple pour l’ensemble de l’Europe, qui a malheureusement parfois tendance à suivre.

Je vous pose la question, et la poser, c’est y répondre : devons-nous faire passer les intérêts nationaux avant notre rôle de défenseur des droits de l’homme ou devons-nous sacrifier les droits de l’homme à l’intérêt d’un pays ?

M. BRAUN (Hongrie)* – Lorsque la proposition de résolution pour l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie a été présentée, j’ai ressenti de la colère et de la déception. Je suis sûr que la Hongrie est un pays démocratique où les droits de l’homme prévalent. Elle est engagée en faveur de la liberté et de la démocratie. Elle est membre du Conseil de l’Europe depuis 1990.

Dans l’amendement 7 appuyé par la commission de suivi, il est précisé que le Parlement hongrois, pour la première fois dans l’histoire de la Hongrie libre et démocratique, a modifié la Constitution afin de la transformer en une loi fondamentale moderne par le biais d’une procédure démocratique, après des débats intenses et avec la contribution de la société civile. L’ancienne constitution était un document temporaire, le résultat d’un accord politique. Ce n’était pas une constitution adoptée par un parlement librement élu.

Lors des élections de 2010 il y a eu une majorité des deux tiers et des mouvements politiques de protestations qui furent les conséquences d’une grande frustration sociale. Ces vingt dernières années, la société hongroise a beaucoup changé, mais le cadre juridique n’a pas suivi.

L’un des objectifs les plus importants de la procédure de suivi devrait être de permettre aux Etats membres un peu réticents de coopérer avec les différents organes du Conseil de l’Europe. Ces trois dernières années, le Gouvernement hongrois a bien marqué son intention de mener un dialogue ouvert et constructif avec le Conseil de l’Europe et ses différents organes, pas uniquement par courtoisie. Il en est résulté la modification de plusieurs lois à la demande du Conseil de l’Europe. Je remercie le Secrétaire Général et le Président de l’Assemblée parlementaire pour leur dévouement et leur coopération.

En conclusion, je demande aux membres de l’Assemblée de voter contre l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie.

Mme von CRAMON-TAUBADEL (Allemagne)* – L’ouverture d’une procédure de suivi revêt différents aspects, que nous devons tous considérer aujourd’hui. Sur le fond, il faut rappeler que le rapport de la Commission de Venise sur le quatrième amendement, présenté le 4 juin, critique l’inscription dans la Constitution hongroise de toute une série de dispositions déclarées anticonstitutionnelles. Ainsi, quel sens cela a-t-il, sur le plan constitutionnel, de donner aux communes la possibilité de condamner les sans-abri à des peines d’amende ? De même, pourquoi les étudiants hongrois ayant obtenu une bourse d’étude à l’étranger devraient-ils s’engager à revenir ensuite dans leur pays ? La Constitution hongroise est de toute évidence utilisée à des fins politiques. La Commission de Venise a le devoir de le dénoncer haut et fort.

Autre sujet de préoccupation, plus de 500 amendements ont été adoptés en trois ans au Parlement, devenu une véritable machine à légiférer. La Commission de Venise est dans son rôle lorsqu’elle critique les violations des normes du Conseil de l’Europe, ou bien il ne lui reste plus qu’à mettre les clés sous la porte !

Je voudrais demander aux membres du Groupe du Parti populaire européen pourquoi une constitutionnaliste polonaise ou un juriste finlandais auraient intérêt à diffamer la Hongrie. C’est tout à fait absurde ! Comme l’a rappelé M. von Sydow, nous nous sommes dotés de la Commission de Venise précisément pour connaître de manière objective la situation juridique d’un pays. Remettre en question cette instance serait remettre en question le Conseil de l’Europe tout entier.

La Hongrie constitue un problème pour l’Union européenne elle-même. Si nous refusions aujourd’hui, pour des raisons politiques, la demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie, nous porterions un coup cruel à l’Etat de droit et à la démocratie en Europe. Nous ne devons pas laisser la question du respect des normes sous la seule responsabilité de l’Union européenne.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Lorsque nous avons discuté pour la première fois de l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie, j’ai voté pour. Il n’y avait d’ailleurs qu’une voix de différence entre les votes pour et les votes contre. Toutefois, j’étais déjà réservé sur le rapport, comme je l’avais expliqué alors. Il me semble, aujourd’hui encore, que nous nous y prenons mal. En effet, sur les 193 paragraphes de ce nouveau rapport, pas un ne présente les avantages pour la Hongrie de faire l’objet d’une procédure de suivi de l’Assemblée parlementaire. C’est pourtant l’objet d’un tel rapport !

Une procédure de suivi sera-t-elle source d’améliorations supplémentaires par rapport aux démarches déjà en cours pour la Hongrie au Conseil de l’Europe ? Comme l’a si bien dit Mme Bakoyannis, tous les pays européens aimeraient bénéficier d’une majorité telle que celle qui existe actuellement en Hongrie. Il est vrai que, par le passé, ceux qui ont connu une forte majorité politique se sont parfois lancés dans des entreprises hasardeuses, comme la guerre. Toutefois, si la population hongroise était réellement en désaccord avec le pouvoir politique actuel, elle l’aurait manifesté dans la rue.

Les responsables politiques européens doivent sortir de leur position de supériorité à l’égard de la Hongrie et protéger les droits démocratiques des citoyens hongrois qui ont voté pour le gouvernement actuel. Il ne faut pas soutenir uniquement l’opposition.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vous rappelle que le scrutin pour l’élection des juges est ouvert. Celles et ceux qui n’ont pas encore voté ont la possibilité de le faire pendant encore 35 minutes.

Sir Edward LEIGH (Royaume-Uni)* – Dans une démocratie, les électeurs choisissent leur gouvernement. En Hongrie, ils lui ont donné une majorité des deux tiers et nous n’avons pas le droit de le contester. Le nouveau gouvernement a remplacé la constitution communiste par une nouvelle Constitution, fermement enracinée dans les principes de la démocratie. Les protestations qui se sont élevées à son sujet paraissent tout à fait injustifiées. Dans le magazine Weltwoche, un constitutionaliste de renom estime que cette Constitution est moderne et défend les valeurs fondamentales de la démocratie et les droits de l’homme au même titre que les autres Constitutions européennes.

Interrogé sur la nouvelle Constitution hongroise, Viktor Orbán a déclaré vouloir réformer son pays en accord avec les valeurs européennes, conformément au principe de subsidiarité, central dans le droit communautaire. Dans une interview à la télévision française, il a expliqué le sens qu’il donne au mot « nationalisme » en se référant à l’approche du général de Gaulle. Il y a de la place, mes chers collègues, pour un nouveau gaullisme en Europe. En tout état de cause, ce sont aux électeurs, et non aux parlementaires, d’en décider.

Les modèles possibles de coopération européenne sont nombreux. Viktor Orbán propose une Europe des Nations dans laquelle les peuples peuvent s’unir sans perdre leurs particularités et leur souveraineté. C’est un modèle parfaitement démocratique et c’est celui qu’a choisi le peuple hongrois. Le Royaume-Uni et d’autres pays européens partagent largement cette vision de l’Europe. La démocratie est fermement enracinée dans la nouvelle Constitution hongroise. La controverse sur la loi relative aux médias montre que les institutions hongroises fonctionnent. Le contester, ce serait porter offense aux électeurs.

La Hongrie possède un système de souveraineté parlementaire comme le Royaume-Uni. Si les Hongrois veulent le changement, ils peuvent voter pour les partis de l’opposition ! Si l’on décidait d’ouvrir une procédure de suivi pour la Hongrie, alors il faudrait l’ouvrir également pour le Royaume-Uni.

M. GULYÁS (Hongrie)* – Permettez-moi, en tant que membre hongrois de la commission de suivi, de vous remercier pour le dialogue stimulant et fructueux au sein de la commission. Merci pour toutes les discussions que nous avons eues à l’intérieur mais aussi à l’extérieur du Conseil de l’Europe.

La phase de pré-suivi qui a duré deux ans et demi illustre les forces et la créativité de notre communauté de valeurs. Nous avons constaté de nombreux signes d’ouverture et de confiance, même si quelquefois le débat n’a pu éviter certains a priori politiques – raison pour laquelle l’autre rapporteur, membre du Groupe démocrate européen, a démissionné.

De nombreux officiels hongrois ont souligné l’importance de la coopération avec la Commission de Venise, qui, lors de la l’élaboration de ses avis, a accepté l’argumentation présentée par les autorités hongroises. Ces dernières ont adopté de nombreuses recommandations de la Commission.

Conformément à l’amendement 5, appuyé par la commission de suivi, le Gouvernement hongrois est favorable à la poursuite du dialogue avec la Commission de Venise. Un autre amendement de la commission de suivi affirme que les dispositions de la Loi fondamentale se fondent sur les valeurs européennes traditionnelles.

La majorité au pouvoir au Parlement hongrois est très engagée en faveur de la Convention européenne des droits de l’homme et des trois piliers du Conseil de l’Europe.

Le renforcement de la solidarité européenne entre les Etats membres et de la confiance européenne est essentiel en ces temps difficiles. Il est primordial que nos citoyens perçoivent toute l’attention apportée par les institutions européennes et ressentent la fraternité des autres citoyens européens.

C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir suivre la position du Bureau de l’Assemblée en votant contre l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie, et d’appuyer les amendements présentés par le Groupe démocrate européen et le Groupe du Parti populaire européen.

Enfin, deux de mes collègues allemands ont affirmé que la Constitution hongroise pénalisait les sans-abri. En réalité, vous trouverez dans cette Constitution un paragraphe garantissant aux sans-abri un hébergement et le droit de résider ! N’oublions pas les faits.

Mme BOURZAI (France) – La Hongrie a longtemps fait figure de modèle en Europe centrale et orientale après la chute du mur de Berlin. La modernisation de ses structures politiques et économiques a servi de référence pour ses voisins. Son intégration au sein du Conseil de l’Europe puis de l’Union européenne s’imposait. Un des artisans de cette transition réussie vers la démocratie, l’économie de marché et l’Europe est d’ailleurs l’actuel Premier ministre.

La crise économique, mais aussi politique, qu’a traversé le pays à la fin des années 2000 semble avoir compromis cette évolution. Nous pouvons ainsi constater un écart préoccupant entre la pratique politique mise en œuvre depuis 2011 et les valeurs défendues par notre Organisation.

Entendons-nous bien, je ne dis pas qu’il y a une mise en cause de la démocratie au sens où l’alternance serait désormais impossible en Hongrie. J’observe simplement que si l’alternance intervient, la nouvelle majorité sera ligotée par une Constitution intégrant nombre de dispositions qui devraient plutôt relever de la loi ordinaire. Cette constitutionnalisation excessive est au cœur des réserves exprimées par les organes européens. Si la Constitution prescrit une politique, quel choix démocratique reste-t-il aux électeurs ? Le quatrième amendement à la Constitution adopté en mars dernier est d’ailleurs venu confirmer cette tendance.

Je note ainsi que nombre des dispositions contestées par la Commission de Venise mais aussi par la Commission européenne ont été finalement intégrées dans la Loi fondamentale hongroise. Et cela alors même que le Gouvernement hongrois se déclarait prêt à coopérer avec les institutions européennes en vue d’amender ces dispositifs !

Les lois sur les médias adoptées en 2010 avaient ainsi été sensiblement révisées sous la double pression de la Cour constitutionnelle et des instances européennes. Des négociations, jugées d’ailleurs positives par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, sont encore en cours. Mais le quatrième amendement adopté en mars dernier constitutionnalise une disposition ambiguë limitant l’usage de la liberté d’expression dès lors qu’elle serait supposée violer la dignité de la nation hongroise, concept dont la portée reste à préciser.

La Commission européenne a atténué ses critiques à la mi-juin en s’estimant satisfaite sur deux points précis : la réforme du système judiciaire et le dispositif prévoyant une taxe spéciale prélevée pour financer d’éventuelles amendes imposées par la Cour de justice de l’Union européenne. Je note qu’un certain nombre de questions restent en suspens : je pense notamment à l’impossibilité pour les partis politiques de faire campagne dans les médias électroniques privés mais aussi à la limitation des pouvoirs de la Cour constitutionnelle.

C’est dans ce contexte que la demande d’ouverture d’une procédure de suivi de la Hongrie par le Conseil de l’Europe prend tout son sens. Il ne s’agit pas pour notre Organisation de jouer les censeurs ou de contester la légitimité du gouvernement en place, mais plutôt de mettre fin au double langage des autorités hongroises en pointant les écarts entre leurs déclarations d’intention et la réalité de leur action.

Mme CSÖBÖR (Hongrie) – En tant que nouveau membre de la délégation hongroise, encore novice, ne connaissant pas les compromis internes pratiqués par les membres de l'Assemblée, je souhaite attirer votre attention sur certains aspects.

La grande majorité des citoyens hongrois restent perplexes devant certaines critiques formulées contre la Hongrie, car dans leur quotidien, ces citoyens ne sont pas confrontés aux situations décrites par le rapport, qui sont issues soit d'une mauvaise interprétation, soit d'une intention politique.

Pour ma part, je dois constater que les mesures du Gouvernement hongrois, disposant d’une légitimité démocratique et d'une majorité de deux tiers au Parlement, sont évaluées de manière très unilatérale. De plus nous parlons d'un pays qui a vécu le cataclysme de 1956 et a été un exemple d'héroïsme au cours de cette révolution.

Je pense qu'une réflexion de la part de chaque Etat membre du Conseil de l'Europe ne ferait pas de mal, car certaines des accusations formulées contre la Hongrie pourraient également être évoquées à l’encontre de chaque Etat.

En outre, le rapport ignore également le fait que le Gouvernement hongrois a modifié, à de multiples reprises, sa législation sur la base des remarques des experts du Conseil de l'Europe et de la Commission de Venise. Notre volonté de coopération est intacte et, d'ailleurs, le Gouvernement hongrois a d'ores et déjà déposé au parlement les amendements constitutionnels et législatifs conformes à la position de la Commission de Venise.

Sauf erreur de ma part, la mission du mécanisme de suivi est d'attirer l'attention sur certaines corrections nécessaires et non de provoquer une confrontation. Pourtant, le texte actuel du projet de résolution est unilatéral et imprécis. Aussi ne pouvons-nous pas l'accepter sans les modifications nécessaires. Je vous appelle, mes chers amis, à soutenir notre position.

M. BIEDROŃ (Pologne)* – Je félicite la rapporteure pour son excellent rapport, qui décrit en détail comment les principes de démocratie, de prééminence de droit et des droits de l’homme ont été mis à mal par les autorités hongroises. Ce sont des principes que nous avons tous accepté de respecter dans cette maison.

Les membres de cette Assemblée ont reçu une lettre dans laquelle Amnesty International et Human Rights Watch leur demandent d’appuyer la recommandation de la commission de suivi d’ouvrir une procédure de suivi pour la Hongrie. Ces organisations ont raison, car la prééminence du droit et les droits de l’homme suivent une mauvaise pente en Hongrie. Nous ne devons pas tolérer cette situation. Notre Assemblée a un rôle essentiel à jouer en ajoutant sa voix à celles qui s’expriment pour défendre la prééminence du droit, les droits de l’homme et la démocratie en Hongrie.

Le Gouvernement hongrois doit prendre les mesures nécessaires afin que le dispositif législatif soit conforme aux normes du Conseil de l’Europe. Au vu des faits, comment quiconque pourrait-il sérieusement prétendre qu’une procédure de suivi ne devrait pas être ouverte pour la Hongrie ? Il s’agit des normes auxquelles nous avons adhéré ici, les normes en matière de démocratie, de droits de l’homme et de prééminence du droit. Il ne s’agit pas d’une question politique ou d’ordre national. Il ne s’agit pas non plus d’une question de minorité, comme d’aucuns l’ont dit, il ne s’agit pas d’une minorité de personnes votant pour un parti. A mon sens et d’après les organisations susmentionnées, refuser d’ouvrir une procédure de suivi, c’est oublier les responsabilités de notre Assemblée et en saper la crédibilité.

M. ROCHEBLOINE (France) – D’une certaine manière, le débat que nous tenons aujourd’hui est une étape sombre dans le processus de la construction européenne. Je n’aurais jamais imaginé, comme d’autres, que la procédure de suivi puisse être ouverte à l’encontre de la Hongrie, dont on louait il n’y a pas si longtemps encore, à l’époque du rideau de fer, l’art de cheminer discrètement, et de compromis en compromis, vers toujours plus de démocratie. Il nous faut pourtant nous rendre à l’évidence : le rapport qui nous est aujourd’hui présenté contient toutes sortes d’informations inquiétantes quant à l’évolution démocratique de la société politique hongroise. L’adoption selon un rythme précipité d’une nouvelle constitution, la multiplication, à vrai dire suspecte en soi, des lois organiques réputées nécessaires pour l’application de ce texte fondamental, les nombreux incidents de la procédure préparatoire, autant de motifs de critiques, sont autant de motifs de crainte.

La commission de suivi rappelle que le système électoral mis en place a démultiplié l’effet de l’avantage majoritaire acquis, dans une bien moindre proportion, par la coalition au pouvoir. Elle a raison de dire qu’une telle situation n’autorisait pas cette coalition à bouleverser le droit existant dans un sens qui apparaît clairement contraire, dans la plupart sinon la totalité des cas, aux principes fondamentaux des droits de l’homme. Je déplore que la fierté nationale légitime du peuple hongrois ait ainsi été dévoyée par le gouvernement en une crispation nationaliste qui l’isole nécessairement et dangereusement, et au Conseil de l’Europe, et dans l’Union européenne.

Sans doute l’étude de la commission de suivi devait-elle se concentrer, comme elle l’a fait, sur l’examen des normes constitutionnelles et organiques nouvelles et sur leur conformité aux exigences qui en découlent, pour tout Etat membre, de son appartenance au Conseil de l’Europe ; la matière ne manquait visiblement pas pour une enquête de taille. Mais j’avoue avoir mieux compris en lisant ce rapport pourquoi le Gouvernement hongrois avait pu, sans trop d’états d’âme, libérer en août dernier le criminel azéri Safarov, coupable avéré d’un crime gratuit et abject contre un officier arménien, faisant ainsi bon marché, et de la douleur d’une famille et d’un peuple, et de la jurisprudence de ses propres tribunaux. De plus, j’ai retrouvé dans les réactions du gouvernement retracées dans le rapport, la fuite en avant devant les critiques que j’avais pu déplorer lorsque l’affaire Safarov avait été portée à la connaissance de l’opinion publique. Je n’aurai garde cependant, et j’y insiste, de confondre dans ma critique le gouvernement et le peuple hongrois.

Je note, au demeurant, que l’attitude gouvernementale dans l’affaire Safarov avait suscité les fortes réserves des autorités morales et religieuses, au premier rang desquelles le cardinal Erdö, archevêque de Budapest et les représentants des Eglises protestantes. Aussi, je souhaite vivement que, dans le dialogue qui doit suivre ce débat, le gouvernement et la majorité qui le soutient au Parlement hongrois puissent être amenés à comprendre que le profit à court terme qu’ils pensent retirer de leur attitude actuelle est excessivement coûteux au regard des intérêts à long terme du peuple hongrois.

4. Prolongation du délai de dépôt des amendements pour le débat selon la procédure d’urgence

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, j’ai été informé que la commission des questions politiques, saisie au fond pour notre débat selon la procédure d’urgence qui doit se tenir jeudi matin, n’adoptera son rapport qu’à l’issue de sa réunion de mercredi après-midi. En conséquence, le délai de dépôt des amendements sur ce thème, qui devait initialement être clos demain, mercredi, à 10 h 30 est prolongé jusqu’à demain 19 heures. Cela devrait permettre à chacun des membres de cette Assemblée de prendre connaissance de ce rapport et de disposer d’un temps suffisant pour aborder jeudi matin notre débat selon la procédure d’urgence dans de bonnes conditions.

5. Demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie (suite)

LE PRÉSIDENT – Nous reprenons la discussion sur la procédure de suivi pour la Hongrie.

Mme SCHUSTER (Allemagne)* – Je remercie moi aussi très chaleureusement Mme Kerstin Lundgren, notre rapporteure, dont la tâche, difficile, a été parfaitement maîtrisée. Je ne peux que la féliciter pour son excellent rapport.

