FR14CR33

AS (2014) CR 33

SESSION ORDINAIRE DE 2014

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-troisième séance

Mercredi 1er octobre 2014 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

4.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 30 sous la présidence de Mme Brasseur, Présidente de l'Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

La parole est à M. Hancock, pour un rappel au Règlement.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – Au cours de la réunion de la commission des questions politiques, qui vient de se terminer, la délégation arménienne a malheureusement dit qu’elle ne coopérerait pas avec le collègue désigné par la commission pour rendre un rapport sur le Haut-Karabakh. Puis-je vous demander d’intervenir auprès de cette délégation, Madame la Présidente, afin qu’elle reconsidère sa décision ? Il n’est dans l’intérêt de personne qu’elle campe sur cette position, mais, si elle refuse vraiment de coopérer, puis-je demander que le Bureau examine la question et se penche sur les pouvoirs de cette délégation ?

LA PRÉSIDENTE – Merci, Monsieur Hancock. Je transmettrai ces questions au Bureau, qui se réunira vendredi matin.

1. Le fonctionnement des institutions démocratiques en Géorgie (suite)

LA PRÉSIDENTE – Nous reprenons notre débat sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Géorgie.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission pour le respect des obligations et engagements des Etats membres (commission de suivi)* – J’aimerais remercier l’Assemblée. Le débat fut très intéressant et, par moments, chargé en émotions.

Je représente la commission de suivi, qui a discuté de ce rapport hier, mais, en tant que président de la commission, je me sens responsable de tous les rapporteurs de celle-ci et je dois leur apporter mon soutien.

Vous savez quelle a été la position de la commission, et que les rapporteurs y étaient opposés. Ce n’est pas la première fois dans l’histoire de l’Assemblée parlementaire – je vous le rappelle – que nous nous retrouvons dans la situation où les rapporteurs doivent voter contre leur propre rapport. Je vous propose, dès lors, de renvoyer ce rapport devant la commission de suivi, afin que les rapporteurs puissent soutenir leur position. S’ils ne peuvent plus défendre leur propre rapport, je pense qu’il est normal de leur donner la possibilité d’en redébattre en commission.

LA PRÉSIDENTE – La parole est à M. Kandelaki, pour un rappel au Règlement.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Je souhaite simplement vous informer, Madame la Présidente, que le Premier ministre géorgien a fait, il y a une demi-heure, une déclaration publique selon laquelle il est d’accord avec le Conseil de l’Europe pour supprimer les points critiques de la résolution, qui ont pourtant été adoptés par une majorité écrasante de la commission. Je crois que la commission s’est forgée une opinion, l’a exprimée très clairement par vingt-cinq voix contre deux. Ce serait manquer de respect envers la commission que de retirer le rapport à ce stade de la discussion.

LA PRÉSIDENTE – La parole est à Sir Roger Gale, pour un rappel au Règlement.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Mon rappel au Règlement porte sur la même question. On vient de me montrer une copie de ce courrier électronique, qui est honteux. Le fait qu’un homme politique, quel qu’il soit, qui n’est pas membre de l’Assemblée, sur le sort d’un rapport est totalement inacceptable. Je pense que ce courrier électronique devrait être publié et que nous devrions immédiatement mettre aux voix les amendements acceptés par la commission.

M. JENSEN (Danemark), corapporteur de la commission de suivi* – Nous n’avons pas vu cette intervention du Premier ministre géorgien, mais une certain confusion règne à propos de la question de savoir ce qu’il aurait ou n’aurait pas dit. Les deux corapporteurs sont d’accord avec la proposition du président de la commission. Cela nous permettrait de voir ce que le Premier ministre géorgien a ou n’a pas dit.

Au vu de la situation et de la confusion ambiante, nous acceptons donc la proposition de renvoi en commission.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Je demande la parole pour un rappel au Règlement !

LA PRÉSIDENTE – Nous sommes donc saisis d’une proposition de retrait au plus tôt du rapport et de renvoi en commission.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Me refusez-vous la parole pour un rappel au Règlement, Madame la Présidente ?

LA PRÉSIDENTE – Non, Monsieur Binley. Je souhaite simplement expliquer la procédure, laissez-moi un instant.

En présence d’une telle proposition, je considère qu’il revient à l’Assemblée de décider, en votant. Notre Règlement – je le dis sous le contrôle du Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire – laisse la possibilité à une personne de s’exprimer en faveur de la proposition et à une autre de s’exprimer contre.

La parole est à M. Binley, pour un rappel au Règlement.

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Merci pour cette précision, Madame la Présidente, mais je voulais dire que nous sommes une assemblée adulte, mature, composée d’élus qui ont beaucoup d’expérience. Il serait bon que nous examinions le rapport comme nous devions le faire, que nous écoutions les corapporteurs et que nous entendions l’avis de la commission sur chacun des amendements. Cela nous permettra de nous déterminer sans que ce rapport retourne en commission.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Agramunt, pour un rappel au Règlement.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – Nous avons entendu nos collègues, et deux d’entre eux nous ont dit que la commission de suivi avait voté, à une très large majorité, ce rapport. Il ne faut donc pas le remettre en question. Et j’espère que l’Assemblée l’approuvera également.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Hancock, pour un rappel au Règlement.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – J’avais le sentiment que le renvoi d’un rapport en commission devait se faire avant le débat ou au moment où l’ordre du jour de la semaine est arrêté. C’est en tout cas ce que l’on nous a expliqué par le passé.

LA PRÉSIDENTE* – Tel n’est pas le cas, Monsieur Hancock. Le renvoi peut se faire jusqu’au moment du vote final sur le projet de résolution.

Je suis donc saisie d’une requête visant à renvoyer le rapport devant la commission de suivi.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Je suis contre ce renvoi en commission. Ce rapport a été débattu conformément au Règlement. Il appartient donc désormais, non plus à la commission de suivi, mais à l’Assemblée. Une série d’amendements ont été présentés, dont la quasi-totalité ont été approuvés par la commission de suivi. Il serait donc malheureux de renvoyer le rapport en commission à ce stade. Il faut procéder au vote sur les amendements et nous respecterons les résultats de la manière la plus démocratique qui soit.

La demande de renvoi n'est pas adoptée.

LA PRÉSIDENTE – La commission de suivi a présenté un projet de résolution sur lequel 34 amendements et 5 sous-amendements ont été déposés. 1

Le président de la commission de suivi demande l’application de l’article 34.11 du Règlement sur les amendements 28, 5 et 6 qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission.

Les amendements 4 et 3 ont également été adoptés à l’unanimité par la commission ; toutefois, des sous-amendements écrits ayant été déposés sur ces derniers, ils ne pourront pas faire l’objet de la procédure prévue à l’article 34-11 et seront discutés selon les modalités habituelles.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, les amendements 28, 5 et 6 sont déclarés définitivement adoptés.

Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Je suis saisie de l’amendement 7.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Au premier paragraphe du projet de résolution il me semble nécessaire d’établir une différence entre les élections législatives de 2012, qui n’ont pas été justes et équitables, et l’élection présidentielle de 2013, qui s’est déroulée démocratiquement et conformément aux normes européennes.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – La commission a rejeté à une très grande majorité cet amendement. Ceux qui étaient présents lors des élections législatives savent qu’elles se sont déroulées démocratiquement. Je suis donc contre cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L'amendement 7 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Mme Magradze m’a fait savoir qu’elle souhaitait retirer l’amendement 8.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Effectivement !

L’amendement 8 est retiré.

LA PRÉSIDENTE - Je suis saisie de l’amendement 24.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – Nous souhaitons que le projet de résolution reflète la réalité. Or la réalité, c’est que les militants et les sympathisants du parti d’opposition, le MNU, ont été régulièrement interrogés et intimidés par divers organes d’enquête. Cela a été confirmé par plusieurs ONG, dont Transparency International.

M. JENSEN (Danemark), corapporteur* – Je suis contre cet amendement, car nous avons parlé de cette question au paragraphe 9 du rapport. Nous sommes très francs dans notre façon de relater les événements, mais équilibrés. Il n’est donc pas nécessaire d’ajouter cette phrase au projet de résolution.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est favorable.

L'amendement 24 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 25.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – Une fois encore, nous souhaitons que le projet de résolution reflète la réalité. Or au cours des deux dernières années, des anciens dirigeants du parti au pouvoir ont été arrêtés et font l’objet de poursuites. Cela doit être mentionné dans texte qui est soumis au vote de l’Assemblée.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Cet amendement mentionne les différentes arrestations ou poursuites intervenues depuis deux ans, mais il essaye également de saper le sens du paragraphe 2, modifiant totalement le fond du rapport et la pensée des corapporteurs. Je suis donc totalement opposé à ce paragraphe. Il aurait été possible de développer ce sujet ailleurs.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de la commission* – La commission émet un avis favorable.

L’amendement 25 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 30.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Les réformes citées au paragraphe 5 ne peuvent pas être considérées comme de véritables réformes. En effet, le gouvernement géorgien a été bombardé de critiques contrairement à ce qui figure dans ce paragraphe. C’est la raison pour laquelle je vous propose de le supprimer.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Je vais contredire mon collègue qui estime que l’opposition veut empêcher les avancées réalisées par la Géorgie alors même qu’elles ont été reconnues, entre autres institutions, par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de la commission* – La commission a émis un avis favorable.

L’amendement 30 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 33.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – C’est un fait public et confirmé par des déclarations officielles de l’actuel Premier ministre et de ministres que M. Ivanischvili, alors qu’il n’est plus au gouvernement, continue de prendre des décisions. À un expert qui le contredisait, il a déclaré qu’il allait le renvoyer.

M. JENSEN (Danemark), corapporteur* – Nous sommes contre cet amendement qui indique qu’en sa qualité d’ancien premier ministre, M. Ivanishvili est considéré comme consultant par le gouvernement actuel. Dans nos pays européens, il est légal qu’un gouvernement consulte qui il souhaite. Si nous acceptions cet amendement, cela reviendrait à dire que nous sommes inquiets parce que le gouvernement actuel discute avec son prédécesseur, ce qui va à l’opposé de nos valeurs.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de la commission* – La commission émet un avis favorable.

L’amendement 33 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 9. Si cet amendement était adopté, l’amendement 26 serait sans objet.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – La réforme judiciaire est en cours en Géorgie. L’indépendance des juges est une priorité pour le gouvernement ; elle s’accompagne de la dépolitisation du processus de nomination, conformément aux recommandations de la Commission de Venise.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Le fait que tous les dirigeants du parti de l’opposition soient en prison ou poursuivis démontre la fausseté des assertions contenues dans l’amendement.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de commission* – La commission est contre.

L’amendement 9 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 26.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – En sus des anciens membres du gouvernement, nous voulons que l’on ajoute les personnalités de l’opposition.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie du sous-amendement 1 par la commission.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Nous sommes d’accord sur le fond, mais nous proposons un sous-amendement qui vise à apporter une précision : il ne s’agit pas de toutes les personnalités de l’opposition, mais plutôt de figures de premier plan de l’opposition. Si ce sous-amendement est adopté, nous voterons l’amendement.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – J’accepte le sous-amendement.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de la commission* – La commission est favorable au sous-amendement.

Le sous-amendement 1 est adopté.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Ce débat sur le projet de résolution est un véritable fouillis !

Certes, des figures de premier plan de l’opposition ont été arrêtées et le Conseil de l'Europe en prend note. Mais après avoir adopté l’amendement précédent, maintenant nous essayons d’aller plus loin en précisant que ces personnalités sont membres de l’opposition. Non ! Les griefs qui leur sont faits ne sont pas liés à leurs activités en tant que leaders de l’opposition, mais en tant que membres du gouvernement précédent.

M. SCHENNACH, (Autriche) président de la commission* – La commission émet un avis favorable.

L’amendement 26, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 10.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – En 2010, un rapport du Conseil de l'Europe portant sur le système judiciaire en Géorgie était très négatif. Aujourd’hui, les mêmes juges sont en place. Nous pensons que les juges doivent être assujettis à une période probatoire de trois ans avant leur nomination, ainsi que c’est le cas en Bulgarie, en Hongrie et dans bien d’autres pays européens.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – L’Assemblée, par cohérence, demande que cette période probatoire soit réduite dans tous les pays où elle est appliquée. C’est du reste la position de la Commission de Venise.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L'amendement 10 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 11.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – L’utilisation de la détention provisoire en Géorgie n’est plus aussi largement répandue que l’affirme le projet de résolution : de quarante-six en 2012, le nombre de cas est tombé à vingt-six cette année.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Une grande majorité des ONG crédibles soulignent que la détention provisoire est un véritable problème. Le fait qu’un grand nombre des figures de premier plan de l’opposition aient été mises en détention provisoire cinq jours avant les élections révèle des buts politiques.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L'amendement 11 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 31.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – L’amendement 31 vise à rappeler qu’il est inacceptable que les détentions provisoires puissent être utilisées dans un but politique.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Je ne m’insurge pas contre cette idée, qui est évidente mais cet amendement n’est pas bien placé : il faut le présenter dans le paragraphe qui rappelle les conditions proposées notamment par la Commission de Venise.

Pour des raisons de clarté, il convient de rejeter l’amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L'amendement 31 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Mme Magradze m’a fait savoir qu’elle souhaitait retirer l’amendement 12.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Oui, Madame la Présidente.

L’amendement 12 est retiré.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 27.

M. OMTZIGT (Pays-Bas)* – Cet amendement se réfère à des cas récents, selon lesquels des avoirs ont été gelés alors que les accusations ne les concernaient pas. Même les avoirs de membres de la famille des personnes visées ont été gelés : il en est ainsi des actifs non seulement de l’ancien président, mais également de ceux de son épouse et de sa mère – notamment la voiture de celle-ci. Cela ne devrait pas se produire.

Cela dit, il est possible de supprimer le mot « généralisé ».

M. JENSEN (Danemark), corapporteur* – M. Omtzigt m’a ôté les mots de la bouche puisqu’il reconnaît que ce phénomène n’est pas généralisé. Nous n’avons pas eu connaissance de faits allant en ce sens. Si cet amendement est adopté, il affirmera donc une chose contraire à la réalité observée.

Je le répète : si nous savons que la famille de l’ancien président est concernée, ce qui est préoccupant, c’est vrai, nous n’avons aucune preuve qu’il existe un « recours généralisé » au gel des avoirs de membres de la famille de personnalités de l’opposition et d’anciens responsables gouvernementaux. Cette expression « recours généralisé »n’a pas de justification objective..

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L'amendement 27 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 32.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Souligner que l’Assemblée « salue les réformes des services de maintien de l’ordre engagées par les autorités » serait pour le moins excessif, non seulement parce qu’un grand nombre de responsables politiques sont en prison, mais également parce que de nombreux rapports révèlent des cas de torture ou des meurtres de témoins.

Il ne faut pas encourager des services qui dysfonctionnent.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Je ne suis pas d’accord avec mon estimé collègue géorgien membre de l’opposition – cela ressemble, à tort, à un différend entre deux partis de la délégation géorgienne.

Le gouvernement fait de son mieux en procédant à des réformes pour rétablir le service de maintien de l’ordre et lutter contre la corruption : cela, toutefois, demande du temps.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L'amendement 32 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Mme Magradze m’a fait savoir qu’elle souhaitait retirer l’amendement 13.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Oui, Madame la Présidente.

L’amendement 13 est retiré.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisi de l’amendement 14.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Le gouvernement a mis en œuvre des réformes importantes pour assurer le pluralisme et la transparence, s’agissant notamment du processus de nomination du service public de radiodiffusion.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – L’année dernière, l’Assemblée parlementaire, dans une de ses résolutions, a exprimé sa préoccupation relativement au service public de radiodiffusion : plusieurs rapports d’ONG indiquaient qu’un agent de renseignement travaillait dans ce service pour peser sur sa ligne éditoriale. J’avais demandé au parlement de mon pays si c’était vrai : il m’a été répondu que je n’avais pas le droit de poser la question et qu’en conséquence on ne me répondrait pas.

Il faut donc rejeter cet amendement tout simplement parce que ce qu’il affirme est faux.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est défavorable à l’amendement.

L'amendement 14 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Les amendements 15 et 16 ont été retirés.

Je suis saisie de l’amendement 17, déposé par Mme Magradze. J’ai cru comprendre qu’il pourrait être retiré si un amendement oral de conciliation présenté par la commission était examiné juste avant l’amendement 3. Est-ce bien le cas ?...

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – En effet, je retire cet amendement.

L’amendement 17 est retiré.

LA PRÉSIDENTE – Nous en venons donc à l’amendement 18.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Selon le Comité des droits de l’homme des Nations Unies, le Gouvernement géorgien s’est engagé à respecter ses engagements internationaux en garantissant le respect de l’Etat de droit et l’exercice public de la responsabilité s’agissant des violations des droits de l’homme commises par le passé.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – L’amendement proposé par ma collègue commence par les mots « personne n’est au-dessus des lois ». Nous avons déjà entendu ces paroles prononcées par un grand nombre de régimes autoritaires qui réprimaient l’opposition. N’autorisons pas cela en Géorgie.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est défavorable.

L’amendement 18 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 4, sur lequel le sous-amendement 1 a été déposé.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – En fait, cet amendement vise des faits intervenus après la rédaction du rapport au mois de juin. Les poursuites engagées à l’encontre de l’ancien président Saakachvili sont un fait qui doit être mentionné ici, mais nous avons choisi d’utiliser des termes neutres.

Nous en appelons encore une fois à nos amis géorgiens pour qu’ils agissent dans le plein respect de nos principes.

LA PRÉSIDENTE – Nous en venons au sous-amendement.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Ce sous-amendement vise à garantir le respect des principes qui viennent d’être évoqués par M. Cilevičs, c’est-à-dire qu’il faut recourir à une formulation parfaitement neutre, et ce, non seulement à l’égard de l’ancien président, M. Saakachvili, mais aussi à l’égard de tout responsable politique qui pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires. Il s’agit de faire en sorte qu’ils bénéficient d’une procédure régulière. Tous doivent être traités de la même manière.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – C’est très bien d’adopter un langage neutre, mais ce sous-amendement dilue totalement le sens de notre propos. Nous avons choisi avec précision les mots que nous voulions utiliser. Il s’agit bien des poursuites à l’encontre de l’ancien président. Nous ne voulons pas nous contenter d’une formulation vague et générale.

Je m’oppose donc au sous-amendement.

