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AS (2013) CR 34

 

SESSION ORDINAIRE DE 2013

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-quatrième séance

Jeudi 3 octobre 2013 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5, sous la présidence de Mme de Pourbaix-Lundin, Vice-Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

1. La situation en Syrie : débat selon la procédure d’urgence

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. von Sydow, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie, sur la situation en Syrie (Doc. 13320).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

Je vous indique que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à midi, pour entendre l’allocution du Président de la Serbie. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 11 h 50 afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. von SYDOW (Suède), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* –Mes chers collègues, nous avons été confrontés lors de la réunion de la commission politique, début septembre, à une escalade de la violence militaire en Syrie. Nous étions très préoccupés par le risque d’une éventuelle intervention unilatérale, américaine ou française. Nous avions alors décidé que ce point devait faire l’objet d’un débat d’urgence durant la session d’octobre.

Mais depuis cette réunion de septembre, les choses ont évolué. Les représentants américains et russes ont trouvé le moyen de traiter la situation dans un contexte onusien. Bien sûr, de nombreux problèmes restent à traiter, en Syrie comme au sein de la communauté internationale.

En conséquence, nous avons décidé de faire un rapport sur la Syrie, en prenant comme point de départ la question des armes chimiques.

La tragédie en Syrie dure depuis deux ans et demi. La population est exposée à tous les périls, y compris la mort. L’utilisation d’armes chimiques est évidemment une tragédie, mais ce n’est hélas qu’une fraction des atrocités subies quotidiennement par la population. Le nombre de réfugiés augmente, des millions de personnes sont touchées par la guerre et vivent dans des conditions misérables, même si les pays limitrophes font preuve d’une grande générosité.

Au départ, nous avions pensé rédiger une résolution exposant la position de l’Assemblée du Conseil de l'Europe, mais un certain sentiment de frustration a joué, nos gouvernements n’ayant que peu réagi. Ce n’est en effet que la semaine dernière que l’éradication des armes chimiques est passée à l’ordre du jour. Nous avons alors voulu que notre avis soit relayé par nos gouvernements respectifs et c’est ainsi que nous avons finalement présenté un projet de recommandation, qui devra, bien sûr, obtenir une majorité des deux tiers pour être adopté.

Oui, nous voulons un cessez-le-feu, mais dans l’état actuel de la situation, il ne sera pas aisé d’y parvenir. Il n’en reste pas moins que ce cessez-le-feu s’impose pour que la procédure de contrôle des armements chimiques soit mise en œuvre. Oui, la Conférence de Genève s’impose également, mais l’ensemble des forces d’opposition n’ont pas accepté d’être présentes. Nous ne savons donc pas à l’heure actuelle quelles seront les forces politico-militaires qui y seront représentées. Si tout ce processus –élimination des armes chimiques, « Genève 2 » – permettait de trouver une solution sur la durée, alors, oui, le début de semaine du mois de septembre pourra être considéré comme un point de départ. Que dire du rôle de la communauté internationale si ce n’est qu’elle n’a pas été très digne jusqu’à présent ? Mais le champ est désormais ouvert pour qu’elle accentue son rôle. À noter toutefois que le Conseil de sécurité de l’Onu laisse de côté des points qui devraient être inscrits à l’ordre du jour.

L’avis de l’Assemblée du Conseil de l'Europe, porteur des valeurs de démocratie, des droits de l’homme et de la prééminence du droit, doit être relayé. Il convient également de rappeler que tous les auteurs de violences commises dans le cadre de la guerre civile en Syrie doivent tomber sous le coup des conventions de Genève.

La fin de la guerre sera le test. Il faut arriver à un Etat inclusif et démocratique. Et pour que le succès soit au rendez-vous, il convient de faire pression sur le régime syrien actuel comme sur les groupes d’opposition, car il est important d’unifier les forces d’opposition qui préconisent la tolérance, la démocratie et qui veulent éliminer les groupes extrémistes et terroristes. Il nous faut arriver à un infléchissement de la situation et amener à la table des négociations l’ensemble des parties concernées. « Genève 2 » doit être le début d’une ère nouvelle.

Il convient d’injecter nos valeurs dans le processus qui a débuté voilà quelques semaines. Il appartient aux acteurs internationaux d’assumer leurs obligations et nous devons, quant à nous, promouvoir nos valeurs de démocratie, des droits de l’homme et de prééminence du droit.

LA PRÉSIDENTE* – Je vous remercie, Monsieur le rapporteur. Il vous reste un temps de parole de 4 minutes 30.

La discussion générale est ouverte.

M. WALTER (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Le recours aux armes chimiques n’est pas acceptable. Il n’était déjà pas acceptable il y a un siècle lors de la première guerre mondiale. Le droit international l’a d’ailleurs banni en 1925 dans le Protocole de Genève et a réaffirmé cette interdiction en 1949 dans la Convention de Genève.

Nous rejetons toute possibilité de recours aux armes chimiques en Syrie, quels que soient les auteurs des attaques. La communauté internationale se concentre désormais sur cet objectif mais il a fallu trop de temps pour en arriver là. N’oublions pas que 100 000 personnes sont mortes au cours des deux dernières années, que deux millions de personnes ont fui dans des pays voisins. On pense, en outre, que cinq millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur de la Syrie en raison de la guerre.

Le changement de régime par des moyens militaires n’est pas et n’a jamais été une bonne option. C’est pourquoi le parlement de mon pays et d’autres se sont opposés aux frappes militaires. D’ailleurs, je me suis toujours exprimé contre l’éventualité d’un armement de l’opposition tant il est vrai que la situation en Syrie n’est pas simple. En effet, un grand nombre de Syriens continuent de soutenir le régime de Bachar el-Assad. Les groupes de l’opposition me l’ont dit, ils sont déterminés en cas de réussite à punir tous ceux qui auraient soutenu le régime de Bachar el-Assad. Une fois cela fait, il est très probable qu’ils se diviseraient, car ils sont loin d’être d’accord en tous points.

Par conséquent, la seule solution est d’amener l’ensemble des parties autour d’une table de conférence. « Genève 2 » est la solution. Tout le monde doit y participer : Bachar el-Assad, les groupes de l’opposition et l’Iran.

M. KÜRKÇÜ (Turquie), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Mon groupe se félicite de ce rapport et remercie le rapporteur d’être parvenu à un texte équilibré.

La situation en Syrie ne fait que confirmer les préoccupations que nous avions exposées lors du débat sur le même sujet l’année dernière. Le territoire syrien est en ruine, la catastrophe humanitaire est terrible.

Le rapporteur évoque également les efforts de démantèlement des armes chimiques en Syrie et les responsables de cette tragédie. Le peuple de Syrie paye le prix d’une guerre menée par les Etats-Unis au Moyen-Orient. Certes, le régime d’Assad est terrible, mais la révolte a été alimentée par les Etats-Unis sans qu’ils en évaluent correctement les risques. Les calculs politiques ont été mauvais.

L’Assemblée a elle aussi jugé que l’effondrement du régime d’Assad était proche, comme en témoigne sa dernière résolution. C’est parce qu’ils en étaient convaincus que les pays occidentaux et notamment Ankara ont sous-estimé les atrocités perpétrées par l’ASL dite modérée, dont la moitié des effectifs au moins entretiennent des liens avec Al-Qaida, Al-Nosra et d’autres djihadistes. Il y a eu un flux de réfugiés et beaucoup œuvrent pour instaurer la charia en Syrie. M. von Sydow le dit dans son rapport, la présence de djihadistes sur le territoire alimente les tensions entre minorités ethniques et religieuses et pousse les chrétiens et les juifs, entre autres, à quitter le pays.

La recommandation, par laquelle nous pouvons apporter notre soutien à l’émergence d’une démocratie en Syrie, est donc essentielle. Il s’agit d’aider l’Assemblée à s’engager sur une nouvelle voie, à jouer un rôle constructif dans cette affaire. Il reste beaucoup de travail avant d’arriver à une Syrie démocratique, pluriethnique, libre de la dictature des Assad comme des djihadistes et d’Al-Qaida.

Mme BAKOYANNIS (Grèce), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je félicite le président de la commission pour cet excellent rapport et ce projet de recommandation auquel nous apporterons notre soutien.

Lorsque l’on parle de la Syrie, le désespoir et la honte s’emparent de moi. Le désespoir, tant la crise politique et, surtout, humanitaire est devenue tragique. Plus de 2 millions de réfugiés ont déjà quitté le pays ; 6,8 millions de personnes sont dans un état de cruelle nécessité ; 4,25 millions sont déplacées et plus de 70 % des victimes sont des femmes et des enfants, alors même que 72 % des fonds américains destinés à aider le peuple syrien ne sont pas parvenus à leurs destinataires. Mais aussi la honte, parce que l’Europe, qui, il y a quelques années seulement, créait en grande pompe l’Union pour la Méditerranée à Paris, s’est montrée une fois de plus quasi inutile.

Si la situation reste préoccupante, son évolution récente laisse espérer un règlement politique. Il semble que la détermination de la communauté internationale ait forcé le régime d’Assad à s’engager à placer son arsenal chimique sous contrôle international et à détruire son stock. Mais il faut maintenir la pression sur Assad, et, plus important encore, il faut que cette évolution contribue à permettre un accord politique global en Syrie. Nous soutenons donc le lancement d’un processus politique dans le cadre de « Genève 2 », en vue d’une transition progressive. Une opposition large et représentative, alternative au règne d’Assad, doit siéger à cette conférence.

Malheureusement, on en est loin. La récente déclaration de 13 groupes d’opposition islamistes combattant en Syrie, qui ne considèrent pas la coalition d’opposition syrienne et l’Armée syrienne libre comme représentatifs, et leur appel à bâtir une coalition dans un « cadre clairement islamique » ne sont guère encourageants. On constate sur le terrain que plus le conflit dure, plus il se radicalise, les extrémistes et les djihadistes prenant peu à peu le dessus. Par rapport à l’objectif d’une Syrie laïque et unifiée, ce pourrait être une véritable bombe à retardement.

Je conclurai par trois points principaux. Premièrement, les principaux auteurs des crimes de haine commis en Syrie devront un jour être traduits devant la Cour pénale internationale. Deuxièmement, il faut organiser sans tarder une conférence internationale en vue de présenter un plan global et généreux de reconstruction de la Syrie et d’aide à son peuple. Enfin, l’Europe, sur cette question comme sur tant d’autres, doit parler d’une nouvelle voix, une voix commune qui sera la sienne propre. Le Conseil de l’Europe doit établir une feuille de route européenne pour la Syrie et la région. Car cela se passe tout près de nous !

Lord ANDERSON (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe socialiste* – Le rapport, qui analyse très bien la tragédie syrienne, devra être mis à jour, car la situation ne cesse d’évoluer.

J’évoquerai d’abord le contexte, ensuite la complexité de l’affaire, enfin le rôle des Européens.

Sur le premier point, nous assistons à la dégradation du « printemps arabe ». Au moment de la réunion de la commission des questions politiques, il y a quatre semaines, l’on s’attendait à une intervention militaire. Heureusement, la situation s’améliore un peu : les Russes et les Américains se sont mis d’accord et l’on ne peut que saluer la résolution du Conseil de sécurité de l’Onu.

Sur le deuxième point, au Proche-Orient, tout est lié. La dimension régionale est essentielle. En Syrie, il existe un clivage entre communautés. Je songe à l’avenir des Kurdes, au rôle d’Al-Qaida, aux islamistes. Il faut également tenir compte du fait que la Russie est un ami particulier de la Syrie, ainsi que du rôle de la Turquie et de celui de l’Iran. Qui est l’opposition ? Ceux qui s’expriment en son nom, sur quel fondement le font-ils ? Au bout du compte, la famille Assad ne peut se maintenir au pouvoir. Mais comment garantir un cessez-le-feu alors que tant de factions sont impliquées ? Selon certains, l’opposition militaire est islamiste à 70 % ; 90 % des effectifs militaires le sont. Si la charia est finalement imposée en Syrie, quel sera l’avenir des minorités, dont les chrétiens, vulnérables là comme ailleurs ?

Troisièmement, quelle contribution positive l’Europe peut-elle apporter ? Il faut soutenir les principaux acteurs extérieurs – Etats-Unis, Russie –, préserver l’intégrité territoriale, apporter si nécessaire une aide technique à la destruction des armes chimiques et contribuer à garantir la sécurité des experts. Soyons réalistes à propos de « Genève 2 » : l’Iran doit être partie prenante de la solution. Mais c’est essentiellement au niveau humanitaire que l’Occident peut intervenir. Les conditions de vie dans les camps sont misérables, surtout pour les femmes. Il faut absolument de l’argent. Le Royaume-Uni est le deuxième bailleur de fonds, avec 400 millions de livres sterling. En outre, comme parlementaires, nous devons faire pression sur nos gouvernements respectifs pour qu’ils tiennent leurs promesses en matière d’aide humanitaire. Enfin, n’oublions pas la nécessaire reconstruction après la tragédie.

Mme SCHUSTER (Allemagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Au nom de l’ADLE, je félicite le rapporteur.

Ce n’est malheureusement ni la première ni la dernière fois que notre Assemblée se penche sur la situation catastrophique de la Syrie – plus de 100 000 morts, 2 millions de réfugiés, plusieurs millions de déplacés. Au bout de deux ans et demi, la fin du conflit n’est pas en vue. Nous nous réjouissons certes qu’une position commune ait pu être trouvée au sein du Conseil de sécurité, que la résolution ait pu être adoptée et qu’il soit convenu que les armes chimiques seront détruites. Mais des Syriens continuent de mourir chaque jour. C’est le cas au moment même où nous débattons.

C’est la raison pour laquelle notre objectif politique doit être le cessez-le-feu suivi de négociations. Cela a déjà été évoqué, nous espérons que la Conférence de Genève 2 portera ses fruits. Le processus politique doit être notre moyen d’action, dans l’espoir de faire taire les armes.

Nous nous félicitons, bien sûr, de la résolution des Nations Unies, mais il y manque quelque chose. L’impunité ne saurait être acceptée. Il s’agit de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et, quels qu’en soient les auteurs, ils doivent être traduits devant la Cour pénale internationale. C’est ce que nous, communauté internationale, devons aux victimes et à leurs familles. Il est normal que le Conseil de sécurité ait mis sur pied une commission d’enquête.

Enfin, troisième point concernant la situation humanitaire, nous avons reçu une lettre ouverte de Médecins Sans Frontières : la situation sanitaire se dégrade chaque jour un peu plus et certaines régions du pays sont complètement fermées à l’aide humanitaire. Nous devons faire les efforts nécessaires pour que l’aide soit apportée à ces populations.

Nous aimerions remercier les pays voisins de la Syrie – la Turquie, le Liban et la Jordanie – pour avoir accueilli autant de réfugiés. Mais, soyons honnêtes, nous aussi devons faire plus. Nous devons accueillir plus de réfugiés dans nos pays, parce que la situation va encore se dégrader durant l’hiver. Nous devons faire montre de plus de disponibilité, au-delà du soutien financier.

C’est la raison pour laquelle je vous invite tous à adopter ce rapport. Il nous permettra de faire plus dans nos capitales.

LA PRÉSIDENTE* – Le rapporteur m’indique qu’il reprendra la parole à la fin des débats.

Nous poursuivons donc la liste des orateurs.

M. SALLES (France) – La guerre civile qui endeuille la Syrie depuis plusieurs années appelle de notre part la plus grande détermination, mais aussi le réalisme le plus éclairé. Il ne s’agit pas de se laisser aller à quelque simplification entraînant des solutions qui pourraient paraître logiques, mais qui exposeraient les civils, et parmi eux les plus faibles, à des dangers encore plus grands.