Je dirai, d’entrée de jeu, que je suis favorable à l’ouverture de la procédure de suivi parce que les faits plaident pour une telle solution. Kerstin Lundgren a fort bien décrit la situation. Je rappellerai également que le Parlement européen s’est penché sur le problème, tout comme la Commission européenne et de nombreux ministres des Affaires étrangères, ainsi que Mme Navi Pillay, Haut-Commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme, qui a dit que la position du président de l’Office national de la Justice faisait problème, de même que le déséquilibre des pouvoirs. C’est bien ce que disait Kerstin Lundgren : l’équilibre des pouvoirs en Hongrie est perturbé et même bouleversé.

Mais nous avons aussi les avis de la Commission de Venise. Cette commission, qui n’est pas un organe politique mais un organe composé de juristes éminents et de constitutionnalistes, indiquait, elle aussi, que la Constitution hongroise contenait un certain nombre de points qui avaient été préalablement déclarés inconstitutionnels par la Cour constitutionnelle hongroise. Avec le système de la majorité des deux tiers, on inscrit aujourd’hui dans la Constitution hongroise des dispositions qui auraient pu faire l’objet d’une loi adoptée à la majorité simple. Pour un futur gouvernement, il sera très difficile de modifier les choses.

Nous ne sommes pas opposés aux majorités des deux tiers. Nous ne disons pas qu’en Hongrie, on n’a pas voté démocratiquement. Nous disons simplement que même une majorité des deux tiers doit exercer ses responsabilités avec prudence, spécialement pour ce qui concerne la Constitution. En réalité, ce quatrième amendement vise à amputer les prérogatives de la Cour constitutionnelle, qui ne pourrait plus désormais se prononcer sur les contenus mais seulement sur les procédures.

La lettre commune d’Amnesty International et de Human Rights Watch nous invite à ouvrir d’urgence la procédure de suivi. Les faits sont clairs, le suivi représente l’une de nos tâches fondamentales. Considérons-le non comme une offense, mais comme une chance.

Le suivi est pour nous un instrument essentiel et une tâche fondamentale ; il ne s’agit pas d’ingérence dans les affaires internes d’un pays. Je lance un appel à tous les membres de notre hémicycle : montrons-nous aujourd’hui à la hauteur de nos responsabilités. Oubliez la politique partisane, défendez les valeurs de notre Assemblée et votez ce rapport.

M. NEILL (Royaume-Uni)* – Je suis d’accord avec ce qui a été dit au nom du Bureau par M. Walter : quelles que soient les intentions qui ont présidé à l’élaboration de ce rapport, le fait de l’adopter et d’ouvrir une procédure de suivi pour la Hongrie reviendrait à créer un précédent dangereux.

Il ne s’agit pas ici d’approuver ce qu’a fait le Gouvernement hongrois. Pour ma part, je n’aurais jamais utilisé une majorité des deux tiers pour faire la même chose ! N’oublions pas, toutefois, que les dispositions en question ont été prises dans le cadre d’un mandat octroyé à l’issue d’élections libres et équitables. Par ailleurs, cet Etat membre a de bons antécédents pour ce qui est de la mise en œuvre de ses obligations internationales.

Lorsque nous exerçons l’un de nos pouvoirs, il faut faire attention : nous devrions, au même titre que les gouvernements, nous imposer certaines limites. Il ne s’agit pas ici d’aller contre la volonté des électeurs de tel ou tel pays. Certes, certaines critiques – que l’on retrouve dans le rapport – peuvent être adressées à la Hongrie. La Commission de Venise elle-même en a d’ailleurs formulé. Cela dit, je regrette que le rapport fasse une utilisation sélective des faits. Certains des amendements présentés visent précisément à le corriger de ce point de vue.

S’il est vrai que l’on trouve des critiques dans l’avis de la Commission de Venise, celui-ci comporte également certaines appréciations très positives. C’est ainsi que la Commission parle du quatrième amendement en termes favorables. On peut également noter la bonne initiative que représente la création d’une plainte constitutionnelle individuelle, inspirée de l’exemple allemand. Un certain nombre des changements introduits dans la Constitution sont en fait une réponse aux observations de la Commission de Venise. La Hongrie suit donc ces recommandations. Peut-être y a-t-il effectivement en Hongrie davantage de lois cardinales qu’ailleurs : 26 d’après la nouvelle Constitution – mais il y en avait 28 dans l’ancienne constitution soviétique !

Au bout du compte, nous devons nous imposer certaines limites, de la même façon que nous souhaitons que le Gouvernement hongrois s’en impose. Ouvrir une procédure de suivi pour une démocratie mûre serait, selon moi, une procédure disproportionnée.

M. Mogens JENSEN (Danemark)* – Ce débat et la décision que nous nous apprêtons à prendre sont particuliers dans le sens où il en va de l’avenir et de la légitimité du Conseil de l’Europe et de cette Assemblée : voulons-nous protéger les valeurs clés de notre institution ou bien voulons-nous fermer les yeux devant les faits pour défendre des intérêts partisans ?

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas fermer les yeux devant ce qui se passe en Hongrie. Nous manquerions au respect dû au Conseil de l’Europe si nous ne décidions pas, tous ensemble, de défendre la démocratie, la prééminence du droit et les droits de l’homme en oubliant nos intérêts partisans. Nous ne pouvons pas fermer les yeux devant ce que dit la Commission de Venise, laquelle, avec d’autres instances spécialisées – notamment des tribunaux et des cours –, a noté que ce qui se passe en Hongrie est en contradiction avec les valeurs européennes, avec la Convention européenne des droits de l’homme, avec la jurisprudence de la Cour et le droit communautaire.

Ne fermons pas les yeux devant le constat suivant : les changements apportés en permanence à la Constitution hongroise par la coalition au pouvoir ont créé une grande instabilité et mettent en péril l’organisation de l’Etat. Changer les lois et les constitutions pour défendre des intérêts politiques allant bien au-delà du mandat donné par les électeurs, c’est bien ce que font actuellement les dirigeants hongrois. Comment fermer les yeux sur le fait que la nouvelle législation a placé sous un contrôle politique étroit toute une série d’instances de régulation ?

Mes chers collègues, ne fermez pas les yeux devant ce qui se passe en Hongrie ; ne poursuivez pas des intérêts partisans étroits ; défendez la démocratie, la prééminence du droit et les droits de l’homme. Pour ce faire, il n’y a malheureusement pas d’autre possibilité que d’ouvrir la procédure de suivi. Votez donc contre l’amendement 2 et pour la procédure de suivi.

M. ALLAVENA (Monaco) – Plusieurs intervenants l’ont indiqué avant moi : l’évolution de la situation constitutionnelle en Hongrie est préoccupante et le Conseil de l’Europe est dans son rôle en suivant la situation avec attention et en appelant à la vigilance. Cette démarche de vigilance est symbolisée par les interventions de la Commission de Venise, dont les avis ont été parfois critiques, parfois rassurants, mais jamais impératifs.

Beaucoup l’ont dit aussi : n’oublions jamais, car c’est la base de la démocratie, que le Parlement hongrois a été élu démocratiquement, à une très large majorité, et qu’il n’est pas, à ce jour, rejeté par son peuple.

En conséquence, il me semble que, à cette heure, la meilleure voie est celle de la poursuite du dialogue avec les autorités hongroises, via les structures déjà impliquées et la Présidence ou le Secrétariat Général de l’Assemblée, d’autant que rien n’indique que les autorités hongroises rejettent ce dialogue. L’ouverture immédiate d’une procédure de suivi n’est ni nécessaire ni urgente et je crains, à l’inverse, qu’elle ne provoque une crispation des relations avec le Conseil de l’Europe.

Nous avons vécu une situation comparable l’an dernier à Monaco, à travers la saisine de la Commission de Venise imposée par la commission de post-suivi. Je peux vous assurer que cette démarche imposée et subie a créé une situation de défiance grave à l’encontre du Conseil. Alors, comme l’a dit notamment M. Hancock, arrêtons de prendre des positions dogmatiques. Arrêtons de croire que nous savons tout, arrêtons de vouloir donner des leçons, voire de vouloir faire le bonheur des gens contre leur volonté.

Il me semble donc bien préférable de poursuivre le dialogue constructif et vigilant avec la Hongrie que de risquer de provoquer un rejet de l’institution par une action prématurée et disproportionnée et de perdre ainsi tout contrôle sur la suite des évènements.

M. VILLUMSEN (Danemark)* – Merci à Mme Lundgren pour la qualité de son travail. Notre Assemblée est fondée sur trois grands piliers : la démocratie, les droits de l’homme et la primauté du droit. Ne les oubliez pas ce soir au moment du vote.

En effet, le vote qui interviendra ne concerne pas simplement l’action du Gouvernement hongrois. L’enjeu est de savoir si cette Assemblée et nous-mêmes, les parlementaires qui la composons, pouvons être pris au sérieux, ou bien si nous sommes seulement là pour nous envoyer des noms d’oiseaux à la tête et laver notre linge sale.

En fait nous sommes là pour rendre les Etats conscients de leurs obligations à l’égard de la démocratie, de la prééminence du droit et des droits de l’homme. Tous nos Etats ont en effet ratifié la Convention européenne des droits de l’homme.

Nous sommes face à un excellent rapport, qui montre que le Gouvernement hongrois actuel ne respecte pas les principes que j’ai rappelés. La Commission de Venise a rendu un avis qui nous invite à ouvrir une procédure de suivi. Mais le Bureau et, ce matin, la commission de suivi, ont décidé de n’en rien faire. Ce n’est pas une bonne chose. C’est un petit jeu politique qui ne donne pas un spectacle très ragoûtant.

Je vous demande vraiment, mes chers collègues, de reconsidérer votre position. Voulez-vous vraiment vous préoccuper de la prééminence du droit, des droits de l’homme et de la démocratie en Hongrie ou voulez-vous simplement suivre les indications de vos groupes politiques et vous laissez bercer par le flot ?

J’espère que vous voterez pour cette procédure de suivi, pour la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Pourquoi maintenant, pourquoi la Hongrie et pourquoi de cette façon ? Il n’est pas difficile de trouver des ressemblances entre ce qui est fait par l'Union européenne et par le Conseil de l’Europe à l’encontre de la Hongrie.

En tant que l’un des membres les plus actifs du Parlement hongrois, j’appartiens à une faction de l’opposition. Par conséquent, je ne représente pas ici la position du gouvernement, mais bien l’opinion du peuple, des gens épris de paix et de liberté.

Je vous demande de soutenir la Hongrie, de voter contre ce projet de résolution et de faire barrage à une procédure de suivi tout à fait injuste.

Entre 2002 et 2010, sous le régime du parti social libéral, il y avait une crise en Hongrie. L’opposition était systématiquement harcelée et poursuivie – ce qui a créé de graves problèmes économiques, des personnes étaient détenues de façon arbitraire à la suite de manifestations. À l’automne 2006, des centaines de personnes ont été agressées par les policiers, plus de dix d’entre elles ont été touchées par des tirs. Or rien n’a été dit sur tout cela.

Au cours des trois dernières années, un grand nombre de réformes institutionnelles ont été apportées au système juridique, ce qui n’avait jamais été fait depuis la chute du communisme. Certes, la Constitution historique a été rétablie, mais blâme-t-on le Royaume-Uni d’avoir une Constitution historique ?

Je ne suis pas entièrement satisfait de la manière dont fonctionnent le gouvernement et l’actuel Constitution, mais je suis entièrement convaincu que l’intention de lancer une procédure de suivi est motivée par des raisons politiques et n’a aucun fondement juridique. C’est un exemple parfait du deux poids deux mesures. Pourquoi seule la Hongrie et pourquoi maintenant ?

L’année prochaine il y aura des élections. Les socialistes souhaitent condamner la Hongrie pour les aider à revenir au pouvoir. Dieu préserve la Hongrie de cela ! Car parmi les principaux acteurs qui ont agi lors du premier débat en 2011, figurait M. Matyas Eörsi, le chef de la faction libérale, ici, au Conseil de l’Europe.

Il y a un grand nombre d’erreurs factuelles dans ce rapport. On invite la Hongrie à amender un grand nombre de textes sans fondement juridique. La Hongrie est un pays respectueux du droit et cette procédure risquerait de remettre tout cela en question. C’est la raison pour laquelle il est indispensable de dire non à cette demande d’ouverture de la procédure de suivi.

LE PRÉSIDENT – Mers chers collègues, le scrutin relatif à l’élection des juges à la CEDH est maintenant clos. Le dépouillement aura lieu après le vote sur le projet de résolution. Nous allons déposer l’urne à la vue de tout le monde.

Mme GÜNDEŞ BAKIR (Turquie)* – Je veux dire ici ma déception face à ce rapport intitulé « Demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie ». La Hongrie a joué un rôle constructif au sein du Conseil de l’Europe et de l'Union européenne. Ce pays maintient un cap politique dans le cadre de l’intégration euro-atlantique et fait tout ce qu’il peut en ce sens.

Avant d’intervenir, j’ai lu avec attention le rapport de la Commission de Venise sur la Hongrie. Ce rapport porte sur un certain nombre de textes relatifs à la protection du mariage et de la famille, sur le passé communiste du pays, la reconnaissance des Eglises, l’accès aux médias pour les partis politiques, l’autonomie des institutions d’enseignement supérieur, le soutien financier aux étudiants, les sans-abri. Je n’y vois rien qui puisse justifier l’ouverture d’une procédure de suivi à l’encontre de ce pays.

La législation sur le mariage et la famille relèvent de la marge d’appréciation de l’Etat. En ce qui concerne le passé communiste, je rappelle que n’importe quel pays peut demander à ses fonctionnaires un minimum de loyauté. S’agissant de la reconnaissance des Eglises, il n’y a pas de limite à la liberté religieuse en Hongrie ; n’importe quelle organisation peut s’appeler Eglise. Concernant la liberté des médias, je considère qu’il n’y a pas de contrainte légale non plus. On peut diffuser des brochures politiques, des messages politiques ; les radios et télévisions accueillent les hommes politiques, les programmes d’information sont pluralistes. Par ailleurs, je ne vois rien non plus de répréhensible en ce qui concerne le problème des sans-abri ; bien entendu, il faut essayer de loger décemment tout le monde ; le gouvernement a des responsabilités en la matière. Quant aux universités, aucune des dispositions ne me semble vraiment contestable.

Il y a une différence entre refuser de reconnaître les arrêts de la Cour constitutionnelle et encadrer le dispositif. Aucun arrêt de la Cour constitutionnelle n’a jamais été foulé au pied en Hongrie. Il n’y a pas de prisonniers politiques. Il n’y a pas d’abus de droit. Cette demande d’ouverture d’une procédure de suivi est donc motivée uniquement par des raisons politiques et n’a pas de base juridique. Je suis donc tout à fait hostile à cette demande.

M. BENEYTO (Espagne)* – Ce débat nous montre combien ce thème divise notre Assemblée. Il faudrait se demander si les arguments employés par les uns et les autres sont fondamentalement politiques, si la procédure de suivi n’est pas détournée à des fins qui ne sont nullement les siennes.

Quelle forme de tutelle doit protéger une démocratie dotée d’un dualisme politique et d’un système qui fonctionnent ? Où se situe la limite ? Selon moi, une majorité des deux tiers au Parlement ne saurait en rien constituer une limite ou une critique portée à une démocratie qui fonctionne. Il va de soi que la règle de la majorité exige le respect de la minorité, mais dès lors que le principe des élections libres est appliqué, il est possible de changer de majorité.

Un grand nombre des recommandations de la Commission de Venise et son rapport peuvent être remis en question, voire sont arbitraires à certains égards. Par exemple, exiger un registre des médias imprimés ou des médias en ligne ne me semble pas être une demande démocratique. De même, séparer le conseil des médias de l’autorité des médias ma paraît contestable. Ou encore, le découpage électoral doit-il être opéré par voie législative ou par décision administrative ? Il n’appartient ni au Conseil de l'Europe ni à la Commission de Venise d’en décider.

On pourrait pointer dans d’autres pays des aspects qui ne sont pas totalement conformes aux recommandations de la Commission de Venise. En l’occurrence, il s’agit d’un pays que l’on souhaite soumettre à une procédure de suivi. Un pays qui a toujours été ouvert au dialogue et prêt à se pencher sur des questions devant faire l’objet d’un examen. C’est bien ce dialogue qui doit être promu par le Conseil de l'Europe. En revanche, il ne faut pas utiliser un instrument de l’importance de la commission de suivi à des fins qui ne relèvent pas vraiment de ces compétences et qui visent à remettre en question les résultats d’élections démocratiques.

Par conséquent, je suis opposé à l’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie à la suite de l’avis du Bureau.

M. SZABÓ (Hongrie)*– Les Etats membres du Conseil de l'Europe assument des responsabilités en matière d’Etat de droit et de défense des droits de l’homme, et la violation de ces engagements doit avoir des conséquences.

Depuis 2010, le parti Fidesz qui détient la majorité des deux tiers a abusé de son pouvoir pour remettre en cause un certain nombre d’institutions démocratiques et limiter les droits de l’homme pour s’accaparer le pouvoir.

Les décisions prises pour limiter les pouvoirs de la Cour constitutionnelle, la liberté des médias, le vote d’une loi limitant les possibilités d’intervention de l’opposition, la remise en cause des aspects du droit de grève, l’épuration de fonctionnaires dans l’administration, la limitation de la liberté religieuse, la modification unilatérale du droit électoral, l’ensemble de ces faits participent du démantèlement de l’Etat de droit et de la démocratie. Et tout cela au profit du parti majoritaire ! L’Etat de droit, la séparation des pouvoirs, les institutions démocratiques ont été gravement lésées. Pourtant, en 2010, que je sache, les électeurs hongrois n’avaient pas donné un tel chèque en blanc aux autorités.

Le Conseil de l'Europe, ses organes, le Parlement européen, la Commission européenne et bien d’autres organisations ont exprimé leur préoccupation. Les critiques portées à l’encontre de l’action du gouvernement ne manquent pas depuis 2010-2011. Même s’il a nuancé certains textes, il n’a pas remis fondamentalement en cause le cap qu’il s’était fixé.

Aujourd’hui, nous évoquons l’avis de la Commission de Venise et nous nous inspirons du rapport Rui Tavares du Parlement européen. Les choses y sont dites clairement. Il ne s’agit nullement d’attaquer la nation hongroise ni donc de faire de la politique politicienne, mais de suivre exactement ce qui passe dans le pays. Voilà pourquoi nous sommes favorables à l’ouverture d’une procédure de suivi. L’opposition se prépare à une alternance pour rétablir la démocratie en 2014. Nous sommes assurés du travail attentif de la commission de suivi et persuadés que tout ce qui doit être dit le sera.

M. Michael Aastrup JENSEN (Danemark)*– Je remercie le rapporteur pour son travail. Il a brossé un tableau très clair de la situation.

Le Conseil de l'Europe souhaite que l’ensemble des citoyens des pays membres bénéficient d’un espace juridique commun sur l’ensemble du continent dans le plein respect des valeurs fondamentales des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du droit. C’est la raison pour laquelle le Conseil de l'Europe a été fondé. Ses valeurs fondamentales n’ont pas varié et nous continuons à affirmer que nous défendons les droits et les valeurs fondamentales comme la liberté d’exprimer son avis sans crainte d’être poursuivi.

Le Danemark a été l’un des pays fondateurs du Conseil de l'Europe et il continue à croire profondément dans ces principes. La démocratie est vitale si nous voulons préserver la civilisation et le bien-être de l’humanité. C’est la raison pour laquelle nous croyons qu’il est bon de suivre attentivement l’évolution du cadre constitutionnel en Hongrie. Des événements discutables sont intervenus et des mesures ont été prises dans ce cadre. À mon sens, la procédure de suivi est progressive, elle permettra de veiller au respect des droits et libertés individuelles, au respect des droits de l’homme pour tout un chacun et pas seulement pour quelques-uns.

Le Conseil de l'Europe a été informé de certains faits préoccupants concernant la Hongrie, ce qui apparaît d’ailleurs clairement dans le rapport. Ce qui me semble encore plus problématique, c’est que certains parlementaires semblent penser que tout cela n’est pas si grave. N’oublions pas que les citoyens doivent pouvoir croire aux libertés individuelles, aux libertés politiques, à la prééminence du droit, tous principes à la base de toute démocratie authentique. Il est donc du devoir du Conseil de l'Europe de veiller à les maintenir et, par conséquent, de répondre aux demandes émanant des citoyens d’un Etat. Ce serait la meilleure solution pour la Hongrie.

C’est la raison pour laquelle j’invite instamment tous les membres à voter en faveur de l’ouverture d’une procédure de suivi et contre l’amendement 2, car il ne faut pas se contenter de parler des valeurs fondamentales, il faut qu’elles soient suivies d’effets par des actes clairs et concrets. Tout un chacun devrait voter « oui » !

