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AS (2013) CR 31

 

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-et-unième séance

Mardi 1er octobre 2013 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35 sous la présidence de M. Mignon, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Rappel au Règlement ! Monsieur le Président, il est inacceptable que la séance ne commence pas à l’heure prévue. Là où je travaillais, j’aurais jugé ce procédé fort discourtois. J’aimerais que vous m’apportiez une réponse raisonnable.

LE PRÉSIDENT – Je vais m’y efforcer, mon cher collègue. Nous avons tous un emploi du temps excessivement chargé. Les commissions ont à peine eu le temps de terminer leurs réunions. Il me paraît conforme à la courtoisie de laisser ceux de nos collègues qui y siégeaient rejoindre l’hémicycle. Ils arrivent maintenant, si bien que nous allons pouvoir commencer. Je ne sais si je vous ai répondu assez précisément, mais si vous souhaitez reprendre la parole pour un nouveau rappel au Règlement, je vous la donne.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – L’ordre du jour ne pourrait-il tenir compte du fait que nous avons des réunions de commission ? Cela ne paraît pas si difficile.

LE PRÉSIDENT – Mon cher collègue, nous tenons compte autant que possible des impératifs de chacun. Ce n’est pas chose facile, notamment pour les présidents de commission, qui n’ont d’ailleurs pas encore pu regagner l’hémicycle. Ils s’efforcent de faire du bon travail, et il n’est pas toujours aisé de se conformer à l’ordre du jour tel qu’il est défini. Personnellement, je suis dans l’hémicycle à l’heure, mais, je le répète, il me semble plus courtois de laisser à nos collègues le temps de nous rejoindre. Cela étant, nous n’allons pas passer l’après-midi à discuter de rappels au Règlement ; tenons-nous-en là, si vous le voulez bien.

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie (suite)

LE PRÉSIDENT – Je vous rappelle que l’ordre du jour appelle l’élection de juges à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie.

La liste des candidats et leurs notices biographiques figurent dans le Doc.13305.

Le vote a lieu dans la rotonde derrière la présidence. Il sera clos à 17 heures.

J’invite ceux d’entre vous qui n’ont pas encore voté à le faire.

Le dépouillement aura lieu aussitôt après la clôture du scrutin, dans les conditions habituelles, sous le contrôle des deux scrutateurs que nous avons désignés par tirage au sort ce matin, Mme Guzowska et M.  Haupert. Je leur rappelle qu’ils devront se trouver dans la rotonde derrière la présidence à 17 heures.

Le scrutin est donc ouvert. Pendant ce temps, nous continuons nos travaux.

2. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2013) 07 Addendum 3.

En l’absence d’opposition, ces propositions sont adoptées.

3. Le droit des enfants à l’intégrité physique

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion de l’important rapport de Mme  Rupprecht, au nom de la commission des questions sociales, sur « Le droit des enfants à l’intégrité physique » (Doc.13297).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Je vous rappelle également que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 17 h 40. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 17 h 15, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme RUPPRECHT (Allemagne), rapporteure de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – L’intégrité physique des enfants est l’un des droits de l’homme les plus fondamentaux. C’est le thème de notre débat, que je me réjouis d’avoir l’occasion de mener aujourd’hui dans cet hémicycle.

En tant que militante pour les droits des enfants et première rapporteure générale sur le droit des enfants à l’Assemblée parlementaire, je m’occupe depuis de longues années de la protection et la promotion des droits des enfants. Que ce soit au Conseil de l’Europe ou au Bundestag, où je suis encore parlementaire mais auquel je n’appartiendrai plus car je n’étais pas candidate aux dernières élections, j’ai toujours essayé de sensibiliser mes collègues aux violations des droits des enfants qui sont autant de violations des droits de l’homme.

Aujourd’hui, notre ordre du jour nous permet de nous pencher sur ces actes que l’on pratique de bonne foi sur des enfants pour des raisons diverses, religieuses, culturelles, esthétiques ou dans un souci de modernité, ces gestes commis sur des enfants parce que l’on pense qu’ils sont des actes assez anodins. En fait, on n’en mesure pas les conséquences et l’on ne sait pas non plus très bien ce qu’en dit la médecine depuis quelque temps.

Le moment est donc venu de faire le point sur la situation.

Mon rapport évoque les mutilations génitales des fillettes, que réprouve le monde entier – ou presque –, la circoncision des jeunes garçons et la détermination de l’identité sexuelle trop précoce pour les enfants intersexués, c’est-à-dire des enfants dont on ne peut pas dire très exactement quel est leur sexe à la naissance. Il cite également un certain nombre d’actes d’ordre plutôt esthétique, tels que les piercings, les tatouages ou les implants chez des jeunes.

Nous nous sommes tous battus, longtemps, pour interdire et éradiquer les mutilations génitales des fillettes. Ce sont des violations des droits de l’homme, on le reconnaît aujourd’hui. Mais dans bien des régions du monde, et même chez nous, ces mutilations génitales ne sont pas suffisamment combattues. On ne parle pas de la possibilité de transformer ces rites anciens en rites symboliques. Tout cela est tu, tout cela reste caché. On n’en discute jamais et on ne parle jamais non plus de ce que signifie parfois pour un adulte le fait d’être circoncis.

Concernant la détermination du sexe d’un enfant, qui ne pose généralement pas problème, on ne mentionne que rarement les conséquences d’une intervention décidée par les parents. On ne parle pas de ces situations avec les enfants et l’on ne parle pas avec les parents d’éventuelles alternatives. Le nombre des enfants intersexués est assez limité et, depuis un siècle, on les opère massivement tout de suite après la naissance : l’enfant peut subir jusqu’à trente opérations. Les opérations étant plus faciles pour aller vers le sexe féminin, on choisit généralement de « faire » des fillettes. Sans demander aux enfants ce qu’ils en pensent. Sans se demander s’ils n’auraient pas tout simplement envie de rester comme ils sont, considérant que le corps avec lequel ils sont nés est leur corps naturel.

Ces opérations se font sans l’assentiment des enfants, qui en gardent les séquelles et en subissent des conséquences tout au long de leur vie, comme on peut s’en rendre compte en discutant avec ces personnes. Ce n’est certainement pas une vie dans l’autodétermination que vivront ces personnes !

La commission des questions sociales a consulté quatre experts sur ces questions, notamment sur les pratiques de la circoncision et des mutilations génitales féminines, et nous en avons discuté en présence de représentants des communautés juives et musulmanes, que nous avons dûment écoutés.

Je voudrais insister sur l’aspect qui me semble le plus important depuis toutes ces années que j’ai passées dans ce combat : le bien-être de l’enfant, dans toute décision privée ou publique le concernant, doit être à l’avant-plan. C’est lui qui doit déterminer nos actes et nos gestes. Malheureusement, ce droit est souvent bafoué parce que les adultes ont tant de bonnes raisons d’intervenir sur un enfant… « pour son bien », évidemment !

La Convention des Nations Unies sur les droits des enfants considère que c’est là le principe le plus noble et le plus élevé que nous devons respecter. Quand il y a violation évidente des droits de l’enfant, nous sommes vite d’accord. Quand un enfant est frappé à mort, tout le monde est d’accord pour condamner cet acte. Mais on l’est déjà bien moins quand il s’agit de questions pour lesquelles nous transmettons, sans y réfléchir, des traditions souvent ancestrales : « on a toujours fait comme ça » !

Les parents n’agissent pas pour nuire à leurs enfants. Ils songent au bien-être de leurs enfants. La quasi-totalité des parents décident pour leurs enfants en fonction de ce qui leur apparaît, en tant que parents, comme étant le mieux pour l’enfant. Mais souvent leurs décisions ne sont pas fondées au point de nous permettre de dire que l’enfant vivra bien ce qu’on lui fait vivre.

Le droit des parents à l’éducation, le droit des parents à l’exercice de la religion et à l’éducation religieuse, d’une part, le droit de l’enfant à l’autodétermination et son droit à l’intégrité physique, d’autre part, constituent un champ de tensions au milieu duquel nous devons nous situer et décider. Les tribunaux décident en faveur de l’enfant, quand leur survie est en cause ou en danger. Ainsi, si certaines communautés religieuses interdisent les transfusions sanguines et qu’il s’agit de sauver la vie d’un enfant, la religion passe derrière la justice et le droit s’impose à l’église.

Lorsqu’il s’agit de rites centenaires ou millénaires, on est souvent très prudent. On devrait plutôt se demander si les interventions qu’ils justifient ont un caractère irréversible. Ce sont leurs conséquences à court et moyen termes pour les enfants qui doivent motiver nos décisions. Il en va de même pour la circoncision et la détermination du sexe des enfants.

Nous devons par ailleurs garantir la participation des enfants à toutes les décisions qui les concernent. D’après l’article 12 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, les enfants sont des sujets, qui disposent de leurs droits propres. Leurs parents sont soumis au droit de la responsabilité. Ils ont l’obligation d’accompagner leurs enfants, de les aider à grandir et de leur transmettre des valeurs. Ils ne sont pas autorisés à traiter leurs enfants comme des objets. Ils doivent faire preuve de sensibilité. C’est aux parlementaires de le rappeler dans les différentes enceintes où ils interviennent.

La question du droit des enfants à l’intégrité physique n’est pas débattue seulement au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Dans les pays scandinaves, les médiateurs en charge des droits de l’enfant se sont réunis hier pour prendre position sur la question de la circoncision des garçons. Selon eux, la circoncision, véritable violation des droits de l’homme, appelle un travail d’information et de sensibilisation.

Il ne s’agit pas ici de limiter des droits ou des libertés religieuses. Bien évidemment, les parents ont le droit d’élever leurs enfants dans leur religion et de leur transmettre leurs valeurs. Les élever dans un système de valeurs est même un devoir. Toutefois, il n’est pas acceptable de toucher à l’intégrité physique de l’enfant.

Nous devons prendre le temps de discuter de toutes ces questions. Avant tout, le rapport encourage le dialogue, plutôt que d’inciter à de nouvelles lois ici et là. Si elle n’est pas soutenue par le cœur et la raison, une loi est d’ailleurs inutile. C’est pourquoi il faut conduire ce débat au niveau de l’Europe tout entière. Les droits de l’homme, la démocratie et la prééminence du droit constituent les bases même de notre coexistence. Nous ne pouvons fouler aux pieds les droits des enfants et je vous demande, mes chers collègues, d’approuver le projet de résolution et le rapport, qui favorisent le débat sur une question essentielle.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Madame la rapporteure. Il vous restera une minute tout à l’heure pour répondre aux orateurs, soit un temps bien court compte tenu de la qualité de votre rapport.

Madame Rupprecht, vous êtes membre de l’Assemblée parlementaire et du Conseil de l’Europe depuis treize ans presque jour pour jour, puisque vous êtes arrivée le 25 septembre 2000. La qualité de votre travail et votre investissement ont été depuis remarquables. Ce n’est peut-être pas votre dernière session à l’Assemblée parlementaire mais, si tel était le cas, je tiens à vous remercier très chaleureusement pour votre sensibilité et votre engagement sur des questions qui touchent aux fondements même de notre Organisation.

Nous ouvrons maintenant la discussion générale.

Mme NIKOLAEVA (Fédération de Russie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Je souhaite remercier la rapporteure pour le courage dont elle a fait preuve, sur une question qui ne laisse personne indifférent. Elle affirme son respect pour la liberté religieuse des parents mais sans jamais oublier l’intérêt de l’enfant. D’après la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être prioritaire dans les décisions des parents et des pouvoirs publics. Ce doit être le cas également au Conseil de l’Europe.

Garantir l’intégrité physique de l’enfant est notre obligation à tous. Le rapport précise que des experts ont été mobilisés pour élaborer des mécanismes permettant de garantir ce droit. Il est aussi indispensable de tenir compte des traditions religieuses des différents Etats membres.

Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a récemment adopté une stratégie pour la défense des droits de l’enfant. C’est un élément essentiel pour aider les Etats membres à mettre en œuvre des normes qui permettront de lutter contre toutes les formes de violence à l’égard des enfants. Les Etats qui ont adopté une stratégie propre en la matière sont de plus en plus nombreux. La défense des intérêts de l’enfant doit être la pierre angulaire de toutes les activités que nous déployons.

M. Kox, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Mignon au fauteuil présidentiel.

M. JONASSON (Islande), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je tiens à dire, tout d’abord, que nous soutenons sans réserve le projet de résolution présenté par Mme Rupprecht.

Au cours des dernières années, le Conseil de l’Europe a joué un rôle essentiel dans la définition des droits de l’enfant et dans l’organisation de campagnes de sensibilisation sur le sujet. Par ailleurs, la Convention de Lanzarote de 2007 a constitué une étape clé dans la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle.

Aucune violence contre les enfants n’est justifiée. Toute violence contre les enfants peut être évitée. Ce sont les conclusions d’une étude des Nations Unies sur la violence publiée en 2006. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et le Commissaire aux droits de l’homme doivent œuvrer afin que les droits des enfants soient considérés comme une priorité politique. Le rapport et le projet de résolution poursuivent précisément cet objectif.

Malgré différentes mesures législatives et politiques adoptées par les Etats membres du Conseil de l’Europe afin de protéger les enfants de violences physiques et psychiques, la question du droit à l’intégrité physique des enfants n’a pas encore été traitée.

Ce que cela veut dire, Mme Rupprecht vous l’a expliqué.

Certaines des pratiques décrites dans le texte plongent leurs racines dans la tradition, religieuse ou autre. Mais il faut être extrêmement clair : ces projets de recommandation et de résolution ne vont pas contre une religion ou une confession particulière. Il s’agit d’adopter une approche positive en deux volets : tout d’abord, en définissant très clairement les pratiques en question, afin de défendre les enfants, de prévenir la violation de leur intégrité physique et de promouvoir leurs droits – à cet égard, la résolution est pour quelque chose, et non pas contre – ; ensuite, en lançant un appel en faveur d’un dialogue interculturel et interreligieux au sein de la société, de façon à obtenir un consensus large en faveur de la protection des enfants, ou plutôt du respect de leurs droits. Il ne s’agit pas, ici, de condamner.

Cela étant, une distinction très claire est faite entre les différentes pratiques afin d’identifier les plus dangereuses d’entre elles, comme les mutilations génitales féminines. L’Assemblée parlementaire lance ainsi un appel aux Etats membres afin qu’ils condamnent publiquement ces pratiques, adoptent des législations et créent des mécanismes pour les prévenir et les éliminer.

Mme KYRIAKIDES (Chypre), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* - Mes chers collègues, au nom du PPE, je souhaite féliciter Mme Rupprecht, qui a préparé un rapport excellent sur des questions difficiles. Le droit des enfants à l’intégrité physique fait l’objet de débats dans plusieurs sociétés, dans les parlements et les médias. En tant que rapporteure générale pour les droits de l’enfant du Conseil de l’Europe, je voudrais dire de la façon la plus claire et la plus catégorique qui soit que la défense des droits de l’enfant, tels que définis dans la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant, est d’une importance essentielle. Nous ne saurions accepter de voir ces droits édulcorés. Prendre cette voie, autoriser différentes variations dans l’interprétation de ces droits ferait courir le risque d’autoriser de fait leur violation dans certaines circonstances.

Toutes nos décisions doivent être prises en ayant à cœur l’intérêt supérieur de l’enfant. Il ne fait donc pas de doute que l’intégrité physique de l’enfant doit être protégée par tous les moyens. Nous avons d’ailleurs vu les attitudes et les croyances en la matière évoluer au fil des ans : il est désormais reconnu que les châtiments corporels sévères et autres conditions dures considérées dans le passé comme des méthodes pédagogiques adaptées aux enfants ont, au plan psychique, de très graves conséquences sur leur développement.

Le rapport traite de différents problèmes très difficiles : circoncision des garçons, mutilations génitales féminines, opérations visant à déterminer le sexe des enfants intersexués, piercings, etc. Le plus simple serait sans doute de dire que nous condamnons tout type de violation de l’intégrité physique d’un enfant quand il est effectué sans le consentement éclairé de ce dernier. Mais nous devons faire preuve de la plus grande vigilance en matière de respect des convictions religieuses, celles des parents comme celles des sociétés, pour ne pas risquer de mettre l’enfant en danger en rendant de telles pratiques encore plus clandestines.

Il ne fait pas de doute que nous devons prendre une position claire et nette pour ce qui concerne les mutilations génitales féminines, qui sont une violation directe de la vie sexuelle des femmes et des filles et une violation inacceptable de leurs droits. Elles ont d’ailleurs été décrites comme une torture, un acte qui mutile à tout jamais le corps des jeunes filles.

Dans le cas de la circoncision des garçons, toutefois, la position adoptée dans le rapport est différente. Il s’agit en effet d’ouvrir un débat, de lancer un dialogue avec toutes les personnes impliquées, de façon à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit respecté et que l’on ait recours aux progrès les plus récents de la médecine tant que l’on n’aura pas réussi à sensibiliser davantage les populations à l’importance, pour les enfants, de participer aux décisions qui les concernent.

Nous devons veiller à ce que l’intégrité de l’enfant fasse l’objet d’une attention particulière et ouvrir un dialogue sur le droit de l’enfant à son intégrité physique, son droit à une décision éclairée, son droit à être considéré comme un individu et non pas seulement un prolongement du monde des adultes.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* - Le Président de notre Assemblée a, en termes émouvants, rendu hommage à notre rapporteure. J’aimerais, chère Marlene, en faire autant au nom de notre groupe, car votre présence laissera de longues traces dans cette institution. J’ai appris beaucoup de votre courage, de votre engagement incessant en faveur de la défense des droits des enfants. Je sais que vous effectuez le même travail au Bundestag.

Votre dernier rapport, marqué par une très grande sensibilité, concerne une question terriblement difficile, y compris dans ses aspects souvent tus, comme l’intersexualité des enfants. Dans nos pays surmédicalisés, lorsqu’un enfant naît intersexué, on veut en effet déterminer immédiatement son sexe. Or certaines personnes disent : « Nous ne voulons pas être il ou elle, nous voulons être une personne. » Dans ce domaine, nous décidons parfois beaucoup trop vite, au risque de créer un dommage physique et psychique irréversible.

Autre thème souvent caché, celui des mutilations génitales infligées aux jeunes filles pour des raisons culturelles ou religieuses – un phénomène heureusement en régression chez nous.

Mais le débat d’aujourd'hui concerne également l’intégrité physique des garçons.

Une douleur est toujours une douleur, et une atteinte à l’intégrité physique est toujours un acte grave, quelle qu’en soit la cause. Marlene Rupprecht ne cesse de nous rappeler que les droits des enfants sont des droits propres : chaque enfant a en effet son propre droit, indépendamment de celui de la société ou de celui de ses parents. L’enfant a notamment le droit de ne pas souffrir ni de subir d’atteintes à son intégrité physique.

Tout ne peut être expliqué ou justifié par la tradition. Chez nous, pays catholique, l’Inquisition brûlait des sorcières au nom de la tradition. Nous devons ici prendre la défense du bien-être des enfants, questionner ce qui doit être questionné, et permettre à l’enfant de prendre, en connaissance de cause, une décision relative à son intégrité physique – comme celle de subir une intervention chirurgicale pour déterminer son sexe.

Je sais, ma chère Marlene, qu’il n’est pas facile de travailler sur de telles questions, pas même en Allemagne. J’aimerais donc, au nom de mon groupe, vous remercier à nouveau chaleureusement.

Mme ACKETOFT (Suède), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* - Je tiens à remercier Mme Rupprecht d’avoir traité ce sujet difficile, et je la félicite pour son rapport bien équilibré. J’espère que nous pourrons l’approuver sans modifications et que nous saurons ensuite le mettre en pratique.

Je vous remercie également, Madame, pour votre discours d’une grande clarté : chacun sait exactement où vous en êtes sur ces questions.

Des mesures législatives ont été prises par les Etats membres pour améliorer la protection et le bien-être des enfants. Toutefois, à ce jour, seulement 23 pays ont totalement interdit le châtiment corporel. Dans la majorité des pays, le recours à de telles pratiques est toujours considéré comme relevant d’une décision familiale, domestique. L’usage de la violence est vu comme une façon, pour les parents, d’élever leurs enfants en utilisant la peur.

Ce rapport examine d’autres types de violences, celles infligées aux enfants au nom de la foi, de la religion, de la tradition ou de la culture. Des parents ou tuteurs pensent que la meilleure façon d’élever les enfants, c’est de les élever dans le respect d’une certaine croyance qui exige des opérations non justifiées au plan médical.

Je comprends que des collègues s’élèvent contre ce rapport. Ils pensent que, si nous l’approuvons sous l’angle du droit de l’enfant à l’intégrité physique et du droit à être consulté pour toutes les décisions le concernant, nous enfreignons la liberté des parents et la liberté religieuse. Mais en commission, hier, il a été clairement rappelé que la circoncision effectuée pour des raisons non médicales et sans le consentement de l’enfant constituait une infraction aux principes déontologiques médicaux et éthiques fondamentaux.

Nous avons entendu que les enfants ont des droits humains supérieurs aux droits des parents. La liberté religieuse est aussi celle de ne pas choisir de religion ou de le faire plus tard dans la vie. Je suis libérale, je considère qu’un adulte est libre de faire ce qu’il veut de son corps mais c’est différent lorsqu’il s’agit d’enfants. Nous devons veiller à leur bien-être. Pourquoi devrions-nous autoriser la religion, la tradition, la culture, les mœurs à violer ce droit fondamental de l’enfant à l’intégrité physique ?

Je félicite Mme Rupprecht. Je vous exhorte tous, mes chers collègues, à voter ce rapport sans le modifier pour qu’ensuite, dans nos parlements nationaux, il soit suivi d’effets.

LE PRÉSIDENT* – Madame Rupprecht, souhaitez-vous répondre maintenant aux porte-parole des groupes ?

