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AS (2014) CR 15

SESSION ORDINAIRE DE 2014

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(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la quinzième séance

Mercredi 9 avril 2014 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35 sous la présidence de Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE - La séance est ouverte.

Mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de saluer la présence parmi nous de M. Pavlo Petrenko, ministre de la Justice de l’Ukraine.

Monsieur le ministre, soyez le bienvenu dans cette enceinte.

1. Organisation des débats

LA PRÉSIDENTE – Compte tenu du grand nombre d’orateurs inscrits sur les deux débats de cet après-midi, nous devrons interrompre la liste des orateurs à 17 h 20 pour le premier texte et à 19 h 35 pour le second afin de pouvoir entendre les répliques des commissions et de procéder aux votes nécessaires.

2. Développements récents en Ukraine : menaces pour le fonctionnement
des institutions démocratiques
(Débat selon la procédure d’urgence)

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Reps et de Mme de Pourbaix-Lundin au nom de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe, dite « commission de suivi », sur le thème suivant : « Les développements récents en Ukraine : menaces pour le fonctionnement des institutions démocratiques » (Doc. 13482).

Je vous informe que je donnerai la parole au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, M. Jagland, après l’éventuelle réponse des corapporteures aux porte-parole des groupes politiques.

La commission de suivi dispose d’un temps de parole total de 13 minutes, que les corapporteures se partagent à leur convenance entre la présentation du rapport et la réponse aux orateurs.

Mme REPS (Estonie), corapporteure de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe, (commission de suivi)* – Nous voici à nouveau réunis aujourd’hui pour débattre dans cette enceinte de la situation en Ukraine. Nous en discutions déjà il y a quelques mois. Nous étions à l’époque préoccupés par la dégradation de la situation et avions appelé les autorités ukrainiennes à s’abstenir de toute nouvelle mesure. Malheureusement, en tant que rapporteures au nom de notre Assemblée parlementaire, nous avons été témoins de l’aggravation de la situation. Alors que nous étions à Kiev, nous avons assisté à des violations flagrantes des droits de l’homme. Notre Assemblée – sa Présidente et son Secrétaire général, mais l’Assemblée de manière plus générale – a été extrêmement préoccupée par la situation sur place. On a vu des tirs à balles réelles, l’emploi de matériels militaires et de forces armées. Les autorités ont perdu le soutien populaire de leur pays et nous savons tous ce qu’il s’est passé par la suite : le président de l’Ukraine a fui le pays.

L’escalade de la violence n’a pas quitté nos esprits. Nous avons tous suivi, je pense, avec la plus grande préoccupation, les événements qui se succédaient en Ukraine. Nous étions bien sûr inquiets de la situation en matière de droits de l’homme, mais je vous rappelle aussi, dans cet hémicycle, que nous discutons d’un pays qui a des obligations et des engagements envers le Conseil de l’Europe, tout comme nous avons l’obligation d’appuyer les efforts qu’accomplit l’Ukraine.

C’est la raison pour laquelle la résolution dont nous débattons aujourd’hui aborde, dans un premier temps, les problèmes auxquels est confrontée l’Ukraine, mais aussi, dans un second temps, ce que nous pouvons faire pour l’aider à redresser la situation actuelle. Il est important que tous comprennent bien que l’Ukraine doit mener à terme un certain nombre de réformes, dont ma collègue dira un mot. Mais pour que l’Ukraine puisse œuvrer dans le sens des réformes, il est aussi essentiel que tous les Etats membres du Conseil de l’Europe s’abstiennent de toute ingérence et interférence dans ses affaires intérieures et n’annexent pas de parties du territoire ukrainien. Nous condamnons donc tous toute tentative visant à pousser à la ségrégation et à la séparation ou visant à encourager les mouvements séparatistes qui pourraient remettre en question l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

C’est pourquoi il est très important de bien comprendre les événements qui se sont déroulés au mois de février.

Avec l’appui de la communauté internationale, l’Ukraine a mis en place un plan et pris des mesures. Différents experts de diverses organisations vont se rendre sur place et lui apporter leur appui. Il s’agit aussi d’enquêter très précisément sur toutes les violations des droits de l’homme qui ont été commises. Il est aussi de la plus haute importance d’aider la Verkhovna Rada, le Parlement ukrainien, dans ses efforts et de ne pas saper ce qu’elle a déjà entrepris.

Et puis, ce qui est très important, c’est que chacun d’entre nous comprenne bien que toute ingérence militaire ou politique qui empêcherait la tenue des élections prévues pour le 25 mai compromettrait l’avenir de l’Ukraine. Nous devons donc unir nos efforts pour aider ce pays à tenir ces élections de manière parfaitement juste et équitable.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe, (commission de suivi)* – Monsieur le ministre, je commencerai par condamner l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie et les menaces qui pèsent encore sur la partie orientale de l’Ukraine du fait de l’armée russe. L’Assemblée parlementaire reconnaît la légitimité des nouvelles autorités au pouvoir à Kiev. Nous reconnaissons la légalité de leurs décisions. Le Parlement ukrainien, la Verkhovna Rada, n’a jamais été aussi unie qu’aujourd’hui, tout cela sous une pression extérieure, imposée par la Russie. La Verkhovna Rada fait face à la situation d’une excellente manière. Elle a voté sur des questions très difficiles, en se prononçant toujours à la majorité des deux tiers.

Aujourd’hui, une fenêtre s’ouvre pour l’Ukraine. Elle a la possibilité de remplir les obligations et les engagements qu’elle a contractés en adhérant au Conseil de l’Europe. La première des priorités doit être la réforme constitutionnelle. Il s’agit d’assurer l’équilibre des pouvoirs entre le président et le parlement. Il s’agit aussi d’une décentralisation au profit des collectivités locales, dans le cadre d’un Etat unitaire solide ; il ne s’agit pas, ici, de fédéralisme. L’Ukraine doit aussi être dotée d’un pouvoir judiciaire indépendant et d’un code électoral unifié. Notre Assemblée et la Commission de Venise se tiennent prêtes à apporter leur concours à cette évolution démocratique de l’Ukraine.

Nous nous félicitons que la Verkhovna Rada ait assumé ses responsabilités. Nous pensons que la manière dont elle le fait, l’unité dont elle fait preuve seront bénéfiques à l’unité de l’Ukraine.

LA PRÉSIDENTE – Mesdames les corapporteures, il vous restera six minutes trente pour répondre aux orateurs.

J’ouvre la discussion générale.

M. AGRAMUNT (Espagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je salue le travail effectué par les rapporteures, Mailis Reps et ma collègue de groupe, Marietta de Pourbaix-Lundin.

Pour être clair, mon amitié va au gouvernement légitime ukrainien, et non pas au régime néo-impérialiste de Russie. Le gouvernement provisoire actuel est légitime, cela ne fait aucun doute. Il a obtenu le soutien des trois quarts de la Verkhovna Rada et est revenu à l’esprit de la Constitution de 2004.

L’Ukraine, c’est l’Europe, et la Russie c’est également l’Europe. L’agression militaire de la Russie a violé la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine et le droit international. Le référendum qui a eu lieu le mois dernier en Crimée était une mascarade aux yeux des démocrates du monde entier. L’occupation russe de la Crimée est inconstitutionnelle et illégale. Elle ne doit pas être reconnue par la communauté internationale. J’appuie et soutiens l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Il est nécessaire de résoudre le problème, et j’ai quelques propositions à faire pour que nous y parvenions.

Tout d’abord, le peuple ukrainien doit décider de son avenir. C’est ainsi que nous pourrons résoudre le problème. L’Ukraine doit avoir le droit de choisir librement ses associations économiques et politiques. A mon sens, il n’y a pas d’incompatibilité entre des accords douaniers avec l’Union européenne et des liens avec la Russie. Au sein du Conseil de l’Europe, nous devons convaincre tous les Ukrainiens et la Russie qu’une Ukraine démocratique qui entretiendrait des liens avec l’Europe peut également bénéficier à la culture, à l’histoire et au patrimoine linguistique qu’elle partage avec la Russie. La Russie doit cesser ses actions armées et retirer ses troupes de la frontière ukrainienne.

Je félicite le gouvernement provisoire actuel. En si peu de temps, en un mois de mandat, il a pu approuver 80 lois et prendre un nombre important de mesures économiques. Il faut approfondir la réforme constitutionnelle et judiciaire, lutter contre la corruption et adopter un budget réaliste. Les manifestations prétendument pro-russes à Donetsk et Loudentsk sont de fausses manifestations. Fruits de la propagande, elles sont pilotées depuis le Kremlin. Récemment, j’ai été dans différentes villes d’Ukraine, dont Donetsk. Pour avoir personnellement observé ces manifestations, je puis vous dire qu’elles sont totalement artificielles ; les manifestants viennent en fait de Russie. Il faut condamner les mouvements visant à déstabiliser l’Ukraine d’ici au 25 mai, date des élections. Il est urgent que des élections parlementaires se tiennent, de même qu’une élection présidentielle, pour approuver les réformes politiques, constitutionnelles et économiques. Nous ne saurions accepter que l’agression d’un autre pays au nom d’un nationalisme ethnique devienne un principe de droit international. C’est pourtant ce sur quoi se fonde la Russie pour occuper la Crimée ! Si ce principe devient universel, nous reviendrons au siècle précédent, à un nouveau colonialisme, et la moitié de l’Afrique se retrouvait à nouveau entre les mains des Britanniques, des Français, des Espagnols, des Italiens et des Belges. Le Président Poutine se comporte d’une manière typique du xixsiècle, c’est inadmissible au xxie siècle.

L’Union européenne ne doit pas ménager ses efforts. Elle doit trouver avec l’Ukraine un compromis sérieux pour les accords douaniers et éliminer la barrière des visas pour les citoyens ukrainiens.

Mme BECK (Allemagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – J’ai souvent été sur la place Maïdan. Au début, c’était un mouvement étudiant, un mouvement de jeunes qui voulaient venir en Europe, car c’est en Europe qu’ils voyaient leur avenir. Lorsque la police a commencé à taper à bras raccourcis sur ces jeunes, leurs parents se sont mobilisés, estimant qu’il était scandaleux que leurs enfants soient ainsi battus. C’est ainsi qu’a commencé la révolte du peuple contre le despotisme, contre une corruption omniprésente, contre le contrôle politique des autorités judiciaires, contre les combines éhontées des dirigeants politiques.

Sur Maïdan, on parlait toutes les langues : l’ukrainien, mais aussi le russe. Etaient présents aussi des membres des minorités : des citoyens juifs, mais bien d’autres encore. Et il y eut de petites Maïdan dans une cinquantaine de villes d’Ukraine, y compris dans l’est du pays. Qu’on ne nous dise pas que ce pays est divisé en deux ! L’Ukraine est un Etat souverain, désormais doté d’un gouvernement légitime. Ce n’est pas le pré carré de la Russie, ni, d’ailleurs de l’Union européenne. Quiconque s’exprime ou pense en ces termes fait ressurgir l’impérialisme du xixe siècle, mais nous vivons au xxie siècle. Il ne peut pas y avoir deux catégories différentes d’Etats souverains en Europe.

La paix en Europe ne peut se fonder sur le droit du plus fort et donc sur l’utilisation de la force armée. Nous vivons sous le régime de la prééminence du droit, du droit international public en l’occurrence.

La Fédération de Russie a garanti l’intégrité territoriale de l’Ukraine en signant le Protocole de Budapest ; or elle a renié sa promesse en annexant la Crimée, menaçant de fait la paix dans toute l’Europe. Lorsque nous parlons de l’Ukraine, en effet, nous parlons de nous. Le Conseil de l'Europe est là pour assurer la pérennité du droit international et garantir la paix sur notre continent. Je suis par conséquent très inquiète de voir que l’est de l’Ukraine fait l’objet d’une campagne systématique de déstabilisation, ourdie en partie par des agents provocateurs qui viennent de l’autre côté de la frontière pour empêcher les élections du 25 mai. Or, ces élections sont cruciales pour l’avenir du pays. L’Ukraine a besoin de stabilité. Une élection légitime est nécessaire pour que l’Ukraine se dote d’une constitution fondée sur le pluralisme. Le Conseil de l'Europe doit soutenir ce processus politique de toutes ses forces, nous le devons à l’idée même que nous nous faisons de l’Europe comme nous le devons à ses citoyens.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – L’Ukraine est dans une situation tragique, pas seulement en raison de l’annexion de la Crimée par la Russie, même si cela aggrave encore le problème. Cette situation n’est pas due à la révolte qui a renversé le président, mais aux abus de ce même président qui a accepté que des violences soient perpétrées contre ses citoyens ; cette situation ne s’explique pas seulement par l’action des extrémistes et des fascistes qui ont joué un rôle dans cette révolte et qui se retrouvent au gouvernement. Non, ce désarroi est structurel en Ukraine : il existe depuis que le pays a accédé à l’indépendance voici 23 ans. Depuis, le pays est divisé et connaît de multiples lignes de fracture : les oligarques, ont pillé les richesses du pays, les gouvernements se succèdent et ne sont pas en mesure de faire en sorte que l’Ukraine remplisse ses obligations envers ses citoyens. Ceux-ci sont les principales victimes de la corruption endémique qui a sévi au cours des deux dernières décennies, comme nous l’a dit le gouverneur de Donetsk lorsque nous nous sommes rendus sur place. L’Ukraine est un pays en désarroi.

Dès lors, comment pouvons-nous aider ce pays de 44 millions d’habitants à devenir une société plus démocratique dotée d’institutions qui fonctionnent bien, d’un système judiciaire indépendant, avec une réduction des inégalités et plus de solidarité ? Voilà la question qui doit être posée dans ce débat d’urgence.

Le Groupe pour la Gauche unitaire européenne est opposé à toute intervention étrangère, de la Russie comme de l’Union européenne, des Etats-Unis et de l’Otan. Il faut cesser d’avoir cette approche impérialiste à l’égard de l’Ukraine : laissons l’Ukraine aux citoyens ukrainiens. Cela relève du droit humain le plus élémentaire. Aidons-les à organiser au plus tôt des élections libres et équitables : une élection présidentielle, des élections législatives pour qu’ils se dotent d’un président, d’un gouvernement et d’un parlement légitimes.

Notre Assemblée et le Conseil de l'Europe peuvent toujours et doivent faire partie de la solution au problème. Nous ne sommes pas une puissance étrangère. L’Ukraine c’est nous, c’est l’un de nos Etats membres. A ce titre, nous devons veiller à ne pas devenir une partie du problème, mais à être une partie de la solution.

C’est pourquoi il est indispensable d’adopter une démarche plus équilibrée et objective. Aussi, le Groupe pour la Gauche unitaire européenne présentera une série d’amendements en vue de parvenir un texte plus équilibré, à une analyse plus objective de la situation, pour offrir des conseils avisés aux citoyens ukrainiens sur la manière dont ils pourraient aller de l’avant afin que leur pays devienne plus stable, plus démocratique et plus juste socialement.

Tel est l’objectif de notre débat et mon groupe souhaite œuvrer en ce sens.

M. FLEGO (Croatie), porte-parole du Groupe socialiste* – Nous savons tous que l’Ukraine vit une situation difficile et traverse une crise dramatique. Elle a dû subir une violation de son intégrité territoriale, elle a vécu une déception après le non-respect du Mémorandum de Budapest. Ce pays a été laissé seul pendant l’occupation de la Crimée, il a vécu un bouleversement du régime politique, la révolution de Maïdan, le peuple s’est dressé contre un régime oligarchique corrompu et injuste, la richesse énorme de certains se fondait sur la pauvreté extrême d’une grande majorité de la population.

Le changement de régime est un processus long et complexe. L’Ukraine vit dans l’incertitude au regard de ce qui se passe dans la partie est du pays.

L’Assemblée parlementaire a déjà évoqué le dilemme de l’Ukraine il y a quelques mois déjà. Doit-elle se rapprocher de la Fédération de Russie et éliminer l’Union européenne et l’Otan de son horizon politique ou faire le contraire ? L’un ou l’autre choix serait dommageable et inutile. Au cours de nos discussions, nous avons suggéré que les Ukrainiens trouvent un juste milieu entre ces deux solutions tant il est vrai que l’Ukraine peut devenir le pont entre l’Union européenne et la Russie, le relais entre l’Est et l’Ouest. Il ne nous appartient pas de trouver la voie politique à adopter, c’est aux Ukrainiens de le faire. Ils devraient s’attacher à la neutralité politique qui a prouvé, dans un grand nombre de cas, qu’elle était satisfaisante pour les parties en conflit.

La révolution de Maïdan peut être contagieuse et être considérée comme dangereuse pour les régimes autoritaires et leurs alliés. C’est pourquoi nous pensons qu’un pays qui ne respecte pas les règles doit être puni et c’est pourquoi il est nécessaire de lutter contre la propagande politique.

Certains de mes collègues se sont perdus dans le texte de la résolution. Ils ont essayé d’améliorer le document, mais une nuit n’y suffisait pas. Si la résolution proposée, les réformes judiciaire, et constitutionnelle ainsi que la décentralisation sont des mesures certainement positives, elles restent toutefois insuffisantes pour répondre à la crise actuelle. Nous devrions mobiliser tous nos experts, toutes nos forces pour aider l’Ukraine afin qu’elle rétablisse un système démocratique.

M. JAGLAND, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe* – Je remercie les rapporteurs, le Comité des Présidents ainsi que vous-même, Madame la Présidente, pour les mesures qui ont été prises. Redessiner les frontières en Europe en se fondant sur des critères ethniques est dangereux. La question qui se pose à nous est de savoir comment nous pouvons aider l’Ukraine à défendre sa souveraineté ainsi que son intégrité territoriale.

Il est indispensable que tous ceux qui se sont rendus responsables de violations des droits de l’homme soient traduits devant les tribunaux afin de rendre justice à ceux qui ont été blessés ou tués. Cela fait partie du processus de cicatrisation qui doit être entamé. C’est ce que j’ai proposé lorsque je me suis rendu à Kiev. En effet, j’avais souhaité la création d’une commission d’enquête qui mène ses travaux de façon impartiale afin de rétablir la confiance. Mais cette commission n’a pas pu être constituée.

Nous devons aider l’Ukraine à renforcer ses institutions politiques, à adopter des lois et à mettre en place une Constitution qui inspire la confiance. C’est pourquoi nous avons fait trois choses.

Tout d’abord, j’ai obtenu l’accord du président ukrainien par intérim pour mettre en place un représentant spécial à la Verkhovna Rada. Il peut fournir des conseils aux législateurs ainsi qu’au gouvernement. Il a reçu un excellent accueil, il a déjà ouvert un bureau sur place et travaille quotidiennement sur toutes les questions qui se posent.

Ensuite, nous aidons l’Ukraine à se doter d’une Constitution en laquelle tout le monde ait confiance, et à cet égard la Commission de Venise a un rôle important à jouer.

Enfin, les droits de l’homme de toutes les minorités doivent être protégés. Pour cela, la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et le Comité consultatif auprès de cette convention ont un rôle important à jouer. Ils se sont déjà rendus en Ukraine, ont rédigé un rapport et continuent à observer la situation de toutes les minorités en Ukraine. Celles-ci doivent continuer à exister, tout comme leurs langues, faute de quoi ce serait une violation des droits de l’homme.

Il est également important que l’Ukraine puisse s’approprier ce processus, sans qu’il y ait ingérence de la part d’étrangers. Le Conseil de l'Europe n’est pas un étranger, puisque l’Ukraine est membre de notre Organisation. Notre tâche consiste donc à l’aider dans cette entreprise. Et je précise que nous l’assistons à sa demande, nous n’imposons rien à l’Ukraine.

L’évolution de la situation que nous avons observée en Ukraine montre combien il est important de défendre les droits de l’homme et la primauté du droit dans tous les Etats membres du Conseil de l'Europe. Car il s’agit d’une menace pour l’ensemble du continent. Les gouvernements de tous les membres du Conseil de l'Europe doivent bien le comprendre et veiller au strict respect de la Convention européenne des droits de l’homme qui est garante de la sécurité et de la stabilité.

J’en appelle donc à tous les Etats parties à la Convention afin qu’ils défendent les droits de l’homme et la primauté du droit. C’est la meilleure politique de sécurité que l’on puisse avoir sur ce continent.

LA PRÉSIDENTE – Je vous remercie, Monsieur le Secrétaire Général.

M. POPESCU (Ukraine) – J’aimerais avant tout remercier les corapporteures de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe pour l’attention et le soutien dont elles ont fait bénéficier l’Ukraine en ce moment dramatique.

Malheureusement, les événements qui se sont produits ces derniers temps auront des conséquences pour l’ensemble de la communauté mondiale. Le fait que la Fédération de Russie ait renoncé à être garant de l’intégrité territoriale de l’Ukraine en échange de son renoncement à l’arme nucléaire est un signal négatif pour le processus de dénucléarisation mondial.

Il convient de veiller à garantir les droits de l’homme des minorités nationales en Crimée. L’Ukraine ne reconnaîtra jamais cette annexion, nous mettrons en œuvre tous les mécanismes disponibles au Conseil de l'Europe et dans les autres instances internationales. Nous sommes reconnaissants envers ceux qui ont reconnu la souveraineté de l’Ukraine, son indépendance et son intégrité territoriale et qui pensent qu’aucune tentative d’ingérence dans les affaires intérieures de l’Ukraine n’est acceptable.

La situation reste extrêmement tendue, notamment dans la partie est de l’Ukraine. Il est indispensable que la Fédération de Russie retire ses troupes. Nous devons réagir immédiatement. Un groupe a été créé pour analyser la situation en Ukraine, mais à ce moment-là il n’y avait pas encore de victimes. Et pour une raison mystérieuse, ce groupe ne s’est même pas rendu en Ukraine.

Le Bureau avait également décidé que le Comité des Présidents se rendrait en Ukraine. Or il s’y est rendu après les événements. Nous devons donc adopter une décision maintenant, avant qu’il y ait d’autres événements tragiques.

Tout conflit doit être résolu pacifiquement, sans recours à la force, avec le recours à la médiation du Conseil de l'Europe et des pays qui se sont portés garants de l’intégrité territoriale de l’Ukraine en vertu de l’accord de Budapest.

En dépit des difficultés que connaît notre pays aujourd’hui, il est indispensable de poursuivre le processus de renouvellement de la Constitution, de veiller à la démocratisation, de décentraliser davantage, de garantir l’indépendance du système judiciaire, de réformer les forces de police et de veiller aux droits de tous les groupes ethniques.

Tous les organes du Conseil de l'Europe doivent analyser les textes de loi pour vérifier s’ils sont conformes aux normes du Conseil de l'Europe et aux bases juridiques qui, pour certaines, vont au-delà des normes du Conseil de l'Europe. Et nous devons veiller à ce que cela se fasse sans ingérence extérieure.

Nous appuyons le projet de résolution et avons proposé quelques amendements. Merci à tous pour votre solidarité avec notre pays et notre peuple.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni)* – La Fédération de Russie a annexé la Crimée et va y rester. Le Secrétaire Général n’a souligné qu’un certain nombre de réponses que nous avons apportées. Les événements dont nous parlons nous ont fait revenir la doctrine Brejnev. Plusieurs pays, comme les pays Baltes ou la République de Moldova, craignent de se retrouver dans la situation des Sudètes. Et l’intérêt russe à alimenter l’inquiétude parmi les minorités est réel. Elle a peut-être un intérêt légitime en termes de langue, de protection des minorités en Ukraine. Mais la Russie ne peut pas imposer sa propre vision des choses en termes de Constitution ou de neutralité.