Nous sommes tous d’accord pour dire que le régime de Bachar el-Assad ne peut pas continuer de diriger ce pays comme si rien ne s’était passé. Mais chasser un régime est une chose, le remplacer en est une autre. Il y a quelques mois, certains dirigeants occidentaux s’affichaient avec des représentants de l’opposition syrienne, somme toute a priori fréquentables. Certains allaient même jusqu’à proposer de leur vendre des armes afin de s’organiser contre le régime syrien.

Seulement voilà, l’opposition syrienne est une nébuleuse assez complexe qui n’est pas composée uniquement de démocrates et de militants des droits de l’homme, loin s’en faut ! Les djihadistes, les représentants d’Al-Qaida font partie de cette nébuleuse et participent largement aux exactions constatées dans ce pays, faisant souffrir le peuple avec une rare cruauté. Ainsi faut-il craindre que la disparition du régime actuel ne laisse la place au chaos dans les mains des terroristes.

C’est pourquoi je crois plus que jamais indispensable de rechercher la solution politique qui permette une ouverture de la Syrie aussi bien sur le contrôle et l’éradication des armes chimiques que sur la démocratisation. Aidons les Syriens à trouver la voie d’une meilleure gouvernance sans plonger ce peuple dans l’abîme.

Je me félicite donc des efforts déployés depuis plusieurs mois par la Russie ainsi que du dialogue qui s’est noué entre ce pays et les pays occidentaux, notamment les États-Unis. C’est, me semble-t-il, le seul moyen pour espérer une issue satisfaisante tant pour le peuple syrien que pour la paix au Moyen-Orient ; et donc dans le monde.

La fermeté doit s’accompagner de la lucidité permettant de sortir de cette crise qui a déjà fait trop de victimes. Je souhaite que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en lien avec l’Assemblée parlementaire de l’Union pour la Méditerranée puisse s’associer, d’une façon ou d’une autre, à cette mission de pacification où la haine doit pouvoir laisser la place au dialogue et où la guerre doit céder face aux pressions de la paix.

Mme BLANCO (Espagne)* – Je commencerai par remercier M. von Sydow pour son excellent rapport et je concentrerai mon intervention sur « Genève 2 » et ses conséquences.

Nous nous félicitons tous de la Résolution des Nations Unies et du fait que les négociations entre la Fédération de Russie et les Etats-Unis soient parvenues à un résultat non militaire mais politique et diplomatique.

Nous attendons maintenant « Genève 2 ». C’est une conférence importante du point de vue humanitaire. Il faut bien le comprendre et il faut que la position du Conseil de l’Europe soit parfaitement claire. Vu l’ampleur du conflit, la Syrie est une immense tragédie, la première véritable tragédie du XXIe siècle : 6 millions de personnes déplacées, 2 millions de réfugiés dans les pays voisins, en Turquie, au Liban, mais également en Iran au Kurdistan, où pratiquement 150 000 Syriens ont trouvé refuge. Les pays voisins de la Syrie doivent supporter le fardeau que représente l’arrivée massive des réfugiés.

Lors de la réunion du 30 septembre à Genève, la demande a été faite d’une aide économique et de réinstallation des réfugiés dans des pays tiers européens. Jusqu’à présent, sur les 2 millions de réfugiés, très peu sont en Europe. Or la moitié d’entre eux sont des femmes et des mineurs et il s’agit donc de groupes particulièrement vulnérables et, de plus, extrêmement pauvres.

Seuls les Etats-Unis d’Amérique, le Brésil, l’Autriche, la Suisse et la Suède ont répondu à l’appel pour une réinstallation des réfugiés. La plupart d’entre eux sont aujourd’hui en Turquie, qui est membre du Conseil de l’Europe, et qui doit gérer l’arrivée de dizaines de milliers de réfugiés. Les autres n’ont rien fait pour aider les réfugiés à se réinstaller.

J’invite donc cette Assemblée non seulement à adopter sans aucune équivoque le rapport de M. von Sydow, mais à s’ouvrir, et je plaide pour un quota de réinstallations. La Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés ne les protège pas, mais les générations futures nous regardent, et nous regarderont avec méfiance si nous n’arrivons pas à faire quoi que ce soit.

Mme ALLAIN (France) – Le soulèvement du peuple syrien est né dans le sillage du « printemps arabe ». Ce mouvement de liberté, d’exigence de dignité et de justice sociale a été réprimé dans le sang par le pouvoir dictatorial syrien. L’utilisation, jusqu’à preuve du contraire, par le régime de Bachar el-Assad, de gaz chimiques contre sa population le 21 août dernier, en violation des conventions internationales, marque une ascension dans la terreur de cette guerre civile.

Si nous pouvons nous féliciter de l’adoption, enfin, d’une résolution à l’Onu, nous n’ignorons pas que de nombreux belligérants qui combattent les droits humains de liberté et de démocratie, se sont emparés de ce conflit et affaiblissent les activistes laïques.

Le sort des populations civiles est particulièrement inquiétant. L’immense problème des réfugiés de Syrie reste plus urgent que jamais. Le coût humain de la tragédie syrienne est lourd depuis 2011 : 100 000 morts, 2 millions de réfugiés et plusieurs millions de déplacés. La moitié a moins de dix-sept ans.

Nous sommes face à une situation humanitaire terrible et face à un risque fort de déstabilisation de toute la région. Le Liban, la Jordanie, la Turquie et l’Irak ont fait preuve de générosité à l’égard de leurs voisins, au prix de sacrifices.

Comme l’indiquait avec raison M. Guterres, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, en début de semaine : « Le conflit en République arabe syrienne ne représente pas seulement une menace à la paix et à la sécurité globale, mais pose des problèmes structurels fondamentaux aux pays de la région. Ils sont aux prises avec d'énormes bouleversements démographiques du fait de l'afflux des réfugiés mettant à mal leur tissu social et économique. »

Est-il encore concevable de laisser ces pays supporter seuls le poids des réfugiés ? Est-il normal que, parmi les dix-sept pays qui vont partager cette charge, plus de la moitié soient des pays en développement ? Non.

Les pays européens devraient ouvrir leurs frontières aux réfugiés syriens et prendre des engagements chiffrés pour leur venir en aide, en activant notamment la directive européenne de 2001, dite de « protection temporaire », qui permet d’ouvrir largement les frontières de l’Europe dans une situation d’urgence.

Les ONG ont insisté fort justement sur la nécessité de rappeler à l’ensemble des belligérants l’impératif de respecter le droit humanitaire international, d’assurer l’accès des organisations humanitaires à l’ensemble du territoire syrien et de garantir des corridors humanitaires pour acheminer l’aide sanitaire et alimentaire.

Enfin, les crimes graves commis en Syrie contre la population civile - avec des armes chimiques ou des armes conventionnelles - ne peuvent rester impunis. Il faut rendre justice aux milliers de victimes. Le rôle de la Cour pénale internationale doit être affirmé avec force !

Alors que nous débattons, des civils meurent. L’histoire jugera le Conseil de l’Europe à son courage et à son unité sur ce vote.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – Malgré un répit dans les tensions et les réticences de l'opinion internationale, une intervention militaire en Syrie est imminente. Chacun d’entre nous pressent ses conséquences réelles, car tous les pays seront affectés par ce conflit, y compris ceux qui ont accédé au pouvoir par des slogans contre la guerre et qui maintenant s'y préparent. Cette intervention militaire ne mettra pas fin à la guerre civile. D’ailleurs, les armes ne cessent d’affluer en Syrie. Une chose est claire, aucun pays ne peut imposer son régime aux autres. La société syrienne doit décider par elle-même de son avenir et de son destin.

Il est encore temps, aujourd’hui, pour la communauté internationale, de mettre fin à la guerre civile sanglante et à la catastrophe humanitaire en Syrie, à condition de poursuivre comme objectif la paix et les intérêts du peuple syrien. Le nombre des victimes et des réfugiés est effrayant : plus de 100 000 victimes, parmi lesquels des femmes et des enfants, et environ 7 millions de réfugiés et de personnes déplacées.

Chers collègues, je suis préoccupée aussi par le destin et la sécurité de mes compatriotes qui vivent en Syrie. La guerre est inévitable là où la diplomatie et la politique trouvent leurs limites. La guerre aggravera le désastre humanitaire, ainsi que la haine et les affrontements entre les minorités nationales, entre les groupes religieux et ethniques, et aboutira au chaos, menaçant du même coup la stabilité mondiale.

Un nouveau génocide pourrait avoir lieu en Syrie. Un seul pas nous en sépare ; nous sommes sur le point de vivre une nouvelle tragédie historique. Je représente une nation qui, dans deux ans, commémorera le centenaire du génocide arménien en Turquie ottomane. Nous connaissons les conséquences d'un génocide perpétré pour des motifs ethniques et nationaux...

Il y a cent ans, certains de mes compatriotes ont fui les massacres de Turquie à pied vers la Syrie, dont ils sont devenus des citoyens honorables. Nous devons nous en souvenir avant qu'il ne soit trop tard !

M. PUSHKOV (Fédération de Russie)* – Si de nombreux points importants ont déjà été soulignés dans ce débat, je voudrais revenir sur certaines vérités importantes. La crise syrienne n’est plus la même qu’il y a un an et demi. À cette époque, elle était présentée comme la lutte de forces démocratiques contre la dictature. Il est clair que ce n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui. D’après le dernier rapport d’une agence britannique indépendante, 10 à 15 % des combattants de l’opposition appartiennent à Al-Qaida et 35 % sont des islamistes radicaux. Ce ne sont certainement pas eux qui établiront la démocratie en Syrie et on ne peut que s’étonner que certains grands pays qui luttent contre l’extrémisme radical au Mali et en Afghanistan envisagent de les soutenir. C’est tout à fait inadmissible !

La crise syrienne n’est pas uniquement une crise interne. Elle subit de nombreuses interférences extérieures. Le Qatar a dépensé trois milliards de dollars au cours des deux dernières années pour cette guerre. Il est bien connu également que l’Arabie Saoudite est prête à payer pour des frappes américaines si les Etats-Unis revoient leur position.

Bien sûr, l’impunité de certains crimes n’est pas acceptable et nombreux sont ceux qui veulent traîner le président syrien devant les tribunaux. Mais qu’en est-il de ceux qui ont mené des guerres illégales, déclenchant de véritables catastrophes humanitaires ? La guerre en Irak, décidée par MM. Bush et Cheney, a fait naître le terrorisme dans ce pays. Depuis l’occupation américaine, plus de 200 000 personnes ont péri en Irak. Pourquoi n’en parle-t-on jamais ?

Lors de la réunion du Bureau de l’Assemblée parlementaire à Dubrovnik, il a été rappelé que l’utilisation de la force militaire n’est pas la solution à la crise en Syrie. J’appuie totalement cette déclaration. L’unique voie est le compromis et la conférence internationale de Genève 2.

Le pays ne peut être laissé aux mains d’Al-Qaida et des islamistes radicaux, incapables de gouverner. Mais le pays doit être dirigé. Une solution politique à la crise doit donc être trouvée.

Mme HOVHANNISYAN (Arménie)* – Même si une solution semble aujourd’hui possible pour mettre fin aux armes chimiques, les tueries de civils continuent en Syrie, sans que l’on puisse très bien savoir si ce sont les forces du gouvernement qui en sont responsables.

Lors du génocide arménien de 1915, des milliers d’Arméniens ont trouvé refuge en Syrie, en particulier dans la région d’Alep. Aujourd’hui, cette ville est en ruine et ses citoyens sont persécutés, violés, exterminés. Non, ce ne sont pas les soldats du gouvernement qui sont à l’origine de ces massacres, mais la prétendue opposition, le Front Al-Nosra et l’Armée syrienne libre. Le gouvernement, pour sa part, protège les minorités ethniques, en particulier les chrétiens, qui sont le moteur de la société syrienne.

Actuellement, les rebelles s’emploient à faire disparaître toutes les minorités non musulmanes et non sunnites. Les événements de Maaloula ont été suivis d’incidents à Raqqa, où les forces de l’opposition ont pillé l’église arménienne et remplacé la croix chrétienne par le drapeau noir. Nombreux sont les Arméniens d’Alep qui témoignent de l’intérêt marqué des rebelles à leur égard. C’est l’intérêt du chasseur pour sa proie…

Nous avons d’ailleurs de sérieuses raisons de penser que cet intérêt est alimenté par un puissant voisin dont la frontière borde la région d’Alep.

À son tour, notre pays, qui accueille déjà de nombreux réfugiés syriens à qui il accorde très rapidement la nationalité arménienne, devrait faire face à une catastrophe humanitaire si Alep tombait. Un autre génocide aurait certainement lieu, et les Arméniens de Syrie qui auraient la chance d’y survivre se rendraient en masse en Arménie.

Notre pays va essayer de répondre à ces défis, mais nos capacités économiques ont leurs limites. Même si nous sommes jusqu’à présent parvenus à gérer la situation, la pression sur le système social est forte et un afflux plus important ne serait pas sans impact.

Faut-il vraiment armer l’opposition, emboîtant ainsi le pas à la politique de l’Arabie saoudite et de la Turquie ? Ne vaudrait-il pas mieux soutenir les survivants et protéger ceux qui portent nos valeurs et notre histoire commune ? Il est temps d’ouvrir les yeux : là où les extrémistes wahhabites et sunnites prennent le pouvoir, aucune tolérance, aucun droit de l’homme ne peut être garanti. Il faut donc protéger les communautés chrétiennes plutôt que de les laisser à la merci des mercenaires, car ces communautés, catalyseurs du progrès dans la région, risquent d’être éliminées. Faute d’assumer nos responsabilités, nous risquons de voir un nouveau Moyen Orient, qui ne connaîtrait plus ni civilisation, ni droits de l’homme, ni foi en l’avenir. Cela entraînerait aussi des changements pour l’Europe et donc pour le monde. Or un tel monde, ni Robert Schuman, ni aucun d’entre nous ne voudrait l’imaginer.

M. ROUQUET (France) – La résolution 2118 adoptée le 27 septembre est un premier signe d’espoir. Le Conseil de Sécurité de l’Onu devient désormais, comme le demandait la France, le garant du désarmement chimique et qualifie l’utilisation de celles-ci de menace pour la paix. Damas a – enfin – pris des engagements devant toute la communauté internationale ; ces engagements devront être respectés.

Cette avancée sur les armes chimiques ne doit cependant pas nous faire oublier que la priorité est maintenant de trouver les conditions d’une solution politique qui, seule, permettra de mettre fin à la crise.

Le communiqué de Genève du 30 juin 2012, qui prévoit la mise en place d’un gouvernement de transition doté de tous les pouvoirs exécutifs – y compris les forces de police et de renseignement –, doit servir de base à la conférence « Genève 2 ».

Un des défis de « Genève 2 » sera la représentation de l’opposition syrienne. Si nous souhaitons un avenir démocratique pour la Syrie, nous devons renforcer notre soutien à l’opposition modérée.

C’est pourquoi il est très important de se mobiliser autour de la Coalition nationale syrienne, qui a besoin d’un appui international. La France a d’ailleurs organisé jeudi 26 septembre à New York une grande réunion de soutien à la Coalition nationale syrienne, autour de son président, Ahmad al-Assi al-Jarba.

Une tragédie humanitaire se joue devant nos yeux. Nous ne pouvons pas laisser les pays voisins de la Syrie assurer seuls la charge des réfugiés. Nous ne pouvons pas abandonner les personnes déplacées. Tout doit donc être mis en œuvre pour qu’un accès humanitaire immédiat, libre et sans entrave, soit garanti à toutes les populations dans le besoin.