Le sous-amendement 1  n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous en revenons à l’amendement 4.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Tout d’abord, j’aimerais souligner que j’approuve entièrement le propos de M. Cilevičs. Malheureusement, bien des choses que vous ne vouliez pas dire ont déjà été incluses dans le texte et, pour ce qui est de cet amendement, je pense qu’il aurait été préférable de généraliser le propos afin qu’il s’applique à tous. Contre l’amendement, donc.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – L’avis de la commission est favorable à l’unanimité.

L’amendement 4 est adopté.

LA PRÉSIDENTE - Je suis saisie par la commission d’un amendement oral de conciliation. Est-ce bien cela, Monsieur le président ?

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – C’est cela même.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Cet amendement fait partie du compromis général sur l’amendement 17. Le fait nouveau qui mérite d’être cité est que ces procès sont suivis, contrôlés. C’est un point important que nous avions négligé. Il ne s’agit pas de se prononcer sur le fond, mais simplement d’évoquer ce fait.

LA PRÉSIDENTE – Permettez-moi auparavant de donner lecture de cet amendement oral.

Il tend, après le paragraphe 10.5, à insérer le paragraphe suivant :

« L’Assemblée prend note que ces jugements sont suivis par les organisations internationales ainsi que par les organisations de la société civile. »

Je considère cet amendement oral comme recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentant ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Y a-t-il des objections à la prise en compte de cet amendement oral ?...

Je constate que le nombre de parlementaires qui se sont levés ne suffit pas. L’amendement oral…

M. BINLEY (Royaume-Uni)* – Madame la Présidente, vous nous avez demandé de nous lever, mais nous n’avons pas eu le temps de réagir après la lecture du texte de l’amendement. Plusieurs collègues ont eu besoin d’un peu de temps et finalement se sont levés. J’ai constaté qu’il y avait plus de dix personnes debout.

LA PRÉSIDENTE – Vous avez raison, c’est la raison pour laquelle j’ai attendu.

Plus de dix personnes se sont levées. J’en conviens, il faut du temps puisque je lisais le texte en français et que plusieurs d’entre vous doivent écouter l’interprétation. Cela crée un petit décalage dans le temps, j’en suis d’accord avec vous.

Nous n’allons donc pas examiner cet amendement oral de conciliation.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Madame la Présidente, vous n’avez pas demandé si un parlementaire s’opposait à cet amendement oral. Personne ne s’est exprimé contre.

LA PRÉSIDENTE – Si plus de dix membres de l’Assemblée s’y opposent, je ne peux laisser prendre en compte un amendement oral. C’est le Règlement de l’Assemblée. Je dois l’appliquer.

Je suis saisie de l’amendement 3.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Une fois encore, cet amendement reflète les évolutions intervenues depuis la rédaction du rapport. Nous n’avons pas suivi les élections municipales en Géorgie mais plusieurs rapports, dont celui du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, nous permettent de nous prononcer.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie d’un sous-amendement.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Nous demandons que soient supprimés les mots « persistantes » et « de l’opposition ». Les tentatives d’intimidation n’ont pas concerné seulement des candidats de l’opposition mais aussi des candidats du parti au pouvoir.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Les allégations sur ces tentatives de pression et d’intimidation sont malheureusement persistantes et n’ont concerné que des candidats de l’opposition. Je suis donc opposé à ce sous-amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis favorable.

Le sous-amendement est adopté.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission a émis un avis unanimement favorable sur l’amendement.

L'amendement 3, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – J’ai cru comprendre que Mme Magradze souhaitait retirer l’amendement 19.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – En effet, je retire cet amendement.

LA PRÉSIDENTE – L’amendement 19 est retiré.

Je suis saisie de l’amendement 34.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Cet amendement souligne l’absence d’enquêtes et de poursuites efficaces concernant les infractions motivées par la haine à l’encontre des minorités. Une personne a récemment été crucifiée sur la porte d’une madrasa. L’auteur de ce crime n’a été puni que d’une légère amende.

M. CHIKOVANI (Géorgie)* – Je regrette, mes chers collègues, de vous imposer ce débat interne à la Géorgie, mais il semble bien que nous ne puissions pas l’éviter. La Géorgie est un pays tolérant à l’égard des minorités. Il existe sans doute des difficultés s’agissant des minorités religieuses mais une nouvelle loi vient d’être adoptée pour lutter contre les discriminations. La Géorgie fait de son mieux. Evitons de mettre toujours en avant les crimes de haine. Cela ne nous fait pas avancer dans le bon sens.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis favorable.

L'amendement 34 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 2.

M. DİŞLİ (Turquie)* – La communauté musulmane souhaite construire de nouvelles mosquées. Nous demandons à la Géorgie d’accepter cette demande. Tel est le sens de l’amendement.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Bien que reconnaissant les bonnes intentions contenues dans cet amendement, je désapprouve son libellé par trop radical. Le paragraphe ne porte pas sur les droits des minorités religieuses mais sur l’intolérance et la discrimination. En outre, certaines conditions établies par la loi doivent d’abord être réunies pour pouvoir répondre à cette demande. Je suis donc opposé à l’amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Avis défavorable.

L'amendement 2 n'est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 20.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Des crimes pour des motifs ethnique, sexuel ou religieux se produisent en Géorgie comme ailleurs. Chacun d’entre eux fait l’objet d’une enquête.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie d’un sous-amendement.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – La commission ne peut accepter la première phrase de cet amendement. Nous ne sommes pas satisfaits des enquêtes qui sont menées en Géorgie. Nous proposons donc, dans ce sous-amendement, que seule la seconde phrase de cet amendement soit retenue et qu’il y soit supprimé le mot « également ».

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – J’approuve ce sous-amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* Avis favorable sur le sous-amendement et l’amendement.

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement 20, ainsi sous–amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 1.

M. DİŞLİ (Turquie)* – La population dont il s’agit a toujours été appelée « Turcs meskhètes » – ou « Turcs ahiska » –, dans nos textes comme dans ceux des autres organisations internationales.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Il s’agit d’une question sensible car la communauté meskhète elle-même est divisée quant à l’appellation à adopter. Voilà pourquoi, depuis 2010, notre Assemblée a décidé d’utiliser une expression neutre en parlant de « la population meskhète » ou de « la population meskhète déportée ». Il me paraît préférable que nous nous en tenions à cette tradition. Je suis donc opposé à cet amendement.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est également contre.

L’amendement 1 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 21.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – Ceux qui ont demandé la citoyenneté géorgienne l’ont obtenue.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – Cette affirmation n’est pas corroborée par les faits. Les ONG de défense des Meskhètes, avec lesquelles nous sommes en contact permanent, font état de nombreuses plaintes portant sur la mise en œuvre de la procédure d’octroi de la citoyenneté. Je suis opposé à l’amendement, car nous ne devons pas insérer une assertion non prouvée dans une résolution de l’Assemblée parlementaire.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est également contre.

L’amendement 21 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE – Je suis saisie de l’amendement 22 qui fait l’objet d’un sous-amendement de la commission.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – L’amendement 22 prend acte de l’adoption de la Stratégie nationale sur le rapatriement par le Gouvernement de Géorgie le 12 septembre dernier.

M. CILEVIČS (Lettonie), corapporteur* – C’est un événement très important, mais le document est trop récent pour que nous ayons pu l’examiner. Il faut assurément le mentionner dans le texte, mais sans supprimer notre recommandation de mettre en œuvre une stratégie pour le rapatriement. Tel est le sens de notre sous-amendement.

Mme MAGRADZE (Géorgie)* – D’accord.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est naturellement favorable à ce sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement modifié.

L’amendement 22, sous-amendé, est adopté.

L’amendement 23 est retiré.

LA PRÉSIDENTE - Je suis saisie de l’amendement 29.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – Le dernier paragraphe doit être cohérent avec le reste de la résolution. Au vu des nombreux amendements dont le texte a fait l’objet, il me paraît nécessaire d’ajouter que les progrès réalisés en Géorgie, que nous relevons, sont « terni[s] par l’arrestation et la poursuite en justice de la quasi-totalité de la direction de l’ex-parti gouvernemental », etc. Cela reflétera bien notre travail. Tel est le sens de l’amendement 29.

M. JENSEN (Danemark), corapporteur* – Contre l’amendement. Nous traitons cette question dans le rapport, dans le paragraphe 4 de la version mise à jour. Nous avons dit très franchement ce que nous pensions du gouvernement. Toutefois, sur cette question très sensible, nous devons nous montrer équilibrés : nous n’acceptons pas la justice sélective, mais nous ne voulons pas non plus que quiconque puisse devoir sa libération à ses anciennes fonctions.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L’amendement 29 est adopté.

LA PRÉSIDENTE – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13588, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (103 voix pour, 27 voix contre et 8 abstentions).

2. La crise en Ukraine (débat d’actualité)

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle un débat d’actualité sur la crise en Ukraine.

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé dans sa séance de lundi, d’une part, de porter la durée du débat d’actualité d’une heure et demie à trois heures et, d’autre part, de limiter le temps de parole des orateurs à trois minutes.

M.  Schennach, premier orateur désigné par le Bureau, va ouvrir le débat et disposera de dix minutes. Ensuite interviendront les porte-parole des groupes, puis M.  Muižnieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, que je salue et remercie de prendre part à notre débat. Nous entendrons enfin les autres orateurs inscrits.

La liste des orateurs a été close à 12 heures.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Chers collègues, depuis le début de l’année, le Conseil de l’Europe fait face à un défi majeur, une crise considérable. L’Assemblée parlementaire s’y est intéressée lors de nombreuses réunions. La commission de suivi, une sous-commission, les deux rapporteures – qui se sont rendues près de trois mois en Ukraine - le Secrétaire Général et le Comité des Ministres qui se sont récemment exprimés en faveur du retrait de toutes les troupes du territoire, la Conférence ministérielle de Vienne, la présidence du Comité des Ministres, la Présidente de l’Assemblée parlementaire, plusieurs missions de cette Assemblée, tous ont cherché à défendre et à rétablir les valeurs du Conseil de l’Europe.

Il s’agit ici de la souveraineté d’un Etat membre et d’un conflit entre Etats membres du Conseil de l’Europe, lequel n’a pas d’armée mais des valeurs, que chaque Etat membre s’est engagé à respecter. Nous ne pouvons donc pas accepter une agression de la part de l’un d’entre eux ni un conflit entre deux Etats membres.

Au début, il y eut une réaction de la population ukrainienne, des protestations face à une corruption insoutenable, à une absence totale de confiance dans la politique du pays et à de sérieux dysfonctionnements de la justice. On constatait le non-fonctionnement d’un système politique sapé par un grand nombre d’oligarques et les difficultés de la vie quotidienne, d’où l’appel à la réforme. Nous avons tous été témoins de ces manifestations très impressionnantes sur le Maïdan. Nous avons alors assisté au démantèlement d’un système.

Les gens qui s’étaient réunis sur le Maïdan souhaitaient des réformes ; celles-ci sont toujours aussi nécessaires. Le pays a besoin de réformes, mais aussi de stabilité économique et politique, et surtout de sécurité. La population demandait une décentralisation de ce gigantesque pays, le rétablissement et la protection des droits de l’homme et des minorités. Hélas, des Ukrainiens et Ukrainiennes ont péri par milliers dans des combats auxquels participent de la manière la plus agressive qui soit des troupes étrangères.

En aucune manière, le Conseil de l’Europe ne peut accepter cette situation. Un pays, Etat membre du Conseil de l’Europe, déstabilise son voisin et cherche à saper sa souveraineté. Des troupes étrangères ont été envoyées sur le territoire du pays voisin, c’est totalement inacceptable. Des facteurs internes ont bien sûr facilité cela : le non-fonctionnement structurel d’un Etat, la faiblesse des institutions, la corruption, les intérêts des oligarques…

Nous avons besoin aujourd’hui d’un cessez-le-feu immédiat et total, d’un retrait inconditionnel de tous les soldats étrangers et simultanément d’un dialogue avec des négociations dans le pays entre les partis politiques, la société civile, les régions et les minorités. En même temps, il faut un dialogue entre l’Ukraine et son voisin, la Russie.

Nous devons élucider tous les cas de crimes de guerre intervenus, sans laisser la moindre zone d’ombre. Tous les coupables devront répondre de leurs actes. Nous devons exiger le rétablissement immédiat de la souveraineté et du contrôle des frontières de l’Ukraine. Nous exigeons aussi un libre accès et une liberté de circulation pour les observateurs du Conseil de l’Europe ou de l’OSCE.

Au nom de la commission de suivi, j’ai examiné tous les textes de lois adoptés en septembre et je les ai transmis pour avis à la Commission de Venise. Dans une intervention ici même en avril, j’ai déclaré : « Il faut que la question de l’autonomie de structures décentralisées soit considérée comme la clé de la solution. Nous le voyons bien en Europe, que ce soit en Allemagne, en Italie, en Suisse, en Autriche, en Espagne ; partout où on trouve des structures décentralisées qui ensemble défendent l’Etat, cela fonctionne. »

Ce sont des exigences que nous devons imposer en tant que Conseil de l’Europe, seul acteur international n’ayant pas d’intérêts géostratégiques. Nous ne sommes pas comme l’Union européenne ou l’Alliance atlantique. À nous de réclamer le rétablissement des valeurs que nous défendons : l’Etat de droit, la démocratie et les droits de l’homme.

Nous sommes à la veille de l’hiver. La catastrophe humanitaire qui s’annonce dans l’est du pays devrait nous alarmer. Dans cette région, il n’y a plus d’électricité ni de gaz pour se chauffer. Le marché alimentaire a explosé. Nous sommes donc à la veille d’une catastrophe majeure !

La Russie devra bien comprendre que de partenaire, elle est devenue acteur. Elle a perdu la confiance des Etats membres et de la communauté internationale. Elle peut la rétablir en faisant ce qui est demandé : retrait des troupes, rétablissement de la souveraineté, mise en œuvre des valeurs du Conseil de l’Europe. Il ne doit plus y avoir de guerre froide en Europe. Cette idée était le point de départ de toutes nos activités.

C’est pourquoi, nous, Conseil de l’Europe, devrons continuer à œuvrer dans l’intérêt de tous et fournir des efforts concertés pour surmonter cette difficulté et rétablir la souveraineté de l’un de nos Etats membres.

LA PRÉSIDENTE – Merci beaucoup, Monsieur Schennach, pour cette excellente introduction.

Mme L’OVOCHKINA (Ukraine), porte-parole du Groupe démocrate européen* – Madame la Présidente, chers collègues, un conflit interne, l’intervention de la Fédération de Russie, l’annexion de la Crimée, les conséquences d’une guerre non déclarée, des milliers de victimes, des morts, des blessés, des milliers d’otages, de réfugiés, une chute dramatique du PIB, un déficit budgétaire gigantesque, une crise économique, la détérioration des normes sociales, le chômage, des infrastructures en ruine : voilà quelle est la situation en Ukraine ! C’est tragique, et cela ne fait qu’empirer.

Comme je manque de temps, je n’évoquerai que deux problèmes. Comme vous le savez, j’ai été élue en Ukraine. Eh bien, je n’ai plus de circonscription, aujourd’hui ! À la suite de la tragédie de Donetsk et de Lougansk, l’annexion de la Crimée est devenue une question de dernier plan. Le Président et le Gouvernement de l’Ukraine se contentent de faire des déclarations et de rappeler que la Crimée est un territoire ukrainien, mais il n’y a pas de politique nationale efficace pour protéger les intérêts des Ukrainiens qui vivent en Crimée. Il n’y a pas de véritable stratégie pour rendre ce territoire à l’Etat national. Or vous savez qu’il y a, en Crimée, des Tatars et d’autres citoyens qui souffrent au quotidien.

Des élections parlementaires extraordinaires vont être organisées, mais la Crimée n’y participera pas. Des amendements à la loi électorale ont été proposés pour permettre aux Ukrainiens de Crimée de voter, mais ils n’ont pas été adoptés. La Crimée ne sera donc pas représentée dans ce nouveau parlement. Parallèlement, des élections à la Douma d’Etat de Russie vont avoir lieu. Quel message envoyons-nous donc à ces citoyens ukrainiens de Crimée ? Et quel message envoyons-nous à M. Poutine ?

Cela m’amène à la deuxième question. Il est crucial que les élections à venir se déroulent dans le respect des normes européennes et sans interférence du pouvoir administratif. Le nouveau parlement devra être légitime aux yeux des Ukrainiens et sur tout le territoire ukrainien. Il devra l’être aussi – lui et le gouvernement qui sera formé – pour le reste du monde, y compris la Russie, pour que des négociations puissent avoir lieu.

Non seulement la Crimée ne va pas voter, mais la situation de Donetsk et de Lougansk est difficile. Si ces deux régions ne sont pas vraiment représentées dans le nouveau parlement, la crise ne fera que s’aggraver. Et quelle légitimité aura le nouveau parlement pour les gens de l’est de l’Ukraine ?

Et puis il y a des bandits armés dans les rues de toutes les grandes villes. Les candidats qui font campagne sont attaqués, frappés, on casse leur voiture et les autorités ne font rien pour protéger les candidats de l’opposition ou pour faire comparaître en justice les responsables de ces exactions.

Mme REPS (Estonie), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – En Ukraine, il y a clairement, aujourd’hui, une crise à trois niveaux.

Il y a une crise du point de vue de l’ordre international, c’est-à-dire en raison des faits commis par un pays vis-à-vis d’un autre. Aujourd’hui, je pense que personne, dans cet hémicycle, ne doute de la présence de troupes russes sur le territoire ukrainien, et il est également clair que les dégâts n’auraient pas été tels si des armes lourdes russes n’avaient pas été employées.

Il y a aussi un conflit, qui appelle un règlement pacifique. Il est essentiel que l’Assemblée apporte son soutien à toute solution pacifique de nature à réunifier l’Ukraine. Qu’est-ce que cela veut dire ? Eh bien, c’est restaurer l’ordre public, rétablir la confiance dans les autorités, réformer le pouvoir judiciaire. Si le système national est fort, si la population peut avoir confiance, eh bien, la propagande n’est alors plus possible et la propagande de la Fédération de Russie perd de son efficacité.