M. J. NAGY (République slovaque)*– Lancer une procédure de suivi pour violation des principes démocratiques serait une grave décision. Voilà un moment que nous débattons non seulement du contenu des changements constitutionnels, mais aussi de la méthode choisie. Je pense nécessaire de faire la part des choses et de faire preuve de prudence.

Plusieurs institutions internationales dont le Conseil de l'Europe se sont interrogées sur ce qui s’est passé en Hongrie. C’est leur droit, car l’application des principes démocratiques ne peut être une affaire exclusivement interne à un Etat et à ses citoyens.

Il y a quelques années, la République slovaque, alors candidate à l’Union européenne, était sous le feu des projecteurs et faisait l’objet de nombreuses critiques, compte tenu de sa situation intérieure. Toutefois le Conseil de l’Europe n’a pas ouvert de procédure de suivi à son encontre.

Le suivi est une procédure grave, qui peut avoir des répercussions importantes sur le pays qui en fait l’objet. Si la Hongrie réagit aux critiques qui lui ont été faites, le suivi ne sera pas nécessaire. Un suivi, ce n’est pas seulement une tache sur le bilan d’un gouvernement : engager cette procédure, c’est également jeter l’opprobre sur toute la population !

C’est pourquoi je vous demande de refuser la procédure de suivi.

LE PRÉSIDENT – J’en suis désolé, mais il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs.

Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer, dans les vingt-quatre heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle la réplique de la commission de suivi. Madame la rapporteure, il vous reste quatre minutes.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – J’ai écouté avec attention toutes les interventions. Il est toujours intéressant d’entendre l’Europe s’exprimer.

Comme l’a dit Lord Acton : « le pouvoir tend à corrompre, le pouvoir absolu corrompt absolument ». C’est là un rappel très salutaire pour nous tous.

En effet, la majorité des deux tiers a soulevé de nombreuses questions. Pour la Commission de Venise, il est important de maintenir des contre-pouvoirs afin de garantir la démocratie constitutionnelle. Selon elle, le fait de recourir à la majorité des deux tiers pour amender la Constitution ne se justifie que dans des cas particuliers, fondés sur un travail préparatoire approfondi, incluant un débat public et de vastes consultations conduisant à un consensus politique. La Commission de Venise n’a pas fait là une déclaration politique.

Il faut veiller à ce que, en démocratie, les vainqueurs n’emportent pas la mise, sans quoi on risque de revenir en arrière, ce à quoi on n’est jamais obligé, même lorsqu’on dispose de la majorité des deux tiers. Il faut au contraire aller de l’avant en incluant les citoyens dans le débat.

Pour la Commission de Venise, la Loi fondamentale ne doit pas être considérée comme un outil politique. Il convient au contraire de distinguer la loi constitutionnelle et les lois positives et subordonner les secondes à la première, sinon on risque de réduire la démocratie et de menacer la prééminence du droit. Là non plus, il ne s’agit pas d’une déclaration politique, il s’agit de l’avis de la Commission de Venise.

Les douze avis donnés sur les différentes modifications de la Constitution sont allés crescendo. Un dialogue régulier a été évoqué. Or ces avis, à plusieurs reprises, regrettent l’absence de tout dialogue en amont sur ces modifications. La situation n’a donc pas évolué.

Je reviendrai sur l’amendement 2. L’important est de veiller au respect par les Etats de leurs obligations de membres du Conseil de l’Europe, comme au regard des conventions qu’ils ont ratifiées. Or l’organe chargé de veiller à ce respect est la commission de suivi. Il s’agit pour elle non pas de sanctionner ni de blâmer mais de suivre l’évolution de la situation afin que tous les Etats membres du Conseil de l’Europe s’orientent vers des normes toujours plus élevées en matière d’Etat de droit.

C’est pourquoi je vous demande de voter l’ouverture de la procédure de suivi pour la Hongrie.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Herkel, il vous reste deux minutes pour répondre.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission de suivi* – Au nom de la commission je tiens à remercier Mme la rapporteure et le secrétariat pour leur travail ardu.

On nous demande souvent pourquoi nos travaux n’aboutissent pas à des décisions en séance plénière. Je tiens à affirmer qu’en l’occurrence, tous les aspects de la question ont été longuement étudiés.

On nous a également accusés d’avoir été motivés par des considérations politiques dans l’élaboration de ce rapport. Je tiens à affirmer que Mme la rapporteure a travaillé honnêtement dans le respect de ses convictions. Cela étant, on peut toujours évidemment avoir des divergences d’opinion.

Il nous appartient maintenant de choisir la stratégie que nous voulons suivre à l’avenir.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission de suivi a présenté un projet de résolution sur lequel 22 amendements et 1 sous-amendement ont été déposés.

Le président de la commission de suivi demande l’application de l’article 33-11du Règlement pour les amendements 3, 4 et 1 sur le projet de résolution qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 3, déposé par MM. Agramunt, Puche, Conde, Badea, D. Davies, M. Halicki, Gulyás, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, à remplacer les mots « se félicite » par les mots suivants : « prend note ».

L’amendement 4, déposé par MM. D. Davies, Agramunt, Mariani, Vitali, Puche, Conde, Fischer, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, après la première phrase, à insérer la phrase suivante : « L’Assemblée prend note de l’avis du Bureau de l’Assemblée qui n’est pas favorable à l’ouverture d’une procédure de suivi à l’égard de la Hongrie. »

L’amendement 1, déposé par Mmes Lundgren, Schuster, MM. Hunko, Villumsen, Mme Reps, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 9, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée prend acte de l’avis de la Commission de Venise sur le 4e amendement constitutionnel ; les conclusions et les constatations qu’il contient confirment les préoccupations exprimées par l’Assemblée dans la présente résolution, ainsi que dans le rapport de la commission de suivi. Elle exhorte les autorités hongroises, en étroite coopération avec la Commission de Venise, à répondre pleinement à ces préoccupations et à mettre en œuvre les recommandations contenues dans l’avis. »

En l’absence d’objections, les amendements 3, 4 et 1 sur le projet de résolution sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT – Nous en venons à la discussion des autres amendements.

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement 5, déposé par MM. Agramunt, Vitali, Mme Dervoz, Puche, Conde, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, M. D. Davies, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, à remplacer la dernière phrase par la phrase suivante : « De ce point de vue, l’Assemblée salue la poursuite du dialogue régulier entre la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) et le gouvernement hongrois. »

M. AGRAMUNT (Espagne)* – Cet amendement vise à prendre acte d’une réalité, à savoir qu’il existe un dialogue régulier entre la Commission de Venise et le Gouvernement hongrois. Cela a été dit et répété : ce dialogue a été permanent. Il faut le noter dans le rapport.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je suis contre l’amendement. J’ai déjà fait des commentaires sur ce dialogue permanent. Le premier paragraphe indique qu’il faut s’en tenir aux conclusions de la Commission de Venise qui a répondu à un certain nombre de questions posées. On demande au Gouvernement hongrois de faire un certain nombre de choses. On ne parle pas du dialogue entre les deux. Ce n’est pas l’objet de notre texte.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 5 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 6, déposé par MM. Braun, Conde, Agramunt, Fischer, Fritz, M. Badea, Mme Gündeş Bakir, M. D. Davies, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 2, à insérer la phrase suivante :

« A l’issue des élections de 2010, une coalition a remporté une majorité de plus des deux tiers au parlement hongrois ce qui, du point de vue des normes européennes communes, lui confère une légitimité suffisante pour amender la Constitution ».

M. BRAUN (Hongrie)* – Il est contraire à nos valeurs de remettre en cause la décision des électeurs, à l’issue d’une consultation démocratique. Depuis les dernières élections, le gouvernement était parfaitement fondé à modifier la Constitution.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je le répète, la question qui se pose ici est de savoir si nous voulons appliquer le principe selon lequel le vainqueur peut tout faire. Tel est bien l’objet de cet amendement. Je suis contre.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 6 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 7, déposé par MM. Sasi, Kandelaki, Puche, Agramunt, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, M. D. Davies, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 3 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée note que le nouveau Parlement hongrois a, pour la première fois dans l’histoire de la Hongrie libre et démocratique, amendé son ancienne Constitution qui était le fruit d’un seul parti pour en faire une nouvelle Loi fondamentale moderne, à l’issue d’une procédure démocratique et d’intenses débats au parlement, et avec des contributions de la société civile hongroise. »

M. SASI (Finlande)* – Il serait juste de rendre hommage à la Hongrie. Le pays avait une ancienne constitution héritée du communisme. Elle a été réformée. Il était grand temps.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Encore une fois, dans mon texte j’ai essayé d’expliquer que nous avons tenu compte du grand débat qui s’est déroulé dans le pays. Nous en avons longuement discuté dans cette Assemblée. Faire adopter à la hussarde des amendements constitutionnels n’est pas une bonne façon de réformer un tel texte. Ce paragraphe ne me convient pas. Je suis contre l’amendement.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 7 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 8, déposé par MM. Braun, Puche, Conde, Agramunt, Fischer, Fritz, Badea, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 4 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée appuie l’avis de la Commission de Venise en relevant que le nombre de matières soumises à une majorité des deux tiers n’a pas augmenté depuis l’adoption de la nouvelle Loi fondamentale. Afin que l’application de ces lois bénéficie d’un soutien aussi large que possible dans la société civile, l’Assemblée appelle la majorité au pouvoir et tous les partis d’opposition à poursuivre leur coopération sur ces questions. »

M. BRAUN (Hongrie)* – Notez, chers collègues, que la Loi fondamentale régit 26 sujets contre 28 dans l’ancienne. Autrement dit, il y en a moins qu’avant.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Encore une fois, de grandes questions se posent quant au recours excessif aux lois et dispositions cardinales. La Commission de Venise l’a pointé du doigt. On ne peut le nier. Le paragraphe visé rappelle cette situation. Je suis contre l’amendement.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 8 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 9, déposé par MM. Volontè, Fritz, Fischer, Braun, Mme Csöbör, M. Gulyás, Badea, Mme Gündeş Bakir, MM. D. Davies, J. Nagy, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 5, à remplacer la deuxième phrase par la phrase suivante : « L'Assemblée note que plusieurs dispositions sont source de préoccupation pour une partie de la société hongroise. Ces dispositions se fondent toutefois sur des valeurs européennes traditionnelles, énoncées dans les Constitutions de nombreux autres pays européens, et ont été adoptées par la majorité démocratique des deux tiers du Parlement hongrois. »

M. VOLONTÈ (Italie)* – Nous voulons ajouter un paragraphe pour dire la vérité. On ne peut être préoccupé parce que des textes sont adoptés à la majorité des deux tiers. En Italie aussi, une telle majorité est requise pour les réformes constitutionnelles non adoptées par référendum. Cela n’offusque personne dans les Etats membres du Conseil de l’Europe.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je m’en tiens à ce qui est écrit dans mon texte. Nous devons veiller à ce que les normes constitutionnelles ne divisent pas les sociétés mais les unissent. Les constitutions doivent être une base commune et non une source de division. Nous ne voulons pas revenir à la situation de l’époque communiste.

Je suis contre l’amendement.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 9 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 10, déposé par M. Braun, Mme Bakoyannis, MM. Taliadouros, Palacios, Kandelaki, Puche, Conde, Agramunt, Fischer, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 6.

M. BRAUN (Hongrie)* – Je vous demande de supprimer ce paragraphe totalement déséquilibré. On déplore la limitation des pouvoirs de la Cour constitutionnelle, mais on oublie de mentionner l’application d’un certain nombre de dispositions constitutionnelles nouvelles, et excellentes, qui sont d’ailleurs héritées du modèle allemand.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Encore une fois c’est un problème d’équilibre des pouvoirs. Les nouveaux dirigeants concentrent trop de pouvoirs. Ils ont réduit les possibilités de contrôle judiciaire de toute une série d’actes de gouvernement, de décisions de l’exécutif.

Je suis contre l’amendement.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est contre.

L’amendement 10 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 11, déposé par MM. D. Davies, Braun, Mme Bakoyannis, MM. Taliadouros, Palacios, Mme Dervoz, MM. Kandelaki, Puche, Conde, Agramunt, Fischer, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 7 par le paragraphe suivant : « Se ralliant à l’avis de la Commission de Venise, l’Assemblée estime que le Quatrième amendement à la Loi fondamentale institue la possibilité, pour la Cour constitutionnelle, de réexaminer la Loi fondamentale et ses amendements du point de vue de la procédure. D’autre part, l’Assemblée appelle les autorités hongroises à veiller à ce que toutes les garanties soient en place pour l’examen de la constitutionnalité de la réglementation budgétaire. »

M. D. DAVIES (Royaume Uni)* – Il est défendu.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Votre référence à la Commission de Venise est erronée. Il faut s’en tenir à notre paragraphe 7.

Je suis contre l’amendement.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est contre.

L’amendement 11 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 12, déposé par MM. Volontè, Braun, Gulyás, Halicki, Girzyński, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 8 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée a suivi avec attention les débats sur le Quatrième amendement à la Loi fondamentale et note que dans son avis, la Commission de Venise a identifié des points positifs mais en a critiqué certains aspects. A cet égard, l’Assemblée salue l’intention du Gouvernement hongrois de modifier la Loi fondamentale pour en éliminer l’institution légale du transfert de procès et la question d’une taxe spéciale en cas de décisions de justice internationales impliquant des obligations de paiement. »

Si l’amendement 12 est adopté, l’amendement 21 n’a plus d’objet.

M. VOLONTÈ (Italie)* – Il s’agit ici de simplifier le paragraphe 8. On ne peut pas dire, en outre, comme le fait ce paragraphe, que changer la Constitution est une mauvaise chose en soi.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je suis contre cet amendement. Le texte présente un certain nombre de remarques positives et, c’est d’ailleurs aussi le sens de l’amendement 1 qui vient d’être adopté. Il n’est évidemment pas possible de supprimer les différents avis de la Commission de Venise repris dans ce paragraphe.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – Avis défavorable de la commission.

L’amendement 12 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 21, déposé par Mmes Čigāne, Lībiņa-Egnere, MM. Bērzinš, Sasi, Jakavonis, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 8, à remplacer la dernière phrase par la phrase suivante : « La tentative de la coalition gouvernementale en Hongrie d’utiliser sa majorité exceptionnelle des deux tiers pour faire passer en force des réformes arbitraire était contraire à ces principes démocratiques. »

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – La résolution insinue que s’appuyer sur une majorité des deux tiers pour faire passer des réformes importantes est mauvais en soi. L’amendement propose une formulation plus nuancée, qui tient mieux compte de la situation en Hongrie.

LE PRÉSIDENT – La Présidence a été saisie par la rapporteure du sous-amendement oral suivant :

Dans l’amendement 21, après les mots « force des réformes », supprimer le mot « arbitraires ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Ce n’est pas le cas. Le sous-amendement oral peut donc être examiné.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Ce sous-amendement vise à clarifier le texte. C’est faire passer en force des réformes qui est à nos yeux critiquable.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Le terme « arbitraires » me paraît devoir être conservé. Ce ne sont pas les réformes par principe qui sont critiquables, mais les réformes arbitraires.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est favorable au sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement ainsi sous-amendé.

L’amendement 21 sous-amendé est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 13, déposé par MM. D. Davies, Braun, Mariani, Vitali, Mme Bakoyannis, M. Taliadouros, Palacios, Mme Dervoz, M. Kandelaki, Puche, Conde, Agramunt, Fritz, Badea, Mme Gündeş Bakir, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 9.

Si l’amendement 13 est adopté, l’amendement 22 n’a plus d’objet.

M. BRAUN (Hongrie)* –Le paragraphe 9 contient des déclarations peu objectives. Plusieurs experts allemands et français renommés ont qualifié le quatrième amendement de loi positive, tandis que d’autres ont exprimé des critiques. La Commission de Venise exprime des vues plus équilibrées. Le Gouvernement hongrois a déjà déclaré son intention d’amender la Loi fondamentale. Ce paragraphe n’est donc plus d’actualité.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Ce paragraphe est tiré directement de l’avis de la Commission de Venise sur le quatrième amendement. Je vous rappelle également que la Commission de Venise a alerté sur le fait que certains experts ont été achetés par le Gouvernement hongrois pour rendre un avis favorable sur les modifications proposées.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – Avis défavorable.

L’amendement 13 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 22, déposé par M. Gaudi Nagy, Mme Gündeş Bakir, MM. Kayatürk, van Dijk, Ghiletchi, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 9 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée salue les dispositions (clause U) du quatrième amendement à la Constitution qui pourront servir de garantie juridique pour punir les auteurs des crimes contre l’humanité commis sous le régime communiste et, en l’absence d’exécution effective de ces dispositions, invite instamment les autorités hongroises à engager le processus en vue de mettre fin à l’impunité des auteurs de ces crimes. »

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Le quatrième amendement contient une disposition qui constituera une base juridique pour poursuivre les auteurs de crimes contre l’humanité à l’époque communiste. Il est important de le souligner dans le projet de résolution.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement 1, déposé par MM. Gaudi Nagy, van Dijk, Mularczyk, Mme Kapetanović, M. D. Davies, tend, à la fin de l’amendement 22, à insérer les phrases suivantes : « L’Assemblée souligne qu’entre 2002 et 2010, pendant les huit années de pouvoir des gouvernements libéraux-socialistes, la Hongrie a connu une crise des droits de l’homme, plus particulièrement à l’automne 2006, où des centaines de personnes ont été agressées par la police, qui a tiré dans les yeux de plus d’une dizaine d’entre elles, et où des centaines de procès arbitraires ont été ouverts à l’encontre de manifestants et de victimes innocentes. Des rapports d’organisations de défense des droits de l’homme, des jugements, des rapports officiels du Parlement hongrois ont tous confirmé ces graves violations des droits de l’homme. Que les auteurs de ces actes – et notamment l’ancien premier Ministre – n’aient toujours pas été punis n’est pas compatible avec les valeurs du Conseil de l’Europe. Les autorités hongroises doivent prendre les mesures légales qui s’imposent pour mettre fin à l’impunité dont ils jouissent. »

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Ce sous-amendement porte sur les violations des droits de l’homme entre 2002 et 2010 et demande que des poursuites soient engagées contre les auteurs de ces crimes.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Ce sous-amendement n’a pas été examiné par la commission. Personnellement, j’y suis défavorable. Cette incrimination de l’opposition semble en effet contraire aux principes du Conseil de l’Europe.

Le sous-amendement 1 n’est pas adopté.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je suis contre l’amendement 22 pour les raisons que j’ai déjà exposées.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est contre l’amendement.

L’amendement 22 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 14, déposé par MM. Volontè, Braun, Gulyás, Gruber, M. Vejkey, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 10, à remplacer la deuxième phrase par la phrase suivante : « L’Assemblée appelle les autorités hongroises à poursuivre son dialogue ouvert et constructif avec la Commission de Venise et avec toutes les autres institutions européennes. »

M. VOLONTÈ (Italie)* – Il s’agit d’un ajout. Que l’on veuille ou non le suivi, l’Assemblée doit rappeler qu’il serait bon que les autorités hongroises et la Commission de Venise ainsi que d’autres institutions européennes poursuivent leur dialogue.

Mme LUNDGREN, rapporteure* – Cet amendement tend à remplacer une partie du texte du projet de résolution. Il ne s’agit pas d’un ajout. C’est pourquoi j’y suis défavorable. En effet, cet amendement aurait pour conséquence de passer sous silence la position de la Commission de Venise concernant la défense de nos principes. Laissons le texte en l’état.

M. HERKEL, président de la commission* – Avis favorable de la commission.

L’amendement 14 est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 15, déposé par M. Braun, Mme Quintanilla, MM. Puche, Conde, Agramunt, Badea, Mme Gündeş Bakir, M. D. Davies, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 10, insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée se félicite que, à la suite du dialogue avec la Commission de Venise et le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, le Parlement hongrois ait modifié la loi sur les médias à deux reprises, ainsi que les lois régissant le système judiciaire, la loi sur la liberté d’information et les dispositions transitoires de la Loi fondamentale, et formulé une proposition pour un cinquième amendement de la Loi fondamentale. L’Assemblée note que, en adoptant la loi sur l’élection des membres du parlement, le Gouvernement hongrois a répondu aux recommandations émises précédemment par la Commission de Venise et mis fin au problème des écarts de taille entre circonscriptions. L’Assemblée note que la décision du parlement répond aux exigences de la Cour constitutionnelle selon lesquelles le découpage des circonscriptions doit être régi par la loi. »

J’ai cru comprendre que M. Braun était prêt à retirer l’amendement 15 pour permettre la discussion d’un amendement oral dont la présidence a été saisie par M Herkel.