De même, les demandes d’entraide émanant des réseaux civils syriens impliqués directement dans l’assistance humanitaire ainsi que celles de l’Assistance Coordination Unit devraient être soutenues.

Le vote – enfin acquis – d’une résolution au Conseil de Sécurité de l’Onu, la probable tenue d’une conférence sur la Syrie vers la mi-novembre sont autant de progrès que nous devons saluer. Cependant, nous devons rester lucides et faire preuve de prudence, même si la volonté est forte au Conseil de sécurité de mettre en place un dialogue politique entre les parties. N’oublions pas que les combats continuent de faire des victimes chaque jour ! N’oublions pas que pour l’instant les stocks d’armes chimiques existent toujours !

Par ailleurs, nous ne pourrons tolérer que la nouvelle Syrie ne respecte pas les droits des minorités et des femmes. Nous serons également attentifs au contexte régional – je pense en particulier au Liban, dont la situation est préoccupante.

Enfin, car c’est un point important, la Syrie est un pays en ruine. Les bombardements ont touché les habitations, mais aussi un patrimoine culturel unique au monde. Nous ne devons pas l’oublier, même si aujourd’hui l’urgence absolue est de protéger les civils en trouvant une solution politique efficace.

Mme VIROLAINEN (Finlande)* - La situation en Syrie est débattue au Conseil de l’Europe pour deux millions cent mille raisons : c’est le nombre de Syriens ayant fui leur pays pour trouver refuge à l’étranger. Près de 500 000 réfugiés ont ainsi été accueillis en Turquie, et le nombre de réfugiés syriens au Liban représente plus de 20 % de la population totale.

Même s’il n’est pas aussi élevé, le nombre de ceux qui ont été accueillis par des Etats membres de l’Union européenne est significatif. C’est le cas par exemple en Suède, qui a décidé d’octroyer des permis de séjour permanents à tous les Syriens.

Mon éminent collègue français, M. Bockel, est en train de préparer un rapport sur les besoins humanitaires des réfugiés syriens dans les pays limitrophes, qui sera débattu en janvier. Au cours d’une récente mission d’enquête au Liban et en Turquie, il a rendu visite à des camps de réfugiés, et en tant que présidente de la commission des migrations, je voudrais partager avec vous certaines de ses observations.

M. Bockel a vu dans quelles conditions difficiles et primitives ces réfugiés vivaient au Liban et à quel point les services de base leur font défaut. N’oublions pas toutefois que ce pays est confronté à ses propres problèmes sociaux et politiques, et que les événements de Syrie commencent à avoir un impact sur sa stabilité.

La situation en Turquie est meilleure, et je voudrais féliciter les autorités turques pour l’approche très constructive et très humaine qu’elle a adoptée à l’égard des réfugiés. Cela étant, la Turquie ne pourra pas assumer seule ce fardeau. Et nous, dont les pays n’ont pas une frontière de 800 kilomètres avec la Syrie, avons la responsabilité de nous montrer solidaires vis-à-vis des pays qui portent l’essentiel de ce fardeau.

Nous siégeons au sein de cette Assemblée pour défendre les droits de l’homme. Or la situation des réfugiés et des migrants est aujourd’hui, au regard des droits de l’homme, une des questions les plus urgentes. Les gens meurent à la porte de l’Europe, et pendant ce temps, nous nous disputons sur leur nombre ! Parmi les 2,1 millions de réfugiés syriens, 53 % sont des femmes et des enfants. Si on ne les aide pas, on les prive de tout avenir. Si nous ne parvenons pas à trouver un accord s’agissant de l’approche à adopter vis-à-vis du régime d’el-Assad, à tout le moins, aidons les femmes et les enfants ! Évidemment, il serait préférable de les aider près de chez eux, mais si les conditions sont aussi mauvaises que celles décrites par M. Bockel, je préfèrerais les amener en lieu sûr jusqu’au moment où ils pourront retourner, en toute sécurité, dans leurs foyers – où, j’en suis sûre, ils préfèreraient se trouver.

M. SCHENNACH (Autriche)* - Je remercie très sincèrement les parlementaires britanniques qui, par leur décision, ont empêché des frappes militaires dans une région qui subit déjà la guerre civile – si l’on peut qualifier ainsi le conflit qui la déchire, tant les parties impliquées sont nombreuses et leurs motivations différentes : des pays voisins tels que l’Arménie, qui accueillent des milliers de réfugiés ; des bandits armés ; des groupes militaires comme le Hezbollah ou Al-Qaïda qui, tous, luttent contre l’armée syrienne mais qui poursuivent des objectifs différents. L’ASL est elle-même très hétérogène. Nous ne pouvons plus parler de guerre civile, c’est maintenant quelque chose de tout à fait différent qui se passe.

En tant que président de l’une des commissions de l’Union pour la Méditerranée, je me suis rendu, en Jordanie, dans les camps de réfugiés.

Chers collègues, ce qui est préoccupant c’est la situation des jeunes filles et des femmes. Elles sont violées, vendues. Ces camps de réfugiés sont des supermarchés. L’Onu laisse l’administration de ces camps à des bandits. Il n’y a pas de toilettes pour les femmes parce que les hommes ne veulent pas. Derrière des portes closes, les femmes et les jeunes filles sont comme dans des bordels. On en compte cinq.

En Algérie circule une anecdote : « Si ma femme ne fait pas ce que je veux, je m’achèterai une femme syrienne. » Les viols sont quotidiens. Tout le monde en parle. Untel a acheté une femme syrienne et l’a épousée quatre semaines plus tard.

Ces femmes et ces jeunes filles doivent avoir un camp séparé et sécurisé. En Syrie, on compte 1,5 million de réfugiés de l’Irak, et la situation est encore pire, sans oublier les réfugiés palestiniens.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – Le peuple syrien attend la paix depuis trois ans. Malheureusement il subit la répression et les exécutions du régime autoritaire de Bachar el-Assad. Le conflit est terrible. C’est une guerre civile des plus cruelles comptant 100 000 victimes.

La communauté internationale n’a pas été à la hauteur de la tâche. La Russie a apporté son soutien au régime dictatorial de Bachar el-Assad. D’autres pays ont soutenu les rebelles mais de manière arbitraire, ce qui a facilité les activités des extrémistes en Syrie.

Qu’en est-il de l’avenir ? Il ne devrait pas être déterminé par des personnes extérieures mais par le peuple syrien. Il faut que la Russie, l’Iran, le Quatar et l’Arabie saoudite fassent pression dans ce sens et pas pour un jeu géopolitique.

Une intervention militaire serait une erreur phénoménale. Le seul résultat serait de menacer des innocents et de conduire tout droit à un chaos encore plus important.

J’ai rencontré des représentants de certaines minorités. Dans mon groupe politique du Parti populaire européen, nous parlons souvent des droits des minorités comme la minorité chrétienne. Ces droits sont essentiels si l’on veut surmonter ce conflit. Des milliers de chrétiens ont été assassinés depuis le début du conflit. Toutes les minorités devraient être protégées, y compris pour la liberté de leur foi.

Nous devons analyser ce qui s’est passé au Conseil de sécurité des Nations Unies. La résolution 2118 adoptée le 27 septembre 2013 doit être mise en œuvre dans son intégralité. La Syrie doit démanteler l’ensemble de son arsenal chimique. La communauté internationale doit faire plus et ne pas rester immobile. Nous devons instaurer un dialogue, sans prendre parti pour l’un ou l’autre. Nous devons aider la Syrie pour son avenir et ne pas jouer le jeu d’autres intérêts. Avant tout il faut protéger le peuple syrien.

M. GARÐARSON (Islande)* – La communauté internationale a failli en Syrie. Il est apparu clairement qu’elle n’est pas capable de gérer efficacement une telle situation. De nombreuses résolutions n’ont rien fait pour le peuple syrien. Il a fallu le recours à des armes chimiques, qui ont tué près de 1 000 personnes, pour que la communauté internationale se réveille. Auparavant, plus de 100 000 personnes avaient déjà perdu la vie en Syrie, ces trois dernières années.

Les hommes et les femmes politiques ne se sont intéressés à la Syrie que lorsque les médias ont braqué leurs projecteurs. Le changement a été rapide au bout de trois mois. Ne sommes-nous intéressés par les crimes contre l’humanité que lorsque les médias les soulignent ? Comment pouvons-nous nous regarder dans une glace tous les matins, sachant que des centaines de personnes vont mourir dans un conflit en Syrie chaque jour, alors que nous ne faisons rien ? Comment pouvons-nous fermer les yeux, alors que des personnes innocentes, des hommes, des femmes, des enfants meurent chaque jour ? Comment pouvons-nous fermer les yeux alors que des droits de l’homme fondamentaux sont violés à chaque instant en Syrie ?

Trois années d’erreurs, d’occasions manquées et nous ne savons toujours pas quoi faire. Des gens meurent au moment même où je vous parle ; pourtant nous discutons et nous adoptons des résolutions. Lorsque des armes chimiques sont utilisées nous demandons l’arrêt car il y a violation d’une convention. Par conséquent, on n’a pas le droit d’utiliser des armes chimiques pour tuer, mais c’est acceptable avec d’autres moyens. Tel est le signal donné par la communauté internationale !

Mme GILLAN (Royaume-Uni)* – L’attaque chimique en août à Damas a choqué le monde. Mais nous avons été lents à la détente dans cette affaire comme Angela Kane l’a dit récemment. Elle regrette qu’on n’ait pas réagi après les attaques aux armes chimiques en mars dernier. Le statu quo a duré pendant plusieurs mois.

Je félicite notre rapporteur car son document et ses recommandations sont excellents. Il est écrit que les auteurs des violences ne s’en tireront pas avec le recours aux armes chimiques.

Le réalisme s’impose dans la situation actuelle. Les inspecteurs pour le désarmement sont allés sur place avant-hier. Ils ont 19 sites à contrôler, identifiés par le gouvernement ; 7 sont dans des zones de combat. Ce travail est sans précédent. C’est la première fois que l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) demande que des armes soient détruites pendant un conflit. Ce n’est pas facile d’accéder à ces sites. L’ASL a déclaré que les inspecteurs pourraient venir, mais d’autres combattants ont peut-être une autre idée. On compte 1 000 tonnes de sarin et d’autres substances qu’il faut détruire ainsi que les moyens pour les mélanger. Les délais sont serrés. Il se peut qu’on ne puisse les tenir.

D’ailleurs, les Américains et les Russes, forts de leur expérience en matière de destruction d’arsenaux, savent ce qu’il en est. On risque donc de dépasser les délais prévus.

Pendant ce temps, des Syriens meurent, et il y a six millions de personnes déplacées internes. Hier, le Conseil de sécurité de l’Onu a décidé de faire de leur situation une priorité. Les agences d’aide nous indiquent que le Gouvernement syrien les empêche d’aller sur place pour secourir les personnes en difficulté. Le Royaume-Uni a donné 500 millions de livres sterling pour les aider.

Soutenons ces démarches, et tous ceux qui veulent arriver à une solution lors de la conférence de Genève 2.

Mme GUZENINA-RICHARDSON (Finlande)* – M. von Sydow a fait un excellent travail, très approfondi, sur ce qui se passe en Syrie à l’heure actuelle. Il traite de nombreux problèmes auxquels nous devrons nous atteler lorsque la situation se sera améliorée. Malheureusement, les lueurs qui nous permettent d’espérer sont faibles, mais il faut quand même garder espoir.

Je rejoins Mme Virolainen quand elle dit que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider les réfugiés et prêter assistance aux pays voisins pour les camps de réfugiés. Accueillons nous-mêmes des réfugiés. La Suède, à cet égard, est un exemple. Pour notre part, nous acceptons encore davantage de réfugiés et nous ne refuserons personne qui demande asile dans notre pays.

Dans les pays voisins et dans les camps de réfugiés, la situation est extrêmement difficile. Au Liban, par exemple, il y a plus d’enfants syriens qu’il n’y a de sièges dans les écoles pour les enfants libanais ! Voilà qui remet les choses en perspective.

J’aimerais évoquer un autre aspect dont personne n’a parlé jusqu’à maintenant dans ce débat. Ce qui me préoccupe, c’est que, si l’on considère le climat de nombreux pays d’Europe, ce sont des groupes populistes, des extrémistes de droite qui donnent le ton. Ils prétendent que l’aide humanitaire et l’accueil des réfugiés remettraient en question les services sociaux nationaux ou le bien-être de leur peuple. Je vous en prie tous instamment, chers collègues du Conseil de l’Europe : il faut que vous mettiez un terme à ce type de déclarations chez vous. Il n’est peut-être pas très populaire d’aider les réfugiés mais, en tant que membres du Conseil de l’Europe, nous devons le faire. À défaut, nous aurons cédé à un populisme qui ne cessera de prospérer. Ne nous engageons pas sur cette voie très néfaste pour nous tous, pas simplement pour les réfugiés mais aussi pour nos propres peuples

M. MOTA AMARAL (Portugal)* – L’Assemblée suit depuis longtemps la crise en Syrie. Elle a adopté plusieurs résolutions sur cette guerre civile brutale et le sort réservé aux personnes déplacées.

Le débat d’aujourd’hui a été demandé au moment où, à la suite du massacre de civils à l’arme chimique, une intervention militaire occidentale semblait imminente. Beaucoup se sont élevés contre ce crime horrible, ce crime contre l’humanité.

Le Président des Etats-Unis et le Président de la République française ont affirmé que la ligne rouge avait été franchie et qu’il fallait agir contre la brutalité du régime. Beaucoup, au sein de l’opinion publique, s’opposaient à une intervention en Syrie, craignant que cela ne revienne à ouvrir la boîte de Pandore. Fort heureusement, une occasion s’est présentée, et un accord bilatéral a été conclu avec la Russie, qui a pour objet la destruction de l’arsenal chimique syrien. Une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, adoptée le 27 septembre dernier, vient consacrer cet accord. Il s’agit d’éviter que la crise ne s’aggrave toujours plus et que le peuple syrien ne continue de souffrir. Il faut absolument veiller à la complète mise en œuvre de la résolution du Conseil de sécurité.

Cependant, comme l’a dit notre rapporteur, notre Assemblée doit aller plus loin. Il faut demander un cessez-le-feu et tout faire pour qu’un accord politique soit trouvé en Syrie et permettre le retour de la paix, l’avènement de la démocratie et le respect des droits de l’homme. Les dirigeants russes devraient d’ailleurs revoir leur position. Il s’agit d’enquêter pour établir la responsabilité des crimes contre l’humanité, et il faut que des actions soient entreprises par les organisations internationales pertinentes. Il faut également aider les réfugiés à reconstruire ce qui a été détruit. Je souhaite également faire référence aux initiatives visant à accueillir les familles syriennes et à permettre aux enfants syriens d’aller à l’école.

Quant au projet de résolution présenté par M. von Sydow, il doit être approuvé à l’unanimité par notre Assemblée.

M. JÓNASSON (Islande)* – La situation en Syrie est devenue désastreuse. Des atrocités sont commises et le sort des réfugiés devient terrible. Nous avons tous une responsabilité. La communauté internationale a la responsabilité de protéger, conformément aux recommandations de 2005, mais comment ? Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a récemment fait appel au pouvoir de la diplomatie, formule plus prometteuse que les menaces d’intervention militaire proférées quelques jours plus tôt par l’administration américaine. Depuis la création de la Société des Nations, au lendemain de la première guerre mondiale, et celle des Nations Unies, après la seconde guerre mondiale, le monde éprouve des difficultés à prendre des décisions démocratiques permettant des interventions militaires. Le Conseil de sécurité, où sont réunies les puissances militaires pour régir le monde, est un legs du passé. L’expérience nous a appris que les interventions se font de leur chef.