L’Ukraine jouit de la souveraineté nationale. Deux réponses sont possibles. L’une est diplomatique, et le Secrétaire Général a mentionné un certain nombre de mesures en ce domaine. Certains se souviennent de l’exemple de la Géorgie qui a connu elle aussi des problèmes avec la Russie. D’autres souhaitent punir la Russie. Après la période d’illusions que nous avons vécue, nous nous rendons compte que des craintes existent.

Certains souhaitent que la Russie soit isolée, qu’elle soit punie. Elle le sera par le secteur privé, puisqu’il y aura une forte perte de confiance envers ce pays ; des marchés alternatifs seront trouvés pour le gaz par exemple et nous avons vu ce qui s’est déjà passé en termes de gel de certains avoirs. La réponse la plus sage se trouve peut-être entre les deux solutions que je viens de vous présenter.

On peut punir la Russie tout en aidant l’Ukraine, mais la Russie ne peut rester impunie. Pour le Comité des Ministres, il ne faut pas fermer la porte à la coopération compte tenu des convergences d’intérêts qui existent. Mais pour l’Assemblée parlementaire, le dialogue n’est pas une fin en soi. Dans un groupe, il y a des règles et des valeurs qui doivent être respectées. Il y va de notre crédibilité. Il faut appliquer les mêmes règles à tout le monde ! Il faut donc envisager au moins la suspension des droits de vote des parlementaires russes qui, au sein de leur parlement, ont unanimement accepté l’annexion de la Crimée.

M. HOOD (Royaume-Uni)* – Tout d’abord, je rends hommage à nos rapporteures ainsi qu’au Secrétaire Général et espère être utile à notre débat.

Je ne voudrais pas que l’on interprète les commentaires que je vais formuler comme pro-ukrainiens ou antirusses. En revanche, je suis résolument pro-APCE ! Tel sera, je l’espère, le sens des décisions que nous allons prendre aujourd’hui.

Je désapprouve l’annexion illégale de la Crimée par la Fédération de Russie, qui constitue une violation du droit international. Il ne s’agit pas ici de relayer la position des Etats-Unis ou de l’Union européenne, et plusieurs initiatives ou remarques émanant de l’OTAN n’étaient sans doute pas utiles. Simplement, ici, au Conseil de l’Europe, nous devons défendre la démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit. Or la Russie a enfreint ces valeurs fondamentales de notre Organisation et nous devons prendre des mesures en réponse.

Certes, des problèmes se posent dans d’autres Etats membres du Conseil de l’Europe, et l’on ne peut pas tous les évoquer aujourd’hui. Les mesures qui doivent être prises ne sauraient donc l’être isolément. On ne peut pas se permettre de choisir lorsqu’il y va de la démocratie et des droits de l’homme : les principes doivent être les mêmes pour tous, tous les Etats membres doivent recevoir le même message.

En conclusion, nous souhaitons que l’Ukraine et la Russie procèdent à une désescalade dans l’affrontement en cours, car si nous sommes réunis aujourd’hui, c’est pour défendre les principes fondamentaux de notre Organisation : démocratie, droits de l’homme, prééminence du droit.

Mme SCHNEIDER-SCHNEITER (Suisse)* – La situation en Ukraine reste tendue et les réformes internes, si nécessaires pourtant, ne progressent que très lentement. La population ukrainienne a démontré, en protestant pendant des mois, qu’elle voulait un changement, une démocratisation durable. Elle la mérite, et tous les Ukrainiens en tireraient profit.

Nous devons donc faire en sorte que soient organisées des élections démocratiques, transparentes, impliquant toutes les couches de la population. Car c’est ainsi que l’on assurera le succès des réformes. L’observation des élections prévue par notre Assemblée contribuera à leur légitimité.

Le débat d’aujourd’hui et celui de demain matin sont très importants. Nous voulons échanger avec toutes les parties concernées. C’est ce que nous devons faire, ici, à l’Assemblée parlementaire. Il faut donc poursuivre le dialogue, y compris avec nos collègues russes. Ne faisons pas obstacle aux tentatives de dialogue politique en vue de trouver une solution à la crise.

Je remercie nos corapporteures et je vous félicite, Madame la Présidente, de votre engagement et de votre visite en Ukraine. Nous suivons la situation depuis le début et, dès novembre 2013, le Conseil de l’Europe a proposé à l’Ukraine de bénéficier de son savoir-faire en matière de démocratisation, d’Etat de droit et de protection des droits de l’homme, en particulier des droits des minorités. Nous félicitons également le Secrétaire Général de son engagement et saluons l’envoi d’un conseiller spécial du Conseil de l’Europe pour accompagner les travaux législatifs et la réforme du ministère de la Justice, ainsi que l’action de la Commission de Venise, qui a délivré des conseils en vue de la réforme constitutionnelle et judiciaire. Nous nous réjouissons enfin de la constitution du panel international chargé d’enquêter sur les violations des droits de l’homme lors des incidents violents survenus à Kiev, qui doit travailler très vite.

La Suisse est préoccupée par l’aggravation du conflit. Nous condamnons les violations constatées par la Commission de Venise. Nous voulons nous montrer impartiaux et privilégier le dialogue avec toutes les parties. Nous nous engageons aussi dans le cadre de l’Organisation pour la coopération et la sécurité en Europe, présidée cette année par la Suisse, et dont nous voulons qu’elle envoie également une mission. Il convient en effet de veiller à une véritable synergie entre les deux organisations, essentielle à une gestion satisfaisante de cette crise.

M. PUSHKOV (Fédération de Russie) – Je voudrais vous rappeler que notre débat d’aujourd’hui a pour objet les menaces pour le fonctionnement des institutions démocratiques en Ukraine. Or ces menaces ne viennent pas de la Russie. Il existe plusieurs dangers, mais j’ai l’impression qu’une grande partie de cette Assemblée ne veut pas les reconnaître parce qu’elle se laisse emporter par des considérations politiques.

Le premier danger est qu’il n’existe pas de gouvernement ni de pouvoir constitutionnel en Ukraine. Pour le montrer, je m’en remettrai non à la propagande russe mais à l’appréciation d’un juriste français, doyen de la faculté de droit de Nice : M. Robert Charvin. « La position des nouvelles autorités installées à Kiev, écrit-il, est de s’afficher comme les défenseurs de la légalité constitutionnelle ukrainienne », qu’elles ont elles-mêmes bafouée puisque la destitution du Président ukrainien, telle qu’elle a été prononcée, est illégale. « Les nouvelles autorités de Kiev, conclut M. Charvin, ne peuvent donc pas se prévaloir d’une légalité dont [elles] ont balayé les fondements constitutionnels […]. [Elles] ne peuvent à la fois violer la Loi fondamentale de leur pays et l’invoquer ensuite pour servir leur cause ».

Si je dis cela, c’est pour vous faire observer que certains éléments pertinents pour la discussion d’aujourd’hui sont, malheureusement, rejetés par les rapporteures.

Ainsi, ces dernières soulignent que personne en Ukraine ne demande la fédéralisation du pays. Je suis vraiment étonné : 10 millions de Russes et de russophones vivant en Ukraine la réclament ! Si vous rejetez ces réclamations, est-ce à dire que vous refusez aux Russes d’Ukraine les droits que vous défendiez pour ceux qui ont participé à Maïdan ? Je trouve cela absolument déplorable. Vous affirmez donc quelque chose qui est faux.

Ensuite, on lit dans le projet de résolution que le gouvernement ukrainien applique l’accord du 21 février : cela aussi est absolument faux. Rien n’est accompli ; il n’y a ni réforme constitutionnelle ni gouvernement de coalition ; les organisations paramilitaires ne sont pas désarmées, etc. Cela a d’ailleurs été partiellement reconnu par l’Union européenne.

J’ai été étonné que les rapporteures aient rejeté l’amendement que j’ai déposé ; la seule raison est qu’il vient de la Russie. Il proposait de mettre en cause les partis racistes et ultranationalistes, la mouvance de droite et le parti Svoboda qui existent en Ukraine. Des leaders de ce parti figurent sur la liste des dix premiers antisémites du monde. Cela aussi a été ignoré par les rapporteures. Entendent-elles être solidaires des partis racistes et ultranationalistes ?

Malgré toute l’émotion que l’on ressent aujourd’hui, j’appelle l’Assemblée à porter un jugement plus objectif sur le sujet examiné.

Mme KHIDASHELI (Géorgie)* – J’invite l’Assemblée à mobiliser ses forces pour permettre aux autorités ukrainiennes de poursuivre la transition vers la démocratie en dépit des difficultés.

Le débat ne porte pas tant sur le fonctionnement des institutions démocratiques, il est indissociable de celui prévu pour demain. Il faut demander à nouveau à la Fédération de Russie de quitter l’Ukraine, de cesser les provocations dans l’est du pays et, de la laisser faire ses propres choix. Nous devons être fermement aux côtés de ceux qui ne veulent pas que leurs frontières soient redessinées. Nous devons faire preuve de solidarité avec le peuple ukrainien, montrer notre volonté aux actuels dirigeants de l’Ukraine déterminés à poursuivre les réformes démocratiques et à tenir des élections libres et équitables.

Je ne peux m’empêcher de penser qu’il y a 25 ans, le 9 avril, les troupes russes entraient dans la capitale de la Géorgie, Tbilissi, pour écraser des manifestations pacifiques, faisant 20 morts et des milliers de blessés. Des dizaines de milliers de personnes étaient empoisonnées par un gaz inconnu. Elles souffrent, comme moi encore, des effets de ce gaz toxique.

On pensait que le monde ne tolèrerait plus la violence, l’ambition impérialiste, qu’il lutterait pour garantir la paix. Des gens ont été tués, blessés, empoisonnés mais on continuait de croire que notre lutte pour la liberté serait couronnée de succès. Vingt-cinq ans plus tard on est toujours au même point. Les troupes russes passent d’un pays indépendant à l’autre. On a l’impression que ça ne s’arrêtera jamais. L’objectif est impérialiste, il s’agit pour la Russie de retrouver la puissance d’autrefois. Le monde ne réagit pas.

Je vous rappelle que l’Union soviétique est morte. La Géorgie, la Moldavie, l’Ukraine sont des Etats indépendants. Même si c’est inacceptable pour certains, ils le demeureront. Ils ont fait leurs propres choix : la paix et non l’agression, la liberté et pas l’occupation, la démocratie et pas la dictature. La Russie n’est qu’un voisin géographique avec lequel nous voudrions avoir de bonnes relations. Nous ne voulons pas vivre dans le même Etat qu’eux. C’est notre choix, notre avenir, notre destin. On ne peut changer les faits. L’histoire a sa logique. Tôt ou tard, vous quitterez la Crimée, la Transnistrie, l’Abkhazie et l’Ossétie du sud. Vous n’êtes plus à Prague, Vilnius ou Berlin.

L’Ukraine doit savoir que nous sommes à ses côtés dans ce moment difficile. Nous allons l’aider à connaître le succès, à l’avenir. Dès demain, nous devons clairement signifier à la Russie qu’il n’y a pas de place ici pour ceux qui sont pour l’agression et l’annexion d’un Etat indépendant.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Je remercie les corapporteurs pour leur rapport franc et objectif. Il brosse un tableau fidèle de la situation en Ukraine et en Russie.

La République de Moldova, la Géorgie, l’Ukraine… Attendons-nous de nouvelles agressions contre ces Etats, de la part de ceux qui sont assis à côté de nous sur ces bancs ? Ils votent ici mais ils ont voté pour l’agression contre l’Ukraine, pour envoyer des soldats qui ont tué les nôtres, nos femmes, nos enfants. Ces personnes sont assises ici, dans cet hémicycle ! Nous devons répondre à ceux qui ont voté dans ce sens. Vous entendez ici les voix de parlementaires qui ont voté pour envoyer l’armée en Ukraine.

Nous devons mettre un terme à cette agression qui n’est pas seulement dirigée contre l’Ukraine mais contre la démocratie. Des troupes étrangères sont entrées en Crimée avec pour seul objectif d’occuper notre territoire souverain. Leur pays nous avait pourtant garanti la souveraineté en échange de notre renoncement à l’arme nucléaire. Souhaitez-vous de nouvelles puissances nucléaires dans ce monde, comme l’Iran ?

Après la mise en place d’un nouveau gouvernement par 372 voix sur 450, nous avons réussi à lancer une véritable réforme du système judiciaire pour lutter contre la corruption. Qui appuyait les corrupteurs en Ukraine ? Où sont Ianoukovtich et son équipe ? Ils cachent à Moscou les milliards de dollars volés à nos retraités, à nos enfants, à nos citoyens. La Fédération de Russie et Poutine les cachent. Ils dissimulent tous les crimes de Ianoukovitch.

Pour nous, ce rapport est la réponse à la question de savoir qui est aujourd’hui l’agresseur en Europe et dans le monde. Nous devons le stopper, sinon la situation du 1er septembre 1939 se reproduira. À l’époque c’était la Pologne, aujourd’hui ils veulent diviser l’Ukraine. C’est pour eux la seule manière de conquérir d’autres pays.

Nous sommes favorables à ce rapport qui dépeint la réalité de la situation. Nous remercions tous ceux qui nous appuient.

M. O. SHEVCHENKO (Ukraine)* – La révolution en Ukraine a renversé un gouvernement et jeté les bases d’un nouvel Etat. Le nouveau gouvernement, qui comprend des représentants de Svoboda a entamé des réformes démocratiques. Il faut encore modifier le cadre juridique et le système législatif. La réforme de l’autonomie locale reste à faire.

La Constitution de l’Ukraine doit être modifiée. Le Parlement ukrainien est sur le point de voter les amendements à la Constitution. Cela devrait être achevé pour l’automne. Les réformes sont importantes en Ukraine. La Russie a agressé notre pays, violé le droit international. Elle n’a pas respecté les relations internationales en occupant la Crimée ni les accords de 1997 sur la Crimée et la Mer noire. La Russie agit sans base juridique. Elle n’a pas à être en Crimée. C’est pourquoi je suggère que les membres de cette Assemblée parlementaire nous soutiennent.

Je demande à l’Assemblée d’exiger le retrait des troupes russes de Crimée. La Fédération de Russie bloque les processus mis en œuvre par le Conseil de sécurité des Nations Unies et par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. J’espère que le Conseil de l’Europe sera l’organe international qui se dressera contre l’agression de la Russie en Ukraine et qui l’empêchera de s’ingérer dans les affaires internes de ce pays. Je propose de boycotter politiquement la Russie. On peut aussi envisager de l’exclure du Conseil de l’Europe ou de priver sa délégation du droit de vote au sein de l’Assemblée.

Par sa politique, la Russie conduit à détruire les mécanismes internationaux existants. Je suggère que le Conseil de l’Europe milite également pour l’abolition des armes nucléaires dans les pays qui en sont dotés.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Je salue le travail des corapporteures. Leur travail était difficile et il arrive à point nommé. Je félicite également le président de la commission de suivi, qui mène avec brio nos travaux.

Pour une génération qui a vécu la fin de la guerre froide, les événements de Crimée revêtent une importance cruciale. Le stalinisme est mort, tout comme le nationalisme sur lequel il s’est appuyé. La désintégration de l’URSS a ouvert la voie à plusieurs guerres et à différents mouvements sécessionnistes.

L’annexion de la Crimée sous le prétexte d’un référendum ouvre la voie à d’autres annexions. La Russie pratique le révisionnisme en s’appuyant sur la loi du plus fort. Elle veut le retour non pas aux frontières de 1991 mais plutôt à celles de 1945. Tous les pays voisins se sentent menacés. On veut nous faire croire que la crise portait uniquement sur la Crimée, qui était russe de toute manière. C’est totalement faux ; l’enjeu est bien plus grave. L’insistance de Moscou à redessiner les frontières sur la base du nationalisme préfigure un retour à la géographie de 1918. La Russie cherche à faire ressurgir les nationalismes, comme si l’appartenance ethnique était plus importante que la citoyenneté.

Si l’annexion de la Crimée est légitimée, que ce soit par la force ou par la négociation, nous risquons d’entrer dans une ère dangereuse de nouvelle guerre froide. Qu’attendons-nous pour réagir ? Nous devons toutes et tous nous souvenir de ce qui s’est passé, avant les événements d’Ukraine, en Abkhazie et en Ossétie du sud. Certains n’ont rien dit alors car ils n’étaient pas Géorgiens. Même si nous ne sommes pas Ukrainiens, aujourd’hui, nous devons nous dresser contre la présence de la Russie en Crimée !

M. BAKRADZE (Géorgie)* – Un territoire annexé par un pays membre du Conseil de l’Europe, des troupes russes qui se rassemblent le long de la frontière de l’Ukraine, des menaces ouvertes d’intervention dans les affaires intérieures : la situation est claire. La Russie désapprouve la politique menée par le gouvernement de l’Ukraine, mais nombreux sont les pays qui sont en désaccord avec leurs voisins ; ce n’est pas pour autant qu’ils envahissent et annexent leurs territoires !

Tout nous pousse aujourd’hui à adopter une résolution forte. Ce qui est en jeu, en Ukraine, ce n’est pas simplement le fonctionnement des institutions démocratiques : c’est l’Etat même, son unité, son intégrité et son avenir européen.

La situation n’est pas encore stabilisée. Tous les jours, de nouvelles menaces apparaissent, avec des émeutes et des manifestations orchestrées par la Russie dans l’est de l’Ukraine. En votant aujourd’hui pour le projet de résolution, nous contribuerons peut-être à mettre un terme à cette situation et à rétablir la paix dans la région.

J’ai écouté les interventions de nos collègues russes et lu certains de leurs amendements. Soyons clairs : ceux qui ont appuyé, à l’unanimité, le recours à la force en Ukraine et l’annexion de la Crimée n’ont aucune crédibilité morale pour déposer des amendements sur un rapport portant sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Ukraine. L’Assemblée doit le dire clairement aujourd’hui. En appuyant l’annexion de la Crimée, nos collègues russes perdent toute crédibilité morale !

Il y a 25 ans, les troupes russes ont organisé un massacre dans ma ville natale, en Géorgie. J’étais alors adolescent. Je veux aujourd’hui, en appuyant l’Ukraine, me souvenir des luttes que j’ai menées dans le passé au nom de la liberté de mon pays. Je veux me souvenir aussi de toutes les victimes des troupes russes dans ma ville natale. Défendre l’Ukraine aujourd’hui, c’est aussi rendre hommage à tous ceux qui ont lutté pour la liberté dans les pays Baltes, en Tchécoslovaquie, en Hongrie et dans bien d’autres Etats européens. Nous devons défendre la liberté au nom de l’avenir !

M. SLUTSKY (Fédération de Russie)* – En lisant ce rapport, on a le sentiment qu’il y est question, non pas de l’Ukraine, mais d’une sorte de pays virtuel, n’existant que dans l’imagination des corapporteures.

Vous dites, au paragraphe 15, que l’extrême droite n’a pas pris le pouvoir à Kiev. Or aujourd’hui, dans une grande partie des régions, le parti communiste d’Ukraine et le Parti des Régions ont été interdits de fait, et un certain nombre de personnes ont été tuées en raison de leurs opinions politiques. Pas plus tard qu’hier, à la Verkhovna Rada, M. Petro Simonenko a été agressé par des membres du parti nationaliste Svoboda.

Vous nous dites qu’il n’y a pas, en Ukraine, de problèmes s’agissant de la langue russe et des langues des autres minorités. Or il a été dit clairement que l’emploi de la langue russe serait considéré comme un appel au séparatisme. Dans une grande partie des régions, notamment à l’ouest, des gens sont persécutés parce qu’ils parlent russe. Il suffit pour le savoir d’écouter les gens que l’on rencontre dans la rue en Ukraine ; mais vous refusez de le faire.

Vous nous dites qu’il n’y a pas de nazisme en Ukraine. Mais Dmitri Iaroch, l’un des leaders du parti Pravyi Sektor, présente tous les signes de l’idéologie nazie dans ses discours et ses écrits.

De quoi devrions-nous parler aujourd’hui ? Du fait que les gens qui sont actuellement au pouvoir en Ukraine se sont livrés à un coup d’Etat et n’ont, dès lors, aucune légitimité. De plus, ils répandent l’idéologie nazie. Tout cela est absolument inacceptable en Europe au xxie siècle.

Je ne suis pas d’accord avec la rhétorique déployée dans ce rapport. Au sein du Groupe socialiste, nous nous sommes accordés sur le fait que nous ne sommes pas ici l’Assemblée parlementaire de l’Otan. Or il semble que ce rapport n’ait pas été rédigé à Strasbourg. Je ne serais pas étonné qu’il ait été à Washington ou au sein de l’Assemblée parlementaire de l’Otan.

Nous sommes la plus grande organisation d’Europe ; nous sommes une grande famille européenne. Le Conseil de l’Europe a pour vocation d’unir l’Est et l’Ouest. Or nous agissons en sens exactement contraire. Je vous appelle donc tous, mes chers collègues, à ne pas voter en faveur de ce rapport qui est l’une des démonstrations les plus ahurissantes dans toute l’histoire du Conseil de l’Europe du fait qu’il y a deux poids, deux mesures. Je vous appelle tous à la coopération, au nom de la vérité et des valeurs les plus élevées de notre Organisation.

M. BOCKEL (France) – N’appartenant ni à l’Est ni à l’Ouest, ou bien un peu aux deux à la fois, l’Ukraine apparaît comme la victime du cynisme des Russes et de l’inconséquence des Occidentaux – en tout cas de leurs dirigeants.

En Ukraine, tout le monde a commis des erreurs. L’Union européenne a fait preuve d’une arrogance évidente qui l’a conduite à l’aveuglement. La Russie, elle, a bien perçu l’ampleur de la crise que vivait ce pays et a profité de sa vulnérabilité pour le ramener dans son giron. En revanche, le Kremlin a sous-estimé la société ukrainienne et ses capacités de réaction et de mobilisation.

Les Russes se sont comportés avec brutalité en Ukraine. Le président Poutine a pris le risque d’une crise internationale de haute intensité pour intégrer la Crimée dans la Fédération de Russie, au terme d’un simulacre de consultation populaire. Pour autant, les Européens ne parviennent pas à comprendre le président russe. Celui-ci a sa propre logique. De fait, la Crimée est importante pour la Russie, sur le plan militaire, avec la base de Sébastopol, mais aussi sur le plan affectif, étant donné que les racines de l’orthodoxie se trouvent à Kiev. La Russie a également su tirer parti des faiblesses des Occidentaux, y compris des Américains, et de l’incohérence de leur politique à l’égard de l’Ukraine.

Maintenant que le coup de force russe a réussi, comment envisager l’avenir ? Les sanctions européennes relèvent pour l’essentiel du symbole, dans la mesure où la Russie est le troisième partenaire commercial de l’Union européenne et l’un de ses premiers fournisseurs en énergie. Les Européens et les Américains estiment par ailleurs – à juste titre je pense – avoir besoin du Kremlin pour la résolution de conflits internationaux sensibles en Iran, en Afghanistan et en Syrie.

Mes chers collègues, que faire aujourd’hui ? L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est une chance pour le dialogue et pour la démocratie parlementaire. Notre rôle est de nous dire les choses, y compris celles qui sont difficiles à entendre – on le voit bien aujourd’hui, si l’on en juge d’après les arguties qui viennent, encore à l’instant, d’être développées.