M. BRAUN (Hongrie)* – Tout à fait.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 15 est retiré.

La présidence a été saisie par M. Herkel de l’amendement oral suivant :

Après le paragraphe 11.2.2 de la résolution insérer le paragraphe suivant :

« L’Assemblée note que, en adoptant la loi sur l’élection des membres du Parlement, le Gouvernement hongrois a répondu aux recommandations émises par la Commission de Venise ainsi qu’à la décision de la Cour constitutionnelle visant les écarts de taille entre circonscriptions. »

Je considère que cet amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent, ce qui n’est pas le cas.

M. HERKEL, président de la commission* – Favorable.

L’amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 16, déposé par M. Braun, Mme Quintanilla, MM. Puche, Conde, Agramunt, Fritz, Badea, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 11.3.3 par le paragraphe suivant : « introduire une période de répit obligatoire pour les membres du parlement, à l’instar de ce qui existe déjà pour les membres du Gouvernement, les dirigeants de partis politiques et les dirigeants de l’Etat, entre la fin du mandat politique et la prise de nouvelles fonctions, dans le cas de leur élection en tant que juge à la Cour constitutionnelle ; »

M. BRAUN (Hongrie)* – Il existe déjà une période de transition obligatoire en ce qui concerne les membres du gouvernement, les dirigeants de partis politiques et les dirigeants de l’Etat. Il faudrait étendre cette obligation de période de transition aux parlementaires.

Cet amendement tend à ajouter les parlementaires à la liste des personnes qui doivent attendre un certain temps avant de pouvoir occuper ces autres fonctions.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par M. Herkel du sous-amendement oral suivant :

Dans l’amendement 16, substituer aux mots : « dans le cas de leur élection » les mots : « avant qu’ils ne soient éligibles ».

Je considère ce sous-amendement recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. Tel n’est pas le cas.

M. HERKEL, président de la commission* – Il s’agit d’une correction rédactionnelle. La période de transition intervient avant que les parlementaires soient éligibles.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. HERKEL, président de la commission* – Avis favorable de la commission sur l’amendement ainsi sous-amendé.

L’amendement 16 sous-amendé est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 17, déposé par M. Braun, Mme Quintanilla, MM. Puche, Conde, Agramunt, Fritz, Badea, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 11.4.

M. BRAUN (Hongrie)* – À la suite des remarques du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne, une modification a été proposée par le Gouvernement hongrois. Après l’avis de la Commission de Venise, le gouvernement a sollicité la Cour constitutionnelle. Celle-ci a annulé un certain nombre de dispositions, notamment concernant les innovations touchant le système judiciaire.

Par conséquent le problème est désormais réglé. Il faut que le texte tienne compte des récentes décisions prises en Hongrie pour suivre les suggestions de la Commission de Venise.

Mme LUNDGREN, rapporteure* – C’est justement l’un des nœuds du problème en ce qui concerne la prééminence du droit. Nous voulons que la justice soit rendue conformément à nos principes. Nous devons rappeler que le fonctionnement de la justice doit être conforme aux préconisations de la Commission de Venise. C’est pourquoi il faut maintenir le texte.

M. HERKEL, président de la commission* – Avis défavorable.

L’amendement 17 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 18, déposé par M. Braun, Mme Quintanilla, MM. Puche, Conde, Agramunt, Fritz, Badea, D. Davies, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 11.5 par le paragraphe suivant : « la législation applicable aux médias, afin de la rendre encore plus conforme à la jurisprudence de la CEDH, indépendamment des améliorations apportées aux lois correspondantes, en collaboration avec le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe. »

M. BRAUN (Hongrie)* – Le rapport donne l’impression trompeuse que le Gouvernement hongrois ignore ce que dit la Commission de Venise, tout comme la jurisprudence de la Cour des droits de l’homme. En fait, la Hongrie a toujours agi de manière constructive. C’est la raison pour laquelle je vous invite à soutenir mon amendement.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Je suis contre cet amendement. Nous ne parlons pas ici de la jurisprudence de la Cour ; nous citons, en fait, les remarques formulées par les propres experts du Conseil de l’Europe en matière de médias. Accepter l’amendement de M. Braun reviendrait à remettre en cause l’avis de ces experts.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L’amendement 18 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 19, déposé par MM. Volontè, Braun, Gulyás, Mularczyk, Czelej, Clappison, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 12.

M. VOLONTÈ (Italie)* – Nous voulons supprimer le paragraphe 12 du projet de résolution, qui semble ignorer ce qui s’est passé dans le cadre de la coopération entre la Hongrie, le Conseil de l’Europe, son Secrétaire Général et l’Union européenne. Il y a un an, ce paragraphe 12 aurait peut-être eu lieu d’être, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui, car des réformes ont été introduites grâce, justement, à l’action du Conseil de l’Europe.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Ce paragraphe 12 est parfaitement justifié, voire crucial dans l’économie du texte. Il faut voir l’ensemble du tableau et ne pas se focaliser sur de petites modifications, même si celles-ci sont allées dans le bon sens.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 19 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 20, déposé par MM. Gulyás, Braun, G. T. Nagy, Mme Csöbör, MM. Gruber, Vejkey, Kalmár, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, à remplacer les deuxième et troisième phrases par les phrases suivantes : « Les nouvelles dispositions de la Constitution ont amené à s’interroger, d’un point de vue juridique, sur la mesure dans laquelle le pays se conforme à ses obligations. L’Assemblée décide toutefois de ne pas ouvrir de procédure de suivi à l’égard de la Hongrie parce qu’une telle décision serait disproportionnée compte tenu de l’actuel dialogue ouvert et constructif de ce pays avec la Commission européenne, la Commission de Venise et tous les organes pertinents du Conseil de l’Europe. »

J’ai cru comprendre, Monsieur Gulyás, que vous souhaitiez le retirer ?

M. GULYÁS (Hongrie)* – Oui, Monsieur le Président. Dès le départ, nous avons dit qu’il ne fallait pas ouvrir la procédure de suivi, mais l’amendement 2 préconise une autre solution, qui est acceptable.

LE PRÉSIDENT – Personne ne souhaitant le reprendre, l’amendement est considéré comme retiré.

L’amendement 2, déposé par MM. Rouquet, Henriksen, Hancock, Agramunt, Mme Woldseth et M. Hörster, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, à remplacer la dernière phrase par la phrase suivante : « L’Assemblée décide toutefois de ne pas ouvrir de procédure de suivi à l’égard de la Hongrie mais de suivre de près l’évolution de la situation en Hongrie et de dresser le bilan des progrès accomplis dans la mise en œuvre de cette résolution. »

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – S’il est une leçon à tirer de ce débat, c’est que, bientôt, le Conseil de l’Europe va devoir remettre complètement sur le métier sa procédure de suivi, et voir quand elle peut être déclenchée. Il faudrait fixer des lignes directrices précises en la matière.

Je retire de ce débat le sentiment que rien ne semble indiquer qu’un suivi serait bénéfique pour les Hongroises et les Hongrois. C’est un argument suffisant pour que je vous appelle à appuyer mon amendement.

Mme LUNDGREN (Suède), rapporteure* – Nous sommes là face à une question tout à fait cruciale : fallait-il ou non préconiser l’ouverture de la procédure de suivi ? Il semble que, dans l’intervention précédente, on ait oublié les règles de la commission de suivi. Cette commission est là pour vérifier que la Convention européenne des droits de l’homme et que les autres conventions du Conseil de l’Europe sont bien respectées. Telle est la mission de la commission du suivi : elle est là pour « suivre de très près ». Cela signifie que nous devons avoir un suivi. Ouvrez le dictionnaire et vous verrez ce que veut dire follow closely : c’est suivre de très près.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement 2 est adopté.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix le projet de résolution contenu dans le Doc.13229, tel qu’il vient d’être amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (149 voix pour, 38 voix contre et 24 abstentions.)

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, j’appelle les deux scrutateurs, M. Van der Maelen et M. Bataille, afin que nous puissions procéder au dépouillement du scrutin relatif à l’élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme.

6. Évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement du Maroc

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport sur l’évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement du Maroc, présenté par M. Luca Volontè au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13230), ainsi que des avis présentés par M. Jordi Xuclà au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc.13244) et par Mme Sahiba Gafarova, au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc.13245).

Après avoir écouté les rapporteurs, nous aurons le plaisir d’entendre M. Karim Ghellab, président de la Chambre des représentants du Maroc, que je salue puisqu’il vient de nous rejoindre.

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance d’hier matin, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Je vous rappelle aussi que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 20, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de treize minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. VOLONTÈ (Italie), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* –Quelques minutes seulement me seront nécessaires pour rappeler comment, ces dernières années, notre Assemblée a envisagé ce partenariat avec le Parlement du Maroc. Je remercie d’ailleurs le président Marcenaro d’avoir fait en sorte que sa commission fasse de moi le rapporteur sur ce sujet.

C’est un événement extraordinaire que la mise en place de ce partenariat pour la démocratie. Bien entendu, tout n’a pas été parfait. Il y a eu quelques moments difficiles, lorsque nous nous sommes trouvés en désaccord sur un certain nombre de points avec nos amis marocains. Mais cela démontre qu’un processus s’est ouvert avec ce pays et je remercie nos partenaires marocains pour tout ce qui a été fait.

Notre commission des questions politiques, de même que d’autres commissions de notre Assemblée, entretient depuis quelques années des échanges réguliers avec nos homologues marocains et, plus généralement, avec les autorités marocaines. Nous constatons avec beaucoup de plaisir que le Maroc a accompli une réforme considérable, sans doute la plus importante qu’il pouvait mettre en œuvre, à savoir une réforme constitutionnelle. Bien entendu, un certain nombre de lois organiques doivent maintenant être mises en place ; j’invite d’ailleurs les autorités marocaines à faire diligence en la matière. Quoi qu’il en soit, il faut reconnaître que la nouvelle Constitution est très moderne et tout à fait digne des meilleures constitutions de nos pays européens.

Je pourrais presque m’arrêter là. Cela dit, nous devons aujourd’hui, non seulement mentionner les grands progrès, mais aussi signaler certains points qui restent encore un peu difficiles et sur lesquels nous allons devoir œuvrer dans les temps qui viennent. De toute façon, dans deux ans, nous dresserons avec les Marocains – je dis bien : avec eux – un nouveau bilan. En effet, le partenariat pour la démocratie ne signifie pas que le Conseil de l’Europe joue le rôle du professeur et que nos partenaires – le Maroc ou la Palestine – sont assis sur les bancs de l’école, boivent nos paroles et appliquent toutes les consignes. De fait, le Conseil de l’Europe a beaucoup à apprendre de ce dialogue avec ses partenaires, car il s’agit bien d’un échange. La commission des questions politiques a appris beaucoup de choses lors de ses discussions avec les Marocains et les Palestiniens. Grâce à d’autres partenariats – car j’espère que le mouvement se poursuivra dans les années qui viennent – nous enrichirons encore nos connaissances.

Ce rapport sera certainement mon dernier ici. Je suis très fier d’avoir pu accomplir ce travail au nom de la commission des questions politiques. Nous étions sur un terrain vierge. C’était donc une aventure tout à fait passionnante : nous avons dû, nous aussi, nous adapter à une situation nouvelle. Encore une fois, nous avons vécu un changement extraordinaire, même si certaines difficultés subsistent et si, sur certains points, nous ne sommes pas d’accord à cent pour cent avec nos amis marocains, notamment pour ce qui est de l’interprétation d’un certain nombre de normes.

Quoi qu’il en soit, retenons ce qu’il y a de positif – c’est du moins dans cet esprit que nous avons abordé ce travail et que nous avons œuvré depuis deux ans. Je souhaite évidemment que, dans les années qui viennent, on puisse continuer à avancer dans le même esprit. Ce partenariat pour la démocratie avec le Maroc représente l’ouverture d’un nouveau chapitre dans nos relations bilatérales, un chapitre plus positif qui doit être l'occasion, pour les uns et les autres, de promouvoir les droits de l’homme, non seulement dans les discours, mais surtout dans les faits.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera huit minutes pour répondre aux orateurs.

Vous nous avez dit que c’était probablement votre dernier rapport. Je vous répondrai que nous n’en savons rien : la vie politique est faite de hauts et de bas. Nombreux sont les parlementaires qui nous ont quittés et qui sont revenus à l’Assemblée parlementaire. Peut-être aurons-nous donc à nouveau le plaisir de vous accueillir.

Monsieur Xuclà, vous disposez de trois minutes pour présenter l’avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme.

M. XUCLÀ (Espagne), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – Notre commission s’est efforcée de produire un rapport sur cette expérience relativement nouvelle au sein du Conseil de l’Europe, à savoir celle du partenariat.

Dans cette situation, il s’agit d’un pays qui souhaite, non pas présenter sa candidature pour devenir membre du Conseil de l’Europe, mais prendre pour référence les normes qui sont celles du Conseil en matière de démocratie et de respect des droits de l’homme. En l’espèce, il existe des indices tout à fait positifs quant aux réformes qui ont été opérées au Maroc. En particulier, on peut considérer que, si ce que l’on a appelé le Printemps arabe – même si ce printemps s’est parfois quelque peu refroidi – n’est pas parvenu au Maroc, c’est justement parce que ce pays a entrepris de telles réformes.

Entre amis et partenaires, le dialogue ne doit pas se résumer à une acceptation sans condition, mais il doit être empreint de critiques constructives. Le travail que nous avons accompli depuis deux ans au sein de la commission consiste aussi à évoquer certains aspects pour lesquels nous pensons que le Maroc, en tant qu’ami et partenaire, peut améliorer les choses ; cette position est reflétée notamment dans l’amendement 12, qui pourrait d’ailleurs être amélioré par le biais d’un amendement oral.

Nous avons évoqué les normes européennes. Nous voulons être des partenaires fidèles et loyaux. Il est bon de noter que, pour la première fois en près de 70 ans d’existence du Conseil de l’Europe, nous avons une nouvelle politique de relations avec nos voisins. Cela nous permettra peut-être de gagner un pouvoir d’attrait important à l’égard des pays situés au-delà de la Grande Europe, notamment ceux de l’Afrique du Nord et du monde arabe.

LE PRÉSIDENT – Madame Gafarova, vous avez la parole pour trois minutes pour présenter l’avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan), rapporteure pour avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – J’aimerais avant tout féliciter M. Volontè pour son excellent rapport. Ce fut un plaisir pour moi de compléter, comme le rapporteur me l’a demandé, les informations fournies par ce texte pour ce qui est de la représentation équilibrée des hommes et des femmes dans la vie publique. J’ai également jugé approprié de traiter de quelques autres questions tout aussi pertinentes au vu des attributions de la commission sur l’égalité et la non-discrimination.

Lorsque le Gouvernement du Maroc a sollicité le statut de partenaire pour la démocratie, en février 2010, il a assumé –  à juste titre  – des engagements politiques ambitieux. La résolution 1818 de 2011 a également fixé des objectifs importants aux autorités marocaines. Pour ma part, j’ai considéré que cette résolution était une référence me permettant d’évaluer notre partenariat.

Pour ce qui est de la représentation politique des femmes, leur nombre au parlement a été pratiquement multiplié par deux. Cela reflète la réforme du système électoral qui réserve désormais 60 sièges pour les femmes. L'Assemblée parlementaire a toujours recommandé d’établir des quotas en faveur des femmes en tant que mesure nécessaire, éventuellement temporaire, pour accroître leur représentation politique. Par conséquent, nous ne pouvons qu’approuver cet aspect du système marocain. Toutefois, j’espère que la part des femmes élues sur les listes générales augmentera à l’avenir.

L’opinion publique comme les autorités sont désormais particulièrement sensibles à la question de la violence contre les femmes au Maroc. Je pense que cela se traduira par des changements importants apportés à la législation et par l’adoption de politiques efficaces. Aujourd’hui, la protection contre une telle violence se retrouve surtout dans le code pénal qui remonte à 1962, et qui est donc complètement obsolète.

Je suis particulièrement sensible au fait que le projet de résolution invite les autorités marocaines à envisager d’adhérer à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

La Convention d’Istanbul offre d’ailleurs un ensemble d’outils permettant de prévenir la violence, de protéger les victimes et de poursuivre les auteurs d’actes de violence.

La traite des êtres humains semble être quelque peu sous-estimée par les autorités marocaines. Je pense que nous devons les encourager à renforcer la coopération internationale au niveau pénal, notamment avec les pays européens, car le Maroc est un important pays d’origine, de transit et de destination de cette traite.

Il est également nécessaire de combler le fossé entre certaines lois novatrices qui ont été adoptées ces dernières années au Maroc et leur mise en œuvre. Cela permettrait notamment d’améliorer notablement la situation des femmes. Le code de la famille doit être appliqué de façon plus uniforme à l’échelle du pays, dans les grandes villes comme dans les zones rurales.

La discrimination au motif d’orientation sexuelle et d’identité de genre doit être abordée au Maroc. Le racisme est également une question qui se pose dans ce pays, comme dans bien d’autres. Je suggère donc que des activités soient menées pour lutter contre ce fléau, y compris des campagnes de sensibilisation destinées au public en général et une formation destinée aux responsables de l’application de la loi.

J’espère que nos amis du Maroc considèreront ces indications comme une contribution constructive et respectueuse dans le cadre d’un partenariat qui s’est avéré fructueux et qui pourrait devenir encore plus fort et plus profond.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est ouverte.

M. VILLUMSEN (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Nous sommes là face à un pays qui va dans le bon sens et il faut que l’Assemblée en prenne note. Il en va différemment de la Hongrie dont nous parlions tout à l’heure. Malheureusement, dans le cas de la Hongrie, nous n’avons pas voulu respecter nos propres valeurs en matière de droits de l’homme.

Je me suis rendu au Maroc avec une délégation du Parlement danois au mois de février et j’ai pu rencontrer le Premier ministre, la délégation marocaine qui vient ici à Strasbourg et les représentants de la société civile.

Bien entendu, un certain nombre de problèmes doivent être traités. La nouvelle Constitution a été un pas en avant, mais pour l’instant les lois d’application de cette Constitution n’existent pas encore.

Par ailleurs, les pouvoirs du roi sont considérables et ne peuvent absolument pas être discutés dans le cadre du débat politique. Cela peut poser problème pour que la démocratie soit vraiment vivante et intense dans le pays.

En outre, le problème de l’occupation illégale du Sahara occidental doit être résolu dans le cadre de l’Onu. Le Groupe pour la gauche unitaire européenne soutient l’amendement 1 renvoyant à une décision antérieure de l’Assemblée qui demandait une solution urgente au conflit du Sahara occidental. Nous devons traiter cette question, nous devons traiter toutes les questions de violation des droits de l’homme et tous les problèmes qui subsistent en matière démocratique au Maroc.

Mais le Maroc a fait des progrès, il faut le dire, même s’il subsiste des problèmes. Un proverbe danois dit : « La vérité doit venir des amis ». Je pense justement que les Marocains doivent entendre la vérité de la bouche de leurs amis Européens, ici, au Conseil de l’Europe. J’espère donc que ce qui est dit dans ce rapport sera bien entendu. Il souligne les progrès mais également la persistance de grands problèmes en ce qui concerne l’Etat de droit, le droit international et les droits de l’homme.

M. GHILETCHI (République de Moldova), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen*– Je voudrais remercier le rapporteur pour la mise à jour qu’il a réalisée sur la situation au Maroc et pour les informations qu’il nous a données sur la dynamique de la coopération qui s’est instaurée entre le Conseil de l’Europe et le Maroc.

Etant donné qu’il s’agit du dernier rapport élaboré par M. Volontè, je tiens à le remercier sincèrement pour son engagement très passionné et son travail inlassable au sein de l'Assemblée parlementaire. Je ne sais ce que vous réserve la providence, Monsieur Volontè, mais continuez à lutter en faveur des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe.

Il y a deux ans, le Maroc est devenu le premier partenaire pour la démocratie de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et il convient de faire l’éloge du dur travail qui a été accompli par ce pays qui a pris des mesures importantes pour créer un Etat authentiquement démocratique. L’histoire nous enseigne que ce n’est pas une voie facile, mais qu’on en est largement récompensé.

Je voudrais souligner la nécessité de voir le Parlement marocain s’impliquer très fortement dans le processus de réformes qui doit lui permettre de renforcer en permanence la démocratie, la prééminence du droit, le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans le pays.