Dans la presse, il a été dit que des puissances occidentales, y compris le Royaume-Uni et l’Allemagne, ont approuvé la vente de produits chimiques à la Syrie à des fins militaires. Les décisions d’Obama aux Etats-Unis et de Cameron au Royaume-Uni, à savoir de poser la question de l’intervention militaire à leurs parlements respectifs, marquent un moment politique très important. En France, la pression de l’opinion publique va dans le même sens.

Le régime de l’apartheid en Afrique du Sud a pris fin non seulement en raison d’une lutte interne aux pays mais aussi grâce à une pression économique extérieure et de la diplomatie.

Aujourd’hui, des millions de Syriens souffrent horriblement. Beaucoup de réfugiés ont faim, manquent d’eau, n’ont pas d’abri, alors que nous sommes au mois d’octobre et que l’hiver qui approche risque fort d’entraîner une catastrophe humanitaire. Nous devrions tous être conscients de l’appel urgent qui a été adressé à la communauté européenne et internationale afin que des mesures soient prises rapidement pour éviter une catastrophe humanitaire et afin que nous acceptions le plus grand nombre possible de réfugiés.

M. HAWN (Canada, observateur)* – Récemment, nous avons été profondément choqués par le recours aux armes chimiques probablement utilisées par le régime d’Assad. Mais tout aussi inacceptable est la mort de 100 000 personnes du fait du recours à des armes conventionnelles. Une mort est une mort, et 99 morts par balle ne sont pas moins graves qu’une mort par gaz sarin.

L’objectif de la transition démocratique semble s’éloigner alors que nous traitons des conséquences des événements récents. Mais de manière assez perverse, ces événements contribueront peut-être à faire en sorte que le monde prenne des mesures significatives.

Nous saluons la coopération entre la Russie et les Etats-Unis, qui a permis de ne pas intervenir sur le plan militaire. D’ailleurs, une intervention militaire ne ferait que déboucher sur la condamnation de l’intervenant, quelles que soient ses intentions.

Compte tenu de son soutien historique prodigué à el-Assad, la Russie doit faire le maximum pour accélérer le processus de désarmement. Elle doit faire partie de la solution durable ainsi que d’autres pays, comme la Chine, l’Arabie Saoudite, le Qatar et l’Iran.

Les dommages collatéraux, ce sont des millions de personnes déplacées. Il faut s’occuper des gens qui ont perdu leur foyer. Le Canada a engagé 362 millions de dollars pour l’aide à la sécurité et au développement, ainsi que pour l’aide humanitaire. Nous nous occupons également de la réinstallation des réfugiés.

Il faut envoyer un message clair à el-Assad ainsi qu’aux autres criminels impliqués dans cette atrocité. Il n’y a pas de « bons » dans le conflit armé en Syrie. Le Canada ne reconnaît aucune des forces d’opposition en tant que représentants légitimes des Syriens.

En outre, nous sommes très préoccupés par l’implication de djihadistes radicaux dans les rangs de l’opposition. Ces groupes ne veulent nullement garantir les droits des communautés minoritaires en Syrie et ils ne sont pas davantage prêts à renoncer à l’extrémisme. Il n’est donc pas déraisonnable de penser que les auteurs de ces violences puissent être traduits en justice, par exemple à la Cour pénale internationale.

Mais pour l’heure, il faut arrêter les combats, appliquer un cessez-le-feu, désarmer au maximum et secourir les millions de réfugiés qui se trouvent dans les Etats limitrophes, lesquels font de leur mieux pour les aider.

Nous sommes très attachés au triptyque du Conseil de l’Europe : démocratie, droits de l’homme et prééminence du droit. Nous pensons que les Syriens doivent décider eux-mêmes de leur avenir, mais nous pouvons créer les conditions leur permettant d’y parvenir.

Mme FORT (France) – L’adoption de la résolution 2118 est un pas important vers un espoir de paix après deux ans de guerre civile. Radio France internationale soulignait cette semaine que « La Syrie ne serait ni l’Irak ni la Lybie, c’est le choix de la communauté internationale ».

Cette résolution a le mérite d’avoir réussi à faire jaillir, enfin, une position internationale sur ce conflit alors que, depuis plusieurs mois, celle-ci avait du mal à s’unifier.

Le rapprochement entre Russes et Américains en marge du G20 de Moscou a permis, il faut le reconnaître, la résurgence d’une conscience internationale. Il est d’ailleurs regrettable que l’Europe n’ait pas joué un rôle plus capital.

Cette volonté de la communauté internationale de favoriser un règlement politique ne peut que me réjouir, d’autant plus que les conclusions des experts de l’Onu sur l’attaque chimique du 21 août ne désignaient formellement aucun responsable. C’est d’ailleurs une des grandes difficultés des guerres civiles. Identifier les responsables est un exercice délicat et nous devons agir avec prudence. Les exactions sont commises par tous les camps. La haine, la vengeance rendent les guerres civiles encore plus barbares car la population civile en est la principale victime.

Monsieur le rapporteur, vous soulignez que la Syrie est une mosaïque ethnique, religieuse et culturelle. C’est également un pays laïque. La solution politique à ce conflit devra donc prendre en compte tous les Syriens.

Nous devrons aussi tirer les leçons du « printemps arabe » et ne pas laisser, au nom de la liberté, les ennemis de la démocratie et des droits de l’homme prendre le pouvoir.

Je serai particulièrement attentive au respect des droits des minorités, des chrétiens de Syrie et des femmes. Il n’y aura pas de démocratie syrienne sans cela. La question des réfugiés et des personnes déplacées devra également être traitée avec détermination pour permettre aux populations de retourner chez elles, comme elles y aspirent légitimement.

La conférence sur la Syrie qui devrait avoir lieu en novembre ne sera un succès que si, en plus d’arrêter la guerre, elle permet la pacification du pays, nécessaire au retour du tiers de la population syrienne jeté sur les routes par la guerre civile.

Il reste encore beaucoup d’obstacles et d’incertitudes sur la route de Genève. Une des questions principales est de savoir qui représentera l’opposition plurielle au régime. Accepteront-ils de venir pour former un gouvernement de transition sans discuter de l’avenir de Bachar el-Assad, qui garde, on le sait, bien des partisans en Syrie ? Quels pays seront présents ?

En attendant, des civils souffrent, des enfants meurent, des femmes sont violées : « Genève 2 » doit avoir lieu. « Genève 2 » a une obligation de résultat, sur la voie sage et prudente de la solution politique et non militaire. Un pas vers la paix, du moins devons-nous le souhaiter.

M. IWINSKI (Pologne)* – La délégation de la commission s’est rendue en Jordanie dans le camp de réfugiés Zaatari, où étaient réunies plus de 100 000 personnes, et qui reflète l’ampleur de la tragédie : des millions de réfugiés, des personnes déplacés en Syrie.

Le public a été particulièrement indigné par l’utilisation de gaz chimiques, qui a fait beaucoup de victimes.

Je me félicite du rapport équilibré de M. von Sydow, car on n’y trouve pas les « bons » et les « méchants ». Toutes les parties sont responsables de ce chaos et de cette tragédie humaine.

Je me réjouis de l’accord entre les Russes et les Américains à Genève visant à éliminer les armes chimiques en vertu du protocole de 1925 qui les interdit. Le processus d’élimination des stocks d’armes chimiques dans un avenir proche est très complexe. La vérification en est également difficile et l’aspect financier est important. D’où la nécessité de tirer les enseignements du conflit en Libye.

En Syrie, les gens sont très divisés. Des groupes islamistes s’ancrent dans le pays et la Syrie risque d’être démantelée et privée du territoire occupé par les djihadistes. Il y aura une sorte de « bosnification » du Moyen-Orient.

Toutefois, les événements de la semaine dernière font apparaître quelques lueurs d’espoir : l’interdiction des armes chimiques et l’accueil des réfugiés par divers pays nous permettent en effet d’espérer. Ces événements pourraient avoir un effet positif sur les relations entre les Etats-Unis, la Chine, Israël, la Russie et les Nations Unies.

En Europe, nous devons garder ouverts le cœur et le portefeuille, mais également nos frontières.

M. NEILL (Royaume-Uni)* – J’aimerais féliciter le rapporteur pour son excellent rapport. Il est équilibré et identifie des points importants.

Une tragédie humanitaire se déroule sous nos yeux en Syrie. Des gouvernements, comme celui du Royaume-Uni, ont cherché des réponses, mais un défi se pose à la communauté internationale car celles-ci restent encore insuffisantes.

La Fédération de Russie affiche un cynisme au sein du Conseil de sécurité. Je le dis en toute franchise et en toute amitié à mes amis russes. Mais les pays de l’Ouest ont, quant à eux, fait montre d’une grande naïveté, certains défendant le principe d’une intervention libre.

Le rapport est utile en ce qu’il souligne la diversité de la société syrienne. Toute mort dans une guerre civile est inacceptable et le recours aux armes chimiques, quelles que soient les parties qui les utilisent, est une violation patente du droit international, et nous ne pouvons pas accepter qu’il soit enfreint sans aucune sanction.

Nul ne souhaite que la sanction prenne la forme d’une intervention militaire. Nous devons rechercher une solution politique. Aussi, j’espère que le Conseil de l'Europe aura une influence sur les principaux acteurs. La résolution prise par les Nations Unies la semaine dernière permettra d’organiser « Genève 2 » et fournira peut-être une réponse, mais il est permis d’être quelque peu sceptique quant aux intentions des participants à la conférence.

La solution politique devra prendre en compte un principe : la Syrie doit reconnaître le droit de toutes les communautés en Syrie. Je pense en particulier à la communauté chrétienne qui a été victime de traitements barbares de la part de groupes appartenant à l’opposition. Ne soyons pas naïfs quant à la nature islamique de bien des opposants, à laquelle il faut s’intéresser davantage. La position de mon pays est claire.

Les attaques des églises chrétiennes, les assassinats d’évêques et de prêtres, l’élimination des chrétiens ne sont pas annonciateurs d’un avenir positif pour une Syrie et un Moyen-Orient pluralistes. Il faut trouver une solution qui ne transforme pas le « printemps arabe » en hiver de l’oppression, du moins pour certains. Des messages et des solutions clairs doivent être trouvés.

M. Mignon, Président de l’Assemblée, prend place au fauteuil présidentiel.

M. DİŞLİ (Turquie)* – Je remercie le rapporteur et la commission des questions politiques pour avoir inscrit ce débat à l’ordre du jour de notre Assemblée.

Je voulais parler des décisions du Conseil de sécurité, de la destruction des armes chimiques, d’un éventuel cessez-le-feu et de la mise en œuvre de la résolution du Conseil de sécurité, de la situation en Turquie, etc. Mais je n’en parlerai pas, parce que deux points me gênent.

D’une part, je suis gêné par les accusations de M. Schennach qui a parlé de traîtres, parmi lesquels il a inclus la Turquie. Mais c’est un mensonge ! Chez nous, les réfugiés sont considérés comme nos invités et à ce titre nous les prenons en charge. L’hospitalité turque est bien connue. Monsieur Schennach, et dès lors que vous incluez la Turquie dans vos accusations, vous devez apporter des éléments de preuve.

D’autre part, nos amis arméniens et consorts parlent du problème arménien. Des Syriens, musulmans, chrétiens ou arméniens meurent. Cent mille Syriens ont perdu la vie. Des femmes et des enfants syriens meurent. Ces enfants ne savent pas encore quelle est leur religion ni à quelle ethnie ils appartiennent. Les chrétiens, les Arméniens font partie de la mosaïque syrienne et il est nécessaire de les protéger comme il faut protéger l’intégrité syrienne dans son ensemble. La Conférence Genève 2 doit parvenir au cessez-le-feu et à la protection de cette intégrité.

LE PRÉSIDENT – Mme Zimmerman renonce à son intervention.

Mme SZÉL (Hongrie)* – J’appartiens au Parti vert hongrois. Nous sommes en faveur d’une solution pacifique et de la création de structures internationales pour promouvoir la paix et de bonnes relations entre les Etats. Nous pensons que la violence n’est jamais la solution.

Les guerres civiles donnent lieu à des formes brutales de violence et sont difficiles à maîtriser. La Syrie n’y échappe pas.

La communauté internationale a été incapable de proposer une solution depuis deux ans. Qu’il faille plus de 100 000 morts pour reconnaître la situation est un scandale. Nous nous félicitons de la résolution récente du Conseil de sécurité des Nations Unies. C’est un premier pas dans la bonne direction.

Le projet de résolution n’évoque pas les crimes de guerre. Nous pensons que la communauté internationale doit s’intéresser au processus de désarmement. Il est important que les armes chimiques soient détruites pour empêcher qu’elles soient à nouveau utilisées. Plus important encore, il convient d’engager un processus qui déboucherait sur un cessez-le-feu et une solution durable en Syrie.

Pour l’heure, la situation parmi les réfugiés est catastrophique et impose que la communauté internationale les protège.

Nous soutenons les recommandations du rapport et voudrions que l’ensemble des gouvernements des Etats membres du Conseil de l'Europe fassent tout ce qui est en leur pouvoir pour mettre fin à cette guerre civile. Notre devoir est de participer à la recherche d’une solution pacifique et l’implication de toutes les forces démocratiques doit être obtenue.

Nous approuvons le rapport.

M. SASI (Finlande)* – La situation en Syrie est extrêmement triste et est probablement la plus grande catastrophe humanitaire du XXIe siècle. Plus de 100 000 personnes ont été assassinées par le gouvernement, plusieurs millions de personnes sont réfugiées. Les chiffres atteints par Saddam Hussein sont dépassés.

Lorsqu’un gouvernement assassine ses propres citoyens, la communauté a pour responsabilité de les protéger, mais qu’a fait jusqu’ici la communauté internationale ? Rien. Il n’y a pas eu unanimité entre les grandes puissances pour protéger ce peuple.

Je voudrais maintenant répondre à M. Pushkov qui a relevé la présence de combattants d’Al-Quaida sur le territoire syrien. Si, au début de la crise, il y avait eu une unité des grandes puissances et si le gouvernement Assad avait été mis à terre, alors, l’opposition serait aujourd’hui beaucoup moins radicalisée et ces combattants étrangers ne seraient pas sur le territoire syrien.

Des erreurs ont été commises et il est maintenant extrêmement difficile de les corriger. À l’avenir, il sera malheureusement très difficile de mettre sur pied un gouvernement pacifique.

Le Gouvernement syrien a utilisé des armes chimiques contre son propre peuple ; c’est la pire chose qu’un gouvernement puisse faire ; c’est intolérable. Nous ne pouvons pas nous contenter de condamner, nous devons agir ! C’est d’ailleurs ce qu’a dit le Président Obama. Heureusement, l’unanimité a été trouvée au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, ce qui a permis d’ouvrir des négociations contraignant le régime à abandonner le recours aux armes chimiques. Toutefois, celles-ci ne sont pas encore détruites. Nous devons veiller à ce que la résolution soit appliquée afin qu’il n’y en ait plus dans le pays, car il est dans l’intérêt de tous que de telles armes ne soient plus jamais utilisées, en Syrie comme ailleurs.

Que doit faire la communauté internationale ? Il faut changer le gouvernement, car M. Assad n’est plus légitime. Plus la crise durera, plus elle se radicalisera. Lorsque des combattants étrangers sont impliqués, notre sécurité est elle aussi menacée. Voilà pourquoi il faut tenter de mettre un terme à la crise le plus rapidement possible. Quant au Conseil de l’Europe, il doit apporter son aide aux réfugiés, qui sont plus de 2 millions, au Liban, en Jordanie, en Turquie notamment. Nous devons les accueillir chez nous.