Notre Assemblée doit également prendre en compte les enjeux géopolitiques, car c’est bien là notre rôle. En disant cela, je ne cherche pas à critiquer le rapport ; j’essaie d’imaginer la suite, les débats que nous aurons à l’avenir. Nous ne devons pas nous donner bonne conscience à peu de frais. Au contraire, la meilleure des sanctions que l’on puisse prendre à l’égard de comportements comme ceux que nous avons observés, c’est de nous obliger mutuellement à rester ensemble, dans notre hémicycle, à nous dire les choses, parfois avec force, voire de manière désagréable. C’est cela aussi l’Europe ; c’est cela l’honneur de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

M. HARUTYUNYAN (Arménie)* – Je ne me livrerai pas, pour ma part, à une évaluation de la situation. Il est clair que les analyses diffèrent s’agissant des causes de cette crise. Je voudrais plutôt vous inviter à réfléchir au rôle de notre assemblée, celui qu’elle a joué comme celui qu’elle devrait jouer à l’avenir en Ukraine.

Depuis que ce pays a adhéré au Conseil de l’Europe, différents mécanismes de suivi ont été mis en place ; de nombreuses visites ont été effectuées et des dizaines de rapports rédigés pour voir si ce pays respectait toutes ses obligations. Les résultats de ces visites et de ces rapports ont été longuement discutés, des conclusions et des recommandations ont été publiées. Or, après toutes ces années de suivi et de rapports, on observe, dans ce pays, une situation sans précédent. Ma question est donc la suivante : nous reconnaissons-nous une part de responsabilité dans cette crise ? Sommes-nous prêts à accepter de reconnaître que, à cause de notre hésitation et des appartenances politiques des uns et des autres, nous n’avons pas été en mesure d’éviter cette crise, ce qui aurait été possible si nous avions aidé à consolider les pratiques démocratiques et si nous avions œuvré pour la prééminence du droit et la protection des droits de l’homme en Ukraine ? Certes, nous tendons la main à nos amis ukrainiens pour les aider à sortir de cette crise, mais nous devrions également tenir compte de ce qui se passe dans l’espace du Conseil de l’Europe et renoncer à privilégier les intérêts économiques, les appartenances politiques et les intérêts géopolitiques par rapport à nos valeurs.

Si nous ne reconnaissons pas nos responsabilités, si nous n’exprimons pas fortement notre désaccord face à cette violation inacceptable de nos principes fondamentaux, nous serons, à l’avenir, confrontés à une crise bien plus importante encore.

Voilà aussi pourquoi je souhaite faire l’observation suivante : dans moins d’un mois, le Conseil de l’Europe sera présidé par un pays qui, parmi les Etats membres, est le champion pour ce qui est du nombre de journalistes et de défenseurs des droits de l’homme emprisonnés et de prisonniers politiques, un pays où la liberté de réunion, la liberté d’association et la liberté des médias n’ont pas été respectées par le gouvernement. Or, à quelques exceptions près, je constate que mes collègues parlementaires ne sont pas plus gênés que cela par cette perspective.

Notre Organisation sera représentée par un pays qui, il y a quelques jours de cela, a mis en prison pour sept ans le directeur de l’Ecole d’études politiques du Conseil de l’Europe, à Bakou. Notre assemblée reste sans rien faire. Le président de ce pays va s’adresser à cette assemblée en juin et cela ne nous dérange pas. Quel message envoyons-nous donc ? Avant de regarder ce qui se passe chez les autres, il est toujours bon de commencer par regarder chez soi. Je vous le demande donc : avons-nous fait suffisamment pour éviter l’érosion de nos valeurs ?

M. BERDZENISHVILI (Géorgie)* – Cela vous paraît peut-être étrange : je suis déjà le quatrième Géorgien à prendre la parole aujourd’hui – petit pays, mais beaucoup d’intervenants.

J’ai choisi de m’exprimer en russe parce que je pense que nous avons un certain nombre de choses à dire à nos amis de la Fédération de Russie.

J’appartiens à une génération qui a connu l’Union soviétique. À cette époque, nous rêvions d’indépendance et de liberté. En 1999, lorsque mon pays est devenu membre du Conseil de l’Europe, j’ai été extrêmement heureux.

Nous aspirions désespérément à cela, non pas pour entendre des déclarations comme celle qui vient d’être faite, non pas pour entendre dire que tous ceux qui ne sont pas d’accord avec la Russie sont des agresseurs, des fascistes, des nazis ou des nationalistes. Il est facile de s’exprimer ainsi. J’éprouve un sentiment de honte en entendant tenir de tels propos au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, mais je m’en remettrai sans doute.

En tout cas, je tiens à remercier les deux corapporteures qui ont réalisé un travail considérable. Il n’était pas facile de rédiger un tel rapport sur l’Ukraine, car il s’agit non seulement de l’indépendance de ce pays, mais aussi de la stratégie de l’Europe vis-à-vis d’un très grand pays, la Russie.

On se demande souvent comment aider l’Ukraine. Nous pouvons essayer de faire en sorte que la Russie renonce à l’annexion de la Crimée, que les troupes se retirent, que l’on ne puisse modifier la structure constitutionnelle du pays et qu’on lui laisse faire son choix. Même si ce choix est erroné, ce doit être le sien.

Cela me rappelle ces propos du président Poutine : « Ceux qui ne regrettent pas la disparition de l’URSS n’ont pas de cœur, mais ceux qui voudraient la refaire n’ont pas de tête ». On pourrait filer cette métaphore douteuse en disant que ceux qui veulent rétablir l’empire soviétique en annexant et en occupant d’autres Etats, petits ou grands, n’ont ni cœur, ni tête, ni même d’yeux pour voir que nous sommes maintenant au xxie siècle et plus au xviiie siècle. Il est temps de s’en rendre compte !

M. PYLYPENKO (Ukraine)* – L’Ukraine a accédé à l’indépendance en 1991 sans qu’une goutte de sang ne soit versée, sans mort et sans affrontement militaire. Mon pays saura défendre son indépendance contre toute occupation étrangère.

Après l’annexion de la Crimée, des groupes séparatistes se révoltent aujourd’hui dans l’est du pays pour déstabiliser celui-ci. Les médias russes font état de chaos et d’anarchie, et perturbent le fonctionnement des institutions démocratiques en Ukraine. Le même scénario avait déjà été employé en Crimée, il y a quelques semaines. On voit se reproduire le même phénomène dans l’est du pays : on incite la population locale à organiser des référendums pour rejoindre la Fédération de Russie. Le résultat est déjà planifié à Moscou.

Tout cela représente un danger pour l’intégrité territoriale de l’Ukraine et son avenir.

La Fédération de Russie, qui occupe notre territoire souverain, ignore totalement les institutions démocratiques, les valeurs, les libertés et les acquis de la communauté internationale. À l’occasion du pseudo-référendum organisé en Crimée, quatre articles au moins de la Constitution ukrainienne ont été violés. La Constitution prévoit que le pays est indivisible et n’autorise pas la tenue de référendums locaux sur la sécession de l’Ukraine. Les constitutions d’autres Etats membres du Conseil de l’Europe contiennent d’ailleurs des dispositions analogues. La liste des personæ non gratæ en Crimée compte plus de trois cents noms, dont le mien. Nous ne pouvons plus poser un pied en Crimée. Je suis citoyen ukrainien et je n’ai pas le droit d’entrer dans un territoire qui appartient à mon propre pays !

Je voudrais remercier les corapporteures ainsi que tous les Etats membres du Conseil de l’Europe pour l’appui qu’ils ont apporté à mon pays. Pour ma nation, cela prend un sens très fort. Nous sommes pour la paix et l’Ukraine veut être un pays européen. Pour nous, le droit est plus fort que les armes. J’espère que l’Assemblée parlementaire continuera à soutenir l’Ukraine, qui souhaite préserver son territoire, sa culture et sa nation face aux menaces extérieures.

Nous tenons à ce que l’Europe sache que les Ukrainiens sont contre le séparatisme, contre le conflit armé, pour le développement européen de l’Ukraine et les principes du droit international.

Nous sommes reconnaissants à l’Assemblée de son soutien.

M. ROUQUET (France) – En préambule, je voudrais rappeler mon attachement à l’intangibilité des frontières, au règlement pacifique des conflits et à l’intégrité territoriale des Etats membres. À ce propos, je note que selon qu’il s’agit de la Crimée ou du Kosovo, la Russie n’a pas tout à fait la même vision du droit international, sauf à imaginer qu’elle a évolué et va demain reconnaître le Kosovo.

De même, je tiens à condamner avec la plus extrême fermeté et comme totalement inacceptables les manœuvres violentes de différents agitateurs dans l’est de l’Ukraine.

Même s’il y eut bien des maladresses du côté occidental, cela ne peut en aucune manière justifier l’invasion de la Crimée. J’appelle de mes vœux une solution pacifique fondée sur le dialogue et le respect mutuel. J’invite, en particulier, la Russie à engager un dialogue direct, sincère et honnête avec le gouvernement ukrainien. Je souhaite que l’APCE puisse faciliter ce dialogue.

Les menaces pesant sur l’avenir de ce pays ne doivent cependant pas nous dispenser d’un examen objectif et approfondi de la situation en Ukraine. Celle-ci est assez préoccupante, et pas seulement sur le plan économique. Force est de constater une légitime méfiance de la population à l’égard de dirigeants qui se sont prêtés à bien des compromissions et qui ont souvent changé d’orientation, plus par souci de préservation de leurs intérêts que par adhésion sans réserves aux valeurs de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme.

Ne faisons pas sur ce point preuve d’un angélisme excessif. C’est une logique universelle. Lorsqu’en France Napoléon 1er fut au bord de la défaite, le Sénat impérial, couvert d’or et d’honneurs, le déposa sans faiblesse. Je vous avouerai qu’en l’état, les candidatures à l’élection présidentielle ne me paraissent pas aller dans le sens du renouvellement tant espéré et m’inquiètent tant elles s’inscrivent dans la continuité d’un passé récent peu enviable.

Je crois pourtant qu’il s’agit d’un point essentiel si l’on veut que se mettent véritablement en place les réformes que nous appelons tous de nos vœux, notamment du système judiciaire, avec l’aide du Conseil de l’Europe et de son Assemblée. Nous disposons d’outils précieux, comme la Commission de Venise ou le Comité pour la prévention de la torture.

Je souhaite que tant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe que le Conseil de l’Europe collaborent activement aux réformes indispensables en Ukraine, mais leur mise en œuvre va bien au-delà de l’adoption formelle de telle ou telle loi.

La démocratie et l’Etat de droit ne se décrètent pas et ne peuvent s’instaurer du jour au lendemain. C’est autant affaire de mentalité que de texte. Il faut en être conscient et laisser du temps au temps.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Je dois constater avec regret qu’une fois de plus, nous examinons un texte déséquilibré, pour ne pas dire provocateur, sur la situation en Ukraine.

Je l’ai dit à la commission de suivi. J’ai dit que le rapport de janvier élaboré par les mêmes corapporteures et adopté par l’Assemblée n’a en rien permis le règlement du conflit en Ukraine et n’a fait que jeter de l’huile sur le feu dans la guerre civile qui a conduit à un coup d’Etat.

On ne peut pas juger les événements récents sans noter les manifestations de néofascisme dans ce pays. Notre dernier rapport et la dernière résolution poussaient, pour ainsi dire, au changement à la tête de l’Etat. Le rapport qui nous est aujourd’hui soumis est empli de formulations catégoriques et n’ouvre pas la porte au compromis, à la paix civile ni à des modèles qui permettraient de tenir compte de toutes les régions de tous les citoyens de l’Ukraine, quelles que soient leur langue ou leur origine ethnique.

Si le précédent rapport en appelait au changement de pouvoir, celui-ci ouvre la voie à des solutions de force et à des scissions dans la société ukrainienne. Comment peut-on ainsi déformer la vérité ? Comment peut-on dire que les citoyens russophones d’Ukraine n’ont pas vu leurs droits violés et que tout cela n’est pas justifié ?

Madame Reps, 24 ans après la fin de l’URSS, on essaie toujours de nous convaincre qu’il n’y a pas de violations des droits de la population russophone en Estonie. Ce n’est pas vrai, vous le savez très bien ! C’est aujourd’hui une population de deuxième zone. Si vous maintenez qu’il n’y a pas de menaces contre les populations russophones d’Ukraine, pourquoi des dizaines de milliers de personnes manifestent-elles pour défendre leurs droits, des droits que nous devrions, à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, défendre ? Comment peut-on affirmer qu’il n’y a pas, au pouvoir, aujourd’hui, à Kiev, des tendances d’extrême droite, alors que le gouvernement compte des membres du parti néo-fasciste Svoboda ? Que diriez-vous, Mesdames les corapporteures, si, chez vous, en Suède, en Estonie, il y avait dans la rue des groupes armés, si des gens avaient constamment peur pour leur avenir et celui de leurs enfants ? Pourquoi ne condamnons-nous pas les groupes extrémistes néo-fascistes ? Pourquoi ne réclamons-nous pas leur désarmement ? Pourquoi fermons-nous les yeux sur le fait que le drapeau des partisans de Bandera, des nationalistes ukrainiens, flotte aujourd’hui au vent au côté du drapeau ukrainien ?

On ne peut pas refuser catégoriquement la fédéralisation. On ne peut pas prétendre qu’elle affaiblirait le pays. Qui a imaginé cela ? L’Allemagne est une fédération, la Fédération de Russie est une fédération, voilà ce qu’est le modèle fédéral ! Et la Suisse est une confédération. Personne ne prétend que ce sont des Etats faibles, bien au contraire !

Il serait bon d’appeler les autorités de l’Ukraine à éviter toute solution unilatérale susceptible d’accroître les tensions. Il serait bon de les appeler à s’abstenir de tout recours à la force contre des manifestants pacifiques dans le sud-est du pays. Il serait bon de les appeler à assurer des élections transparentes, équitables, démocratiques, pour donner la possibilité à tous les partis politiques de s’exprimer.

Je voterai contre ce projet de résolution et j’appelle l’Assemblée parlementaire à réfléchir à la possibilité de nommer, à l’avenir, de nouveaux rapporteurs sur la question de l’Ukraine.

M. CHISU (Canada, observateur)* – Je remercie Mme la Présidente de me donner la parole dans ce très important débat sur les événements d’Ukraine, que les Canadiens suivent de très près et qui les préoccupent vivement. Je remercie aussi les corapporteures.

Le Canada condamne l’intervention militaire de la Russie en Crimée dans les termes les plus fermes. Nous considérons que le comportement des Russes viole clairement la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. En outre, le Canada ne reconnaît pas le résultat du référendum sur le statut de la Crimée qui a eu lieu le 16 mars dernier. Il appuie pleinement la Résolution du 27 mars 2014 de l’Assemblée générale de l’ONU qui invite les Etats à ne pas reconnaître le changement de statut de la région de Crimée. Non seulement ce référendum n’a pas été autorisé par l’Ukraine mais, de plus, il s’est déroulé de manière antidémocratique, comme l’a indiqué récemment la Commission de Venise du Conseil de l’Europe.

Dans ce contexte, saluons la retenue dont le gouvernement ukrainien fait preuve face aux provocations. Il essaie de créer une société libre, démocratique et prospère. Dès lors, la protection des minorités et de leurs droits reste primordiale. Nous travaillons, nous, Canadiens, en étroite liaison avec les autorités ukrainiennes, pour les aider à relever les défis qui leur sont lancés. Par exemple, le procureur général du Canada a fait geler les actifs de 18 membres de l’équipe Ianoukovitch et d’un certain nombre de ses alliés, afin de lutter contre la corruption, soutenir les réformes démocratiques, la transparence et la responsabilité.

En outre, nous avons pris des sanctions contre certains Criméens et Russes responsables de la crise en Crimée. Nous demandons également la justice pour tous – hommes, femmes, membres des groupes marginalisés – et la possibilité d’une campagne électorale transparente et équitable. Le Canada va aider l’Ukraine en accordant des garanties d’emprunt afin d’aider à la restauration de la stabilité du pays.

Cela n’est d’ailleurs pas sans conséquences : en réponse aux sanctions canadiennes, la Russie a interdit l’entrée de 13 Canadiens dans le pays, des membres du gouvernement et des parlementaires, trois conservateurs, deux libéraux, un membre du NPD, le Nouveau parti démocratique, et le chef de la diaspora ukraino-canadienne. La Chambre des communes du Canada est restée unie face à ces pressions russes et aux sanctions édictées à l’encontre de Canadiens. Nous restons aux côtés des Ukrainiens dans un contexte où les institutions démocratiques sont menacées. Nous voulons que toutes les parties poursuivent un dialogue à tous les niveaux, y compris ici, à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

M. FOURNIER (France) –  Depuis le dernier débat de notre Assemblée sur l’Ukraine, le 30 janvier dernier, la situation a considérablement évolué dans ce pays : enchaînement de violences à Kiev, fuite et destitution du président Ianoukovitch, nomination d’un gouvernement intérimaire, sécession anticonstitutionnelle de la Crimée, annexion brutale de celle-ci par la Russie au mépris, d’ailleurs, de la légalité internationale et de tous ses engagements, crise diplomatique avec sanctions de part et d’autre, bruits de bottes à la frontière orientale de l’Ukraine, etc. En moins d’un mois, nous avons assisté non seulement à la plus grave crise internationale depuis l’effondrement du mur de Berlin et la fin de la guerre froide, mais aussi à la remise en cause des principes du droit international les plus établis, à commencer par l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale. La condamnation de la prise de contrôle de la Crimée puis de son annexion a été unanime. La Chine s’est même abstenue à l’Assemblée générale de l’ONU.

Le déroulement de la crise ukrainienne a rappelé à la fois les méthodes employées en 1938 pour « protéger » les Allemands des Sudètes prétendument en danger et l’intervention soviétique de 1968 en Tchécoslovaquie pour mater le Printemps de Prague. Et, aujourd’hui comme hier, les Occidentaux ont laissé faire, se contentant de fermes déclarations, de condamnations solennelles. Les sanctions européennes et américaines ont rencontré le succès que l’on sait ! Moscou aurait tort de se priver : le coup de force russe en Géorgie en 2008 n’est-il pas resté impuni ?

Où le Kremlin va-t-il s’arrêter ? Déjà, des menaces pèsent sur la Transnistrie, territoire moldove où stationnent des troupes russes depuis 1992. Tout dépendra de la fermeté de l’attitude occidentale. Moscou joue habilement sur les divisions entre Européens, sur le manque de coordination entre Bruxelles et Washington, sur le tropisme pro-russe de certains pays, fascinés par la puissance militaire et les ressources énergétiques russes, et aussi, sans doute, par la poigne d’un dirigeant audacieux et déterminé qui ne s’embarrasse ni de scrupules ni du respect de la légalité internationale.

D’aucuns prétendent, y compris en Europe, que plusieurs arguments plaideraient en faveur de l’attitude russe.

D’abord, la Russie n’aurait fait que protéger les populations russes ou russophones de Crimée. Hélas, on ne sait toujours pas si agression il y a eue ni, le cas échéant, qui en étaient les auteurs. Le président Poutine s’est fait le chantre du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il est dommage que les Tchétchènes, pour ne citer qu’eux, n’aient pas bénéficié d’autant de sollicitude.

M. GAUDI NAGY (Hongrie)* – Ce rapport est tout à fait subjectif et partial, un diktat pour la Russie, qui viole les principes du Conseil de l’Europe. Nous ne pouvons donc pas l’accepter. Sachez ce qui se passe en Ukraine : des mouvements secrets ont essayé de prendre le contrôle du pays, de s’en emparer et de préparer une attaque contre la Russie. Voilà ce qui s’est passé ! Le « deux poids, deux mesures » est la chose la mieux partagée. Vous n’avez jamais voulu, ici, condamner, par exemple, les Etats-Unis, responsables de l’exil forcé de M. Snowden à Moscou.

Vous voudriez soulever les Ukrainiens pour qu’ils combattent les Russes à vos côtés. Des forces antidémocratiques étaient déployées, tout le monde le sait. En fait, vous ne parlez pas des gens qui vivent en Ukraine, vous parlez de manière théorique de l’intégrité territoriale. C’est de la spéculation intellectuelle. Vous ne voyez pas les faits. Or les faits montrent que des millions de personnes sont opprimées en Ukraine et quittent le pays. L’Ukraine n’a jamais vraiment contribué à la paix. La Transcarpatie n’a-t-elle pas été arrachée à la Hongrie à l’instar d’autres régions du bassin des Carpates ?

Merci, chers collègues, de votre attitude démocratique ! En voulant m’empêcher de m’exprimer par vos bruyantes réactions, vous offrez une belle leçon de démocratie !

Il y a en Transcarpatie des millions de personnes qui voudraient revenir en Hongrie. Je pourrais citer bien d’autres cas, ne serait-ce que celui des Tatars de Crimée. De toute façon, les sanctions que vous voulez imposer à la Fédération de Russie n’ont aucune raison d’être : il s’agissait d’un référendum d’autodétermination. Nulle raison d’y revenir. La Transcarpatie devrait être rendue à la Hongrie ; ce serait normal au sens du droit international. Que le Conseil de sécurité de l’ONU et autres institutions commencent par faire leur travail et soutiennent la population ukrainienne confrontée à des événements fomentés de l’étranger et qui visent à diviser les citoyens en Europe !

M. LE BORGN’ (France) – Qu’il est triste d’entendre des discours nationalistes dans cette salle !

Le Conseil de l’Europe est la maison européenne du droit. C’est son histoire, sa vocation, sa valeur ajoutée. Les 47 Etats membres sont liés par un idéal – la démocratie – et par des engagements précis, dont le respect le plus absolu de l’intégrité territoriale et de l’inviolabilité des frontières, deux principes qui ont été délibérément violés par la Fédération de Russie, ces dernières semaines. L’intervention militaire russe en Crimée et l’annexion de cette partie du territoire ukrainien constituent une violation flagrante du droit international et des engagements de la Fédération de Russie au titre de son appartenance au Conseil de l’Europe.

LA PRÉSIDENTE – Je prie les membres de l’Assemblée d’écouter les orateurs et de ne pas les interrompre.

M. LE BORGN’ (France) – Le respect du droit n’est pas une suggestion. Le Conseil de l’Europe n’est pas une organisation où, comme sur un marché, en fonction de ses intérêts nationaux, dans le plus grand cynisme, l’on retiendrait certains principes et on en écarterait d’autres. Il est intolérable qu’un Etat membre du Conseil de l’Europe en agresse un autre, le dépouille d’autorité d’une partie de son territoire, l’asphyxie économiquement et entende pour l’avenir le placer sous liberté surveillée. La souveraineté limitée est un concept qui appartient à une époque révolue et il n’est aucunement imaginable dans une communauté d’Etats libres et démocratiques.

Rien n’explique ni n’excuse la violation du droit international. Les liens historiques, culturels, économiques et commerciaux de la Russie avec l’Ukraine sont connus. Dans les difficultés traversées par l’Ukraine, la voix de la Russie compte et doit être entendue. Reste que l’Ukraine est un Etat souverain. S’il souhaite faire le choix de l’Europe, c’est là sa liberté la plus absolue. Or tout se passe comme si la Fédération de Russie entendait briser coûte que coûte l’émancipation ukrainienne, annexant la Crimée, puis alimentant les troubles dans l’est du pays.