Enfin, il y a une troisième crise, la plus importante pour nous, aujourd’hui, dans cet hémicycle, qui pèse sur le développement du pays. Que pouvons-nous faire ? Une mission préélectorale est prévue pour la semaine prochaine. Nous verrons à cette occasion quel soutien nous pouvons apporter et quels conseils nous pouvons dispenser avant les élections pour que tous puissent y participer. Il faut aussi faire en sorte qu’il n’y ait pas trop d’incitations à des discours de haine et également encourager toutes les enquêtes sur les violations des droits humains.

C’est ce qui nous préoccupe le plus : les violations des droits humains sur le territoire ukrainien. Il existe plusieurs organisations fiables en faveur des droits de l’homme. Ecoutez-les, parlez avec leurs représentants. Il y a notamment des violations des droits humains par les séparatistes et par les troupes russes, et nous sommes aussi très préoccupés par le fait que les violations perpétrées par les troupes ukrainiennes ne font pas l’objet de véritables enquêtes. Il est essentiel que ce travail soit fait sans exclure aucune partie. Il faut également considérer la propagande et lutter contre les discours de haine.

Il faut absolument que l’Ukraine poursuive ses réformes : sa réforme du judiciaire, sa réforme du parquet public, sa réforme constitutionnelle, ses réformes économiques, etc.

M. HUNKO (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* 
Au mois de juin, nous avons déjà eu un débat sur l’Ukraine. Le Président Porochenko est venu, et nous nous rappelons tous qu’un cessez-le-feu provisoire était alors en vigueur. J’avais demandé au Président Porochenko de le transformer en cessez-le-feu permanent. Il a duré trois jours de plus, et puis les combats ont repris et l’Ukraine de l’Est a connu un été terrifiant.

Depuis lors, grâce aux accords de Minsk, un cessez-le-feu fragile est en vigueur. Le plus important, me semble-t-il, est que notre Assemblée fasse tout ce qui est possible pour que ce cessez-le-feu tienne et qu’une solution pacifique soit trouvée.

Cependant, ces derniers jours, des charniers – Mme Reps l’a évoqué – ont été découverts en Ukraine dans des zones où des combats ont eu lieu, l’OSCE l’a confirmé, et dans une région où l’armée ukrainienne ou les « bataillons volontaires », comme ils s’appellent, avaient le contrôle de la situation. L’OSCE n’a malheureusement pas d’experts médico-légaux pour mener les investigations nécessaires. Il serait important que cette Assemblée – M. Muiznieks voudra peut-être dire quelque chose à ce propos – demande qu’une enquête ait lieu et que toute la lumière soit faite sur ces charniers.

M. Schennach a rappelé les faits depuis le début : les manifestations à Maïdan et les différents événements. Un certain nombre de ces événements étaient absolument tragiques et justifient une enquête. Il faut notamment que nous sachions qui a tiré sur les manifestants le 20 février dernier. Et que s’est-il passé à Odessa, le 2 mai dernier, lorsque la maison des syndicats a brûlé ? Il y eut quelque 50 victimes, dont certaines avaient été frappées ou abattues. Le Secrétaire Général Jagland a dit, dans son intervention, qu’il avait bien l’intention de s’en occuper. C’est important, d’autant que les procès sont sur le point de commencer.

Nous ne savons toujours pas ce qui est arrivé au vol MH17 de la Malaysia Airlines.

Il n’est pas bon d’imputer tous les problèmes à la Russie et à M. Poutine. Si nous critiquons les interventions de la Russie, il faut également élucider les problèmes internes à l’Ukraine.

M. FRANKEN (Pays-Bas), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Chaque jour, notre monde globalisé change. Il change dans les domaines politique et économique, en matière d’environnement, de culture et bien d’autres. Depuis notre débat du mois de juin, ici, en plénière, de nombreux événements se sont produits. Nous avons ainsi été témoins d’une escalade du conflit en Ukraine. Nous avons vu la situation au Proche-Orient se détériorer. Et tout dernièrement, une coalition internationale a lancé des frappes aériennes contre « l’Etat islamique ».

Je souhaiterais m’arrêter un instant sur la situation en Ukraine. La crise doit tous nous préoccuper. Elle touche quelque 5 millions de personnes dans la région. On dénombre 8 000 blessés et 3 000 morts. L’OSCE a pris l’initiative de mettre en place un arrangement régional sous l’égide de la présidence suisse. Elle s’est lancée dans plusieurs activités qui vont d’une activité, d’établissement des faits sur le terrain à l’instauration d’un dialogue politique à divers échelons. Espérons que ces initiatives aboutiront. Le cessez-le-feu est un premier pas essentiel en ce sens.

Cependant, nous sommes aussi confrontés à la tragédie du vol MH17 de la Malaysia Airlines, abattu au-dessus du territoire ukrainien. Cette tragédie a entraîné la mort de tous les passagers, dont 196 citoyens néerlandais qui s’apprêtaient à retrouver leurs foyers, qui se rendaient en vacances ou qui étaient en déplacement professionnel. Permettez-moi de citer un passage du discours de notre Premier ministre, prononcé la semaine dernière devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York : « Cette tragédie a eu un impact considérable sur notre pays. Un si grand nombre d’hommes, de femmes et d’enfants ont perdu la vie, des familles entières ont été arrachées à leur quartier, dans les écoles des bureaux restent vides. Certaines des victimes n’ont pu être identifiées. Il faut élucider la cause de cette catastrophe le plus rapidement possible et traduire en justice les personnes responsables. C’est la raison pour laquelle un accès libre au site où est tombé l’avion de la Malaysia Airlines est essentiel ».

Je voudrais renouveler ici l’appel lancé par notre Premier ministre. Un appel lancé à toutes personnes capables de peser sur la situation sur le terrain. Donnez-nous la possibilité de ramener les restes des victimes dans notre pays. Donnez la possibilité aux enquêteurs de mener leur mission à bien, de façon que la communauté mondiale sache qui est responsable, qui a abattu cet avion, de façon que justice puisse être faite, car justice doit être faite.

Madame la Présidente, coopérons ensemble pour atteindre cet objectif. C’est notre devoir de travailler sans relâche pour créer un ordre mondial stable et pacifique.

Lord ANDERSON (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe socialiste* – Le danger d’un nouveau conflit gelé apparaît sur notre continent. Il viendrait s’ajouter à tous ceux qui existent déjà. Que faire pour ne pas en arriver là ? Que faire pour éviter une catastrophe humanitaire pendant l’hiver, ces régions souffrant cruellement d’un manque de nourriture et d’énergie ?

Sur le plan politique, la position du Président Poutine ne va pas dans le sens du compromis. Il a, par son nationalisme, gagné en popularité dans son pays. Nous devons soutenir le président démocratiquement élu en Ukraine et utiliser tous les instruments dont dispose le Conseil de l'Europe pour protéger les droits de l’homme dans cette région.

Cela dit, nous devons reconnaître que la Russie a des intérêts légitimes dans cette région et qu’ils doivent être pris en compte dans la recherche d’une solution. Mais cela amène à la question suivante : la Russie est-elle vraiment intéressée à la recherche d’une solution ou souhaite-t-elle maintenir l’insécurité afin de déstabiliser encore davantage la région ?

Quels sont les intérêts légitimes de la Russie ? D’abord la Russie et l’Ukraine ont une histoire et une culture partagées et l’Ukraine doit reconnaître les intérêts culturels des russophones vivant dans le pays ; or il y a beaucoup à faire dans ce domaine. Ensuite, il faut une plus grande décentralisation. Mais il n’est pas raisonnable de suivre la proposition absurde de M. Lavrov, qui préconise que chacune des régions décentralisées ait sa propre politique étrangère et son propre modèle économique. Enfin, il y a des intérêts de sécurité. En 1990, les Américains ont promis à M. Gorbatchev qu’il n’y aurait pas d’expansion de l’Otan vers l’Est. Il faut donc garantir à la Russie que l’on n’offrira pas à l’Ukraine la possibilité de devenir membre à part entière de l’Otan. Sinon, la Russie préfèrera maintenir l’instabilité.

Nous devons imposer des sanctions à la Russie. Certes, nous en paierons le prix, mais la Russie paiera encore plus cher. L’Europe doit rester unie. Essayons d’empêcher qu’un nouveau conflit gelé n’apparaisse sur notre continent. Utilisons tous les moyens pour essayer de trouver une solution raisonnable pour cette région.

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Muižnieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l'Europe.

M. MUIŽNIEKS, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l'Europe* – Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs, il y a une condition préalable au respect des droits de l’homme en Ukraine, c’est que les combats dans l’est du pays cessent. Aussi longtemps que le conflit est en cours, c’est la terreur qui règnera dans les territoires occupés par les rebelles.

Dans le même temps, nous lisons des rapports de plus en plus préoccupants sur les violations des droits de l’homme perpétrées par les forces de sécurité ukrainiennes, et notamment par les nombreux bataillons de volontaires. Si l’on veut voir mis en place un cessez-le-feu renforcé, il est essentiel que les auteurs de violations des droits de l’homme ne restent pas impunis.

Lors du débat du mois de juin, j’avais soulevé la question des personnes déplacées. Leur situation continue à nous préoccuper aujourd’hui. Si l’on en croit le HCR, le nombre de personnes déplacées au 30 septembre était de 368 000 en Ukraine : 350 000 de l’est du pays et 18 000 de Crimée. Ces personnes sont dans une situation particulièrement vulnérable et l’accueil qui leur est fait diffère grandement selon la région dans laquelle elles s’installent. Je reste très préoccupé par l’arrivée de l’hiver, comme d’autres orateurs, car un grand nombre de ces personnes vivent dans des abris qui ne sont pas chauffés.

Les autorités ukrainiennes ont besoin, de toute urgence, d’une assistance internationale, qui devrait accordée uniquement à condition qu’elles coopèrent étroitement avec le HCR et qu’elles mettent en œuvre ses recommandations pour traiter cette crise humanitaire.

Au cours de la deuxième semaine du mois de septembre, je me suis rendu en mission à Kiev, à Moscou et en Crimée. Je vous dirai quelques mots sur mes conclusions. D’abord, il ne faut pas interpréter ma visite sur place comme une reconnaissance du statut de la Crimée – question qui sort de mon mandat.

Les problèmes relatifs aux droits de l’homme que j’ai étudiés ont porté sur les violations des articles 2 et 3 de la Convention, sur l’état des enquêtes en cours, sur la situation des Tatars de Crimée, sur les minorités ukrainiennes et sur la liberté des médias.

Je suis préoccupé en premier lieu par la situation des Tatars de Crimée, une population à l’histoire tragique. Il est urgent de renforcer son sentiment de sécurité qui a été anéanti par des raids lancés par des personnels de sécurité armés et masqués dans des institutions religieuses, dans des entreprises possédées par des Tatars, au domicile de personnes privées. Ces raids avaient pour but de trouver des armes ou une littérature prétendument extrémiste. Or les Tatars de Crimée n’ont aucune tradition de violence ni d’extrémisme. Ces mesures sont hors de proportion et il faut qu’elles cessent.

S’agissant des Ukrainiens de souche, j’ai rencontré le patriarche de l’Eglise orthodoxe de Kiev qui m’a dit que, depuis le mois de mars, six de ses quinze églises avaient été saisies par des militants de l’Eglise orthodoxe de Moscou. Les autorités religieuses de Kiev veulent régler ces différends pacifiquement et engager le dialogue.

S’agissant des médias, des journalistes critiques ont été contraints de quitter la Crimée après avoir été menacés, après que leur domicile eut été fouillé, après avoir été harcelés. J’ai rencontré des journalistes qui avaient reçu des avertissements, et dont le matériel avait été saisi. En outre, le responsable du centre de journalisme d’enquête affirme avoir été détenu arbitrairement et maltraité par des forces prétendues de légitime défense. Ces forces ont également été impliquées dans une série de graves violations des droits de l’homme et d’enlèvements.

J’ai abordé cinq cas avec les responsables de la région : deux meurtres et trois personnes portées disparues. On m’a promis des informations sur ces affaires.

Nous prévoyons une mission de suivi dans la région pour travailler avec les médiateurs russes et ukrainien sur le problème humanitaire dans la région. Des personnes en détention provisoire ou en prison en Crimée pourraient achever leur période de détention sur le continent. Nous souhaitons étudier ces cas avec les médiateurs et encourager la coopération avec les services pénitentiaires russes et ukrainiens.

J’ai l’intention de retourner en Ukraine au mois de décembre et de travailler en coopération avec les Nations Unies afin d’aider les autorités ukrainiennes à mettre en place de façon plus systématique des réformes en matière de droits de l’homme. À ce titre, nous espérons que les Ukrainiens adopteront un plan d’action national.

La communauté internationale devrait, par des mesures d’assistance rapide, aider les autorités ukrainiennes à répondre aux besoins urgents de la population, qui sont nombreux, mais elle devrait aussi les aider à planifier à plus long terme, et ce par une aide assortie de conditions strictes. La communauté internationale devrait également insister sur la participation active de la société civile pour que les autorités ukrainiennes assument la responsabilité de la totalité de l’aide.

LA PRÉSIDENTE* –Vous vous êtes rendu dans plusieurs localités en Ukraine. Merci pour votre rapport, Monsieur le Commissaire aux droits de l’Homme, et pour ces dernières informations que vous nous avez livrées. Je vous remercie beaucoup de votre contribution.

M. POPESCU (Ukraine)* – Depuis un an, aucune session de l’Assemblée parlementaire ne s’est déroulée sans que nous débattions de la crise en Ukraine. Malheureusement, de session en session, la situation ne cesse d’empirer.

L’année dernière, nous évoquions la nécessité pour l’Ukraine de respecter ses obligations vis-à-vis du Conseil de l'Europe. En janvier, nous déplorions déjà des premières victimes à Kiev et nous parlions de réconcilier les partis. Au mois d’avril, nous constations l’annexion de la Crimée et insistions sur la nécessité pour l’Ukraine de retrouver le contrôle de l’ensemble de son territoire. En juin, nous avons évoqué le cessez-le-feu. Cet été, au Donbass, des combats ont eu lieu et des armes lourdes ont été utilisées, causant des milliers de victimes parmi les militaires et les civils. Un avion de ligne a été abattu et des milliers de réfugiés et de personnes déplacées ont été jetées sur les routes.

Aujourd’hui, l’Ukraine a besoin de l’aide de la communauté internationale. Alors que l’hiver approche, de nombreuses personnes sont sans toit. À Lougansk, elles n’ont ni lumière, ni eau, ni moyens de communication. Par ailleurs, de nombreuses personnes ne reçoivent plus leur pension ni leurs allocations et les produits alimentaires manquent. Les infrastructures ont disparu. Au Donbass, 11 325 infrastructures ont été détruites et des milliards de grivnas seront nécessaires pour les reconstruire.

À ce jour, le nombre de réfugiés dépasse 300 000 personnes et plus de un million de personnes se retrouvent au chômage. Surmonter cette crise nécessite impérativement de mettre un terme au conflit. Il faut absolument que le dialogue se poursuive et que des élections parlementaires soient organisées. Malheureusement, elles n’auront lieu ni en Crimée ni à Sébastopol, les territoires annexés. Seules 13 des 32 circonscriptions seront ouvertes dans les régions de Donetsk et de Lougansk. Il faut pourtant absolument que des représentants de toutes les régions de l’Ukraine participent à la recherche d’un compromis.

Nous devons renforcer nos efforts afin que le cessez-le-feu soit respecté et que l’on évite l’escalade de la violence.

Des centaines de personnes ont déjà trouvé la mort ou ont été blessées. Des personnes réfugiées ou déplacées arrivent en masse dans les pays voisins. Cette crise ne touche ainsi pas uniquement l’Ukraine, mais l’ensemble de la région, ce qui présente des similitudes avec la crise des Balkans. Nous devons tout faire pour maintenir l’intégrité territoriale de notre pays et trouver un règlement pacifique. Mais pour que cela soit possible, il est nécessaire que des élections parlementaires soient organisées conformément à notre législation.

Que la paix soit avec nous, que Dieu nous vienne en aide. C’est la dernière fois que je prends la parole dans cette enceinte. Je ne reviendrai pas mais j’espère, en ces temps de guerre, pouvoir être utile à mon pays.

LA PRÉSIDENTE* – Je profite de cette occasion pour remercier M. Popescu de tout le travail qu’il a effectué au sein de notre Assemblée et de l’ensemble de ses contributions.

En notre nom à tous, merci beaucoup, Monsieur Popescu.

M. SPAUTZ (Luxembourg) – Le conflit entre l’armée ukrainienne et les séparatistes pro-russes fait quotidiennement la une des journaux.

Tous ceux qui ont subi l’oppression soviétique et qui sont membres de l’Union européenne depuis le 1er mai comprennent la difficulté de la situation. Un nouveau fossé s’est creusé entre l’Ouest et la Fédération de Russie. A la suite notamment des décisions du G8, chacun campe sur ses positions.

Un espoir de désescalade est né lors du cessez-le-feu. Or, très rapidement, nous avons tous été déçus. Le nouveau gouvernement a baissé les bras. Les experts parlent déjà d’une nouvelle guerre froide. Pour l’heure, les sanctions sont de nature économique et financière. De son côté, la Fédération de Russie parle de fermer son espace aérien. Les sanctions commerciales qui ont été prises ont déjà une incidence sur les économies de part et d’autre. Bien plus grave, des milliers de personnes innocentes ont dû fuir ou ont perdu la vie.

Dans ces régions en guerre, les personnes ont cruellement besoin d’aide humanitaire. Elles vivent dans des conditions dramatiques, n’ayant accès ni à l’eau ni à la nourriture. Même si une aide alimentaire est envoyée, très souvent elle est arrêtée aux frontières par peur de ce que seraient susceptibles de contenir les convois. Une telle situation est inacceptable et nous ne pouvons autoriser qu’au XXIe siècle, sur le continent européen, des personnes soient obligées de fuir, le tout alors que cette région devrait être le symbole d’une coopération entre l’Est et l’Ouest et jouer le rôle d’une passerelle entre eux. Au lieu de cela, victime des conflits entre deux zones de puissances, ainsi que cela s’est produit en Pologne au moment de la seconde guerre mondiale, ce pays qui voulait la démocratie semble s’enfoncer toujours plus dans le chaos.

Les victimes sont surtout civiles : c’est une situation intenable. Nous devons faire preuve de solidarité en mettant les populations à l’abri et en leur apportant toute l’aide dont elles ont besoin, notamment alimentaire ou médicale. Nous ne saurions accepter que l’aide humanitaire soit arrêtée aux frontières car elle est nécessaire.

C’est pourquoi nous en appelons aux autorités ukrainiennes, russes et séparatistes pour qu’elles respectent les vies humaines.

Mme VĖSAITĖ (Lituanie)* – Je suis d’accord avec M. Popescu. Voilà plusieurs mois, nous avions déjà évoqué, ici, la situation ukrainienne et exprimé l’espoir d’un règlement pacifique de la crise.

Nous le savons tous, la situation en Ukraine est devenue plus tragique encore. C’est par milliers que des personnes ont été tuées et par centaines de milliers qu’on compte les réfugiés. Il y a quelques mois, certains d’entre nous se montraient prudents et hésitaient à affirmer que la Russie était un agresseur. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus douter du rôle joué par ce pays dans la crise. Seule la Russie persiste à prétendre qu’elle se tient à l’écart de la guerre en Ukraine et fait l’objet de discriminations parce que des sanctions économiques la frappent ou parce qu’on lui a retiré ses pouvoirs au sein de l’Assemblée parlementaire.

Nous nous félicitions du protocole récemment signé à Minsk car il s’agit peut-être d’un premier pas vers un cessez-le-feu. Il convient toutefois, mes chers collègues, de rester prudent. Ce cessez-le-feu règle-t-il le problème ou est-il le prélude à un nouveau conflit gelé ? Les autorités ukrainiennes ont respecté les dispositions du protocole alors que les séparatistes continuent de violer la trêve. Si nous sommes favorables au dialogue et à un cessez-le-feu, il est évident qu’aucune paix durable ne pourra voir le jour aussi longtemps que la Russie ne jouera pas un rôle constructif dans le processus.

Or il saute aux yeux que la Russie refuse d’admettre l’évidence, à savoir qu’elle viole ses engagements, y compris par l’occupation de la Crimée. Elle ne se montre nullement disposée à remplir ses engagements découlant du protocole de Minsk. Elle continue de défier le droit international qui fonde la paix mondiale.

La Lituanie condamne avec la plus grande fermeté l’invasion par la Fédération de Russie d’une partie du territoire ukrainien, ainsi que l’appui qu’elle fournit aux mouvements séparatistes dans l’est de l’Ukraine.

Nous regrettons par ailleurs que l’Union européenne ne soit pas allée assez loin et n’ait pas agi avec une rapidité suffisante pour prévenir la mort d’un grand nombre de citoyens ukrainiens. L’Union européenne peut agir pour changer la donne. Aussi longtemps que nous hésiterons, la Russie essaiera de remporter de nouveaux avantages. Toute nouvelle concession l’encourage à poursuivre son avancée : qui sait quel est, après l’Ukraine, le prochain pays sur la liste ? La communauté internationale doit s’unir et inviter la Russie à changer de cap. Il faut exercer des pressions sous toutes les formes, en commençant par des sanctions économiques et politiques. L’ensemble de la communauté internationale doit contribuer à l’efficacité des tentatives visant à régler la crise.

Mes chers collègues, la Lituanie se félicite des mesures positives que l’Ukraine a prises récemment en se rapprochant de l’Europe et en ratifiant l’accord d’association. Nous comprenons aussi l’importance que revêtent des élections législatives transparentes et libres en Ukraine. C’est pourquoi nous appelons tous les pays européens à les suivre de près en envoyant des observateurs.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – La fin de l’URSS a marqué l’un des plus grands changements politiques du XXe siècle. Toutefois le spectre du régime soviétique hante encore l’Europe, en particulier l’Europe orientale. La Russie a remplacé l’URSS, ce qui explique la croisade lancée contre les anciennes républiques de l’Union soviétique qui ont décidé d’exorciser le spectre du régime soviétique. Malheureusement, la transition a été marquée jusque-là par un processus douloureux et difficile et personne ne peut dire quand il s’arrêtera.

De nombreux experts qui ont travaillé sur les conflits territoriaux post-soviétiques savent que la partie la plus intéressée à résoudre le différend est le principal médiateur. La République de Moldova le sait : le résultat de telles médiations est qu’on se retrouve dans une situation intermédiaire entre la guerre et la paix. Le cessez-le-feu déclaré le 5 septembre dernier dans le sud-est de l’Ukraine créera un nouveau conflit gelé. Les nouveaux territoires qui ont émergé des ruines de l’Union soviétique ne sont pas assez forts ou légitimes pour être reconnus au plan international mais ne sont pas assez faibles non plus pour être contrôlés par leur gouvernement. L’Ossétie du Sud et le Haut-Karabakh en sont des exemples.

En Transnistrie, les dirigeants régionaux de l’ancien parti communiste de l’Union soviétique ont joué un rôle similaire. L’envoi à travers la frontière de soi-disant « volontaires » armés a permis le déclenchement de ces guerres, dont l’expérience, malheureusement, ne fait que cimenter l’esprit de sacrifice et de libération. Les enfants dans les écoles de Transnistrie apprennent l’histoire de façon différente des autres enfants. C’est ainsi que les séparatistes ukrainiens enseigneront l’histoire à leurs enfants : l’Ukraine est tombée dans le même piège que la Moldova, la Géorgie ou l’Azerbaïdjan dans les années 1990. Le Gouvernement ukrainien a choisi d’utiliser la force contre les sécessionnistes mais n’a pas réussi à les battre sur le terrain. Les organisations internationales ont peu de moyens pour peser sur eux. Les discussions, conférences, négociations et autres sommets n’ont pas atteint leur objectif, qui était la réintégration des régions séparatistes dans des Etats reconnus.

Or plus le temps passe, plus il devient difficile de changer le statut de la Transnistrie, pour ne prendre que cet exemple.

L’expérience nous montre que les cessez-le-feu et les promesses de statut spécial sont le point de départ de la création de facto d’Etats non reconnus.

Il faut garder l’espoir de mettre un terme à ces conflits car un meilleur avenir existe pour ces peuples et leurs enfants. C’est seulement ainsi qu’on pourra exorciser le spectre du soviétisme et surmonter des conflits sans fin.

M. Flego, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Brasseur au fauteuil présidentiel.

M. LEIGH (Royaume-Uni)* – Vous n’apprécierez peut-être pas mes propos, mais je prends la parole dans un esprit de dialogue en vue de promouvoir la paix dans cette région.

La vérité est que nous ne formons pas un parlement décisionnaire : nous ne pouvons ni imposer des sanctions ni lancer des missiles. Nous sommes une union interparlementaire dont l’objectif premier est de discuter les uns avec les autres. Je ne cherche pas à justifier l’action de la Russie mais si les représentants russes continuent de ne pas venir à l’Assemblée, nous ne pourrons pas les persuader, alors que ce serait déjà difficile de le faire s’ils étaient présents. Le débat ne serait-il pas plus productif si des représentants de la Fédération de Russie pouvaient y exprimer leur point de vue, puisqu’ils ont un point de vue ?

Il est par ailleurs facile de dénoncer la Russie ; toutefois, la vérité est que le problème, très complexe, remonte loin dans le temps. L’Otan et l’Union européenne ont une large part de responsabilité pour avoir repoussé les frontières de l’Ouest à quelques kilomètres de Moscou.

Monsieur Poutine n’est pas le seul, tous les dirigeants russes ont toujours dit qu’ils n’étaient pas prêts à tolérer que l’Ukraine devienne membre de l’Otan, et l’on peut comprendre leurs préoccupations, notamment quand on pense aux ports de Crimée sur la mer Noire. Or, l’Union européenne a toujours cherché à pousser ses frontières à l’Est, contre les Russes.

L’Ukraine a une histoire extrêmement complexe. Sa situation actuelle l’est tout autant. Pour ceux qui connaissent le sujet, il n’existe pas de solution simpliste. Il suffit de penser à l’histoire de l’Ukraine, à la division existant entre l’est et l’ouest du pays, au fait qu’une partie de l’Ukraine faisait autrefois partie avec la Pologne de l’Empire austro-hongrois, et à toute l’histoire des Juifs. De très nombreux aspects du problème sont extraordinairement complexes, sans oublier que les Ukrainiens russophones vivant à l’est du pays veulent faire partie de la Russie.

On peut donc continuer à attaquer la Russie, mais nous devons aussi faire preuve de réalisme. Nous devons comprendre que les Russes ont des intérêts légitimes dans cette région. À mon sens, la solution est que l’Ukraine ne devienne pas membre de l’Otan et que des accords de libre-échange soient mis en œuvre avec la Russie. C’est la seule solution. Ce n’est qu’ainsi que la paix pourra être maintenue à l’avenir.

M. JENSEN (Danemark)* – Je suis assez étonné que dans une Assemblée qui doit être le phare de la liberté et de la démocratie, en particulier pour ces pays qui croient dans le droit à leur autodétermination, certains de mes collègues se lèvent pour nous dire qu’il faut écouter Poutine, qu’il faudrait être d’accord avec lui et qu’un pays n’a pas le droit de décider s’il veut adhérer à l’Otan ou à l’Union européenne.

De quel Conseil de l’Europe parlez-vous ? Sommes-nous devenus une Organisation disposée à toutes les compromissions pour sauvegarder un statu quo face à un pays qui, à de nombreuses reprises, a cherché à imposer sa loi à des pays plus petits ? Non, nous devrions être le phare de la liberté, le phare de la démocratie, et c’est bien pour cela que nous devons pouvoir parler franchement et dire clairement à la Russie que si elle veut être membre de notre Organisation, elle doit aussi en respecter les règles. Or prendre une partie d’un autre Etat membre, ce n’est pas respecter les règles. Envahir le territoire d’un autre Etat membre par la force militaire, ce n’est respecter les règles. Alors ne me dites pas qu’il faudrait en discuter !

Il faut que nous soyons unis pour demander que le Gouvernement russe et la délégation russe assument leurs responsabilités. Mais nous ne le faisons pas. Nous parlons et parlons... J’ai été présent pour chaque débat sur l’Ukraine et rien de concret n’en est sorti, si ce n’est des rapports, toujours des rapports et encore des rapports. Pendant ce temps, la situation en Ukraine se dégrade, la Russie grignote chaque jour un peu plus de territoire et, de l’avis de tous, la Crimée est purement et simplement perdue pour l’Ukraine. Je trouve cela bien triste.

En ne demandant pas d’acte concret à la Russie, en n’exigeant pas qu’elle se retire d’Ukraine si elle ne veut pas être exclue de notre Organisation, nous courons le risque de signer notre propre arrêt de mort. Si nous n’exigeons rien, pourquoi même venir ici ? J’aime beaucoup Strasbourg, c’est une ville très agréable, mais si rien ne sort jamais de cette Assemblée, pourquoi venir ?

Alors, s’il vous plaît, chers collègues, restons ce phare en Europe. C’est ce que les Ukrainiens attendent de nous.

M. DI STEFANO (Italie)* – Mes chers collègues, le Conseil de l’Europe n’est-ce pas l’organe qui favorise, encourage la démocratie, le respect des droits de l’homme et la sécurité au sein de ses 47 Etats membres ? Aujourd’hui, 820 millions de citoyens se sentent menacés. Prenons un peu de recul et demandons-nous ce que souhaitent ces 820 millions de personnes. À mon avis, elles veulent le dialogue, la médiation, la paix. Sinon, notre Organisation n’aurait pas de raison d’être.

Le Conseil de l’Europe devrait rejeter la logique des deux blocs, qui, malheureusement, réapparaît dans tous les débats politiques que nous menons. Prenons du recul, appuyons-nous sur l’Histoire : dans ce conflit entre la Russie et l’Ukraine, il y a sans doute aussi des responsabilités européennes et ukrainiennes. Songeons aux actes d’Ianoukovitch contre les populations russophones. Songeons à l’occupation de la Crimée par Poutine – qu’il faut condamner, bien entendu. Songeons aux événements qui se sont produits à Odessa, sur lesquels toute la lumière n’est pas faite. Songeons aussi à l’avion de la Malaysia Airlines.

Je ne vois dans tout cela que des victimes et, comme d’habitude, les victimes sont des civils. Je vois l’Otan, les Etats-Unis, l’Europe et la Russie. Mais dans toute cette histoire, les grands perdants, ce sont encore une fois les civils. Tout cela sape la stabilité de l’Europe, tout cela sape la logique même du Conseil de l’Europe. Voilà la grille de lecture que je voudrais proposer.

La Russie, la Chine et l’Inde représentent aujourd’hui plus de 50 % de la population mondiale. Voulons-nous vraiment expulser la Russie du Conseil de l’Europe ? Ce n’est pas possible, ce n’est pas un projet tenable. Je vois dans des parlements européens émerger des logiques d’accords qui nous lieraient exclusivement aux Etats-Unis. Pour moi, c’est une impasse, cela va à l’encontre de la diversité et de l’avenir européen. L’Europe devrait aujourd’hui avoir le courage du dialogue.

Il faut du courage pour dialoguer, notamment pour dialoguer avec M. Poutine. Pendant toutes ces années, des défis ont été lancés à la démocratie, mais notre Organisation est fondée sur la démocratie et sans cela, elle n’a pas de raison d’être. Le Conseil de l’Europe doit être le médiateur entre l’Union européenne et la Russie. Nous devons donc parler à la Russie. Un cessez-le-feu dans cette zone de conflit pourrait permettre à des ONG d’intervenir et recréerait à nouveau la stabilité nécessaire. Il faut régler le problème des sanctions, y compris celles que nous avons prises nous-mêmes ici, dans cet hémicycle, à l’encontre de la délégation russe car, comme vient de le dire notre collègue britannique, le fait de ne pas pouvoir parler aujourd’hui avec les Russes nous prive de notre véritable fonction.

Le passage d’une situation de crise à une situation de stabilité, c’est nous qui devons le vouloir, le désirer. Pour cela, il faut abattre ce mur de l’absence de communication et rouvrir un dialogue qui, dans cet hémicycle comme ensuite au Parlement européen, pourrait être fructueux. Le Conseil de l’Europe devrait se comporter en médiateur.

Mme FINCKH-KRÄMER (Allemagne)* – J’aimerais ramener la discussion sur la situation de tous ceux qui n’ont pas voulu ce conflit, qui ne l’ont pas favorisé et qui n’y ont pas participé activement, et de tous ceux qui, en Ukraine, ont dû quitter leur domicile, en particulier au Donbass, pour se réfugier ailleurs en Ukraine ou en Russie. D’après les chiffres dont je dispose, plus de personnes sont parties vers la Russie que vers d’autres régions d’Ukraine. Dans le même temps, la situation est catastrophique pour ceux qui, faute de moyens pour partir, se trouvent contraints de rester au Donbass sans électricité, dans des logements à moitié détruits, sans eau potable très souvent.

Il me semble donc que le but de notre Assemblée devrait être d’aider ces personnes.

Peut-être ce sujet permettrait-il aux Ukrainiens et aux Russes de renouer le contact. Il s’agit de favoriser le retour des personnes déplacées. En Crimée, des pourparlers ont été menés à l’initiative de l’OSCE. Le Conseil de l’Europe ne pourrait-il pas adresser une invitation aux parlementaires russes et ukrainiens de l’Assemblée afin qu’ils se rencontrent en dehors d’une partie de session ? Ils pourraient ainsi discuter dans de bonnes conditions, sur des thèmes utiles aux populations, et non sur les traditionnels thèmes de crispation.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Que faire ? Une chose est sûre : c’est la Russie qui est responsable de la situation actuelle. Chers collègues britanniques, j’ose à peine imaginer votre réaction si un pays tentait de vous imposer une autre langue ou de s’immiscer dans votre vie politique. C’est au peuple ukrainien de choisir s’il veut rejoindre l’Otan ou l’Union européenne, et non à Poutine.

Des milliers de personnes ont péri dans les assauts des troupes russes. Un grand nombre de civils morts dans les affrontements n’ont même pas pu être identifiés. Leurs cadavres ont été brûlés sur le territoire même de l’Ukraine. Tout cela s’est passé malgré les Accords de Minsk. Et pendant ce temps, le Gouvernement français envisage de vendre un important navire de guerre à la Russie, qui accostera à Sébastopol.

Lorsque la Transnistrie a été occupée par la Russie, la communauté internationale a fermé les yeux. Elle les a fermés aussi lors de l’occupation d’une partie de la Géorgie. J’avais prévenu à l’époque que la prochaine région annexée par la Russie serait la Crimée. Là encore, personne n’a rien dit. La Russie menace chaque jour un peu plus la sécurité de l’Europe. S’il vous plaît, mes chers collègues, mettez fin aux agressions de ce pays !

M. ROUQUET (France) – Le débat d’actualité que nous tenons aujourd’hui sur la crise ukrainienne montre que malgré une actualité médiatique centrée sur d’autres conflits, notre Assemblée n’oublie pas ce drame qui se joue au sein même de notre Grande Europe.

Depuis notre dernière session, des évolutions, positives ou négatives d’ailleurs, se sont fait jour. Les efforts diplomatiques se sont multipliés pour tenter de mettre fin à ce conflit qui touche à nos valeurs et qui remet en cause l’équilibre instauré sur notre continent depuis les années 1990.

La France s’est particulièrement impliquée aux côtés de l’Allemagne pour trouver un règlement pacifique à cette crise. Les discussions au format quadripartite dit « de Normandie », entre la France, l’Allemagne, la Russie et l’Ukraine, ont permis de maintenir le contact.

Le cessez-le-feu instauré depuis le 5 septembre est fragile, mais il est à ce jour globalement respecté. Cependant, il n’est qu’un préalable au règlement politique et nous devrons rester vigilants quant à l’évolution de la situation sur le terrain.

Une solution politique de la crise devra prendre en compte la diversité ukrainienne sans remettre en cause l’intégrité territoriale de ce pays. Ce ne sera pas facile, car les informations qui parviennent de Crimée sur le traitement infligé aux minorités ukrainophone et tatare, ou l’intransigeance de certains séparatistes pro-russes à l’est, sont particulièrement inquiétantes.

À l’est, la situation est également alarmante sur le plan humanitaire. Nous avons entendu hier matin, en commission des migrations, des organisations russes et ukrainiennes sur la question des réfugiés et des personnes déplacées. Leur témoignage poignant nous rappelle qu’au-delà de la géopolitique, la crise ukrainienne est d’abord humaine.