Mme LUNDGREN (Suède)* – Je félicite moi aussi le rapporteur de cet excellent rapport. Nous condamnons tous l’utilisation d’armes chimiques, mais nous devons également tous condamner les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité perpétrés en Syrie. Nous voulons une solution politique parce qu’il n’y a pas de solution militaire, mais, dans ce cas, il faut arrêter d’introduire des armes dans la région, et cela nous concerne tous. Donnons une chance à la solution politique.

À cet égard, je tiens à remercier nos collègues parlementaires britanniques, qui nous ont montré l’exemple en agissant auprès de leur gouvernement pour plus de transparence et de contrôle. Ce moment a été très important.

Le Conseil de l’Europe ne peut que soutenir les Nations Unies et travailler avec elles pour garantir l’appui de chacun de nos pays. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés vient de décider de fournir une aide directe à ceux-ci, de lancer des initiatives pour le développement et d’apporter une assistance économique et sociale pour favoriser la reconstruction. La tragédie syrienne dure depuis bien plus de trois ans et elle concerne toute la région. N’oublions pas que 87,5 % des réfugiés inscrits auprès du HCR viennent déjà d’Irak. Nous devons tirer les leçons de tout cela.

Nous qui espérons tous le succès de la conférence de Genève 2, nous devons le favoriser en ouvrant non seulement une ligne budgétaire, mais aussi nos frontières, comme le font la Jordanie, le Liban, la Turquie, l’Irak et l’Egypte, avec tous les efforts que cela suppose. Plus de cinquante réfugiés qui tentaient de rejoindre le continent européen se sont noyés au large des côtes italiennes, dont treize lundi dernier. Dans cette affaire, nous devons prendre notre part de responsabilité sans nous contenter de proposer des réponses militaires. Ainsi la Suède a-t-elle augmenté cette année de 127 % le nombre de réfugiés syriens qu’elle accepte sur son territoire et accordé 57 millions d’euros à l’aide humanitaire en Syrie.

Nous devons tirer les leçons de ce qui s’est passé : prévenir, réagir, reconstruire, et nous assurer que tout cela n’arrivera plus.

Sir Edward LEIGH (Royaume-Uni)* – Je remercie Mme Lundgren pour ses propos sur le débat qui s’est tenu au Parlement britannique et auquel certains d’entre nous ont participé. C’était une belle journée pour les parlementaires d’Europe. Auparavant, on s’acheminait vers la guerre ; ensuite, il y a eu une pause ; notre Premier ministre l’a immédiatement acceptée, M. Obama a assez rapidement renvoyé la décision au Congrès, puis le Secrétaire d’Etat Kerry a estimé dans une conférence de presse que l’intervention militaire ne serait pas nécessaire si les Syriens étaient disposés à détruire toutes leurs armes chimiques.

Alors que l’on nous avait dit qu’il était inutile d’espérer convaincre les Russes de négocier, nous y sommes parvenus, et nous avons obtenu des avancées avec nos amis russes. M. Pushkov a raison : le réalisme s’impose dans cette affaire. Une solution militaire est condamnée à l’échec. L’attaque militaire proposée, assez limitée pour être acceptée par nos opinions publiques, n’aurait pas suffi à renverser le régime. À l’époque de la guerre en Serbie, l’un de nos généraux estimait que le recours à la diplomatie pour dissuader les Russes de soutenir Milošević avait été le plus efficace. Aujourd’hui, de même, il faut travailler avec les gouvernements russe et américain à une solution diplomatique au conflit. C’est possible, à condition de ne pas insister sur le départ d’Assad avant le début des négociations – qui, de toute façon, n’arrivera pas ! Voulons-nous vraiment que les rebelles, que nous, Occidentaux, n’avons cessé de soutenir, soient associés à notre démarche ? Voulons-nous qu’Al-Nosra prenne le pouvoir ? Voyez les attaques contre les minorités en Syrie ! La solution diplomatique, la seule envisageable, implique tout le peuple syrien. C’est la seule manière d’avancer.

LE PRÉSIDENT – M. Loukaides, inscrit dans le débat, est absent de l’hémicycle, de même que M. Don Davies.

Mme KANELLI (Grèce)* – Je dois admettre que le rapport est équilibré, mais j’observe que nous parlons plus du Président Obama que de nos gouvernements, de nos populations, de nos nations ! À propos de chaque guerre, même la plus terrible des guerres civiles, nous devons nous demander, sans hypocrisie : est-ce une guerre civile ou est-ce une guerre utile, qui profite au monopole de l’énergie, aux grandes fortunes ?

Il s’agit toujours de vendre de grandes idées en dissimulant de grands crimes, qui ne font que générer d’autres crimes.

Ce qui se passe en Syrie à l’heure actuelle est une tragédie. On l’évoque avec émotion, on parle des réfugiés, mais admettons la réalité : on ne s’attaque pas aux racines du mal qui produisent ces flux de réfugiés ! Des femmes et des enfants vulnérables sont tués. C’est cela, la guerre !

À qui profite cette guerre ? J’ai entendu parler du respect des minorités en Syrie et, ici même, j’ai entendu des collègues parler de « nation islamique ». Parlons-nous ici d’idées ou parlons-nous des minorités bouddhistes, chrétiennes ou musulmanes ? Luttons-nous contre la nature de ceux qui représentent le mal ?

Nous nous devons d’intervenir. Nous devons intervenir contre les grands intérêts à l’œuvre depuis maintenant une décennie. Ils ont vendu l’idée d’un « printemps arabe » afin de créer un grand marché arabe. La paix règne-t-elle en Irak ? La paix règne-t-elle en Afghanistan, en Libye, ou au Soudan ? Nous engendrons les causes de la guerre, puis nous inventons l’idée de catastrophe humanitaire, qui nous sert d’excuse. Nous demandons à nos populations européennes de payer en invoquant des raisons humanitaires mais, avant cela, ce sont des fortunes qui ont été dépensées pour financer la guerre. Tous ces hommes guidés par de grands intérêts veulent-ils véritablement mettre un terme à la guerre ? Ou ne le peuvent-ils pas ? N’en ont-ils vraiment pas les moyens ? C’est cela la question !

Alors, revenons en arrière et expliquons à nos populations que, si nous voulons la paix, il faut lutter contre la pauvreté, que ce soit en Europe ou au Moyen-Orient. Il ne s’agit pas d’un marché, il faut laisser les populations décider pour elles-mêmes. Et, si les interventions impérialistes cessent, la paix pourra enfin régner !

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Monsieur von Sydow, il vous reste 4 minutes 30 pour répondre aux orateurs.

M. von SYDOW (Suède), rapporteur et président de la commission – Chers collègues, je vous remercie d’avoir participé à ce très important débat. Il a porté sur deux thèmes : les valeurs qui sont les nôtres et la façon dont nous identifions les horreurs en Syrie.

Des éléments de Realpolitik ont été évoqués. Nous sommes soulagés qu’enfin, les cinq membres du Conseil de sécurité, en particulier les Etats-Unis et la Russie, aient compris qu’il était de leur intérêt et de l’intérêt de tous de s’entendre et d’intervenir, car c’est nécessaire. Les mesures envisagées se fondent sur la nouvelle situation. Il peut être dérangeant qu’il ait fallu attendre l’attaque chimique, mais nous apprécions néanmoins les décisions prises.

Si je comprends bien, la résolution du Conseil de sécurité ne porte pas de jugement de valeur, elle se fonde sur d’autres conditions. Notre contribution doit se fonder sur nos valeurs. Nous devons pousser nos gouvernements à rappeler aux négociateurs à Genève que les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit doivent avoir leur place dans les négociations et qu’il faut soutenir davantage les réfugiés. J’ai reçu un message d’António Guterres, il y a quelques jours, disant que la situation des réfugiés devait être prise en considération. Le Liban accueille 760 000 réfugiés aujourd’hui, soit l’équivalent de 11 millions de réfugiés au Royaume-Uni, 15 millions en Allemagne, 20 millions en France et 58 millions aux Etats-Unis d’Amérique. Voilà la situation que connaît le Liban aujourd’hui !

Nous devons apporter un plus grand soutien aux réfugiés dans les camps. Nous devons aussi accueillir plus de réfugiés et contribuer au financement de leur accueil.

Il nous faut également parler des culpabilités. La recommandation que je vous propose ne parle pas, a-t-il été dit, de l’impunité. Mais si ! Le paragraphe 3 est très clair à ce sujet. Le Conseil de l’Europe doit introduire cette perspective sous peine que cette recommandation soit uniquement marquée au coin de la Realpolitik. Nous devons sans cesse rappeler cela à nos gouvernements : nous demandons que le droit international prime, qu’il y ait enquête et que justice soit faite.

Finalement, à propos de la Conférence de Genève 2, nombre d’entre vous ont clairement exprimé que tant que tous les groupes qui détiennent un pouvoir militaire, qu’ils soient miliciens ou autres, n’ont pas confirmé qu’ils participeront à la conférence et qu’ils respecteront le résultat des négociations, la situation restera alarmante et les chances de succès nulles.

Nous devons rappeler au Conseil de sécurité qui, fort heureusement, a compris et réagi, qu’il doit poursuivre sur cette voie. On ne peut se contenter de demi-solutions.

Je vous remercie de votre soutien.

LE PRÉSIDENT – Merci, Monsieur von Sydow, pour l’excellent travail que vous avez effectué. Merci au secrétariat de votre commission.

Merci également à celles et ceux qui sont intervenus dans ce débat qui honore l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Je ne doute pas que, si la recommandation est votée, elle sera prise en considération par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et nos gouvernements respectifs.

La discussion générale est close.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de recommandation sur lequel deux amendements ont été déposés.

Cette commission demande l’application de l’article 33-11 du Règlement, car elle a adopté à l’unanimité ces deux amendements.

Est-ce bien cela, Monsieur le président ?

M. von SYDOW (Suède), rapporteur et président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – J’en donne lecture :

L’amendement 1, déposé par M. Schennach, Mmes Christoffersen, Bilgehan, Trettebergstuen, Hägg, tend, dans le projet de recommandation, au paragraphe 2, à la fin de la première phrase, après les mots « assistance humanitaire », à insérer la phrase suivante : « De même, la violence fondée sur le genre, notamment le viol, l’enlèvement et la traite de femmes, l’exploitation sexuelle et les violences, la prostitution forcée et les mariages forcés font désormais partie d’une stratégie visant à déstabiliser la population syrienne. »

L’amendement 2, déposé par Mme Quintanilla, M. O. Shevchenko, Mme Mulić, MM. Ivanovski, Račan, tend, dans le projet de recommandation, au paragraphe 14.5, après les mots « s’assurer que », à insérer les mots suivants : « les effets de l’utilisation très répandue des violences sexuelles et de la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre et ».

En l’absence d’objection, les amendements 1 et 2 sont déclarés définitivement adoptés.

LE PRÉSIDENT – Je mets aux voix le projet de recommandation contenu dans le Doc. 13320, ainsi amendé. Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

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Le projet de recommandation, amendé, est adopté à l’unanimité des 98 votants.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, mon cher collègue, d’avoir déposé un projet de recommandation plutôt que de résolution. Cela me semble plus approprié, plus fort, eu égard au sujet traité.

2. Discours de M. Nikolić, Président de la Serbie

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Nikolić, Président de la Serbie.

Monsieur le Président, soyez le bienvenu à Strasbourg. Je suis très heureux des échanges que nous avons eus ce matin dans mon bureau. Ils nous ont permis de brosser un tableau politique général, qu’il s’agisse du travail de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ou de votre région.

Notre maison de la démocratie et des droits de l’homme ne vous est pas inconnue puisque vous avez siégé au sein de notre Assemblée pendant huit ans. Votre visite parmi nous est donc un retour. Nombreux sont d’ailleurs celles et ceux qui, après avoir siégé au sein de cette Assemblée, ont occupé des responsabilités politiques de premier plan. L’école de la démocratie est une bonne école !

J’ai eu la chance de me rendre en visite officielle dans votre beau pays au mois de mars dernier. Je voudrais remercier une nouvelle fois la délégation serbe de l’Assemblée parlementaire pour l’accueil qui m’a été réservé, ainsi que les autorités du pays, avec qui j’ai eu des échanges particulièrement intéressants. M’exprimant devant l’Assemblée nationale de la Serbie, j’ai eu l’occasion de dire que votre pays m’est proche par son histoire et son présent, un présent résolument européen.

Evidemment, l’Assemblée n’oublie pas l’histoire douloureuse et tragique des conflits dans les Balkans. Alors que leur souvenir reste très vif dans nos esprits, nous formons l’espoir que les responsables politiques de tous les pays de l’Europe du Sud-Est écrivent une nouvelle page de l’histoire de cette région, qui se trouve au cœur d’une Europe que nous voulons démocratique, fondée sur le respect des droits de l’homme, et riche de sa diversité.

L’Assemblée parlementaire aime aussi se tourner vers l’avenir. Les avancées récentes dans les relations entre Belgrade et Pristina sont porteuses d’espoir et nous ne pouvons que saluer cette démarche positive pour pérenniser la paix et la réconciliation de la région. La Serbie est un grand pays de la région et doit jouer pleinement son rôle dans la stabilisation et la coopération dans l’Europe du Sud-Est.

Monsieur le Président, comme vous le savez, l’Assemblée parlementaire soutient pleinement les autorités de votre pays dans les réformes en cours pour mettre en œuvre les engagements post-adhésion qui restent encore à honorer. Notre commission de suivi accompagne, conseille et assiste la Serbie dans ses efforts en vue de consolider le système judiciaire, pour qu’il devienne véritablement indépendant et efficace, en vue de renforcer la liberté des médias et d’intensifier la lutte contre la corruption et les discriminations. La Commission de Venise est également à votre entière disposition pour vous apporter ses conseils.

Forte d’un certain nombre de réformes déjà accomplies, en collaboration étroite avec notre Organisation - notamment en ce qui concerne le système électoral, le système judiciaire, les droits des minorités ou encore en termes de décentralisation -, la Serbie a fait, récemment, un grand pas en direction de l’adhésion à l’Union européenne, et je m’en félicite.

De grands défis attendent encore votre pays et notre Assemblée sera toujours aux côtés de la Serbie pour l’encourager à les relever.

Je voudrais, pour finir, saluer la présence à mes côtés de notre Secrétaire Générale adjointe, Mme Gabriella Battaini.

Monsieur le Président, vous avez la parole.

M. NIKOLIĆ, Président de la Serbie* – Monsieur le Président, Madame la Secrétaire Générale, chers membres de l’Assemblée parlementaire, Mesdames, Messieurs, je vous remercie de l’honneur que vous me faites aujourd’hui en m’invitant à intervenir devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Je vous souhaite à tous une bonne santé et à vos pays le progrès et la réussite dans tous les domaines.

J’apprécie tout particulièrement cette possibilité qui m’est offerte de répondre aujourd’hui aux questions de mes anciens collègues. Je vous souhaite d’avoir un jour le même privilège. Intervenir devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe suscite une fierté très particulière. C’est ici, en effet, que sont ancrées les valeurs fondamentales de nos sociétés : les droits de l’homme, la démocratie et la primauté du droit. C’est ici aussi que les futurs dirigeants acquièrent les connaissances indispensables qui leur permettront de défendre les valeurs essentielles de la civilisation.

Je tire une grande fierté d’avoir été membre de l’Assemblée pendant huit ans. Il est vrai que je n’appartenais à aucun groupe parlementaire. J’ai toujours figuré en fin de liste des orateurs et la plupart de mes interventions n’étaient connues que par leur publication.