Mme RUPPRECHT (Allemagne), rapporteure* – Non, Monsieur le Président.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Je remercie notre rapporteure d’avoir attiré notre attention sur l’intégrité physique des enfants. Mme Rupprecht défend depuis longtemps les droits de l’enfant. Je m’associe à M. Mignon pour la remercier pour son activité au Conseil de l’Europe et je lui souhaite tout le bien possible dans ses futures activités.

Notre institution promeut les droits de l’homme. Elle doit par conséquent défendre particulièrement ceux de l’enfant, créature la plus innocente. Les mutilations génitales féminines ont déjà été évoquées plusieurs fois dans cette Assemblée. Il convient aussi de définir très clairement les conditions médicales et sanitaires requises pour la circoncision des garçons.

Je ne veux cependant pas décourager la circoncision, dont rien ne prouve la nocivité à court ou long terme. On lui connaît même des bienfaits médicaux tangibles. La plupart des inconvénients liés à la circoncision des garçons viennent d’un manque de professionnalisme de ceux qui la pratiquent et d’un manque d’hygiène - environnement non stérile. Ces deux conditions pourraient être rendues préalables et obligatoires.

Le fait d’attendre que les garçons atteignent l’âge du consentement pour la circoncision n’est peut-être pas le choix le plus sage. Je regrette profondément que Mme Rupprecht ne se soit pas opposée à l’amendement 1 déposé en commission. Le paragraphe 7-4 était en effet fort bien rédigé. Sans l’équilibre entre le droit de l’enfant et la liberté des parents, ce projet de résolution perd l’un de ses piliers les plus importants. Or, cet équilibre est nécessaire dans une société multiculturelle comme la nôtre. Il faut simplement informer les populations des risques de toutes les pratiques médicales.

Je remercie la rapporteure qui a montré les deux faces de la médaille. Lorsque la procédure n’affecte pas la vie de l’enfant à long terme, il faut permettre aux parents de transmettre une partie de leur héritage culturel à ses enfants.

Je prie Mme Rupprecht de bien vouloir rejeter l’amendement 1 et de préserver ainsi l’équilibre du projet de résolution, sans quoi il me sera difficile de soutenir ce projet, malgré ses excellentes intentions.

Mme  BLONDIN (France) – Merci, Madame Rupprecht, pour cet excellent et ô combien délicat rapport que vous nous laissez en héritage, pour que le débat sur les droits des enfants à l’intégrité physique s’installe dans nos parlements.

Je m’attarderai plus particulièrement sur les mutilations sexuelles féminines ayant trait à d’anciennes pratiques coutumières. Plus de 120 millions de femmes et de fillettes sont victimes de ces pratiques sur le seul continent africain, soit le tiers de la population féminine de l’Afrique ! Elles existent aussi en Indonésie, en Malaisie et au Yémen… Je veux rappeler encore et encore qu’aucune religion n’impose ce type de sévices, au premier rang desquels il faut citer l’excision.

En France, les autorités estiment à au moins 20 000 le nombre des femmes et à 10 000 celui des fillettes qui seraient ainsi mutilées ou menacées de l’être.

Notre réponse juridique a considérablement évolué depuis les premiers cas découverts dans les années soixante-dix : plus de vingt procès, à l’encontre de parents dont les enfants sont décédés à la suite d’excisions, mais aussi à l’encontre d’exciseuses. Ces affaires étaient jugées en correctionnelle jusqu’en 1983. La Cour de cassation, la plus haute juridiction française, a alors affirmé que l’ablation du clitoris constituait bien une mutilation au sens du code pénal français. Bien sûr, la sanction a également évolué avec des peines allant jusqu’à 20 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende.

Nous avons dans le même temps porté à 20 ans – à compter de la majorité de la victime – le délai de prescription de ces mutilations. Le secret professionnel peut, par ailleurs, être levé s’agissant de ces violences. Notre code pénal sanctionne également ces pratiques sur les mineures de nationalité étrangère résidant habituellement en France et qui sont victimes à l’étranger de mutilations sexuelles.

En 2014, la Marche sur Paris contre l’excision sera parrainée par la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, que nous avons eu l’honneur et le plaisir d’entendre lors de la dernière partie de session en juin.

Je rejoins la rapporteure sur la nécessité d’aller plus loin au sein de notre Organisation en vue de mieux harmoniser nos pratiques en la matière. Il s’agit d’avoir une approche unifiée, en prévoyant notamment que dans tous les pays membres du Conseil de l’Europe, la législation sanctionne les mutilations commises à l’étranger sur les fillettes résidant habituellement sur leurs territoires respectifs.

Cette fermeté doit aller de pair avec une meilleure coopération avec les autorités des pays d’origine sur le thème de la prévention et de l’éducation.

Mme  FORT (France) – Madame la rapporteure, vous venez de rappeler avec conviction et passion que les mutilations génitales féminines sont une atteinte particulièrement insupportable à l’intégrité physique des enfants. Cette question devrait faire l’objet d’une attention spécifique au niveau international.

Aujourd’hui, dans le monde, 130 millions de femmes ou de jeunes filles sont victimes de ces mutilations. En France, on estime que 65 000 femmes ou fillettes sont mutilées ou menacées de l’être. Elles sont pour la plupart originaires du continent africain, où malheureusement ces pratiques relèvent de la tradition !

La France a adopté une législation très contraignante puisque l’auteur des mutilations peut être poursuivi quels que soient sa nationalité et le lieu où l’acte a été commis si la victime est française ou réside en France. Mutiler une fillette est ainsi passible d’une peine de réclusion criminelle allant jusqu’à vingt ans. Pourtant, malgré les nombreux procès et condamnations, ces pratiques perdurent.

Ces blessures engendrent de graves souffrances psychiques car ces jeunes filles mutilées n’auront pas une vie de femme épanouie sans chirurgie de réparation. Nous sommes face à une aliénation même de la condition de femme. C’est pourquoi il faut punir mais aussi rappeler avec force aux pères et aux mères de ces fillettes qu’une tradition qui a de si graves conséquences sur la santé physique et psychique d’un enfant est une atteinte intolérable à la dignité humaine. Comme l’indique fort justement la plaquette d’information distribuée en France, on dit qu’il faut respecter les coutumes, mais il faut avant tout respecter la loi !

Madame la rapporteure, vous avez voulu mettre en avant les atteintes à l’intégrité physique des enfants dont on parle peu dans les conventions. Il me semble que la question de l’inceste aurait aussi pu être intégrée à votre travail : c’est une autre forme d’atteinte à l’intégrité physique, tout aussi abominable. Nous savons combien ce sujet est tabou dans beaucoup de sociétés, comme toutes les violences domestiques d’ailleurs… C’est pourquoi il me paraît important que notre Assemblée évoque cette violence intrafamiliale et réfléchisse à la façon dont ces actes sont incriminés dans le droit pénal des États membres.

Je suis l’auteure de la loi française du 6 février 2010 visant à inscrire l’inceste sur mineur dans le code pénal. Malheureusement, à la suite d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par un agresseur condamné, le Conseil constitutionnel a censuré le nouvel article du code pénal, estimant que les membres de la famille devaient être désignés plus précisément.

Alors que de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe font actuellement évoluer leur droit de la famille, voire la notion même de famille, la question est de savoir où s’arrête la famille. Et, par conséquent, à partir de quand est-on face à une agression qualifiable d’inceste ? C’est une question importante : en France plus de deux millions d’adultes auraient été victimes d’inceste dans leur enfance. Combien dans les quarante-sept pays du Conseil ?

Bien entendu, les auteurs d’actes incestueux sont souvent poursuivis pour viol et agression sexuelle, mais, s’il y a un cas où l’enfant est sans défense, c’est bien lorsque la violence naît au sein même de son environnement familial ! L’introduction d’une notion spécifique d’inceste dans le droit pénal doit être un objectif car les victimes de ces actes odieux sont en attente de reconnaissance.

LE PRÉSIDENT* – M. Drăghici, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme ANTTILA (Finlande)* – Je souhaite tout d’abord remercier la rapporteure : son rapport est excellent. C’est sans doute l’un des plus importants que nous ayons à examiner. Nous avons d’ailleurs la responsabilité essentielle de veiller à la vie de l’enfant. Ce rapport nous rappelle justement que nous devons tenir compte du droit de l’enfant à l’intégrité physique.

En préparant et en adoptant la nouvelle stratégie pour les droits de l’enfant jusqu’à 2015, je crois que nous devons tenir compte de la lutte contre toutes les formes de violence contre les enfants et veiller à promouvoir la participation des enfants aux décisions qui les concernent. Tous, nous pouvons l’accepter.

Je veux vous rappeler à quelles menaces expose internet. Bien trop de personnes s’efforcent d’entrer en contact avec les enfants, et ce pour des raisons fort diverses. Ce ne sont pas que des personnes honnêtes. Elles ont parfois des visées sexuelles, ou d’autres pensées malveillantes. J’espère vivement que le Conseil de l’Europe, lorsqu’il préparera la prochaine stratégie sur les droits de l’enfant, prendra très au sérieux les problèmes qui se posent sur internet. Nous connaissons trop d’exemples de crimes très graves commis ces dernières années qui lui sont dus. Nous devons donner un coup d’arrêt à ce genre de développement ; c’est notre responsabilité, c’est également notre fonction.

En tant que responsables politiques, nous avons également pour principale responsabilité d’élaborer des législations qui tiennent compte de tous les risques potentiels qui se présentent dans notre société. Nous devons donc protéger notre bien le plus précieux : nos enfants, c’est-à-dire notre avenir.

La famille est la partie la plus importante de notre société. Nous devons nous en souvenir lorsque nous prenons des décisions. Adoptons-en qui permettent aux familles de prendre réellement soin de leurs enfants.

M. SIDYAKIN (Fédération de Russie)* – Je remercie notre rapporteure. La Russie s’intéresse beaucoup aux questions touchant à la protection des droits de l’enfant et la convention relative aux droits de l’enfant y entrera en vigueur le 1er décembre prochain.

La théorie du droit n’a pas tranché la question du droit des personnes à disposer de leur propre corps. Le code d’éthique des officiers de police en Russie prohibe ainsi tatouages et piercings. Autre exemple, en 2004, un roman américain, Skin, de Shelley Jackson a été tatoué sur le corps de près de 3 000 volontaires.

Dans quelle mesure les parents sont-ils responsables du corps de leurs enfants mineurs ? Il arrive bien que des enfants intentent une action contre leurs parents parce qu’ils ont refusé de leur acheter un téléphone portable ou une Playstation. Alors le choix de la coiffure d’un enfant est-il une atteinte à son intégrité physique ? Nous craignons que le projet de résolution ne porte atteinte aux valeurs traditionnelles de la famille. Il y a là quelque chose qui sape les décisions futures des parents si l’on donne un sens trop large à cette notion d’intégrité physique.

La circoncision des petits garçons, dans les traditions musulmane et juive, est remise en question par ce projet de résolution. Or la Russie est un pays multi-ethnique où coexistent de nombreuses confessions, et nous n’avons pas l’intention de légiférer pour réduire la liberté religieuse, par exemple dans les républiques du Caucase. En Russie, des milliers de nouveau-nés sont circoncis, tandis que leur proportion dépasse 20 % aux Etats-Unis.

Nous sommes favorables aux mesures de protection du droit des enfants à l’intégrité physique mais il faut une base juridique plus solide pour définir l’intégrité physique dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Les normes européennes en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales pourraient servir d’outils. En tout état de cause, le droit des enfants à l’intégrité physique doit être débattu en tenant compte des réalités culturelles et nationales de chaque pays.

Mme VIROLAINEN (Finlande)* – Violence et enfance sont des mots qui s’inscrivent mal dans la même phrase, mais c’est pourtant une violence que subissent les enfants lorsque les parents insistent pour les soumettre à des procédures de circoncision, pour les garçons, ou de mutilation génitale, pour les filles. Pourquoi ? Est-ce parce que certains parents pensent que c’est pour le bien de leur enfant quand bien même ces procédures sont douloureuses ? Les raisons culturelles ou religieuses ne sauraient justifier une violence qui n’est certainement pas exercée dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Les mutilations génitales féminines ne sont pas simplement très douloureuses, elles font également courir à celles qui les subissent des risques graves pour leur santé, et peuvent même entraîner la mort. Dans certains cas, les jeunes filles sont entraînées vers ces procédures par leur mère, ou leur grand-mère, ou des femmes très proches, ce qui cause également un traumatisme psychique.

La circoncision est pratiquée sur des nourrissons. Mais qu’est-ce qui nous donne, à nous, adultes, le droit de faire cela à des êtres sans défense ? C’est médicalement absolument infondé, et cependant très douloureux. Etre parent, cela implique une responsabilité : celle de protéger les enfants.

Les procédures que je viens de décrire violent les droits des enfants, elles ne devraient pas avoir cours sur simple décision des parents.

Je voudrais souligner ici l’importance de la prévention. En informant les parents et les professionnels des droits et de l’intérêt supérieur de l’enfant, nous pourrions éviter ces dommages. Et si les parents ne respectent pas ces droits, il appartient aux autorités d’intervenir pour mettre un terme à ces abus. Nous devons veiller à ce que les autorités chargées de protéger les enfants disposent des moyens et des outils nécessaires pour aider les enfants et leur famille. On pourrait créer des structures faisant intervenir plusieurs professionnels.

Nous avons en Finlande mis en place le modèle norvégien Follo pour aider les parents qui traversent un divorce difficile à ne pas faire du tort à leurs enfants. Cette approche pourrait également s’appliquer à d’autres processus, toujours en se basant sur l’intérêt supérieur de l’enfant.

Je suis d’accord avec la rapporteure pour dire que la sensibilisation est la première étape pour éliminer les violations de l’intégrité physique des enfants. Combien de fois, dans cette Assemblée, avons-nous rappelé que les droits de l’homme sont les mêmes pour tous. Les droits de l’enfant ne sont pas des « mini-droits de l’homme » ! Nos enfants ont les mêmes droits que nous tous.

Mme SZÉL (Hongrie)*– Permettez-moi tout d’abord de remercier la rapporteure pour cet excellent rapport.

Les familles sont de plus en plus variées et les défis de plus en plus nombreux. Les parents ont besoin de davantage d’informations pour améliorer l’éducation qu’ils donnent à leurs enfants.

Les enfants ont le droit à leur intégrité physique et il faut qu’ils puissent dénoncer toute atteinte inappropriée à celle-ci. Leur corps leur appartient, nous devons donc les encourager, les autonomiser.

L’intégrité physique des enfants est intimement liée à la question des sanctions corporelles. Le droit de ne pas être battu est un droit fondamental. Or, dans de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe, il n’y a pas de véritable reconnaissance de ce droit. Et quelquefois, il semble risqué pour les hommes politiques d’aborder un certain nombre de questions.

Les mutilations génitales féminines me semblent être la forme la plus brutale de l’oppression des femmes. Elles constituent une violation des droits les plus fondamentaux des femmes, qui en restent marquées à vie. Il est donc important que tous les Etats érigent en infraction pénale ces pratiques, y compris lorsque leurs ressortissants se rendent à l’étranger pour pratiquer de telles mutilations. Hélas, les opérations illégales augmentent, et ce notamment dans les communautés musulmanes.

La protection internationale est importante. La Convention sur les droits de la femme et la Convention sur les droits des enfants sont contraignantes et luttent contre les pratiques dangereuses pour les enfants.

Sur la base de la Convention sur les droits de la femme, il serait bon d’élaborer une recommandation sur les pratiques, ce qui a été fait en 2011, le but étant également d’éclaircir les obligations incombant aux Etats membres. Les documents de la Convention sur les femmes et d’autres documents peuvent constituer un guide pour le Conseil de l’Europe afin d’aider les Etats membres à élaborer et à mettre en œuvre leur propre législation en la matière.

Il faut également lancer un débat public par le biais des médias et travailler avec les enfants pour qu’ils comprennent l’importance qu’il y a à protéger leur intégrité physique.

Madame la rapporteure, j’appuierai votre rapport.

LE PRÉSIDENT* – Je vous rappelle que le vote se poursuit pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie. Le scrutin sera clos à 17 heures. Si vous n’avez pas encore voté, vous pouvez le faire dans la rotonde derrière la présidence.

Mme CLUNE (Irlande)* – Je remercie la rapporteure pour son rapport qui, comme elle l’a dit, se veut l’amorce d’un dialogue entre les Etats membres sur ces questions importantes et parfois tragiques de la violation de l’intégrité des enfants.

Les enfants sont innocents et vulnérables. Ils sont mis au monde par les adultes qui doivent les protéger et garantir leur intégrité physique contre tout acte ou intervention.

L’OMS a adopté une série de recommandations pour demander aux Etats membres d’établir des politiques nationales claires et pour mettre fin à des pratiques traditionnelles qui lèsent les enfants. Des informations, des orientations, des lignes directrices ont été élaborées pour les habitants des pays concernés.

Les mutilations génitales féminines sont malheureusement un phénomène largement répandu, qui peut frapper des filles de 14 ou 15 ans pour des raisons culturelles. Cela prend différentes formes allant jusqu’à l’ouverture du vagin ou l’excision des petites lèvres. Ce sont là des interventions très mutilantes qui peuvent porter atteinte aux organes environnants, causer des infections et compromettre la fonction reproductrice. Il s’agit donc d’interventions graves qui peuvent engendrer des séquelles considérables et durables pour les enfants.

En Irlande, nous avons adopté une législation qui interdit ces mutilations. Nous avons pris cette décision après avoir entendu des femmes migrantes vivant en Irlande. De nombreuses ONG luttent contre ces pratiques barbares qui sont hélas assez fréquentes.

Notre législation précise également que toute personne qui emmène un enfant à l’étranger pour lui faire subir des mutilations génitales peut être poursuivie en Irlande. Nous souhaitons qu’une législation similaire soit adoptée sur le plan international pour mettre fin à ces pratiques barbares.

Mme BONET PEROT (Andorre)* – Je voudrais avant tout remercier Mme Rupprecht car depuis que je suis membre du Conseil de l’Europe et que je la connais, elle a toujours défendu les intérêts des enfants de toutes ses forces et avec enthousiasme.

Nous parlons ici de la violation de l’intégrité physique qui, souvent, est liée à une altération de l’intégrité psychologique, les conséquences durant tout au long de la vie. Dans ces pratiques, l’intérêt du mineur n’est jamais pris en compte, ce sont toujours des adultes qui décident en son nom.

Des normes juridiques fondamentales existent pour défendre les droits des citoyens. Et dans ces constitutions, il y a des mandats de protection des enfants. Ce sont là des droits fondamentaux qui l’emportent sur les autres droits. Mais l’enfant ne sait pas revendiquer la protection de la Constitution à laquelle il a droit. Il s’agit de droits universels dont tout être humain dispose au début de sa vie.

Or, nous savons que la circoncision est parfois pratiquée sur des nourrissons de quelques jours qui, bien entendu, ne peuvent se défendre.

Les auteurs de ces différentes normes ont souhaité que les enfants occupent une place centrale leur permettant d’être protégés par tous en raison de leur vulnérabilité. Ce sont donc aussi bien la famille, la société que les Etats qui doivent assurer cette protection, sans quoi il est impossible que les enfants parviennent à un développement plein et harmonieux de leur personnalité. En effet, un enfant qui n’a pas décidé d’une intervention sur son propre corps et qui est mutilé ne peut poursuivre un développement normal de sa personnalité.

Différentes pratiques existent, qui ne sont pas faites pour résoudre des problèmes médicaux mais qui répondent à des convictions religieuses. Bien sûr, nous respectons la liberté de culte et la liberté d’inculquer des convictions religieuses, à condition toutefois que cela ne s’accompagne pas d’altérations physiques du corps de l’enfant, car ces marques seront indélébiles, sans compter qu’un grand nombre de ces pratiques entraînent des séquelles psychiques, voire psychiatriques, contre lesquelles l’enfant n’a pu se défendre.

Quels que soient les conflits qui peuvent exister en droit, l’intérêt de l’enfant doit toujours primer.

M. KOLMAN (Croatie)* – Je remercie Mme Rupprecht qui a produit un rapport de la plus haute importance.

S’occuper des enfants est l’essence même de l’humanité. Ce travail long et compliqué qui consiste à protéger le bien-être de nos enfants ne s’achève que le jour où nous quittons ce monde. C’est ce qui fait de nous des êtres humains. C’est d’ailleurs une des différences essentielles entre l’homme et les autres formes de vie.

Il est par conséquent approprié qu’une institution telle que le Conseil de l'Europe s’intéresse davantage aux droits de l’enfant et à son intégrité physique. C’est une question d’autant plus importante que malheureusement l’intégrité physique des enfants est mise à mal par des coutumes, des mœurs et des traditions qui remontent à des centaines d’années, mais aussi par des modes de la société moderne. Dans tous les cas, nous devons dire que nous n’autorisons pas de tels actes et que nous nous y opposons. Il faut adopter une position extrêmement ferme pour que l’intégrité physique des enfants soit protégée dans toutes les régions du monde.

Nous sommes certainement tous d‘accord pour dire que des actes chirurgicaux accomplis par des personnes non formées, dans un environnement non stérile, avec des outils non appropriés et sans anesthésie ne correspondent à aucune de nos normes. Et pourtant c’est ce à quoi sont soumis des milliers de jeunes garçons de par le monde, qui souffrent ensuite souvent d’infections, de séquelles. Dans les cas extrêmes, ces actes se soldent même par la mort de l’enfant.

Les mutilations féminines sont également un problème très préoccupant. Ces pratiques barbares ne présentent aucun avantage sur le plan sanitaire, bien au contraire. Elles ne sont d’ailleurs pas préconisées par des écrits religieux. Et même si tel était le cas, cela ne ferait aucune différence, car elles constituent une pure et simple violation des droits humains ! Comme le souligne Mme Rupprecht à juste titre, légiférer en ce domaine devrait se faire à l’échelle internationale afin d’empêcher les parents ou les tuteurs des enfants de faire pratiquer ces mutilations sur des jeunes filles à l’extérieur de leur pays de résidence.