Alors que l’automne commence, des milliers de personnes, dont de nombreux enfants, sont dans des camps d’été, souvent sans eau potable ou générateur d’électricité. Ces citoyens ukrainiens, qu’ils soient tatars, ukrainophones ou russophones, doivent être aidés. Sur ce point, je regrette que l’Union européenne ne fasse pas plus, ne fasse pas mieux.

Face à cette situation, comment ne pas s’interroger sur les conditions dans lesquelles vont se tenir les élections législatives ? Comment ces milliers de réfugiés et de personnes déplacées vont-ils pouvoir exercer leur droit de vote ? Les citoyens ukrainiens vivant à Sébastopol pourront-ils voter hors de Crimée ? La mission préélectorale de l’APCE devra examiner avec attention cette difficile question.

Je me réjouis des initiatives récentes prises au sein de notre assemblée ou par ses membres pour renouer le dialogue avec nos collègues russes car ce dialogue est indispensable si nous souhaitons avancer sur le dossier ukrainien.

M. ZINGERIS (Lituanie)* – Nous parlons aujourd’hui de « la crise en Ukraine », mais cet intitulé ne me semble pas approprié. En effet, il s’agit d’une guerre infligée aux Ukrainiens par une puissance militaire étrangère. Quelles sont les causes de cette guerre ? La Fédération de Russie tente de remettre en cause les règles et les traités internationaux hérités de l’après-seconde guerre mondiale. Ce faisant, elle viole ses engagements internationaux et notamment ceux qu’elle a pris auprès du Conseil de l’Europe.

Pendant des décennies, l’Europe s’est appuyée sur l’Acte final de la conférence d’Helsinki selon lequel les frontières de l’Europe ne devraient jamais être modifiées par la force. C’est exactement ce que fait la Russie, qui nie à ses voisins le droit de prendre leurs propres décisions quant à leur avenir géopolitique.

La politique de voisinage de la Russie s’appuie sur la doctrine géographique des zones « d'intérêts spéciaux ». Hélas, aujourd’hui plus que jamais, la Russie considère que sa sécurité dépend de l’insécurité d’autres pays. Lorsque la liberté, la prospérité et les valeurs européennes se développent, elle y voit une menace existentielle pour son régime autocratique.

Il est donc évident que la Russie veut discréditer la politique de voisinage de l’Union européenne, surtout à l’est, et les accords d’association. C’est la véritable cause de ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine. Si le Gouvernement ukrainien décide de ne pas rejoindre l’Union européenne, la Russie retirera ses troupes de l’est du pays.

Il y a un an, nous pensions que si l’Ukraine poursuivait sur la voie de l’association avec l’Union européenne et des réformes qu’elle avait entreprises, nous aurions un meilleur voisin et la population un pays plus prospère et plus démocratique. Aujourd’hui, le pays est confronté à une force brutale qui, au-delà même de l’aspect militaire, lui livre une guerre énergétique, financière et de l’information, afin de le démembrer ou d’en faire un régime fantoche, de sorte qu’aucun avenir européen ne sera plus envisageable.

J’ai à mes côtés Mustafa Dzhemiliev, leader de la communauté tatare de Crimée. Je vous demande de signer la déclaration écrite que j’ai déposée pour défendre les droits des Tatars de Crimée, qui vivent une situation bien difficile.

M. HANCOCK (Royaume-Uni)* – L’une des choses les plus tristes qu’il nous soit donné de voir en politique est un pays qui s’effondre, dont les habitants commencent à se battre les uns contre les autres et dont le gouvernement attaque la population elle-même, quelle qu’en soit la raison. Des deux côtés, on déplore un manque d’humanité envers des citoyens qui ne veulent rien d’autre que mener une vie normale. Ce n’est pas pour rien que trois cent mille personnes quittent leur foyer, en sachant qu’à leur retour, s’ils reviennent, celui-ci sera probablement dévasté, les infrastructures détruites et que personne ne se préoccupera guère de reconstruire leur pays.

Un silence de mort règne aujourd’hui dans cette salle, parce que nous reprochons aux Russes ce qui se passe en Ukraine. Il aurait été bien préférable que des Russes prennent part au débat et tentent de justifier leur position, s’ils le peuvent. C’est une grave erreur que de sous-estimer la pertinence des propos qui sont susceptibles d’être tenus dans cet hémicycle. Nous devrions être disposés à écouter et à négocier. Je fais partie de ceux qui estiment que le Conseil de l’Europe doit tenter sans relâche de réunir les parties. Si nous ne faisons rien d’autre, faisons au moins cela.

Notre première et unique préoccupation devrait être d’apporter paix et prospérité à la population ukrainienne. Ceux qui ont eu la chance de visiter l’Ukraine savent qu’il s’agit d’un pays merveilleux, d’un peuple merveilleux qui a besoin de s’épanouir.

Je trouve notamment détestable que l’Union européenne, qui a joué un rôle si important dans le déclenchement de la crise, ait totalement ignoré la crise humanitaire en Ukraine et ne donne pas au pays les ressources nécessaires au redressement de son économie. On fait des reproches à la Russie, mais on n’aide pas la population sur le terrain. En quoi est-il utile aux Ukrainiens qui souffrent et vivent dans la pauvreté de leur dire que nous savons à qui ils le doivent ? Ont-ils besoin de nous pour le savoir ? Ce dont ils ont besoin, c’est que nous leur redonnions espoir. Pour cela, nous devons réunir les parties et leur dire ce que nous attendons d’elles.

Qui sommes-nous pour refuser aux Ukrainiens de décider eux-mêmes de leur sort ? Au Royaume-Uni, nous venons de donner cette possibilité au peuple écossais. Heureusement, les Ecossais ont choisi de rester au sein du Royaume-Uni, mais s’ils avaient pris la décision opposée, nous l’aurions accepté. Il en va de même dans bien des régions d’Europe et c’est une situation à laquelle nous allons être confrontés de nouveau, et de plus en plus souvent. Nous devons donc trouver une solution valable en pareil cas. En tout état de cause, nous ne pouvons nous permettre d’ignorer tout ou partie des acteurs impliqués.

LE PRÉSIDENT - M. Bies, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. KOX (Pays-Bas)* – Nous avons été témoins d’atrocités en Ukraine, mais le début d’une trêve est une bonne nouvelle. Je félicite l’OSCE et sa représentante, Mme Heidi Tagliavini, d’avoir été aussi constructifs, créatifs et patients au cours du processus qui a conduit à ce cessez-le-feu. Voilà le rôle des organisations internationales : prévenir la violence ou y mettre fin, promouvoir et protéger les négociations.

Les organes du Conseil de l’Europe ont aussi fait leur travail, discrètement, par le passé, notamment par l’intermédiaire du Secrétaire Général, de son représentant spécial à Kiev, de la Présidente de l’Assemblée parlementaire, du Commissaire aux droits de l’homme et de la Commission de Venise.

Nous devons maintenant enquêter sur ce qui s’est passé en Ukraine l’année dernière et étudier les conséquences humanitaires et politiques de la crise et de la guerre civile. Je soutiens entièrement notre décision d’établir des rapports sur ces questions cruciales. C’est nécessaire pour comprendre comment l’Ukraine et ses citoyens peuvent surmonter ces terribles événements. Cela ne ramènera évidemment pas ceux qui sont morts à Maïdan, à Odessa, dans l’est du pays ou dans l’avion de ligne qui a été abattu, ni ceux que l’on a retrouvés tout récemment dans des fosses communes. Nous ne pouvons qu’honorer leur mémoire. Mais nous devons savoir ce qui s’est passé et quelles conséquences cela a entraîné afin de pouvoir proposer une solution durable à la crise.

Nous devons aussi enquêter sur le rôle des puissances extérieures. La Fédération de Russie a brutalement enfreint le droit international en annexant la Crimée et en soutenant la rébellion dans l’est de l’Ukraine. Les Etats-Unis ont appuyé de manière irresponsable celle de l’ouest et l’armée ukrainienne qui a violemment attaqué les rebelles et les habitants de Donetsk et Lugansk. Nous avons été témoins de la lutte parfaitement irresponsable que se sont livrée la Fédération de Russie et l’Union européenne pour attirer l’Ukraine dans leur sphère d’influence respective. Et nous avons vu d’autres acteurs internationaux, présents à Kiev puis à Genève, qui ont accepté que soient aussitôt oubliés les accords qui y avaient été signés. Ce n’est pas sérieux ! Voilà le message que nous devrions adresser à la Russie, aux Etats-Unis, à l’Union européenne : vous n’êtes pas là pour déclencher ou attiser des conflits en Europe, mais pour les éviter ou y mettre fin.

Je me joins donc aux collègues qui appellent à soutenir la trêve et tous ceux qui, où que ce soit en Ukraine, désespèrent de retrouver la paix après ce déchaînement de violence brutale et parfaitement inutile. Je m’associe à tous ceux qui, en Europe, refusent de revivre la guerre froide. Un siècle après le début de la première guerre mondiale, nous ne pouvons accepter que de tels événements se reproduisent.

J’invite chacun d’entre nous à se remémorer les raisons pour lesquelles le Conseil de l’Europe a été fondé et qui nous imposent d’ardentes obligations. Au bout du compte, nous serons tous tenus pour responsables.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Notre organisation paneuropéenne a été créée pour empêcher que de nouvelles guerres n’éclatent sur notre continent. Pourtant, pour la deuxième fois en quelques années, l’un de nos Etats membres en a attaqué un autre et a annexé une partie de son territoire.

Avons-nous vraiment appris les leçons de ce qu’il s’est produit voici 70 ans ? Le dialogue et les moyens pacifiques doivent remplacer la guerre et les souffrances humaines. L’annexion de la Crimée par la Russie et les actions militaires à l’intérieur de l’Ukraine sont un pied de nez à nos valeurs et à la liberté que nous défendons depuis la seconde guerre mondiale.

Nos collègues russes ont affirmé que cette politique de voisinage était agressive de la part de l’Otan et de l’Union européenne. Imaginons l’inverse : le Pacte de Varsovie avançant vers l’Ouest. Avant la chute du mur de Berlin, nous aurions pu comprendre ce sentiment, mais la guerre froide est finie, la Russie fait partie de l’Europe. Nous ne pouvons accepter un sentiment de crainte comme excuse pour lancer une guerre. Nous ne pouvons accepter la mort de 295 passagers innocents d’un avion, des adultes comme des enfants.

Quel que soit le responsable, après cette tragédie, Poutine aurait dû déclarer : « Maintenant il faut arrêter. C’est allé trop loin. » Les actions de la Russie ont alimenté les craintes dans toute la région. Certains redoutent qu’elle ne veuille prendre le contrôle de toute la mer Noire. La Crimée est sous contrôle. Les forces russes sont de plus en plus présentes dans l’est de l’Ukraine. Leur participation en Abkhazie, en Ossétie du sud, en Transnistrie et en Moldova, conduit à se demander : qui sera le prochain ? Odessa, peut-être ?

Le Conseil de l’Europe doit trouver une réponse équilibrée pour restaurer le pays. En avons-nous le pouvoir ? J’espère que oui car 50 % des exportations de la Russie vont dans l’Union européenne. Une grande partie de leurs importations en proviennent. Mais ils n’acceptent pas que l’Ukraine ou la Moldova fassent la même chose. Cela n’a aucun sens si les objectifs sont la démocratie, les droits de l’homme et le vivre ensemble. Cela a beaucoup de sens si les objectifs sont l’oppression et le contrôle sur les autres.

LE PRÉSIDENT – Mmes Frenkel et Gerashchenko, inscrites dans le débat, ne sont pas présentes dans l’hémicycle.

Mme SPADONI (Italie)* – J’avais préparé une intervention portant principalement sur les sanctions imposées à la Russie. Après avoir écouté mes collègues, je me suis demandé : à qui profitent les lois commerciales et doivent-elles être placées au-dessus des droits de l’homme ? Nous avons un problème avec les sanctions. Beaucoup de pays violent les droits de l’homme, notamment la Chine. L’Union européenne a décidé de privilégier les accords commerciaux et les profits. Tant que cela durera nous aurons ce type de débat.

Nous pouvons examiner ici des projets de résolution sur la protection des droits, encourager des pays à faire ceci ou cela. La vérité, c’est que si nous bloquions commercialement les pays coupables de violer les droits de l’homme, nous obtiendrions bien plus. Pour cela il faut du courage et aborder l’Europe différemment.

Nous ne devons pas nous étonner si les jeunes générations considèrent que l’Europe est de plus en plus un assemblage d’intérêts économiques, et non une Europe solidaire ou une Europe des peuples. Ils voient l’Europe des profits et des bénéfices. Tant que cette idée circulera, il n’y aura pas d’Europe et nous coulerons tous ensemble.

Mme de POURBAIX-LUNDIN (Suède)* – La crise en Ukraine est due à la Russie. L’été dernier, elle a commencé de menacer l’Ukraine et tous les pays des partenariats de l’Est. Il y a eu des blocus. En novembre, l’ancien président Ianoukovitch a décidé sous la pression de ne pas signer l’accord d’association avec l’Union européenne. Immédiatement la population a manifesté sur la place Maïdan contre la corruption.

Le 20 février de cette année, une centaine de manifestants ont été tués par les tireurs d’élite de l’ancien président Ianoukovitch. Ils étaient sur les toits des maisons autour de Maïdan, je les ai vus tirer. Deux jours plus tard, le 22 février, Ianoukovitch a quitté l’Ukraine pour se réfugier en Russie. À la demande de Poutine, la Douma russe a autorisé l’utilisation de forces militaires dans l’ensemble de l’Ukraine. La Russie a organisé un référendum illégal en Crimée, suivi d’une annexion illégale en violation de tous les accords internationaux. Il y a maintenant une guerre dans l’est de l’Ukraine avec des terroristes prorusses armés par la Russie. Nous savons que des soldats russes sont aussi sur le terrain, en Ukraine et ils font de leur mieux pour déstabiliser le pays.

Le président Porochenko a été élu le 25 mai dernier, au premier tour. Il a tout de suite proposé un plan de paix. Il devrait y avoir un cessez-le-feu mais ce n’est pas le cas. Aujourd’hui dix civils ont été tués à Donetsk.

Beaucoup d’intervenants ont parlé des personnes déplacées. Je n’y reviendrai pas.

Si cette crise existe c’est parce que la Russie n’accepte pas que l’Ukraine soit un pays souverain qui a droit à l’autodétermination pour appartenir à telle ou telle organisation internationale. Aujourd’hui, j’ai lu un magazine ukrainien dont le titre de « une » est « L’Ukraine va survivre ». Elle mérite plus que cela.

Madame la Présidente ce sera mon dernier discours dans cet hémicycle. Chers collègues je vous rappelle qu’en janvier 2015, les pouvoirs de la Russie seront à nouveau contestés. Au début de cette année nous avons dit que la Russie devait rendre la Crimée à l’Ukraine si elle voulait recouvrer ses pouvoirs. Souvenez-vous de cela au mois de janvier.

Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

LA PRÉSIDENTE* - Nous vous remercions, Madame, pour tout le travail accompli au sein de l’assemblée. Vous avez souvent pris la parole dans cet hémicycle. Merci beaucoup et bonne chance pour vos activités futures.

M. SELVİ (Turquie)* – Mes chers collègues depuis la dernière partie de session, la crise en Ukraine a pris un tour nouveau avec les événements intervenus.

Je tiens tout d’abord à souligner que nous nous félicitons de l’accord de cessez-le-feu signé à Minsk, le 5 septembre dernier, ainsi que du mémorandum du 19 septembre dernier, régissant les dispositions relatives au cessez-le-feu, également signé à Minsk. Respecter ce cessez-le-feu est essentiel, de même qu’il est essentiel de respecter les dispositions de l’accord qui pourraient offrir une ouverture sur une solution politique durable. Nous saluons aussi la ratification de l’accord entre l’Union européenne et l’Ukraine, intervenue le 16 septembre dernier. Nous soutenons résolument le processus de réforme à l’œuvre en Ukraine ainsi que le développement des relations entre ce pays et les institutions de l’Union européenne, dans la mesure où cela correspond au choix de l’Ukraine et au rythme qui lui conviendra. Nous attendons des élections législatives du 26 octobre prochain qu’elles contribuent à mettre en place un gouvernement durable et inclusif ouvrant la voie à une paix durable et à la stabilité du pays, grâce à un processus de réforme à long terme.

Cependant, nonobstant tous ces faits positifs, la population des Tatars de Crimée continue de subir dans sa propre patrie des pressions qui vont croissant depuis l’annexion illégitime et illégale de la péninsule. L’interdiction faite aux dirigeants des Tatars de Crimée d’entrer sur le territoire, ainsi que le raid récemment lancé par les forces de sécurité russes contre le bâtiment des Tatars de Crimée, à Simferopol, le 16 septembre dernier, en sont des témoignages évidents. Le respect des droits et libertés de la communauté tatare et le bon fonctionnement du Parlement des Tatars de Crimée sont essentiels pour préserver la paix et la stabilité en Crimée. Nous continuerons à suivre de très près la situation des Tatars de Crimée. La communauté internationale doit tout faire pour garantir le respect de leurs droits et de leur bien-être. Dans ce contexte de pression continue sur les Tatars de Crimée, permettez-moi de souligner que la paix et la stabilité en Crimée sont étroitement liées au respect des droits et des libertés de cette communauté. Il faut permettre au Parlement des Tatars de Crimée de fonctionner librement. Il faut donc rejeter tout isolement des Tatars de Crimée de l’Ukraine et du reste du monde. Il faut tout faire pour maintenir le contact avec la population des Tatars de Crimée.

M. XUCLÀ (Espagne)* – Cela fera très bientôt un an qu’a eu lieu à Vilnius le sommet qui devait permettre la signature du partenariat oriental de l’Union européenne. Il s’est achevé sans qu’on parvienne à un accord. Le cours de l’histoire aurait pu changer si nous avions pris une décision différente mais, à une voix près, cet accord a échoué. Nous avons donc, au sein de l’Union européenne, commis des erreurs vis-à-vis de l’Ukraine, mais la vision qu’ont les Etats-Unis de la politique européenne est également erronée. Et puis il y a eu Maïdan et les 100 morts de la nuit du 21 au 22 février derniers.

Maintenant, chers collègues, la situation est toute différente, nous sommes en temps de guerre, une de ces guerres d’aujourd’hui, qui ne commencent pas le jour où on la déclare et qui n’ont pas de terme bien précis, une de ces guerres qui se gagnent à l’usure, que l’on cache ou que l’on nie, mais qui ne sont pas sans conséquences et qui ne vont pas sans violer le droit international. Certains, dans cet hémicycle, ont ainsi pu parler de « conflit gelé », mais ce n’en est pas un ! Dans un « conflit gelé », un territoire est perdu entre un Etat d’origine et un Etat qui le protège. En l’occurrence, il s’agit d’une annexion : celle de la Crimée par la Russie. Cela a bien évidemment des conséquences, tant sur le plan politique que sur le plan des relations internationales. Cela ne nous engage pas simplement au titre des décisions que nous prenons ici, à l’Assemblée parlementaire, cela nous implique complètement.

Nous devons également, mes chers collègues, regarder l’avenir et prendre en compte des données précises. Tout d’abord, nous savons que l’économie ukrainienne dépend à 70 % de la Russie. Nous ne pouvons rester passifs face à cela, nous devons proposer une solution alternative à l’Ukraine. Or qu’a proposé l’Union européenne ? Le report de l’accord économique à l’année 2016 ! Quelle déception ! Voilà encore une occasion que l’Union européenne laisse passer. Le vide qu’elle laisse sera occupé par quelqu’un. Qui donc ? Eh bien, celui qui tient entre ses mains les rênes de l’économie ukrainienne.

Enfin, il faut prendre en compte le nombre de personnes déplacées. Entre 500 000 et 800 000 personnes ont été déplacées vers la Russie. Si nous ne proposons pas un plan Marshall à l’Ukraine, elle ne sortira pas de cette crise, et tous ceux qui veulent offrir leur aide et leur concours pour la reconstruction de ce pays frappé par la guerre doivent parrainer ce plan Marshall.

Mme BOKUCHAVA (Géorgie)* – Depuis le début du prétendu cessez-le-feu, plus de cinquante attaques ont été perpétrées par les forces russes. La plus importante, dont la cible était l’aéroport de Louhansk, remonte à seulement quelques jours.

Il y a eu des milliers de morts, des milliers de blessés, et plus de 300 000 personnes sont déplacées. Combien d’autres vies Poutine doit-il encore prendre ? Combien d’enfants devront encore quitter leur foyer ? Combien de personnes encore seront soumises à la torture ? Je suis fermement convaincue que la réponse de Poutine est : « Autant qu’il en faudra ! » Autant qu’il en faudra pour lui assurer le contrôle de l’Ukraine et démembrer celle-ci, autant qu’il en faudra pour établir une nouvelle Union soviétique. Nous le savons tous : il pense que l’effondrement de l’Union soviétique a été la plus grande catastrophe du siècle dernier.

En 2008, comme vous le savez tous, la Géorgie a été envahie par Poutine. Certains se montraient sceptiques en ce qui concerne la responsabilité des uns et des autres. Aujourd’hui, c’est l’Ukraine qui est envahie. À moins que Poutine ne s’arrête, le prochain pays sera peut-être la Moldova, ou la Pologne, ou un Etat balte. Certains me diront que je ne suis pas réaliste, mais, en 2008, beaucoup de collègues ne pouvaient même pas imaginer que l’Ukraine était le prochain pays sur la liste. Nous le disions pourtant déjà, et nous exprimions déjà la crainte que la Crimée soit la cible suivante. Et voici qu’aujourd’hui Poutine essaie de démembrer l’Ukraine !

On prône beaucoup le dialogue dans cette assemblée. Je suis tout à fait d’accord, et je peux vous garantir que je ne préfèrerai jamais un échange de tirs à un échange verbal mais, si l’on veut dialoguer avec la Russie, pourquoi la Russie répond-elle par des tirs ? Jusqu’où irons-nous ? Si la Russie veut faire partie de cette assemblée, elle doit en respecter les règles. Ce n’est pas à nous de suivre les siennes. Nous devons donc faire preuve de fermeté, ne montrer aucune ambiguïté. Je regrette que mon gouvernement ne soit pas aujourd’hui à mes côtés pour tenir ce discours. Nous devons être unanimes, car nous condamnons tous les actes de la Russie, nous soutenons tous l’Ukraine.

M. SASI (Finlande)* – Je veux exprimer toute ma sympathie au peuple ukrainien dans l’épreuve qu’il traverse. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, nous ne voulions plus de guerre, nous voulions faire la paix, pas la guerre. Nous avons créé le Conseil de l’Europe et l’Union européenne pour que les problèmes se règlent autour d’une table et pour que les personnes puissent circuler librement en Europe. Nous avons atteint ces objectifs, et nous ne voulions pas qu’il y ait de barrières, mais le principe du respect des frontières a été inscrit dans les accords d’Helsinki, en 1975.

Aujourd’hui, pourtant, on assiste à des conflits en Ossétie du Sud, en Abkhazie, en Transnistrie et maintenant en Crimée. Il est clair que l’armée russe a pris le pouvoir.

On parle d’un référendum en Crimée. Mais en vérité, il ne s’agit pas d’un véritable référendum, il n’avait rien de comparable avec celui qui s’est tenu en Ecosse. Et aujourd’hui, à Donetsk et à Lougansk, il y a toujours des soldats russes.

Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a adopté un texte demandant à la Russie de retirer son armée d’Ukraine, et je m’en félicite. Il souhaite également un règlement pacifique ainsi que des réformes pour garantir le respect des droits de l’homme et assurer un bon climat dans le pays.

Le plan de paix et le mémorandum sont une étape, mais la mise en œuvre n’a guère suivi. Les forces ukrainiennes ont subi de nombreux tirs, des mouvements de troupes et nous devrons suivre de près ce qui se passera à Marioupol.

Certes, les frontières sont surveillées par l’OSCE, mais les territoires occupés doivent être restitués. C’est pour moi un point crucial. Des élections locales doivent se tenir le plus tôt possible. Au mois de janvier, nous devrons tenir compte de tous ces éléments pour prendre notre décision concernant la Russie.

J’ai beaucoup de sympathie pour Mme L’Ovochkina, qui a parlé de sa circonscription perdue en Crimée. C’est une honte. J’espère que quelque chose pourra être fait après les élections, quand la Crimée sera restituée, pour que les personnes comme elle aient leur mot à dire au parlement.

LA PRÉSIDENTE - Mme Zelienková, inscrite dans le débat, n'est pas présente dans l'hémicycle.

Mme ANTILLA (Finlande)* – La crise ukrainienne a commencé bien avant les événements de Maïdan. La coopération entre l’Union européenne et l’Ukraine a conduit Poutine à menacer l’Union européenne de revoir leurs relations. L’Union européenne a signé des accords de libre-échange et d'association politique avec l'Ukraine, ce qui a divisé le peuple ukrainien.

En Ukraine, les droits des minorités ne sont pas respectés, notamment dans la partie orientale du pays. Or l’Ukraine est un pays souverain qui doit défendre les droits de ces personnes. La Roumanie a été condamnée pour les erreurs qu’elle a commises. Dans ce pays la guerre a causé la mort de nombreuses personnes, d’autres se sont enfuies et ont souffert. C’est une situation tout à fait inacceptable.

Le temps est venu, non pas de rechercher les coupables, mais de trouver une solution diplomatique et pacifique. L’OSCE fait un travail remarquable et soutient les négociations ; il faut continuer sur cette voie. J’espère que les élections à venir seront organisées conformément aux principes européens, qu’elles seront libres et pacifiques.

M. SHEVCHENKO (Ukraine)* – J’appellerai votre attention sur l’agression de l’Ukraine par la Russie. La Russie ne veut pas laisser l’Ukraine réaliser ses réformes, notamment politiques et judiciaires. La Russie craint que ces réformes n’aient un impact sur l’attitude de la population à son égard.

La Russie a un régime totalitaire visant à créer dans l’espace post-soviétique un monde russe. Sur la base de cette idéologie soviétique, Poutine souhaite une grande Russie orthodoxe. Il tient un discours anti-ukrainien affirmant que ce sont les Ukrainiens qui oppriment le monde russe. Or il n’y a eu aucune oppression des minorités russes en Ukraine. Au contraire, c’est la Russie qui veut « russifier » la population ukrainienne.

Aujourd’hui, toutes les écoles ukrainiennes ont été fermées en Crimée et dans le Donbass. La langue ukrainienne est haïe par les militaires russes et des séparatistes. On assiste à une véritable ukrainophobie en Crimée et dans l’est de l’Ukraine.

Je suis étonné par la position de certains députés de droite qui ont soutenu l’agression de l’Ukraine par la Russie. Cette situation me fait penser au héros d’un récit qui rentre se reposer dans son pays, découvre que sa femme a été kidnappée et est battu. Les responsables politiques qui soutiennent Poutine commettent une très grave erreur. En effet, s’unir avec les chauvinistes russes et les néonazis risque de conduire à une union euro-asiatique de néonazis.

LA PRÉSIDENTE - Mme Cimbro, inscrite dans le débat, n'est pas présente dans l'hémicycle.

M. ARIEV (Ukraine)* – Il y a six ans, en septembre 2008, a été organisé un débat selon la procédure d’urgence sur l’agression de la Géorgie par la Russie. Nous avions alors essayé de prouver que Moscou était dangereux et que l’Ukraine allait être sa prochaine cible. La Russie n’a pas reçu de réponse équivalente à son agression et nous discutons maintenant de l’annexion de la Crimée.

Aujourd’hui, on parle de l’occupation terroriste de certains districts en Ukraine. Qui peut être sûr que le dialogue avec les Russes soit efficace ? Le cessez-le-feu n’existe que sur le papier. Depuis la signature des accords de Minsk, ont eu lieu des persécutions, des répressions, des exactions et des tortures.

J’ai sous les yeux une photo prise aujourd’hui à Donetsk après l’explosion d’une école. Des élèves et une enseignante ont trouvé la mort. Voilà le résultat de l’activité du terrorisme russe à Donietsk. Ce que nous voyons, c’est que ces accords ne sont pas respectés par les Russes.

D’autres actions violentes se sont produites, la situation est complexe et nécessite que nous agissions. Vous ne semblez pas vous rendre compte que nous assistons à une véritable escalade de la violence. Il faut reconnaître cette agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Cette Assemblée ne veut-elle pas tirer les leçons du passé et de la seconde guerre mondiale ? Un grand nombre de mouvements néonazis sont à l’œuvre en Ukraine. On ne peut ignorer ce phénomène. Personne en Europe ne peut se sentir en sécurité depuis le printemps dernier. Il faut agir. Personne ne peut dire que les accords protègent. Et lorsque l’on ne réagit pas à l’invasion en Ukraine, on se rend compte ensuite que Poutine soutient le terrorisme.

Des efforts communs sont nécessaires pour instaurer tous types de coopération, y compris militaires, faute de quoi d’autres actions militaires seront lancées contre les voisins de la Russie : la Lituanie, le Kazakhstan, etc. À vous de choisir !

Mme NACHTMANNOVÁ (République slovaque)* – J’aimerais vous faire connaître la déclaration sur la situation en Ukraine adoptée par le Parlement slovaque au mois de septembre.

Le Parlement slovaque soutient les efforts de la communauté internationale visant à obtenir une solution pacifique du conflit dans la partie sud et orientale de l’Ukraine, nouvelle guerre froide en Europe. Il appelle toutes les parties au conflit à respecter les accords de cessez-le-feu et à ne pas relancer le conflit, afin d’éviter les morts et les souffrances des civils.

Nous sommes convaincus que pour trouver une solution pacifique durable au conflit, un compromis acceptable pour le Gouvernement de l’Ukraine comme pour les représentants des insurgés de Donetsk et de Lougansk doit être trouvé.

Le Parlement slovaque appelle les parties au conflit à permettre aux citoyens ukrainiens de prendre une décision indépendante et d’organiser des élections libres et démocratiques sur l’ensemble du territoire ukrainien. Il reste encore un peu de temps pour trouver un accord permettant d’aboutir à une solution pacifique à la crise dans le sud-est de l’Ukraine.

Le Parlement slovaque, depuis le début, soutient une solution pacifique ukrainienne via un accord entre l’Ukraine, la Fédération de Russie, l’Union européenne et les Etats-Unis d’Amérique, afin de respecter pleinement l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine.

La Slovaquie a toujours apporté son soutien à l’orientation européenne de l’Ukraine et elle est prête à lui fournir une assistance en termes d’expertise. Néanmoins, seuls les citoyens ukrainiens souverains de l’Ukraine doivent décider librement de leur politique étrangère.

Mon pays insiste sur sa position vis-à-vis du Kosovo. La même position s’applique à la Crimée. La Slovaquie ne soutient pas la déclaration unilatérale d’indépendance de quelque pays que ce soit quand le droit international n’est pas respecté.

M. LOUKAIDES (Chypre)* – Le débat se déroule aujourd’hui alors que deux événements regrettables ont lieu. D’une part, les Etats-Unis et l’Union européenne ont décidé de renforcer les sanctions économiques contre la Russie alors qu’un fragile cessez-le-feu a été signé au début du mois de septembre. Comment la paix peut-elle être envisagée alors que l’on assiste à une escalade dans la guerre économique ? D’autre part, l’accord d’association entre l’Union européenne et l’Ukraine a été signé sans véritable dialogue avec la société, et nous sommes à la veille d’élections. Encore une fois, les intérêts ont prévalu. Les rivalités géopolitiques évoluent tout comme évolue la militarisation de toute cette partie de l’Europe de l’Est. Cette situation s’accompagne de développements fort dangereux, aux conséquences imprévisibles.

Les décisions prises récemment par l’Otan ont été considérées comme des cris de guerre. Bien entendu, la Russie n’hésite pas à y répondre.

Concernant les réformes constitutionnelles, on relève, ainsi que cela fut souligné dans la note d’information des rapporteurs après leur mission d’enquête sur place au mois de juillet, un grand nombre de manquements, de retards et un défaut de consultation de la société ukrainienne.

Autre point important : le processus de décentralisation du pays contribuerait grandement à la désescalade des tensions dans la région et servirait l’unité du pays et de son peuple. Accorder un statut particulier d’autonomie aux régions de l’Ukraine de l’Est constitue un pas dans la bonne direction même s’il est nécessaire d’éclaircir un certain nombre de points.

Il est regrettable que la demande de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe d’instaurer un nouveau système électoral dans différentes régions et la représentation des citoyens dans toutes les parties du pays n’ait pas encore été acceptée.

La condamnation par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe de l’interdiction du parti communiste en Ukraine par le vote d’une loi, qui est une violation flagrante des principes démocratiques, doit être saluée. C’est le peuple lui-même qui doit décider du rôle de chaque parti dans la vie politique.

Nous avons également remarqué que l’anticommunisme s’est accompagné d’une recrudescence de l’activité néonazie dans le pays et de la participation des forces d’extrême droite au gouvernement. En tant qu’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, il est de notre devoir de faire face aux dangers qui naissent parce que certains tolèrent et soutiennent ces forces en Ukraine. Nous craignons que, tôt ou tard, les parties impliquées s’en rendent compte et qu’une nouvelle fois, leur soutien à ces éléments extrémistes pour des raisons géopolitiques ait un effet de boomerang.

M. AGRAMUNT (Espagne)* – C’est la troisième fois que nous organisons un débat sur la crise en Ukraine. Pendant ce temps, plus de 3 500 personnes sont décédées et les voyageurs du vol MH17 ont péri au mois de juillet dernier.

Cette semaine, j’ai retrouvé mes amis du Parti populaire, dont Mme Ioulia Timochenko. Elle m’a informé que le cessez-le-feu avec les séparatistes avait suscité des espoirs, mais que des agressions ont eu lieu à l’aéroport de Donetsk qui va peut-être tomber entre les mains des rebelles.

En dépit de la volonté du Parlement ukrainien de rétablir la situation et en dépit de l’organisation des élections au mois d’octobre, la situation reste extrêmement précaire. Chaque jour, il y a de nouveaux morts, de nouveaux blessés, chaque jour, le nombre des familles qui manquent de l’essentiel augmente. Plus de 300 000 personnes ont dû quitter leur domicile et pour aller se réfugier dans des camps. Trouver des solutions pour faire face à l’hiver s’impose.

Quelque 40 000 personnes ont décidé de revenir à Lougansk au péril de leur vie : elles sont épuisées face aux difficultés qu’elles doivent affronter ; 1500 enfants sont dans une situation très précaire. L’Ukraine a besoin de tout notre soutien.

La solution passe par le dialogue entre M. Porochenko et M. Poutine. Le Président russe doit arrêter ses troupes et respecter l’accord passé avec l’Ukraine. La menace ne suffit pas. En tout état de cause, la situation ne peut pas perdurer sur le sol ukrainien.

Il faudra également faire face à une autre menace, celle des djihadistes, que nous évoquerons demain, et qui met en danger la sécurité de tous les pays européens, y compris celle de la Fédération de Russie.

Le cessez-le-feu en Ukraine n’est pas une fin en soi : ce qu’il faut, c’est obtenir la paix.

M. MORENO PALANQUES (Espagne)* – Il y a deux semaines les Parlements européen et ukrainien ont signé un accord d’association qui n’entrera en application qu’en 2016. Il renforcera les rapports politiques et économiques entre l’Union européenne et l’Ukraine – tel est son objet.

Le même jour le Parlement ukrainien a adopté des lois créant un statut spécial pour Donetsk et Lougansk, visant à permettre aux séparatistes d’utiliser le russe et d’entretenir des rapports économiques avec des provinces russes limitrophes. Il faut soutenir sans condition le processus de paix engagé par M. Porochenko et assurer le respect du principe de l’égalité internationale. L’Ukraine doit pouvoir choisir son destin.

À cette fin, et conformément à la loi internationale, l’Ukraine doit recouvrer son intégrité territoriale. Nous devons par ailleurs nous montrer solidaires des pays de l’Union européenne qui peuvent se sentir menacés – pays Baltes, Pologne, Hongrie – et soutenir l’Ukraine dans son processus de réformes et de rapprochement avec l’Union européenne.

Enfin, et c’est une question capitale, l’Europe doit décider si elle veut de la Russie comme adversaire ou comme allié stratégique. Pour moi, la réponse est claire : la Russie doit être un allié stratégique. Auparavant, toutefois, elle doit respecter le droit international, notamment l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Il faudra parallèlement trouver une forme d’association économique de long terme entre la Russie et l’Union européenne. Un accord d’association et une union douanière devront être mis en place. Ces deux instruments représenteront un premier vers un accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Russie. Mais pour y parvenir, la situation actuelle devra évoluer de manière radicale.