L’élection présidentielle ukrainienne aura lieu le 25 mai. Pour la stabilité et l’avenir de l’Ukraine, son organisation doit être un succès irréprochable. Le Conseil de l’Europe doit en prendre sa pleine part. Des observateurs de notre Assemblée seront présents en nombre le jour de l’élection. Les ressources de la Commission de Venise doivent être mobilisées au profit de la réforme institutionnelle que l’Ukraine décidera souverainement de conduire. La démocratie n’est pas qu’affaire d’élections, elle est aussi affaire de principes et de valeurs, d’indépendance de la justice, de lutte contre la corruption et de dialogue permanent avec la société civile.

C’est le rôle du Conseil de l’Europe que d’être présent face à de tels défis. Il le sera, s’il sait être ferme contre le coup de force, s’il se garde des joueurs de flûte, s’il refuse l’illusion de la posture et fait entendre avec fierté la voix de la liberté, qui est depuis longtemps la sienne.

LA PRÉSIDENTE – M. Mariani, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme GODSKESEN (Norvège)* – En 2008, au cours de la campagne présidentielle aux Etats-Unis, Sarah Palin avait prédit que le manque de réaction de Barack Obama face à l’invasion de la Géorgie ne pourrait qu’encourager la Russie à entrer en Ukraine. On lui avait ri au nez. Quatre ans plus tard, Mitt Romney a lancé des mises en garde, le Président Obama lui a également ri au nez. Nous savons maintenant que ni le Président Obama ni personne d’autre ne rit !

En Crimée, près de 58 % de la population sont russes, mais les Russes ne représentent que 17 % de la population totale de l’Ukraine. Nous avons le sentiment que le pays est divisé en deux : d’un côté les Ukrainiens, de l’autre les Russes. Ce n’est pas le cas.

Après l’invasion de la Crimée, il est facile de condamner la Russie, car elle a violé le droit international. Elle a montré qu’elle ne respectait pas la souveraineté ni l’intégrité territoriale de l’Ukraine. La tension est à son comble, et c’est malheureux dans la mesure où il s’agit de deux pays membres du Conseil de l'Europe.

Dorénavant, nous pouvons nous demander quel autre pays la Russie envahira. L’attitude de la Russie inquiète les pays de la Fédération. Après la guerre froide, beaucoup étaient habités de grands espoirs. Aujourd’hui, ils sont déçus.

La Norvège a entretenu des relations fructueuses avec la Fédération de Russie. Nos deux pays n’ont jamais été en guerre. Nous avons besoin que la Russie soit un partenaire constructif. L’Otan, l’Union européenne, le Conseil de l'Europe et la Norvège sont d’accord : nous condamnons fermement l’action de la Russie et nous recommandons de ne pas contribuer à l’escalade. Nous resterons unis avec nos alliés, nous essayerons de coordonner notre réponse avec eux. Nous le devons aux Ukrainiens. L’Ukraine a le droit de choisir la voie de son avenir, à l’instar de tout autre pays.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Les forces qui ont organisé le massacre des manifestants pacifiques à Tbilissi, il y a vingt-cinq ans, ont réitéré à Bakou, à Vilnius, à Riga et récemment à Kiev. Aujourd’hui, ces mêmes forces essayent de découper l’Etat souverain de l’Ukraine et de priver ses habitants de leur avenir. Je vous rappelle que 70 % d’entre eux sont favorables à l’intégration européenne.

Lorsque nous mettons en parallèle l’invasion russe de la Géorgie en 2008 et les événements des années 30, des sourcils se lèvent. Mais je crois que, aujourd’hui, ces comparaisons s’imposent d’elles-mêmes. Le pseudo-référendum organisé en Crimée rappelle le prétendu référendum organisé en Autriche qui a conduit à l’Anschluss. Les arguments employés par M. Poutine en Crimée ressemblent fortement à ceux employés par Hitler à l’époque de l’annexion du Pays des Sudètes. Rappelez-vous qu’il ne s’est pas arrêté là.

La plupart des personnes ici présentes seraient d’accord pour considérer que Vladimir Poutine a envahi l’Ukraine parce qu’il n’avait pas payé un prix trop élevé pour l’envahissement et l’occupation de la Géorgie, ni pour le nettoyage ethnique perpétré par ses troupes sur place, fait qui a été reconnu par notre Assemblée.

Je me rappelle qu’en 2009, lorsque 75 membres de l’Assemblée ont signé une proposition d’annulation des pouvoirs de la Fédération de Russie, l’un de nos collègues, M. Gross, a insisté sur l’importance de maintenir ouverts les canaux de communication avec la Russie et estimé que l’on ne pouvait pas tenir les parlementaires pour responsables des actes de l’exécutif. Nous en voyons aujourd’hui le résultat.

Je remercie les rapporteures pour ce rapport très clair qui condamne l’agression militaire. Cette agression risquant d’aller plus loin, nous devons soutenir la légitimité des autorités ukrainiennes actuelles.

L’inaction a un coût beaucoup plus élevé que celui de l’action. Nous déciderons demain si nous entendons priver nos collègues russes uniquement de leur droit de vote ou de tous leurs pouvoirs. Les médias russes proclament déjà la victoire de la délégation russe en affirmant que seul le droit de vote sera suspendu et que les Russes pourront continuer à nous délivrer ici leurs exposés.

Il ne faut pas encourager l’agresseur. En 1968, lorsque l’armée russe a envahi la Tchécoslovaquie, huit personnes seulement ont eu le courage de manifester sur la place Rouge avec le fameux slogan : « Pour notre liberté et la vôtre ».

Sans Ukraine libre, il ne saurait y avoir de Russie libre. Si nous voulons voir un jour la Russie libre, il faut soutenir la liberté de l’Ukraine.

Mme FINCKH-KRÄMER (Allemagne)* – Souvenons-nous de tous les manifestants pacifiques de la place Maïdan qui ont protesté contre la corruption de leurs dirigeants et qui les ont renversés. Souhaitaient-ils vraiment le gouvernement qu’ils ont obtenu ? Ce gouvernement dont un certain nombre de ministres entretiennent de bonnes relations avec l’extrême droite allemande ne représente ni l’est ni même le sud du pays.

Quand une partie a tort, cela ne veut pas dire que l’autre a raison. Même si l’annexion est illégitime, les manifestants de la place Maïdan ont manifesté non contre la Russie, mais pour une justice indépendante et un pays sans corruption, gouverné dans la transparence.

Ce débat me rappelle ce que l’on pouvait entendre il y a 35 ans, pendant la guerre froide. A l’époque, on se lançait mutuellement des reproches. Or c’est par la négociation, le dialogue, des échanges culturels et la facilitation des voyages que les citoyens des deux côtés du rideau de fer ont eu une vie plus facile. C’est ainsi que peu à peu, dans l’espace qui était celui du Pacte de Varsovie, la détente est apparue et la Guerre froide a pris fin.

L’Ukraine, nous l’avons accompagnée vers la démocratie et nous voulons continuer à le faire. C’est un pays qui a besoin de notre aide. Car un pays démocratique ne doit pas être déstabilisé de l’étranger. Voilà pourquoi nous devons faire en sorte de continuer à aider les populations ukrainiennes sur la voie de la démocratie.

Je voudrais réfuter toute comparaison entre Poutine et Hitler. Je suis également assez âgée pour avoir entendu parler de Himmler, devenu pacifiste après les guerres hitlériennes. Mais ce n’est pas ce souvenir-là que je veux évoquer, mais celui des 30 000 personnes qui le mois dernier, ont manifesté à Moscou pour la paix.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Je tiens à vous remercier, Madame la présidente, pour votre prise de position au sujet de l’Ukraine et pour avoir décidé d’organiser ce débat.

Je respecte le travail des rapporteures, leur engagement et j’espère sincèrement qu’elles pourront poursuivre leur excellent travail. Il ne faut pas essayer d’empêcher ces femmes courageuses d’être rapporteures pour l’Ukraine.

Le rapport brosse un tableau précis de la situation en Ukraine et nous aide à y voir plus clair. Il ne faut pas toujours écouter les personnes qui nous disent que l’on n’a rien vu, que l’on ne connaît pas bien la situation des Tatars en Crimée, etc.

Je voudrais revenir sur un certain nombre de points qui ont déjà été évoqués à différentes reprises. L’intégration à l’Union européenne a été réalisée par les Ukrainiens en 2010, lorsqu’ils ont voté en faveur du Parti des Régions et élu Ianoukovitch, dont la campagne était pro-européenne. C’est pourquoi je rejette les accusations selon lesquelles l’Union européenne aurait entretenu trop d’espoir en Ukraine.

Toute tentative de décider de l’avenir de l’Ukraine, sans convier l’Ukraine à la même table, doit être rejetée. Faute de quoi, nous agirions comme par le passé, ce qui entrainerait de nouveau une division. Or voulons-nous d’une Europe divisée ? Le peuple ukrainien n’a-t-il pas le droit de décider de son avenir ? C’est pourquoi je pense que nous devons tous considérer la Verkhovna Rada comme légitime et à même de prendre des décisions dans l’intérêt du peuple ukrainien.

Le dernier vote du Parlement russe autorisant l’emploi de forces militaires en Ukraine a choqué tous les pays voisins, y compris la Lettonie.

Enfin, je tiens à remercier tous les pays qui ont soutenu notre adhésion à l’Otan.

M. SUDARENKOV (Fédération de Russie)* – Voilà cent ans, le fondateur de l’Académie nationale des sciences de l’Ukraine a déclaré que la question ukrainienne était une question très ancienne. Il voulait dire qu’au cours des siècles d’histoire commune, les efforts qui avaient été entrepris pour la séparation des deux pays étaient inutiles ; on ne peut pas séparer la Russie de l’Ukraine.

Sans les événements du mois de février à Kiev, il n’y aurait pas eu les événements du mois de mars en Crimée. Nous n’avons pas vraiment tenté d’analyser les événements des mois de janvier et de février. Or on ne peut connaitre la vérité sans faire un bilan précis de ces événements. Écoutons le président russe, qui a dit clairement : « nous ne voulons pas la partition de l’Ukraine, nous n’en avons pas besoin ».

On évoque ici une politique particulière à l’égard de l’Ukraine. On parle de collaborationnisme, d’annexion. On entend des références à l’histoire. Mais qui parle de collaborationnisme ? Je suis sans doute l’un des seuls dans cet hémicycle à avoir vécu l’Occupation. Evitons donc de lancer de grandes phrases de ce genre. Elles devraient être interdites. Ce n’est pas de cela qu’il faut parler aujourd’hui, mais de ceci : comment se fait-il que l’on accuse le chef de l’administration, qu’on le menotte, que des administrations publiques soient prises de force ?

Rien d’absurde ni d’inattendu ne s’est passé en Crimée. Pourquoi les résultats du référendum seraient-ils inattendus ? Mais quels résultats attendiez-vous donc dans la situation qui s’y est créée, avec ce peuple pluriethnique ? Il n’y a pas que des Russes qui ont voté.

Ce qui importe, ce n’est pas le texte de la résolution dans sa version actuelle, mais la vérité, que ce texte devrait refléter.

LA PRÉSIDENTE - Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs. Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer, dans les 24 heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance pour publication au compte rendu.

J’appelle la réplique de la commission. Il vous reste six minutes et demie, Mesdames les corapporteures.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Je remercie tous ceux de nos collègues qui ont participé au débat et qui, pour la plupart, se sont dits favorables au rapport. Peu sont contre ; je pense que ceux-là ont particulièrement peur de notre description de la réalité. Je ne sais pas si je dois en rire ou en pleurer mais, lorsque j’écoute certains collègues russes – des anciens –, je constate qu’ils continuent la propagande ici, dans cet hémicycle. Ces parlementaires sont des membres de la Douma qui ont autorisé M. Poutine à utiliser la force armée en Ukraine !

Je suis convaincue que le gouvernement ukrainien et la Verkhovna Rada ont la force de poursuivre les réformes nécessaires, même si la Russie fait de son mieux pour déstabiliser l’Ukraine et pour la provoquer.

Dans le peu de temps qui nous est imparti, je tiens enfin à remercier Pascal, du secrétariat, qui nous a aidées à préparer ce rapport et qui était avec nous à Maïdan du 18 au 21 février, au moment où nous voyions des gens y mourir. Merci beaucoup, Bas Klein, d’avoir été constamment à nos côtés !

Mme REPS (Estonie), corapporteure* – Je vous rappellerai pour ma part que c’est de l’Ukraine que nous parlons aujourd’hui. Demain, nous parlerons des conséquences de la situation pour la Fédération de Russie et sa délégation.

Je rappellerai également cinq points importants contenus dans le projet de résolution. D’abord, notre soutien total, par tous les moyens, notamment par l’intermédiaire de la Commission de Venise et de nos experts à différents niveaux – y compris ceux qui se trouvent en ce moment même en Ukraine –, à la poursuite des réformes que nous avons demandé aux Ukrainiens de mener à bien. Nous souhaitons qu’elles se fassent, quelle que soit la situation. Le nouveau gouvernement et la Verkhovna Rada doivent poursuivre leur travail.

Ensuite, nous soutenons les élections. Nous demandons à tous de faire de leur mieux pour que l’élection présidentielle ait lieu de manière libre et équitable sous le regard de nos observateurs. Nous souhaitons également un nouveau code électoral en vue de nouvelles élections au Parlement, guidé par une vision claire de l’avenir des autorités locales et une meilleure distribution des pouvoirs à leur profit.

Dans le texte, nous parlons également des droits des minorités. Si vous ne nous croyez pas à ce sujet, j’espère que vous croirez au moins le comité consultatif qui s’est rendu sur place pendant une semaine et qui a préparé un rapport détaillé que je vous demande de lire. Il ne s’agit pas de notre avis, mais des conclusions d’un groupe d’experts, selon lequel il n’existe aujourd’hui aucun risque pour les minorités en Ukraine.

Nous parlons aussi de la Crimée. A cet égard, nous nous sommes exprimées ensemble très clairement dans différentes déclarations en Commission permanente et aujourd’hui même : aucune annexion du territoire d’un autre pays n’est acceptable, sous aucun prétexte. J’espère que notre vote sera unanime sur ce point.

Et, bien entendu, nous voulons un accord de sécurité tangible. Le Mémorandum de Budapest n’a pas été respecté ; il faut évidemment se demander ce que cela signifie pour l’Europe, mais aussi pour le monde tout entier. Quelles sont les conséquences de telles actions, notamment pour l’Iran ? Ce sont des points dont nous devrons discuter une fois que nous aurons achevé le présent débat sur l’Ukraine.

Je remercie à nouveau tous ceux qui ont participé à ce débat particulièrement vif et intéressant. J’espère que notre prochain débat sur l’Ukraine se déroulera dans un environnement et sur un ton différents, et que nos conclusions sur la Crimée seront également différentes. Peut-être le miracle aura-t-il eu lieu, peut-être la Crimée fera-t-elle alors de nouveau partie de l’Ukraine.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission de suivi* – Au nom de la commission de suivi, je remercie toute l’assemblée de ce débat intense et approfondi pour lequel 75 collègues s’étaient inscrits, ce qui montre combien le Conseil de l’Europe est préoccupé par ce conflit qui concerne deux de ses Etats membres. Le fait même que nous ayons eu ce débat confirme que notre Organisation offre un forum de discussion adapté, car elle est la seule à n’avoir aucun intérêt géostratégique dans cette affaire.

Je remercie tout particulièrement nos corapporteures. Pour vous donner une idée du travail qu’elles ont accompli, sachez qu’elles se sont rendues 15 fois une semaine en Ukraine, où elles ont donc passé au total près de quatre mois. Cela représente un travail considérable auquel nous devons rendre hommage et dont nous pouvons leur être reconnaissants.

Ce matin, le Président autrichien nous a adressé une recommandation que j’avais moi-même formulée. Au bout du compte, c’est le peuple ukrainien qui est souverain. Assurément, la neutralité politique, économique, militaire a pu dans certains cas apporter la prospérité à certains pays, dont le mien. Une structure fédérale également, même si tel n’est pas l’objet du présent rapport. En tout état de cause, et quel que soit le choix qui sera fait, il appartient, je le répète, au peuple ukrainien.

Nous n’avons pas fini de parler de ce sujet, car de nombreux amendements ont été déposés.

LA PRÉSIDENTE - La commission de suivi a présenté un projet de résolution sur lequel 47 amendements et 4 sous-amendements oraux ont été déposés

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Le président de la commission de suivi demande l’application de l’article 33-11 du Règlement sur l’amendement 15, qui a été adopté à l’unanimité par la commission.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’objection. En conséquence, cet amendement est déclaré définitivement adopté.

J’en donne lecture :

L’amendement 15, déposé par MM. Popescu, Kalmár, Mme Beselia, MM Iwiński, Díaz Tejera, Cilevičs, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 11, dernière phrase, à remplacer les mots « la Loi sur la langue d’Etat » par les mots suivants : « la loi sur les principes de la politique relative à la langue d’Etat ».

Nous en arrivons aux autres amendements.

L’amendement 1, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, à supprimer la deuxième phrase.

M. KOX (Pays-Bas)* – Je pense que nous pouvons améliorer ce projet de résolution en nous attachant aux faits et en n’évoquant pas ce qui n’est pas tout à fait clair et qui fait l’objet d’enquêtes. D’où cet amendement.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Nous parlons des faits, de la réalité sur le terrain. Nous y étions ! Tiny Kox ne souhaite pas que nous décrivions la réalité, mais nous y tenons. Il faut donc maintenir cette phrase.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Contre l’amendement.

L’amendement 1 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 22, déposé par MM. Aligrudić Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 1, à remplacer les mots « à l’approche de plus en plus dure des autorités, notamment la soi-disant action antiterroriste de réprimer les manifestations d’Euromaïdan par la force, contrairement à tous les conseils donnés par des interlocuteurs nationaux et internationaux, y compris par l’Assemblée dans sa Résolution 1974 (2014) sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Ukraine » par les mots suivants : « à l’ingérence de l’UE et des Etats-Unis dans les affaires intérieures de l’Ukraine, à leur soutien des forces anti-gouvernementales qui ont outrepassé le cadre légal ».

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – L’escalade de la violence a été le fruit de l’ingérence de l’Union européenne et des Etats-Unis dans les affaires intérieures de l’Ukraine. Il convient de le dire.

M. ARIEV (Ukraine)* – Il n’est pas vrai que seuls l’Union européenne et les Etats-Unis se soient rendus à Kiev à l’époque. D’après le SBU, le service de sécurité d’Ukraine et d’après des chercheurs, des membres du FSB de la Russie étaient aussi présents en nombre lorsqu’on a tiré sur la foule. Je ne crois pas pertinent de ne citer que certaines parties. C’est pourquoi cet amendement me paraît inacceptable.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L’amendement 22 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 40, déposé par MM. Kox, Petrenco, Mmes Burykina, Kazakova, Nikolaeva, Borzova, Goryacheva, M. Timchenko, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 2, première phrase, à supprimer les mots « à cette occasion par les autorités ukrainiennes » et les mots « à l’encontre des manifestants ».

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Les tirs des snipers n’ont pas touché que les manifestants qui protestaient, mais également les forces de police, dont les forces spéciales. Il faut faire preuve d’objectivité et ne pas déformer les faits. C’est pourquoi nous proposons la suppression de plusieurs mots.

Mme REPS (Estonie), corapporteure* – Dans le deuxième paragraphe du projet de résolution, nous commençons par condamner ce qui a été fait par les autorités contre les manifestants. Dans la seconde phrase, nous indiquons que toutes les pertes en vies humaines doivent faire l’objet d’une enquête complète. Tous ceux qui ont violé les droits de l’homme sont visés, y compris les manifestants qui ont tiré. Je suis contre cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Contre.

L’amendement 40 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 2, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 2, après la première phrase, à insérer les mots suivants : « Elle condamne aussi l’utilisation de la violence à l’encontre de la police et d’autres. »

M. KOX (Pays-Bas)* – Dans le droit fil de ce que vient de dire la corapporteure, cet amendement permet d’établir un équilibre dans le texte. Il doit donc être adopté.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Si vous lisez bien, il ne saurait y avoir d’impunité pour les violations des droits de l’homme, quels qu’en soient les auteurs. Tout est couvert par notre texte. L’amendement est donc superflu.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est contre.

L’amendement 2 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 23, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 2, troisième phrase, à supprimer les mots «, qui se sont produites dans le sillage des manifestations d’Euromaïdan ».

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Les violations des droits de l’homme n’ont pas eu lieu dans le cadre d’Euromaïdan. Il y a eu des manifestations anti-Maïdan et de nombreuses violations des droits de l’homme sur le territoire ukrainien, avec beaucoup de victimes et de décès. Tous ces cas doivent faire l’objet d’enquêtes et pas seulement ceux d’Euromaïdan. Nous demandons que l’on vote cet amendement.

Mme REPS (Estonie), corapporteure* – Dans notre projet de résolution, nous ne visons pas que la place Maïdan ou que certaines périodes, mais bien tout ce qui est lié aux manifestations d’Euromaïdan, aussi bien à Kiev qu’ailleurs. Il s’agit des actions contre les manifestants et de celles contre les forces de police. Tout cela doit faire l’objet d’une enquête. Il ne faut donc pas supprimer ces mots. C’est très important.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Contre.

L’amendement 23 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 45, déposé par M. Kandelaki, Mme Čigāne, MM. Ghiletchi, Japaridze, Mme Gerashchenko, M. O. Shevchenko, Mmes Bokuchava, Guţu, Taktakishvili, MM. Hanson, Bardina Pau, Mme Mateu Pi, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 2, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée prend acte de la déclaration de M. Valentin Nalivaïtchenko, directeur des services de sécurité de l’Ukraine (SBU), sur les allégations faisant état de conseils que le FSB de la Russie aurait donnés avant et pendant les tirs à l’encontre de manifestants à Kyiv, ainsi que de la participation de 26 agents du FSB à ces tirs, et demande que ces affirmations fassent l’objet d’enquêtes approfondies. »

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Comme l’a indiqué l’un de nos collègues ukrainiens, des preuves ont été apportées de l’implication du FSB russe dans la répression des manifestants. Il est important qu’un fait d’une telle gravité fasse l’objet d’une enquête.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Comme le dit un proverbe russe, « quand on parle du loup, il sort du bois ». Les snipers venaient plutôt du côté de M. Saakashvili ! Une enquête est sans doute une bonne idée…Je suis donc contre l’amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 45 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 24, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, Aligrudić, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 3.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Le paragraphe 3 du projet de résolution ne correspond pas à la réalité. Il est tout à fait faux de dire que la Verkhovna Rada a joué un rôle constructif pour résoudre la crise en appliquant l’accord du 21 février, qui prévoyait notamment le désarmement des groupes illégaux. Or, celui-ci n’a pas eu lieu. On ne peut pas déformer la réalité !

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Ceux qui n’ont pas respecté l’accord, ce sont le représentant de la Fédération de Russie et l’ex-président de l’Ukraine, qui a fui le pays. Toutes les autres parties de l’accord ont respecté ses dispositions. Je suis donc opposée à cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 24 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 17, déposé par MM. Morozov, Fetisov, Umakhanov, Tarlo, Chernyshenko, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 3 par le paragraphe suivant : « Organe partiellement légitime, la Verkhovna Rada n’a pas su gérer le moment difficile de la période de transition et a formé un gouvernement avec la participation de représentants des forces nationalistes d’extrême droite. En conséquence, il n’a pas encore commencé à appliquer l’accord du 21 février 2014, ce qui déclenche des protestations sociales et politiques dans le sud-est de l’Ukraine et une déstabilisation générale de la situation. »

M. MOROZOV (Fédération de Russie)* – Cet amendement propose une nouvelle rédaction du paragraphe 3.

M. ARIEV (Ukraine)* – Le Parlement de l’Ukraine, élu en 2012 sous la présidence de M. Ianoukovitch, est totalement légitime. On ne peut donc pas accepter cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 17 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 3, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 3, première phrase, à supprimer les mots suivants : « lorsque, dans l’unité et le consensus, elle a géré le changement de pouvoir et l’application des principales dispositions de l’accord du 21 février 2014, dans l’esprit des principes généraux de l’accord et en tenant dûment compte des principes constitutionnels ».

M. KOX (Pays-Bas)* – Nous devons nous en tenir aux faits. Dans quelle mesure l’accord du 21 février 2014 a-t-il été mis en œuvre ? Ce point fait encore l’objet de discussions. Il en sera question dans une réunion future entre l’Ukraine, la Fédération de Russie, les Etats-Unis et l’Union européenne.

M. ARIEV (Ukraine)* – Le Parlement ukrainien, conformément aux recommandations de la Commission de Venise, a voté des ajouts à la Constitution de 2004 et, pour les trois quarts de ses membres, a apporté son soutien au gouvernement actuel. Ses décisions sont légitimes.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 3 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 4, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 3, à remplacer la dernière phrase par la phrase suivante : « L’Assemblée appelle les nouvelles autorités à agir conformément à leurs obligations nationales et internationales, y compris les obligations leur incombant au titre de la Convention européenne des droits de l’homme, et à rétablir la confiance du public à l’égard du Gouvernement et du Parlement. »

M. KOX (Pays-Bas)* – La légitimité des autorités ukrainiennes actuelles fait débat. La Commission de Venise n’a pas encore rendu ses conclusions. Les autorités de facto doivent veiller au strict respect des obligations leur incombant au titre de la Convention européenne des droits de l’homme.

M. A. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Je suis opposé à cet amendement, qui remet en question la légitimité du nouveau Gouvernement et du Parlement. Ce dernier a joué un rôle crucial pendant la crise alors que M. Ianoukovitch a fui le pays.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 4 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 25, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 4.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Le paragraphe 4 indique que les événements de février à Maïdan ont ouvert une fenêtre d’opportunité pour le développement démocratique de l’Ukraine. C’est tout à fait faux, comme en témoignent la répression politique actuelle et l’interdiction de certains médias. Nous proposons donc de supprimer ce paragraphe.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Il y a aujourd’hui un Parlement légitime en Ukraine. Il a modifié la Constitution et le nouveau Gouvernement a reçu le soutien d’une large majorité. La liberté de parole est respectée. Les journalistes russes ne peuvent qu’envier notre situation. C’est en Russie qu’ils se livrent à de la propagande plutôt qu’à de l’information.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 25 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 38, déposé par MM. Morozov, Fetisov, Umakhanov, Tarlo, Chernyshenko, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 4, première phrase, à remplacer les mots : « ont ouvert une fenêtre d’opportunité pour le développement démocratique de l’Ukraine » par les mots suivants : « ne bénéficient pas d’un véritable soutien public et finiront par entraîner un conflit civil de longue durée ».

M. MOROZOV (Fédération de Russie)* – Je considère qu’il faut modifier le texte du paragraphe 4. Selon moi, une grande partie de la population ne soutient pas le pouvoir actuel. De nombreux crimes ont été commis, notamment place Maïdan, et ne font pas l’objet d’enquêtes. Des crimes de même nature se poursuivent d’ailleurs dans le sud-est du pays. C’est la raison pour laquelle je propose de remplacer les mots : « ont ouvert une fenêtre d’opportunité pour le développement démocratique de l’Ukraine » par les mots suivants : « ne bénéficient pas d’un véritable soutien public et finiront par entraîner un conflit civil de longue durée ».

M. A. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Je m’oppose à cet amendement qui propose une interprétation fallacieuse des événements. Selon moi, il faut conserver la rédaction actuelle du paragraphe 4 qui vise à encourager le développement démocratique de l’Ukraine.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 38 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 5, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 4, à insérer la phrase suivante : « Afin de rétablir l’Etat de droit, l’Assemblée préconise le désarmement immédiat des personnes et des groupes armés illégalement en Ukraine et la poursuite de l’action des autorités destinée à protéger les citoyens ukrainiens contre la corruption endémique dans l’ensemble du pays. »

M. KOX (Pays-Bas)* – Au cours de la mission en Ukraine du Comité des Présidents, nous avons appris deux choses importantes. D’une part, le ministère de l’Intérieur a évoqué la nécessité absolue de désarmer dans les meilleurs délais les personnes et les groupes armés qui constituent une menace pour la stabilité du pays. D’autre part, le nouveau gouverneur de Donetsk nous a informés de ce qu’il a appelé – ce sont ses mots – la « corruption endémique » qui gêne le développement du pays. Ce sont là deux faits qui doivent figurer dans le projet de résolution.

LA PRÉSIDENTE - La présidence a été saisie par Mme Reps et Mme de Pourbaix-Lundin, au nom de la commission de suivi, du sous-amendement oral suivant : à l’amendement 5, après la première occurrence du mot : « de », insérer le mot « complètement » et après le mot « désarmement », insérer les mots « complet et ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

Mme REPS (Estonie), corapporteure* – Il s’agit, à travers ce sous-amendement, de demander le désarmement de toutes les personnes illégalement armées.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est évidemment favorable à ce sous-amendement.

M. KOX (Pays-Bas)* – Pour continuer dans l’état d’esprit positif qui, je l’espère, va caractériser la suite de ce débat, je voudrais dire que ce sous-amendement oral améliore mon amendement. Je l’accepte donc.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous en revenons à l’amendement, ainsi sous-amendé.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement 5, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 26, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 5, cinquième phrase, supprimer les mots « en première lecture avant la tenue de la prochaine élection présidentielle et en dernière lecture ».

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – J’aimerais simplement dire que les journalistes russes peuvent tout à fait aller en Ukraine et voir de leurs propres yeux ce qui s’y passe.

En ce qui concerne le présent amendement, nous partons du principe que la référence à la Verkhovna Rada est légitime dès lors que l’on se réfère à la chambre issue des dernières élections. A ce moment-là, toutes les régions de l’Ukraine étaient représentées et pouvaient, dès lors, prendre des décisions.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Actuellement, au sein du Parlement ukrainien, il manque seulement quelques députés de la Crimée, annexée par la Fédération de Russie. L’ancien président Ianoukovitch et l’ancien procureur général sont partis avec leurs amis. À cet égard, nous demandons l’extradition du Président Ianoukovitch et celle de tous les autres hauts dirigeants pour que nous puissions enquêter comme il se doit – rien, en Ukraine, ne s’y oppose.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 26 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 27, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9, à supprimer les mots « Cette stratégie de décentralisation devrait reposer sur les principes d’un Etat unitaire fort doté d’un système efficace de gouvernance centrale, avec une délégation de responsabilités et pouvoirs aux régions. L’Assemblée conteste fermement toute notion de fédéralisation de l’Ukraine, car cela affaiblirait substantiellement l’unité et la stabilité du pays. »

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Nous proposons de supprimer, dans le paragraphe 9, les mots qui ont trait à la fédéralisation. On ne peut pas d’emblée imposer tel ou tel modèle d’organisation à l’Ukraine. De plus, il est écrit que la fédéralisation affaiblirait l’unité et la stabilité du pays. Or il existe en Europe des pays fédéraux ; sont-ils pour autant affaiblis ? Pourquoi faut-il dénoncer ce modèle et dire qu’il n’est pas adapté à l’Ukraine ? Tel est l’objet de cet amendement.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Le Parlement ukrainien a créé une commission chargée d’élaborer une nouvelle Constitution, dont nous espérons qu’elle pourra être adoptée avant l’élection présidentielle. Ce sont nos députés et nos experts qui sont chargés de sa rédaction – pas le Kremlin. Nous sommes donc opposés à cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 27 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 41, déposé par MM Petrenco, Kox, Mmes Burykina, Nikolaeva, Kazakova, Borzova, Goryacheva, M. Timchenko, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9, quatrième phrase, à supprimer le mot « unitaire ».

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Je souhaiterais que nous examinions les choses sur le fond du texte. Moi, je ne travaille pas au Kremlin, je ne sais pas ce qu’a compris l’oratrice précédente. Parlons du fond, s’il vous plaît, Madame !

Cet amendement est logique : on ne peut pas rejeter d’emblée le modèle de la fédéralisation et, en plus, insinuer que celle-ci affaiblirait l’unité du pays. Dans ce cas, l’Allemagne est faible, la Fédération de Russie également ! Voilà la conclusion logique d’une telle insinuation.

Donc, avançons de manière équilibrée et supprimons le mot « unitaire ».

M. A. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Si l’on parle d’Etat unitaire, c’est pour respecter la Constitution ukrainienne. Je pense que ce sera apprécié. La notion de fédéralisme est seulement utilisée pour mettre en cause l’Etat ukrainien et essayer de mettre le nouveau gouvernement sous pression.

Je suis contre cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable de la commission

L'amendement 41 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 14, déposé par MM. O. Shevchenko, Popescu, Mme Gerashchenko, M. Kandelaki, Mmes Taktakishvili, Boukhara, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9, quatrième phrase, à remplacer les mots « aux régions » par les mots suivants : « aux communautés locales ».

M. O. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Le Gouvernement d’Ukraine a travaillé sur un concept d’autonomie, qui a pour objet d’accorder aux organes qui assurent celle-ci de larges pouvoirs, qui figureront dans la Constitution ukrainienne. C’est la raison pour laquelle je vous demanderai de voter pour cet amendement.

LA PRÉSIDENTE – La présidence a été saisie par Mmes Reps et de Pourbaix-Lundin, au nom de la commission de suivi, du sous-amendement oral suivant tendant à compléter l’amendement 14 par les mots : « et régionales »

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc examiner ce sous-amendement.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Nous pensons qu’il est important de faire référence à la fois les communautés locales et régionales dans ce paragraphe.

M. O. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Je suis favorable à ce sous-amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est également favorable à ce sous-amendement.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous en revenons à l’amendement 14, ainsi sous-amendé.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est également favorable à l’amendement sous-amendé.

L’amendement 14, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Les amendements 6 et 42 sont identiques.

L’amendement 6, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9, à supprimer la dernière phrase.

L’amendement 42, déposé par MM. Petrenco, Kox, Mmes Burykina, Nikolaeva, Kazakova, Borzova, Goryacheva, M. Timchenko, a le même objet.

L’amendement 6 ayant été déposé en premier, j’appelle son auteur, M. Kox, pour soutenir ces amendements.

M. KOX (Pays-Bas)* – Je viens des Pays-Bas, qui sont un Etat décentralisé. C’est une décision que nous avons prise nous-mêmes. Il me semble que c’est aux Ukrainiens de décider comment ils souhaitent organiser leur Etat. Ce n’est pas nous de leur donner des instructions.

M. POPESCU (Ukraine) – Conformément à sa Constitution, l’Ukraine est un Etat unitaire, ce qui ne l’empêche pas d’être favorable à la décentralisation et au fait d’accorder plus de pouvoirs aux régions. Ce qui vaut au Conseil de l’Europe et au Congrès des pouvoirs locaux et régionaux devrait aussi se mettre en place par une délégation de pouvoirs aux collectivités territoriales. Nous sommes donc contre ces amendements.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à ces amendements.

Les amendements 6 et 42 ne sont pas adoptés.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 11, déposé par Mme Čigāne, MM. Bērzinš, Dombrava, Mme Lībiņa-Egnere, MM. Kandelaki, Ghiletchi, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 9, dernière phrase, après les mots « l’Ukraine », à insérer les mots suivants : « et de toutes pressions extérieures en faveur de la poursuite de la fédéralisation dans l’avenir ».

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Nous avons déposé cet amendement, parce que la fédéralisation de l’Ukraine ne doit pas se faire sous des pressions extérieures.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Cet amendement témoigne du fait qu’il existe justement une pression extérieure ! La question de la fédéralisation n’a pas à être réglée par notre Assemblée ni par Washington. Ce n’est pas à Washington d’écrire la Constitution ukrainienne, mais au peuple ukrainien d’en décider lui-même, après des élections libres.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement 11 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 12, déposé par Mme Čigāne, MM. Bērzinš, Dombrava, Mme Lībiņa-Egnere, MM. Kandelaki, Ghiletchi, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 9, à ajouter la phrase suivante : « L’Assemblée appelle les médias, en particulier ceux de la Fédération de Russie, à rendre compte des événements en Ukraine de manière impartiale et objective, de manière à promouvoir et favoriser la désescalade. »

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Cet amendement confirme qu’une excellente propagande a été organisée par les médias russes contre l’Ukraine. Cela étant, nous sommes d’accord avec la commission pour dire qu’il aurait dû porter sur le paragraphe 13 et non le paragraphe 9.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – En effet, cet amendement devrait se rapporter au paragraphe 13, qui parle des médias, ce qui n’est pas le cas du paragraphe 9.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 12 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 28, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 10.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Nous proposons de supprimer le paragraphe 10, selon lequel il est nécessaire de réaliser des réformes judiciaires de grande ampleur. De telles réformes doivent être mises en œuvre non pas rapidement, mais en prenant le temps nécessaire. Sinon, elles pourraient, dans la précipitation, conduire à des résultats négatifs.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Ce point faisait partie des demandes de la Commission de Venise à l’Ukraine. Nous avons commencé à travailler et adopté les premières lois. Cela doit figurer dans cette résolution, pour qu’elle soit conforme aux recommandations de la Commission de Venise.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 28 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 29, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, Aligrudić, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 11, à supprimer la deuxième phrase.

M. PETRENCO (République de Moldova)* – A mon avis, ce serait le pire des cynismes que de déclarer qu’aucune menace ne pèse sur les droits des minorités en Ukraine. Que des milliers de personnes manifestent dans les villes ukrainiennes et demandent le respect de leurs droits, n’est-ce pas la confirmation du fait qu’il y a bien un problème ? On ne parle pas que des droits des russophones, on parle aussi de ceux des Moldoves, des Hongrois, des Roumains et d’autres. L’interdiction de parler sa langue maternelle frappe toutes les minorités, que ce soient les Moldoves, les Roumains, les Hongrois ou les autres. Je vous propose donc de supprimer la deuxième phrase du paragraphe 11.

M. ARIEV (Ukraine)* – Je suis désolé mais ce que je viens d’entendre n’est pas conforme à la réalité. Une législation a effectivement été adoptée, y compris par des Russes, notamment ceux qui ont agi en Crimée. Je crois que tout cela, tout ce qu’on dit à propos de ces minorités, c’est de la propagande, et il faut se conformer au droit international.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 29 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 7, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 11, dernière phrase, à supprimer les mots suivants : «, même si cette décision n’a jamais été entérinée ou mise en œuvre ».

M. KOX (Pays-Bas)* – Au cours de la mission que nous avons effectuée, avec les deux corapporteures, nous avons constaté que l’abrogation de la loi sur la langue d’Etat avait suscité des craintes, dans la société ukrainienne comme dans la communauté internationale. Il n’est pas besoin de préciser que la loi n’est pas entrée en vigueur, il suffit de décrire les faits, à savoir qu’elle a suscité des réactions de colère dans la société.

M. A. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Si nous biffons ces derniers mots du paragraphe, le texte suscitera des mésinterprétations. Aucune loi n’a été mise en œuvre par la nouvelle administration. En outre, cette loi sur la langue d’Etat est en vigueur depuis deux ans et la Constitution mentionne des droits spécifiques au profit de la langue russe. Je suis donc hostile à l’amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable de la commission.

L'amendement 7 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 30, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 12.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Chers collègues, le document que nous examinons comporte un grand nombre d’assertions inexactes. Le paragraphe 12, notamment, n’est pas conforme à la vérité. Il faudrait que le texte de la résolution ne fasse référence qu’à des faits concrets et vérifiés. D’où émanent les allégations qui figurent au paragraphe 12 ? Et pourquoi ne signale-t-on pas des faits analogues dans d’autres régions de l’Ukraine ? Nous proposons donc de supprimer ce paragraphe.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – C’est le comité consultatif sur la protection des minorités nationales, formé de différentes ONG, comme Human Rights Watch, qui a relayé ces signalements. Il s’agit donc bien de faits, et ce paragraphe doit être conservé.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable de la commission.

L'amendement 30 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 18, déposé par MM. Morozov, Fetisov, Umakhanov, Tarlo, Chernyshenko, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 12 par le paragraphe suivant : « L’Assemblée exprime sa gratitude au Conseil d’Etat de Crimée (Fédération de Russie) pour l’adoption, le 11 mars 2014, d’une déclaration historique " sur les garanties de rétablissement des droits des Tatars de Crimée et leur intégration dans la communauté de Crimée ", ce qui correspond à la réalisation des objectifs majeurs du mouvement national des Tatars de Crimée, qu’il poursuivait en vain depuis 23 ans en Ukraine. »

M. MOROZOV (Fédération de Russie)* – Madame la Présidente, je considère que le paragraphe 12 relève d’une totale désinformation sur la réalité de ce qui se passe en Crimée pour la minorité tatare. Je viens moi-même de Crimée, et le Conseil d’Etat de Crimée a véritablement adopté une déclaration historique sur le rétablissement des droits des Tatars de Crimée. De ce fait, les Tatars de Crimée peuvent siéger au gouvernement et, pour la première fois en 235 ans, le tatar est langue officielle. Cela faisait 23 ans qu’en Ukraine les Tatars de Crimée luttaient pour ces droits. Je voulais donc procéder à la substitution qui est l’objet de l’amendement.

M. ARIEV (Ukraine)* – Je puis vous parler d’un Tatar de Crimée qui a été torturé par un de ces militaires non identifiés dont nous savons que c’étaient des soldats russes ! Nous avons des milliers de réfugiés de Crimée, des Tatars, qui ont quitté leur terre d’origine, la Crimée, pour venir dans l’ouest de l’Ukraine. Il faut donc conserver ce paragraphe.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 18 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE - L’amendement 19, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Mme Strik, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 12, à remplacer les deux premières phrases par la phrase suivante : « L’Assemblée s’inquiète de la situation de tous les citoyens de Crimée, notamment de la minorité tatare et de la minorité ethnique ukrainienne. »

M. KOX (Pays-Bas)* – Il y a de bonnes raisons de s’inquiéter à propos de la situation de tous les citoyens de Crimée dans le territoire annexé, en particulier de ceux qui appartiennent aux minorités tatare et ukrainienne. Nous demandons donc que l’OSCE puisse suivre la situation sur place.

Le projet de résolution évoque un nombre croissant de signalements dignes de foi de violations des droits de l’homme, mais ces signalements n’ont pas été soumis à l’Assemblée parlementaire. Je les examinerai avec attention s’ils me sont communiqués, mais il faut nous en tenir aux faits. Tel est l’objet de mon amendement.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Pour que l’on puisse étudier ces signalements, il faudrait au moins que les forces d’occupation autorisent à présent l’OSCE à se rendre sur place. Or cela n’a pas été le cas, au contraire. C’est pourquoi nous sommes contre cet amendement. Cela dit, il est vrai qu’il y a actuellement des violations des droits de l’homme en Crimée. Des Tatars ont été battus, et deux Ukrainiens ont été abattus par les forces russes.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 19 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 47, déposé par MM. Dişli, Denemeç, Mme Erkal Kara, MM. Tuğrul Türkeş, Selvi, Baykal, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 12, après la deuxième phrase, à insérer les mots suivants : « Le rapport du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, élaboré suite à sa mission en Ukraine du 21 au 26 mars 2014, fait observer que les Tatars de Crimée sont particulièrement exposés à des risques en Crimée. Les Tatars de Crimée, qui ont déjà souffert de la déportation dans le passé, ont un sentiment croissant de peur et d’incertitude concernant leur avenir. Leurs craintes relatives à leur sécurité et leur accès aux droits, y compris la jouissance des droits culturels, linguistiques, à l’éducation et de propriété, doivent être dûment prises en compte. »

M. DİŞLİ (Turquie)* – L’amendement fait état de la réalité de la situation dans la région. Les risques qui pèsent sur les Tatars de Crimée figurent dans le rapport du Comité consultatif et doivent donc être reflétés ici.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Avis favorable de la commission.

L’amendement 47 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 8, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 13 par le paragraphe suivant : « La liberté des médias et la liberté d’expression sont indispensables au développement de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme en Ukraine. L’Assemblée appelle les autorités à garantir ces libertés. »

M. KOX (Pays-Bas)* – En temps de crise, la liberté des médias et la liberté d’expression sont indispensables au développement de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme. L’Ukraine est en crise et par conséquent la liberté des médias et la liberté d’expression sont essentiels. Par l’amendement, nous proposons d’en appeler aux autorités pour les garantir.

M. ARIEV (Ukraine)* – Il n’y a aujourd’hui aucune preuve de limitation de la liberté des médias en Ukraine. Nous devons simplement protéger nos médias contre la propagande en faveur du séparatisme et contre les discours haineux.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L'amendement 8 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 31, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, première phrase, à supprimer les mots « et non corroborées ».

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Les violations des droits de l’homme en Ukraine font l’objet de constatations de la part de nombreuses organisations internationales. Dire qu’elles ne sont pas corroborées n’est pas objectif.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – Tenons-nous en aux faits. Sur 15 journaux, 14 sont en russe ; les nouvelles en Ukraine sont en langue russe à la télévision, le théâtre national produit à nouveau des spectacles en langue russe. Un député de la Douma peut venir chez nous, il verra qu’il n’y a aucune violation des droits des minorités russophones. Nous sommes catégoriquement contre tout amendement qui ne serait pas objectif.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L'amendement 31 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 32, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 13, à remplacer la dernière phrase par la phrase suivante : « Les autorités devraient prendre immédiatement des mesures pour établir un dialogue inter-ethnique. »

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Il faudrait modifier le point 13. On y évoque les problèmes entre les différentes ethnies et les moyens d’information, mais pas de façon objective. De la même façon, certains médias de l’Ouest n’ont pas présenté la situation dans une perspective réaliste. Ajouter la phrase « Les autorités devraient prendre immédiatement des mesures pour établir un dialogue inter-ethnique. » serait une bien meilleure chose que de limiter l’action des médias.

M. ARIEV (Ukraine)* – Le Gouvernement ukrainien comprend des élus natifs de l’est de l’Ukraine, deux sont juifs, le gouverneur d’une grande région industrielle est l’un des leaders du Congrès juif européen. Nous n’avons aucun problème vis-à-vis des minorités ethniques et la paix règne entre les différentes minorités. Notre problème, c’est notre voisin, qui essaye constamment d’exploiter ces situations en Ukraine. Voilà le vrai problème !

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L'amendement 32 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 33, déposé par MM. Petrenco, Makhmutov, Mme Kazakova, MM. Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 13, à ajouter la phrase suivante : « Nous appelons les autorités d’Ukraine à reconsidérer la décision de mettre fin au fonctionnement de certaines des chaînes de télévision les plus populaires du pays et à s’abstenir de toute censure des médias. »

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Nous sommes tous d’accord pour dire que la liberté d’expression et celle des médias sont parmi les grandes valeurs que nous partageons tous et que nous défendons dans toutes les enceintes. C’est pourquoi nous appelons les autorités d’Ukraine à reconsidérer la décision de mettre fin au fonctionnement de certaines des chaînes de télévision les plus populaires du pays et à s’abstenir de toute censure des médias.

LA PRÉSIDENTE – La présidence a été saisie par Mme Reps et Mme de Pourbaix-Lundin, au nom de la commission de suivi, du sous-amendement oral suivant : « A l’amendement 33, supprimer les mots “les plus populaires” ».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent. En l’absence d’objection, nous pouvons examiner ce sous-amendement oral.

Mme REPS (Estonie), corapporteure* – Nous proposons de supprimer les mots « les plus populaires », car nous n’avons pas les moyens de vérifier que ces chaînes de télévision étaient vraiment les plus populaires ; nous ne disposons pas non plus de rapports qui étayent cette affirmation.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – La délégation ukrainienne est catégoriquement contre, car la liberté d’expression existe en Ukraine. Comme d’autres pays, tels que la Pologne ou les Pays Baltes, nous devons nous protéger de la propagande russe. Des films ont été diffusés il y a deux jours sur les candidats à l’élection, Ioulia Timochenko et Petro Porochenko. Il y était fait allusion à leurs racines juives. On a assisté à une propagande antisémite de la part des Russes. Or, notre Constitution et nos lois nous protègent contre une propagande aussi agressive. Nous refusons donc cet amendement.

LA PRÉSIDENTE – Nous étudions le sous-amendement oral, Madame.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable au sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. A. SCHEVCHENKO (Ukraine)* – Je n’avais rien contre le sous-amendement, mais je propose de voter contre l’amendement, car de nombreuses chaînes russes sont diffusées en Ukraine. Le Gouvernement ukrainien a simplement interrompu la diffusion de chaînes russes qui faisaient de la propagande contre l’Etat ukrainien.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L’amendement 33, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 39, déposé par MM. Pushkov, Chernyshenko, Mmes Nikolaeva, Kazakova, MM. Makhmutov, Sidyakin, tend, dans le projet de résolution, après le paragraphe 13, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée condamne fermement les agissements du parti ukrainien "Svoboda" au sein de la Verkhovna Rada et sur le territoire de toutes les régions d’Ukraine. L’Assemblée se réfère à la résolution adoptée le 13 décembre 2013 par le Parlement européen, qui rappelle que les opinions racistes, antisémites et xénophobes sont contraires aux valeurs et principes fondamentaux de l’Union européenne et, par conséquent, invite les partis démocratiques siégeant à la Verkhovna Rada à ne pas s’associer avec ce parti, ni à approuver ou former de coalition avec ce dernier, dont l’activité, tout comme celle du mouvement "Secteur Droit", est ouvertement fasciste. »

M. PUSHKOV (Fédération de Russie)* – Rappel au Règlement. Je souhaiterais que l’on demande à nos collègues ukrainiens de bien se tenir. Nous, nous n’avons pas recours à des attaques contre les membres de l’Assemblée et contre le gouvernement ukrainien. L’oratrice précédente tapait du pied pendant qu’elle parlait et accusait la Russie d’antisémitisme ! Madame la Présidente, pouvons-nous dire ici tout ce qui nous passe par la tête ?

LA PRÉSIDENTE – Ce débat doit se dérouler dans la sérénité et le respect mutuel. J’en appelle donc à tous les membres de cette Assemblée, comme je l’ai fait avant le débat.

Vous n’avez pas défendu l’amendement 39, Monsieur Pushkov.

M. PUSHKOV (Fédération de Russie) – Certains prétendent ici qu’il n’y a aucun problème en Ukraine. Si, il y en a au moins un, puisque le Parlement européen, le 13 décembre 2013, a estimé que le parti Svoboda  était un parti antisémite, xénophobe et raciste. Nous pensons donc que l’Assemblée doit mettre en accusation ce parti, ainsi que le mouvement Secteur Droit.

Si nos collègues veulent se solidariser avec ce parti, ils n’ont qu’à rejeter ma proposition.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Où M. Pushkov voit-il de l’antisémitisme ? Pourquoi voulez-vous proposer de telles choses dans le rapport, Monsieur ? Et ce que vous dites est faux, puisque Secteur Droit n’était pas un parti il y a deux ans.

Par ailleurs, au sein de notre gouvernement de coalition, toutes les communautés ethniques sont représentées. Je suis donc contre cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L'amendement 39 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 34, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 14.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Je voudrais féliciter l’Assemblée de soutenir Secteur Droit  et autres ! Vous allez regretter cette décision !

LA PRÉSIDENTE – Monsieur, je vous prie de bien vouloir respecter le résultat du vote et de vous abstenir de faire des commentaires après l’adoption d’un amendement. Vous n’avez la parole que pour défendre l’amendement 34.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – On parle au paragraphe 14 de changement démocratique et de développement politique en Ukraine et l’on dit que la situation en Crimée aurait éclipsé cette évolution. Ce n’est pas vrai. D’un point de vue objectif, nous ne pouvons pas écrire que ce qui se passe en Crimée éclipse ce qui se passe en Ukraine, alors qu’il ne s’y passe rien. C’est pourquoi il faut supprimer le paragraphe 14.

M. ARIEV (Ukraine)* – Je suis contre l’amendement et je comprends bien pourquoi la délégation de Russie propose de supprimer le paragraphe 14 : il condamne l’agression militaire en Crimée.

Retirez vos troupes de Crimée et alors on pourra supprimer ce paragraphe !

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable à l’amendement.

L'amendement 34 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 13, déposé par Mme Čigāne, MM. Bērzinš, Dombrava, Mme Lībiņa-Egnere, MM. Kandelaki, Ghiletchi, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 14, à remplacer le mot « éclipsés » par le mot suivant : « entravés » et, après les mots « avec force », à insérer les mots suivants : « l’autorisation donnée par le Parlement de la Fédération de Russie d’utiliser la force militaire en Ukraine, ».

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Nous pensons qu’il faut dire que le Parlement de la Fédération de Russie a voté à l’unanimité pour l’utilisation de la force militaire le 1er mars. C’est ce qui figure dans cet amendement et j’accepte par avance le sous-amendement proposé par les rapporteures.

LA PRÉSIDENTE – La présidence a été saisie d’un sous-amendement oral par Mme Reps et Mme de Pourbaix-Lundin, au nom de la commission de suivi, qui tend à l’amendement 13, à supprimer les mots : « remplacer le mot "éclipsés" par le mot suivant : "entravé". »

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas, nous allons donc examiner ce sous-amendement oral.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Nous souhaitons garder le terme « éclipsés ».

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est favorable.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous en revenons à l’amendement 13, ainsi sous-amendé.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Il n’y a pas eu d’annexion de la Crimée, puisqu’il y a eu un référendum libre. Que vous y croyiez ou pas, moi j’étais présent et c’était peut-être le plus libre des référendums qu’il y ait jamais eu sur cette terre !

Par ailleurs, on dit que nos militaires sont sur place, mais cela fait très longtemps qu’ils y sont, tout simplement parce qu’il y a une base russe là-bas. Nous n’avons pas augmenté notre contingent ! Il n’y a eu aucune agression.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est favorable à l’amendement sous-amendé.

L'amendement 13, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 9, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 15.

L’amendement 43, déposé par MM. Petrenco, Kox, Mmes Burykina, Nikolaeva, Kazakova, Borzova, Goryacheva, M. Timchenko, est identique.

L’amendement 9 ayant été déposé en premier, j’appelle son auteur, M. Kox, à soutenir ces amendements.

M. KOX (Pays-Bas)* – L’annexion de la Crimée constitue une violation flagrante du droit international selon la grande majorité de l’Assemblée générale des Nations Unies, presque tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, le Comité des Ministres, son Président et la grande majorité des membres de mon groupe. Quels que soient les arguments avancés pour la justifier, elle n’aurait pas dû avoir lieu puisqu’elle est illégale. Inutile, donc, de demander aux Russes de fournir des arguments supplémentaires.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est contre.

Les amendements 9 et 43 ne sont pas adoptés.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 35, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 16.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Le paragraphe 16 met en doute les résultats du « soi-disant référendum » mais, je le répète, j’y étais et je n’ai jamais vu autant de personnes attendre l’ouverture des bureaux de vote, je n’ai jamais été témoin d’une telle participation – plus de 70 % ! Ce référendum était assurément libre, surtout comparé à d’autres…

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Contre l’amendement. Tous ceux qui savent lire pourront constater que ce référendum était contraire à la fois à la Constitution de l’Ukraine et à celle de la Crimée et qu’il constituait une violation de tous les traités de droit international.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est contre l’amendement.

L’amendement 35 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 20, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 16, à supprimer la deuxième phrase.

M. KOX (Pays-Bas)* – Saisie pour avis, la Commission de Venise nous a indiqué que le référendum en Crimée constituait une violation du droit international. Peu importent les conditions dans lesquelles il s’est déroulé. Même s’il s’agit du meilleur référendum jamais organisé, il est illégal et contraire notamment au droit ukrainien. C’est imparable.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède), corapporteure* – Contre l’amendement. Je vous renvoie au paragraphe 82 de notre rapport : il est impossible qu’il y ait eu 82 % de participation et 96 % de « oui » puisque 36 % de la population a boycotté l’élection. Les chiffres ne sont donc pas plausibles. Tel est le sens du paragraphe 16 du projet de résolution.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est contre l’amendement.

L’amendement 20 est rejeté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 16, déposé par M. O. Shevchenko, Mme Gerashchenko, M. Kandelaki, Mmes Taktakishvili, Bokuchava, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 16, à insérer la phrase suivante : « Eu égard à la dénonciation par la Fédération de Russie des accords, conclus avec l’Ukraine en 1997, sur le déploiement de la flotte de la mer Noire en Crimée, l’Assemblée appelle la Russie à retirer immédiatement ses troupes de Crimée. »

M. O. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Les députés russes ont dénoncé les accords de 1997 sur le déploiement de la flotte de la mer Noire en Crimée, ainsi que les accords dits de Kharkiv. Dès lors, le déploiement de la flotte de la mer Noire en Crimée n’a aucun fondement légal. L’Assemblée peut donc appeler la Fédération de Russie à retirer ses troupes de Crimée.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Je suis opposé à cet amendement, qui montre combien l’Assemblée peut être éloignée de la réalité. La flotte russe est en Crimée et nous ne comptons pas l’en retirer.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement 16 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 44, déposé par Mme Gerashchenko, M. Kandelaki, Mme Bokuchava, MM. Popescu, Sakovskis, tend, dans le projet de résolution, à la fin du paragraphe 16, à ajouter la phrase suivante : « Elle appelle donc les Etats membres à faciliter l’indemnisation de l’Ukraine pour les dommages subis en raison de l’annexion illégale de la Crimée en instaurant une coopération effective avec les autorités ukrainiennes pour enquêter sur les circonstances des violations des droits de l’homme commises sur le territoire de la péninsule de Crimée, et obtenir rapidement des réponses à leurs demandes ainsi qu’une reconnaissance mutuelle des décisions de justice. »

L’amendement 46, déposé par MM. Zingeris, Kandelaki, Berdzenishvili, Mme Taktakishvili, MM. Ghiletchi, Jakavonis, est identique.

L’amendement 44 ayant été déposé en premier, j’appelle Mme Gerashchenko à soutenir ces amendements.

Mme GERASHCHENKO (Ukraine)* – L’annexion de la Crimée a causé à l’Ukraine des dommages territoriaux, mais aussi des dommages financiers qui se comptent en milliards, notamment du fait de l’appropriation du gaz et du pétrole de la mer Noire. Par cet amendement, nous demandons de l’aide pour que ces dommages soient indemnisés sur un fondement juridique, grâce aux tribunaux internationaux.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Contre l’amendement. Voilà qui est bien improbable : on demanderait la compensation de dommages dus au fait que les pays de l’Ouest, en particulier les Etats-Unis d’Amérique, ainsi que les Etats membres du Conseil de l’Europe, ont soutenu de manière inacceptable les événements qui se déroulaient en Ukraine. Ce qui s’est passé en Ukraine résulte de nombreuses erreurs commises par des responsables politiques des pays occidentaux, lesquels se sont ingérés dans les affaires d’un Etat souverain.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est opposée à ces amendements.

Les amendements 44 et 46 ne sont pas adoptés.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 36, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov, tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 17.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Dans le paragraphe 17, « l’Assemblée exprime la grande préoccupation que lui cause la mobilisation d’une forte présence militaire russe le long de la frontière avec l’Ukraine ». Il n’y a vraiment pas de quoi être préoccupé ! Nous décidons de la manière dont nous disposons de nos forces militaires sur notre territoire.

M. ARIEV (Ukraine)* – Contre l’amendement. Ce que nous comprenons, c’est qu’environ 100 000 soldats russes sont massés à la frontière ukrainienne.

Ils ne sont pas venus en vacances ! Il faut garder ce paragraphe dans notre projet de résolution.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L’amendement 36 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 21, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Petrenco, Mme Strik, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 17, à supprimer les mots «, ce qui pourrait être un signe que la Fédération de Russie envisagerait de poursuivre son agression militaire, sans qu’il y ait eu provocation, contre l’Ukraine, ce qui est inacceptable ».

M. KOX (Pays-Bas)* – L’accumulation de militaires à la frontière ukrainienne est un fait préoccupant. Quelles que soient les intentions des Russes, on ne les connaît pas et il serait bon qu’ils nous en informent. Cela étant, il ne faut pas parler de leurs intentions mais d’un fait : on compte de plus en plus de forces militaires à la frontière.

M. BOROWSKI (Pologne)* – Il faut quand même parler des intentions. N’oublions pas que la Douma a voté une loi autorisant le président russe à intervenir militairement dans un pays voisin. Elle s’inspire de la doctrine Brejnev.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est contre l’amendement.

L’amendement 21 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 37, déposé par M. Aligrudić, Mme Kazakova, MM. Makhmutov, Shlegel, Morozov tend, dans le projet de résolution, à supprimer le paragraphe 18.

Si cet amendement est adopté, l’amendement 10 n’aura plus d’objet.

M. SHLEGEL (Fédération de Russie)* – Il faut réfléchir sérieusement avant de voter pour ce paragraphe, qui ne nous rapproche pas de la paix. Il nous rapproche de tout, sauf de la stabilité. Il ne fait rien pour que nos citoyens se sentent en sécurité. Ne soutenez pas ce paragraphe qui pourrait conduire aux pires conséquences.

M. A. SHEVCHENKO (Ukraine)* – Il est important au contraire de garder ce paragraphe parce qu’il identifie l’armée russe comme étant la source de la déstabilisation, non seulement de l’Ukraine mais aussi de toute la région et du continent européen. Je suis tout à fait contre cet amendement de suppression.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable de la commission sur l’amendement.

L’amendement 37 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 10, déposé par MM. Kox, Hunko, Villumsen, Jónasson, Petrenco, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 18, première phrase, à supprimer les mots « qu’entraînerait une escalade de l’agression militaire russe à l’encontre de l’Ukraine ».

M. KOX (Pays-Bas)* – Une intervention étrangère ne peut que porter préjudice à l’Ukraine. Il faut mettre un terme à l’agression de la Fédération de Russie, mais aussi à celle de l’Union européenne, de l’OTAN et des Etats-Unis. C’est pourquoi il ne faut pas montrer du doigt un seul pays. En enlevant cette phrase, on saura mieux à quoi s’en tenir.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Ce paragraphe ne dit qu’une chose : il ne faut pas avoir recours à la force mais venir à la table de négociations pour continuer le dialogue. Ce paragraphe a donc toute sa place dans le texte.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable sur l’amendement.

L’amendement 10 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13482, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (154 voix pour, 26 voix contre et 14 abstentions).

LA PRÉSIDENTE* – Je vous donne une information importante pour nos débats de demain. Vu le dépôt tardif d’amendements sur le rapport concernant les pouvoirs de la délégation russe, l’heure limite de dépôt des sous-amendements est repoussée de 20 heures à 21 heures.

M. Kox, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Brasseur au fauteuil présidentiel.

3. L’accès à la nationalité et la mise en œuvre effective
de la Convention européenne sur la nationalité

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport sur l’accès à la nationalité et la mise en œuvre effective de la Convention européenne sur la nationalité présenté par
M. Cilevičs au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc. 13392 et corrigendum), ainsi que de l’avis présenté par M. Huseynov au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées (Doc. 13438).

Je vous rappelle que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 heures 35, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – Le droit à la nationalité et la nécessité de lutter contre l’apatridie font l’objet de la Convention européenne sur la nationalité. Il s’agit aussi de permettre l’accès à la nationalité aux résidents à long terme.

Le droit à la nationalité est généralement reconnu comme « le droit d’avoir des droits ». Même si plusieurs instruments juridiques internationaux le reconnaissent comme un droit de l’homme, la Convention européenne des droits de l’homme n’en dit rien. La Convention européenne sur la nationalité a été ouverte à la signature en 1997 afin de remplir cette lacune. Pour la première fois, on a parlé de la nationalité au niveau international. Malheureusement, aujourd’hui, seuls 20 Etats membres du Conseil de l’Europe ont ratifié ce texte. En outre, alors qu’elles figuraient parmi les priorités du Conseil de l’Europe, les questions liées à la nationalité n’y apparaissent plus depuis 2008.

La Convention européenne sur la nationalité permet de lutter contre l’apatridie, un sujet encore préoccupant en Europe. D’après le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, il existerait 700 000 apatrides en Europe, localisés plus particulièrement en Estonie, en Russie, en Lettonie et en Ukraine. Cette situation est due à la dissolution de l’Union soviétique et de la Yougoslavie, mais aussi aux lacunes de certaines législations nationales, qui engendrent l’apatridie dès la naissance.

La Convention des Nations Unies sur le statut des apatrides de 1954 et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie de 1961 n’ont pas été ratifiées par de nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe. Or des enfants continuent de naître apatrides, héritant de l’apatridie de leurs parents. Certains ont même des difficultés à prouver leurs liens avec l’Etat dans lequel ils vivent car ils ne sont pas enregistrés à la naissance.

Nous devons penser également aux résidents à long terme, qui n’ont pas la nationalité du pays hôte. De nombreux obstacles les empêchent d’en bénéficier. Leurs enfants ne peuvent pas non plus obtenir la nationalité d’un pays où pourtant ils sont nés. Le rapport mentionne les pratiques discriminatoires de certains pays, beaucoup plus stricts aujourd’hui que par le passé dans l’octroi de la nationalité, qu’ils conditionnent à des tests civiques et linguistiques.

Le projet de résolution présente des propositions concrètes. Les parlements nationaux doivent adopter des législations permettant aux apatrides d’acquérir une nationalité sans obstacles inutiles. Le Comité des Ministres doit par ailleurs créer un nouveau comité d’experts sur la nationalité et prendre des mesures pour promouvoir l’adhésion des Etats membres du Conseil de l’Europe à la Convention européenne sur la nationalité.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le rapporteur, il vous restera neuf minutes pour répondre aux orateurs.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan), rapporteur de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, saisie pour avis* – La commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées félicite M. Cilevičs pour son excellent rapport. Nous sommes très inquiets du fait que si peu de pays aient signé la Convention européenne sur la nationalité. Nous ne pouvons que nous interroger.

Les questions liées à la naturalisation se posent dans un grand nombre d’Etats membres. Elle est souvent difficile à obtenir et constitue de ce fait une source de grande souffrance pour de nombreux individus. Les pays qui ne souhaitent pas signer la Convention ont sans doute leurs raisons, celles-ci étant sans doute liées à une certaine vision de l’évolution de la société. Le problème de l’apatridie ne touche pas seulement des personnes d’âge mûr, mais aussi de tout jeunes enfants. En ce sens, elle constitue une préoccupation pour les générations à venir.

On ne peut que regretter que le nombre d’apatrides dans les Etats membres du Conseil de l’Europe soit si élevé. La situation ne fait que s’aggraver du fait des migrations volontaires et forcées. L’abolition des frontières en Europe a également intensifié le problème. Aujourd’hui, on se déplace facilement d’un pays à l’autre et de nombreux enfants naissent sans nationalité. La coexistence des apatrides aux côtés de citoyens dotés d’une nationalité est, de toute évidence, source d’inégalité.

Après la seconde guerre mondiale, l’Azerbaïdjan a été submergé d’immigrés en provenance du sud de l’Iran. Ils sont d’une origine ethnique proche du peuple de l’Azerbaïdjan et ont passé près d’un demi-siècle dans notre pays sans que la nationalité azerbaidjanaise leur soit accordée. Ils n’ont obtenu que le statut de réfugiés politiques et beaucoup souffert de cette situation, marquée par l’époque. Alors que nous entrons dans le xxie siècle, il existe encore des centaines de milliers de personnes apatrides en Europe.

Cette situation est évidemment très préoccupante. Qui plus est, elle l’est plus encore que dans le passé, alors que ce devrait être l’inverse. Aujourd’hui, beaucoup d’enfants naissent dans ces familles de migrants sans nationalité. Ils sont obligés de partager le même destin que leurs parents et rencontrent donc des obstacles de toute sorte. Il faut donc prendre des mesures concrètes pour essayer de trouver une solution à ce problème.

LE PRÉSIDENT* - Nous abordons la discussion générale. Grâce à la générosité des interprètes, nous disposerons de dix minutes de plus pour le débat. Je devrai interrompre la liste des orateurs à 19 h 45.

Je demande aux orateurs d’être aussi concis que possible pour que le plus grand possible d’inscrits puissent s’exprimer.

M. MAKHMUTOV (Fédération de Russie), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Dans une civilisation moderne, l’apatridie est quelque chose de terrible, d’injuste ; c’est une véritable violation des droits de l’homme. Les personnes qui en sont victimes se voient refuser leurs droits les plus fondamentaux : ils vivent dans un pays sans pouvoir travailler, étudier et utiliser leurs compétences. Malheureusement, dans le cadre de la globalisation, ce phénomène s’aggrave, en particulier dans les pays Baltes.

En Lettonie, quelque 300 000 personnes sont concernées, soit plus de 15 % de la population ; 60 % sont des Russes, dont un grand nombre sont nés et vivent dans ce pays depuis qu’il a pris son indépendance et adopté sa constitution.

Le 30 mars 2011, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a, dans une résolution, rappelé à la Lettonie les exigences de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales et exprimé sa vive préoccupation quant au fait que les apatrides échappent à la protection des normes édictées par cet instrument, lesquelles visent à permettre une véritable participation des minorités à la vie du pays, y compris par le vote aux élections locales.

En 2005, au moment elle a signé la Convention-cadre, la Lettonie a émis des réserves. Les minorités nationales, là où elles vivent en grand nombre, doivent pouvoir s’exprimer dans leur langue maternelle. En outre, les noms de rue doivent pouvoir être écrits dans cette langue. La Lettonie a considéré que certaines personnes échappaient au champ de cette convention. Or, plus de 50 % de la population vivant dans certaines grandes villes de Lettonie – comme Riga et Daugavpils – sont, d’un point de vue ethnique, des Russes. Le département d’Etat américain a adressé en 2008 des recommandations au gouvernement letton pour l’inviter à accélérer le processus de naturalisation, de participation aux élections locales, à faire en sorte que les enfants nés après 1991 obtiennent la nationalité et que l’Ombudsman puisse faire son travail. A Genève, dans le cadre d’une procédure de contrôle périodique, le Conseil des droits de l’homme a envoyé à la Lettonie toute une liste de recommandations. Le Conseil rappelait en particulier qu’une telle apatridie de masse était inacceptable, qu’il fallait mettre un terme à la discrimination visant les minorités nationales, garantir leur droit de participer à la vie politique, de même que leur droit à l’éducation dans leur langue et mettre un terme au racisme. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance a adopté un énième rapport sur la Lettonie, dans lequel elle pointe du doigt sans pitié le fait que ces dispositions n’ont pas été mises en œuvre. L’apatridie de masse persiste ; elle concerne des gens qui sont considérés comme de non-citoyens alors qu’ils devraient être reconnus comme des citoyens.

Mme GUŢU (République de Moldova), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Au nom du groupe ADLE, je voudrais féliciter M. le rapporteur pour son travail qui attire notre attention sur la nécessité de respecter l’un des droits fondamentaux de l’homme – je veux parler du droit à la nationalité.

Dans le projet de résolution et dans le rapport, ce terme est, à juste titre, considéré comme un synonyme d’identité civique. A cet égard, il existe deux approches doctrinales à ce sujet : l’approche allemande et l’approche française. Selon la doctrine française, la nationalité inclut aussi bien l’identité civique que l’identité nationale et culturelle. Au contraire, l’approche allemande distingue les deux : il y a l’identité civique d’un côté, et l’identité nationale et culturelle de l’autre.

Je voudrais appeler votre attention sur la situation dans les pays post-soviétiques – y compris le mien, la République de Moldova –, lesquels sont marqués par les discours identitaires.

En République de Moldova, d’un part, nous avons tous une identité civique – nous sommes des citoyens de la République de Moldova – mais, d’autre part, des spéculations politiques prolifèrent autour de l’aspect national et culturel. C’est un débat qui ne finira jamais, car aucun représentant des minorités nationales de mon pays ne dira qu’il est moldove ; il dira d’abord qu’il est russe, ukrainien ou bulgare. De plus, je considère qu’après les événements de Crimée, au-delà du profond changement qui est intervenu à cette occasion dans le droit international, un bouleversement touchera aussi la redéfinition de la notion d’identité civique et d’identité nationale et culturelle.

En effet, la Russie est intervenue en Crimée pour défendre les droits de la minorité russe. Nous pouvons nous demander quelle est la véritable identité des habitants de la Crimée, qui fait partie intégrante de l’Ukraine, ainsi que celle des personnes vivant dans les régions de l’est de ce pays qui brandissent le drapeau de la Russie. L’Ukraine a, sans le moindre doute possible, octroyé la citoyenneté à tous ces gens ; ils ont des passeports ukrainiens, ce sont des citoyens ukrainiens, mais ils défendent les intérêts d’un autre pays dont ils réclament la nationalité. En République de Moldova, il en va de même pour les habitants de la région sécessionniste de Transnistrie, mais aussi dans le sud du pays où habite une minorité turcoïde christianisée.

Les pays post-soviétiques, à l’exception de la Lettonie, se sont montrés très généreux en délivrant l’identité civique à tous les représentants des minorités nationales, y compris à ceux qui ne se sont pas intégrés culturellement. Il est regrettable que ce geste ne soit pas aujourd’hui apprécié. Les représentants des minorités russophones et russophiles alimentent l’identité nationale d’un pays aussi puissant que la Russie. En affirmant cela, je me réfère au désaccord que plusieurs représentants des minorités nationales dans les pays post-soviétiques ont manifesté à l’égard de la politique étrangère pro-européenne.

Pour conclure, le groupe ADLE appuie bien sûr les projets de résolution et de recommandation, de même que le contenu du rapport, car ces documents ont été élaborés dans le respect d’un droit fondamental de l’homme – le droit à l’identité civique. En outre, ils font référence à un grand nombre d’autres travaux du Conseil de l’Europe en général et de notre Assemblée parlementaire en particulier.

M. LE BORGN’ (France), porte-parole du Groupe socialiste – Au nom du Groupe socialiste, je souhaite rendre hommage au remarquable travail que vous avez conduit, Monsieur le rapporteur, sur l’accès à la nationalité.

La nationalité est un droit dont nul ne devrait être privé. L’histoire de l’Europe est celle de migrations successives dont la réussite ou les difficultés qu’elles ont rencontrées repose sur la faculté d’intégration dans la société que rejoignent les migrants. L’accès à la nationalité est un élément essentiel de cette réussite, car elle consacre seule l’égalité de devoirs et de droits qu’attendent les étrangers dont la vie s’est construite dans l’Etat qui les a accueillis. Or, trop souvent encore, cet accès reste subordonné à d’inutiles et décourageantes conditions. Trop souvent aussi, il reste ouvert aux appréciations les plus discrétionnaires, déguisant parfois d’inavouables et intolérables discriminations.

Il y en aurait pas moins de 700 000 apatrides en Europe. La disparition de l’Union Soviétique, l’éclatement de la Yougoslavie et la dissolution de la Tchécoslovaquie expliquent cette situation. Je pense aux communautés russophones en Estonie et en Lettonie, mais aussi aux Roms dans plusieurs pays d’Europe centrale.

Sans nationalité et donc sans titre d’identité, peut-on prétendre au même accès à l’éducation, à la santé, au travail et au logement ? Non, malheureusement. C’est à une vie en marge de la société que l’apatridie condamne, une marginalité qui touche aussi les enfants d’apatrides, souvent apatrides eux-mêmes. L’apatridie prive ces enfants de leur jeunesse.

Que faire ? Mener campagne pour que soit signée, ratifiée et appliquée la Convention du Conseil de l’Europe sur la nationalité de 1997. A ce jour, 20 ratifications ont été enregistrées sur les 47 Etats membres du Conseil. C’est bien trop peu. Pourtant, c’est dans ce texte qu’il faut rechercher les éléments décisifs pour la lutte contre l’apatridie, en particulier l’acquisition automatique de la nationalité de l’Etat de résidence par les enfants d’apatrides qui y seraient nés et, bien sûr, la facilitation de la reconnaissance de la nationalité pour leurs parents.

Je souhaite également défendre ici la pluralité de nationalités. Il est heureux que la Convention du Conseil de l’Europe de 1963 qui visait à réduire les cas de plurinationalité soit devenue peu ou prou caduque.

Ce sont 6 des 13 Etats signataires qui l’ont en effet dénoncée. La pluralité de nationalités, par la naissance ou la naturalisation, n’est pas un danger. Elle est le reflet d’histoires personnelles, du mouvement entre nos peuples. Elle est une chance. Vivre dans un pays depuis des années et s’y plaire au point de vouloir en devenir le citoyen, ce n’est en rien renier son autre patrie. C’est au contraire se rejoindre et faire vivre ainsi la promesse européenne.

Mme PAKOSTA (Estonie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Garantir les droits de l’homme aux réfugiés et leur accorder une procédure équitable lorsqu’ils demandent la citoyenneté dans un des Etats membres du Conseil de l’Europe est une question très importante, car il ne s’agit pas seulement de garantir des droits civils, cela permet aussi de stabiliser la sécurité interne et externe.

Aujourd’hui, la citoyenneté et l’apatridie sont devenues, si je puis dire, deux nouvelles armes pour les Etats ayant des aspirations néo-impériales. Il suffit de voir les conséquences de l’octroi de passeports russes en Transnistrie, en Ossétie du Sud, en Abkhazie et en Crimée. Cette politique de « passeportisation » est souvent utilisée comme un casus belli, un motif d’invasion. En fait, il ne s’agit pas de réfugiés mais de citoyens fabriqués, qui n’ont aucun lien avec la Russie, mis à part un visa et des avantages économiques. Je suis déçue que l’Assemblée, en dépit du dépôt récent de deux motions, n’ait pas abordé cette question de la passeportisation et j’espère que le Bureau de l’Assemblée ne rejettera pas cette question, si une nouvelle motion venait à être déposée.

Par ailleurs, le fait de ne mentionner que quelques pays dans ce rapport n’est absolument pas justifié. C’est même dangereux, surtout à la lumière des tensions que nous avons pu constater cet après-midi. Le HCR, qui est évoqué dans ce rapport, a rappelé que seule une minorité de pays ont mis en place des procédures pour identifier et enregistrer les apatrides. L’Estonie et la Lettonie en font partie. Ainsi, le nombre de personnes dont la citoyenneté est indéterminée a baissé de manière considérable en Estonie, passant de 32 % en 1992 à 6,5 % en 2014, et, parmi les jeunes, ce taux est marginal. Toutes ces personnes à la citoyenneté indéterminée disposent de documents de voyage et de cartes de résident. Elles ont accès à tous les services sociaux ainsi qu’à l’éducation. Elles peuvent participer aux élections locales, et les enfants nés en Estonie peuvent obtenir la citoyenneté estonienne si leurs parents n’y sont pas opposés.

Cela étant, il ne faut pas oublier qu’un certain nombre de non-citoyens ne souhaitent pas obtenir la citoyenneté, car, en fait, ils profitent de cette situation douteuse. Alors que les ressortissants estoniens vivent un vrai cauchemar lorsqu’ils demandent un visa pour se rendre en Russie, tous les résidents d’Estonie à la citoyenneté indéterminée peuvent circuler sans visa en Russie et au sein de l’Union européenne. Leurs enfants n’ont pas à faire de service militaire, que ce soit en Estonie ou en Russie.

Ce sont des détails, mais ils sont importants pour eux. Nous ne pouvons pas imposer la nationalité à ces personnes. Donner automatiquement la citoyenneté à des adultes n’est pas une solution pour stabiliser l’Europe.

M. FRÉCON (France) – Le droit de chaque individu à un lien juridique avec un Etat constitue un élément essentiel de la protection des droits de l’homme. Notre Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 stipule ainsi, dans son article 15, que « tout individu a droit à une nationalité. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité ».

La citoyenneté ou nationalité est un droit clé pour les individus. Non seulement elle donne à chaque individu le sens de son identité mais elle lui ouvre, en outre, le droit à la protection de l’Etat et lui confère de nombreux droits civils et politiques. De fait, la citoyenneté a souvent été décrite comme « le droit d’avoir des droits » et l’on dit aussi qu’être déchu de sa citoyenneté, c’est être privé de son appartenance au monde.

Je voudrais dire moi aussi un mot de la Lettonie. Le sujet a déjà été abordé par notre rapporteur et par le représentant de la Fédération de Russie. Il se trouve qu’en 2008, j’ai effectué une mission en Lettonie au titre du Conseil de l’Europe, justement sur ces citoyens lettons qui, pour certains, après cinquante années de vie professionnelle et familiale en Lettonie étaient considérés comme des « non-citoyens ». Après l’indépendance de 1991, la Lettonie n’avait accordé la citoyenneté lettone qu’aux personnes qui en bénéficiaient avant juin 1940, et à leurs descendants. Ceux qui ne remplissaient pas ces conditions – et ceux-là représentaient 17 % de la population vivant en Lettonie, ce qui n’était pas rien – n’avaient obtenu aucune autre citoyenneté et étaient alors devenus des non-citoyens. Je vous promets, chers collègues, que j’avais pu à l’occasion de cette visite mesurer l’ampleur du sentiment d’exclusion ressenti par cette population déchue de fait d’une partie de ses droits, notamment du droit de vote aux élections locales – et je précise bien « locales ».

Les Etats ne sont pas restés sourds à cette souffrance et, depuis, la situation a évolué. C’est tant mieux !

Il a été dit précédemment que la Convention européenne sur la nationalité a été ratifiée par 20 Etats membres. La France a signé cette convention, mais ne l’a pas ratifiée. C’est d’autant plus regrettable qu’elle a inclus dans sa législation un certain nombre de pratiques, qui sont la mise en œuvre effective de cette convention.

C’est pour cela que je soutiens pour l’essentiel les conclusions de ce rapport, tout en soulignant cependant la nécessité de laisser à chaque Etat membre une marge de manœuvre importante pour déterminer dans sa législation les conditions d’accès à sa nationalité.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – J’aimerais revenir sur les arguments présentés par le dernier orateur. Ce rapport porte sur l’accès à la nationalité et l’apatridie, et l’apatridie est l’absence de lien juridique avec un pays donné. Or les non-citoyens lettons ont un lien permanent avec le pays. Ils ont la protection diplomatique. Si certains de leurs droits sont limités, ce lien juridique existe bel et bien.

Quant au rapport lui-même, M. Cilevičs parle, dès l’abord, des différentes approches du sujet. Pour ma part, je pense que du fait de ces différentes approches et des facettes multiples qu’il cherche à exposer, ce rapport n’est pas suffisamment concentré sur un sujet. On y parle d’apatridie, d’accès à la nationalité, de non-citoyens, de bi-nationalité, qui sont des concepts très différents.

De même, le projet de résolution cite quatre pays, qui sont présentés de façon totalement différente dans le rapport. L’Ukraine, quant à elle, est mentionnée dans le projet de résolution, mais aucun paragraphe ne porte sur ce pays dans l’exposé des motifs. La résolution affirme que la Fédération de Russie compte de nombreux apatrides, mais le rapport ne donne aucun détail sur le cas russe, qui n’apparaît que dans une note de bas de page. En ce qui concerne l’Estonie et la Lettonie, on assimile les non-citoyens aux russophones. C’est une erreur, si j’en crois les statistiques, puisque, parmi les non-citoyens en Lettonie, 70 % se déclarent d’origine russe, mais 14 % disent être d’origine ukrainienne, 10 % d’origine bélarusse, 3 % d’origine lithuanienne et d’autres encore d’origine estonienne. On ne peut donc pas parler de russophones !

Le rapport ne mentionne pas non plus le problème de l’octroi des passeports soulevé par notre collègue Mme Pakosta. Nous savons que notre collègue, M. Slutsky, est allé en Crimée distribuer des passeports russes à des personnes avant le référendum. Pourquoi n’en parle-t-on pas ? La rhétorique de ce rapport me rappelle malheureusement celle utilisée par M. Slutsky, quand il dit que les Russes protégeront les russophones dans les pays voisins.

Je demande donc à l’Assemblée de renvoyer ce rapport en commission pour pouvoir en discuter en détail et pour que la grave question de l’apatridie soit examinée correctement.

Mme JONICA (Monténégro)* – Tout d’abord, je voudrais souligner le fait que le droit à la nationalité c’est le droit d’avoir des droits. Dans quelle mesure est-ce important ? Bon nombre de citoyens de l’ancienne Yougoslavie ont découvert à quel point ces problèmes administratifs leur rendent la vie très difficile. A un moment donné, cela a changé leur vie. Ils vivaient dans un pays et, le lendemain, ils n’en étaient plus ressortissants. Que s’était-il passé ? Ils ont eu du mal à trouver un endroit où acquérir une nouvelle nationalité. Parfois, c’est un endroit où ils avaient vécu un ou deux ans ; parfois, c’est un endroit où ils n’avaient jamais vécu mais où leur père ou leur grand-père était né.

Le Monténégro a ratifié la Convention européenne sur la nationalité, mais il a fait une réserve sur l’article 16, que je considère comme le plus important pour mes concitoyens. Mon parti s’était opposé à cette réserve. Le parti socialiste a toujours demandé que l’on règle ces problèmes. Nous avons dit que la loi sur la citoyenneté devrait offrir des solutions et non pas créer des problèmes. En 2011, un amendement proposé par le SNP, le Parti socialiste populaire du Monténégro a été adopté. Sur cette base, bon nombre de citoyens ont acquis la nationalité du Monténégro. Malheureusement, il y a des délais et toutes les catégories visées n’ont pu en bénéficier.

Nous avons alors fait une nouvelle proposition, pour répondre aux questions recensées dans ce rapport. J’espère que l’adoption de cette résolution me permettra de convaincre les représentants des autres partis siégeant au Parlement du Monténégro de soutenir notre proposition.

Je suis tout à fait d’accord : les enfants de parents de nationalités différentes devraient avoir accès aux deux nationalités. Or, en vertu du droit actuellement en vigueur, si l’un des parents d’un enfant né à l’étranger a un parent né au Monténégro et que l’autre parent n’est pas né au Monténégro, l’enfant ne peut obtenir la nationalité monténégrine que s’il renonce à l’autre nationalité. Et que va-t-on faire pour les enfants qui ne sont plus mineurs ? Ce sont bien les enfants de leurs parents, mais ce ne sont plus des enfants au sens de la loi, et ils n’ont pas droit à la double nationalité. Je crois qu’il faut effectivement retenir des délais raisonnables, des durées de résidence raisonnables, mais qu’est-ce donc qu’une durée de résidence raisonnable ? Et quelqu’un qui vient du Kosovo ou de la Bosnie aura des difficultés pour obtenir certains documents d’identité au Monténégro s’il en a eu d’autres émanant d’autres pays.

J’espère que cette résolution nous permettra de régler les problèmes. Nous la soutiendrons donc.

LE PRÉSIDENT* - M. Badea, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. ALEKSANDROV (Fédération de Russie)* – Chers collègues, le problème de la citoyenneté exige que nous attirions l’attention des parlementaires européens sur l’un des plus importants instruments en la matière : la Convention européenne sur la nationalité. Le rapport en dit long à ce propos.

Cette convention n’est pas très populaire, puisque seuls 20 des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe l’ont ratifiée. La Russie l’a signée le 6 novembre 1997 mais les parlementaires russes, comme leurs collègues d’Italie, de France et de Grèce, comme de nombreux autres également, ont encore laissé la question de la ratification ouverte.

Au moment où nous avons signé la convention, nous pensions qu’elle aurait une forte influence sur les Etats qui, directement ou indirectement, discriminent les citoyens qui ne sont pas ressortissants du pays. Notre certitude s’est effritée pour un grand nombre de raisons. Un certain nombre de pays, par exemple la République de Lettonie en 2001, ont signé mais cela n’a rien changé sur le fond. Ainsi, les anciens citoyens soviétiques n’ont pas vu leur situation s’améliorer, et ils n’ont pas vu les pays membres du Conseil de l’Europe faire pression sur les Etats baltes. Nous n’avons pas non plus constaté que la question était soulevée lors de l’adhésion des pays Baltes aux structures européennes ou après celle-ci.

En outre, les pays qui ont ratifié s’écartent parfois radicalement des principes de cette convention européenne. Prenons tout d’abord le principe de non-discrimination, qui est l’objet de son article 5. Selon ce principe, les normes juridiques des Etats parties ne doivent pas discriminer pour des raisons de sexe, de religion, de race, d’origine nationale ou d’origine ethnique. Pourtant, on constate que les droits des Russes ethniques et des Ukrainiens russophones sont encore un problème d’actualité, alors que c’est dès le 21 décembre 2006 que l’Ukraine avait ratifié cet instrument. Evoquons notamment la limitation du recours à la langue russe, l’interdiction des mass media russes, des menaces vis-à-vis des personnes considérées comme non loyales par les défenseurs, comme ils s’appellent, de Maïdan, et l’abrogation de la loi sur la langue, qui menace non seulement les droits linguistiques des russophones mais aussi ceux des Roumains et des Polonais. C’est une grave pression morale qui est exercée sur eux, et l’on voit bien quelle direction suit actuellement le pouvoir de Kiev.

Par ailleurs, le rapport évoque la question des non-citoyens en Lettonie, en Estonie, en Ukraine et en Fédération de Russie, en particulier des enfants. Nous partageons la préoccupation exprimée par l’Assemblée à propos de l’apatridie de masse en Lettonie. Le 1er janvier 2014, 14 % de la population de Lettonie étaient composés de non-citoyens. Il faut vraiment agir.

LE PRÉSIDENT* - M. Cozmanciuc, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

Mme STRIK (Pays-Bas)* – J’aimerais remercier M. Cilevičs pour son rapport, qui évoque et analyse tous les aspects du problème de la nationalité : l’apatridie, les critères de naturalisation, les nationalités multiples. Ce qui est important, ce sont les conséquences de l’accès à la nationalité en termes d’identité sociale des personnes, de participation pleine et entière à la société, de droits civiques et sociaux et, surtout, de sentiment d’appartenance. Tout cela a des implications en termes de droits de l’homme. Voilà qui est trop précieux pour être abandonné à la seule souveraineté des Etats !

C’est pourquoi beaucoup de pays d’Europe orientale ont dû modifier leur législation sur la nationalité afin de pouvoir adhérer au Conseil de l’Europe. Celui-ci a donc déjà eu une influence sur l’accès à la nationalité, et, si, depuis lors, des membres, plus anciens, du Conseil de l’Europe ont durci leur droit de la nationalité, c’est un peu cynique. Par exemple, le niveau du test linguistique pour l’acquisition de la nationalité est beaucoup plus élevé qu’auparavant. D’autre part, des connaissances historiques sont exigées, et même les comportements des candidats sont testés. Nous disons que nous chérissons les libertés, les sociétés pluralistes, mais nous voulons un nouveau type de citoyens ! Le nombre de demandes de naturalisation a d’ailleurs chuté. En particulier, des illettrés, certains migrants, certains étrangers ne sont plus citoyens : ils ont peur de rater les tests et se trouvent exclus de ce fait. Que faire de ces individus ? Comment les intégrer dans la société ?

Autre évolution récente, de plus en plus de personnes ayant deux nationalités doivent renoncer à l’une d’entre elles. Pourtant, la plupart de ces personnes chérissent leurs deux nationalités ! Il faut tenir compte de la réalité. Pourquoi forcer des gens attachés à deux pays à choisir entre leurs deux nationalités ? Il serait plus pertinent de les informer des conséquences des nationalités multiples pour qu’ils puissent choisir en connaissance de cause et qu’ils se tiennent à l’écart de situations potentiellement conflictuelles.

Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a organisé une magnifique conférence où l’on a appris que l’Europe comptait 680 000 apatrides, en particulier des enfants qui grandissent avec ce handicap. Nous devons tout faire pour que les Etats membres signent le traité.

M. MARUSTE (Estonie)* – L’accès à la nationalité étant de toute évidence une question centrale, ce sujet méritait d’être inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée parlementaire.

Le rapport de M. Cilevičs évoque l’accès au droit à la nationalité et renvoie à la Convention du Conseil de l’Europe sur la nationalité adoptée en 1997 et ratifiée par seulement 20 Etats membres, soit moins de la moitié des Etats composant notre Organisation.

Permettez-moi de rappeler que la Convention européenne des droits de l’homme ne considère pas comme un droit le droit à la nationalité. Ainsi, aux termes de la convention, il convient de s’en remettre aux Etats membres qui décident à qui ils accordent la nationalité et à quelles conditions. Une telle approche a d’ailleurs toujours été étayée par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. La nationalité ou citoyenneté n’est pas un droit à proprement parler, c’est un privilège que l’on accorde à des personnes qui remplissent certaines conditions, qui s’identifient à un Etat en particulier, qui éprouvent un sentiment de loyauté envers cet Etat et qui demandent la nationalité du pays.

On ne peut octroyer la nationalité à une personne qui n’en veut pas. Il existe donc des différences dans les politiques de naturalisation. On ne peut traiter tout le monde à l’identique. Il est inapproprié de citer certains pays uniquement sur la base de chiffres, sans essayer de comprendre les raisons du problème ou sans analyser les mesures prises par ces pays pour les apatrides, les droits qu’ils leur ont octroyés et les véritables raisons des faibles progrès réalisés en la matière.

En d’autres termes, nous appuyons l’objectif central du rapport et les mesures recommandées, mais nous sommes réservés s’agissant des Etats cités uniquement sur la base des chiffres. Le seul droit que n’ont pas les apatrides en Estonie, c’est de participer à des élections législatives, mais le fait n’est pas unique en Europe. En revanche, les enfants apatrides ont exactement les mêmes droits que les ressortissants.

Je suis d’accord avec Mme Cigāne sur les apatrides qui ont des documents russes. Ce qui est dit est totalement faux.

Mme ZIMMERMANN (France) – En 1988, dans son rapport Etre français aujourd’hui et demain, Marceau Long, président de la commission de la nationalité, définissait la nationalité non seulement comme un lien juridique, mais aussi et surtout comme un lien « politique entre l’Etat et un individu qui donne à celui-ci la qualité de membre de la population constitutive de l’Etat ».

De ce fait, l’accès à une nationalité constitue un enjeu fondamental autant pour les Etats qui la donnent que pour ceux qui la demandent ou l’acquièrent par le droit du sang ou du sol. Parmi toutes ces personnes, les femmes occupent une place particulière.

En premier lieu, la question de la nationalité de la femme mariée et de la perte ou le changement de nationalité à cause du mariage est un problème récurrent. Si dans la plupart de nos pays européens, le problème semble réglé, nous ne devons pas oublier que la majorité des femmes immigrées en Europe sont originaires de pays non européens où les lois en vigueur et certains conflits juridiques entre Etats peuvent provoquer des cas d’apatridie.

J’observe également que la double nationalité peut représenter dans certains cas un progrès réel pour les femmes. En effet, elle permet à la femme de choisir librement si elle souhaite acquérir ou non la nationalité de son époux, car c’est souvent dans ce sens que se pose la question.

Elle permet également à des femmes immigrées de pouvoir s’intégrer sans couper tout lien avec leur pays d’origine. Nous savons que certaines femmes immigrées subissent une pression familiale ou communautaire les incitant à ne pas chercher à obtenir la naturalisation. En effet, l’accès à la nationalité du pays d’accueil correspond souvent à un vrai parcours d’intégration et aussi à une voie vers une indépendance réelle de ces femmes.

Il est d’ailleurs intéressant de voir que la reconnaissance de la double nationalité se développe au niveau mondial et que des débats ont lieu dans plusieurs pays au sein du Conseil de l’Europe, notamment en Allemagne.

Enfin, je voudrais souligner que dans le cas des femmes, l’apatridie accentue leur précarité, en particulier lorsque les droits sociaux et économiques sont strictement liés à la nationalité du pays.

La réduction de l’apatridie doit être une priorité et si nous pouvons comprendre les raisons historiques de certains choix politiques, il me semble que, dans le cas de l’apatridie, une vision plus humaniste devrait être recherchée. Les Etats concernés y trouveraient un intérêt en rétablissant le lien juridique mais surtout politique entre ces populations et leur pays, celui où elles sont nées, celui où elles souhaitent voir grandir leurs enfants.

Un travail devrait être mené au cœur de notre institution en ce sens pour mettre fin à l’apatridie et ainsi réintégrer dans notre grande Europe nos citoyens invisibles.

LE PRÉSIDENT* – Tous les orateurs inscrits qui étaient présents ont pu participer au débat.

Monsieur le rapporteur, il vous reste neuf minutes pour répondre aux orateurs. Mais si vous pouviez ne pas utiliser tout votre temps de parole, ce serait très bien…

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur* – Différentes questions ont été abordées dans le rapport, mais j’ignorais que l’on soulèverait au cours du débat une telle variété de sujets.

Madame Cigāne et Monsieur Makhumutov, je voudrais vous informer que le rapport ne porte pas sur la Lettonie, il porte sur des problèmes qui se posent dans de nombreux pays européens et nous devons les traiter maintenant, car ce sera encore plus difficile demain.

Je suis d’accord avec Mme Guţu qui a déclaré que la nationalité était liée à l’identité civique. Nous avons une grande diversité culturelle dans tous nos pays, mais ce qui unit les citoyens c’est leur identité civique qui est reflétée par leur nationalité.

Mme Pakosta a évoqué le grave thème de la sécurité des apatrides qui est un problème difficile. C’est donc dans l’intérêt bien compris de tous que d’éliminer l’apatridie, y compris pour des raisons de sécurité.

Pourquoi certains pays sont-ils mentionnés contrairement à d’autres ? Tout simplement, parce que les statistiques montrent qu’il est utile de mentionner les pays particulièrement concernés.

La commission des droits de l’homme éprouve des difficultés, car des parents souhaitent que leurs enfants demeurent apatrides, ce que les pays démocratiques ne peuvent accepter car cela ne va pas dans le sens de l’intérêt des enfants. La citoyenneté de l’Etat dans lequel un enfant est né doit être octroyée à cet enfant, que leurs parents soient ou non d’accord.

Pour élaborer mon rapport, j’ai retenu la définition de l’apatridie tiré de la convention. Votre discours plein d’émotion, Madame Cigāne, montre que la Lettonie connaît encore bien des problèmes en ce domaine, l’un étant la définition de l’apatridie introduite dans sa législation nationale, différente de celle qui figure dans la convention, ce qui est en soi un problème. Ainsi que l’a souligné Mme Pakosta, il faut se fonder sur les textes. Cela dit, il convient d’étudier la question et je serai favorable à un rapport séparé sur cette question. C’est pourquoi je suis réservé s’agissant de certains amendements déposés par nos collègues géorgiens. Je suis d’accord avec eux sur le fond, mais le problème n’est pas abordé dans ce rapport.

Nous traitons des problèmes du passé, c’est donc de notre faute s’ils n’ont pas été pleinement résolus. Je suis d’accord avec Mmes Strik et Zimmerman : il faut se concentrer sur les problèmes de l’avenir. Un bon nombre d’immigrés apatrides demeurent dans une zone grise parce qu’on ne sait pas quoi en faire. Il faut donc traiter cette question.

Monsieur le Président, je crois sincèrement que, même si c’est déplaisant pour certains Etats membres d’être mentionnés, nous devrions avec l’UNHCR nous concentrer sur l’élimination de l’apatridie. L’apatridie est absurde dans un monde tel que le nôtre, en particulier en Europe. J’espère donc que cette résolution sera adoptée et aura des effets.

LE PRÉSIDENT* - Merci beaucoup, Monsieur le rapporteur, pour votre répondre précise et rapide.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – Je souhaite remercier le rapporteur pour son excellent travail.

LE PRÉSIDENT* – Très bien, Madame Reps, vous nous avez fait gagner deux minutes !

La discussion générale est close.

La commission des questions juridiques et des droits de l’homme a présenté : un projet de résolution sur lequel 6 amendements et 1 sous-amendement oral ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel 2 amendements ont été déposés.

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes. 

S’agissant du projet de résolution, le président de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme demande l’application de l’article 33-11 du Règlement sur les amendements 1 et 3 au projet de résolution qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

En est-il bien ainsi, Madame la vice-présidente ?

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – Tout à fait, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Il n’y a pas d’objection. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

J’en donne lecture :

L’amendement 1, déposé par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 5.2.5, après les mots « des nouveau-nés », à insérer les mots suivants : «, indépendamment de leur situation d’immigration, ».

L’amendement 3, déposé par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, tend, dans le projet de résolution, à remplacer le paragraphe 7.3 par le paragraphe suivant : « à ne pas établir de distinction entre leurs citoyens en fonction du mode d’acquisition de leur nationalité, afin d’éviter l’apparition de différentes classes de citoyens ; »

Nous en arrivons aux autres amendements.

L’amendement 5, déposé par Mmes Čigāne, Lībiņa-Egnere, Taktakishvili, M. Kandelaki, Mmes de Pourbaix-Lundin, Pakosta, M. Hanson, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 4, à supprimer la deuxième phrase.

Mme ČIGĀNE (Lettonie)* – Je propose de supprimer la référence aux différents pays au paragraphe 4, car ces pays ont des situations et des expériences très différentes. Ils sont par ailleurs traités différemment dans le rapport : l’Ukraine n’est pas mentionnée, la Russie très peu et les situations de la Lettonie et de l’Estonie sont expliquées de long en large.

M. McNAMARA (Irlande)* – Il faut faire face aux problèmes dans les pays où ils existent. Dans son excellent rapport, M. Cilevičs entre en détail dans ces problèmes et je crois qu’il faut que nous y fassions face.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L'amendement 5 n'est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 6, déposé par Mmes Taktakishvili, Lībiņa-Egnere, Mateu Pi, Palihovici, MM. Kandelaki, Ghiletchi, Mme Čigāne, tend, dans le projet de résolution, avant le paragraphe 6, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée estime que la délivrance massive, par la Fédération de Russie, de passeports russes à des personnes vivant à l’extérieur de la Fédération de Russie (" passeportisation ") est contraire aux principes du Conseil de l’Europe. L’Assemblée partage l’avis rendu par la Commission de Venise concernant la loi sur la Défense de la Fédération de Russie (CDL-AD(2010)052), et considère que le fait de justifier les actions militaires d’un Etat membre contre d’autres Etats membres par la nécessité de protéger ses propres citoyens est incompatible avec les normes du Conseil de l’Europe ».

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Quand on parle d’accès à la nationalité, il faut se souvenir qu’il y a des pratiques condamnables telles que la distribution massive de passeports par un pays sur le territoire d’un autre. Même si l’idée de M. Cilevičs est juste, nous souhaitons ajouter un élément conceptuel.

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur* – Je suis contre cet amendement, car même si je suis d’accord sur le fond, ce rapport ne porte pas sur la délivrance massive de passeports. Cela ne figure pas dans notre exposé des motifs. Il faudrait un rapport différent sur la « passeportisation ». Si cet amendement est rejeté, cela ne signifie pas que notre Assemblée change sa position sur ce point.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – L’avis de la commission est favorable.

L'amendement 6 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 2, déposé par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, tend, dans le projet de résolution, paragraphe 6, à remplacer les mots « ressortissants étrangers » par le mot « migrants ».

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan), rapporteur pour avis* – Il s’agit de reprendre la terminologie communément acceptée par l’Assemblée sur cette question.

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur* – Je suis vraiment désolé, mais tous les ressortissants étrangers ne sont pas des migrants. Je suis donc contre cet amendement pour des raisons juridiques.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L'amendement 2 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 7, déposé par Mmes Taktakishvili, Lībiņa-Egnere, Mateu Pi, Palihovici, MM. Kandelaki, Ghiletchi, Mme Čigāne, tend, dans le projet de résolution, avant le paragraphe 8, à insérer le paragraphe suivant : « L’Assemblée appelle la Fédération de Russie à cesser la délivrance massive de passeports russes dans d’autres Etats membres et à modifier sa législation sur l’autorisation d’opérations militaires justifiées par la nécessité de protéger ses propres citoyens, conformément à l’avis de la Commission de Venise (CDL-AD(2010)052). »

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Il s’agit d’un amendement conceptuel pour mettre l’accent sur un point lui aussi conceptuel.

LE PRÉSIDENT* – La présidence a été saisie par M. Cilevičs, au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme, du sous-amendement oral suivant :

« À l’amendement n°7, après le mot : “membres”, supprimer les mots “ et à modifier sa législation sur l’autorisation d’opérations militaires justifiées par la nécessité de protéger ses propres citoyens, conformément à l’avis de la Commission de Venise (CDL-AD(2010)052) ”. »

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc examiner ce sous-amendement oral.

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur* – La législation concernant l’autorisation d’opérations militaires n’est pas visée par ce rapport. Si l’amendement était adopté, il conviendrait de s’arrêter après le mot « membres ».

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Je suis favorable à ce sous-amendement oral.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – Avis favorable de la commission.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en revenons à l’amendement 7 ainsi sous-amendé.

M. McNAMARA (Irlande)* – Il s’agit d’un point important qui doit être examiné plus avant par cette Assemblée, mais pas dans ce rapport. Je suis donc contre cet amendement.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – L’avis de la commission est favorable.

L’amendement 7, modifié, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13392, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (64 voix pour, 5 voix contre et 1 abstention)

LE PRÉSIDENT – Nous en venons au projet de recommandation sur lequel deux amendements ont été déposés.

L’amendement 4, déposé par la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, tend dans le projet de recommandation, à la fin du paragraphe 2.2, à ajouter le texte suivant : «, et d’évaluer la pertinence actuelle et continue de la Convention sur la réduction des cas de pluralité de nationalités et sur les obligations militaires en cas de pluralité de nationalités (STE no 43) et de ses protocoles (STE no 95, STE no 96 et STE no 149 ) ; »

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan), rapporteur pour avis* – Cet amendement est défendu.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – La commission saisie sur le fond est pour.

L’amendement 4 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 8, déposé par Mme Strik, MM. Hunko, Villumsen, Franken, de Vries, Mmes Groth, Amtsberg, tend, dans le projet de recommandation, après le paragraphe 2.2, à insérer le paragraphe suivant : « de stimuler et de superviser, en coordination avec le haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, les Etats membres lors de la mise en place d’une procédure d’identification de l’apatridie au niveau national, conformément à l’obligation d’éviter l’apatridie qui leur incombe en vertu de la Convention européenne sur la nationalité ; ».

Mme STRIK (Pays-Bas)* – Les apatrides se heurtent à toutes sortes d’obstacles lorsqu’il s’agit de prouver leur apatridie. Or c’est important de pouvoir le faire pour favoriser l’accès à la nationalité. Le Comité des Ministres devrait donc encourager les Etats membres à instaurer une procédure d’identification de l’apatridie.

Mme REPS (Estonie), vice-présidente de la commission* – La commission est pour.

L’amendement 8 est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous en venons au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 13392 et corrigendum, tel qu’il a été amendé. Je rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté (66 voix pour, 5 voix contre et 0 abstention).

LE PRÉSIDENT – Félicitations aux rapporteurs et merci à tous d’être restés si tard, en particulier les interprètes !

4. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin, à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 20 h 10.

SOMMAIRE

1. Organisation des débats

2. Développements récents en Ukraine : menaces pour le fonctionnement des institutions démocratiques (Débat selon la procédure d’urgence)

Présentation par Mme Reps et Mme de Pourbaix-Lundin, du rapport de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi) (Doc. 13482)

Orateurs : M. Agramunt, Mme Beck, MM. Kox, Flego, Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, Popescu, Lord Anderson, M. Hood, Mme Schneider-Schneiter, M. Pushkov, Mme Khidasheli, MM. Sobolev, O. Shevchenko, Japaridze, Bakradze, Slutsky, Bockel, Harutyunyan, Berdzenishvili, Pylypenko, Rouquet, Petrenco, Chisu, Fournier, Gaudi Nagy, Le Borgn’, Mme Godskesen, M. Kandelaki, Mmes Finckh-Krämer, Čigāne, M. Sudarenkov,

Réponses de Mmes les corapporteures et de M. le président de la commission de suivi

Vote sur un projet de résolution amendé

3. L’accès à la nationalité et la mise en œuvre effective de la Convention européenne sur la nationalité

Présentation par M. Cilevičs, du rapport de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc. 13392 et corrigendum)

Présentation par M. Huseynov, du rapport de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, saisie pour avis (Doc. 13438)

Orateurs : M. Makhmutov, Mme Guţu, M. le Borgn’, Mme Pakosta, M. Frécon, Mmes Čigāne, Jonica, M. Aleksandrov, Mme Strik, M. Maruste, Mme Zimmerman

Réponses de M. le rapporteur et de Mme Reps, vice-présidente de la commission des questions juridiques

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation amendé

4. Prochaine séance publique

Annexe

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque.

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV

Miloš ALIGRUDIĆ*

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON

Luise AMTSBERG*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Khadija ARIB/ Tineke Strik

Volodymyr ARIEV

Francisco ASSIS/Ana Catarina Mendonça

Danielle AUROI/Pierre-Yves Le Borgn'

Daniel BACQUELAINE*

Egemen BAĞIŞ/Suat Önal

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE

Taulant BALLA*

Gérard BAPT/Pascale Crozon

Gerard BARCIA DUEDRA/Silvia Eloïsa Bonet Perot

Doris BARNETT/Mechthild Rawert

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK

Ondřej BENEŠIK/Gabriela Pecková

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Teresa BERTUZZI

Robert BIEDROŃ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Delia BLANCO

Jean-Marie BOCKEL

Eric BOCQUET*

Mladen BOJANIĆ/Snežana Jonica

Olga BORZOVA/Otari Arshba

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR/Claude Adam

Alessandro BRATTI*

Márton BRAUN*

Gerold BÜCHEL/Rainer Gopp

André BUGNON

Natalia BURYKINA

Nunzia CATALFO

Mikael CEDERBRATT/Lennart Axelsson

Elena CENTEMERO

Lorenzo CESA/Milena Santerini

Irakli CHIKOVANI/Tinatin Khidasheli

Vannino CHITI

Tudor-Alexandru CHIUARIU/Viorel Riceard Badea

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Desislav CHUKOLOV*

Lolita ČIGĀNE

Boriss CILEVIČS

Henryk CIOCH/Grzegorz Czelej

James CLAPPISON*

Deirdre CLUNE/ Jim D'arcy

Agustín CONDE

Telmo CORREIA*

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES

Celeste COSTANTINO*

Jonny CROSIO*

Yves CRUCHTEN

Katalin CSÖBÖR*

Milena DAMYANOVA/Irena Sokolova

Joseph DEBONO GRECH*

Armand De DECKER*

Reha DENEMEÇ

Roel DESEYN*

Manlio DI STEFANO

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Aleksandra DJUROVIĆ

Jim DOBBIN

Ioannis DRAGASAKIS

Damian DRĂGHICI*

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Josette DURRIEU

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES

Tülin ERKAL KARA

Franz Leonhard EßL/Andreas Schieder

Bernd FABRITIUS*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU*

Vyacheslav FETISOV

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ/Miroslav Krejča

Ute FINCKH-KRÄMER

Axel E. FISCHER

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Jean-Claude FRÉCON

Béatrice FRESKO-ROLFO

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON

Tamás GAUDI NAGY

Nadezda GERASIMOVA/Olga Kazakova

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Jarosław GÓRCZYŃSKI*

Alina Ştefania GORGHIU

Svetlana GORYACHEVA*

Sandro GOZI*

Fred de GRAAF*

Patrick De GROOTE*

Andreas GROSS

Arlette GROSSKOST*

Dzhema GROZDANOVA

Attila GRUBER*

Mehmet Kasim GÜLPINAR*

Gergely GULYÁS*

Nazmi GÜR

Antonio GUTIÉRREZ

Ana GUŢU

Maria GUZENINA-RICHARDSON

Carina HÄGG

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI*

Hamid HAMID *

Mike HANCOCK*

Margus HANSON/Rait Maruste

Davit HARUTYUNYAN

Alfred HEER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Michael HENNRICH*

Martin HENRIKSEN*

Françoise HETTO-GAASCH

Adam HOFMAN/Zbigniew Girzyński

Jim HOOD

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER/Volkmar Vogel

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO*

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Vitaly IGNATENKO

Vladimir ILIĆ/Vesna Marjanović

Florin IORDACHE/Corneliu Mugurel Cozmanciuc

Igor IVANOVSKI*

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/Marie-Jo Zimmermann

Gediminas JAKAVONIS

Gordan JANDROKOVIĆ

Stella JANTUAN

Tedo JAPARIDZE

Michael Aastrup JENSEN

Frank J. JENSSEN

Jadranka JOKSIMOVIĆ/Katarina Rakić

Ögmundur JÓNASSON

Čedomir JOVANOVIĆ*

Josip JURATOVIC*

Antti KAIKKONEN/Sirkka-Liisa Anttila

Ferenc KALMÁR

Mariusz KAMIŃSKI/Łukasz Zbonikowski

Deniza KARADJOVA*

Marietta KARAMANLI

Ulrika KARLSSON/Kent Härstedt

Jan KAŹMIERCZAK/Tomasz Lenz

Serhii KIVALOV*

Bogdan KLICH/Marek Borowski

Serhiy KLYUEV/Volodymyr Pylypenko

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN/Ingrid Antičević Marinović

Kateřina KONEČNÁ

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Attila KORODI*

Alev KORUN

Tiny KOX

Astrid KRAG*

Borjana KRIŠTO*

Dmitry KRYVITSKY/Evgeny Tarlo

Athina KYRIAKIDOU

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV/Sergey Kalashnikov

Christophe LÉONARD*

Valentina LESKAJ*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Lone LOKLINDT/Nikolaj Villumsen

François LONCLE/Jean-Pierre Michel

George LOUKAIDES*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Trine Pertou MACH

Saša MAGAZINOVIĆ

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI*

Epameinondas MARIAS*

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI/Josep Anton Bardina Pau

Pirkko MATTILA/Jouko Skinnari

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Ivan MELNIKOV*

José MENDES BOTA

Jean-Claude MIGNON

Djordje MILIĆEVIĆ*

Philipp MIßFELDER*

Rubén MORENO PALANQUES*

Igor MOROZOV

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Melita MULIĆ

Lev MYRYMSKYI*

Philippe NACHBAR*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Marian NEACŞU/Florin Costin Pâslaru

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI

Elena NIKOLAEVA

Aleksandar NIKOLOSKI*

Mirosława NYKIEL/Iwona Guzowska

Judith OEHRI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Lesia OROBETS/Andriy Shevchenko

Sandra OSBORNE*

Liisa-Ly PAKOSTA

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI

Dimitrios PAPADIMOULIS/Olga-Nantia Valavani

Eva PARERA/Jordi Xuclà

Ganira PASHAYEVA*

Foteini PIPILI

Stanislav POLČÁK

Ivan POPESCU

Marietta de POURBAIX-LUNDIN

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT/Joe Benton

Jakob PRESEČNIK

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV

Mailis REPS*

Eva RICHTROVÁ

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Pavlo RYABIKIN/Iryna Gerashchenko

Rovshan RZAYEV

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Kimmo SASI

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU

Frank SCHWABE*

Urs SCHWALLER

Laura SEARA

Predrag SEKULIĆ

Ömer SELVİ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV

Jim SHERIDAN

Oleksandr SHEVCHENKO

Bernd SIEBERT/Jürgen Hardt

Arturas SKARDŽIUS/Algis Kašėta

Leonid SLUTSKY

Serhiy SOBOLEV

Lorella STEFANELLI

Yanaki STOILOV*

Karin STRENZ

Ionuţ-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV

Björn von SYDOW/Jonas Gunnarsson

Petro SYMONENKO*

Vilmos SZABÓ*

Chiora TAKTAKISHVILI/Giorgi Kandelaki

Vyacheslav TIMCHENKO/Anvar Makhmutov

Romana TOMC

Lord John E. TOMLINSON/David Crausby

Konstantinos TRIANTAFYLLOS

Mihai TUDOSE*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ

Tuğrul TÜRKEŞ

Konstantinos TZAVARAS/Spyridon Taliadouros

Ilyas UMAKHANOV

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN

Petrit VASILI*

Volodymyr VECHERKO*

Mark VERHEIJEN/Pieter Omtzigt

Birutė VĖSAITĖ

Anne-Mari VIROLAINEN/Jaana Pelkonen

Vladimir VORONIN/Grigore Petrenco

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON/Jeffrey Donaldson

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER*

Morten WOLD/Ingebjørg Godskesen

Gisela WURM

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ

Barbara ŽGAJNER TAVŠ*

Emanuelis ZINGERIS

Guennady ZIUGANOV/Alexander Burkov

Naira ZOHRABYAN/Naira Karapetyan

Levon ZOURABIAN/Mher Shahgeldyan

Siège vacant, Chypre*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Chiora TAKTAKISHVILI

Observateurs

Sean CASEY

Corneliu CHISU

Percy DOWNE

Ernesto GÁNDARA CAMOU

David TILSON

Nycole TURMEL

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Bernard SABELLA

Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Tahsin ERTUĞRULOĞLU