La question des opérations destinées à déterminer le sexe d’un enfant doit être posée. On ne peut tenir pour acquises des décisions qui exigent souvent de multiples interventions chirurgicales et des traitements hormonaux.

En conclusion, si nous devons respecter les mœurs, les coutumes et les traditions, il n’en reste pas moins que la tradition et les mœurs du Conseil de l'Europe sont les droits de l’homme et la protection desdits droits. C’est ce qui nous réunit ici. Le rapport fait toute la lumière sur des domaines où les droits humains des plus vulnérables d’entre nous sont menacés. Les questions soulevées par le rapport méritent toute notre attention et notre action.

LE PRÉSIDENT* – Mme Kapetanović, inscrite dans le débat, est absente de l’hémicycle.

M. D. DAVIES (Canada, observateur)* – Mme la rapporteure a réalisé un excellent travail, qui fait toute la lumière sur des problèmes importants au regard des droits de l’homme, à savoir les choix faits par les parents pour leurs enfants, des choix qui font courir à ces derniers un risque sanitaire. De telles pratiques sont une forme de violence à l’encontre des enfants et il est inacceptable que les enfants continuent d’en être l’objet. Il est perturbant de constater que des enfants subissent des interventions chirurgicales qui n’ont aucune valeur médicale.

Je voudrais mettre l’accent sur certaines mesures concrètes qui pourraient être prises afin de décourager, voire de prévenir des procédures non nécessaires d’un point de vue médical. Je m’inspirerai des expériences du Canada pour illustrer ce qui pourrait être entrepris.

Au Canada, la communauté médicale est consensuelle pour reconnaître qu’il n’y a aucun avantage physique ou sanitaire lié à la circoncision des garçons. Depuis 1997, le code pénal canadien indique clairement qu’un praticien ou toute autre personne qui réalise une telle opération est coupable d’un fait aggravé. De même, si un parent participe activement à cette opération en maintenant l’enfant, par exemple, ou s’il demande à une autre personne de s’acquitter de cette pratique, il peut être inculpé.

Notre code pénal érige également en infraction le fait d’envoyer un enfant de moins de 18 ans hors du Canada afin de subir une mutilation génitale.

La société des obstétriciens et des gynécologues du Canada encourage les facultés de médecine à appeler l’attention des étudiants sur les mutilations génitales. On les informe également sur la façon de traiter les patients qui ont subi ce genre d’intervention. Les médecins ont également pour obligation d’adresser un rapport aux autorités responsables du bien-être des enfants s’il leur semble qu’un enfant a fait l’objet de telles pratiques.

Nous disposons donc d’un cadre pour protéger les enfants de ces interventions dangereuses à but non médical. Et même lorsqu’il est difficile de mettre en œuvre des politiques efficaces, il n’en demeure pas moins que l’on peut faire beaucoup dès lors que l’on est animé de la volonté suffisante pour agir. Nos enfants sont les citoyens les plus vulnérables. Protéger leur intégrité physique, l’un des droits humains les plus fondamentaux, est de notre devoir. En adoptant ce rapport, nous contribuerons à la réalisation de cet objectif.

Mme MATTILA (Finlande)* – Cet excellent rapport aborde un grand nombre de questions extrêmement sensibles.

En matière de circoncision, nous avons affaire à des structures qui avancent l’intérêt de l’enfant pour justifier l’atteinte à son intégrité physique : on recourt directement à la violence. Ces structures sont difficiles à faire évoluer même si nous les condamnons sans ambages.

Le débat public ne suffit pas en tant que condamnation officielle, car il ne permet pas de révéler les vraies structures de pouvoir sous-jacentes au problème ni de les modifier. Cela dit, il ne fait aucun doute que nous devons condamner sans réserve la circoncision des garçons comme les mutilations génitales des filles, même si nous sommes confrontés à un problème caché. Il est caché, parce qu’il concerne une institution forte, l’institution parentale que, bien sûr, je n’entends pas renverser, mais que je souhaiterais faire évoluer.

Certaines personnes pensent certainement que la circoncision est bonne pour la personne sur laquelle elle est pratiquée, sans quoi leur attitude serait incompréhensible.

Le rapport aborde un autre sujet important : la déontologie médicale. Il évoque la possibilité d’une intervention du côté des professionnels de la santé et de l’aide sociale. Mais si l’on veut introduire cette pratique, elle doit recevoir l’appui de la société. Il convient de procéder de manière logique et systématique dès lors que, je le répète, ce sont des structures et des modes de pensée qu’il s’agit de transformer, à bien des échelons. Nous devrions commencer par les mots que nous employons : oublions des expressions comme « crime d’honneur » puisque le recours à la force n’a rien à voir avec l’honneur. De même, la circoncision est justifiée par l’honneur familial, mais cela autorise-t-il à parler à son propos de « violence d’honneur » ?

Comme l’a dit notre rapporteure, un enfant n’est pas un adulte en miniature mais un adulte en devenir. Voilà pourquoi ce rapport est si important et si précieux. Grâce à lui, nous pourrons bâtir un monde meilleur.

Mme GRAHAM (Norvège)* – La citation de Khalil Gibran qui ouvre le rapport nous rappelle opportunément que nos enfants ne nous appartiennent pas, qu’ils sont des personnes à part entière qui jouissent des droits de l’homme, dont le droit à l’intégrité physique. La situation actuelle nous le rappelle : comme parents et comme adultes, notre tâche première est de veiller à ce que nos enfants grandissent dans un environnement sûr, afin de devenir des membres responsables, réfléchis et productifs de la société. Comme parents, nous voulons ce qu’il y a de mieux pour nos enfants ; nous voulons les protéger de tout danger ; nous ne voulons absolument pas leur faire du mal. Mais nos bonnes intentions ne sont pas toujours sans conséquences.

Depuis 1987, les châtiments corporels sont illégaux en Norvège, qu’ils soient administrés par les parents, par les enseignants ou par d’autres adultes. Cette date n’est pas si éloignée. Mais, aujourd’hui, le fait de battre un enfant n’est pas seulement illégal : la société ne l’accepte pas. Nous savons maintenant que les châtiments corporels ne sont pas bénéfiques pour les enfants, contrairement à ce que l’on croyait auparavant. Cela montre que notre perception peut changer avec le temps. Mais les changements ne sont pas automatiques : nous avons besoin d’un leadership politique pour adopter les mesures législatives appropriées.

Nous, parents, devons avoir le courage de nous dresser contre des pratiques culturelles et religieuses bien établies. En Norvège, il existe depuis 1996 une loi contre les mutilations génitales féminines, mais des difficultés perdurent. La loi est en cours d’incorporation dans le code pénal et les sanctions encourues vont être alourdies. Le gouvernement a défini un plan d’action destiné à lutter contre les mariages forcés et les mutilations génitales féminines afin de faire œuvre de sensibilisation à tous les niveaux, des familles aux autorités. Il ressort en outre de la récente réunion des ombudsmans des pays nordiques que la circoncision des jeunes garçons constitue une violation de l’article 12 de la Convention onusienne relative aux droits de l’enfant.

Que les violations de l’intégrité physique des enfants puissent être perpétrées dans de bonnes intentions n’implique pas qu’elles soient justes. Je suis tout à fait d’accord avec la rapporteure : le moment est venu de nous pencher sur le droit de nos enfants à l’intégrité physique. Je soutiens donc son projet de résolution comme son projet de recommandation.

Pour en revenir à la citation de Khalil Gibran, vous pouvez transmettre à vos enfants tout votre amour, mais pas toutes vos pensées : ils ont droit à leur propre réflexion. Et ils doivent pouvoir se développer en jouissant de leur pleine intégrité physique.

M. G. Davies (Royaume-Uni)* – Les femmes et les jeunes filles doivent être préservées des mutilations génitales. Ce point ne saurait être négocié. L’idée d’un compromis nécessaire entre le droit de l’enfant de ne pas subir de mutilations génitales et le droit des parents et des familles à la liberté religieuse revient à mal poser l’équation. C’est du racisme, c’est du sexisme. Une telle supposition est en conflit direct avec les principes du Conseil de l’Europe – démocratie, droits de l’homme, prééminence du droit –, qui fondent l’existence de notre Organisation.

Au Royaume-Uni, les mutilations génitales féminines sont un crime et la loi devrait être appliquée avec rigueur et détermination. Or elle ne l’est pas. Les mesures prises restent inefficaces. Selon le ministère de la Justice et le département de la Santé, l’éradication systématique des mutilations génitales féminines au Royaume-Uni suppose que les communautés concernées abandonnent d’elles-mêmes ces pratiques. Mais si cela n’arrive pas, allons-nous rester sans rien faire alors que des jeunes filles subissent l’ablation du clitoris ? Certainement pas !

Le recensement établi en 2001 a révélé que 20 000 jeunes filles de moins de 15 ans étaient exposées à ce risque dans notre pays. Douze ans plus tard, personne ne sait combien sont concernées et nous ne devrions pas disposer d’un nouveau recensement avant 2014. Quelle indifférence ! Quelle indifférence de notre gouvernement à cette violation flagrante du droit fondamental de ces jeunes filles à échapper à toute mutilation génitale, à cette violence obscène ! Que fait le Gouvernement britannique à ce sujet ? Il a édité des affiches, des dépliants, entrepris de mettre au point un guide de meilleures pratiques ; il a dépensé 100 000 livres sterling, soit 10 livres sterling par victime potentielle. Les cas de mutilation génitale féminine n’ont entraîné aucune poursuite au Royaume-Uni, contre plus de cent en France.

Ceux qui usent de ces pratiques, ceux qui les encouragent, ceux qui se rendent complices de ce crime scandaleux doivent pourtant être identifiés et sanctionnés, que le crime soit commis dans un domicile privé ou à l’étranger. Mais M. Cameron semble plus intéressé par d’autres questions. Nous avons pourtant toutes les informations nécessaires : la BBC a filmé le témoignage de groupes de jeunes filles ; la police n’a pas besoin de témoignages supplémentaires pour agir. Il faut lutter contre les mutilations génitales féminines en suivant l’exemple français au lieu de détourner le regard de ces brutalités. Nous avons le devoir de protéger ces jeunes filles.

Mme MEMECAN (Turquie)* – Ma principale objection à ce rapport tient au fait qu’il donne une image sombre de la circoncision des garçons sans aucune preuve médicale ni scientifique. Notre rapporteure fait comme si la recherche avait mis au jour de nouveaux éléments qu’elle aurait été chargée de diffuser ; j’en suis très surprise. De nombreux avis médicaux recommandent pourtant la circoncision. Voilà la réalité. Nous devons recourir aux meilleurs services médicaux pour procéder à la circoncision, mais en suivant les enseignements de la science et de la médecine modernes plutôt que nos préjugés politiques ou personnels.

D’autre part, on met ici sur le même plan la circoncision et les mutilations génitales féminines, lesquelles sont absolument inacceptables. Le rapport ouvre ainsi un débat inutile et offensant qui touche aux pratiques religieuses des personnes. La circoncision est une pratique millénaire de millions de musulmans et de juifs. C’est peut-être difficile à comprendre pour les chrétiens ou les athées, mais il est totalement ridicule de proposer des alternatives à cette pratique, sans parler de son éradication ! Pour les juifs comme pour les musulmans, c’est impensable et totalement inadmissible du point de vue social et culturel. Le fait que le rapport questionne cette pratique n’est pas seulement irresponsable : cela constitue une dangereuse provocation. Mes chers collègues, allons-nous maintenant mettre en cause nos croyances et pratiques religieuses respectives ? Où nous arrêterons-nous donc ? Comparer et attaquer ainsi des pratiques religieuses, c’est s’engager sur un terrain glissant. Il faut absolument l’éviter.

Or c’est ce que nous faisons dans ce rapport : non seulement, nous faisons de la provocation, mais nous ouvrons la voie à la mise en cause de différentes pratiques religieuses qui échappent complètement à notre compétence. Cela jettera inévitablement une ombre sur la crédibilité de notre Organisation et lèsera à jamais les valeurs qu’elle veut promouvoir. Cela représente un danger, une menace pour les valeurs et les principes directeurs du Conseil de l’Europe. Notre rapporteure s’efforce de faire passer ses points de vue dans la politique européenne, après avoir échoué au Bundestag en Allemagne, que je félicite d’avoir rejeté ses propositions, mettant ainsi fin à une initiative qui était une pure provocation.

Je vous demande, mes chers collègues, de soutenir mes amendements afin d’éliminer le risque caché derrière l’aspect apparemment progressiste du texte et d’éviter les difficultés qui en résulteraient pour tous les croyants en Europe.

LE PRÉSIDENT*– Il est maintenant 17 heures.

D’autres membres de l’Assemblée désirent-ils encore participer à l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme ?... Tel n’est pas le cas.

Le scrutin est donc clos.

J’invite les scrutateurs, Mme Guzowska et M. Haupert, à bien vouloir se rendre derrière la présidence pour procéder immédiatement au dépouillement du scrutin au service de la séance.

Le résultat du scrutin sera proclamé si possible avant la fin de la présente séance.

Nous reprenons notre débat.

Mme ERKAL KARA (Turquie) – La protection de l’intégrité physique des enfants est un sujet extrêmement important. Cependant, le rapport adopte un point de vue étroit et biaisé sur la circoncision des jeunes garçons pour motif religieux. J’estime que Mme la rapporteure devrait prendre en considération les résultats des études sur les sensibilités de ses concitoyens d’origine étrangère et ne pas ignorer plusieurs recherches scientifiques qui contredisent le projet de résolution.

En effet, plusieurs médecins et organisations sanitaires comme l’Académie américaine de pédiatrie et l’Organisation mondiale de la santé révèlent les avantages de la circoncision, dont la prévention contre les infections, la contamination par le sida, la transmission de certaines infections sexuellement transmissibles et le cancer pénien. De plus, lorsque la circoncision est pratiquée dans de bonnes conditions sanitaires, elle ne donne lieu à aucune conséquence néfaste à court ou long terme sur la santé et le bien-être de jeunes garçons et des hommes. Bien au contraire, dans certains cas, la circoncision des bébés est médicalement recommandée par des spécialistes.

Comment voulez-vous qu’on pose la question à un bébé ? On ne peut pas plus lui demander s’il veut être baptisé ou non. À cet égard, je voudrais vous rappeler la déclaration des Nations Unies contre la discrimination religieuse, d’après laquelle les parents ont le droit d’élever leurs enfants selon leurs convictions.

Par ailleurs, la circoncision des jeunes garçons est pratiquée dans plusieurs pays dans un cadre religieux et sociologique. Elle est une pratique importante pour des millions de musulmans et de juifs qui vivent en Europe. Le paragraphe 7.7 du projet de résolution peut enclencher un processus aboutissant à l’interdiction de la circoncision des jeunes garçons, considérée comme un crime. Une telle conséquence entraînerait le recours à des solutions illégales et des opérations réalisées dans de conditions sanitaires inacceptables, et viendrait ajouter un débat politique et discriminatoire aux problèmes d’intégration des immigrés en Europe où, vous le savez, la xénophobie ne cesse de monter.

J’estime qu’un sujet sanitaire et religieux, largement accepté par plusieurs sociétés, ne devrait pas être instrumentalisé par des décisions politiques. J’invite donc notre Assemblée à modifier le paragraphe 7.7 ou à rejeter le projet de résolution.

LE PRÉSIDENT* – M. Leyden, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme KAZAKOVA (Fédération de Russie)* – Je voudrais remercier très chaleureusement la rapporteure d’avoir préparé ce document très complet et volumineux. Le thème de l’intégrité physique et psychologique de l’enfant mérite en effet d’être débattu dans les murs du Conseil de l’Europe et le fait que nous en discutions démontre, une fois encore, que nous sommes très attentifs à la situation des personnes particulièrement vulnérables que sont les enfants.

L’adoption du projet de résolution et du projet de recommandation qui nous sont proposés aujourd’hui permettra certes d’exercer une influence sur la question, mais ne règlera malheureusement pas tous les problèmes qui menacent les enfants. N’avez-vous pas le sentiment, ma chère collègue, qu’examiner la question de l’intégrité physique de l’enfant nécessiterait de poursuivre le travail et d’élargir la problématique ? Car, outre l’étude approfondie des questions telles que l’intersexualité et des interventions médicales dont il est question dans le rapport, il m’apparaît nécessaire d’étudier les phénomènes d’agression chez l’adolescent, les châtiments familiaux injustifiés, les actes cruels des parents à l’égard des enfants dans les familles d’accueil et autres.

Il est question dans le rapport de la nécessité de voir les enfants participer aux décisions qui les concernent touchant à leur intégrité physique. A mon avis, parallèlement à un travail d’information auprès des parents par des spécialistes qui s’occupent de ces questions, il serait intéressant de faire connaître aux enfants leurs droits au moyen de matériaux adaptés à leur âge, afin de susciter une prise de conscience.

En Russie, la loi qui protège les enfants contre les manifestations de pornographie ou contre la drogue, qui a souvent été critiquée, très injustement, y compris au Conseil de l’Europe, prémunit les enfants contre les actes qui pourraient compromettre leur intégrité physique. Nous avons aussi adopté une stratégie nationale de protection de l’enfant qui porte notamment sur les conditions sociales de vie. Elle se fonde sur les recommandations du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et sur les droits de l’enfant en matière sociale. C’est un document très important pour prolonger le débat de ce jour. Je considère que ce thème est plus large que les aspects traités dans le rapport dont nous discutons aujourd’hui.

L’essentiel est de constater que, dans la lutte pour défendre les intérêts et droits des enfants, nous sommes unis. Nous ne sommes pas indifférents, et ce, quelle que soit notre nationalité, notre appartenance politique, notre statut social ou notre âge. Je conclurai donc en citant Leonid Leonov, un écrivain russe, qui a dit que tous les enfants du monde pleurent dans la même langue. Nous devons nous efforcer de réduire au minimum les raisons de ces larmes.

LE PRÉSIDENT* – Mme El Ouafi, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

Mme AL-ASTAL (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Je remercie Mme la rapporteure pour son excellent rapport qui met l’accent sur des questions très importantes, relatives à la santé et au bien-être physique et psychique des enfants.

À titre personnel, je suis favorable aux recommandations et aux conclusions contenues dans le rapport, notamment pour ce qui est de la lutte contre les pratiques les plus dangereuses, en particulier les mutilations génitales féminines. Essayons de mettre en place les mécanismes permettant de lutter contre ces pratiques.

Les mutilations génitales pratiquées sur les fillettes âgées d’un à quinze ans ont des conséquences physiques et psychologiques extrêmement graves. Les complications sont nombreuses : saignements, infections, voire la mort pour certaines d’entre elles. Elles sont chroniques et entraînent parfois la perte de la libido. Des conséquences sur la santé se font sentir pendant toute la vie. Il s’agit d’une véritable violation du droit de la petite fille et de la femme.

Nous devons absolument établir la distinction entre les pratiques qui portent atteinte à l’intégrité physique des enfants et les autres. La circoncision représente un avantage médical certain, alors que la mutilation génitale féminine a pour but de contrôler le comportement sexuel des femmes toute leur vie durant.

Un travail de sensibilisation de l’opinion publique contre les mutilations génitales féminines est indispensable, en particulier dans les communautés où ces pratiques sont les plus répandues. Les parents doivent être informés des risques liés à ces pratiques et sensibilisés au droit de l’enfant à l’intégrité physique. Nous devons les aider à refuser les pratiques dangereuses pour leurs enfants.

Mme GASTÉLUM BAJO (Mexique, observateur)* – Je tiens à féliciter la rapporteure pour ce travail, qui appelle les pays à respecter les droits de l’homme dans toutes leurs dimensions. Le droit à l’intégrité physique des enfants est un droit de l’homme fondamental, qui repose sur le respect même de la vie.

En dépit des mesures législatives et politiques adoptées par les Etats membres du Conseil de l’Europe afin de protéger les enfants contre les violences physiques, psychologiques et sexuelles, de nombreux cas d’atteinte à l’intégrité physique des enfants sont encore constatés. Ils concernent notamment des mutilations génitales féminines, des circoncisions, des opérations pratiquées sur les enfants intersexuels, des opérations chirurgicales cosmétiques, des piercings et des tatouages.

Nous soutenons le travail accompli par le Conseil de l’Europe, qui veut promouvoir activement la défense des droits de l’enfant dans le cadre de la nouvelle stratégie au-delà de 2015.

Le Sénat mexicain s’est engagé dans la signature de la Convention 138 de l’Organisation internationale du travail. Par ailleurs, le Mexique a signé la Convention de Lanzarote.

Il nous reste encore beaucoup à faire et nous devons avancer vers l’adoption de mesures concrètes afin de garantir le droit à l’intégrité physique des enfants partout dans le monde.

LE PRÉSIDENT* – M. Yatim, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle à présent la réplique de la commission. Madame la rapporteure, vous disposez de deux minutes.

Mme RUPPRECHT (Allemagne), rapporteure* – Je voudrais clarifier une nouvelle fois un point : il ne s’agit pas, avec ce rapport, de tenter de nous immiscer dans les libertés religieuses. Lisez l’article 9 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la liberté de conscience et la liberté religieuse. Il précise clairement, dans son dernier alinéa, que la liberté religieuse trouve ses limites là où la santé d’autrui est affectée. Or « autrui », ce sont aussi des enfants !

Nous devons toujours nous interroger sur les conséquences pour nos enfants et leur santé de nos pratiques culturelles ou religieuses. Je vous invite à réfléchir à cette question. Je suis membre de cette Assemblée depuis treize ans. Je crois qu’il est temps d’affirmer notre cohésion lorsqu’il s’agit de défendre les droits des enfants, comme nous défendons la liberté religieuse des adultes. Mais quand la santé est en cause, le droit des enfants prime.