D’après l’Onu, plus de 3 000 personnes sont mortes à Donetsk ou à Lougansk depuis le mois d’avril. Cela doit cesser. La légalité internationale doit être de nouveau respectée. Tous les Etats voisins doivent pouvoir se sentir en sécurité.

Rétablir la coopération est la seule voie pour mettre fin au conflit. Toutes les parties en profiteront.

LA PRÉSIDENTE – M. Badea, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. EßL (Autriche)* – Depuis six mois, des informations désastreuses nous parviennent quotidiennement de l’est du continent, désastreuses non pas simplement parce que l’Ukraine a des frontières communes avec les pays de l’Union européenne, mais également parce que la population est la première victime du conflit.

C’est la tâche du Conseil de l’Europe d’agir pour rétablir la paix. Nous ne saurions laisser la Russie imposer par la force ses choix géopolitiques. Les droits des minorités et la démocratie ont-ils été respectés ? Il est possible d’en discuter. Toutefois, pour combler d’éventuelles lacunes, la solution ne peut être que politique. Elle ne saurait en aucun cas être militaire.

Cette guerre a déjà fait trop de victimes. C’est pourquoi le Conseil de l’Europe, l’OSCE et l’Union européenne doivent rétablir le dialogue et promouvoir des solutions diplomatiques. Les sanctions économiques sont-elles le bon remède ? Très souvent, elles en entraînent d’autres, ce qui est mauvais pour l’économie.

Convient-il de parler des intérêts de l’Otan en Ukraine ? Ce serait, à mes yeux, envoyer un mauvais signal. C’est pourquoi j’y suis défavorable. C’est avec la Russie et non contre elle que l’Ukraine doit trouver une solution pacifique, ce qui suppose, notamment, la reconnaissance mutuelle du droit des minorités et de la souveraineté de l’Etat ukrainien – le droit international l’exige. Il faut que la Russie, elle aussi, le reconnaisse. C’est pourquoi, en tant qu’organisation, le Conseil de l’Europe devrait lui demander de se retirer d’Ukraine.

La résolution de la crise passe notamment par un cessez-le-feu, surveillé par les experts de l’OCDE : malheureusement, celle-ci n’est pas pour demain. Aussi le Conseil de l’Europe, qui milite pour la paix et le respect du droit, doit-il promouvoir le dialogue et y participer.

M. VECHERKO (Ukraine)* – L’Ukraine, à l’heure actuelle, doit affronter des difficultés non seulement économiques et politiques mais également énergétiques, ce qui est plus grave encore. Au centre et à l’ouest du pays, on s’efforce de trouver des réponses aux besoins de sécurité des enfants. Alors que l’énergie est nécessaire pour chauffer les foyers, notre monnaie, la hryvnia, perd de sa valeur. Il faut savoir que l’hiver est très froid chez nous et que nous sommes menacés par une vraie catastrophe en matière d’approvisionnement en gaz. Cette situation ne peut être réglée que grâce à un dialogue constructif entre l’Ukraine, la Russie, l’Union européenne et les Etats membres du Conseil de l’Europe. Chaque pays doit apporter son concours à la résolution du conflit et trouver la bonne approche par le biais de consultations, qui ne doivent pas se tenir seulement au plus haut niveau, mais également entre les représentants des autres niveaux de pouvoir. Ainsi, il ne revient pas seulement aux présidents des parlements concernés d’entamer le dialogue, mais également aux députés ukrainiens et russes avec les délégués du Conseil de l’Europe. Il faut agir le plus vite possible pour obtenir la paix civile.

C’est la paix, uniquement la paix, et la fin de la mort d’innocents que nous réclamons. Or, pour mettre en œuvre ce cessez-le-feu, il faut maintenir le lien avec la Fédération de Russie et régler la situation en Ukraine. Une élection à laquelle ne participent pas des millions de personnes est une élection où nombre de députés ne représentent plus leur électorat. En effet, les personnes réfugiées sont privées de leur droit de vote. Aujourd’hui, ces réfugiés ne rejoignent pas seulement le centre de l’Ukraine, ils partent aussi vers toute l’Europe. Il ne faut pas oublier ces citoyens. Ce n’est que par le biais de négociations que nous parviendrons à la paix.

Je voudrais redire une dernière fois à tous que j’ai travaillé depuis le début de ma carrière politique à l’intégration européenne de l’Ukraine. J’ai mis toutes mes forces dans ce projet et je ferai tout mon possible pour que la paix soit rétablie et pour que les femmes et les hommes puissent vivre en toute sécurité pas seulement en Ukraine mais partout en Europe.

LA PRÉSIDENTE* – Au nom de toute l’Assemblée, je vous remercie pour votre engagement et vous souhaite bonne chance.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – Laissez-moi tout d’abord vous rappeler ce qui s’est passé il y a quelques semaines à peine : s’il continue de se produire parfois des conflits entre les forces armées dans la zone critique de l’est de l’Ukraine, un premier pas a été fait en faveur d’un processus de paix. Je suis convaincu qu’il sera possible de résoudre le conflit, mais que cela ne sera rendu possible que grâce à des négociations continues.

La Hongrie s’intéresse au développement de cet accord, car la crise la touche également et elle se sent concernée non seulement parce qu’elle est un pays voisin de l’Ukraine, mais parce que nous dépendons aussi des fournitures énergétiques de la Russie. L’agriculture, les entreprises hongroises souffrent des pertes causées par les sanctions et, malheureusement, ces pertes ne sont pas couvertes par le fonds de compensation, qui n’était pas suffisamment doté. Si nous restons convaincus de l’efficacité des sanctions, il ne fait aucun doute qu’elles auront des conséquences sur la Hongrie, comme ce fut déjà le cas par le passé.

Il faut chercher à améliorer la démocratie. Des élections législatives auront lieu le 26 octobre en Ukraine et non seulement le président, mais également tous les représentants seront légitimés après ces élections. Dans une situation particulièrement complexe et difficile, cette légitimité est nécessaire pour l’Ukraine mais aussi pour toute la communauté démocratique. Elle est d’une importance vitale.

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et l’OSCE, réunies en une mission d’observation commune, vont soutenir ce processus. Les résultats sont attendus. Toutefois, si la nouvelle loi électorale hongroise permet aux minorités nationales d’avoir une représentation au sein du parlement en Hongrie, ce n’est malheureusement pas le cas en Ukraine. La minorité nationale hongroise vivant en Ukraine n’a pas eu jusqu’à présent la possibilité d’élire de représentants par un scrutin direct. Cependant, aujourd’hui, l’avenir devrait être plus rose et nous espérons que les prochaines modifications de la loi électorale ukrainienne permettront une élection directe des représentants de la minorité auprès du Parlement ukrainien.

Nous souhaitons qu’une véritable stabilisation s’instaure dans le pays après ces élections et que la démocratie y soit respectée au plus vite.

LA PRÉSIDENTE – MM. Matušić et Chikovani, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle

M. PETRENCO (République de Moldova)* – Chers collègues, ce n’est pas la première session au cours de laquelle nous examinons la situation en Ukraine. Il y a un an, en séance plénière, le rapport de la commission de suivi avait suscité de nombreuses interventions passionnées au moment où devait intervenir cet accord d’association avec l’Union européenne pour demander comment l’on pouvait changer ainsi le cours des choses. Puis, un projet de résolution avait inscrit la nécessité d’avoir un référendum en Ukraine, mais les citoyens ukrainiens ont été privés du droit de décider de leur avenir et, en janvier, notre Assemblée a majoritairement rejeté notre proposition de condamner les manifestations néofascistes. Personne n’avait prêté l’oreille à nos propos. Puis, il y a eu le refus clair de Kiev de signer l’accord d’association, suivi de l’Euromaïdan, des tirs et, au bout de compte, cela a conduit à un coup d’Etat et à l’arrivée au pouvoir d’un nouveau régime dit pro-européen, qui a immédiatement engagé une lutte contre les communistes, contre les mémoriaux et monuments au communisme, interdit les radios et les chaînes de télévision russes et l’utilisation de la langue russe.

En avril, notre Assemblée a adopté une nouvelle résolution, manquant totalement d’objectivité. La situation y était analysée de façon partiale. Cette résolution ne cherchait pas à résoudre le problème, mais à soutenir ceux qui, au bout du compte, ont levé les armes contre leur propre peuple.

J’ai eu l’occasion de me rendre en Ukraine à Lougansk et dans d’autres régions. J’étais apparemment la première personne de l’Assemblée parlementaire à me rendre à Lougansk après le cessez-le-feu et j’ai pu leur dire : « Ce n’est pas contre des terroristes que vous luttez, mais contre votre propre peuple que vous tirez. » On ne peut pas traiter ces personnes de « terroristes » car qui a tiré sur les écoles et les hôpitaux à Lougansk ? Qui a tiré sur des immeubles d’habitation ? Qui a bombardé l’école N 57 à Donetsk, ou encore sur l’autobus qui a fait huit morts ? C’étaient des civils, ce n’étaient pas des terroristes sur lesquels on a tiré. Il n’y a aucune justification possible pour ces crimes de guerre.

Je m’adresse aux plus hauts dirigeants du Conseil de l’Europe : il faut que ces personnes puissent vivre avec de la lumière et de l’eau. Ils n’ont plus d’électricité, ils n’ont plus rien à manger, aucun produit de première nécessité, plus de salaires, de pensions ni de retraites. C’est une véritable catastrophe humanitaire. C’est à cela qu’il faut penser avant tout et non à des réformes constitutionnelles ou à de nouvelles élections à la Verkhovna Rada.

J’appelle le Conseil de l’Europe à condamner l’action militaire de l’Ukraine contre sa population au Donbass et à enquêter sur ces crimes. Tous ceux qui ont ordonné ces tirs criminels sur leur propre peuple doivent répondre leurs actes. L’Assemblée doit nommer un nouveau rapporteur sur l’Ukraine et corriger les erreurs du passé.

Mme JOHNSEN (Norvège)* – Le Conseil de l’Europe est vivement préoccupé par l’évolution de la situation en Ukraine. Au mois d’août, l’armée russe a combattu l’armée ukrainienne. La Russie joue un rôle de plus en plus actif dans le conflit. De toute évidence, elle cherche l’escalade. Le Gouvernement ukrainien, lui, a choisi la voie diplomatique.

Les pays occidentaux ont réagi en adoptant des sanctions économiques et la Norvège a pris sa part dans le dispositif annoncé le 12 septembre. Le ministre norvégien des Affaires étrangères s’est rendu place Maïdan et a promis une aide humanitaire. On estime qu’actuellement 200 000 personnes en ont besoin, mais la situation empire de jour en jour. Dans la région de Donetsk, la population fuit les combats. Malheureusement, les ONG n’ont pas toujours accès aux territoires dans lesquels la population souffre le plus. Les civils craignent d’être tués ou blessés. Des enlèvements ont lieu, ainsi que des actes de torture et des emprisonnements illégaux.

Le Gouvernement ukrainien a mis en place un plan d’action pour l’aide humanitaire en coopération avec les Nations Unies. Les besoins en eau, en médicaments et en logements sont énormes. Les réfugiés vivent dans les écoles. On chiffre les besoins de l’aide internationale à 33 millions de dollars. La Norvège participera à cet effort à hauteur de 1 million d’euros. Cette somme sera affectée à l’éducation et à la protection des civils. De nombreux enfants ukrainiens ne peuvent plus aller à l’école. Ils ont par ailleurs besoin de soutien psychologique. L’Unicef va être chargée de gérer l’aide apportée par la Norvège.

Le Conseil de l’Europe doit suivre de près la situation en Ukraine. Les sanctions à l’égard de la Russie doivent être maintenues. Ce pays ne respecte pas le droit international. La communauté internationale doit aider l’Ukraine à avancer vers une solution pacifique au conflit. Ceux qui sont morts sur la place Maïdan ne doivent pas être morts en vain.

M. FRONC (République slovaque)* – Avant la première guerre mondiale, personne ne croyait qu’un conflit allait éclater. La seconde guerre mondiale a elle-même commencé après les accords de Munich. L’Histoire nous appelle à la vigilance. Aujourd’hui, aux frontières de l’Union européenne, se déroule un conflit qui nous concerne directement. L’aide humanitaire et économique apportée à l’Ukraine est très importante. Nous devons l’organiser dans les meilleures conditions et exprimer ainsi notre solidarité à l’égard du peuple ukrainien, qui souffre.

Le peuple ukrainien est divisé. Cette division a des causes économiques mais aussi historiques. Pendant des siècles, l’Ukraine de l’ouest a fait partie de l’Europe. La partie est appartenait à l’empire russe. Un pays, une langue, mais deux traditions historiques et culturelles : cette situation sert d’alibi aux intérêts impériaux de la Russie.

Nous souhaitons tous qu’un dialogue s’instaure, mais pour dialoguer, il faut être deux. Il faut forcer les Russes à dialoguer. La position de l’Union européenne à l’égard de la Russie est claire. Il ne s’agit pas d’une position hostile ; c’est une position qui exprime l’exigence européenne du respect du droit international et de la justice. Cette exigence vaut pour les petits pays comme pour les grands.

Mme GUŢU (République de Moldova) – Nous débattons de la crise en Ukraine pour la quatrième fois cette année. Des documents ont été produits, des auditions ont été organisées, des visites ont été effectuées par les membres de l’APCE. Je voudrais m’arrêter aujourd’hui sur les causes et les effets de ce que nous appelons ici « la crise en Ukraine ».

Les effets sont les suivants : une crise humanitaire sévit dans l’Est de l’Ukraine ; des violations graves des droits de l’homme persistent en Crimée et dans l’est de l’Ukraine ; un conflit gelé est né en Crimée. L’Assemblée a voté une résolution visant la suspension des droits de vote de la délégation russe, la Russie ayant purement et simplement annexé la Crimée.

Dans ces conditions, est-il raisonnable de parler des causes de la crise en Ukraine ? Je considère que oui. La cause principale de ce conflit, comme le constatent également les experts en matière de droits de l’homme, a été le désir des Ukrainiens de définir eux-mêmes leur politique étrangère. Les premières manifestations place Maïdan visaient à protester contre la décision de Ianoukovitch de ne pas signer l’accord d’association avec l’Union européenne. Ces manifestations ont également été causées par les représailles des forces de l’ordre à l’égard des étudiants qui avaient manifesté dans le calme place Maïdan.

Lors de la réunion du Bureau de l’Assemblée, lundi, certaines voix se sont prononcées pour le dialogue avec la délégation russe. Oui, ce dialogue est nécessaire, mais notre Assemblée ne doit pas se sentir coupable d’avoir suspendu les droits de vote de cette délégation.

D’autres membres de l’Assemblée ont prononcé aujourd’hui une phrase incroyable : « la Russie a des intérêts légitimes en Ukraine ». Mais quels sont-ils ? L’Union soviétique n’existe plus. Est-il normal qu’un Etat viole la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un autre Etat ?

Le phénomène du séparatisme explique en partie l’annexion de la Crimée. C’est un sujet très délicat, car le droit international prévoit le droit des peuples à l’autodétermination. Néanmoins, peut-on accepter aujourd’hui le démantèlement de territoires souverains, constitués au sein d’Etats nationaux ayant conquis leur indépendance au fil des siècles ? La question est sans doute rhétorique mais une réflexion scientifique, politique et géopolitique, est nécessaire. Il vaut mieux discuter du problème du séparatisme que de l’éviter.

Dans mon pays, il existe également des tendances séparatistes. M. Petrenco, qui vient de s’exprimer, a lui-même participé à l’entraînement de jeunes qui devaient ensuite se rendre en Ukraine pour combattre le néonazisme. Le terme de « séparatisme » n’est pas reconnu dans les législations nationales des pays européens, on parle plutôt de « terrorisme ». La Russie a adopté l’année dernière une législation contre le séparatisme. Le texte de loi ne parle pas de « séparatisme » mais d’ « actions portant atteinte à l’intégrité territoriale du pays ».

J’ai déposé en commission des questions politiques une motion pour un projet de résolution ayant comme titre « La nécessité de prévenir et de combattre le séparatisme ». J’espère que le Bureau de l’Assemblée prendra vendredi, au cours de sa réunion, la décision de préparer un rapport sur le sujet du séparatisme d’obédience soviétique.

LA PRÉSIDENTE – Mme Virolainen, inscrite dans le débat, n'est pas présente dans l'hémicycle.

M. OMTZIGT (Pays-Bas)* – Ce n’est pas la première fois, en effet, que nous parlons de l’Ukraine. Nous évoquons souvent, dans cette Assemblée, des sujets qui concernent les droits des individus. Aujourd’hui, comme nous l’ont rappelé nos collègues géorgiens, nous parlons de faits qui se sont déjà produits une fois dans le passé. Voilà qui sonne peut-être le glas de la Convention européenne des droits de l’homme. Notre Organisation devrait en être consciente. Notre priorité devrait être de veiller au bon fonctionnement des mécanismes que nous avons mis en place.

Je regrette que MM. Jagland et Muižnieks aient rapidement quitté l’hémicycle. Très souvent, on parle de dialogue mais, pour les politiques, cela revient à : « je parle, vous m’écoutez » ; et la réciproque ? Cela vaut aussi pour les membres de notre Assemblée : je vois plus de sièges vides que de sièges occupés.

Je félicite le Comité des Ministres qui, une fois n’est pas coutume, s’est montré très clair : les troupes russes sont présentes sur le territoire ukrainien. C’est une violation manifeste de la Convention et de nos mécanismes habituels. Il faut en prendre acte et agir en conséquence pour que cela cesse.

Il est dommage que l’Assemblée ne fasse pas de déclaration à ce sujet. S’il y en avait une, il faudrait à mon avis y dire deux choses. D’abord, la Cour européenne des droits de l’homme devrait traiter très rapidement les affaires interétatiques. L’affaire Géorgie c. Russie n’est pas close. J’aimerais qu’il y ait très vite une nouvelle affaire impliquant la Russie et l’Ukraine. C’est la Cour, plutôt que notre Assemblée, qui doit se prononcer sur les questions de légalité.