Nous célébrons cette année les dix années de l’entrée de la Serbie au Conseil de l’Europe. L’aide et l’assistance de l’Organisation sont précieuses pour le développement de la démocratie dans notre pays. Nous sommes engagés dans une collaboration durable et nous souhaitons œuvrer au même but commun, celui de permettre à tous les citoyens européens de jouir de la prééminence du droit, des droits de l’homme et de la démocratie, en vue de l’édification d’une stabilité et d’une prospérité durables sur notre continent.

Depuis son entrée au Conseil de l’Europe, la République de Serbie a beaucoup progressé et s’est quasiment acquittée de la totalité des obligations contractées lors de son adhésion. De nombreuses lois ont été adoptées et des initiatives ont été prises pour des réformes globales du droit et de la politique. Je citerai notamment la lutte contre la corruption, la réforme de la justice, l’interdiction des discriminations, l’amélioration de la situation des minorités nationales, la réglementation du statut des ONG et la coopération pour le jugement des crimes perpétrés en Yougoslavie.

Au cours des derniers mois, les activités du Gouvernement de la Serbie se sont concentrées sur une actualité brûlante dans le domaine judiciaire. L’Assemblée nationale a adopté et amendé de nombreuses lois, ainsi que deux stratégies nationales pour la réforme de la justice et la lutte contre la corruption, en coopération avec le Conseil de l’Europe. La réforme du système judiciaire est fondée sur la Stratégie nationale pour la réforme de la justice et s’appuie sur six principes : l’indépendance, l’impartialité, la qualité, le professionnalisme, la responsabilité et l’efficacité.

L’objectif général de la stratégie nationale de lutte contre la corruption en Serbie est de supprimer, dans la plus large mesure possible, toutes les barrières au développement économique, social et démocratique de la République. La corruption a non seulement pour conséquence l’appauvrissement de la société et de l’Etat, mais aussi une chute radicale de la confiance des citoyens à l’égard des institutions démocratiques. La corruption engendre également des incertitudes, la déstabilisation du système économique et la réduction des investissements. Des domaines d’action prioritaires ont donc été définis en se fondant sur les analyses du Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO).

Les problèmes auxquels nous devons faire face ne sont pas simples, les résoudre sera difficile et demandera du temps. La plus grande partie de nos efforts est consacrée à adopter les normes européennes, à réformer fondamentalement les institutions et à créer une société moderne.

Monsieur le Président, la République de Serbie appuie l’initiative du Secrétaire Général pour la promotion du mécanisme de suivi du Conseil de l’Europe. Nous partageons l’idée qu’il faut en renforcer le fonctionnement et mieux le coordonner plutôt que de créer de nouveaux mécanismes. Nous sommes favorables à l’élaboration d’un système solide de protection contre les menaces que sont la corruption, les discriminations, le racisme, l’intolérance, la criminalité organisée et l’incitation à la haine.

Par ailleurs, nous sommes favorables à la fixation de critères plus clairs et mieux mesurables pour la décision de mettre un terme au processus de suivi.

Plus d’un an après l’élection du Président de la Serbie et la désignation d’un nouveau gouvernement, je suis heureux de pouvoir confirmer depuis cette tribune l’attachement de notre pays aux valeurs européennes, et je me réjouis de voir nos partenaires internationaux prendre acte de cette attitude. En d’autres termes, nous sommes devenus un partenaire fiable, sincère et responsable, et nous agissons dans un esprit de dialogue et de tolérance.

Nous pouvons nous féliciter d’avoir obtenu des résultats tangibles. La Serbie, malgré les nombreux obstacles auxquels elle a dû faire face au cours de cette année, a beaucoup avancé dans de nombreux domaines. Nous avons ainsi produit des résultats importants dans le dialogue entre Belgrade et Pristina – entamé l’année dernière dès la constitution du Gouvernement de la Serbie –, mais aussi en matière de lutte contre la corruption et la criminalité organisée, ou de réforme des institutions.

Outre ces questions, le développement de l’économie est un problème sur lequel nous allons fortement mettre l’accent à l’avenir. L’objectif est clair : il s’agit de faire de la Serbie un membre respectable de la famille des peuples européens, capable d’apporter le bien-être à ses citoyens.

La République de Serbie accorde une importance considérable au dialogue constructif mené entre Belgrade et Pristina sous l’égide de l’Union européenne et, à Bruxelles, avec la participation et sous la direction remarquable de Mme Ashton. À notre initiative, ce dialogue est mené au plus haut niveau politique et les engagements pris ont un caractère contraignant. Ce processus a abouti à la conclusion du premier accord de principe destiné à normaliser les relations entre les deux parties. Nous sommes convaincus que cet accord apportera la stabilité et favorisera une coopération profonde dans la région, de même qu’il contribuera au processus d’intégration de la Serbie dans l’Union européenne. Nous sommes d’avis que les décisions fondées sur le compromis peuvent permettre le règlement de toutes les questions de longue durée.

En outre, la République de Serbie a accepté la proposition de Thorbjørn Jagland, le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, d’intégrer au sein du Conseil les institutions provisoires du gouvernement du Kosovo-et-Métochie sur une base fonctionnelle, et d’utiliser un astérisque et une note en bas de page lors de la mention du Kosovo dans tous les projets et documents de l’Union européenne et du Conseil de l’Europe.

Nous sommes convaincus qu’il faut poursuivre les activités du Conseil de l’Europe au Kosovo-et-Métochie et nous sommes favorables à l’application des normes de cette organisation dans les domaines de la défense des droits de l’homme – en particulier ceux des minorités –, de la primauté du droit et de la préservation du patrimoine culturel.

Nous sommes d’avis que le Conseil de l’Europe doit conserver son statut de neutralité, et qu’une décision doit être prise au sujet de la majorité des habitants de nationalité albanaise, afin d’éviter toute sécession du Kosovo-et-Métochie par rapport à la Serbie.

La Serbie a appelé les Serbes à participer au scrutin, et nous aimerions que des organes légaux puissent être représentés. Elle est favorable à l’instauration d’un système par lequel les Serbes pourraient, directement et sans intermédiaire, exposer leurs problèmes, et qui permette de les aider à les résoudre. Peut-être s’agit-il là d’un problème pour Pristina, mais nous avons agi sincèrement, dans un contexte particulièrement difficile, au point d’être parfois considérés en Serbie comme de véritables traitres, et nous attendons donc la même sincérité de la part de l’autre partie.

Or le comportement de l’administration de Pristina vis-à-vis des Serbes est inadmissible : sa commission électorale efface leurs noms des listes alors qu’ils ont aussi le droit de vote. Elle refuse également d’avoir un représentant dans la commission électorale de Serbie et dans les bureaux de vote. Cela doit préoccuper le Conseil de l’Europe.

Sans participation de la Serbie, il ne peut y avoir de développement de la démocratie ni progression de la coexistence au Kosovo-et-Métochie. Le moment est donc venu, pour le Conseil de l’Europe, d’intervenir dans la surveillance du processus électoral afin de défendre la démocratie et de garantir la tenue d’élections régulières et impartiales. Si aucune des organisations auxquelles nous nous sommes adressés ne réagit, la Serbie reconsiderera sa décision d’appuyer la tenue d’élections qui ne seraient pas organisées de façon régulière, car c’est seulement ainsi que la position des Albanais pourra évoluer. Les principes démocratiques ne peuvent être bafoués, même par les partisans d’un Etat du Kosovo indépendant.

La Serbie a transféré le règlement de ce conflit territorial aux Nations Unies, et cela n’a rien à voir avec la reconnaissance ou l’absence de reconnaissance du Kosovo-et-Métochie. Si votre aide se fait attendre, cela signifiera que mon action aura été vaine au cours de cette année et demie de mandat, alors que je suis sûr qu’elle a contribué, dans le monde entier, à l’adoption d’une attitude différente vis-à-vis des Serbes.

Je ne peux croire qu’il puisse y avoir une démocratie et une justice sélectives. L’exemple que j’ai cité aura donc valeur de test : soit il entrera dans les annales comme un cas d’application des principes démocratiques, soit il restera au contraire comme un exemple de dévoiement de ces principes.

Une autre question particulièrement importante pour la Serbie est celle du trafic d’organes humains au Kosovo-et-Métochie. Nous devons mettre en œuvre les résolutions de l’ Assemblée réclamant une enquête sur les allégations de comportements inhumains or de commerce illégal d’organes humains au Kosovo. L’Assemblée parlementaire doit en effet s’intéresser aux suites données à l’adoption de ses résolutions et veiller à ce qu’elles ne restent pas lettre morte.

Monsieur le Président, le passé des pays de l’ex-Yougoslavie est empreint de différends, de conflits lourds, de destructions dues à la guerre et, ce qui est le pire, de victimes humaines. La seule voie pour régler cet héritage est de résoudre les questions en suspens en faisant preuve de confiance mutuelle et d’esprit de coopération. La Serbie est pour la paix et la stabilité dans la région comme dans toute l’Europe, et souhaite développer des relations de bon voisinage. La résolution des problèmes en suspens est un élément très important de notre politique, et celle-ci rencontre de bons résultats. Nos relations ont apporté une perspective européenne à la région. Nous devons tous participer à ce processus avec patience, dynamisme et ténacité.

L’Assemblée nationale de la République de Serbie a adopté une déclaration sur la condamnation des crimes à Srebrenica. Cela montre sa volonté réelle de participer au processus de réconciliation et à la coopération régionale. Cette déclaration condamne fortement les crimes et exprime un appui à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine.

Les autres parties doivent exprimer leurs sentiments et faire preuve de compassion envers les victimes serbes. La Serbie attend avec patience que ces parties fassent preuve de courage et de responsabilité. Nous œuvrons pour que cela n’ait pas d’incidences négatives sur la paix et nos relations de bon voisinage. C’est pourquoi nous aidons tous les pays de la région sur la voie de leur intégration européenne. Tout ce qui est bon pour la région l’est aussi pour la Serbie. Nous sommes convaincus qu’un progrès politique positif et le développement de nos voisins ne pourront que contribuer au bien-être de nos citoyens.

Être membre de l’Union européenne est la voie du maintien du développement politique de la région. Nous sommes convaincus que la Serbie entraînera par son exemple, l’intégration des autres Etats de ce que vous appelez par erreur le Balkan occidental. Il est aussi à l’ouest de la Bosnie-Herzégovine. C’est humiliant de penser qu’en entrant dans l’Union européenne, nous sortirions des Balkans. La Serbie en restera un des Etats.

Une société démocratique est inconcevable sans le respect des droits de l’homme et de l’égalité des citoyens dans toutes les sphères de la vie. La Serbie, ces derniers mois, a progressé dans l’élaboration d’un système de développement de l’égalité pour tous ses citoyens. Nous avons modifié le code pénal en instaurant une nouvelle incrimination pour haine. Nous avons dépénalisé la diffamation qui empêchait la liberté des médias, ce qui a contribué à la liberté d’expression en Serbie.

Depuis un an et demi, nous avons adopté une loi sur l’interdiction de la discrimination. Le gouvernement de la République de Serbie a adopté une stratégie de prévention et de protection contre la discrimination. Nous visons la promotion des groupes les plus soumis à la discrimination comme les femmes, les enfants, les LGBT, les personnes âgées ou handicapées, les minorités nationales, les réfugiés, les personnes déplacées à l’intérieur, les groupes minoritaires et religieux.

Ne jugez pas trop sévèrement la Serbie pour ne pas avoir autorisé la parade LGBT pour des raisons de sécurité. Il ne faut pas qu’une année et demie de progression vers les normes européennes soit effacée à cause de cela. Nous sommes prêts à éliminer les difficultés. S’il vous plaît, il serait inhumain qu’il faille perdre des vies humaines pour justifier la décision du gouvernement. Beaucoup de groupes extrémistes voulaient participer à ce défilé pour exprimer leur mécontentement. Il y a encore chez nous beaucoup de xénophobes, de faux patriotes et de criminels dangereux.

Nous allons coopérer avec tous, les groupes LGBT, les médias, les ONG, les services de l’Etat. Nous allons promouvoir des droits égaux pour tous, modifier les lois. Nous avons aggravé les peines. Nous poursuivrons les organisations qui sont pour la violence envers ceux qui pensent autrement. Cela ne doit pas se renouveler.

La République de Serbie aura une attention soutenue pour améliorer la situation de toutes ses minorités nationales. Nous appliquons la Convention-cadre pour celles-ci et la Charte européenne des langues régionales. Les droits des minorités nationales sont intégrés dans tous les documents officiels. On prévoit une discrimination positive pour les minorités qui sont pénalisées.

Nous avons adopté une loi sur les conseils nationaux des minorités. Il y a eu des élections directes pour le conseil des minorités nationales. Cette loi définit les activités des conseils nationaux dans les domaines de l’éducation, de la culture, de l’information etc.

Toutes les minorités doivent être reconnues et jouir des droits accordés à tous. Cela est prévu par le comité de la convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Notre position fondamentale est que nos citoyens ne peuvent pas avoir des droits inférieurs en raison de leur appartenance nationale ou de leur langue. Il faut utiliser les normes internationales, notamment la convention-cadre et singulièrement son article 3.

Nous poursuivons notre engagement pour l’amélioration de la situation des minorités nationales sur notre territoire en coopérant avec le Conseil de l’Europe. Réciproquement, tous les ressortissants serbes et les minorités nationales vivant dans d’autres territoires doivent disposer des mêmes droits que tous les habitants.

Monsieur le Président, la Serbie est devant une grande chance. Je vous assure que nous ne la laisserons pas passer. Tout notre potentiel sera mis en œuvre pour que notre pays dans tous les domaines soit totalement européen dans le cadre des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe, de la protection des droits de l’homme, de la primauté du droit et de la démocratie.

La Serbie est engagée à poursuivre sa coopération et la promotion des relations avec le Conseil de l’Europe pour atteindre ces objectifs et assurer le bien-être de ses citoyens. Nous comptons sur votre appui.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le Président, un certain nombre de collègues souhaitent vous poser des questions. Ils ont trente secondes pour le faire.

M. AGRAMUNT (Espagne) porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – La Serbie a pris cette année des mesures importantes pour lutter contre la corruption qui est très répandue. Les autorités européennes ont préconisé des mesures pour endiguer le phénomène. L’opposition politique a porté diverses accusations. Quels sont, selon vous, les défis majeurs ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE * – En Serbie, la corruption est importante et ancienne. Il n’y a pas eu de changement de gouvernement ayant permis la lutte contre la corruption jusqu’ici.

On la trouve partout, chez les médecins, les avocats, les chefs d’entreprise. Nous avons lancé la lutte contre la corruption. Il est difficile de trouver une personne qui soit mêlée à la corruption sans avoir été au gouvernement. Dans ce domaine, il n’y a pas de droit sélectif. Nous avons eu vingt-quatre privatisations qui ont été criminelles, et il y a eu une corruption et des criminels. Maintenant, quand des poursuites sont engagées dans le cadre de ces affaires, on trouve des gens qui ont occupé des fonctions importantes au gouvernement. Ce n’est pas lié à la politique, il n’y a pas de prisonniers politiques en Serbie ; moi, j’ai été prisonnier politique, et je sais à quel point c’est difficile quand vous êtes tout simplement en prison parce que vous n’êtes pas d’accord avec les gens au pouvoir.

Nous allons condamner ces criminels et nous n’allons pas céder devant ceux qui ont été mêlés à des affaires de corruption, même s’il s’agit de gens de mon ancien parti politique ou d’anciens collaborateurs. Et si vous êtes désormais dans l’opposition après avoir fait partie du gouvernement, ce n’est pas un motif pour que vous soyez protégé, exonéré de poursuites pour les actes criminels que vous avez commis. Tout le monde a droit à un procès juste en Serbie, et les poursuites sont désormais beaucoup plus rapides que sous le précédent gouvernement. Je peux féliciter le Gouvernement serbe, qui a pris des mesures qui nous mènent sur la voie de la condamnation des criminels et de tous ceux qui ont été mêlés à la corruption.