Je me suis réjouie, en écoutant les différentes interventions, de constater que différents pays membres du Conseil de l’Europe ont ouvert le débat sur le droit à l’intégrité physique des enfants.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable – Mes chers collègues, j’aimerais tout d’abord m’associer, au nom de la commission, aux remerciements adressés à notre rapporteure, qui a mis au service de la défense des enfants et de notre Assemblée tout entière, non seulement son cœur, ses compétences, mais aussi toutes ses connaissances et son engagement. Je lui en suis très reconnaissante.

Je voudrais dire également que les débats au sein de la commission sur ce rapport très délicat se sont toujours déroulés dans le plus grand calme et dans le respect de tous les points de vue, contrairement à ce que certaines interventions ont laissé entendre.

Ce rapport, loin de constituer une attaque contre telle ou telle religion, est très cohérent : il place l’intérêt supérieur de l’enfant au centre de nos préoccupations. Certes, certains points n’ont pas été abordés, mais il n’était pas possible d’évoquer toutes les pratiques nuisant au développement de l’enfant. C’est pourquoi le rapport s’est concentré sur les mutilations génitales féminines, la circoncision de jeunes garçons pour des motifs religieux, les interventions médicales à un âge précoce sur les enfants intersexués, les piercings, les tatouages et les interventions de chirurgie plastique pratiquées sur des enfants.

La circoncision représente-t-elle réellement un avantage médical ? Je vous laisse prendre connaissance des paragraphes 18 à 34 du rapport. Une intervention chirurgicale n’est pas toujours indiquée et sans risque pour un enfant.

Mes chers collègues, c’est pour le droit des enfants à l’intégrité physique que nous nous engageons aujourd’hui. Je vous invite à voter le projet de résolution, largement soutenu par la commission.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission des questions sociales a présenté un projet de résolution sur lequel sept amendements ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel aucun amendement n’a été déposé.

Sur le projet de résolution, la présidente de la commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement. L’amendement 2 a été adopté à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente ?

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 2, déposé par la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 7.5.3 par le paragraphe suivant : « entreprendre des recherches complémentaires afin d'augmenter les connaissances de la situation spécifique des personnes intersexuées, s'assurer que personne ne soit soumis pendant l'enfance à des traitements médicaux ou chirurgicaux cosmétiques et non cruciaux pour la santé, garantir intégrité corporelle, autonomie et auto-détermination aux personnes concernées, et fournir des conseils et un soutien adéquats aux familles ayant des enfants intersexués. »

En l’absence d’objections, cet amendement est déclaré adopté définitivement.

LE PRÉSIDENT* – Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

L’amendement 5, déposé par Mme Memecan, M. Dişli, Mme Erkal Kara, MM. Ghiletchi, Hajiyev, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 2, deuxième phrase, à supprimer les mots « la circoncision de jeunes garçons pour des motifs religieux ».

Mme MEMECAN (Turquie)* – Dans ce paragraphe, la circoncision de jeunes garçons est évoquée au même titre que les mutilations génitales féminines et les interventions médicales à un âge précoce sur des enfants intersexués, qui portent incontestablement atteinte à la santé des enfants, contrairement à la circoncision. Je demande donc qu’elle ne soit pas mentionnée ici.

Mme RUPPRECHT, rapporteure * - Des enfants sont présents dans les tribunes, qui nous écoutent. Ils pourraient nous parler de leur propre situation. Mais l’affaire est désormais close.

Je suis contre cet amendement, parce que l’article 24.3 de la Convention internationale des droits de l’enfant stipule que « les Etats parties prennent toutes les mesures efficaces appropriées en vue d’abolir les pratiques traditionnelles préjudiciables à la santé des enfants. » « Préjudiciables », cela signifie irréversible, durable et avec de lourdes séquelles.

Par ailleurs, l’Association américaine de pédiatrie, ainsi que 38 professeurs européens et canadiens ont également pris position sur la question.

Mme MAURY PASQUIER, présidente de la commission – Avis défavorable.

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L’amendement 5 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement 4, déposé par Mme Memecan, M. Dişli, Mme Erkal Kara, M. Hajiyev, Mme Kapetanović, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 7.4.

Mme MEMECAN (Turquie)* - Ce paragraphe demande l’ouverture d’un débat scientifique sur les valeurs religieuses. Une telle suggestion est très dangereuse et tout à fait inappropriée. Il s’agit d’une provocation. Nos pratiques culturelles et religieuses ne posent pas problème et il n’est nul besoin d’un tel débat.

Mme RUPPRECHT, rapporteure* - Supprimer ce paragraphe aurait pour effet de nous mettre en contradiction avec d’autres textes adoptés par notre Assemblée par lesquels nous demandons la promotion d’un dialogue interculturel et interreligieux dans le but de mieux vivre ensemble. L’adoption d’un tel amendement n’aurait donc pas de sens.

Mme MAURY PASQUIER, présidente de la commission – Avis défavorable.

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L’amendement 4 n’est pas adopté

LE PRÉSIDENT* - L’amendement 1, déposé par MM. G. Davies, Benton, Lord Anderson, M. Liddell-Grainger, Sir Alan Meale, MM. Crausby, Connarty, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 7.4, à remplacer les mots : « les limites à ne pas dépasser en ce qui concerne les atteintes à l’intégrité physique des enfants compte tenu des normes des droits humains, et à trouver un équilibre entre les droits et l’intérêt supérieur de l’enfant d’une part et les droits et les libertés religieuses des parents et des familles d’autre part », par les mots suivants : « le droit des enfants à la protection contre les violations de leur intégrité physique compte tenu des normes des droits humains ; »

M. G. DAVIES (Royaume-Uni)* - Il ne peut y avoir d’équilibre entre les droits et l’intérêt supérieur de l’enfant et les droits et les libertés religieuses des parents et des familles si la religion de ces derniers promeut, notamment, les mutilations génitales féminines.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* - La rédaction initiale du paragraphe 7.4 contribue à un certain équilibre et doit être maintenue. Comment pourrions-nous parler au nom des enfants sans tenir compte de ce que pensent les parents ? Pour le sort de cette résolution, il nous paraît donc très important de rejeter cet amendement.

Mme MAURY PASQUIER, présidente de la commission – Avis favorable.

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L’amendement 1 est adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement 6, déposé par Mme Memecan, M. Dişli, Mme Erkal Kara, MM. Ghiletchi, Hajiyev, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 7.5.2, à supprimer les mots « telles que la circoncision médicalement non justifiées de jeunes garçons ».

Mme MEMECAN (Turquie)* - Il n’est pas vrai que la circoncision est « médicalement non justifiée » : de nombreux médecins la recommandent. C’est également le cas, notamment, de l’Académie américaine de pédiatrie et de l’OMS.

Mme RUPPRECHT, rapporteure* - Vous faites allusion à la position de l’Académie américaine de pédiatrie, mais comme je l’ai déjà dit, celle-ci l’a révisée en avril et émis un avis exactement contraire. L’OMS, quant à elle, a bien constaté que la circoncision pouvait contribuer à protéger les adultes contre certaines maladies, mais cet avis ne concerne que des adultes sexuellement actifs. En outre, il a entraîné un effet inverse de celui escompté : les hommes concernés, se croyant protégés, ont été en fait infectés davantage. Il n’y a par ailleurs jamais eu de recommandation s’agissant des enfants.

Mme MAURY PASQUIER, présidente de la commission – Avis défavorable.

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L’amendement 6 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement 3, déposé par Mme Memecan, M. Dişli, Mme Erkal Kara, M. Hajiyev, Mme Kapetanović, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 7.6.

Mme MEMECAN (Turquie)* - Ce paragraphe incite à engager un débat scientifique sur les valeurs et pratiques traditionnelles et religieuses. C’est extrêmement dangereux. Nous ne devons pas permettre une telle provocation.

Mme RUPPRECHT, rapporteure* - Le paragraphe évoque un dialogue interdisciplinaire, c’est-à-dire impliquant des représentants de différents milieux professionnels. Il ne s’agit pas de mettre en cause la religion, mais de discuter des pratiques. Le supprimer reviendrait à ne pas tenir compte de l’avis des pédiatres ni du contenu des documents adoptés par le Conseil de l’Europe. Même en matière de pratiques religieuses, nous ne sommes pas dans le vide juridique, mais disposons d’une base solide : les constitutions et les lois de nos pays. La liberté religieuse doit être mesurée à cette aune.

Mme MAURY PASQUIER, présidente de la commission – Avis défavorable.

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L’amendement 3 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* - L’amendement 7, déposé par Mme Memecan, M. Dişli, Mme Erkal Kara, MM. Ghiletchi, Hajiyev, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 7.7, à supprimer les mots « et à adopter des dispositions juridiques spécifiques pour que certaines interventions et pratiques ne soient pas réalisées avant qu’un enfant soit en âge d’être consulté. »

Mme MEMECAN (Turquie)* - Ce paragraphe est encore plus dangereux, car il tend à criminaliser une pratique, la circoncision des jeunes garçons, adoptée par toutes les familles juives ou musulmanes. Ces dernières devraient donc se rendre dans des pays où n’existe pas une telle législation pour agir conformément à leurs convictions. On assisterait ainsi à un « tourisme de la circoncision » comme il existe un « tourisme de l’avortement ». Je ne pense pas que ce soit l’objectif visé, et il convient donc de supprimer cette partie du texte.

Mme RUPPRECHT (Allemagne), rapporteure* – Dans ce paragraphe, nous demandons uniquement que les enfants soient consultés, conformément à la Convention des Nations Unies. Il faut s’informer de leur volonté. Il ne s’agit nullement de restreindre la liberté des parents de donner à leurs enfants une éducation religieuse mais de rappeler que celle-ci est limitée par le droit des enfants à l’intégrité physique.

Je suis hostile à cet amendement.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission* – La commission est également contre.

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L’amendement 7 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc.13927, tel qu’il a été amendé.

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Le projet de résolution, amendé, est adopté (77 voix pour, 19 contre et 12 abstentions).

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc.13297, sur lequel aucun amendement n’a été déposé. Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

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Le projet de recommandation est adopté (78 voix pour, 13 contre et 15 abstentions).

4. Evolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (juin 2012-septembre 2013)

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Andres Herkel, au nom de la commission de suivi, sur « L’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (juin 2012 – septembre 2013) » (Doc.13304).

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 35, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. HERKEL (Estonie), rapporteur de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi)* – Permettez-moi tout d’abord de remercier tous ceux qui participent aux activités de suivi ainsi que les autres parties prenantes. Un recueil extrêmement volumineux montre tout ce que nous avons fait ces dernières années. Cela ne serait pas possible sans la contribution de nombre d’entre vous.

Je remercie le secrétariat, tous les rapporteurs de suivi, les membres de la commission et bien entendu les représentants des pays concernés. Ce n’est pas un travail aisé et il n’est pas facile d’être l’objet d’un suivi. Je suis persuadé que c’est une procédure bénéfique pour les pays concernés. Elle permet d’améliorer leur fonctionnement et la démocratie. Nous nous fondons sur la Convention de Venise et d’autres textes.

Un rapport annuel fournit un aperçu de toutes les activités de la commission. Il porte sur les pays qui sont toujours soumis à une procédure et sur ceux engagés dans un dialogue post-suivi, mais pas uniquement.

Le rapport d’activité mentionne également les 33 autres pays qui font l’objet d’autres mécanismes de suivi du Conseil de l’Europe. Dans l’exposé des motifs vous trouverez quelque chose sur votre propre pays : aussi bien les résultats des activités de la commission que ceux du Commissaire aux droits de l’homme ou d’autres instances.

Je présente mes excuses à ceux qui pensaient possible, lors de la dernière phase, de modifier l’exposé des motifs. Ce n’est jamais possible. Tout ce qui y figure date du 13 septembre, dernier délai pour rendre public le rapport qui se fonde sur toutes les activités du Conseil de l’Europe, y compris durant les trois derniers mois. Si des informations nouvelles ne sont pas incluses, c’est parce que nous arrêtons l’exposé des motifs plus tôt.

Un chapitre important reprend les propositions relatives à l’évolution de la procédure de suivi, faites par de nombreuses délégations, à l’initiative du Président de l’Assemblée, que nous remercions.

L’une des propositions que l’on retrouve dans mon projet de résolution a pour objet la création d’un groupe de travail au sein de la commission de suivi, qui réfléchirait aux options possibles et traiterait les difficultés d’ordre pratique que nous avons pu rencontrer dans notre travail.

Je souligne qu’outre un projet de résolution, il y a un projet de recommandation qui fait référence à la résolution et évoque la coopération avec le Comité des Ministres. Il s’agirait d’inscrire systématiquement tous les futurs rapports de suivi de l’Assemblée parlementaire à l’ordre du jour du Comité des Ministres.

Nous avons longuement discuté des moyens d’accroître notre influence et celle des rapports, qui sont de grande qualité. Comment mieux coopérer avec le Comité des Ministres ? Nous en avons discuté au sein du Bureau, en séance plénière et en commission. Faisons preuve de réalisme en adoptant – c’est la seule manière de le faire – une recommandation qui permette d’envoyer les rapports de suivi au Comité des Ministres. Premier avantage, cela permettrait d’améliorer la coopération. Deuxième avantage, cela accroîtrait notre visibilité. Troisième avantage, il ne serait plus possible de dire, comme c’était le cas il y a un an, qu’un traitement inégal est appliqué aux différents pays. Avec cette solution, tous les pays seraient traités de la même manière.

M. Mignon, Président de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT – Il vous restera six minutes trente de temps de parole, Monsieur le rapporteur.

M. VILLUMSEN (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je remercie le rapporteur. Surveiller le respect des droits de l’homme dans les Etats membres est absolument vital pour notre Assemblée. Ce rapport traite donc d’une question extrêmement importante, mais, pour être tout à fait honnête, il n’est pas entièrement satisfaisant. Plusieurs rapports et résolutions de l’Assemblée sont résumés et combinés avec des conclusions portant sur la situation dans certains Etats membres qui ne font pas l’objet d’une procédure de suivi. D’autre part, le rapport comporte des propositions pour l’avenir alors que les organes du Conseil de l’Europe sont en train d’évaluer leurs mécanismes de suivi. Bref, tout cela fait que la résolution et la recommandation ne sont pas exhaustives et qu’elles ne sont pas équilibrées. En outre, certaines conclusions me paraissent prématurées.

À la lecture du rapport, il est clair que le débat sur la façon d’assurer un suivi favorable au respect des droits de l’homme et non à des inclinations politiques risque de perdurer. Nous avons constaté, au cours de la dernière session, comment la Hongrie a pu échapper à une procédure de suivi, malgré des violations clairement constatées des droits de l’homme et des droits fondamentaux. Voilà bien tout le problème. Au nom du Groupe pour la gauche unitaire européenne, je veux souligner qu’il est nécessaire, pour notre Assemblée, d’oublier les points de vue politiques et d’insister sur le respect des droits de l’homme, que le pays considéré soit membre de l’Union européenne ou non et quelle que soit la couleur politique de son gouvernement. Malheureusement, nous n’en sommes pas là, et cela n’a pas toujours été le cas.

M. ALLAVENA (Monaco), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen – Au nom du Groupe du Parti populaire européen, je veux d’abord saluer le travail du rapporteur, mais le saluer au-delà des usages convenus, parce que le rapport qu’il nous a adressé est, je crois, exceptionnel, par sa richesse, par sa précision, par son analyse détaillée et objective, et il aboutit à des préconisations tout à fait claires, qui répondent au constat du Président Jean-Claude Mignon selon lequel il était temps de faire un bilan de ces procédures et de les faire évoluer.

C’est en me fondant sur ma double expérience, acquise lors de la procédure de suivi et de post-suivi de mon pays depuis 2004, puis en participant, depuis quelques mois, aux travaux de la commission de suivi, que je veux faire quelques commentaires.

Il est clair que tout n’est pas parfait. Il est clair que des évolutions sont souhaitables, mais préconiser, comme certains l’ont fait, de supprimer cette procédure ou d’en changer totalement l’esprit, en renonçant par exemple à l’approche par pays, est un non-sens. Le rapport le montre parfaitement.

J’ai souvent entendu que la non-interruption ou, pire, la réouverture d’une procédure était vécue comme un examen, une humiliation, clairement une situation négative. Ce n’est certainement pas l’objectif de la procédure, mais c’est ainsi qu’elle est souvent perçue. La procédure devrait être une aide, un échange, un dialogue, c’est évident, mais, faute de bonne volonté de certains pays, faute de moyens supplémentaires donnés aux rapporteurs, notamment pour leur permettre des visites plus fréquentes et un suivi plus rapproché, on aura du mal à faire changer cette image négative. Pourtant, cela permettrait aussi, sans doute, de répondre à ceux qui jugent les procédures très longues. Et si l’on donnait à la méthode actuelle, assez informelle et peu contraignante, un cadre un peu plus formel, des objectifs plus précis, un planning, on améliorerait certainement les choses.

Enfin, une meilleure acceptation passe par une plus grande équité. Votre rapport, Monsieur Herkel, met en évidence que de nombreux pays souvent présentés comme des modèles de démocratie ou de respect des droits de l’homme refusent de signer tel ou tel texte. Il ne s’agit pas, à l’évidence, de demander l’ouverture de nouvelles procédures à leur endroit mais, à l’inverse, ce refus de signature justifie, dans d’autres pays, la poursuite des procédures. Deux poids, deux mesures, ce n’est jamais une très bonne situation.

C’est aussi au nom de l’équité qu’il faudrait arriver à mettre en place des procédures différentes lorsque les cas sont très différents. Peut-être même faudrait-il leur donner des noms différents. On ne peut pas traiter à l’identique, mettre dans le même sac, des pays qui vivent des atteintes graves aux droits de l’homme, des atteintes permanentes à la démocratie, et d’autres où tout n’est pas parfait, où on peut espérer mieux, mais où la situation n’a rien de dramatique.

Tout cela, votre rapport le prend en compte, formellement ou implicitement, tout comme la suggestion d’un échange plus étroit entre l’Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres. Clairement, le but n’est pas de renoncer aux prérogatives de l’Assemblée, il est de créer des passerelles entre les deux structures, pour une meilleure efficacité, une meilleure compréhension, une meilleure acceptation des procédures.

Je dois à l’honnêteté de cet exposé de dire, sur ce point, que le paragraphe 3 du projet de recommandation a fait l’objet de discussions au sein du Groupe du Parti populaire européen et que les avis étaient partagés, quoique globalement très favorables.

Pour toutes ces raisons, il me semble évident que l’Assemblée doit approuver sans réserves le rapport de M. Herkel.

5. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie
(résultats du scrutin)

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, j’interromps un moment le débat pour vous donner les résultats de l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie.

Nombre de votants : 151

Bulletins blancs ou nuls : 2

Suffrages exprimés : 149

Majorité absolue : 75

Les suffrages ont été exprimés comme suit :

- Mme Iulia Antoanella Motoc, 132 voix

- M. Tudor Pantîru, 10 voix

- M. Ioan Florin Streteanu, 7 voix

Mme Motoc ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés, je la proclame juge à la Cour européenne des droits de l’homme, au titre de la Roumanie. Son mandat de 9 ans commence à compter du 17 décembre 2013 ou, dans tous les cas, au plus tard, trois mois à compter de son élection.

Félicitations, donc, à Mme Motoc !

6. L’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (juin 2012- septembre 2013) (suite)

LE PRÉSIDENT – Nous reprenons la discussion générale sur l’évolution de la procédure de suivi.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Au nom de mon groupe, je veux féliciter M. Herkel pour son rapport qui montre combien il mène bien les affaires et activités de la commission de suivi. On l’a déjà dit, et il faut le rappeler, le suivi est une activité très importante du Conseil de l’Europe. Parfois, nous devons être un peu plus honnêtes et reconnaître qu’il faut éviter qu’un post-suivi dure trop longtemps. Si l’on n’a pas obtenu le résultat escompté au bout de quatre ans de post-suivi, il faudrait pouvoir revenir au suivi ou changer d’orientation. Notre Conseil de l’Europe ne doit pas être une société à deux classes, partagée entre ceux qui font le suivi et ceux qui sont l’objet du suivi. Voilà pourquoi la recommandation de nous soumettre tous au suivi est importante.

Le rapport mentionne l’ouverture d’une procédure à l’encontre de la Hongrie, pour des raisons graves. Une tentative a échoué, et c’est bien malheureux.

Le rapport montre qu’il existe des problèmes sérieux dans tous nos Etats membres lorsque des conventions importantes ne sont pas ratifiées. Il est donc important que tout le monde soit soumis à un suivi.

La mauvaise intégration des Roms est une honte, tant sur le plan juridique que sur le plan social. La situation des réfugiés, des demandeurs d’asile, les violations des droits de l’homme, le refus des droits, la situation des minorités nationales, notamment quant à leur liberté d’utiliser leur langue, la mauvaise mise en œuvre de la Charte sociale européenne révisée que beaucoup n’ont pas ratifiée, la lutte contre le racisme, contre l’intolérance et la discrimination, tout cela exige, dans tous les Etats membres, un suivi permanent.

La mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, la lutte contre la corruption, contre la traite des êtres humains ou contre le blanchiment d’argent sont des problèmes qui se posent partout, dans tous nos Etats membres. Voilà pourquoi tous doivent être soumis à une procédure de suivi.

Le rapport montre qu’il n’y a pas deux catégories d’Etats, ceux qui font le suivi et ceux qui font l’objet du suivi.

Les conflits gelés vont, si l’on peut dire, fêter leurs vingt ans. Au cours de la réunion de notre commission à Tallinn, nous avons assisté à un geste très fort de notre président qui doit nous aider à ne pas oublier ces conflits gelés.

Mme REPS (Estonie), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – J’aimerais avant tout féliciter M. Herkel pour l’excellent travail qu’il a effectué tout en présidant la commission de suivi.

Bien des aspects de ce rapport très intéressant ont été évoqués, et sans y revenir, je soulignerai l’importance de procéder au suivi de tous les pays pour que l’on sache très exactement ce qu’il en est des conventions, des obligations et des problèmes qui peuvent subsister.

Je m’attacherai plus particulièrement à un aspect qui mérite de retenir notre attention également par le biais des amendements, c’est-à-dire l’avenir du suivi.

En tant qu’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, quelle attention souhaitons-nous consacrer au suivi et quel contenu voulons-nous donner à cette procédure ? Certaines voix se sont élevées pour réclamer la révision de ce suivi, l’envisager sous un autre angle. D’ailleurs, cette proposition de résolution offre une possibilité en ce sens, que les libéraux appuient sans réserve, en impliquant davantage le Comité des Ministres.

Il est vrai que certains rapports de suivi ont été transmis au Comité des Ministres, et ce dernier s’est impliqué dans certains débats. Certains rapporteurs ont même été invités à s’exprimer devant le Comité des Ministres.

Le rapport suggère que tous les rapports de suivi soient mis sur un pied d’égalité et qu’ils soient donc tous présentés au Comité des Ministres pour débat. Les rapporteurs pourront ainsi évoquer les succès, les échecs et les difficultés auxquelles ils se sont peut-être heurtés aux ambassadeurs ou aux ministres.

Je vous demande à tous d’appuyer ce rapport dans sa version actuelle et non pas amendée.

M. BINLEY (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe démocrate européen* – J’aimerais remercier M. Herkel, car c’était une tâche difficile et son rapport est très complet et bien structuré.

Nous sommes favorables à l’amendement 10 qui propose de supprimer le paragraphe 3 du projet de recommandation. En effet, nous nous interrogeons sur ce qui est prévu dans la troisième partie de la recommandation. N’allons-nous pas renoncer à des pouvoirs importants pour l’Assemblée ? Nous nous demandons si nous n’allons pas réduire le rôle de l’Assemblée en transférant une de nos responsabilités au Comité des Ministres.

Je crains en effet qu’en préconisant que tous nos rapports soient transmis au Comité des Ministres, nous ne renoncions à une responsabilité. Je ne suis pas sûr qu’il en serait ainsi, mais si cette possibilité existe, nous devons y accorder la plus grande attention et bien réfléchir.

Je puis cependant parfaitement appuyer les mesures visant à renforcer l’efficacité et la célérité de notre action. Je crois qu’il est bon de temps à autre d’utiliser les pouvoirs du Comité des Ministres, mais je voudrais que l’Assemblée conserve cette responsabilité pour ne pas devenir l’organe subsidiaire du Comité des Ministres.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Je souhaite à mon tour remercier le rapporteur pour son excellent travail.

Ce rapport est un très bon guide pour tous les membres de l’Assemblée parlementaire qui, bien souvent, trop immergés dans la politique nationale, oublient ce qui se passe ici même une fois rentrés chez eux.

Le rapport démontre qu’aucun pays du Conseil de l’Europe ne peut se targuer de n’avoir aucun problème. Il nous permet également de voir que tous les Etats membres sont traités de manière égale.

Je m’opposerai maintenant au propos de M. Binley, car je pense que le projet de recommandation et son troisième paragraphe sont extrêmement utiles. A l’heure actuelle, nombre d’organisations sont en concurrence : elles veulent développer leur système de suivi alors même que nous voulons renforcer le nôtre, qui permet un suivi rigoureux et dont la méthodologie est efficace. C’est pourquoi je pense qu’envoyer l’ensemble de nos rapports de suivi au Comité des Ministres renforcerait notre procédure. C’est ainsi que je voudrais que l’Assemblée rejette l’amendement 10 et soutienne le projet de résolution tel que présenté par le rapporteur.

Ce rapport nous montre par ailleurs que l’approche est ciblée selon les pays, car ils sont tous différents. Ceux qui font l’objet d’une procédure de suivi spécifique bénéficient de cette procédure et le bon fonctionnement de leurs institutions démocratiques est examiné. Contrairement donc à ce qui a été dit, je ne pense pas que le fait que chaque pays fasse l’objet d’un rapport spécifique serait susceptible de gêner en quoi que ce soit l’Assemblée.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je félicite très chaleureusement notre rapporteur. Son travail est de grande ampleur. Il a quasiment produit un manuel du travail de suivi, reprenant l’ensemble des tâches de contrôle en matière de primauté du droit, des droits de l’homme et de la défense de la démocratie dans les pays membres du Conseil de l'Europe.

Je reviendrai sur plusieurs points.

Tout d’abord, il a été souhaité un traitement équitable de l’ensemble des pays. C’est la raison pour laquelle le rapport fait une référence exhaustive, non pas seulement aux pays qui font l’objet d’une procédure de suivi, mais à tous les pays du Conseil de l'Europe. Il convient d’établir une distinction claire entre les pays qui font l’objet d’une procédure de suivi de ceux qui sont engagés dans un dialogue de post-suivi. La non-ratification des conventions est encore un autre cas. Les situations sont donc distinctes selon les pays, et c’est ce qu’indique le rapport.

Par conséquent, un traitement équilibré a été souhaité, il faut être conscient que le rapport est plus ambitieux que son titre même. C’est ainsi qu’il énumère de façon exhaustive les cas pour lesquels le suivi a été efficace. Il indique dans quelle mesure les rapports de suivi ont permis dans certaines situations concrètes d’améliorer des points essentiels, tels que l’indépendance du système judiciaire, la lutte contre la corruption et le crime organisé, le respect des droits des minorités et des réfugiés, de la liberté d’expression et des médias, le fonctionnement du système parlementaire, le code pénal.

J’évoquerai ensuite la question des relations avec le Comité des Ministres. Pour ma part, je suis favorable à ce que chaque rapport de suivi soit examiné par le Comité des Ministres et qu’un débat soit organisé. Mais il faudrait que ces rapports soient transmis à l’ensemble des organes du Conseil de l'Europe car il nous faut impliquer davantage ses autres organes dans cette tâche réalisée par l’Assemblée parlementaire. Sans doute conviendrait-il de réfléchir aux canaux de communication que nous pourrions établir avec d’autres organisations internationales – je pense à l’Union européenne ou aux Nations Unies – afin que ces rapports reçoivent un plus large écho et soient donc ainsi plus efficaces.

Enfin, j’évoquerai la diffusion. Le travail accompli par l’Assemblée parlementaire en matière de suivi n’est pas connu. Si des auditions sont particulièrement utiles, encore faudrait-il qu’elles reçoivent une publicité plus large des autres pays.

LE PRÉSIDENT – M. Ivanovski, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. ZOURABIAN (Arménie)* – J’ai lu très attentivement le projet de résolution, mais avec tout le respect que je vous dois, Monsieur Herkel, je m’étonne que le rapport sur l’Arménie soit à ce point erroné.

Le système électoral arménien a été transformé en une véritable machine de falsifications, de corruptions, d’intimidations des électeurs et des commissions électorales, assurant qu’aucun changement de pouvoir ne pourra intervenir par la voie des élections.

Des dizaines de milliers de personnes pourraient manifester pour protester contre ces graves falsifications. Ce fut d’ailleurs le cas après les élections présidentielles en 2003, en 2008, en 2013.

La télévision fait l’objet de mesures de censure, elle est sous le contrôle strict de l’administration présidentielle et au lieu d’augmenter le nombre de chaînes de télévision pour assurer le pluralisme, la réforme de la numérisation a conduit à des restrictions plus nombreuses encore, voire à des fermetures de chaînes.

Après les tueries du 1er mars 2008, des dizaines de personnes qui manifestaient pacifiquement ont été tuées par les forces de sécurité gouvernementales. Or personne n’a jamais été condamné. Aucune véritable enquête n’a été faite.

Les brutalités policières contre les manifestants et les activistes pacifiques se poursuivent. La police envoie des personnes mater les manifestants de la même façon que le gouvernement envoie des criminels blesser les manifestants isolés. Par ailleurs, des décisions antidémocratiques sont prises, mises en œuvre par des gangsters contrôlés par le gouvernement. Or aucune de ces affaires n’a fait l’objet d’une quelconque enquête.

Le manifestant Tigran Arakelian est toujours en prison sur la base de faux témoignages, montés de toutes pièces par la police. Il est considéré comme un prisonnier politique par toutes les organisations des droits de l’homme arméniennes et par l’ensemble des médias. Pourtant le rapport est silencieux et ne dit rien de toutes ces questions qui tiennent à cœur quand on veut défendre la démocratie en Arménie. Cela démontre tout simplement que la procédure de suivi pour l’Arménie n’est pas fonctionnelle.

Les missions d’observation électorale détectent une corruption massive : on intimide les électeurs, on corrompt les membres des commissions électorales. Ces faits interviennent hors des bureaux et ne font donc pas l’objet du rapport.

Au surplus, cela fait des années que les corapporteurs ne se sont pas rendus en Arménie. Ils ne sont pas disponibles et il est impossible de les contacter. Je suis le représentant du Congrès national arménien, le plus grand groupe d’opposition et la principale cible de la répression du régime depuis 2008. Malgré tous mes efforts, ici, à l’Assemblée parlementaire, je n’ai jamais réussi à évoquer avec eux un seul de ces points. Je vais certainement voter contre cette résolution car elle est fausse dans tout ce qu’elle rapporte ou plutôt elle tait tout ce qu’elle devrait dire au sujet de l’Arménie.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan)* – Que l’on se prononce pour ou contre le rapport, l’essentiel est de comprendre la nécessité de réformer fondamentalement la procédure de suivi. Cela suffit ! Cette procédure ne reflète pas les réalités dans les pays du Conseil de l'Europe et sur le continent européen. Depuis longtemps, plusieurs pays qui font l’objet d’un suivi cherchent à mettre en œuvre les recommandations. Ils font de leur mieux. Mais encore et encore, la commission de suivi ouvre de nouveaux dossiers, pose de nouvelles questions. C’est sans fin. N’en jetez plus !

En principe, les pays du Conseil de l'Europe qui font l’objet d’un suivi, les pays en phase de dialogue post-suivi, les pays que nous observons sans être couverts par le suivi, sont tous égaux. Les droits de l’homme et les valeurs fondamentales du Conseil de l'Europe sont importants pour tous les pays, ils sont universels.

Si nos valeurs sont véritablement universelles, comment expliquer que l’on ne cherche à les imposer qu’à une partie des pays membres du Conseil, les autres n’étant jamais cités, ou seulement au passage ? Nous devons donc nous atteler à une profonde réforme de la procédure de suivi afin d’être plus objectifs lorsque nous entreprenons de faire changer les choses dans les pays du Conseil. Voilà ce que devrait faire l’Assemblée au lieu de se tourner vers les ministres. Nous devons prendre les devants, assumer nos responsabilités. Nous sommes les élus du peuple : à nous de faire évoluer les procédures, au lieu de les renvoyer aux cabinets ministériels, qui ne peuvent pas tout faire, qui ne sont pas responsables de tout. J’espère que l’Assemblée parlementaire aura le courage de modifier cet état de fait.

M. NIKOLOSKI (« L’ex-République yougoslave de Macédoine »)* – Je félicite le rapporteur. La procédure de suivi est une partie essentielle du travail de l’Assemblée parlementaire, mais ses fondements sont dépassés. Lorsqu’elle a été établie, en effet, il s’agissait d’assurer un suivi des nouveaux membres, venus d’une partie de l’Europe où les normes démocratiques n’étaient pas en place. Mais vingt-trois ans après la chute du communisme, la plupart des pays se conforment à ces normes générales. Parallèlement, il existe des pays qui ne font pas l’objet d’un suivi alors qu’ils ne satisfont pas à tous les critères ; certains n’appliquent pas même les normes fondamentales, par exemple la Grèce.

Tous les pays d’Europe sont confrontés à des défis qu’il s’agit de relever. Il faudrait suivre d’ici les problèmes qu’ils rencontrent sur le terrain. Voilà pourquoi il ne faut pas isoler l’un ou l’autre d’entre eux, mais assurer un suivi de tous les pays, par thèmes : par exemple, les droits de l’homme, ou la montée du néofascisme dans tous les Etats membres. Nous n’aurons alors plus trois groupes différents – les pays qui échappent à tout suivi, ceux qui font l’objet d’un dialogue post-suivi et ceux qui sont soumis à une procédure de suivi. Cela créera moins de tensions, chaque pays obéissant au même processus, et cela nous fournira des éléments de comparaison enrichissants du point de vue tant législatif que pratique. Modifions donc le fondement de la procédure de suivi : au lieu de passer d’un pays à l’autre, passons d’un thème à l’autre. J’espère que nous pourrons ouvrir un débat en ce sens.

Mme GUZENINA-RICHARDSON (Finlande)* – Au sein du Conseil de l’Europe, nous devrions tous être placés sur un pied d’égalité. Tous, nous devons respecter les droits de l’homme, la démocratie et la prééminence du droit. Ce devrait être une évidence pour chacun d’entre nous.

Le suivi est né à l’initiative de notre ancienne présidente Tarja Halonen. En Finlande, nous sommes donc très fiers de cette procédure. Elle a été conçue pour aider les nouveaux Etats membres à respecter leurs engagements. Aujourd’hui, n’importe quel Etat membre peut faire l’objet d’un suivi ; c’est une caractéristique du système qu’il faut maintenir.

Le Conseil de l’Europe dépend évidemment de l’action de ses Etats membres et de leurs engagements, dont le respect est une mission primordiale. Nous devons donc veiller à ce que nos recommandations soient appliquées. Si notre Organisation veut rester à la pointe en matière de droits de l’homme en Europe, nous devons nous efforcer, chacun de notre côté, de nous corriger, de surmonter nos faiblesses. Ce n’est qu’ainsi que nous nous montrerons dignes des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe.

Cela dit, l’on observe des signes inquiétants. Certains des pays soumis à un suivi le sont depuis très longtemps, ce qui nous pousse à nous interroger sur l’efficacité du mécanisme. Il y a certainement quelque chose à faire. L’objet du suivi est de promouvoir des réformes internes et une démocratisation des différents pays concernés. Les échanges doivent naturellement être constructifs, fondés sur le respect mutuel et sur des règles du jeu clairement établies. En tout état de cause, nous devons manifestement améliorer le système.

Mme ZIMMERMANN (France) – Le Conseil de l’Europe a été créé afin que les valeurs européennes – les droits de l’homme, l’Etat de droit, la démocratie – ne soient plus jamais bafouées. « Plus jamais ça » : tel était le message des pères fondateurs au sortir de la guerre.

Aujourd’hui, malheureusement, tous les Etats membres ne respectent pas leurs obligations et certains n’en respectent que très peu. Monsieur le rapporteur, vous faites une analyse détaillée de la situation dans tous les Etats membres, ce qui est une bonne chose. Cependant, au vu de certains rapports dont nous avons récemment débattu, je pense que certains pays membres ont oublié la raison d’être de leur adhésion au Conseil de l’Europe – adhésion libre et volontaire, je le rappelle. Les valeurs défendues par notre Organisation ne sont pas optionnelles. Si l’on y adhère, l’on doit tout mettre en œuvre pour défendre les droits et la démocratie, sans quoi l’on n’est pas digne de faire partie de cette famille européenne.

Voilà pourquoi le rôle de la commission de suivi est essentiel à la crédibilité et à la pertinence même du Conseil. Son travail représente un message important pour la société civile et les défenseurs des droits dans les pays concernés. Impartialité, objectivité et fermeté doivent en être le fondement. Il ne peut y avoir aucun compromis sur les principes.

Nous devons également réfléchir aux valeurs que nous souhaitons particulièrement défendre. De ce point de vue, il me semble que les rapports de la commission devraient prendre davantage en considération les droits des femmes. Bien sûr, les discriminations contre les minorités, contre les LGBT, contre la société civile touchent les femmes, mais celles-ci sont souvent victimes de discriminations spécifiques, liées à leur condition féminine même. Peut-on parler de démocratie si les femmes sont peu représentées, ou ne le sont pas du tout, dans les institutions, au parlement ou au gouvernement ? Peut-on parler de droits sociaux si les femmes ne peuvent pas être indépendantes financièrement ou ne peuvent pas travailler ? Peut-on parler de droits de l’homme si les femmes ne sont pas libres de leur corps et de leur esprit, si elles sont victimes de coutumes d’un autre temps ? Dans les conflits, lors des luttes ethniques, les femmes sont souvent les premières victimes, surtout lorsque le viol est utilisé comme une arme de guerre. Les valeurs européennes que nous portons ne peuvent pas exister si les droits des femmes ne sont pas respectés en tant que tels. Mon vœu le plus cher est que la commission de suivi tienne compte de cette exigence dans ses travaux.

M. RECORDON (Suisse) – Mes chers collègues, à vrai dire, j’ai trouvé certains propos assez navrants. J’ai eu le sentiment, et ce n’est pas la première fois, d’assister au réveil d’une sorte d’internationale des nationalismes.

Lorsque j’entends mettre en question les règles de l’égalité de traitement ou que je vois l’amendement 10 tendre à repousser la proposition de saisir davantage le Comité des Ministres, j’ai le sentiment que ceux qui craignent de se voir sérieusement mis en cause veulent éviter d’être dans le champ des projecteurs. Je vous invite donc à rejeter cet amendement 10, car nous avons besoin de plus d’efficacité. Pour ce faire, il faut que les ministres se saisissent davantage des préoccupations dont nous leur faisons part. Ce n’est pas là que se situe le risque de dilution. Je juge, au contraire, cette proposition tout à fait opportune.

Quant à l’égalité de traitement, je me permettrai de souligner qu’elle appelle certes un traitement égal des situations égales mais aussi un traitement différencié des situations différenciées. Ce second élément est tout aussi important que le premier.

Pour autant, tout n’est pas pour le mieux dans le meilleur des mondes dans cette procédure de suivi. Je suis persuadé qu’elle doit être réformée ou à tout le moins, être grandement améliorée. Quand je vois mon propre pays, la Suisse, qui fête cette année les cinquante ans de son adhésion au Conseil de l’Europe, cité huit fois dans le rapport pour des situations dans lesquelles il ne remplit pas pleinement ses obligations, en tout cas, conventionnelles, je ne m’affole pas, je pense que, dans la réalité des faits, c’est peut-être un peu moins grave. Mais je reconnais que c’est malgré tout assez grave d’être cité huit fois.

Je me demande si nous ne devrions pas différencier davantage la procédure de suivi ou de post-suivi, en créant une manière de procéder qui ne soit pas de nature thématique – laquelle crée un risque de dilution totale et de différenciation, mais qui soit à destination des pays membres de longue date, qui peuvent parfois être assez lents dans leur progression et faire malheureusement aussi l’objet de régressions en matière de droits de l’homme, comme nous le voyons, avec le cas dramatique des Roms dans ce pays même et dans le mien.

Certes, toute nouvelle réflexion requiert des moyens supplémentaires. C’est là la grande difficulté. Je pense néanmoins que nous ne pouvons pas rester les bras croisés.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)*– Je remercie M. Herkel de son excellent rapport et de sa proposition formulée au point 3 du projet de recommandation, qui vise à inscrire tous nos rapports de suivi à l’ordre du jour du Comité des Ministres, traitant ainsi tous les pays sur un pied d’égalité. Je trouve cette proposition excellente, et je ne comprends pas mes collègues qui affirment que l’Assemblée parlementaire et le Comité des Ministres ne peuvent pas travailler ensemble. Nous sommes les deux branches d’un même arbre. Travailler ensemble ne peut qu’apporter de la valeur ajoutée.

S’il est clair que certains collègues veulent affaiblir la procédure de suivi, je veux au contraire la renforcer et la rendre plus cohérente. Si nous ne jouons pas notre rôle, c’est l’Union européenne qui le prendra. Bien sûr, ceux qui sont en procédure de suivi souhaitent en sortir le plus rapidement possible, et je les comprends, mais les responsables politiques de ces pays doivent remplir les engagements qui ont été pris au moment de l’entrée de leur pays au Conseil de l’Europe. Chacun doit le faire pour son pays et, Monsieur le rapporteur, pour le vôtre aussi.

Les pays en procédure de suivi ne doivent pas considérer que nous sommes contre eux. Au contraire, nous sommes des amis qui voulons ce qu’il y a de mieux pour eux. Il faut voir le suivi comme un avis d’expert, gratuit en plus. Utilisez-le comme tel !

Dans ce rapport, il est prévu que les 47 pays membres soient sous suivi. C’est une bonne chose, car aucun n’est parfait. Je n’ai pas coutume de parler de mon propre pays, mais je le ferai aujourd’hui. La Suède est critiquée depuis des années par le GRECO pour n’avoir pas de législation sur le financement des partis politiques. Nous n’avons qu’un simple accord entre partis politiques. Je dois avouer ma honte lorsque je vais observer des élections et que je demande s’il existe une législation sur le financement des partis. En tout cas, l’an prochain, nous allons nous doter d’une telle loi.

La Suède a aussi été critiquée par l’Ecri parce que nous ne traitons pas les personnes qui sont sans carte de résident à égalité avec les autres. Mais nous allons le faire, dès le 1er juillet prochain.

La démocratie n’est jamais acquise. Il faut se battre tous les jours pour elle, et cela est valable pour tous nos Etats membres.

Mme KHIDASHELI (Géorgie)* – Je vous remercie, Monsieur Herkel, pour votre extraordinaire rapport.

Je suis tout à fait d’accord avec Mme de Pourbaix-Lundin et d’autres collègues du groupe ADLE qui ont vanté les mérites de cette procédure de suivi.

Je suis ressortissante d’un pays qui fait l’objet d’un suivi depuis plus de dix ans. Peu importe si nous sommes d’accord avec chaque détail de chaque paragraphe. J’apprécie les efforts réalisés dans le cadre de cette procédure même si je ne suis pas toujours d’accord. Tout cela vise à renforcer la démocratie et établir la prééminence du droit chez nous. C’est, comme vous l’avez dit à l’instant, une expertise gratuite. Pourquoi le refuser ?

Bien sûr, on peut toujours faire mieux, mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il faille totalement rejeter cette procédure. Au contraire, nous sommes toujours soucieux d’avoir des informations actualisées.

Je dois toutefois dire que je suis déçue du paragraphe 13 du rapport. En effet, notre rapporteur n’a pas cité les évolutions enregistrées dans mon pays depuis 2012. C’est bien d’être critique, mais quand un pays atteint les objectifs qui lui ont été fixés, il est bon aussi de le relever. Il ne faut pas hésiter à dire que des progrès ont été enregistrés.

Je ne vais pas tous les énumérer, ce serait un inventaire à la Prévert qui nous prendrait trop de temps mais, par exemple, il n’y a plus de torture dans les prisons géorgiennes, alors qu’on la dénonçait souvent autrefois. Le système pénitentiaire s’est beaucoup amélioré grâce aux travaux et aux efforts de la nouvelle administration. Il n’y a plus non plus de monopole dans les médias, autre travers qui était systématiquement dénoncé.

Au paragraphe 14, on s’inquiète de l’absence d’indépendance de la justice dans mon pays. Nous ne sommes pas parfaits, j’en conviens, mais rappelons-nous que nous parlons d’un pays où autrefois le taux de condamnation lors des procès était de 99,9 %. En d’autres termes, chaque fois que le procureur demandait une condamnation, il l’obtenait. Aujourd’hui, il arrive que l’Etat perde devant le tribunal et que le procureur n’obtienne pas gain de cause. Parfois, les appels des procureurs sont rejetés alors qu’autrefois, les condamnations étaient quasi systématiques. C’est une évolution. Elle n’est pas soulignée. De temps en temps, il faut aussi dire quand les choses évoluent dans le bon sens.

Enfin, je ne peux que constater qu’au paragraphe 13, rien n’est dit des violations constantes de nos valeurs par la Russie malgré les recommandations réitérées de l’Assemblée dans de nombreuses résolutions s’agissant de la politique d’occupation et des droits des personnes déplacées de l’intérieur en Géorgie à la suite du conflit.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Je regrette vraiment que Mme de  Pourbaix-Lundin ait quitté l’hémicycle parce qu’elle vient d’un pays où la police a établi un fichier des Roms, pour les traiter d’une manière… « spéciale », disons !

C’est vraiment étrange qu’au Conseil de l’Europe, on applique des règles différentes aux uns et aux autres. On les applique très lourdement. C’est inacceptable.

C’est ce qui s’est passé pour la Hongrie. Pourtant, en Hongrie, ces trois dernières années, de nombreux changements ont été apportés au système législatif.

Lors de la précédente partie de session de l’Assemblée, la commission de suivi, à l’initiative de nos collègues suédois, a voulu faire la leçon à la Hongrie et lui apprendre la démocratie. Et que s’est-il passé ? Les parlementaires de notre Assemblée ont rejeté en bloc le rapport ! Nous vous remercions pour votre expertise et pour votre amitié ! Les Hongrois savent désormais en quoi consiste le travail de la commission de suivi.

Monsieur le rapporteur, vous évoquez la situation des Roms et des personnes LGBT, mais vous ne parlez pas des peuples indigènes d’Europe, ni des minorités nationales, qui constituent pourtant les racines de l’identité européenne. Vous nous jouez une très mauvaise pièce de théâtre, qui ne défend absolument pas la démocratie ! En réalité, avec vos collègues, vous êtes manipulés comme des marionnettes et vous détruisez la culture nationale de l’Europe.

Nous vous demandons de cesser la politique des deux poids deux mesures et de défendre véritablement les valeurs européennes.

En 1920, les minorités hongroises ont vu leur destin détruit par l’oppression de la Roumanie, de la Serbie, de la Slovaquie et d’autres pays encore. Pas un mot à ce sujet dans le rapport : honte à la démocratie !

LE PRÉSIDENT – Monsieur Gaudi Nagy, chacun ici est libre d’exprimer son opinion et toute opinion est respectable. Je vous demande toutefois de modérer vos propos et de respecter les différents orateurs qui se sont exprimés avant vous, comme nous-mêmes nous vous respectons.

M. MOTA AMARAL (Portugal)* – Le rapport de M. Herkel décrit l’évolution de la procédure de suivi au cours des dernières années et présente lucidement les aspects positifs et les faiblesses de cette procédure, instaurée pour soutenir les nouveaux membres du Conseil de l’Europe sur le chemin de la démocratie. Ce chemin n’a pas toujours été facile, mais le dialogue entre l’Assemblée et les pays faisant l’objet d’un suivi a permis des progrès réels. L’implication des parlementaires dans les travaux de l’Organisation est également un atout important pour faire avancer la démocratie dans ces pays. C’est pourquoi je pense que nous devons garder vivante cette procédure parlementaire de suivi et ne pas la diluer dans les responsabilités des gouvernements des pays du Conseil de l’Europe.

L’extension de la procédure de suivi à l’ensemble des membres du Conseil de l’Europe a été évoquée ce matin ; elle a soulevé une majorité de protestations parmi les Etats membres. A la fin des années 1970, lorsque je suis venu pour la première fois au Conseil de l’Europe, l’Organisation ne comptait que 15 Etats membres, contre 47 aujourd’hui.

Force est de constater que la procédure de suivi dans son fonctionnement actuel soulève d’immenses difficultés. Les rapports de suivi sont perçus comme partiaux. Au sein de notre Assemblée, l’influence des groupes politiques doit être tempérée par des considérations d’un autre ordre.

Pour conclure, je pense que ce rapport mérite d’être soutenu et je remercie M. Herkel pour son excellent travail.

Mme KANELLI (Grèce)* – Avec ce rapport, nous avons raté une bonne occasion de réformer la procédure de suivi de l’Assemblée ! La défense des droits de l’homme aurait nécessité que l’on applique cette procédure dans l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe. Nous ne faisons pas ici la diplomatie des droits de l’homme : ou bien ils sont appliqués, ou bien ils ne le sont pas.

Voulez-vous vraiment que le Conseil de l’Europe fonctionne comme cet horrible concours de l’Eurovision, où l’on distribue les points ? Après chaque suivi, nous avons tous observé comment des coalitions et des groupes d’intérêts se forment. Nous perdons alors de vue l’idée même des droits de l’homme.

On dit que nous faisons tous partie du même arbre, mais encore faut-il prendre soin de cet arbre et l’arroser si l’on veut qu’il porte des fruits.

On ne peut accepter que les objectifs changent au gré des intérêts des uns et des autres. Nous devons avoir le souci de défendre tout le monde : les femmes, les enfants, les minorités, etc. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra faire avancer les choses sur le continent européen, véritable creuset de civilisations.

Que représente réellement le 9 mai, la Journée de l’Europe, pour les Européens ? Peut-être, quand nous aurons répondu à cette question, pourrons-nous enfin parler de l’évolution de la procédure de suivi !

M. WACH (Pologne)* – Je ne partage pas la vision de Mme Kanelli, qui s’est exprimée avec beaucoup de passion. En effet, nous discutons aujourd’hui d’un rapport qui porte sur une procédure formelle. Il paraît difficile de l’envisager sous un autre angle.

Nous inspectons les 33 pays qui ne font pas l’objet d’une procédure de suivi ou de post-suivi. Quant aux 14 qui font l’objet de l’une ou de l’autre procédure, ils sont suivis de près justement à cause des problèmes qu’ils rencontrent. Par ailleurs, ce rapport est un rapport annuel : il ne recouvre pas toute l’histoire du Conseil de l’Europe, mais seulement les activités de l’année passée. Pour autant, il est très important, car il touche au cœur même de nos activités et de nos missions. Il est en outre assez exhaustif, dans la mesure où il couvre tous les aspects de l’activité de suivi.

Cette année, le rapport contient trois éléments spécifiques. Tout d’abord, il a été préparé après que des avis critiques ont été émis à propos de la forme actuelle prise par le suivi des Etats membres, qu’il s’agisse de suivi strict ou de post-suivi. Tel est, je crois, l’objet du débat : il y a deux visions de ce que doit être le suivi. Mais il s’agit d’un débat pour l’avenir ; le rapport, lui, porte sur l’année dernière.

L’avis général est que, jusqu’à ce jour, les procédures de suivi ont été appliquées de manière professionnelle et en toute bonne volonté. Elles devraient donc être maintenues – telle est du moins la position que devrait soutenir l’Assemblée. La question de savoir s’il faut les modifier apparaît au paragraphe 24, sans toutefois que soient proposés des changements révolutionnaires.

Une deuxième caractéristique du rapport est l’inspection étroite auquel il procède – de façon adéquate selon moi – des 33 Etats ne faisant pas l’objet d’une procédure de suivi au sens strict.

Enfin, le rapport propose, notamment dans le projet de recommandation, une collaboration plus étroite avec le Comité des Ministres en matière de suivi et de postsuivi. Pour ma part, ne partageant pas les craintes de mon collègue Binley, j’estime que nous devrions accepter toutes les recommandations du rapport, et en particulier celle contenue dans le paragraphe 3.

M. SLUTSKY (Fédération de Russie)* - La procédure de suivi a toujours été un trait particulier de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe : c’était la composante qui nous différenciait en particulier de toutes les autres organisations européennes. Elle obligeait en effet les nouveaux Etats membres à se soumettre aux normes du Conseil de l’Europe, à ses standards. Cela étant, cette procédure, comme tout autre instrument, doit être rafraîchie. Or force est de constater qu’une telle évolution n’a pas encore eu lieu.

Le système de monitoring, qui vise initialement à stimuler les pays pour les conduire à se rapprocher des normes du Conseil de l’Europe, s’est transformé en instrument destiné à pointer du doigt tel ou tel membre de cette institution. Des questions de plus en plus difficiles sont posées à ces pays, qui ne l’avaient pas été au moment de leur adhésion, alors que d’anciennes démocraties ne font l’objet que de compliments et de louanges.

C’est pourquoi, chers collègues, je vous invite à vous écarter de l’ancien monitoring et à adopter un monitoring thématique, un suivi des situations qui nous préoccupent tous, celles qui voient la violation des standards de base de la démocratie et des valeurs qui ont toujours été les mêmes depuis l’adoption de cette procédure.

Ainsi, dans le pays du rapporteur, M. Herkel, des milliers de personnes sont qualifiées de « non-citoyens » et dévalorisées. Elles ne sont même pas protégées par la convention-cadre sur les minorités nationales et les autres instruments, pourtant fondamentaux, de notre Organisation. Pourtant, le rapport ne contient pas un mot à ce sujet. Sur le plan international, d’ailleurs, le terme de « non-citoyen » est une invention de toutes pièces.

Pour ce qui concerne le projet de recommandation, nous devons être très prudents s’agissant de la coopération avec le Comité des Ministres. Pourquoi le Comité examine-t-il les résolutions de notre commission ? À quoi sert une recommandation au Comité des ministres ? Il convient d’éviter les doublons. C’est pourquoi, même si le paragraphe 3 du projet de résolution contient nombre de propositions, nous ne pouvons pas apporter notre soutien au rapporteur. Je vous appelle à réfléchir à la forme que devra prendre, dans le futur, le monitoring exercé par l’Assemblée.

M. XUCLÀ (Espagne)* - À mon tour, Monsieur Herkel, je vous félicite pour le travail réalisé, qui rend compte des activités menées tout au long de l’année par la commission de suivi, activités parmi les plus utiles dans tous les travaux conduits par cette Assemblée parlementaire. Je ne veux pas, cependant, faire trop d’éloges à l’égard de cette commission.

Au paragraphe 3 du projet de résolution, l’Assemblée se déclare satisfaite de la nouvelle approche adoptée par la commission de suivi dans le rapport d’activité relatif au suivi des 33 Etats membres qui ne sont pas soumis à une procédure spécifique concernant le respect des obligations associées à leur adhésion. Mais même si cette procédure me semble excellente, nous sommes fort loin de disposer des instruments qui nous permettraient de vérifier le respect de la démocratie dans les pays membres – qu’il s’agisse du fonctionnement des institutions, du fonctionnement ou du financement des partis politiques, etc. Je vous propose donc d’approfondir la réflexion sur ce point afin de mieux contrôler la qualité de la démocratie dans les pays ne faisant pas l’objet d’une procédure de suivi.

Au paragraphe 4, l’Assemblée se félicite des avancées obtenues dans le dialogue sur les conséquences de la guerre entre la Géorgie et la Russie. Cela me paraît un peu trop optimiste, car dans l’histoire de notre Assemblée parlementaire, l’entrée en guerre de deux Etats membres, le 8 août 2008, a constitué un événement très grave. En outre, les avancées ont été extrêmement timides depuis lors.

Je souhaite par ailleurs dire un mot du séminaire organisé à Tallinn sur les conflits gelés. Il a été utile, car il a permis de constater quels étaient les points de vue en présence et de dresser la liste de toutes les tâches que nous pourrions accomplir. Or nous les laissons entre les mains d’autres organisations multilatérales plutôt que de tenter de rapprocher les différentes parties des trois grands conflits gelés que connaît notre continent.

Nous devrions également entamer une réflexion sur l’usage politicien effectué, par certains partis, de la procédure de post-suivi : lorsqu’ils sont dans l’opposition, ils souhaitent le maintien du post-monitoring afin d’en tirer argument pour dénigrer le gouvernement en place. Puis, parvenus eux-mêmes au pouvoir, ils réclament l’arrêt de cette procédure.

Les informations extrêmement utiles contenues dans le rapport, et pour lesquelles je souhaite féliciter M. Herkel, doivent nous amener à réfléchir et, parfois, à ressentir de la honte.

Il existe beaucoup de conventions du Conseil de l’Europe que nous n’avons pas ratifiées, nous, Etats membres. Retournons dans nos pays et demandons à nos gouvernements de le faire.

M. PUSHKOV (Fédération de Russie)* – Ce n’est pas tellement le projet de résolution qui fait l’objet d’une discussion, c’est plutôt le double suivi.

Je vous rappelle que la guerre froide est finie depuis plus de 20 ans. J’ai l’impression que dans certaines régions on y croit encore, alors que ce n’est pas la voie à suivre.

Il y a quelques années, notre délégation de la Douma d’Etat s’est rendue en Suède. Nous avons eu un délicieux dîner avec Mme de Pourbaix-Lundin. J’ai eu la meilleure impression possible de Stockholm et de la Suède. Cela prouve que nous appartenons à un seul et même continent, une grande Europe et qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans des conflits.

Malheureusement, quand j’arrive à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, je sens une atmosphère de confrontation des uns contre les autres. Ce n’est pas un bon résultat après 20 ans d’arrêt de la guerre froide.

Le suivi a fait l’objet de controverses. Au lieu de nous unir, cette procédure conduit à des coalitions, des combats entre les groupes. C’est déshonorant pour l’institution. Que s’est-il passé depuis trois ans ? Pourquoi aujourd’hui la commission de suivi propose-t-elle de présenter la question au Comité des Ministres ? Y-a-t-il eu un événement dramatique ? Faut-il prendre des mesures spéciales contre les méchants, les bandits de l’Europe ? Je ne pense pas que ce soit la vraie raison.

C’est fait en réaction aux événements de l’an dernier - à l’époque la seule Russie était visée. Il y a eu un échec, pas de soutien de l’Assemblée parlementaire. Alors on retrouve la même proposition, diluée, un double suivi pour que tout le monde soit visé et pas la seule Russie. Les auteurs ont des idées à la vie dure mais elles desservent l’Assemblée parlementaire.

Monsieur Narychkine a parlé aujourd’hui de la nécessité de mettre un terme à la fracture en Europe, certainement pas de rouvrir les clivages. Les pays qui défendent le plus ardemment ce double suivi ne font pas eux-mêmes l’objet d’un suivi. C’est une façon de maintenir leur pays en dehors de cette procédure. C’est injuste. Cela renforce le deux poids, deux mesures. Les idéaux ne peuvent pas être à double vitesse.

M. SASI (Finlande)* – Une démocratie qui fonctionne bien, c’est merveilleux. C’est la meilleure façon pour que nos pays se sentent bien. La procédure de suivi est destinée à aider les pays à se démocratiser, à corriger les carences qui existent dans nos systèmes. Félicitations à M. Herkel pour son excellent rapport.

Je comprends que certains soient mécontents lorsque l’on critique leur pays dans un tel rapport. Je le trouve très équilibré, tout à fait juste et équitable. Il est bon qu’il contienne une liste des évolutions favorables enregistrées dans un certain nombre de pays. Mais il reste une trop longue liste de préoccupations.

Dans ce rapport on mentionne aussi les pays qui ne font pas l’objet d’un suivi. A chaque fois qu’il existe des problèmes, l’Assemblée doit s’en saisir. Nous pouvons évidemment produire des rapports ciblés sur telle ou telle question. Globalement, cela fonctionne plutôt bien.

Lorsqu’il y a eu une longue procédure de suivi, il devrait y avoir des conditions plus précises permettant sa clôture. S’agissant du Monténégro par exemple, nous avons cinq points à l’ordre du jour. Lorsque le pays aura répondu à nos exigences, nous pourrons clore la procédure.

M. Schennach a parlé tout à l’heure du dialogue post-suivi. Je m’interroge sur sa nécessité. Ne faudrait-il pas plutôt que ce soit terminé à la fin du suivi ? Si l’on maintient un dialogue post- suivi, il faut prévoir sa fin dans les 24 à 36 mois.

Ce qui est important, c’est que tous les pays soient égaux. Il faut le rappeler au Comité des Ministres.

Avec nos rapports nous cherchons à renforcer le processus et non à l’affaiblir comme M. Binley l’a dit. Je suis en total désaccord avec lui. Nous voulons une procédure efficace. Le paragraphe 3 dans ce contexte est tout à fait favorable. Il permettra l’égalité entre les pays. Il faut donc voter pour.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Merci de nous donner cette occasion de nous exprimer sur ce sujet très important. Je vous félicite, Monsieur Herkel, ainsi que vos collègues pour ce rapport excellent, de fond. Notre délégation l’a lu avec attention. Nous avons fait nos commentaires. Je suis d’accord avec l’évaluation de Mme Khidasheli.

Ce travail est en cours. Nous sommes sous procédure de suivi du Conseil de l’Europe, en cours d’évolution pour la qualité des institutions démocratiques, de l’Etat de droit, du système judiciaire. Monsieur Herkel, tous les politiques, les experts de l’Assemblée lisent votre rapport.

Les citoyens de Géorgie l’attendent également, surtout dans cette situation dramatique que nous vivons, après la guerre, avec un peuple divisé. Ce rapport est très positif, mais il faut le nuancer car nous avons des évolutions dans nos pays. Chaque pays a ses risques internes et externes, ses difficultés, ses défis à relever. Cela doit être mieux décrit dans votre rapport. Nous en avons parlé en commission. C’est pourquoi nous avons présenté des amendements, pour rendre votre rapport plus parfait et pour que des pays comme la Géorgie deviennent exemplaires au regard de la démocratie et de l’Etat de droit.

Je demande à l’Assemblée de tenir compte de nos commentaires, de nos amendements pour améliorer ce rapport.

Mme KYRIAKIDES (Chypre)* – Un rapport annuel de la commission de suivi peut être un outil très utile pour vérifier dans quelle mesure les Etats membres du Conseil de l’Europe respectent les engagements qu’ils ont pris. C’est aussi une bonne base de dialogue. Il permettra également de vérifier la conformité des trente-trois pays qui ne sont actuellement pas l’objet d’un suivi ou d’un post-suivi aux valeurs du Conseil de l’Europe et aux obligations qui découlent de leur statut de membre. Cela dit, le rapport ne peut sans doute pas être totalement exhaustif.

Je me vois obligée de vous rappeler l’actualité de mon propre pays, Chypre. J’ai d’ailleurs déjà appelé l’attention du rapporteur sur ces questions, en particulier sur le rapport du Moneyval du mois de juin 2013.

Le législateur chypriote a pris plusieurs initiatives pour aménager le cadre régissant les banques et pour tenir compte de l’ensemble des recommandations figurant dans le rapport. En outre, en dépit de la crise financière sans précédent qui affecte mon pays, toute une série de mesures ont été prises pour éviter la surpopulation carcérale. Enfin, et ce n’est pas le moindre des efforts que nous avons fournis, la semaine dernière, le président de la chambre des députés a annoncé que celle-ci adopterait très rapidement toutes les lois nécessaires pour que Chypre soit en parfaite conformité avec les recommandations du Groupe anti-corruption du Conseil de l’Europe, le GRECO, en ce qui concerne la transparence et le financement des partis politiques, qu’il s’agisse de lois d’initiative parlementaire ou de lois d’initiative gouvernementale.

En tant que chef de la délégation chypriote à l’Assemblée, en tant que parlementaire chypriote, je m’engage à faire en sorte que tous les changements demandés et toutes les réformes nécessaires soient mis en œuvre, de manière à ce que Chypre soit vraiment un Etat de droit et afin que les droits de toutes les personnes soient respectés.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Je veux remercier M. Herkel pour cet excellent travail, pas seulement lui mais toute la commission du suivi. On peut mesurer à quel point ce travail est difficile à réaliser pour quarante-sept Etats qui, tous, trouveront quelque chose à redire, parce qu’il y a toujours quelque chose de trop, ou quelque chose qui manque, dans le rapport. C’est donc un très lourd travail, qui met au jour des vérités et des situations dans chacun des Etats membres du Conseil de l’Europe. Ce rapport est très honnête.

La délégation ukrainienne – tant les parlementaires issus de l’opposition que ceux de la majorité – peut le dire : nous avons fait bien plus au cours de ces derniers mois qu’en vingt ans. Pourquoi donc ? Nous avons modifié beaucoup de lois, nous avons travaillé ensemble, majorité et opposition, pour lutter contre la corruption et élaborer des lois pertinentes à cette fin, ainsi que pour réguler l’économie en fonction des normes de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe. Nous avons voulu, ensemble, mettre en place une législation qui consacre la primauté du droit, mais la question n’est pas encore résolue. La commission de suivi a été très franche, et, le rapporteur l’a indiqué très clairement, restent pendantes la question Timochenko et la question des « deux poids, deux mesures » du système judiciaire ukrainien. C’est pour ces raisons principales que nous ne pouvons pas dire que notre pays a rempli toutes les obligations souscrites lors de son adhésion. Ce sera l’étape suivante, car nous serons bientôt membres d’une grande famille de pays, avec, tout d’abord, les accords d’association avec l’Union européenne, et, ensuite, un accord de libre-échange. Ce n’est pas le choix de la majorité ni celui de l’opposition : c’est celui de 95 % de la population, qui est représentée au sein du Parlement ukrainien.

Il faut résoudre le problème Timochenko. Si nous ne le faisions pas, il serait difficile de parler d’un système judiciaire honnête et transparent. Pour notre pays, cela va au-delà de l’affaire Timochenko, cela pose la question de la réforme du système des procureurs, de la réforme du système judiciaire, mais je crois que nous parachèverons cette tâche au cours des deux prochains mois. L’an prochain, nous aurons de nouvelles références, et un pays démocratique uni aux autres pays européens.

M. STROE (Roumanie)* – Tout d’abord, je félicite le rapporteur. Son rapport est excellent.

Chers collègues, comme vous le savez, l’activité de la commission du suivi représente une part essentiel du travail de notre Assemblée. Par conséquent, cette activité demeure au cœur de ses responsabilités. Nous devons continuer à nous engager activement à contribuer à l’amélioration de la procédure de suivi et à apporter notre soutien plein et entier aux méthodes et aux règles qui la régissent aujourd’hui.

Mais comment renforcer cette activité ? En ce qui concerne les pays sous suivi et sous procédure de post-suivi, les rapports de la commission sont une excellente source d’informations et d’analyses. Nous devons faire en sorte qu’ils soient véritablement suivis d’effets. L’Assemblée doit donc rechercher une coopération active avec d’autres organes du Conseil de l’Europe, en particulier le Comité des Ministres. Par ailleurs, nous devons continuer à rechercher des moyens alternatifs pour que nos recommandations et leur contenu soient pris en compte par le Comité des Ministres. Les conclusions du suivi devraient aussi être utilisées pour concevoir l’assistance aux pays concernés et les activités de coopération avec eux. Cette approche permettrait de surmonter l’épuisement du suivi, et créerait un lien direct avec des projets de coopération.

Notre Assemblée n’a pas encore une approche systématique quant aux 33 Etats membres qui ne sont pas soumis à ce dialogue de suivi ou de post-suivi, et nos rapports pourraient être améliorés grâce à une meilleure interprétation des résultats des mécanismes conventionnels.

En conclusion, je me félicite de l’adoption de la résolution 1936 sur l’harmonisation des dispositions réglementaires et para-réglementaires relatives au suivi et à la procédure de post-suivi. Je pense qu’il s’agit là d’un pas en avant pour rendre nos mécanismes de suivi plus efficaces, au service du respect des valeurs clés du Conseil de l’Europe par ses Etats membres.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – J’aimerais reprendre un certain nombre de thèmes qui ont déjà été évoqués par mes collègues.

La procédure de suivi est dégradante pour certains Etats membres. Par ailleurs, d’autres pays qui n’en font pas l’objet connaissent des violations claires des droits de l’homme. Alors pourquoi ne se demande-t-on pas pourquoi certains pays échappent à cette procédure ? Je ne parle pas spécifiquement des pays Baltes, mais comment admettre qu’on y parle, au XXIe siècle, alors que ces pays sont membres du Conseil de l’Europe, de non-citoyens ? C’est une violation flagrante des droits de l’homme. Or le rapporteur, qui vit dans un magnifique pays où existent des non-citoyens, n’en dit pas un mot. C’est pourquoi, dans une situation où le Conseil de l’Europe est, de fait, divisé entre ceux qui font l’objet d’un suivi ou d’un post-suivi et tous les autres, l’Assemblée parlementaire n’est pas en mesure de nous unir, de nous rapprocher.

Comme cela a déjà été dit à plusieurs reprises, une approche thématique est donc nécessaire de la part de la commission de suivi, tous les Etats membres devant faire l’objet d’un suivi sur tel ou tel thème. Ont-ils été bons ou mauvais, ont-ils appartenu à l’Union soviétique, le problème n’est pas là. Le rapport portera sur un thème particulier sans aucun préjugé.

Ce rapport contient un certain nombre de thèses erronées qui ne correspondent pas à la réalité, en tout cas pour ce qui concerne la Russie. On cite notamment un certain nombre de lois qui ont fait l’objet d’expertise et sont à la hauteur de la norme internationale. Nous sommes satisfaits de les avoir adoptées, elles répondent à des besoins et à des défis à relever dans notre pays.

Reprendre tout cela dans un nouveau rapport de suivi me paraît inadéquat. C’est la raison pour laquelle je ne soutiendrai pas ce rapport.

J’aimerais répondre aux collègues de plusieurs pays de la vieille Europe, à ceux qui nous disent « vous devez », « vous êtes obligés », que nous sommes tous égaux. De telles recommandations sont dégradantes.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Les collègues qui veulent que la démocratie l’emporte partout en Europe ont dit qu’il fallait maintenir toute la rigueur de la procédure de suivi qui, aujourd’hui, est certainement le mécanisme le plus puissant dont dispose l’Organisation.

Refuser que l’on sape cette procédure doit être notre mission. Il faut maintenir nos normes et nos valeurs si l’on veut que ce Conseil garde sa crédibilité, sa pertinence sur la scène européenne et que son existence même ne soit pas remise en cause par les contribuables qui le financent.

Mais pour cela il faudrait que la Fédération de Russie respecte ses engagements, ceux pris au moment de son adhésion, mais également ceux pris après l’invasion de la Géorgie et l’épuration ethnique qui a suivi.

Je suis favorable au projet de résolution parce qu’il rappelle les principales préoccupations que nous avons, notamment nous, les Géorgiens, face au recul enregistré dans notre pays et en particulier la mise en accusation des anciens dirigeants par la nouvelle majorité. Le recul se traduit aussi par des ingérences dans le fonctionnement de la justice, des chantages exercés sur certains juges et par une action d’intimidation des services secrets géorgiens.

Notre ancien Premier ministre est en détention provisoire depuis un bon moment et personne n’a été capable d’expliquer pourquoi il doit rester derrière les barreaux en pleine campagne électorale.

Le bilan du gouvernement Ivanichvili est catastrophique. Les représailles déclenchées par ce gouvernement contre les militants d’opposition sont massives. Douze mille de nos militants ont été importunés, harcelés ; cela ne peut pas continuer ainsi. La procédure de suivi doit donc être maintenue, les normes doivent être respectées, non seulement entre les pays, mais également à l’intérieur des pays.

Enfin, une trentaine de journalistes de TV9, possédée par le Premier ministre, ont rejoint le radio-télédiffuseur public après sa fusion avec son alter ego, également possédé par le Premier ministre, et toute une série de gens ont été évincés. Nous ne pouvons pas tolérer que cela se poursuive.

Mme MEMECAN (Turquie)* – Je remercie le rapporteur et le secrétariat de la commission de suivi qui ont présenté sans doute le rapport le plus complet sur l’état de la démocratie en Europe.

Je voudrais tout particulièrement exprimer ma gratitude au Président Mignon qui a soutenu les efforts en cours pour réformer le processus de suivi de l’Assemblée.

J’aimerais dire très clairement que l’Assemblée parlementaire doit procéder à un suivi des Etats membres. Mais la question est de savoir comment. Tout le monde sait bien que le suivi est devenu un instrument purement punitif de certains Etats membres. Et si le but ultime de ce prétendu suivi est d’identifier et d’éliminer les différents problèmes qui font qu’un pays n’est pas dans la ligne des valeurs du Conseil de l’Europe, alors il faut un accompagnement patient, inclusif et coopératif.

Les Etats membres doivent considérer la procédure de suivi comme un effort de collaboration plutôt que comme une action disciplinaire qui rend les uns heureux et les autres déçus. Les pays qui sont sous suivi ou post-suivi sont les mieux placés pour commenter l’efficacité et les points faibles de cette procédure. Je propose donc un certain nombre de remarques et de propositions qui permettraient de rendre plus efficace et utile la procédure de suivi.

Tout d’abord, l’Assemblée doit mettre sur pied des critères mesurables, objectifs et justes pour évaluer les performances d’un pays, ce qui permettrait de soulager le sentiment de désappointement et le ressentiment des pays sous suivi.

Ensuite, ces activités de suivi ne doivent pas être laissées à la discrétion de chacun des rapporteurs. Les rapports de suivi devraient inclure une check-list afin de suivre les recommandations passées et reconnaître les progrès effectués. Les recommandations doivent être fondées sur l’acquis contraignant du Conseil de l’Europe que constitue notamment la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Les Etats membres sous procédure de suivi ou de post-suivi ne devraient pas se voir exiger de mettre en œuvre des engagements qui ne sont pas respectés par les autres Etats membres.

Enfin, il ne fait aucun doute qu’une nouvelle procédure de suivi améliorée renforcera l’impact global de l’Assemblée, de ses principes et ses valeurs.

Mme TAKTAKISHVILI (Géorgie)* – Je voudrais tout d’abord remercier le rapporteur pour la qualité de son travail.

Le débat d’aujourd’hui démontre à quel point il est important que la commission conserve sa pertinence, et cela alors que nous voyons émerger de graves problèmes dans un certain nombre de pays eu égard au respect des grandes valeurs et des grands principes de l’Organisation.

D’aucuns ont rappelé que tous les pays doivent être traités de la même façon. Oui d’accord, mais il faut tenir compte des situations. Dans certains pays, les journalistes sont assassinés, les opposants sont mis en prison ; les autorités peuvent se permettre de faire tout et n’importe quoi sans qu’il y ait le moindre contrôle de la part de la justice et sans que les médias ne puissent dénoncer toutes les exactions.

Alors c’est vrai, le rideau de fer est tombé depuis longtemps, l’Union soviétique a disparu, mais dans les pays post-soviétiques énormément de problèmes demeurent et ils ont parfois tendance à s’aggraver.

M. Pushkov nous a rappelé que la guerre froide avait pris fin. Pourtant, au quotidien, la Fédération de Russie démontre qu’elle n’a pas renoncé à ses ambitions de l’époque. Elle considère que ses voisins où la démocratie s’enracine constituent une menace et elle-même profère des menaces. En échange, elle propose le modèle de ses valeurs eurasiennes qu’elle a créées elle-même. Or, les valeurs eurasiennes sont tout le contraire de celles que nous défendons ici : ce sont la haine, la discrimination, le chantage et l’utilisation de la force contre ses voisins ou leur harcèlement. Ce que nous voulons, c’est renforcer nos valeurs.

J’appelle votre attention sur la détérioration de la situation en Géorgie. Ainsi que vous le savez, l’armée russe occupe 20 % de notre territoire, plus de 300 000 personnes ont été chassées de leur foyer et la Fédération de Russie continue de progresser vers le cœur du pays et d’expulser des familles, notamment dans la région de Vani, au centre de la Géorgie. On est en train de créer un nouveau rideau de fer et c’est l’armée russe qui est en responsable.

La commission de suivi devrait se pencher une nouvelle fois sur ces problèmes et proposer une solution. De toute façon, la solution passe par un renforcement de la procédure de suivi, en permettant par ailleurs que le Comité des Ministres soit plus vigilant à l’égard de tous les pays.

Nous allons examiner les amendements. Songeons donc en les étudiant que l’objectif est de renforcer les droits de l’homme et les valeurs du Conseil de l'Europe.

M. HANCOK (Royaume-Uni)* – Je suis très heureux d’avoir l’occasion de prendre la parole sur un rapport aussi important.

M. Herkel a tenté de faire de son mieux sur la procédure de suivi. Nous devons lui être reconnaissants pour tous les efforts qu’il a produits, mais j’émettrai des réserves extrêmement fortes quant au rapport et sur ses répercussions sur le Conseil de l'Europe si le projet de résolution devait être adopté.

Nous devons nous assurer que nous ne nous défaisons pas de nos responsabilités, c’est essentiel, car il ne faut pas chercher à les partager et inviter des copartenaires dans ce travail. Il nous faut rester extrêmement prudents quant au rôle que joue le Comité des Ministres. En effet, si nous devions poursuivre sur cette voie, nous serions sur une pente raide et glissante : inévitablement, le Comité des Ministres serait convaincu d’avoir un veto et le droit de diriger les activités de l’Assemblée parlementaire en matière de suivi. Or, selon moi, le rapport ouvre la porte à ce scénario catastrophe pour l’Assemblée parlementaire.

Il faut changer radicalement la façon dont nous réalisons le suivi, revoir la manière de traiter de ces questions en commission. Tout parlementaire qui a été membre de la commission de suivi pendant un temps peut éprouver des réserves fortes. Il va sans dire que le changement est nécessaire dans la manière de traiter des rapports, de proposer les amendements, de les voter parfois. Bien des choses doivent être modifiées, car si le rapport s’attaque à certaines questions, pour autant, il n’a pas réussi à évoquer les changements radicaux nécessaires.

Bien sûr, des changements ont été opérés afin que les rapporteurs ne soient pas nommés à vie. C’est un progrès, certes, mais j’aimerais que les mandats soient de plus courte durée encore. J’aimerais que la manière dont sont choisis les pays sous suivi fasse l’objet d’une approche plus uniforme, car l’on peut considérer qu’il y a deux poids, deux mesures selon les pays. Quand le Conseil de l'Europe procède au suivi d’un pays, c’est, pourrait-on dire, un peu « à la tête du client ». Il y a donc des propositions qui méritent d’être soutenues, mais avant tout l’amendement 10 ne doit pas l’être, car il est indispensable que l’Assemblée maintienne son contrôle. Il faut chérir ce droit et ne pas le céder à d’autres.

LE PRÉSIDENT – M. Leyden, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Nous en venons à la réponse de la commission pour laquelle le rapporteur dispose de sept minutes.

M. HERKEL (Estonie), rapporteur* – Merci, chers collègues, de vos interventions, auxquelles je répondrai, notamment lorsqu’elles viennent de ceux qui sont en désaccord avec moi. Je présente donc par avance mes excuses à ceux qui m’ont soutenu.

Je commencerai par répondre à M. Binley et en partie à M. Hancock qui a utilisé le même argument. Si j’admire la rhétorique britannique, je ne suis pas d’accord avec leurs arguments. Certains me semblent quelque peu étranges. Ils ont déclaré que nous renoncerions à notre responsabilité si nous envoyions les rapports de suivi au Comité des Ministres. Mais nous envoyons bien nos résultats aux gouvernements qui doivent connaître les résultats de nos procédures ! Si tel n’était pas le cas, il serait difficile d’obtenir de leur part des mesures concrètes. Nous ne pouvons continuer à entendre ce silence retentissant de la part des gouvernements, à propos des prisonniers par exemple.

M. Zourabian a émis des remarques très critiques sur la façon dont l’Arménie est décrite dans mon rapport comme dans d’autres rapports d’ailleurs. J’aimerais qu’il rencontre les rapporteurs qui ont établi des rapports par le passé, car mon rapport sur l’Arménie s’en est inspiré.

M. Seyidov a déclaré que nous étions tous égaux. Mme Taktakishvili lui a répondu : nous sommes égaux en droit, certes, mais dans certains de nos pays les journalistes sont opprimés, dans d’autres les candidats à la présidence de la République sont jetés en prison la veille des élections. Nous ne sommes donc pas tous égaux.

Mme Khidasheli, comme à l’habitude, a défendu de façon vivante son pays. Elle a déclaré que des progrès étaient intervenus dans son pays, qui n’étaient pas repris dans le rapport. Or, nous avons entendu d’autres délégués géorgiens qui ont un autre point de vue que le sien, ce qui est sans nul doute un signe positif de démocratie, mais je puis l’assurer que la Géorgie est toujours restée au cœur de nos préoccupations. Nous avons d’ailleurs établi plusieurs rapports et nous allons débattre d’amendements portant sur la Géorgie.

M. Slutsky a déclaré également que l’examen des rapports de suivi par le Comité des Ministres ferait doublon avec notre travail.

Quand la branche législative envoie un rapport à l’exécutif, il ne s’agit de rien d’autre que d’équilibre des pouvoirs. Ce procédé est conforme au fonctionnement normal des pouvoirs dans une organisation comme la nôtre.

M. Sasi a insisté sur les critères à propos desquels nous pourrions nous mettre d’accord pour clore une procédure de suivi. Je suis d’accord. Sans doute cet aspect fera-t-il partie de ceux dont nous devrons discuter lorsque nous créerons un groupe de travail spécifique au sein de la commission de suivi, en application de l’un des points du projet de résolution et afin de traiter les problèmes que pose la procédure actuelle.

Un mot encore avant que nous ne passions au vote sur les amendements. Voter pour l’amendement 10 revient à voter contre le projet de recommandation, contre son principe même : sans le paragraphe 3, la recommandation serait vidée de son contenu. Je vous en prie, ne détruisez pas la recommandation et votez tous contre l’amendement 10 !

LE PRÉSIDENT – Mme Christoffersen ne souhaitant pas intervenir au nom de la commission de suivi, dont elle est vice-présidente, la discussion générale est close.

La commission de suivi a présenté un projet de résolution sur lequel 12 amendements ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel un amendement a été déposé.

La commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement sur les amendements 12 et 13 au projet de résolution, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. HERKEL (Estonie), président de la commission de suivi et rapporteur* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – Je donne lecture de ces amendements.

L’amendement 12, déposé par Mme Taktakishvili, M. Kandelaki, Mme Orobets, M. Villumsen, Mme de Pourbaix-Lundin, M. Leyden, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14, après les mots « dans la Fédération de Russie, plusieurs lois récemment adoptées qui restreignent les libertés fondamentales (les lois sur la criminalisation de la diffamation, l’internet, les rassemblements, les organisations non gouvernementales [ONG] et la propagande de l’homosexualité auprès des mineurs), ainsi que les graves préoccupations concernant une justice rendue en fonction de considérations politiques, renforcées par les jugements prononcés récemment contre M. Alexeï Navalni et le défunt M. Sergueï Magnitski », à insérer les mots suivants : « et la non-exécution des résolutions sur les conséquences de la guerre entre la Géorgie et la Russie (résolutions 1633, 1647 et 1683). »

L’amendement 13, déposé par Mme Taktakishvili, MM. Gulyás, Kandelaki, Mmes Orobets, Čigāne, M. Leyden, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 20.4, après les mots « l’ancien Ministre de la Santé », à insérer les mots suivants : « et le Ministre de la Défense ».

En l’absence d’objections, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

LE PRÉSIDENT – Nous en venons à la discussion des autres amendements.

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement 4, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 4, à remplacer les mots « autorités de fait des régions séparatistes » par les mots suivants : « autorités d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud ».

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – J’aimerais souligner une fois de plus que l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont des Etats souverains. Il appartient aux Abkhazes et aux Ossètes du Sud de choisir les organisations dans lesquelles ils souhaitent entrer.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Cet avis n’est pas partagé par notre Organisation. Cette Assemblée a adopté de nombreux textes qui affirment le contraire. Tous les Etats membres, sauf la Fédération de Russie, sont opposés à cet amendement.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission de suivi* – La commission est défavorable à l’amendement.

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L’amendement 4 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 5, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 4, à remplacer les mots « les autorités de fait à Sukhumi et Tskhinvali » par les mots suivants : « les autorités d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud ».

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – Il est indispensable de dire que l’Ossétie du Sud et l’Abkhazie sont des Etats indépendants. C’est une réalité que les Etats membres du Conseil de l’Europe doivent reconnaître.

Mme KHIDASHELI (Géorgie)* – Cela a été dit à propos de l’amendement 4 : pour notre Assemblée comme pour toutes les organisations internationales, il s’agit de territoires occupés et non d’Etats indépendants.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

>

L’amendement 5 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 1, déposé par MM. Japaridze, Berdzenishvili, Chikovani, Mmes Khidasheli, Maghradze, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, après les mots « suite à une grâce présidentielle ; », à insérer les mots suivants : « en Géorgie, le transfert pacifique de pouvoir constitutionnel et l’émergence d’un véritable cadre démocratique et pluraliste à la suite des élections législatives de 2012, un signe des progrès substantiels réalisés dans la mise en œuvre des réformes juridiques et des politiques transversales dans les domaines judiciaire, du droit pénal, du droit du travail et des droits de l’homme, dont la nouvelle stratégie de règlements amiables lancée par le gouvernement pour soulager la Cour européenne des droits de l’homme du nombre élevé d’affaires venant de Géorgie. »

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Cet amendement a été examiné en commission et M. Herkel en a proposé une version acceptable.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par la commission de suivi du sous-amendement oral suivant : « Dans l’amendement 1, après les mots “législatives de 2012ˮ, supprimer les mots “, un signe des progrès substantiels réalisés dans la mise en œuvre des réformes juridiques et des politiques transversales dans les domaines judiciaire, du droit pénal, du droit du travail et des droits de l’homme, dont la nouvelle stratégie de règlements amiables lancée par le gouvernement pour soulager la Cour européenne des droits de l’homme du nombre élevé d’affaires venant de Géorgieˮ ».

Je considère ce sous-amendement comme recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission et rapporteur* – J’ai simplement abrégé l’amendement sans en remettre en cause le fond.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Je suis d’accord avec ce sous-amendement.