Ensuite, dans l’affaire du vol MH17, 50 à 60 personnes n’ont pas été identifiées. L’épave est encore sur place. Il s’agit sans doute de l’attaque la plus meurtrière en Europe des vingt dernières années. Elle n’était peut-être pas intentionnelle, mais la coopération est minimale lorsqu’il s’agit de trouver les coupables de la mort de près de 300 innocents. Les responsables doivent être traduits en justice, sans quoi il ne sert plus à rien de travailler sur des affaires individuelles.

Madame la Présidente, pouvez-vous demander au Secrétaire Général et au Commissaire aux droits de l’homme de rester parmi nous à l’avenir lors d’un débat de ce type ?

M. SYMONENKO (Ukraine)* – J’aimerais revenir sur plusieurs postulats qui me paraissent importants.

Tout d’abord, c’est une guerre civile qui a lieu en Ukraine : des Ukrainiens tuent d’autres Ukrainiens. Des femmes, des vieillards, des enfants sont assassinés.

Ensuite, la sympathie que l’on entend ici ou là s’exprimer à l’égard des morts ne leur servira plus à grand-chose. Ce qu’il faut, c’est une politique responsable, susceptible de modifier le cours des événements. Il aurait fallu prévoir que cette guerre risquait d’éclater et tenter de la prévenir. C’est cela, notre mission.

Cette guerre ne s’explique pas par des facteurs extérieurs, mais par des causes internes. Ce sont elles qu’il nous faut approfondir pour comprendre la destruction de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du pays.

Voici la question essentielle à laquelle il nous faut répondre : aurait-il été possible d’éviter cette guerre ? Selon moi, oui. Nous avons tout fait, mes collègues et moi-même, pour que les Ukrainiens puissent choisir par référendum l’Union européenne ou l’union douanière avec la Russie. La loi ukrainienne subordonnait l’organisation d’un référendum au dépôt de signatures ; il y en a eu 3,5 millions ! Mais le régime corrompu de l’ancien président et les oligarques ont fait obstacle au processus et empêché la population d’exprimer sa volonté.

Quelles sont les raisons du conflit entre l’Est et les autorités de Kiev ? Après Maïdan, ces dernières étaient favorables à l’euro-intégration, tandis qu’à l’Est on défendait l’union douanière. J’ai demandé personnellement que l’Union européenne soit avertie du fait qu’un référendum était indispensable pour éviter l’effusion de sang. Certains ont demandé que le russe devienne langue officielle, la décentralisation du pouvoir et des référendums au niveau local. En réponse, les autorités de Kiev ont envoyé les tanks.

Pourquoi les choses se sont-elles passées différemment en Ecosse ? Pourquoi a-t-on laissé les Ecossais exprimer leur point de vue par référendum ? C’est ce que voulait le peuple ukrainien, mais il n’y a pas eu droit.

Enfin, nous sommes très inquiets de la montée du néofascisme et du néonazisme en Ukraine. L’Europe doit exiger du Gouvernement ukrainien qu’il se débarrasse des néofascistes, honorant ainsi ses engagements de Genève, sans quoi ce sera la fin de l’Ukraine.

M. DZHEMILIEV (Ukraine)* – Dans le bref temps de parole qui m’est alloué, j’aimerais vous informer de la situation en Crimée, territoire occupé par les forces armées russes, et en particulier de la situation des Tatars.

Ce peuple, déporté par le régime soviétique en 1944 et victime d’un véritable génocide, a été autorisé à revenir dans son pays au bout de plusieurs décennies de lutte, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, après l’indépendance de l’Ukraine. Mais il vit aujourd’hui une situation extrêmement difficile.

Les Tatars se sont en effet opposés aux mouvements séparatistes russes de Crimée et à l’occupation. La Russie a tenté par différentes promesses de les rallier à l’invasion et à l’annexion. M. Poutine a négocié, y compris avec moi. Mais, ne parvenant pas à ses fins, il a renoué avec sa méthode agressive, que d’autres ici ont décrite avant moi.

La répression exercée par les forces d’occupation contre les Tatars s’est aggravée ces dernières semaines. Leur institution la plus importante, la Mejlis, les a appelés à boycotter les « élections » locales. Elle a été attaquée dans les jours qui ont suivi le scrutin. Tous les documents ont été confisqués, les ordinateurs ont été volés, les bureaux du principal organe de presse ont été occupés, il a été procédé à des arrestations arbitraires ; il y a eu une vague de fouilles dans les maisons, les bureaux, les mosquées et les bibliothèques – plus de quarante au cours de la semaine passée. Plus de 200 000 livres sont interdits.

Si trois personnes se rassemblent, c’est déjà une réunion interdite. C’est un meeting illégal… Il existe une censure très dure de tous les moyens d’information. Les forces d’occupation en Crimée ne permettent à personne de partir. On déplore des meurtres. Nous sommes les témoins d’une occupation avec des disparus, quinze un jour, trois le lendemain dans une ville. Une forme d’autodéfense s’est mise en place.

Monsieur Aksyonov, le Premier ministre de Crimée, menace de déclarer persona non grata les diplomates occidentaux.

Il y a deux jours, un jeune a disparu. Le représentant de la Fédération de Russie a déclaré ne disposer d’aucune information sur les personnes disparues. Les forces russes sont sur tout le territoire. Il est question que les combats se poursuivent. On parle de détruire la « cinquième colonne ». C’est ainsi qu’on désigne les Tatars de Russie qui n’acceptent pas l’annexion. Ces personnes sont donc menacées de mort. Un ministre a déclaré que tous ceux qui n’accepteront pas ouvertement le rattachement à la Russie seront tués. Ce serait un véritable génocide des Tatars de Crimée.

Nous espérons que l’ensemble de la société européenne, en particulier le Conseil de l’Europe, pourront aider la Crimée à se libérer de cette occupation illégale.

LA PRÉSIDENTE* – Nous avons terminé la liste des orateurs. Je remercie tous ceux qui ont participé à ce débat très important, en particulier M. Schennach. Comme président de la commission de suivi, il a été très actif. Je le remercie tout particulièrement.

Nous n’avons pas à voter sur un texte. Nous avons eu un important échange de vues. Peut-être que par la suite, le Bureau proposera que la question traitée soit renvoyée à une commission compétente pour qu’elle rédige un rapport.

3. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 19 h 20.

SOMMAIRE

1. Le fonctionnement des institutions démocratiques en Géorgie (Suite)

Vote sur un projet de résolution amendé

2. La crise en Ukraine (débat d’actualité)

M. Schennach

Mmes L’Ovochkina, Reps, MM. Hunko, Franken, Lord Anderson

M. Muiznieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe

MM. Popescu, Spautz, Mme Vésaité, MM. Ghiletchi, Leigh, Jensen, Di Stefano, Mme Finckh-Krämer, MM. Sobolev, Rouquet, Zingeris, Hancock, Kox, Mmes Christoffersen, Spadoni, de Pourbaix-Lundin, MM. Selvi, Xuclà, Mme Bokuchava, M. Sasi, Mme Antilla, MM. Shevchenko, Ariev, Mme Nachtmannová, MM. Loukaides, Agramunt, Moreno Palanques, Eßl, Vecherko, Csenger-Zalán, Petrenco, Mme Johnsen, M. Fronc, Mme Guţu, MM. Omtzigt, Symonenko, Dzhemiliev

3. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 11.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

AGRAMUNT Pedro

ALEKSANDROV Alexey Ivanovich*

ALLAIN Brigitte*

ALLAVENA Jean-Charles

AMON Werner*

AMTSBERG Luise*

ANDERSEN Liv Holm*

ANDERSON Donald

ANDREOLI Paride/Giovagnoli Gerardo

ARIB Khadija*

ARIEV Volodymyr

BACQUELAINE Daniel*

BAĞIŞ Egemen*

BAKOYANNIS Theodora*

BAKRADZE David*

BALLA Taulant*

BAPT Gérard/Le Borgn' Pierre-Yves

BARCIA DUEDRA Gerard / Bonet Perot Sílvia Eloïsa

BARNETT Doris*/Schäfer Axel

BARREIRO José Manuel*

BAYKAL Deniz

BECK Marieluise*

BENEŠIK Ondřej*

BENEYTO José María*

BERDZENISHVILI Levan/Magradze Guguli

BERGAMINI Deborah*

BERISHA Sali/Bylykbashi Oerd

BERNINI Anna Maria/Fazzone Claudio

BERTUZZI Maria Teresa*

BIEDROŃ Robert

BİLGEHAN Gülsün

BINLEY Brian

BLAHA Ľuboš/Gabániová Darina

BLANCHART Philippe*

BLANCO Delia/Quintanilla Carmen

BOCKEL Jean-Marie*

BOCQUET Eric*

BORZOVA Olga*

BOSIĆ Mladen/Dervoz Ismeta

BRAGA António*

BRASSEUR Anne/Spautz Marc

BRATTI Alessandro*

BÜCHEL Gerold/Gopp Rainer

BUGNON André/Recordon Luc

BURYKINA Natalia*

CATALFO Nunzia*

CEDERBRATT Mikael*

CENTEMERO Elena*

CHIKOVANI Irakli

CHITI Vannino*

CHIUARIU Tudor-Alexandru/Badea Viorel Riceard

CHOPE Christopher

CHRISTOFFERSEN Lise

CHUKOLOV Desislav*

ČIGĀNE Lolita*

CILEVIČS Boriss

CIOCH Henryk

CLAPPISON James*

CONDE Agustín

CORREIA Telmo*

CORSINI Paolo

COSTA NEVES Carlos

COSTANTINO Celeste*

CROSIO Jonny*

CRUCHTEN Yves

CSENGER-ZALÁN Zsolt

CSÖBÖR Katalin

DAMYANOVA Milena*

DEBONO GRECH Joseph*

DECKER Armand*

DENEMEÇ Reha

DESEYN Roel*

DI STEFANO Manlio

DÍAZ TEJERA Arcadio

DIJK Peter

DİŞLİ Şaban

DJUROVIĆ Aleksandra

DRAGASAKIS Ioannis*

DRĂGHICI Damian

DROBINSKI-WEIß Elvira*

DUMERY Daphné*

DUNDEE Alexander

DURRIEU Josette*

DZURINDA Mikuláš*

ECCLES Diana/Leigh Edward

ERKAL KARA Tülin

EßL Franz Leonhard

FABRITIUS Bernd*

FENECH ADAMI Joseph*

FENECHIU Cătălin Daniel

FETISOV Vyacheslav*

FIALA Doris/Schneider-Schneiter Elisabeth

FILIPIOVÁ Daniela*

FINCKH-KRÄMER Ute

FISCHER Axel E.*

FLEGO Gvozden Srećko

FOURNIER Bernard*

FRANKEN Hans

FRÉCON Jean-Claude*

FRESKO-ROLFO Béatrice*

FRONC Martin

GALE Roger*

GAMBARO Adele

GARÐARSSON Karl

GERASIMOVA Nadezda*

GHILETCHI Valeriu

GIRO Francesco Maria

GOGA Pavol*

GÓRCZYŃSKI Jarosław*

GORGHIU Alina Ştefania*

GORYACHEVA Svetlana*

GOZI Sandro/ Cimbro Eleonora

GRAAF Fred/Omtzigt Pieter

GROOTE Patrick*

GROSS Andreas

GROZDANOVA Dzhema*

GÜLPINAR Mehmet Kasim

GULYÁS Gergely*

GÜR Nazmi

GUTIÉRREZ Antonio/Xuclà Jordi

GUŢU Ana

GUZENINA Maria/Pelkonen Jaana

GYÖNGYÖSI Márton*

HÄGG Carina*

HAJIYEV Sabir

HALICKI Andrzej*

HAMID Hamid*

HANCOCK Mike

HANSON Margus

HEER Alfred/Pfister Gerhard

HENNRICH Michael*

HENRIKSEN Martin*

HETTO-GAASCH Françoise

HOFMAN Adam*

HOOD Jim*

HOVHANNISYAN Arpine*

HÜBINGER Anette*

HÜBNER Johannes*

HUNKO Andrej

HUSEYNLI Ali*

HUSEYNOV Rafael*

IORDACHE Florin*

IWIŃSKI Tadeusz*

JACQUAT Denis*

JAKAVONIS Gediminas

JANDROKOVIĆ Gordan

JANTUAN Stella

JAPARIDZE Tedo

JENSEN Michael Aastrup

JENSSEN Frank J.

JÓNASSON Ögmundur

JOVIČIĆ Aleksandar/Pantić Pilja Biljana

JURATOVIC Josip*

KAIKKONEN Antti/Anttila Sirkka-Liisa

KAMIŃSKI Mariusz*

KARADJOVA Deniza*

KARAMANLI Marietta

KARLSSON Ulrika*

KATIČ Andreja*

KAŹMIERCZAK Jan*

KIVALOV Serhii*

KLICH Bogdan*

KLYUEV Serhiy/Pylypenko Volodymyr

KOÇ Haluk

KOLMAN Igor

KONRÁÐSDÓTTIR Unnur Brá*

KORENJAK KRAMAR Ksenija

KORODI Attila/Kelemen Attila Béla-Ladislau

KORUN Alev*

KOSTŘICA Rom/Pecková Gabriela

KOUNTOURA Elena

KOVÁCS Elvira

KOX Tiny

KRIŠTO Borjana*

KRYVITSKY Dmitry*

KYRIAKIDOU Athina

LE DÉAUT Jean-Yves*

LEBEDEV Igor*

LÉONARD Christophe/Crozon Pascale

LESKAJ Valentina

LEYDEN Terry

LĪBIŅA-EGNERE Inese*

LONCLE François / Philippe Bies

LOUKAIDES George

L'OVOCHKINA Yuliya

LUND Jacob

MACH Trine Pertou*

MAGAZINOVIĆ Saša*

MAHOUX Philippe

MARIANI Thierry

MARKOVÁ Soňa/ Holík Pavel

MARKOVIĆ Milica*

MATEU PI Meritxell

MATTILA Pirkko*

MATUŠIĆ Frano

MAURY PASQUIER Liliane

McNAMARA Michael

MEALE Alan*

MEHMETI DEVAJA Ermira*

MELNIKOV Ivan*

MENDES BOTA José

MENDONÇA Ana Catarina*

MESTERHÁZY Attila*

MIGNON Jean-Claude

MIßFELDER Philipp*

MITCHELL Olivia

MORENO PALANQUES Rubén

MOROZOV Igor*

MOTA AMARAL João Bosco

MULARCZYK Arkadiusz*

MULIĆ Melita

MYRYMSKYI Lev*

NACHBAR Philippe*

NACHTMANNOVÁ Oľga

NAGHDALYAN Hermine*

NEACŞU Marian/Florea Daniel

NÉMETH Zsolt*

NICHOLSON Emma/Gillan Cheryl

NICOLETTI Michele

NIKOLAEVA Elena*

NIKOLOSKI Aleksandar

NYKIEL Mirosława*

OBRADOVIĆ Marija

OBRADOVIĆ Žarko

OEHRI Judith*

OHLSSON Carina*

O'REILLY Joseph

OROBETS Lesia/Mustafa Dzhemiliev

OSBORNE Sandra/Crausby David

PALACIOS José Ignacio*

PALIHOVICI Liliana*

PASHAYEVA Ganira*

PIPILI Foteini*

POPESCU Ivan

POURBAIX-LUNDIN Marietta

PREDA Cezar Florin

PRESCOTT John*

PUCHE Gabino

PUSHKOV Alexey*

REPS Mailis

RICHTROVÁ Eva

RIGONI Andrea*

ROCHEBLOINE François/Reiss Frédéric

ROSEIRA Maria de Belém*

ROUQUET René

RYABIKIN Pavlo/Iryna Gerashchenko

RZAYEV Rovshan

SAAR Indrek

SANTANGELO Vincenzo/ Spadoni Maria Edera

SASI Kimmo

SCHEMBRI Deborah*

SCHENNACH Stefan

SCHOU Ingjerd/Johnsen Kristin Ørmen

SCHWABE Frank

SCHWALLER Urs

SEARA Laura

SEDÓ Salvador

ŠEHOVIĆ Damir

SEKULIĆ Predrag*

SELVİ Ömer

SENIĆ Aleksandar

ŠEPIĆ Senad*

SEYIDOV Samad*

SHERIDAN Jim

SHEVCHENKO Oleksandr

SIEBERT Bernd*

ŠIRCELJ Andre*

SKARDŽIUS Arturas

SLUTSKY Leonid*

SOBOLEV Serhiy

STEFANELLI Lorella

STOILOV Yanaki*

STRENZ Karin*

STROE Ionuţ-Marian*

SUDARENKOV Valeriy*

SYDOW Björn*

SYMONENKO Petro

TAKTAKISHVILI Chiora/Bokuchava Tinatin

TIMCHENKO Vyacheslav*

TOMLINSON John E.

TRIANTAFYLLOS Konstantinos*

TUDOSE Mihai*

TÜRKEŞ Ahmet Kutalmiş*

TÜRKEŞ Tuğrul

TZAVARAS Konstantinos*

UMAKHANOV Ilyas*

VÁHALOVÁ Dana

VALAVANI Olga-Nantia/Saltouros Dimitrios

VALEN Snorre Serigstad/Hagebakken Tore

VASILI Petrit*

VECHERKO Volodymyr

VEJKEY Imre

VERHEIJEN Mark/ Faber-Van De Klashorst Marjolein

VĖSAITĖ Birutė

VIROLAINEN Anne-Mari

VORONIN Vladimir/Petrenco Grigore

VRIES Klaas

VUČKOVIĆ Nataša*

VUKSANOVIĆ Draginja*

WACH Piotr

WALTER Robert*

WATKINSON Angela

WELLMANN Karl-Georg/Benning Sybille

WERNER Katrin*

WOLD Morten*

WURM Gisela

ZECH Tobias*

ZELIENKOVÁ Kristýna

ZIMMERMANN Marie-Jo

ZINGERIS Emanuelis

ZIUGANOV Guennady*

ZOHRABYAN Naira*

ZOURABIAN Levon*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, ''L’ex-République yougoslave de Macédoine''  

Siège vacant, Royaume-Uni*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Maria GIANNAKAKI

Rozsa HOFFMANN

Spyridon TALIADOUROS

Observateurs

Eloy CANTU SEGOVIA

Rina FRENKEL

Partenaires pour la démocratie

Mohammed AMEUR

Mohammed Mehdi BENSAID

Nezha EL OUAFI

Omar HEJIRA

Mohamed YATIM


1 Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution ou sur le site internet de l’Assemblée. Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.