L’un des moyens essentiels pour renforcer les droits fondamentaux consiste à veiller au plein respect de la liberté de conscience, de religion, de croyance – y compris le droit à changer de religion – ainsi qu’à la liberté d’association et de réunion pacifique.

Au cours de la dernière réforme de la Constitution, les dirigeants marocains ont rejeté l’adoption d’un article concernant la liberté de croyance, au motif que cela représenterait une menace pour l’identité du Maroc. L’islam et le judaïsme sont deux religions reconnues au Maroc. D’après l’un des quotidiens les plus populaires au Maroc, Al Massae, en raison d’un grand nombre de convertis, le christianisme est en fait devenu la deuxième religion du pays. En dépit d’un nombre croissant de chrétiens dans le pays, il semblerait que les autorités restent inflexibles lorsqu’il s’agit de leur octroyer des droits pleins et entiers.

D’ailleurs, un grand nombre de chrétiens craignent pour leur vie après qu’une fatwa eut été lancée par l’autorité suprême de l’islam. D’après le quotidien Akhbar al-Youom, le Haut conseil des oulémas, la plus haute autorité religieuse du Maroc a lancé cette fatwa l’an dernier mais l’a retirée à la demande de la délégation aux droits de l’homme du Maroc. Les convertis au christianisme au Maroc considèrent néanmoins que cela créé un précédent dangereux quant à la façon dont seront traités à l’avenir les convertis et les chrétiens. Pour un Etat qui aspire à devenir une réelle démocratie, de telles choses sont inadmissibles.

J’invite le Parlement marocain à rester ouvert et à traiter toutes les questions que j’ai évoquées, outre celles évoquées dans le projet de résolution, pour veiller à une pleine et entière mise en œuvre des engagements politiques, notamment dans les domaines mentionnés au paragraphe 8 de la Résolution 1818. L’Assemblée doit continuer à examiner les progrès accomplis dans le cadre de ce partenariat et offrir son assistance au Parlement du Maroc.

Mme STRIK (Pays-Bas), porte-parole du Groupe socialiste* – Il y a deux ans, le Maroc s’est vu accorder le statut de partenaire pour la démocratie. Les sociaux-démocrates s’en sont réjouis et continuent d’appuyer ce partenariat et soutiennent aujourd’hui cette résolution. Le Maroc a fait un effort sur la voie de la démocratie et a adopté une nouvelle Constitution. Nous en félicitons le Maroc.

Il est temps de passer néanmoins à d’autres réalisations pratiques.

De nouveaux défis sont lancés au Maroc, en matière de migration et de demandeurs d’asile, par exemple. Le Maroc est de plus en plus un pays de destination pour les migrants. Sa responsabilité est d’intégrer les migrants et de s’occuper de questions comme la discrimination, l’accès aux services, au logement et aux droits sociaux. Le nombre croissant de demandeurs d’asile appelle de nouvelles mesures. La commission des migrations s’est rendue au Maroc et même si de nombreux efforts ont été consentis, nous restons préoccupés.

Les demandeurs d’asile n’ont pas facilement accès à une procédure d’asile. Une fois que le HCR les a reconnus en tant que tels, ils peuvent toujours être expulsés et ceux qui viennent de la région sub-saharienne font souvent l’objet de discriminations.

L’Europe a une responsabilité dans de telles pratiques, car elle demande au Maroc de renforcer ses contrôles aux frontières, rendant difficile pour les migrants l’entrée en Europe. De plus en plus de migrants se tournent d’ailleurs vers les autorités marocaines pour demander aide et protection.

Il convient d’aider les Marocains et de veiller à ce que les migrants, si nécessaires, bénéficient d’une protection, soient traités avec dignité et que leurs droits soient respectés. Après tout, ce partenariat ne concerne pas uniquement les citoyens marocains, mais tous les habitants du Maroc. J’ai présenté quelques amendements en ce sens.

Un partenariat implique deux parties : nous avons des choses à apprendre du Maroc. S’agissant de la façon dont nous traitons les Marocains dans nos pays, nous devons améliorer nos propres politiques d’intégration. Instaurer un échange mutuel pourrait être bénéfique pour les deux partenaires.

De nombreuses ONG très actives travaillent au Maroc pour promouvoir les droits humains. Elles sont néanmoins parfois confrontées à des difficultés dans leur travail. Elles rencontrent, par exemple, des obstacles quand il s’agit d’obtenir des permis de travail et ont des difficultés à s’exprimer librement. Or, une démocratie ne peut pas bien fonctionner sans société civile forte. C’est la raison pour laquelle nous demandons au parlement d’étudier les mesures qui seraient susceptibles d’être prises pour réduire les difficultés et étudier dans quelle mesure la coopération avec la société civile pourrait être renforcée.

Par ailleurs, nous souhaitons multiplier les échanges entre les ONG européennes et les ONG marocaines afin de faire progresser les réformes démocratiques. Tout le monde bénéficierait ainsi de ce partenariat.

Nous appuyons pleinement la proposition de continuer à suivre le processus de réformes politiques au Maroc. Nous attendons des mesures plus pratiques visant à améliorer le processus démocratique et le respect des droits de ceux qui vivent au Maroc.

M. HANCOCK (Royaume-Uni), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Je suis ravi et très fier de m’exprimer au nom de mon groupe sur un sujet aussi important.

Je voudrais tout d’abord rendre hommage aux deux rapporteurs pour avis. Leurs avis et leurs amendements apportent beaucoup à ce rapport.

Qu’on l’apprécie ou non, il faut reconnaître à M. Volontè que personne ne peut l’ignorer. Aujourd’hui, il nous a montré qu’il était capable de voir la forêt derrière l’arbre. Il a accepté aujourd’hui les amendements qui ont été présentés à la commission, améliorant ainsi son propre rapport, ce qui est tout de même une bonne chose ! L’Assemblée devrait, je pense, le remercier d’avoir fait preuve d’esprit d’ouverture et d’avoir été disponible. J’ai été fier d’en être le témoin.

J’éprouve une grande affection pour le Maroc où j’ai passé beaucoup de temps au fil des cinquante dernières années. J’apprécie grandement ce pays. Quiconque a été au Maroc, à Marrakech, à Fès ou dans d’autres villes encore, ne saurait que se sentir lié à jamais à ce pays.

Le rapport évoque votre avenir en tant que pays. Le Maroc a à sa tête un roi et il a besoin d’un système où les trois parties du triangle fassent fonctionner le pays : chef d’Etat, parlement et peuple.

La monarchie constitutionnelle est la voie retenue par le Maroc avec la volonté du roi. Nous voulons assister à ce changement et à cet égard nous devons travailler ensemble avec le Parlement marocain pour que le processus démocratique, en dépit des difficultés, progresse. D’ailleurs, le rapport n’ignore pas les difficultés qui subsistent et il nous faudra nous pencher sur certains sujets. Mais vous faites désormais partie de la famille et la responsabilité de notre famille est de vous faciliter le voyage comme nous l’avons fait avec d’autres pays. Nous le ferons avec votre coopération et vous le ferez avec notre aide. Nous appelons de nos vœux le changement vers une monarchie constitutionnelle et un gouvernement qui réponde aux besoins de son peuple, sans quoi ce rapport ne sera pas le dernier que l’Assemblée examinera sur le Maroc.

Le rapport est un élément fondamental qui devra être pris en considération par votre gouvernement, par votre parlement et par le chef d’Etat. Vous ne pourrez pas vous tromper de beaucoup car les obstacles seront moins infranchissables grâce à notre soutien.

M. LIDDELL-GRAINGER (Royaume-Uni)* – Je suis en accord avec l’intervention de mon collègue, M. Hancock. Notre histoire avec le Maroc date d’il y a de plus huit cents ans. La Grande-Bretagne ayant à sa tête une monarchie constitutionnelle, je comprends bien la voie suivie par le Maroc.

A la différence des autres pays du Maghreb et des rives sud de la Méditerranée, le Maroc n’a pas connu le Printemps arabe, parce que tout simplement il est ouvert au changement, que le roi accepte.

Je me suis rendu récemment au Maroc et je suis impressionné par le fonctionnement des deux chambres, ce que j’apprécie d’autant puisqu’il se fonde sur le système britannique ! Lors de notre visite, nous avons constaté sur place des avancées.

Ce rapport, comme d’autres du Conseil de l'Europe, est bon. Le rapporteur a réalisé un excellent travail. Il nous faut soutenir le Maroc, qui fait partie de ce que nous sommes et nous devons être fiers de tout ce qui a été réalisé en si peu de temps, pacifiquement : pas une goutte de sang n’a été versée, pas d’émeutes, pas de meurtres. Les autorités ont agi ainsi parce qu’il a estimé que c’était la bonne voie à suivre ; à cet égard, nous devons les applaudir.

À la suite des contacts avec l’ambassadeur du Maroc à Londres, j’ai mesuré les efforts fournis pour comprendre ce qui était important pour le Maroc et pour l’Europe. Les autorités se sont assurées que les membres du parlement, que les groupes d’une nation, comprenaient tout cela. Cela s’inscrit dans l’intérêt de tous.

Le rapport montre aussi les domaines où des progrès restent à réaliser, mais quel pays pourrait dire qu’il a réalisé de telles avancées aussi rapides en matière de démocratie, y compris les anciens pays du Pacte de Varsovie ? Nous-mêmes avons mis des années à prendre des décisions semblables. Nous devons être fiers des aspirations du Maroc.

J’espère que le changement s’y poursuivra. Nous comprenons qu’il s’agit d’un partenariat et c’est bien cela que le rapport met en exergue : il souligne que nous coopérons, que nous nous entraidons. M. Hancock l’a dit, à raison : le Maroc est un membre de la famille. Nous sommes une famille des nations qui comprennent ce qu’est la démocratie, qui aiment et défendent la démocratie. Nous devons tous être fiers de nos réalisations et plus fiers encore des pays qui rejoignent la famille et qui veulent adhérer à tout ce à quoi nous croyons nous-mêmes.

En tant que parlementaire britannique et membre du Conseil de l'Europe, j’applaudis le Maroc et les avancées qu’il a réussi à réaliser en si peu de temps. J’applaudis aussi la voie suivie pour y parvenir. Nous pouvons tous en tirer des enseignements, tous nous pouvons y parvenir en coopérant, en restant unis, en nous comprenant mutuellement.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le président Ghellab, au nom de l’ensemble de mes collègues présents ou de ceux malheureusement absents de l’hémicycle, je veux vous dire à quel point nous sommes sensibles au fait que vous ayez choisi librement de nous rejoindre aujourd’hui afin de participer à ce débat ô combien important.

Vous avez entendu les différents représentants des groupes. Ils ont parlé avec leur cœur. Mais lorsque l’on parle du Maroc, peut-on faire autrement que parler avec son cœur, car c’est un pays qui montre la voie. Le partenariat pour la démocratie est quelque chose de nouveau pour nous, que nous voulions, qui a été initié par mes prédécesseurs : Lluis Maria de Puig, qui nous a malheureusement quittés il y a quelques mois, en fut l’initiateur ; ce travail a été poursuivi par son successeur, M. Mevlüt Çavuşoğlu, et par moi-même.

Nous sommes très sensibles au fait que vous ayez souhaité participer à Turin à la commission présidée par notre ami commun, M. Marcenaro. Vous avez souhaité être présent afin de mieux comprendre notre façon de travailler. Vous étiez intervenu à Turin. J’étais présent.

Vous m’avez demandé si vous pouviez assister à une réunion de l’Assemblée parlementaire : j’ai aussitôt accepté, parce que je pense que votre présence est aussi gratifiante pour nous que pour vous.

Des représentants du Conseil national de la Palestine ont également obtenu le statut de partenaire pour la démocratie. Nous sommes en discussion avec le Kirghizstan : c’est une volonté de mon prédécesseur, M. Mevlüt Çavuşoğlu. J’ai fait deux voyages dans ce qu’on appelle le Maghreb, en Tunisie et en Algérie. Je suis évidemment venu vous voir et je vous remercie de nouveau de votre accueil.

Nous souhaitons que la Tunisie et l’Algérie frappent un jour à notre porte pour rejoindre cette grande famille que M. Liddell-Grainger a évoquée.

Nous émettons aussi le souhait de voir un jour l’Union du Maghreb arabe.

Nous avons besoin d’un pays comme le Maroc, qui apporte sa contribution à la stabilisation de cette région du monde qui, au cours de ces derniers mois, a beaucoup bougé.

Nous pouvons nous considérer comme des amis. C’est un très grand honneur que vous nous faites aujourd’hui en venant vous exprimer devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

C’est avec beaucoup de plaisir, Monsieur le président de la Chambre des représentants du Maroc, que je vous cède la parole.

M. GHELLAB, président de la Chambre des représentants du Maroc. Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Monsieur le Secrétaire général de l’Assemblée, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs, c’est pour moi un grand honneur et un grand plaisir de participer avec vous aux travaux de cette session de l’Assemblée parlementaire. Je voudrais en cette occasion vous exprimer notre grande satisfaction pour les relations qui nous unissent et la coopération fructueuse que nous avons développée ensemble.

Ma présence à cette séance et celle des membres de l’importante délégation des deux chambres du Parlement marocain qui m’accompagnent me donnent l’occasion de vous adresser deux messages. Le premier concerne l’intérêt stratégique que le Parlement marocain et, à travers lui, notre pays, accordent à ce partenariat, eu égard à la parfaite communion de valeurs que nous défendons et auxquelles nous sommes attachés : la défense et la promotion de la démocratie, des droits de l'homme, des libertés fondamentales, du respect du pluralisme, de la diversité politique, de l’égalité et de la parité entre l’homme et la femme et de la diversité culturelle.

Par ce partenariat nous, Marocains, mettons en œuvre dans notre quotidien ces valeurs qui sont les nôtres et qui sont les vôtres. Je rappelle que, quelques jours après l’octroi de ce statut, le peuple marocain adoptait par la voie du référendum une nouvelle Constitution qui plébiscite ces mêmes valeurs. Je parle de communion de valeurs parce que c’est l’expression qui convient.

Mon second message est l’engagement politique du Maroc, à travers son parlement, de poursuivre avec encore plus de volonté, de ferveur et d’engagement, la mise en œuvre des réformes démocratiques conformément à la nouvelle Constitution, à la Résolution 1818 et à la lettre qui accompagnait cette résolution, à la fois en capitalisant ce qui avait déjà été réalisé avant ce partenariat et au cours de ces deux dernières années, et en tenant compte de toutes les recommandations du rapport en discussion aujourd’hui.

Je tiens à insister sur l’engagement du Maroc à promouvoir et à défendre les droits de l'homme – les parlementaires ont évoqué cette question. Je rappellerai la création en 2004 de l’instance Equité et Réconciliation, qui est revenue sur un passé récent au cours duquel de nombreuses exactions et violations des droits de l'homme avaient été commises. Cette instance a recensé et indemnisé les victimes et émis des recommandations, qui sont autant de promesses que ces faits ne se reproduiront plus dans notre pays. Ces recommandations ont toutes été converties en droits et en articles dans la nouvelle Constitution. Ce sont autant d’engagements et de mécanismes visant à respecter les droits de l'homme.

Je rappelle la suprématie accordée par notre Constitution aux conventions internationales qui fait que nous avons l’obligation de modifier notre Loi fondamentale ou nos lois nationales une fois que nous avons adopté des conventions internationales. Je rappelle également la force, l’importance et la crédibilité des institutions nationales de défense des droits de l'homme, notamment le Conseil national des droits de l'homme, le médiateur ou d’autres instances dédiées à cette fin, sans omettre les mécanismes volontaires auxquels participe le Maroc, qui sont dédiés aux droits de l'homme et mis en œuvre par les Nations Unies.

Je tiens également à insister sur la question de la femme, une des premières priorités sociétales de nos réformes démocratiques depuis la refonte du code de la famille en 2004, refonte qui a libéré la femme de la tutelle de l’homme et énoncé l’égalité entre l’homme et la femme, laquelle figure dans la Constitution. Or nous dépassons aujourd’hui ce cadre puisque nous nous dirigeons vers le principe de la parité entre l’homme et la femme, principe que l’Etat s’engage à développer.

J’insisterai encore sur notre engagement à mettre en œuvre et à renforcer les institutions démocratiques, à travers non seulement la réforme de la justice qui garantit son indépendance, mais aussi la place du parlement dans les institutions. La Constitution garantit son indépendance effective vis-à-vis du gouvernement et sa capacité à matérialiser la séparation et l’équilibre des pouvoirs grâce à un contrôle efficace et effectif du gouvernement et à la prise en charge de l’activité législative.

Je tiens à cet égard à signaler que nous avons adopté un plan stratégique de développement de ce rôle parlementaire, que nous avons transmis à votre Assemblée parlementaire, dans l’espoir qu’il constitue une des références de notre partenariat à venir.

Enfin, le Maroc ne ménage aucun effort pour parvenir à une solution politique négociée et acceptée par les parties sur la question de nos provinces sahariennes, et ce, conformément aux décisions du Conseil de sécurité. Je rappelle que la présence du Maroc dans les provinces sahariennes n’est pas illégale mais issue de l’Accord de Madrid, signé en 1975. Cette présence est donc liée à l’épisode de la décolonisation et à la volonté du peuple marocain de recouvrer son intégrité territoriale. A cet égard, le Maroc a proposé la mise en place dans cette région sous souveraineté marocaine d’une autonomie avec de très larges prérogatives, notamment un parlement et un gouvernement autonomes, ce qui permettra aux populations de ces régions de gérer démocratiquement et par elles-mêmes leurs affaires publiques. Cette proposition entre dans le cadre des réformes démocratiques relatives à la mise en place de la régionalisation avancée, comme nouveau cadre de gouvernance, lequel est un véritable vecteur des réformes constitutionnelles à venir.

Je tiens également à réagir à quelques propos pour éclairer le débat. Les lois organiques doivent être accélérées : six sur dix-neuf sont déjà promulguées. Il en reste donc treize qui doivent l’être. Nous nous sommes engagés à les faire aboutir avant 2016 : nous disposons encore de trois ans.

Toutefois, la Constitution ne se limite pas à la mise en œuvre de ces lois. Il est faux de penser que la Constitution sans les lois organiques n’ouvre pas sur des réformes. Quand la Constitution prévoit que le gouvernement exerce le pouvoir exécutif, il n’y a guère besoin d’une loi organique pour qu’il en soit ainsi. Quand la Constitution affirme la séparation des pouvoirs entre le législatif et l’exécutif, il n’y a, là encore, guère besoin de lois organiques pour attester ces principes d’indépendance. La Constitution en elle-même ouvre sur des réformes qui sont déjà mises en œuvre. Nous sommes dans le cadre d’une monarchie constitutionnelle. Le pouvoir exécutif est exercé par le gouvernement et le pouvoir législatif par le parlement. La justice est indépendante. Le roi est le chef de l’Etat et le dirigeant des armées. Il est le garant et l’autorité en matière religieuse. Le Maroc est bien un Etat musulman, mais l’article de la Constitution qui précise que le Maroc est un Etat musulman l’engage également à protéger la pratique des autres religions, notamment hébraïque et chrétienne. On compte au Maroc des dizaines d’églises et de synagogues. Il n’y a pas de difficultés dans ce domaine. L’autorité religieuse s’est engagée à protéger la pratique des autres religions.

Le roi du Maroc est aussi arbitre des institutions. C’est pourquoi le rapport indique que l’équilibre de la Constitution est conforme aux pratiques démocratiques.

Nous nous engageons à poursuivre les réformes, à accélérer le rythme de discussion et de promulgation des lois organiques.

Je vous remercie, Monsieur Mignon, pour votre accompagnement, votre mobilisation dans ce partenariat. Je remercie M. Marcenaro, président de la commission des questions politiques et de la démocratie qui conclut aujourd’hui un long travail. Je remercie M. Volontè pour son suivi. Pour l’affaire du Sahara, je mentionne le rôle de Mme Maury Pasquier, rapporteure d’une contribution tendant à favoriser une solution politique négociée et acceptée par toutes les parties. Nous saluons également la mobilisation assidue de notre délégation parlementaire qui participe à tous vos travaux.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur le président, pour votre intervention.

Nous reprenons le cours de la discussion générale.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je tiens à féliciter le rapporteur pour son excellent travail sur une question d’actualité éminemment importante pour nous tous. Je le remercie pour le caractère détaillé, équilibré de son rapport et pour ses conclusions.