M. GROSS (Suisse), porte-parole du Groupe socialiste* – Monsieur le Président, j’aimerais revenir sur un point que vous avez mentionné dans votre allocution. Pour la troisième fois, la parade des LGBT n’a pas pu avoir lieu. Savez-vous ce que cela veut dire qu’un Etat cède devant de petits groupes extrémistes violents ? Vous avez dit par anticipation, lundi dernier, que vous alliez préparer le prochain événement. Allez-vous mener des enquêtes, identifier les auteurs, les sanctionner ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Je vous remercie de cette question, Monsieur le député. Je suis profondément conscient de ce qui s’est passé, encore plus que vous. Toutes mes activités politiques depuis un an et demi, et toutes celles de mon gouvernement, ont été menées pour qu’il n’y ait aucun motif qu’on empêche les entretiens avec les LGBT, mais cette manifestation n’a pu se tenir pour des questions de sécurité. Aucun défilé n’a été interdit par le Gouvernement de la Serbie pendant un an et demi, mais les services de sécurité du pays n’étaient pas prêts, à ce moment-là, pour permettre la tenue de cette parade sans conséquences négatives. Les organisateurs sont identifiés, et on voit maintenant à quel point ils sont engagés dans cette organisation, et j’ai reçu l’information que l’on commençait la préparation d’une nouvelle manifestation.

Le pays se trouve dans une situation économique extrêmement difficile, et beaucoup de ce que nous faisons au Kosovo-et-Métochie n’est peut-être pas évalué à sa juste valeur.

Il existe des gens qui font partie des LGBT et qui n’osent pas le dire. Et leurs opposants veulent, eux, montrer qu’ils n’appartiennent absolument pas au groupe LGBT ; nous avons essayé de les neutraliser.

Il y a véritablement une lutte pour que l’on puisse être en sécurité dans les rues de Belgrade et du pays, et pas seulement pour les défilés des LGBT ; il y a aussi des événements sportifs qui donnent lieu à des manifestations de passion extrêmes. Nous serons bientôt très organisés et pourrons anticiper et œuvrer comme il convient. J’espère, après tous les entretiens que j’ai déjà eus, que nous pourrons préparer une manifestation de ce genre qui se déroule normalement en Serbie, à l’abri de tous ceux qui n’en veulent pas. Mais, en ce moment, il y a beaucoup de groupes qui se distinguent les uns des autres en Serbie, et personne ne les maltraite.

Je peux vous promettre que, l’an prochain, vous n’aurez plus de raisons de poser cette question à propos de la Serbie.

M. XUCLÀ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Monsieur le Président, je vous souhaite la bienvenue au nom de mon groupe politique.

J’ai une question à vous poser. Je souhaite encourager votre pays à adopter la convention sur les langues minoritaires, et ce le plus rapidement possible. Quelles mesures mettez-vous en œuvre afin de protéger, en particulier, le droit des minorités à l’éducation ? Autre chose, dans quelle mesure le gouvernement de Pristina respecte-t-il les droits des minorités ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – En ce qui concerne la Serbie, la Constitution va plus loin que la convention sur les minorités. Les ressortissants des minorités nationales peuvent soutenir leur doctorat dans leur langue. Toute leur scolarité, à l’école primaire, dans l’enseignement secondaire, dans l’enseignement supérieur jusqu’au doctorat, peut se dérouler dans leur propre langue. On promeut donc l’utilisation de la langue maternelle.

Il y a eu des problèmes sous le gouvernement précédent pour la minorité bulgare, ils ont été réglés. Pour de nombreux motifs, ils n’ont pas réussi, à l’époque mais je n’ai, pour ma part, reçu aucune plainte d’aucun conseil national comme quoi la langue maternelle n’aurait pu être utilisée. Nous avons plus de trente peuples différents en Serbie. Ce n’est pas quelque chose de nouveau pour nous. Cela fait des siècles que tout le monde coexiste. Il fallait simplement que le gouvernement appuie l’utilisation des langues. La langue administrative est le serbe, mais toutes les autres langues peuvent être utilisées, et on peut écrire en caractères cyrilliques ou en caractères latins pour répondre aux besoins des peuples de notre pays.

S’il y a des problèmes réglés en faveur des minorités nationales, j’en suis fier. Nous n’exigeons pas de leurs membres qu’ils soient serbes ni qu’ils s’expriment en serbe. Nous tenons compte des différences et la Constitution autorise une discrimination positive. S’il y a une minorité qui est un peu en retard pour le maintien de sa culture, de son histoire ou de son écriture, l’Etat lui accorde des droits supérieurs à ceux des autres minorités, et nous les mettons en œuvre. Le conseil des minorités nationales choisit ses représentants, qui œuvrent dans de nombreux domaines.

En ce qui concerne le Kosovo-et-Métochie, il existe deux milieux différents : un milieu où il y a des institutions sous administration de Pristina, qui sont autoproclamées, et l’administration des Nations Unies. Là, on peut utiliser une langue propre. Et il y a quatre communautés au Kosovo-et-Métochie où il n’y a pas d’autorité et où les Albanais ne vivaient pas, auparavant ; il n’y a donc pas eu de mélange de la population, et il n’y a pas d’autre langue que le serbe, parce qu’il n’y a pas d’Albanais qui y vivent.

En ce qui concerne les intentions de la Serbie, elles ne sont pas négatives. Nous essayons de garantir, dans les villages serbes, les manuels de Belgrade, l’organisation des écoles. La situation et un peu confuse, car il y a des domaines où l’on peut coopérer et d’autres où l’on ne peut pas.

Mais nous avons maintenant une législation de Pristina, sans aucune influence de Belgrade et nous essayons de répondre à tous nos accords. Cette législation ne préconise pas de dispositions particulières. D’ailleurs, le Conseil de l’Europe pourrait peut-être nous aider. Si vous avez décidé de coopérer avec les institutions de Pristina, alors vous devez donner une liste des obligations et Pristina pourrait prouver qu’elle respecte les principes du Conseil de l’Europe.

Personnellement, le Conseil de l’Europe m’a aidé à parfaire mes connaissances dans tous les domaines.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Monsieur le Président, la Croatie fait partie de l’Union européenne. Quelles sont les conséquences de cette adhésion sur la Serbie ? Ont-elles été bien gérées ? Je pense au passage des frontières, à la normalisation des normes techniques et aux modalités commerciales. N’y a-t-il pas des aspects où cela a une incidence un peu défavorable ?

Et d’un autre côté, n’avez-vous pas là davantage de possibilités pour améliorer les relations entre Belgrade et Zagreb ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Les relations dans les Balkans dépendent essentiellement des relations entre la Serbie et la Croatie. Nous n’avons pas encore tout fait – ni du côté de la Serbie, ni du côté de la Croatie – pour jeter les bases d’une coopération saine, mais ma rencontre avec le Président de la Croatie ce mois-ci sera un bon signe pour la normalisation des relations.

Nous avons signé un accord commercial entre nos pays.

Quand la Croatie a engagé les pourparlers pour entrer dans l’Union européenne, nous n’avions même pas entamé le processus. Mais nous voulions qu’elle devienne membre pour que nous puissions, à notre tour, le devenir.

Avec la Croatie, nos relations ne feront que s’améliorer puisque nous avons un commerce, mais pas de production. Il va donc bien falloir que nous fassions appel aux ressources naturelles de la Slovénie et de la Croatie. Autrefois, dans les différentes unions, nous n’étions pas concurrents sur les marchés.

Il faut tirer les leçons du passé – mais on vit dans le présent et le futur. Nous avons trop longtemps fait la guerre pour que nous ne méritions pas la paix maintenant. C’est la raison pour laquelle je suis optimiste en ce qui concerne nos relations avec la Croatie, et avec tous les pays des Balkans et pas seulement les membres de l’ex-Yougoslavie. Nous sommes favorables à la normalisation des relations.

Nous allons donc régler nos problèmes et sortir le pays des difficultés économiques. Et la solution passe par la coopération dans les Balkans.

J’aurais aimé que vous me posiez cette question dans un mois, lorsque nous aurons signé toute une série d’accords avec la Croatie.

M. PAPADIMOULIS (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Président, j’ai bien noté avec grand intérêt tous vos propos, leur tonalité surtout et le besoin de dialogue avec tous les pays voisins de la Serbie, afin de trouver une orientation identique.

Quelles sont vos initiatives et quel est votre agenda concernant votre adhésion à l’Union européenne ?

Que comptez-vous faire pour améliorer vos relations avec le Kosovo ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Nous avons de très bonnes relations avec l’Union européenne. J’espère que les pourparlers ne vont pas se prolonger trop longtemps – nous avions préparé le terrain avant même que le pays soit candidat.

Nous ne sommes pas membres de l’Union européenne, mais nous avons vécu la même crise que les autres pays, mais personne ne nous aide. Si sortir de la crise est difficile pour les grands pays, les petits pays, eux, doivent le faire seuls. Nous devons prendre des crédits, nous aggravons nos dettes et comme nos partenaires estiment que notre pays n’est pas sûr pour les investissements, nous payons les intérêts les plus élevés. Et ils risquent d’atteindre un niveau inacceptable pour nous.

Mais l’Union européenne est notre partenaire. Et si nous n’y entrons pas, cela voudrait dire que personne ne veut de nous ! Si le Kosovo-et-Métochie constituait peut-être un problème avant les élections de l’an dernier, ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Certains des Etats sont nos amis, qui ont appelé à l’indépendance du Kosovo. Personne n’a de raisons pour ne pas la reconnaître. Pourquoi blâmer la Serbie qui a fait beaucoup de concessions ? Ceux qui nous ont précédés ont accepté l’autorité du Kosovo-et-Métochie sur l’ensemble du territoire. Nous avons promu et encouragé l’indépendance du Kosovo-et-Métochie et nous avons transféré aux Nations Unies le règlement de cette question. Aussi, la situation est-elle aujourd’hui totalement différente. Elle s’appuie sur la résolution du Conseil de sécurité, mais l’on continue à rechercher des solutions et à poursuivre les pourparlers. Il n’est pas vrai que nous n’acceptons pas la résolution du conflit, mais nous voudrions y vivre mieux. Ce territoire que nous qualifions d’autonome alors que les Albanais l’appellent « pays indépendant » n’est pas un Etat souverain. Les Serbes considèrent le Kosovo-et-Métochie comme faisant partie de leur pays. Qu’avez-vous fait si ce n’est d’engager des pourparlers qui continuent de se poursuivre jusqu’à aujourd’hui ? Nous sommes blessés, car l’on nous trompe dans le cadre de ces discussions. Cela d’ailleurs a eu des conséquences sur la police au Kosovo. Par ailleurs, des points n’ont fait l’objet ni de discussions ni d’accords à Bruxelles. Il ne peut y avoir d’armée sans l’accord de Belgrade. Si l’on se met d’accord sur des sujets comme la santé par exemple, pourquoi pas sur l’armée ?

La Serbie n’a jamais attaqué personne et n’attaquera jamais personne. Nous ne reviendrons pas à une époque révolue. Qui nous attaquerait sans l’autorisation de l’Otan et qui attaquerions-nous si l’Otan ne nous y autorisait pas ? Il serait une bonne chose de dialoguer pour enterrer les armes et vivre mieux.

Nous ignorons comment évolueront les frontières dans le cadre de l’Union européenne. L’Europe, c’est la liberté de communication, la liberté de circulation des personnes comme des marchandises. Les migrations sont grandes en Europe, les populations évoluent, les personnes démunies migrent dans des pays plus riches. L’objectif n’est donc pas de s’enfermer dans nos frontières ou dans des blocs, il faut tout ouvrir. C’est pourquoi nous espérons entrer dans l’Union européenne.

Ce que vous considérez comme des valeurs le sont pour nous aussi. Nous connaissons des difficultés à la solution desquelles nous nous attelons. En Serbie, nombreuses sont les personnes qui pensent que l’on ne doit pas résoudre cette question. Peut-être d’ailleurs serait-il plus populaire de ne pas la résoudre. Mais j’ai conclu un accord et je ne m’appuie pas sur l’idée que je vais peut-être perdre de la popularité. L’homme politique doit diriger le peuple et ne pas suivre l’air du temps. Il faut de l’audace, du courage et prendre des risques. Etre élu n’est pas uniquement un privilège et un prestige, ce sont aussi des obligations. Nous allons donc tout faire pour entretenir d’excellentes relations avec le Kosovo.

Je n’ose pas vous dire les problèmes que nous rencontrons dans le cadre de l’organisation des élections locales qui, si elles n’avaient pas lieu avec la participation des Serbes, ne permettraient aucune avancée.

J’aimerais participer à des entretiens avec mes interlocuteurs sur un pied d’égalité, j’aimerais qu’ils s’informent et comprennent. C’est comme si nous leur avions abandonné les Serbes. Pristina leur organise des conditions de vie qu’ils ne peuvent accepter.

Je suis beaucoup plus faible que la plupart d’entre vous, mais, peut-être plus encore que vous, je comprends les principes du Conseil de l'Europe. Je souhaiterais qu’ils soient à l’œuvre dans tous les Etats du monde, car ce sont les seuls principes en mesure de régir nos vies.

M. MICHEL (France) – Monsieur le Président, votre pays a signé le 19 avril dernier un accord historique avec le Kosovo en vue de normaliser vos relations. Sa concrétisation constituera à n’en pas douter un signal important pour l’ensemble de la région.

Je relève cependant que cette démarche courageuse de votre part en faveur de la paix dans les Balkans conduit quelques personnalités de Tirana à voir dans cette normalisation une première étape vers la grande Albanie. Quelles sont donc vos relations avec l’Albanie qui doit, elle aussi, participer à conforter la paix dans les Balkans ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Je n’ai pas eu de contacts personnels avec des représentants de l’Albanie. Si j’ai rencontré son Président et son ministre des Affaires étrangères dans un cadre privé, je n’ai rencontré personne, si ce n’est bien sûr dans le cadre de la réunion des ministres des Affaires étrangères.

L’Albanie s’est engagée à ne pas insister sur la création d’un Etat unifié albanais. Au cours de la campagne pour les élections législatives, certains candidats ont évoqué ce rêve de former un Etat unique albanais dans les Balkans, ce qui ne serait acceptable ni pour nous ni pour l’Europe. La Serbie n’a pas d’influence sur les autres pays, nous avons besoin des organisations internationales et de l’Union européenne en la matière.

Des populistes albanais rêvent aussi d’une grande Albanie, mais les hommes et les femmes politiques connaissent la réalité. Ce ne serait pas une bonne chose pour l’Europe.

Que certains aient reconnu l’indépendance de pays en sécession est un précédent, mais autoriser la création d’une grande Albanie serait une mauvaise chose. Qui sait où cela nous mènerait ? Des Albanais vivent en Macédoine, d’autres au Monténégro. Pourquoi seuls les Albanais vivant chez nous seraient-ils attirés par un tel projet ?

Peut-être la création d’une grande Albanie est-il l’objectif de certains. C’est la raison pour laquelle la prudence s’impose. Aux termes du droit international que nous devons tous respecter, une minorité ne peut faire sécession d’un pays souverain. Que se passerait-il si tout mouvement sécessionniste de par le monde se voyait accorder le droit de créer un Etat indépendant ? Et d’ailleurs que diriez-vous si cela arrivait dans votre pays ? Pensez aux populations concernées.