>

Le sous-amendement oral est adopté.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Le texte proposé ne correspond pas à la réalité. En outre, lorsque cette procédure a été mise en œuvre en Géorgie, les membres de l’Assemblée parlementaire n’ont pas souligné tous les points positifs qui auraient mérité de l’être.

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L’amendement 1, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 6, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Mme Memecan, MM. Dişli, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 13, à ajouter les mots suivants : « dans la Fédération de Russie, l’abaissement du seuil électoral de 7 % à 5 %, la libéralisation des règles d’enregistrement des partis politiques et la réduction du nombre de membres exigé pour l’enregistrement, tout comme la réduction du nombre de signatures nécessaires pour un candidat aux élections présidentielles, passé de 2 millions à 100 000, l’exemption de l’obligation de recueillir des signatures pendant les élections à d’autres niveaux. »

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – Au paragraphe 13 du projet, il me paraît indispensable de parler de tous les changements législatifs positifs qui ont eu lieu en Fédération de Russie ils sont cités dans l’amendement.

LE PRÉSIDENT – La présidence a été saisie par la commission de suivi du sous-amendement oral suivant :

Dans l’amendement 6, après les mots « enregistrement des partis politiques », supprimer les mots « la libéralisation des règles d’enregistrement des partis politiques et la réduction du nombre de membres exigé pour l’enregistrement, tout comme la réduction du nombre de signatures nécessaires pour un candidat aux élections présidentielles, passé de 2 millions à 100 000, l’exemption de l’obligation de recueillir des signatures pendant les élections à d’autres niveaux ».

Je considère ce sous-amendement comme recevable au regard des critères du Règlement1. Il ne peut toutefois être pris en compte si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Il n’y a pas d’objection à la prise en compte de ce sous-amendement oral. Nous allons donc l’examiner.

M. HERKEL (Estonie), président de la commission et rapporteur* – Là encore, il s’agit d’égalité de traitement. Nous avons raccourci le paragraphe sur la Géorgie, nous le faisons aussi pour la Russie. Mais le sens de l’amendement est préservé.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Tout à l’heure, j’ai essayé d’expliquer que, parfois, lorsque les amendements sont déposés en commission, certains essaient, ensuite, de les dénaturer.

Nous avons là un pays qui a fait de gros efforts pour améliorer son système et nous devrions refléter cela dans le détail. Si vraiment, nous ne devons pas nous exposer à des accusations du deux poids, deux mesures, notamment vis-à-vis de la Russie, il faut mettre aux voix l’amendement dans son intégralité.

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – La commission de suivi n’a pas examiné ce sous-amendement. Plus on est concret et mieux on comprend ce qu’il se passe dans le pays. Pour donner une image complète de la situation en Russie ces derniers temps, il faut dire qu’il y a eu, en particulier, un abaissement du seuil électoral de 7 % à 5 %. Dire que le nombre de signatures requises est passé de 2 millions à 100 000 pour se présenter aux élections présidentielles illustre bien le fait que des obligations ont disparu. Cela mérite quand même d’être cité. Ne plus en parler, c’est discréditer tous les efforts réalisés ces derniers temps en Fédération de Russie.

LE PRÉSIDENT – Pour que les choses soient bien claires, vous êtes donc contre le sous-amendement oral ?

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – En effet, Monsieur le Président.

>

Le sous-amendement oral est adopté.

>

L’amendement 6, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 2, déposé par MM. Japaridze, Berdzenishvili, Chikovani, Mmes Khidasheli, Maghradze, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14, à remplacer les mots « l’arrestation de plusieurs chefs de l’opposition et, plus généralement, les questions relatives à l’indépendance du pouvoir judiciaire et à l’administration de la justice » par les mots suivants : « dans le contexte d’un grand nombre de poursuites engagées contre d’anciens fonctionnaires gouvernementaux ».

>

Si cet amendement est adopté, l’amendement 11 n’aura plus d’objet.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Cet amendement se justifie par son texte même.

Mme TAKTAKISHVILI (Géorgie)* – Je vous demande de voter contre car les auteurs de cet amendement veulent effacer le fait que les leaders d’opposition sont arrêtés dans mon pays et que des problèmes se posent concernant l’indépendance du judiciaire. Le secrétaire général de mon parti est aujourd’hui en détention provisoire. Son arrestation s’est produite la veille de l’élection présidentielle.

Accepter cet amendement ne ferait qu’encourager ceux qui s’opposent à la liberté d’expression.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – La commission est contre l’amendement.

>

L’amendement 2 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 11, déposé par Mme Taktakishvili, MM. Gulyás, Kandelaki, Mmes Orobets, Čigāne, M. Leyden, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14, après les mots « en Géorgie, la cohabitation difficile, l’arrestation de plusieurs chefs de l’opposition et, plus généralement, les questions relatives à l’indépendance du pouvoir judiciaire », à remplacer les mots « et à l’administration de la justice » par les mots suivants : «, l’administration sélective de la justice, y compris les interrogatoires massifs et la détention provisoire controversée des chefs de l’opposition. »

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Cet amendement est technique. Il rappelle des faits bien connus, à savoir que de nombreuses personnes sont en détention provisoire et que cela est très controversé. Comme je l’ai dit dans mon intervention, 12 000 personnes ont été harcelées et interrogées par la police. C’est un rappel de la situation.

Mme KHIDASHELI (Géorgie)* – Nous sommes contre cet amendement qui donne des conclusions sur un prétendu fait qui ne s’est pas encore produit ! Les procès sont en cours. Introduire cela dans un document de l’Assemblée serait comme prendre une décision par avance. C’est préempter la décision des tribunaux.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission * – La commission est défavorable à cet amendement.

>

L’amendement 11 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 7, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 14, à supprimer les mots : « ainsi que les graves préoccupations concernant une justice rendue en fonction de considérations politiques, renforcées par les jugements prononcés récemment contre M. Alexeï Navalni et le défunt M. Sergueï Magnitski. »

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – Il est nécessaire de se préoccuper de la situation dans l’ensemble des pays du Conseil de l’Europe et pas seulement dans un pays en particulier. En outre, ce paragraphe préjuge de l’issue du travail de la justice.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Je suis contre cet amendement. Les affaires Khodorkovsky et Magnitski ont été motivées par des considérations politiques. Il y a un consensus très large sur ce point au sein de la communauté internationale.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – Avis défavorable.

>

L’amendement 7 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 8, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 17, après les mots : « les non-Estoniens », à insérer les mots suivants : « et les non-citoyens ».

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – Certaines minorités subissent une situation inacceptable. Des centaines de milliers de personnes sont concernées. Elles sont aujourd’hui traitées comme des « non-citoyens » et cela se déroule sur le sol même de l’Europe ! Il s’agit de Géorgiens, d’Arméniens, d’Azerbaidjanais et d’Ukrainiens notamment. Ils ne disposent pas des mêmes droits que les autres citoyens européens ! Je vous demande aujourd’hui de soutenir ces personnes, qui attendent notre aide, et je ne le fais pas au nom de mon pays !

M. HERKEL (Estonie), rapporteur* – Je voudrais commencer par un rappel au Règlement. Je ne me suis jamais exprimé, dans mes différentes interventions, au nom de mon pays. Je n’utilise jamais cet argument ! La citoyenneté et l’appartenance nationale ne coïncident pas. Je suis contre cet amendement.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – Avis défavorable.

>

L’amendement 8 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 3, déposé par MM. Japaridze, Berdzenishvili, Chikovani, Mmes Khidasheli, Maghradze, tend, dans le projet de résolution, au paragraphe 20.4, après les mots : « la Géorgie à veiller », à insérer les mots suivants : « à l’avenir également », et après les mots « se déroule dans la transparence », à insérer les mots suivants : « conformément à l’Etat de droit ».

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – L’amendement se justifie par lui-même.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Chers collègues, je vous demande de rejeter cet amendement qui semble annoncer des persécutions des représentants de l’opposition en Géorgie.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – Avis défavorable.

>

L’amendement 3 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – L’amendement 9, déposé par MM. Fetisov, Sudarenkov, Gorbunov, Shamkov, Tarlo, Slutsky, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 22.4, à insérer le paragraphe suivant : « l’Estonie et la Lettonie à prendre des mesures visant à éliminer l’apatridie, conformément aux recommandations du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe. »

M. FETISOV (Fédération de Russie)* – Les minorités nationales de l’Estonie et de la Lettonie subissent des discriminations. Ces deux pays n’ont toujours pas rempli leurs obligations à leur égard, ce qui est tout simplement honteux.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Je demande à l’Assemblée de ne pas appuyer cet amendement. Il est faux du point de vue factuel.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* – Avis défavorable.

>

L’amendement 9 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13304, tel qu’il a été amendé.

>

Le projet de résolution, amendé, est adopté (86 voix pour, 31 voix contre et 9 abstentions).

LE PRÉSIDENT – Nous en venons au projet de recommandation, sur lequel un amendement a été déposé.

L’amendement 10, déposé par MM. Aligrudić, Vaksdal, Mme Woldseth, MM. Shlegel, D. Davies, Binley, Alexander [The Earl of] Dundee, Baroness Diana Eccles, MM. Liddell-Grainger, Harutyunyan, Seyidov, Huseynli, Timchenko, Mme Kazakova, MM. Morozov, Gattarov, Pushkov, Mmes Nikolaeva, Erkal Kara, MM. Tarlo, Shamkov, Mmes Burykina, Gerasimova, Borzova, MM. Makhmutov, Arshba, Kalashnikov, Kivalov, Chope, Mme Memecan, MM. Dişli, Slutsky, Petrenco, Hunko, Díaz Tejera, Gutiérrez, Kaikkonen, Mme Guzenina-Richardson, M. Hancock, tend, dans le projet de recommandation, à supprimer le paragraphe 3.

>

Je précise que si cet amendement est adopté, il n’y aura en réalité plus de projet de recommandation. L’article 24.1.a de notre Règlement précise bien, en effet, que l’Assemblée, dans ce cadre, doit avoir un message à transmettre au Comité des Ministres. Or si l’amendement 10 est voté, il n’y a plus de message.

M. ALIGRUDIĆ (Serbie)* – Le rapporteur ne peut pas affirmer que le paragraphe 3 du projet de recommandation ne vise qu’à évoquer l’envoi de nos conclusions au Comité des Ministres.

Non ! Si tout ce que nous disons ici est mis à l’ordre du jour du Comité des ministres, cela signifie, au fond, que nos conclusions n’ont plus aucune importance. Or une telle évolution saperait la position de l’Assemblée parlementaire. Elle ne saurait donc être acceptée.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* - Rappel au Règlement ! Monsieur le Président, vous venez de déclarer qu’en cas de suppression du paragraphe 3 du projet de recommandation, le texte qui en résulterait n’aurait plus de sens. Est-ce bien cela ?

LE PRÉSIDENT - Je me réfère au paragraphe 24.1.a. de notre Règlement : « Une recommandation consiste en une proposition de l’Assemblée, adressée au Comité des Ministres, dont la mise en œuvre échappe à la compétence de l’Assemblée mais relève des gouvernements. » Si la recommandation se réduit aux paragraphes 1et 2, elle ne contient plus de proposition, et n’a donc plus de sens.

Je vous rappelle le texte du projet : « 1. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe se réfère à sa Résolution… (2013) sur l’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée, dans laquelle elle est déterminée à poursuivre une réflexion plus générale sur les moyens de renforcer l’efficacité et l’impact des procédures de suivi de l’Assemblée à l’égard de tous les Etats membres du Conseil de l'Europe.

« 2. Une coopération renforcée et une synergie accrue entre l’Assemblée et le Comité des Ministres pourraient largement contribuer à l’amélioration de la cohérence et des stratégies dans le domaine de suivi des obligations et engagements contractés par tous les membres lors de leur adhésion au Conseil de l’Europe, tout en renforçant et en améliorant la procédure. L’Assemblée salue le travail remarquable accompli par les mécanismes de suivi du Conseil de l'Europe et l’acquis qu’ils ont constitué au fil des ans. »

Ces deux paragraphes ne répondent pas aux critères définis par l’article 24.1.a, contrairement au troisième, qui commence par ces mots : « L’Assemblée appelle »… S’il est supprimé, il n’y a plus de recommandation.

Cela étant, je ne prends pas parti, je me contente de vous rappeler les termes du Règlement.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* - Si la suppression du paragraphe 3 entraîne celle de la recommandation, le projet de recommandation lui-même n’a aucun sens ! Dans ces conditions, à quoi servent les deux premiers paragraphes ?

LE PRÉSIDENT – Ces paragraphes introduisent et expliquent le troisième. Ce sont, en quelque sorte, des considérants.

Je ne suis pas l’auteur du projet. Je ne fais qu’exposer les faits, sans prendre parti pour ou contre l’amendement. Souhaitez-vous que je vous fasse apporter le Règlement, monsieur Binley ? Il a l’avantage d’être rédigé en anglais et en français…

M. HERKEL (Estonie), rapporteur* - Je souhaite réfuter l’argumentation de M. Aligrudić : la transmission de nos conclusions au Comité des Ministres n’aurait aucune conséquence pour l’Assemblée parlementaire, et ne signifierait certainement pas que nous renonçons à exercer nos responsabilités. Au contraire, cela ne ferait que donner plus de poids à nos conclusions.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), vice-présidente de la commission* - La commission est défavorable à l’amendement.

>

L’amendement 10 est adopté.

LE PRÉSIDENT – Selon moi, l’adoption de cet amendement fait tomber la recommandation. Souhaitez-vous malgré tout, Monsieur le rapporteur, que je fasse procéder au vote sur le projet lui-même ? Cela aurait-il beaucoup de sens ?

M. HERKEL (Estonie), rapporteur* - Je ne le pense pas, en effet, même si je n’ai pas le Règlement sous les yeux.

LE PRÉSIDENT – Je me devais de vous poser la question, car vous êtes aussi président de la commission. Je ne pense pas qu’il y ait du sens à faire voter sur le projet de recommandation dès lors que l’amendement 10 a été adopté.

La résolution a été adoptée, mais la recommandation ne l’a pas été.

7. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu demain, à dix heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

(La séance est levée à 20 h 5.)

SOMMAIRE

1. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie (suite)

2. Modifications dans la composition des commissions

3.        Le droit des enfants à l’intégrité physique

Présentation par Mme Rupprecht du rapport de la commission des questions sociales (Doc. 13297)

Orateurs : Mme Nikolaeva, M. Jónasson, Mme Kyriakides, M. Schennach, Mme Acketoft, M. Ghiletchi, Mmes Blondin, Fort, Antilla, M. Sidyakin, Mmes Virolainen, Szél, Clune, Bonet Perot, MM. Kolman, D. Davies, Mmes Mattila, Graham, M. G. Davies, Mmes Memecan, Erkal Kara, Kazakova, Al-Astal, Gastélum Bajo.

Réponses de Mme le rapporteure et de Mme la présidente de la commission des questions sociales.

Votes sur un projet de résolution amendé et sur un projet de recommandation.

4. Evolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (juin 2012 – septembre 2013)

Présentation par M. Herkel du rapport de la commission de suivi (Doc.13304)

Orateurs : MM. Villumsen, Allavena

5. Election d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre de la Roumanie (résultats du scrutin)

6. Evolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (juin 2012 – septembre 2013) (suite)

Orateurs : M. Schennach, Mme Reps, M. Binley, Mme Čigāne, MM. Beneyto, Zourabian, Seyidov, Nikoloski, Mmes Guzenina-Richardson, Zimmerman, M. Recordon, Mmes de Pourbaix-Lundin, Khidasheli, MM. Gaudi Nagy, Mota Amaral, Mme Kanelli, MM. Wach, Slutsky, Xucla, Pushkov, Sasi, Japaridze, Mme Kyriakides, MM. Sobolev, Stroe, Shlegel, Kandelaki, Mmes Memecan, Taktakishvili, MM. Hancock

Réponse de M. le rapporteur

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un amendement à un projet de recommandation.

7. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA

Karin ANDERSEN*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI/Gerardo Giovagnoli

Khadija ARIB/Tineke Strik

Volodymyr ARIEV

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI*

Daniel BACQUELAINE*

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE/Giorgi Kandelaki

Taulant BALLA*

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Silvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI/Tinatin Khidasheli

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Anna Maria BERNINI/Giuseppe Galati

Teresa BERTUZZI*

Robert BIEDROŃ*

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Ľuboš BLAHA*

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO*

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET/Jacques Legendre

Mladen BOJANIĆ

Olga BORZOVA

Mladen BOSIĆ/Nermina Kapetanović

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Alessandro BRATTI*

Márton BRAUN/László Koszorús

Gerold BÜCHEL*

André BUGNON

Natalia BURYKINA

Sylvia CANEL*

Nunzia CATALFO*

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT

Özlem CEKIC*

Elena CENTEMERO*

Lorenzo CESA*

Otto CHALOUPKA*

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE*

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE

Agustín CONDE

Telmo CORREIA

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO*

Jonny CROSIO*

Katalin CSÖBÖR

Milena DAMYANOVA

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER*

Roel DESEYN

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN*

Karl DONABAUER/Edgar Mayer

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV

Doris FIALA*

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON*

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSON

Ruslan GATTAROV/Tamerlan Aguzarov

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI/Iwona Guzowska

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA

Sandro GOZI*

Fred de GRAAF*

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM

Patrick De GROOTE*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST/Marie-Louise Fort

Dzhema GROZDANOVA

Attila GRUBER

Gergely GULYÁS

Pelin GÜNDEŞ BAKIR*

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI*

Hamid HAMID*

Mike HANCOCK

Margus HANSON/Ester Tuiksoo

Davit HARUTYUNYAN/Naira Karapetyan

Håkon HAUGLI*

Norbert HAUPERT

Alfred HEER/Luc Recordon

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN*

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV/Sahiba Gafarova

Vladimir ILIĆ*

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI

Tadeusz IWIŃSKI/Zbigniew Girzyński

Denis JACQUAT/Frédéric Reiss

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE

Ramón JÁUREGUI*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ*

Antti KAIKKONEN/Sirkka-Liisa Anttila

Ferenc KALMÁR

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI*

Deniza KARADJOVA*

Marietta KARAMANLI/Maryvonne Blondin

Ulrika KARLSSON*

Burhan KAYATÜRK*

Jan KAŹMIERCZAK*

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH*

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Attila KORODI

Alev KORUN*

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Dmitry KRYVITSKY/Yury Shamkov

Václav KUBATA*

Ertuğrul KÜRKÇÜ*

Athina KYRIAKIDOU/Stella Kyriakides

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD/Philippe Bies

Valentina LESKAJ*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT/Nikolaj Villumsen

François LONCLE*

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA

Sir Alan MEALE/ Geraint Davies

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV/Olga Kazakova

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Vesna Marjanović

Jerzy MONTAG/Viola Von Cramon-Taubadel

Rubén MORENO PALANQUES*

Igor MOROZOV/Anvar Makhmutov

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK

Melita MULIĆ

Lydia MUTSCH/Fernand Boden

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ

Marian NEACŞU

Fritz NEUGEBAUER

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Michele NICOLETTI*

Brynjar NÍELSSON*

Elena NIKOLAEVA

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL/Grzegorz Czelej

Judith OEHRI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE/Michael Connarty

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI*

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Johannes PFLUG*

Foteini PIPILI

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT*

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV

Mailis REPS

Eva RICHTROVÁ*

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET/Pascale Crozon

Marlene RUPPRECHT

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV/Fazil Mustafa

Vincenzo SANTANGELO*

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL/Alexey Ivanovich Aleksandrov

Arturas SKARDŽIUS/Algis Kašėta

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV

Christoph STRÄSSER

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ/Bernadett Szél

Chiora TAKTAKISHVILI

Vyacheslav TIMCHENKO/Alexander Sidyakin

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON*

Mihai TUDOSE/Daniel Florea

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Konstantinos TZAVARAS/Liana Kanelli

Tomáš ÚLEHLA

Ilyas UMAKHANOV/Alexander Ter-Avanesov

Petrit VASILI

Volodymyr VECHERKO/Larysa Melnychuk

Mark VERHEIJEN*

Anne-Mari VIROLAINEN

Vladimir VORONIN*

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ*

Zoran VUKČEVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ

Piotr WACH

Johann WADEPHUL

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Katrin WERNER*

Karin S. WOLDSETH/Ingjerd Schou

Gisela WURM*

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV/Robert Shlegel

Naira ZOHRABYAN*

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Tina ACKETOFT

Christian BARILARO

Kerstin LUNDGREN

Eduard SHALSI

Spyridon TALIADOUROS

Konstantinos TRIANTAFYLLOS

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Don DAVIES

Ernesto GÁNDARA CAMOU

Diva Hadamira GASTÉLUM BAJO

Javier LOZANO ALARCÓN

Miguel ROMO MEDINA

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

Bernard SABELLA

Annexe II

Liste des représentants ou suppléants qui ont participé au vote pour l’élection d’un juge à la Cour européenne des droits de l’homme au titre la Roumanie

Miloš ALIGRUDIĆ

Khadija ARIB/Tineke Strik

Theodora BAKOYANNIS

Gerard BARCIA DUEDRA/Silvia Eloïsa Bonet Perot

Anne BRASSEUR

Agustín CONDE

Telmo CORREIA

Carlos COSTA NEVES

Hans FRANKEN

Sir Roger GALE

Valeriu GHILETCHI

Jarosław GÓRCZYŃSKI/Iwona Guzowska

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Mike HANCOCK

Alfred HEER/Luc Recordon

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Athina KYRIAKIDOU/Stella Kyriakides

Lone LOKLINDT/Nikolaj Villumsen

Epameinondas MARIAS

Pirkko MATTILA

José MENDES BOTA

Melita MULIĆ

Joseph O'REILLY

José Ignacio PALACIOS

Foteini PIPILI

Leonid SLUTSKY

Theodora TZAKRI

Konstantinos TZAVARAS/Liana Kanelli

Johann WADEPHUL

Karin S. WOLDSETH/Ingjerd Schou