Je tiens à rendre hommage à M. Volontè pour sa contribution aux travaux du Conseil de l’Europe. Il incarne les valeurs européennes. C’est un hommage personnel au nom de la délégation espagnole pour tout le travail effectué au sein du Conseil de l’Europe. Vous incarnez véritablement, cher collègue, les valeurs de cette institution. Nous vous en remercions.

Cet instrument qu’est le partenariat pour la démocratie est très utile. Le Maroc aujourd’hui est déjà un modèle, au Maghreb, un exemple des réformes qui peuvent être menées à bien. Nous sommes un pays voisin avec des relations très étroites. Au quotidien nous pouvons constater dans quelle mesure le Maroc a su se moderniser, se démocratiser en maintenant une monarchie constitutionnelle. Nous renforçons au quotidien nos relations qui remontent à plusieurs siècles. C’est une satisfaction de se retrouver au Conseil de l’Europe. C’est un plaisir de travailler avec nos collègues parlementaires du Maroc pour partager ces valeurs.

Je veux insister sur deux aspects du rapport.

Ce processus est suivi par tous les pays du Conseil de l’Europe. Nos objectifs sont la prééminence du droit, la démocratie, le respect des droits de l’homme, les lois organiques, la mise en œuvre des droits de l’homme, la suppression de la peine de mort, la coopération avec la Commission de Venise pour améliorer le code électoral.

Concernant les conventions du Conseil de l’Europe, plusieurs ont déjà été signées par le Maroc, la convention pour la prévention de la torture, celle pour lutter contre la traite des êtres humains, celle pour lutter contre la violence domestique ou conjugale, très importante dans le cadre de l’acquis de notre Conseil.

Une coopération renforcée est prévue jusqu’en 2014 et au-delà. Nous accompagnons le processus que suit le Maroc.

M. ROUQUET (France) – Monsieur le président de la Chambre des représentants du Maroc, mes chers collègues, je salue le travail important de notre rapporteur. J’apprécie son dernier travail.

Le partenariat démocratique avec le Parlement du Maroc a été signé dans le contexte particulier du Printemps arabe et aujourd’hui, comme le rapporteur, je pense que nous pouvons nous féliciter de ces deux années de coopération.

Oui, mes chers collègues, alors que la situation démocratique de la région est chaque jour plus alarmante, le Maroc nous prouve que ses engagements pris en 2011 envers le Conseil de l’Europe n’étaient pas des mots. Le rapport rappelle les avancées de la Constitution de 2011. Pour ma part j’en retiendrai trois : le rééquilibrage du pouvoir, avec un élargissement des pouvoirs du parlement auquel nous sommes certainement tous très sensibles ; une affirmation des droits humains qui montre la volonté du Maroc à tendre vers un Etat de droit ; enfin – et cela me semble être un des éléments les plus importants du texte – l’article 110 qui constitutionnalise un principe essentiel de l’Etat de droit : l’application impartiale des lois et le respect des décisions de justice. Globalement, la Constitution a réussi à trouver un heureux équilibre entre l’affirmation d’une identité marocaine forte, la fidélité à l’Islam et la volonté de favoriser le dialogue entre les différentes composantes de la société.

Ce texte est exemplaire – le rapport rappelle qu’un article garantit les droits de l’opposition parlementaire – mais nous devons rester vigilants quant à sa mise en œuvre. La transition démocratique au Maroc sera jugée au regard de l’application effective de tous les droits et réformes ainsi affirmés. Si nous nous impliquons vigoureusement, j’en suis convaincu, le partenariat pour la démocratie avec le Maroc et son parlement sera un instrument du succès. J’ai eu l’occasion de me rendre au Maroc à plusieurs reprises, pour des réunions de commissions ou des séminaires. J’ai pu constater combien les échanges avec nos collègues marocains sur toutes les questions relatives au partenariat étaient constructifs. Je suis persuadé, comme notre rapporteur, que ces rencontres ont permis au partenariat de prendre une autre dimension. Et en matière de transition démocratique, beaucoup de membres le savent, la volonté politique des dirigeants est fondamentale !

Chers collègues, soyons clairs : le Maroc a encore des progrès à accomplir. L’article 110 prendra toute sa force dans les réformes à venir du pouvoir judiciaire, qui doivent être une priorité.

Chers collègues marocains, monsieur le président de la Chambre des représentants, nous sommes exigeants avec votre pays parce que nous croyons en une transition démocratique réussie au Maroc ! Je suis personnellement très confiant dans la capacité de votre pays à devenir un exemple pour toute la région.

M. YATIM (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Permettez-moi tout d’abord de féliciter M. Volontè pour son rapport professionnel, équilibré, rédigé minutieusement après un long travail de suivi sur le terrain et plusieurs déplacements. Je remercie le rapporteur pour ce qu’il a exprimé à notre délégation et pour avoir reconnu notre participation active au travail de cette Assemblée et de ses commissions.

Le rapport énumère les importantes avancées dans le long processus de réforme au Maroc mais aussi les carences et obstacles dont nous sommes très conscients. Nous confirmons comme membres de la délégation et au nom de tous les élus de la nation, notre engagement permanent pour militer pour combler les déficits, dépasser les carences, honorer nos engagements dans le cadre de ce partenariat.

Nous sommes conscients que le chemin des réformes est long. Leur concrétisation et leurs effets pour les citoyens n’apparaîtront pas en quelques mois, ni même en quelques années. C’est pourquoi nous fondons beaucoup d’espoir sur cet accord de partenariat, outil d’accompagnement et d’incitation. Nous voulons nous comparer à des modèles démocratiques avancés plutôt que d’être les meilleurs parmi les moins bons.

Dans le cadre du monitoring, la priorité doit être donnée aux grandes réformes constitutionnelles et juridiques, sans lesquelles des réformes plus poussées ne sont pas envisageables. Il faut par ailleurs prendre en compte le fait que le Maroc est historiquement et constitutionnellement musulman. Ses croyances et ses valeurs font partie intégrante de ce que l’on appelle, dans la terminologie des droits de l’homme, « l’ordre général », et doivent donc être prises en compte dans la définition de la notion de liberté individuelle. Il faut éviter de fragiliser la position des démocrates, qui fournissent aujourd’hui de grands efforts au Maroc pour s’approprier les principes universels de la démocratie et des droits de l’homme. Veillons à ne pas réveiller les démons de l’intégrisme.

Mme MAURY-PASQUIER (Suisse) – En 2011, lors du débat sur l’attribution du statut de partenaire pour la démocratie au Parlement marocain, j’ai été chargée d’élaborer un rapport sur la question spécifique du conflit du Sahara occidental. Ce travail est en cours d’élaboration ; je ne l’évoquerai donc pas.

Avec le soutien de nos collègues de la délégation marocaine auprès de l’Assemblée, j’ai effectué récemment une visite à Rabat et à Laayoune, qui m’a permis de recueillir des informations sur la situation actuelle du Maroc. Comme d’autres, je me félicite des progrès réalisés dans le pays, mais je voudrais évoquer aujourd’hui les préoccupations du rapporteur spécial des Nations Unies pour la torture, M. Méndez, d’Amnesty International et de Human Rights Watch. En effet, je demande à notre partenaire marocain d’aller plus vite et plus loin dans la lutte contre la torture et les traitements inhumains ou dégradants, dans l’amélioration des conditions de détention et dans le respect des libertés fondamentales, liberté de conscience, de religion et de croyance, liberté d’expression et liberté d’association. Je lui demande également instamment de faire tout ce qui est en son pouvoir pour faire advenir une réforme du pouvoir judiciaire aussi attendue que nécessaire.

Nous ne prétendons pas, par ces appels, donner des leçons à quiconque mais, au contraire, nous exprimons notre volonté d’aider le Maroc, sur les principes et sur les faits, sur le papier et dans la réalité, à atteindre le plus haut niveau possible en matière de démocratie, de droits de l’homme et d’Etat de droit.

Certes, nous avons du pain sur la planche ! Mais je me sens partie prenante, sans aucun esprit de supériorité, de cette entreprise. Je désire m’engager auprès de notre partenaire marocain, autant que possible avec le sourire - même si certaines décisions qui viennent d’être prises par l’Assemblée me donnent plutôt envie de pleurer – et main dans la main avec toutes les personnes de bonne volonté, soucieuses de promouvoir les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe.

M. BUGNON (Suisse) – Le Président Mignon a rappelé tout à l’heure ce qui a précédé à la mise en place du système de partenariat pour la démocratie. Je suis fier de cette initiative du Conseil de l’Europe, qui montre la volonté des Etats membres de ne pas rester repliés sur eux-mêmes mais de défendre la démocratie à l’extérieur de leurs frontières. Bienvenue au Maroc dans la grande famille de la démocratie !

Pour Voltaire, c’est la propension de l’homme à être injuste qui a rendu la démocratie nécessaire, et sa propension à être juste qui l’a rendu possible. Face à la dualité de l’être humain, la démocratie est donc le moyen de l’évolution des peuples.

Il y a quelques semaines, j’ai participé à un séminaire à Rabat sur l’évolution de la démocratie au Maroc. Nos échanges avec les parlementaires marocains se sont révélés particulièrement fructueux. Leur volonté d’avancer est bien réelle.

Comme le disait Churchill, la démocratie n’est pas un bon système, mais il n’en existe pas de meilleur. Elle garantit la liberté d’opinion, la liberté de religion, l’équité entre les citoyens, la primauté du droit et le respect des droits humains. Combien de temps faut-il pour l’instaurer durablement dans un pays ? Dix ans, un siècle ? En Suisse, c’est en 1291 que les premiers cantons se sont unis pour construire ensemble les instruments de la démocratie. C’est dire s’il faut du temps ! Mais notre exemple peut aujourd’hui faciliter la tâche à d’autres.

La démocratie n’efface ni l’histoire, ni les traditions d’un pays, et d’ailleurs il existe des monarchies constitutionnelles parmi les pays européens. Le Maroc et la Suisse ont un point commun, celui d’avoir fait accepter leur Constitution par le peuple. En Suisse, nous ne changeons pas une virgule de la Constitution sans en référer à lui. Elle n’appartient pas à la majorité politique au pouvoir mais à l’ensemble des citoyens. Le Maroc a pris beaucoup d’avance en acceptant d’emblée ce principe. Je lui souhaite une bonne continuation sur le chemin de la démocratie !

Mme WOLDSETH (Norvège)* – Je félicite les rapporteurs pour leur excellent travail. Il est très important que le Maroc, pays clé de l’Afrique du Nord, possède le statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Je suis ravie que le Maroc ait adopté une nouvelle Constitution qui a renforcé le rôle des institutions démocratiques, qu’il s’agisse du parlement ou des partis politiques. Nous sommes impressionnés.

Mais il est très important pour le Maroc de se faire assister pour réformer les tribunaux. En février dernier, 24 Sahraouis ont été condamnés devant un tribunal militaire. Dans d’autres pays démocratiques, les civils sont jugés par des tribunaux civils et obtiennent des procès équitables. C’est un des grands piliers du Conseil de l’Europe en termes de prééminence du droit. Ce principe devrait être l’étape suivante franchie par le Maroc sur le chemin de la démocratie.

Mais d’une manière générale, la situation des droits de l’homme concernant cette population du Sahara occidental est mauvaise. Les Sahraouis ne disposent pas de liberté d’expression, ils sont victimes d’arrestations arbitraires et les disparitions ne sont pas rares. Cela n’est acceptable pour aucun pays étroitement lié au Conseil de l’Europe.

On compte 165 000 réfugiés sahraouis en Algérie, totalement dépendants de l’aide humanitaire, et quatre enfants sur dix sont mal nourris. J’espère que le Gouvernement marocain trouvera une solution pour le Sahara occidental le plus rapidement possible. Jusqu’au jour où les élus européens auront le droit de visiter les régions occupées, nous suivrons cette situation au Maroc de très près.

Les droits de l’homme sont les mêmes pour tous, pour les hommes, les femmes, les enfants, qu’ils soient sahraouis ou marocains. Des gens souffrent, et ce n’est pas acceptable pour le Conseil de l’Europe.

Je suivrai les efforts réalisés à l’avenir par le Maroc pour améliorer la situation des Sahraouis au Sahara occidental.

M. BOUHRIZ (Maroc, partenaire pour la démocratie) – A l’aube de son indépendance, le Maroc a fait ses grands choix, notamment celui de l’ouverture du royaume vers toutes les composantes extérieures, en particulier vers l’Europe.

Parmi les fruits de cette ouverture : l’octroi du statut avancé par l’Union européenne et de statut de partenaire pour la démocratie auprès de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Notre ouverture vers l’Europe nous a poussés depuis cinq décennies à engager des réformes politiques réelles : la Constitution de 1962 mais aussi le pluralisme politique qui garantit et consolide la démocratie.

Cela étant dit, nos collègues européens sont en droit de se demander quel est l’intérêt de ce partenariat avec l’Assemblée parlementaire ? Il est multiple et j’en soulignerai quelques aspects.

Malgré ses efforts pour le monde arabe, l’Assemblé parlementaire demeure en arrière-plan par rapport aux actions de l’Union européenne. Cela est regrettable car l’Assemblée traite des sujets humanistes – la démocratie, les droits de l’homme, l’égalité. Or un pays avec une croissance de 15 % du PIB ne pourra pas vivre correctement sans ces valeurs humaines.

C’est pourquoi nous souhaitons que ce partenariat illustre le rôle de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Notre pays est stable et il peut être votre ambassadeur.

Par ailleurs, en participant aux travaux de cette Assemblée, le Maroc compte s’ouvrir davantage vers l’Europe, notamment vers l’Europe de l’Est et les pays scandinaves, ce qui permettra de consolider la démocratie.

Mme DURRIEU (France) – Je salue la délégation marocaine et le président de la Chambre des représentants.

Le Maroc est partenaire pour la démocratie. J’ai été le premier rapporteur en 2003 sur le rapprochement avec le Maroc. J’avais pris l’initiative de solliciter ce rapprochement. Dix ans plus tard, vous êtes là, et nous en sommes heureux. De nombreux témoignages de sympathie vous sont adressés. Vous progressez assez rapidement vers la démocratie. Votre monarchie est constitutionnelle, vous l’avez rappelé, elle avance vers un parlementarisme pour lequel, certes, vous devez encore trouver un équilibre.

Nous vous faisons confiance. Le Maroc a démontré ces dernières années qu’il savait agir et qu’il était peut-être un espace de référence. Vos travaux législatifs vont se poursuivre, car effectivement, il reste encore beaucoup à faire.

Puisque les amis peuvent parler librement, j’irai plus loin en évoquant le moratoire sur la peine de mort qui date de 1993. Certains tribunaux prononcent encore des condamnations à la peine capitale. Vous avez là un acte symbolique très fort à accomplir : abolir la peine de mort.

La stabilité du Maroc est une réalité essentielle. Je ne doute pas que vous apporterez très rapidement les réponses politiques et sociales à quelques profonds problèmes comme l’illettrisme ou le chômage des jeunes diplômés.

Le Maroc est engagé sur la bonne voie, et nous en sommes heureux.

J’évoquerai aussi la question du voisinage. Nous avons parlé du Maghreb qui est essentiel de par son positionnement géostratégique. La semaine prochaine je me rends au Maroc pour la Commission des affaires étrangères française pour laquelle j’ai rédigé un rapport. Le Maghreb est posé sur le continent africain qui est sans doute le continent du XXIe siècle. Sa position charnière sur l’axe Nord-Sud et sur la transversale méditerranéenne occidentale lui donne un rôle pivot à jouer.

L’union de ces trois Etats sera une force pour vous et pour nous. La raison devra dépasser toutes les stratégies. Je n’ai plus le temps d’évoquer le conflit oublié et gelé du Sahara occidental pour lequel il faut pourtant trouver une solution. L’intégration régionale est un vœu ; pour vous c’est une perspective d’avenir.

M. MOTA AMARAL (Portugal) – Je tiens à féliciter M. Luca Volontè pour son rapport sur l'évaluation du partenariat pour la démocratie avec le Parlement du Maroc. Je félicite également le Parlement du Maroc en la personne du président de la chambre des représentants qui s’est déplacé à Strasbourg pour intervenir dans ce débat.

Des félicitations très amicales et chaleureuses doivent être adressées à la délégation parlementaire marocaine auprès de notre Assemblée, qui est devenue un véritable partenaire dans les réunions plénières et même dans nos travaux en commission.

Le statut de partenaire pour la démocratie a été établi pour permettre le dialogue et la coopération avec les parlements des pays de notre voisinage méditerranéen dans un cadre institutionnel. Le Parlement du Maroc a été le premier à se présenter comme candidat à ce statut, lequel lui a été conféré avec une très forte conviction. C’était alors la phase euphorique du Printemps Arabe et le Royaume du Maroc donnait des signes très évidents de vouloir se situer dans la première ligne du changement pour la démocratie.

Une nouvelle Constitution a été élaborée et approuvée par un référendum populaire marqué par une participation convaincante des citoyens et des citoyennes ayant droit à la capacité électorale. Le parlement s’est engagé dans la tâche de faire approuver les lois organiques pour la mise en application des grands principes démocratiques inscrits dans la Constitution. Cependant, les parlementaires marocains sont en train d’impulser un très sérieux effort d’entraînement aux nouveaux mécanismes de contrôle démocratique du pouvoir exécutif, prévus dans cette même Constitution. J’ai eu moi-même le plaisir et l’honneur de participer à l’un des séminaires organisés à Rabat dans ce but.

Le Maroc a manifesté son attachement à la démocratie et aux valeurs de notre Organisation par son adhésion et son intense coopération avec le Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe, dont le siège est à Lisbonne. Les activités du Centre visent la diffusion de la démocratie et des droits humains dans les pays de la rive sud de la Méditerranée, et même encore plus au Sud, où un grand enjeu stratégique nous fait maintenant défi. Le Maroc s’est toujours engagé dans les initiatives du Centre, apportant sa fructueuse expérience.

La transition pour la démocratie est toujours un chemin difficile, qui exige du temps. Il y a surtout à opérer des changements de mentalité au sein des institutions et de la population, qui nécessitent de procéder avec exigence, et aussi avec prudence. Toutefois, le constat que nous faisons aujourd’hui sur l’évolution du Maroc est positif. Il est de nature à fortifier notre espoir et notre confiance dans le futur de la démocratie et des droits de l’homme dans ce pays voisin et ami.

M. IWIŃSKI (Pologne)* – Voici exactement deux ans notre Assemblée adoptait une résolution conférant le statut de partenaire pour la démocratie au Parlement du Maroc. Ce statut avait été mis en place il y a quatre ans dans l’objectif d’instaurer une coopération institutionnelle entre l’Assemblée parlementaire et les organes législatifs des pays voisins du Conseil de l’Europe. C’est un statut dont jouit aujourd’hui également le Conseil national palestinien, et bientôt, je l’espère, le Parlement du Kirghizistan et, plus tard, le Sénat du Kazakhstan.

J’ai eu l’occasion il y a de cela des années de me familiariser avec le Maroc, lors d’une visite à Marrakech. Cette année, je m’y suis rendu à deux reprises et je n’ai quasiment pas reconnu le pays. C’est un bilan très positif. Différentes réformes ont été engagées, déjà bien avant le partenariat, et je me souviens qu’à Rabat, on nous a dit que des réponses avaient été apportées aux espoirs des jeunes. En 2011, la nouvelle Constitution a été adoptée par référendum. Elle repose sur toute une série de principes fondamentaux. Au nouveau parlement, dix-huit partis politiques se côtoient, 17 % des parlementaires sont des femmes, même si elles sont moins nombreuses au gouvernement que précédemment.

La réforme n’est pas encore achevée : la peine de mort existe encore officiellement ; il reste encore beaucoup de progrès à faire en matière d’égalité, surtout dans les provinces ; les violations des droits de l’homme doivent être éliminées ; et le problème du Sahara occidental attend encore sa résolution. Permettez-moi toutefois de mettre en exergue la grande activité déployée par nos collègues marocains, tant durant les sessions plénières de l’Assemblée parlementaire qu’à l’occasion des réunions de commissions. Nos attentes ont vraiment trouvé réponse même si, ensemble, nous pouvons faire encore plus. Choukran, merci donc !

Ce partenariat pour la démocratie est, pour nos amis marocains, l’occasion d’évaluer la politique nationale au prisme de l’expérience européenne. Pour nous, il est la chance d’un dialogue amélioré avec les autres civilisations, en l’occurrence la civilisation arabe.

Je remercie le rapporteur, M. Volontè, pour son excellent rapport, le dernier qu’il présentera devant cette Assemblée, et je félicite également le président de la commission des migrations, M. Santini, pour la très intéressante conférence interparlementaire qu’il a organisée à Rabat sur les réponses aux défis de la migration Nord-Sud. J’adresse enfin mes remerciements à Pietro Marcenaro non seulement en tant que rapporteur sur le Proche-Orient, mais pour sa direction d’une réunion importante dans la capitale marocaine il y a de cela quelques semaines. Cette troïka italienne a apporté la cerise sur le gâteau. (Poursuivant en italien) Je vous adresse à tous les trois mes meilleurs vœux et espère vous retrouver un jour, ici, à Strasbourg.

M. BENSAID (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Nous sommes réunis aujourd’hui dans le cadre de l’évaluation du partenariat pour la démocratie accordé au Parlement marocain, et j’aimerais à cette occasion, si vous le permettez, aborder trois points.

Tout d’abord, concernant les remarques faites dans le rapport à propos de la peine de mort et afin de rassurer Mme Durrieu, je dirai que je suis membre de l’opposition et que nous menons le combat pour l’abolition de la peine de mort. Nous organisons notamment un débat au Parlement marocain qui sera le premier sur ce thème, en partenariat avec la Coalition mondiale contre la peine de mort et avec la participation de quasiment tous les groupes politiques présents au parlement. Certes, le combat n’est pas encore gagné, mais un réel débat est engagé entre les différentes forces politiques et, aujourd’hui, pour la première fois au Maroc, il existe un réseau de parlementaires contre la peine de mort comprenant plus de 200 sénateurs et députés.

Ensuite, pour ce qui est de l’égalité entre l’homme et la femme, je dois dire que deux visions s’opposent aujourd’hui au Maroc : une vision qui veut que la femme soit le complément de l’homme, et une vision égalitaire, qui veut que l’homme et la femme soient égaux. C’est bien sûr cette dernière conception que nous défendons en tant que parti progressiste. Nous espérons sincèrement qu’au-delà de la Résolution 1818 qui octroie au Maroc le statut de partenaire pour la démocratie, nous puissions mener ensemble, Européens et Marocains, des actions de terrain pour expliquer la nécessité d’avoir une vision égalitaire entre la femme et l’homme et libérer les femmes marocaines des pensées patriarcales et conservatrices, non seulement pour leur bien mais aussi pour le développement économique du pays.

Enfin, une autre des valeurs que nous partageons avec le Conseil de l’Europe est celle de l’universalité. L’humanité est une – diverse mais une. De ce fait, c’est une faute impardonnable que de transiger sur les principes fondamentaux à l’éternel prétexte que les autres ne seraient pas prêts à les adopter. Il n’y a pas de droits de l’homme pour l’Europe et d’autres pour l’Afrique ou le monde musulman. Aucun peuple sur terre n’est fait pour l’esclavage, la tyrannie, l’arbitraire, l’ignorance, l’obscurantisme ou l’asservissement de la femme. Chaque fois que l’on néglige cette vérité de base, on trahit l’humanité, on se trahit soi-même. Nous ne voulons nous trahir nous-mêmes, ni nous sentir trahis !

C’est dans cet esprit que s’inscrivent les réformes menées par mon pays, le royaume du Maroc, vingt ans avant le Printemps arabe.

M. SALLES (France) – Je voudrais saluer la présence du président de la Chambre des représentants du royaume du Maroc et en profiter pour remercier aussi notre collègue Luca Volontè pour cet excellent rapport.

Mes chers collègues, deux ans après le Printemps arabe, les inquiétudes qui avaient pu naître de l’arrivée au pouvoir de gouvernements islamistes se révèlent malheureusement justifiées : atteintes aux droits des femmes et à la liberté d’expression, multiplication des violences et des condamnations arbitraires et disproportionnées. Le Printemps arabe s’est transformé en un automne de la démocratie !

Dans ce contexte, la première évaluation du partenariat pour la démocratie avec le Parlement du Maroc apparaît comme un espoir pour tous les démocrates du monde arabe.

Plusieurs orateurs ont rappelé les avancées de la Constitution de 2011. Il est clair que les constituants marocains ont créé un texte qui investit le champ du droit constitutionnel contemporain et provoque une réelle mutation politique. La comparaison avec la Constitution égyptienne et le projet de constitution tunisienne est éloquente, ne serait-ce que sur le droit des femmes. Alors qu’en Egypte et en Tunisie, l’égalité entre les hommes et les femmes n’apparaît pas dans la Loi fondamentale, la nouvelle Constitution marocaine, non seulement proclame l’égalité, mais prévoit la création d’une autorité pour la parité et la lutte contre la discrimination !

Nous devons également nous réjouir des projets de loi relatifs à l’adhésion du Maroc aux protocoles facultatifs de certains instruments internationaux, dont la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Ce protocole facultatif permet d’enregistrer les plaintes des femmes qui ont épuisé tous les recours nationaux pour faire prévaloir leurs droits. Son adoption rapide par le parlement sera une nouvelle avancée vers l’égalité sans réserves réclamée par les femmes du monde arabe.

Dans ses Pensées pour la liberté, Tahar Ben Jelloun affirmait : « La liberté n’est rien si elle ne respire pas dans le corps et l’esprit de l’homme, de tous les hommes, sans distinction ethnique, religieuse ou géographique. » Quinze ans après, le projet de statut de la langue amazigh et l’affirmation d’une identité marocaine plurielle dans le préambule de la Constitution font écho à la voix du lauréat marocain du prix Goncourt.

Bien sûr, le Maroc n’est pas encore une démocratie ; bien sûr, des progrès doivent être faits pour que l’attachement aux droits humains affirmés dans les textes se traduise concrètement pour toutes les Marocaines et tous les Marocains, mais cette première étape montre le parcours accompli – j’en suis persuadé – grâce à ce nouvel outil de promotion de la démocratie et de l’Etat de droit que constitue le partenariat pour la démocratie. Réjouissons-nous donc de ce succès et faisons en sorte que notre coopération avec le Maroc serve d’exemple à ceux qui se sont écartés des valeurs et des idéaux défendus par les manifestants des révolutions arabes.

M. RECORDON (Suisse) – C’est avec beaucoup de satisfaction que j’ai pris connaissance des nombreux progrès enregistrés par les droits humains au Maroc. A ce titre, je m’associe volontiers au flot d’éloges et d’encouragements que j’ai entendus. Toutefois, et même si je suis un grand ami du Maroc – comme beaucoup des préopinants –, je voudrais, suivant en cela la formule de M. Villumsen, selon laquelle il faut savoir écouter ses amis quand ils disent des choses un peu moins agréables, soulever le problème de la violation des droits de l’homme dans la région sahraouie.

Certes, cette question sera reprise par notre Assemblée, mais, pour que le tableau de la situation soit complet, il faut malheureusement dire que ce sujet jette une ombre assez grande sur le panorama très positif que nous venons de brosser. En effet, dans ce domaine, je crains que nos amis marocains ne tombent dans les travers qui sont souvent les nôtres – on a pu le constater pas plus tard qu’au début de cet après-midi. En effet, lorsque les intérêts nationaux sont vraiment en jeu, ils passent avant le strict respect des droits de l’homme.

Je ne prendrai qu’un exemple : lors de la préparation d’une conférence organisée à Fès, à laquelle il était question que je me rende ainsi qu’un de mes collègues, parlementaire suisse, il n’a pas été possible de faire entendre aux organisateurs que l’on puisse parler d’autre chose que des violations des droits de l’homme du côté du Front Polisario. Rien, en revanche, pour celles qui pouvaient être commises de l’autre côté, ce qui marque l’absence du plus élémentaire sens de l’objectivité. De même, je n’ai jamais été en mesure de trouver un défenseur des droits de l’homme au Maroc – que ce soit auprès de la Ligue des droits de l’homme ou des grands écrivains – qui soit un tant soit peu critique sur la question sahraouie. Je suis donc un peu inquiet des développements dans ce domaine. Mais enfin, je m’en remettrai à ce qui ressortira du rapport spécial que nous consacrerons à cette question.

Mme QUINTANILLA (Espagne)* – Pour commencer, je tiens à féliciter le président du Groupe du Parti populaire européen, M. Volontè, pour son engagement et pour le travail qu’il a fourni. J’ai passé beaucoup de temps à travailler avec lui ; je suis donc fondée à dire qu’il est très tenace lorsqu’il s’agit de défendre les droits humains, la démocratie et la liberté.

Monsieur Volontè, je suis certaine que vous allez manquer à nos collègues du Groupe du PPE, mais aussi à tous ceux des autres groupes.

Je tiens également à remercier le président de la Chambre des représentants du Maroc, qui est parmi nous aujourd’hui, pour son engagement en faveur de la démocratie et de la liberté et pour ce débat si important qui est mené au Parlement marocain, dont l’objectif est de construire la démocratie au quotidien.

Il faut rappeler que la presse internationale, y compris en Espagne, a parlé, le 2 mars 2011, du fait que M. Volontè tenait une réunion avec le président du Parlement marocain pour mettre en place le partenariat pour la démocratie. De fait, le Parlement du Maroc est le premier d’Afrique du Nord à obtenir ce statut créé par le Conseil de l’Europe en 2009.

Le Maroc est un exemple pour la démocratie au Maghreb. Il a acquis cette place en mettant en œuvre une Constitution qui, pour la première fois dans l’histoire du pays, reconnaissait la démocratie, la liberté et l’égalité – d’où l’importance du rapport d’aujourd’hui.

Il est important que vous sachiez – je m’adresse au président du Parlement marocain et à l’ensemble de la délégation parlementaire qui l’accompagne – que tous les parlementaires du Conseil de l’Europe vous accueillent à bras ouverts. Vous êtes un pays voisin avec lequel nous avons toujours entretenu de bonnes relations. Nous sommes unis par des liens profonds sur le plan culturel, ainsi que par des liens amicaux.

Nous voulons également tirer profit du fait que l’égalité entre hommes et femmes a été récemment proclamée dans votre pays : il faut que la violence conjugale disparaisse de la vie des femmes marocaines. Il vous revient, dans l’histoire des pays arabes, d’écrire le mot « démocratie » avec une majuscule. Nous sommes convaincus que vous y parviendrez. Nous l’avons vu lors du congrès du parti qui est au gouvernement : la démocratie et la liberté sont déjà bien ancrées dans les esprits des Marocains. Il faut donc avancer. Nous sommes convaincus que vous pouvez faire de votre pays un exemple de démocratie pour le Maghreb et tous les pays arabes. C’est important pour nous comme pour vous. Nous croyons en vous.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – M. Volontè a dit, à juste titre, que le rapport sur le partenariat ne consiste pas à pointer du doigt ; ce n’est pas la leçon du maître à son élève. Il s’agit d’une tentative pour mieux comprendre les dynamiques culturelles traditionnelles et historiques d’un pays – en l’occurrence l’effort d’une réforme progressive de la Constitution accomplie par le Maroc pour plus d’Etat de droit et de démocratie.

Les structures du pays, héritées de son histoire, la réalité d’une démographie marquée par le poids de la jeunesse, des aspirations socio-économiques : tout cela, mis bout à bout, explique que l’expérience du Maroc en matière de réforme et de démocratisation ne peut pas entrer dans le moule des démocraties européennes, quand bien même nous partagerions les mêmes valeurs au travers du partenariat.

Nous pouvons bien sûr apprendre beaucoup de l’histoire de l’Europe et de l’évolution de sa démocratie, mais nous, en Palestine comme dans d’autres pays arabes et musulmans, regardons le Maroc comme un exemple de réforme, notamment pour la façon dont elle se manifeste dans sa Constitution. Les libertés font l’objet d’une plus grande promotion ; c’est un défi pour le Maroc, mais aussi, et au-delà, pour tous vos voisins du sud de la Méditerranée. C’est là un extraordinaire défi que l’on pourra relever grâce au partenariat et à des mesures d’accompagnement, avec des échanges francs et constructifs ; grâce à ces dispositifs, vous aiderez vos voisins du Sud, et surtout les partenaires pour la démocratie, à atteindre leurs objectifs, lesquels correspondent aux valeurs du Conseil de l’Europe et aux valeurs universelles. Le chemin ne sera pas aisé ; c’est pour cela que le partenariat est un élément essentiel pour la promotion d’un avenir susceptible d’offrir de l’espoir, avec un développement socio-économique plus soutenu, dans l’intérêt des Marocains comme de tous les autres citoyens du sud de la Méditerranée.

Le partenariat pour la démocratie est essentiel, il est nécessaire pour préparer cet avenir. Il y a bien sûr des demandes qui viennent des partenaires du Sud, mais il convient de ne jamais oublier que ce partenariat pose aussi des exigences au Conseil de l’Europe et aux Etats membres qui le composent. Et c'est cette relation réciproque qu’il faudra faire vivre. Je félicite M. Volontè pour ce rapport qui renforce ces effets réciproques dans un esprit constructif.

M. FRÉCON (France) – Associer plus étroitement le Parlement marocain aux travaux de notre Assemblée au travers du partenariat pour la démocratie vient couronner une décennie d’efforts en faveur de la liberté et de l’Etat de droit de la part des autorités marocaines. Aboutissement de cette logique vertueuse, la réforme constitutionnelle de 2011 a permis de clarifier l’organisation du pouvoir politique en renforçant notamment le rôle de la Chambre des représentants et de la Chambre des conseillers. Le gouvernement est désormais responsable devant le parlement, qui dispose d’un pouvoir d’initiative en matière législative. Cette libéralisation politique a été accompagnée d’une ouverture économique indéniable et d’une volonté notable d’améliorer la condition sociale. Les autorités marocaines ont parfaitement intégré l’idée que la démocratie ne pouvait prendre racine si les conditions socio-économiques n’étaient pas réunies pour favoriser l’émergence de formations modérées et tournées vers l’avenir. C’est ce double chantier qu’il convient de saluer aujourd’hui. Tant celui de la décentralisation politique, je pense ainsi au projet de « régionalisation avancée », que celui du développement. Saluons ainsi le programme « Villes sans bidonvilles » ou le plan d’urgence en faveur de l’éducation.

Il n’est pas anodin, dans ce contexte, que le Printemps arabe n’ait pas bouleversé le pays tant il semble que les autorités avaient en large partie anticipé ce mouvement des peuples. Je constate également que les difficultés rencontrées par le mouvement démocratique dans les pays voisins semblent évitées au Maroc. Il n’y a pas dans ce pays, ni d’automne de la démocratie, comme l’a dit l’un de mes collègues tout à l’heure, ni d’hiver de la démocratie. Le partenariat pour la démocratie salue donc une évolution favorable. Il doit aussi être un encouragement à la poursuite des réformes. Le tableau que je viens de tracer rapidement n’est pas pour autant idyllique. Le Maroc doit encore faire face à de nombreux défis.

D’abord, plus de 28 % des Marocains vivent encore en dessous du seuil de pauvreté selon une étude du programme des Nations Unies pour le développement. Ensuite, le taux d’analphabétisme est lui l’un des plus forts du monde arabe. Le pays n’est qu’au 114e rang mondial en matière d’alphabétisation. Puis, je relève qu’un certain nombre de valeurs restent difficilement conciliables avec les principes démocratiques. L’égalité homme-femme doit encore véritablement s’incarner au sein de la société marocaine. Enfin, je ne la développerai pas, mais je voulais citer la situation du Sahara occidental.

Notre Assemblée devra donc être vigilante sur ces questions. Je ne doute pas, en tout état de cause, que le partenariat pour la démocratie permettra une nette accélération des réformes restant à mener au Maroc.

Parce que je suis Français et parce que nous avons, peuple marocain et peuple français, au cours de siècles précédents partagé des moments d’histoire, nous avons établi entre nous une confiance, qui entraîne une amitié, qui entraîne le respect, qui entraîne l’amour ; nous nous aimons.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – M. Frécon parlait des liens entre la France et le Maroc, alors imaginez les relations entre les Canaries et le Maroc. Vous ne savez pas ce que c’est que de respirer le simoun, ce vent du désert ; nous autres, nous partageons cela avec les Marocains.

Votre Constitution est une constitution du XXe et du XXIe siècle. A quinze occasions on parle de démocratie participative, de bonne gouvernance, c’est une Constitution qui a pris des éléments dans un peu toutes les constitutions, qui apprend de tous sans copier personne. Elle est adaptée à votre histoire, à la culture du peuple marocain.

Je ne vais pas entrer dans un débat avec les collègues britanniques pour savoir si cette Constitution correspond à la monarchie britannique ou à la monarchie espagnole, ce n’est pas cela qui est important. Votre Constitution est adaptée à votre monarchie, à l’avenir du Maroc. C’est une Constitution qui a une très bonne articulation juridique, elle établit à l’article 14 le droit à l’initiative populaire, ce qui est une véritable occasion pour votre population de participer à la démocratie.

Vous avez dit beaucoup de choses, Monsieur le président, mais je m’adresse ici à mes collègues.

Au Maroc, il y a, d’un côté, les personnes qui veulent faire des réformes, et de l’autre, l’intégrisme qui n’est pas compatible avec une société marocaine démocratique.

Certains pensent que nous sommes mieux que d’autres, mais il faut tenir compte de la réalité de chaque pays, de chaque culture, plutôt que de croire qu’on est meilleur. Il ne faut pas voir les choses en noir ou en blanc.

Il y a eu ce séminaire auquel vous avez participé, Monsieur le Président, ainsi que le président du Sénat. Nous autres parlementaires, nous ne pouvons pas toujours être présents, nous avons des ordres du jour très chargés. Il faudrait donc essayer de mieux coordonner nos travaux dans le cadre de ces séminaires. Avoir quatre rapporteurs européens et quatre rapporteurs marocains, permettrait, par exemple, à chacun de tirer les enseignements mutuels de l’expérience de l’autre.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Díaz Tejera, il y a un peu de Pavarotti en vous quand vous vous exprimez comme vous venez de le faire !

Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer, dans les 24 heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle la réplique des commissions.

M. XUCLÀ (Espagne), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques* – Je crois que nous devons revenir de façon plus détaillée sur certains points et parler des mesures pratiques pour la mise en œuvre de votre Constitution. Certains aspects des droits de l’homme qui se trouvent à l’amendement 12 ou au sous-amendement 1 seront certainement adoptés.

Qu’est-ce que le Conseil de l'Europe ? C’est une partie du monde où la peine de mort n’existe pas. Je tiens à ce que vous en teniez compte.

Au début, nous avons travaillé avec une collègue que j’apprécie beaucoup. Par ailleurs, deux membres éminents du Conseil de l'Europe nous quitteront après cette partie de session : le rapporteur, M. Volontè, et le président de la commission des questions politiques, M. Marcenaro. Vous êtes, chers collègues, des Européens et des démocrates convaincus. Pour moi, c’est un éloge. Dans la diversité, nous sommes unis par des liens d’amitié profonds et je suis certain que vous resterez des amis du Conseil de l'Europe et que vous continuerez à nous illuminer comme la lumière de Marrakech.

M. VOLONTÈ (Italie), rapporteur*– Je remercie tous ceux qui sont intervenus et qui ont enrichi notre discussion de leurs commentaires et suggestions sur le travail qui reste à réaliser et qui sera marqué par l’amitié et la coopération.

Je remercie tous ceux qui ont participé à la réunion de la commission des questions politiques au sein de laquelle nous avons trouvé des solutions permettant d’améliorer ce travail, fait d’ombre et de lumière, que nous avons réalisé ensemble.

En tant que représentants du Conseil de l'Europe, nous sommes conscients de notre responsabilité et nous sommes partenaires de cette responsabilité que nous partageons.

Je remercie le président de la Chambre des représentants du Maroc, tous nos collègues marocains qui ont participé à l’ensemble des réunions, qui ont contribué aux travaux de notre commission, ce qui prouve bien que nous fonctionnons sur un pied d’égalité.

Nous avons abordé cette nouvelle expérience ensemble. Elle nous a permis à tous d’apprendre et de nous enrichir, de partager notre passion pour la démocratie, les droits de l’homme et l’Etat de droit.

Je remercie également Pavel Chevtchenko et tous les autres membres du secrétariat qui m’ont apporté leur aide dans mon activité.

C’est un nouvel article du Règlement qui a pris corps et qui s’est révélé passionnant dans les faits. Nous avons effectué ensemble un travail efficace. Je ne vous dis pas adieu, mais au revoir.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, cher ami Luca Volontè.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Je remercie le président de la Chambre des représentants qui est un ami cher.

Je le dis en toute sincérité, j’envie les pays qui ont de jeunes dirigeants de cette qualité.

Je veux, par ailleurs, rendre hommage à la délégation parlementaire marocaine, qui est un exemple de sérieux, notamment Mohamed Yatim, Mohammed Mehdi Bensaid, Ali Salem Chagaf, Hassan Bouhriz et ma chère amie Mme El Ouafi que j’ai rencontrée autrefois à Turin. Femme immigrée, elle essayait de faire son travail, de soutenir sa famille. Elle est par la suite devenue une grande personnalité. Voyez, la politique est un moyen d’agir pour ceux qui ne peuvent pas participer facilement au gouvernement de leur pays. Ce n’est possible qu’à partir du moment où l’on travaille de manière collective.

Mon engagement politique a duré toute ma vie. Il est réjouissant pour moi de voir des dirigeants si jeunes, car l’avenir ce n’est pas moi, ce sont les autres. Je tiens à vous remercier.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur le président Marcenaro.

La discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution, sur lequel 14 amendements et 3 sous-amendements ont été déposés.

Le président de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement pour les amendements 11, 13, 5, 1, 8, 9, 14 et 10 sur le projet de résolution qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission – Effectivement.

LE PRÉSIDENT - Il n’y a pas d’objection. Ils sont donc considérés comme adoptés définitivement.

J’en donne lecture :

L’amendement 11, déposé par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, tend, dans le projet de résolution, à la fin de paragraphe 6, à insérer la phrase suivante :

« Cependant, l’Assemblée déplore le fait, qu’à ce jour, seules quelques lois organiques aient été adoptées pour mettre en œuvre certaines dispositions constitutionnelles ».

L’amendement 13, déposé par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 8.2, deuxième phrase, après les mots « à une analyse approfondie de l’organisation de ces élections », à insérer les mots suivants : « tenant compte de la nécessité de remédier aux irrégularités signalées, ».

L’amendement 5, déposé par Mmes Strik, Korun, Acketoft, M. Cederbratt, Mmes Wurm, Groth, M. Hunko, Mme Werner, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8.7, à insérer le paragraphe suivant : « appelle le parlement à protéger les droits de l'homme des réfugiés et des autres migrants en adoptant des lois sur l'asile et sur les droits sociaux des migrants, et en surveillant leur mise en œuvre »

L’amendement 1, déposé par MM. Marcenaro, von Sydow, Iwiński, Popescu, Lord Tomlinson, Mme Maury Pasquier, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée rappelle le paragraphe 11 de la Résolution 1818 et souligne l’urgence, pour toutes les parties concernées, ainsi que pour la communauté internationale, de poursuivre les efforts visant à trouver une solution juste, durable et mutuellement acceptable, dans le cadre des Nations Unies, au problème du Sahara occidental. »

L’amendement 8, déposé par la commission sur l'égalité et la non-discrimination, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, à insérer le paragraphe suivant : « Réitérant que les recommandations énoncées au paragraphe 8 de sa Résolution 1818 (2011) sont essentielles au renforcement de la démocratie, de l'Etat de droit et au respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales au Maroc, l'Assemblée appelle les autorités marocaines à redoubler d'efforts en vue de réaliser des progrès décisifs dans ces domaines. Elle les invite à s'appuyer sur l'expertise du Conseil de l'Europe pour faciliter ce processus, que ce soit d'un point de vue technique, par l'échange de bonnes pratiques et/ou par le biais du soutien parlementaire ».

L’amendement 9, déposé par la commission sur l'égalité et la non-discrimination, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8, insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée est très préoccupée par le fait que le Code pénal sanctionne les relations sexuelles consensuelles entre personnes du même sexe par des peines allant de six mois à trois ans d’emprisonnement. Elle note que des personnes ont été récemment emprisonnées en vertu de cette législation. L’Assemblée appelle le Parlement marocain à initier l’abrogation de cette législation dès que possible. »

L’amendement 14, déposé par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, à remplacer les mots : « réaliser son but principal » par les mots suivants : « l’avancement des réformes ».

L’amendement 10, déposé par la commission sur l'égalité et la non-discrimination, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 14, après les mots « conformément aux engagements politiques pris dans le cadre du partenariat », ajouter les mots suivants : « et aux recommandations de la Résolution 1818 (2011) de l'Assemblée ».

Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention sur chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement 3, déposé par Mmes Strik, Korun, Acketoft, M. Cederbratt, Mmes Wurm, Groth, M. Hunko, Mme Werner, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 7, à insérer le paragraphe suivant : « L'Assemblée note que le Maroc est devenu un pays de destination pour les migrants, ce qui rend nécessaire une procédure d'asile adéquate, conforme à la Convention européenne des droits de l'homme, et une politique d'intégration répondant aux normes en matière de droits de l'homme, y compris la non-discrimination, le droit au regroupement familial et les droits sociaux ».

Mme STRIK (Pays-Bas)*– Le Maroc est confronté à un nombre élevé de demandeurs d’asile et de migrants. L’amendement vise à reconnaître cette évolution. Il faut donc instaurer une procédure d’asile adéquate et conforme aux normes.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement 1, déposé par MM. Volontè, Marcenaro, Popescu, Agramunt, Lord Tomlinson, tend, dans l’amendement 3, à supprimer les mots « conforme à la Convention européenne des droits de l’homme ».

M. VOLONTÈ (Italie), rapporteur*– Le Maroc n’étant pas partie à la Convention des droits de l’homme qui implique la Cour et d’autres mécanismes, nous demandons à Mme Strik de bien vouloir supprimer les termes : « conforme à la Convention européenne des droits de l’homme ». Il convient de parler des normes en matière de droits de l’homme.

Mme STRIK (Pays-Bas)*– J’accepte le sous-amendement.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Avis favorable de la commission.

Le sous-amendement est adopté.

L’amendement 3, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 12, déposé par la commission des questions juridiques et des droits de l'homme, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 7, à insérer le paragraphe suivant : « Cependant, l’Assemblée est préoccupée par la situation des droits de l’homme au Maroc, s’agissant en particulier du recours à la torture et à des traitements inhumains ou dégradants, des mauvaises conditions de détention, des violations des libertés de religion et d’expression, de l’indépendance des médias et des libertés d’association et de réunion pacifique. Elle souligne de ce fait l’importance pour le Maroc de prendre toutes les mesures nécessaires pour répondre aux points spécifiques mentionnés au paragraphe 8 de la Résolution 1818 (2011) afin de renforcer la démocratie et le respect des droits de l’homme. »

M. XUCLÀ (Espagne), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques* – Le Maroc doit porter une attention particulière au respect des droits de l'homme. Je tiens à souligner l’importance de cet amendement pour travailler dans cette direction.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement 1, déposé par MM. Volontè, Marcenaro, Popescu, Agramunt, Lord Tomlinson, tend, dans l’amendement 12, après le mot « recours », à insérer le mot suivant : « présumé ».

M. VOLONTÈ (Italie), rapporteur * – Ce sous-amendement concerne toutes les violations, surtout la torture.

M. XUCLÀ (Espagne), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques* – Je suis favorable au sous-amendement.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – L’avis de la commission saisie au fond est favorable.

Le sous-amendement 1 est adopté.

L’amendement 12, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT – J’ai cru comprendre, Monsieur Mogens Jensen, que l’amendement 2 est retiré.

M. Mogens JENSEN (Danemark) * – Je le confirme, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 2 est retiré.

L’amendement 4, déposé par Mmes Strik, Korun, Acketoft, M. Cederbratt, Mmes Wurm, Groth, M. Hunko, Mme Werner, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 8.7, à insérer le paragraphe suivant : « appelle le Parlement à assurer le droit d'association et la liberté d'expression des ONG qui défendent l'amélioration des normes en matière de droits de l'homme au Maroc. »

Mme STRIK (Pays-Bas) * – Comme je l’ai dit dans mon intervention, un processus démocratique exige une société civile active. Or, durant notre visite, nous avons constaté les obstacles que rencontrent les ONG. Lorsqu’elles veulent prendre des initiatives, elles sont obligées de demander des permissions, en particulier lors de leur création.

C’est pourquoi j’appelle le Parlement marocain à prendre les mesures nécessaires pour renforcer les ONG et la société civile en supprimant ces obstacles à leurs activités.

LE PRÉSIDENT – Le sous-amendement 1, déposé par MM. Volontè, Marcenaro, Popescu, Agramunt, Lord Tomlinson, tend, dans l’amendement 4, à remplacer les mots « des ONG qui défendent l’amélioration des normes en matière de droits de l’homme au Maroc » par les mots suivants : « des organisations de la société civile ».

M. VOLONTÈ (Italie), rapporteur * – Ce sous-amendement vise à étendre la portée de l’amendement en augmentant le spectre des garanties.

Mme STRIK (Pays-Bas)* – Je suis favorable au sous-amendement.

M. MARCENARO (Italie), président de la commission* – Avis favorable de la commission.

Le sous-amendement 1 est adopté.

L’amendement 4, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT – J’ai cru comprendre, Madame Strik, que les amendements 6 et 7 étaient retirés.

Mme STRIK (Pays-Bas) * – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – Les amendements 6 et 7 sont retirés.

Avant de passer au vote sur le projet de résolution, je tiens à dire au président Ghellab combien j’ai été heureux de pouvoir présider moi-même cette séance, qui est très importante tant pour vous, Monsieur le président, que pour l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc.13230, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (55 voix pour, 0 voix contre, 1 abstention).

LE PRÉSIDENT – J’adresse mes félicitations au président et au rapporteur de la commission saisie au fond, ainsi qu’aux rapporteurs des commissions saisies pour avis.

7. Élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie

(Résultats du scrutin)

LE PRÉSIDENT – Voici les résultats du premier tour de scrutin pour l'élection du juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande :

Nombre de votants : 170

Bulletins blancs ou nuls : 6

Suffrages exprimés : 164

Majorité absolue : 83

Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- M. Guðmundur Alfreõsson : 41 voix

- Mme Oddný Mjöll Arnardóttir : 27 voix

- M. Róbert Ragnar Spanó : 96 voix

M. Spanó ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, je le proclame juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre de l’Islande ; son mandat de 9 ans commencera à compter du 1er novembre 2013.

Voici les résultats du premier tour de scrutin pour l'élection du juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Lituanie :

Nombre de votants : 170

Bulletins blancs ou nuls : 9

Suffrages exprimés : 161

Majorité absolue : 81

Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- Mme Lyra Jakulevičienė : 41 voix

- M. Egidijus Kūris : 106 voix

- M. Ignas Vėgėlė : 14 voix

M Kūris ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, je le proclame élu juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre de la Lituanie ; son mandat de 9 ans commencera à compter du 1er novembre 2013

8. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu demain, à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 20 h 10.

S O M M A I R E

1. Modifications dans la composition des commissions

2. Election de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie (suite)

3. Demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie

Présentation par Mme Lundgren du rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi) (Doc.13229)

Orateurs : MM. Chope, Hunko, Volontè, von Sydow, Mmes Reps, Bakoyannis, MM. Recordon, Braun, Mme von Cramon-Taubadel, M. Hancock, Sir Edward Leigh, M. Gulyás, Mmes Bourzai, Csöbör, MM. Biedroń, Rochebloine,

4. Prolongation du délai de dépôt des amendements pour le débat selon la procédure d’urgence

5. Demande d’ouverture d’une procédure de suivi pour la Hongrie (suite)

Orateurs : Mme Schuster, MM. Neill, Mogens Jensen, Allavena, Villumsen, Gaudi Nagy, Mme Gündeş Bakir, MM. Beneyto, Szabó, Michael Aastrup Jensen, J. Nagy

Réponses de Mme la rapporteure et de M. le président de la commission de suivi

Vote sur un projet de résolution amendé.

6. L’évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement du Maroc

Présentation par M. Volontè du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc.13230)

Présentation par M. Xuclà du rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, saisie pour avis (Doc.13244)

Présentation par Mme Gafarova du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, saisie pour avis (Doc.13245)

Orateurs : MM. Villumsen, Ghiletchi, Mme Strik, MM. Hancock, Liddell-Grainger

Intervention de M. Ghellab, président de la Chambre des représentants du Maroc

Orateurs : MM. Beneyto, Rouquet, Yatim, Mme Maury Pasquier, M. Bugnon, Mme Woldseth, M. Bouhriz, Mme Durrieu, MM. Mota Amaral, Iwiński, Bensaid, Salles, Recordon, Mme Quintanilla, MM. Sabella, Frécon, Díaz Tejera

Réponses de MM. Xucla, Volontè, Marcenaro, président de la commission des questions politiques

Vote sur un projet de résolution amendé

7. Élection des juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie (résultats du scrutin)

8. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Arben AHMETAJ*

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA

Karin ANDERSEN

Lord Donald ANDERSON/Michael Connarty

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB/Tuur Elzinga

Volodymyr ARIEV*

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Daniel BACQUELAINE*

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE*

Gérard BAPT/Christian Bataille

Gerard BARCIA DUEDRA

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI/Tinatin Khidasheli

Deborah BERGAMINI

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY/ Sir Edward Leigh

Ľuboš BLAHA*

Delia BLANCO*

Jean-Marie BOCKEL*

Eric BOCQUET/ Mme Bernadette Bourzai

Mladen BOJANIĆ/Snežana Jonica

Olga BORZOVA

Mladen BOSIC/Ismeta Dervoz

António BRAGA

Anne BRASSEUR

Márton BRAUN

Federico BRICOLO*

Ankie BROEKERS-KNOL*

Gerold BÜCHEL

Patrizia BUGNANO/Giuliana Carlino

André BUGNON

Natalia BURYKINA/Olga Kazakova

Sylvia CANEL

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT

Otto CHALOUPKA

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI/Paolo Corsini

Tudor-Alexandru CHIUARIU*

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH/Grzegorz Czelej

James CLAPPISON/David Davies

Deirdre CLUNE

Agustín CONDE

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES

Katalin CSÖBÖR

Joseph DEBONO GRECH

Armand De DECKER

Roel DESEYN

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN

Karl DONABAUER/Sonja Ablinger

Ioannis DRAGASAKIS/ Maria Giannakaki

Damian DRĂGHICI

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA*

Baroness Diana ECCLES

Tülin ERKAL KARA

Gianni FARINA*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA*

Daniela FILIPIOVÁ/Miroslav Krejča

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO*

Hans FRANKEN*

Jean-Claude FRÉCON

Béatrice FRESKO-ROLFO

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC/József Nagy

Sir Roger GALE/Robert Neill

Karl GARÐARSON*

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Paolo GIARETTA*

Michael GLOS*

Pavol GOGA*

Jarosław GÓRCZYŃSKI/Iwona Guzowska

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM/Ingjerd Schou

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA

Attila GRUBER

Gergely GULYÁS

Pelin GÜNDEŞ BAKIR

Antonio GUTIÉRREZ/ Carmen Quintanilla

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON/Riitta Myller

Carina HÄGG/Lennart Axelsson

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI

Mike HANCOCK

Margus HANSON/Indrek Saar

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI/Anette Trettebergstuen

Norbert HAUPERT

Alfred HEER

Martin HENRIKSEN

Andres HERKEL

Adam HOFMAN

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER*

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV*

Shpëtim IDRIZI*

Vladimir ILIĆ/Vesna Marjanović

Florin IORDACHE/Viorel Riceard Badea

Igor IVANOVSKI

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/Rudy Salles

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI*

Michael Aastrup JENSEN

Mogens JENSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Katarina Rakić

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI

Marietta KARAMANLI/Jean-Pierre Michel

Ulrika KARLSSON/Kerstin Lundgren

Burhan KAYATÜRK

Jan KAŹMIERCZAK/Marek Krząkała

Serhii KIVALOV

Bogdan KLICH/Marek Borowski

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ*

Igor KOLMAN

Attila KORODI

Alev KORUN

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Dmitry KRYVITSKY

Václav KUBATA*

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV*

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT

François LONCLE*

Jean-Louis LORRAIN/Bernard Fournier

George LOUKAIDES

Younal LOUTFI*

Yuliya L'OVOCHKINA

Saša MAGAZINOVIĆ*

Philippe MAHOUX

Gennaro MALGIERI*

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI

Epameinondas MARIAS*

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA/Sirkka-Liisa Anttila

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA

Sir Alan MEALE/Linda Riordan

Ermira MEHMETI DEVAJA/Aleksandar Spasenovski

Ivan MELNIKOV/Vassiliy Likhachev

Nursuna MEMECAN*

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Frédéric Reiss

Djordje MILIĆEVIĆ/Stefana Miladinović

Federica MOGHERINI REBESANI/Renato Farina

Andrey MOLCHANOV*

Jerzy MONTAG/Viola Von Cramon-Taubadel

Rubén MORENO PALANQUES/Ángel Pintado

Patrick MORIAU/Fatiha Saïdi

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Lydia MUTSCH/Fernand Boden

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Marian NEACŞU*

Aleksandar NENKOV*

Pasquale NESSA

Fritz NEUGEBAUER*

Baroness Emma NICHOLSON/Paul Flynn

Brynjar NÍELSSON*

Elena NIKOLAEVA/Anvar Makhmutov

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL/Elżbieta Radziszewska

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS/Olena Kondratiuk

Sandra OSBORNE

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Lajla PERNASKA*

Johannes PFLUG*

Danny PIETERS/Sabine Vermeulen

Foteini PIPILI/Eleni Rapti

Ivan POPESCU

Lisbeth Bech POULSEN/Nikolaj Villumsen

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV*

Mailis REPS

Eva RICHTROVÁ/Pavel Lebeda

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT*

Ilir RUSMALI/Kastriot Islami

Pavlo RYABIKIN/Iryna Gerashchenko

Rovshan RZAYEV

Giacomo SANTINI

Giuseppe SARO

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH*

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER/Luc Recordon

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO*

Boris SHPIGEL*

Arturas SKARDŽIUS*

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY/Alexander Sidyakin

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI*

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Giacomo STUCCHI

Valeriy SUDARENKOV*

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ

Chiora TAKTAKISHVILI/Tinatin Bokuchava

Vyacheslav TIMCHENKO/Tamerlan Aguzarov

Romana TOMC

Lord John E. TOMLINSON*

Latchezar TOSHEV

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV*

Giuseppe VALENTINO/Oreste Tofani

Miltiadis VARVITSIOTIS/Spyridon Taliadouros

Volodymyr VECHERKO*

Mark VERHEIJEN/ Tineke Strik

Anne-Mari VIROLAINEN

Luigi VITALI

Luca VOLONTÈ

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Tanja VRBAT/Melita Mulić

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH

Johann WADEPHUL*

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON/Ian Liddell-Grainger

Katrin WERNER

Karin S. WOLDSETH

Gisela WURM

Karl ZELLER*

Barbara ŽGAJNER TAVŠ/Andreja Črnak Meglič

Svetlana ZHUROVA*

Emanuelis ZINGERIS

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN*

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Deo DEBATTISTA

Michael FALZON

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Hassan BOUHRIZ

Qais KHADER

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM

Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

ANNEXE II

Liste des représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de l’Islande et de la Lituanie

Pedro AGRAMUNT

Karin ANDERSEN

Robert BIEDROŃ

Mladen BOSIĆ/Ismeta Dervoz

Agustín CONDE

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES

Katalin CSÖBÖR

Joseph DEBONO GRECH

Arcadio DÍAZ TEJERA

Ioannis DRAGASAKIS/ Maria Giannakaki

Damian DRĂGHICI

Tülin ERKAL KARA

Jean-Claude FRÉCON

Sir Roger GALE/Robert Neill

Valeriu GHILETCHI

Alina Ştefania GORGHIU

Antonio GUTIÉRREZ/ Carmen Quintanilla

Davit HARUTYUNYAN

Andrej HUNKO

Vladimir ILIĆ/Vesna Marjanović

Florin IORDACHE/Viorel Riceard Badea

Igor IVANOVSKI

Stella JANTUAN

Michael Aastrup JENSEN

Mogens JENSEN

Ögmundur JÓNASSON

Igor KOLMAN

Tiny KOX

Terry LEYDEN

Yuliya L'OVOCHKINA

Philippe MAHOUX

Pietro MARCENARO

Thierry MARIANI

Pirkko MATTILA/Sirkka-Liisa Anttila

Liliane MAURY PASQUIER

Jean-Claude MIGNON/ Frédéric Reiss

Rubén MORENO PALANQUES/Ángel Pintado

João Bosco MOTA AMARAL

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE

François ROCHEBLOINE

Rovshan RZAYEV

Ionuţ-Marian STROE

Anne-Mari VIROLAINEN

Katrin WERNER

Karin S. WOLDSETH

Barbara ŽGAJNER TAVŠ/Andreja Črnak Meglič