J’ai été témoin de conflits et de guerres tout comme les membres de ma famille et mes collaborateurs. Je ne voudrais pas que quelqu’un d’autre ait à vivre cela. Je ne le souhaite à personne.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Rappel au Règlement. Monsieur le Président, il est déjà 13 heures, mais j’aimerais que tous ceux qui le souhaitent puissent interroger le Président Nikolić. Ne pourrions-nous poser les questions que nous voulons absolument poser ? J’ai une question sur les droits des Hongrois à laquelle il me paraît vraiment important que M. Nikolić réponde.

LE PRÉSIDENT – Il ne s’agit pas vraiment d’un rappel au Règlement, Monsieur Gaudi Nagy. J’ai sous les yeux la liste des orateurs, dans laquelle vos collègues se sont inscrits conformément au Règlement de l’Assemblée parlementaire, et je suis obligé de respecter l’ordre dans lequel ils l’ont fait et d’écouter les réponses du Président. C’est un peu frustrant, soit, mais je ne peux pas faire autrement ! Il y a 38 inscrits. Nous devons respecter le travail de tous. Nous ne pourrons dépasser de plus de cinq minutes l’heure à laquelle il était prévu que la séance soit levée. Je vais donc donner la parole à l’orateur suivant, M. Díaz Tejera.

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – J’aimerais répondre, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – Avec l’accord de M. Díaz Tejera, vous avez la parole, Monsieur le Président.

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Monsieur le député, nous avons encore, vous comme moi, beaucoup à apprendre. Je ne sais pas sur quel point porte précisément votre question à propos des Hongrois. Peut-être ne suivez-vous pas de près les relations entre ces derniers et la Serbie, mais un jalon a été posé il y a un mois sur le territoire de la Vojvodine. Je rappelle que les Serbes ont été occupés et que les Hongrois ont gagné pendant la seconde guerre mondiale. Mais une amitié réelle est née entre les Hongrois et la Serbie. Nous avons fermé derrière nous les portes de l’Histoire. Il ne faut pas vivre dans le passé. En Vojvodine, aucun Hongrois n’est menacé et le parti des Hongrois y prend part au gouvernement. Ne m’interrompez pas ; comportez-vous correctement ! Tout ce qui concerne les relations avec les minorités nationales, en particulier hongroise, a été réglé. Il y a vingt ans, on pouvait dire que la Serbie ne traitait pas bien les Hongrois en Vojvodine, mais vous ne vous êtes pas endormi il y a vingt ans, vous vivez aujourd’hui ! Peut-être peut-on parler différemment pour des motifs électoraux ou en raison d’autres intérêts. Mais ne vous inquiétez pas : le peuple hongrois, en Vojvodine, vit comme les Serbes, modestement, mais dignement. Nous respectons nos minorités. Nous avons fait en sorte que leur langue, leurs écoles, leur système d’éducation soient respectés. C’est la région où il y a le moins de crimes. Les concours sont ouverts, les métiers où l’on porte l’uniforme sont accessibles à tous : s’il n’y a pas de Hongrois dans la police, c’est parce qu’ils ne veulent pas y entrer ; personne ne les en empêche ! Alors de quelle différence parlez-vous ?

LE PRÉSIDENT – Monsieur Díaz Tejera, je vous remercie d’avoir attendu.

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Je maintiens la question que je souhaitais poser malgré le petit incident qui vient d’avoir lieu. Il n’y a pas de primauté du droit sans un pouvoir judiciaire et il n’y a pas de pouvoir judiciaire si les juges ne sont pas indépendants. La différence entre un fonctionnaire et un juge, c’est que le premier se soumet à la hiérarchie alors que le second est libre : il ne doit pas recevoir d’ordre des autorités, il ne se soumet qu’à la loi. Les réformes judiciaires que vous envisagez tendent-elles à assurer l’indépendance de la justice ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE* – Nous avons beaucoup fait en la matière. La plupart des 600 juges qui avaient été révoqués parce qu’ils n’étaient pas membres du parti au pouvoir ont repris leurs fonctions, d’autres ayant pris leur retraite ou changé de profession. L’élection des juges a maintenant lieu au sein d’un organe judiciaire indépendant. Pour être juge, il ne suffit plus de faire des études de droit et de réussir un examen ; maintenant, il faut en outre suivre une formation de deux ans, conformément aux normes de l’Union européenne. Aucun juge n’a dû quitter ses fonctions parce qu’il était membre d’un parti politique. Un juge n’est révoqué que s’il fait mal son travail. Le pouvoir exécutif ne participe plus à l’élection des juges. Car vous avez tout à fait raison : les juges doivent être indépendants et l’exécutif ne doit pas les influencer, ni d’ailleurs le pouvoir législatif, qui s’est beaucoup retiré de ce domaine. Nous avons adopté les normes européennes en la matière et nous espérons que le pouvoir judiciaire restera totalement indépendant. Des mécanismes de contrôle permettent de veiller au comportement des juges. Dans notre pays, on est juge à vie, précisément pour éviter l’ingérence du pouvoir. Simplement, quelquefois, des erreurs sont commises.

Hélas, pour avoir eux-mêmes participé à ces privatisations criminelles, de nombreux juges ont ralenti la lutte contre la criminalité et la corruption.

Nous avons, bien entendu, compris qu’il fallait résoudre ce problème avant d’entamer l’examen du chapitre judiciaire avec l’Union européenne. Notre parti n’était pas au pouvoir à l’époque, il nous est donc plus facile de lutter contre les juges qui étaient impliqués dans des activités criminelles.

Mme DJUROVIĆ (Serbie)* – En tant que membre de la délégation serbe au Conseil de l’Europe, je suis très heureuse de vous accueillir dans cette enceinte.

On se rappelle tous la résolution de Dick Marty. Mais pourquoi l’enquête n’a-t-elle pas abouti ? Pourquoi personne n’a-t-il été traduit en justice ? Et comment va-t-on découvrir la vérité ?

M. LE PRÉSIDENT DE LA SERBIE – Je suis venu au Conseil de l’Europe pour trouver la réponse à cette question. J’ai aussi essayé de la trouver auprès des Nations Unies. Le Conseil de l’Europe se trouve en situation délicate. En tout cas, nous n’avons pas reçu d’informations sur ce sujet depuis longtemps. Peut-être faudrait-il mieux que les Nations Unies se saisissent de cette question. Mais je ne veux pas jouer de mon influence dans cette affaire.

Dans mon allocution, j’ai dit que cela ne devrait pas rester lettre morte. En fait, à l’époque, seuls les Serbes étaient assimilés à des criminels. C’était la tendance. Les autres étaient des victimes. Finalement, le nombre des victimes serbes et leurs souffrances ont été minimisés. On sait très bien que cette affaire n’est en rien inventée. Cette résolution a été adoptée ici. Mais une résolution, c’est une chose, encore faut-il ensuite que des mesures soient prises. On s’attend à ce que le sénateur Dick Marty poursuive son combat, qu’il aille de l’avant. En tout cas, il s’agit d’un crime sans précédent en Europe. Ne nous demandez pas pourquoi le gouvernement est intervenu au Kosovo : des personnes ont été kidnappées pour qu’on prenne leurs organes ! C’est cela qui explique la haine entre les deux peuples. On ne peut simplement pas fermer les yeux sur ces faits. Il faut que l’enquête soit menée.

Nous avons une confiance pleine et entière dans le Conseil de l’Europe. Nous ne vous critiquerons jamais parce que vous n’avez pas trouvé la solution. Mais vous devez servir de modèle aux autres Etats en Europe, qui s’attendent à ce que le Conseil de l’Europe joue son rôle dans cette affaire. Le Conseil de l’Europe est le temple où la démocratie et les droits de l’homme sont parfaitement défendus. Il faut que le message lancé à partir de ce temple soit clair.

Nous avons ouvert tous les dossiers, en pleine coopération avec le Tribunal de La Haye. Le Président Milošević a été extradé ainsi que d’autres, qui ont été jugés à La Haye. Le chef des services secrets aussi. Donc, faites le nécessaire, jouez de votre influence, exercez les pressions utiles pour que l’enquête sur ce trafic d’organes soit menée à bien. Car, sans réponses, il ne pourra y avoir ni paix durable ni stabilité.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, il nous faut maintenant arrêter les questions à M. Nikolić que nous remercions.

3. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance aura lieu cet après-midi à 15 heures 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

(La séance est levée à 13 h 15)

SOMMAIRE

1. La situation en Syrie

Débat selon la procédure d’urgence

Présentation par M. von Sydow du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 13320)

Orateurs : MM. Walter, Kürkçü, Mme Bakoyannis, Lord Anderson, Mme Schuster, M. Salles, Mmes Blanco, Allain, Zohrabyan, M. Pushkov, Mme Hovhannisyan, M. Rouquet, Mme Virolainen, MM. Schennach, Agramunt, Gardarson, Mmes Gillan, Guzenina-Richardson, MM. Mota Amaral, Jónasson, Hawn, Mme Fort, MM. Iwiński, Neill, Dișli, Mme Szél, M. Sasi, Mme Lundgren, Sir Edward Leigh, Mme Kanelli

Réponse de M. le rapporteur

Vote sur un projet de recommandation amendé

2. Discours de M. Nikolić, Président de la Serbie

Questions : MM. Agramunt, Gross, Xuclà, Earl of Dundee, MM. Papadimoulis, Michel, Gaudi Nagy, Dίaz Tejera, Mme Djurović

3. Prochaine séance publique

ANNEXE

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Miloš ALIGRUDIĆ

Jean-Charles ALLAVENA*

Karin ANDERSEN*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Francisco ASSIS*

Danielle AUROI/ Brigitte Allain

Daniel BACQUELAINE/Dirk Van Der Maelen

Theodora BAKOYANNIS

David BAKRADZE*

Taulant BALLA*

Gérard BAPT*

Gerard BARCIA DUEDRA/Silvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI*

Teresa BERTUZZI*

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY/Edward Leigh

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL/Yves Pozzo Di Borgo

Eric BOCQUET*

Mladen BOJANIĆ/Snežana Jonica

Olga BORZOVA/Anvar Makhmutov

Mladen BOSIĆ/Nermina Kapetanović

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Alessandro BRATTI*

Márton BRAUN

Gerold BÜCHEL*

André BUGNON

Natalia BURYKINA

Sylvia CANEL*

Nunzia CATALFO

Mevlüt ÇAVUŞOĞLU*

Mikael CEDERBRATT/Tina Acketoft

Özlem CEKIC*

Elena CENTEMERO*

Lorenzo CESA*

Otto CHALOUPKA/Pavel Lebeda

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Tudor-Alexandru CHIUARIU*

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE*

Boriss CILEVIČS*

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON

Deirdre CLUNE*

Agustín CONDE

Telmo CORREIA*

Paolo CORSINI

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO/Ferdinando Aiello

Jonny CROSIO*

Katalin CSÖBÖR/Bernadett Szél

Milena DAMYANOVA*

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER/Fatiha Saïdi

Roel DESEYN

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN*

Karl DONABAUER*

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI*

Daphné DUMERY

Alexander [The Earl of] DUNDEE

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA

Baroness Diana ECCLES/Cheryl Gillan

Tülin ERKAL KARA*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA/Raphaël Comte

Daniela FILIPIOVÁ*

Axel E. FISCHER

Jana FISCHEROVÁ*

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON/Jean-Pierre Michel

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Erich Georg FRITZ

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSON

Ruslan GATTAROV*

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO*

Michael GLOS*

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI*

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA*

Sandro GOZI*

Fred de GRAAF*

Martin GRAF*

Sylvi GRAHAM/Ingjerd Schou

Patrick De GROOTE*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST/Marie-Louise Fort

Dzhema GROZDANOVA*

Attila GRUBER

Gergely GULYÁS*

Pelin GÜNDEŞ BAKIR*

Antonio GUTIÉRREZ*

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI/Marek Borowski

Hamid HAMID

Mike HANCOCK

Margus HANSON

Davit HARUTYUNYAN

Håkon HAUGLI/Anette Trettebergstuen

Norbert HAUPERT

Alfred HEER/Maximilian Reimann

Martin HENRIKSEN*

Andres HERKEL

Adam HOFMAN*

Jim HOOD/Robert Neill

Joachim HÖRSTER

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Andrej HUNKO*

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV/Sahiba Gafarova

Vladimir ILIĆ

Florin IORDACHE

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/André Schneider

Gediminas JAKAVONIS

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE*

Ramón JÁUREGUI

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN*

Jadranka JOKSIMOVIĆ*

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ/Svetislava Bulajić

Antti KAIKKONEN

Ferenc KALMÁR*

Božidar KALMETA/Ivan Račan

Mariusz KAMIŃSKI*

Deniza KARADJOVA*

Marietta KARAMANLI/Pascale Crozon

Ulrika KARLSSON/Kerstin Lundgren

Burhan KAYATÜRK*

Jan KAŹMIERCZAK

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH*

Serhiy KLYUEV*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN

Unnur Bra KONRÁÐSDÓTTIR*

Attila KORODI

Alev KORUN*

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO/Ismeta Dervoz

Dmitry KRYVITSKY*

Václav KUBATA/Miroslav Krejča

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV*

Harald LEIBRECHT*

Orinta LEIPUTĖ

Christophe LÉONARD*

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN*

Inese LĪBIŅA-EGNERE*

Lone LOKLINDT*

François LONCLE*

George LOUKAIDES*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX*

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI

Pirkko MATTILA/Jaana Pelkonen

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV/Tamerlan Aguzarov

Nursuna MEMECAN

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON/Marie-Jo Zimmermann

Djordje MILIĆEVIĆ/Stefana Miladinović

Jerzy MONTAG*

Rubén MORENO PALANQUES/Carmen Quintanilla

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK

Melita MULIĆ

Lydia MUTSCH*

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ

Marian NEACŞU

Fritz NEUGEBAUER*

Baroness Emma NICHOLSON/Charles Kennedy

Michele NICOLETTI*

Elena NIKOLAEVA*

Aleksandar NIKOLOSKI

Mirosława NYKIEL*

Judith OEHRI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY*

Lesia OROBETS

Sandra OSBORNE*

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Johannes PFLUG*

Foteini PIPILI/Liana Kanelli

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV

Mailis REPS/Maret Maripuu

Eva RICHTROVÁ

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE/Rudy Salles

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Marlene RUPPRECHT*

Pavlo RYABIKIN

Rovshan RZAYEV*

Vincenzo SANTANGELO

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Marina SCHUSTER

Urs SCHWALLER

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Boris SHPIGEL*

Arturas SKARDŽIUS/Algis Kašėta

Ladislav SKOPAL*

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV*

Christoph STRÄSSER*

Karin STRENZ*

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ

Chiora TAKTAKISHVILI*

Vyacheslav TIMCHENKO*

Romana TOMC*

Lord John E. TOMLINSON

Mihai TUDOSE/Daniel Florea

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI*

Konstantinos TZAVARAS

Tomáš ÚLEHLA*

Ilyas UMAKHANOV*

Petrit VASILI*

Volodymyr VECHERKO/ Larysa Melnychuk

Mark VERHEIJEN/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Anne-Mari VIROLAINEN

Vladimir VORONIN*

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ

Zoran VUKČEVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ/Damir Šehović

Piotr WACH

Johann WADEPHUL

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Katrin WERNER/Annette Groth

Karin S. WOLDSETH*

Gisela WURM

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV/Robert Shlegel

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Maria GIANNAKAKI

Spyridon TALIADOUROS

Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Ernesto GÁNDARA CAMOU

Laurie HAWN

Michel RIVARD

Miguel ROMO MEDINA

Bev SHIPLEY

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Omar HEJIRA

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM