FR15CR27

AS (2015) CR 27

SESSION ORDINAIRE DE 2015

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(Troisième partie)

COMPTE RENDU

de la vingt-septième séance

Vendredi 26 juin 2015 à 10 heures

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5 sous la présidence de M. Walter, Vice-Président de l'Assemblée.

LE PRÉSIDENT* - La séance est ouverte.

La parole est à M. Schennach.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Je souhaiterais apporter une correction au compte rendu de la 24e séance, plus précisément des débats sur les pouvoirs de la délégation de Russie. Je n’ai pas parlé de « théologie », mais de « dialogue ». J’imagine que nos collègues russes liront ce compte rendu. Je ne voudrais pas faire de l’Église russe une partie du problème.

LE PRÉSIDENT* - La correction sera apportée dans les deux versions du compte rendu, soyez-en assuré.

1. Reconnaître et prévenir le néo-racisme

LE PRÉSIDENT* - L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Santerini au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination intitulé « Reconnaître et prévenir le néo-racisme » (Doc. 13809).

Je vous rappelle que le temps de parole des intervenants est limité à quatre minutes.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de treize minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme SANTERINI (Italie), rapporteure de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Nous assistons souvent, impuissants et angoissés, à des crimes de haine, qui dans de nombreux cas sont considérés comme des épisodes isolés, comme la tragédie d’Utøya en Norvège en juillet 2011, celle de Charlie Hebdo en janvier dernier, ou récemment l’assassinat de huit personnes à Charleston aux Etats-Unis. Il s’agit, certes, de cas très différents, mais unis par une hostilité profonde à l’égard d’un présumé ennemi, considéré comme dangereux à cause de sa nationalité, de son origine, de sa couleur de peau ou de sa religion.

Lors de tels événements, la conscience civile se réveille, mais ce n’est pas suffisant. Le point de départ de ces crimes est une montée insidieuse des préjugés, de l’intolérance, du racisme à faible intensité, que nous n’avons pas su reconnaître et prévenir en Europe. Cette montée de l’intolérance se distingue des formes traditionnelles, et prend la forme de l’antisémitisme, de l’islamophobie, de la xénophobie et de l’hostilité à l’égard des Gitans.

Les causes sont historiques et politiques : dans les années récentes, la crise économique et l’instabilité géopolitique en Méditerranée et au Proche-Orient ont exacerbé la haine à l’égard des migrants, la xénophobie, l’aversion à l’égard des musulmans, l’ancienne hostilité à l’égard des Juifs et des Roms sont ainsi exacerbées ; et nous pourrions continuer la liste !

J’ai voulu analyser ce que l’on peut appeler le néo-racisme. Beaucoup de personnes ne se reconnaissent pas comme racistes, car leurs positions ne font pas référence à une hiérarchie des « races », ou à des arguments biologiques ou scientifiques. Il semble s’agir d’une intolérance plus light, mais ce « racisme sans races » est tout aussi dangereux que le racisme traditionnel, car il est fondé sur l’idée que les différences culturelles sont irréductibles, et donc que nous ne pouvons pas vivre ensemble dans une société. L’objectif est le même : légitimer et alimenter un discours et des comportements discriminatoires.

Ce phénomène culturel conduit à l’exclusion de certains groupes perçus comme différents. Le racisme et le néo-racisme se banalisent et se normalisent. Nous assistons à une libération de la parole, à un discours simpliste, discriminatoire, insultant, très souvent agressif. Le Conseil de l’Europe a pris en charge le problème dans sa campagne contre le discours de la haine.

J’ai examiné un certain nombre de cas en Europe. En Allemagne, des groupes se forment contre l’islamisation, surtout dans la région de la Saxe, alors que l’Allemagne, qui accueille moins de réfugiés que d’autres pays européens, pourrait en accueillir davantage. De par ce mythe de l’islamisation de l’Europe, on perçoit le monde islamique comme une menace.

Les Roms, en Italie, vivent ghettoïsés et marginalisés dans des camps. Ces populations ont abandonné les traditions du passé, mais n’ont pas encore trouvé une façon de s’intégrer efficacement : une responsabilité collective est certainement en jeu.

J’ai cité le cas de l’antisémitisme en France, où le nombre des actes antisémites a doublé en 2014. En Belgique, après l’attentat contre le Musée juif de Bruxelles en mai 2014, les autorités ont fait de l’antisémitisme une cause nationale.

Le néo-racisme a des caractéristiques particulières. C’est un phénomène complexe, et parfois inconscient, contre lequel il faut lutter. Ce qui est inquiétant, c’est la diffusion du discours de haine dans le domaine politique et sur internet. Les responsables politiques européens doivent être conscients de la responsabilité qu’ils ont de ne pas exploiter la peur à l’égard des migrants. Beaucoup de réfugiés fuient la guerre. La violence et la xénophobie sont alimentées par un discours populiste qui contribue finalement à détruire l’unité européenne, alors qu’il faut défendre cette valeur.

Dans la résolution nous voulons renforcer l’autoréglementation des parlements nationaux et des différentes collectivités territoriales. Il faut améliorer la communication sur les phénomènes migratoires, mieux informer de façon impartiale, pour éviter toute exploitation politique de la peur et du racisme. Il faut souligner que l’expérience de l’Alliance parlementaire du Conseil de l’Europe contre l’intolérance et le racisme, créée en 2014 au sein de la commission sur l’égalité et la non-discrimination et dont je suis la rapporteure, montre qu’il faut des réseaux à l’échelle nationale.

Les pays membres du Conseil de l’Europe doivent ratifier le Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l’homme et le Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques. Il faut encourager les citoyens à dénoncer les discours racistes diffusés sur internet et promouvoir l’activité des modérateurs et médiateurs en ligne qui s’emploient à établir un dialogue avec les auteurs de ces discours à des fins de prévention.

La Cour de justice a créé les instruments juridiques qui permettent d’interdire et de sanctionner toutes les expressions du racisme et de la haine. Il est important de promouvoir une justice réparatrice, notamment sous forme de médiation entre auteurs et victimes de discours de haine et d’actes racistes, sur la base d’un choix libre des personnes concernées. Il convient également de promouvoir la dimension éducative des sanctions pénales.

Les instruments éducatifs, culturels et sociaux dans la formation des citoyens sont très efficaces pour lutter contre l’intolérance. Nous recommandons bien entendu de mener des actions dans les écoles et de former les enseignants à l’éducation interculturelle, en leur donnant des instruments pour comprendre l’évolution actuelle du racisme dans ses différentes formes. L’approche interculturelle, conformément aux lignes directrices du Livre blanc sur le dialogue interculturel « Vivre ensemble dans l’égale dignité » du Conseil de l’Europe, peut être appliquée aux programmes scolaires et aux projets éducatifs. Grâce à l’enseignement de l’histoire et à la mémoire des génocides, il est possible de faire comprendre comment les formes de violence extrême se développent à partir de formes subtiles de discrimination, qui doivent être combattues de façon préventive.

Je remercie la commission pour son travail dans le cadre de la préparation de ce rapport. Aucun amendement n’a été déposé, ce dont je me félicite d’une certaine manière. Notre travail semble en effet avoir été approuvé par la majorité de nos collègues. J’attends toutefois du débat d’aujourd’hui, de vos remarques et de vos critiques, qu’ils nous permettent de progresser dans cette réflexion essentielle.

LE PRÉSIDENT* - Madame la rapporteure, il vous restera 5 minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Dans la discussion générale, la parole est d’abord aux porte-parole des groupes politiques.

M. BADEA (Roumanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je souhaite féliciter la rapporteure, au nom de mon groupe et en mon nom propre, pour son excellent rapport et pour la manière dont elle a réussi à présenter des problèmes qui affligent l’Europe aujourd’hui. Le néo-racisme réintroduit la hiérarchie des races et des traditions. La crise économique et l’instabilité de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, comme le souligne le rapport, expliquent en grande partie l’explosion du néo-racisme récemment en Europe. Il suffit d’écouter les discours politiques dans les médias et sur internet pour se faire une idée de la dimension du phénomène. Certains politiciens sont prêts à tout pour séduire les électeurs. Ils utilisent leurs peurs à des fins électorales, la peur des immigrants, l’islamophobie, l’antisémitisme, le rejet de la population rom entre autres. Toutes ces peurs ne font que croître et sont utilisées par les politiciens qui proposent des solutions incompatibles avec la démocratie. Nous avons à tort pensé que celle-ci était installée pour toujours.

La réaction d’un député européen italien de la Ligue du nord est symptomatique. Il a déclaré il y a quelques mois au sujet du suicide d’un détenu roumain dans une prison italienne : « Un Roumain s’est donné la mort en prison. Peu me chaut. Nous avons économisé de l’argent. Si plus de Roumains rentraient chez eux, je serais content. »

En Allemagne, le Pegida, mouvement des « Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident », défend « l’immigration qualitative ». Il est étonnant de constater que le land de Saxe, où il séduit le plus grand nombre d’électeurs, présente le pourcentage le plus faible de population étrangère.

La liberté d’expression est l’une des valeurs essentielles des Etats démocratiques, mais en abuser permet à certains de diffuser des messages qui incitent à la haine et portent préjudice à la coexistence pacifique. La lutte contre le néo-racisme doit être renforcée. Nous devons recourir à tous les moyens à notre disposition et renforcer le dialogue entre les organisations représentatives des groupes minoritaires touchés par des actes de discrimination et l’Etat. Il faut améliorer le cadre législatif dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe. Enfin, les pays membres du Conseil de l’Europe doivent ratifier le Protocole n° 12 à la Convention européenne des droits de l’homme et le Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité.

Mme ERKAL KARA (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens - Nous sommes aujourd’hui les témoins de la montée du racisme, une idéologie contraire aux principes démocratiques, à la primauté du droit et aux droits de l’homme, ces valeurs qui sont au cœur de l’Europe.

Le rapport de Mme Santerini pose une distinction claire entre le racisme traditionnel et le racisme contemporain, qui apparaît sous de nouvelles formes, liées plutôt aux différences culturelles. Le néo-racisme est devenu un phénomène complexe et se manifeste de plusieurs manières, notamment sur internet, sous la forme de discours de haine.

Les réseaux sociaux sont devenus d’importants instruments de débat et de diffusion des droits humains. Ils ont cependant aussi leur face noire. Toute la haine et la frustration du monde s’y déversent sans limite et le plus souvent en toute légalité. Le problème survient lorsque ces discours s’apparentent à de la discrimination, à de la malveillance ou à une violence dirigées contre certains groupes.

Il est très important que les responsables politiques arrêtent de faire des discours xénophobes un outil de campagne électorale. Il faut qu’ils gardent bien à l’esprit que tout discours offensant à l’encontre d’un groupe ou d’individus particuliers peut être considéré comme une justification de la discrimination et de la violence.

C’est une erreur qui coûtera cher pour l’harmonie en Europe.

La lutte contre les discours de haine est une responsabilité commune. Les politiciens, décideurs et décideuses politiques, tout comme les institutions publiques ont un rôle majeur à jouer. Il faut se concentrer sur la prévention du néo-racisme en s’appuyant sur la déconstruction des stéréotypes et des préjugés par l’éducation et la prise de conscience, et surtout bien définir les origines du problème et mettre en œuvre les réformes législatives nécessaires.

Cependant le néo-racisme n’est malheureusement pas un concept abstrait : il génère de la violence dont sont victimes de nombreuses personnes : il est essentiel de les protéger et de leur garantir un accès à une justice efficace. C’est ensemble que nous devons lutter pour prévenir de telles atrocités et faire en sorte qu’elles ne puissent se répéter, nulle part dans le monde.

La diversité, nous ne devons jamais l’oublier, est la première source de richesse pour l’Europe.

Mme FIALA (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Mme Santerini a rédigé un rapport très riche, qui puise dans les études les plus récentes. Pourquoi la xénophobie et l’intolérance existent-elles encore ? Elles doivent être punies et combattues, y compris par des mesures disciplinaires. Un manque d’Etat de droit et des conditions socioéconomiques misérables constituent le terreau de l’extrémisme. On constate dans certains Etats membres que ces phénomènes peuvent conduire au néonazisme. Les communautés – juifs, Roms ou musulmans – et les migrants sont de plus en plus souvent la cible de discriminations et de propos haineux. Afin de prévenir ce phénomène complexe il faut agir dès l’école. Nous avons besoin de personnes qui luttent contre ce fléau et se montrent solidaires des victimes. En tant que membre de la Task force suisse contre le racisme et que membre du Groupe ADLE, je dois bien constater que des leaders populistes justifient, en invoquant le droit fondamental qu’est la liberté d’expression, la diffamation et les insultes contre les minorités, laissant ainsi libre cours, en toute impunité, aux propos et aux plaisanteries racistes. Le racisme, rappelons-le, n’est pas une opinion mais une attitude criminelle qui, en tant que telle, doit tomber sous le coup de la loi.

Nous devons donc motiver les parents, la société, les responsables politiques et les juges pour qu’ils condamnent ouvertement la xénophobie et le racisme, afin de tuer ces fléaux dans l’œuf. C’est là une condition essentielle pour assurer la protection de la liberté et des droits de l’homme dans nos pays. Si l’on ne combat pas le populisme, il peut évoluer vers des formes d’expression pires encore. En Grèce, en Allemagne, en Hongrie et dans d’autres Etats membres, la situation va s’empirant à cet égard. Le néonazisme apparaît toujours de façon insidieuse ; aujourd’hui, il donne des frissons à l’Europe et aux Etats membres. Il est donc indispensable d’adopter une stratégie commune pour lutter contre le racisme et trouver des réponses.

Mme WERNER (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Au nom de mon groupe, je veux remercier Mme Santerini pour son rapport, auquel nous souscrivons sur de nombreux points.

On constate en effet un mouvement vers la droite dans de nombreux pays européens : en France et en Hongrie, par exemple, les partis populistes ou d’extrême droite réalisent des percées électorales. Partout en Europe, on a assisté à des mobilisations de masse racistes, haineuses ou homophobes. À Dresde, des milliers de personnes ont ainsi manifesté pendant plusieurs semaines contre les demandeurs d’asile dont le nombre, en 2014, avait triplé par rapport à l’année précédente.

Ces manifestations montrent clairement que le racisme s’est enraciné dans nos sociétés ; et le seul fait de le dire risque de passer pour un propos convenu : d’où l’importance du rapport qui nous a été présenté.

Vous rappelez, Madame Santerini, les mesures législatives susceptibles de combattre les discours de haine, mettant l’accent sur leur possible contradiction avec la liberté d’expression. Les choses sont pourtant claires à mes yeux : nous devons prendre position sans ambiguïté contre ces discours. Pour cela, les moyens juridiques ne suffisent pas : un engagement sociétal, une résistance antifasciste qui parte du cœur de la société européenne, est également nécessaire. À cette fin il est indispensable que les groupes visés par les discriminations s’associent au-delà des frontières. Les pouvoirs politiques doivent aussi prendre des mesures visant à renforcer les associations de la société civile engagées dans la lutte contre l’extrême droite.

La formation politique, différentes études l’ont établie, est le meilleur instrument contre toute forme d’expression antidémocratique ou haineuse ; elle permet d’empêcher que ces discours deviennent la norme. Une telle formation permet aussi à chacun de reconnaître ce qu’est un acte ou une réflexion raciste, et de réagir en conséquence. C’est pourquoi il me paraît indispensable de renforcer cette éducation, non seulement dans les écoles, mais aussi auprès des adultes.

Vous avez raison, Madame Santerini, de rappeler que la crise économique mondiale est l’une des causes du racisme et de l’intolérance : nombreux sont ceux qui pointent du doigt certains groupes pour en faire des boucs émissaires. Là encore, l’éducation doit jouer tout son rôle. Il faut aussi miser sur un autre système économique que celui qui, seulement fondé sur la concurrence, conduit à la pauvreté et à l’exclusion : nous avons besoin d’une société solidaire, qui ne soit pas seulement au service de l’économie, mais aussi de l’être humain. C’est seulement sur cette base que l’on pourra éradiquer le racisme et l’intolérance de toute notre planète.

Mme OHLSSON (Suède), porte-parole du Groupe socialiste* – Je remercie à mon tour Mme Santerini pour son excellent rapport. Le racisme est un phénomène complexe, lié à plusieurs facteurs. La lutte contre le racisme doit donc être menée sur les fronts juridique, social et culturel. S’il est assez rare de rencontrer des personnes ouvertement racistes, le racisme inconscient est très répandu ; il génère des attitudes hostiles et, étant plus difficile à identifier, il est également plus difficile à combattre.

Le racisme tient à de nombreux facteurs. En dehors des instruments juridiques, dont l’objectif est d’interdire et de punir toute expression raciste et tout discours de haine, nous devons lutter contre l’intolérance en recourant à des instruments culturels et sociaux.

L’éducation et l’information ont un rôle crucial à jouer lorsqu’il s’agit de sensibiliser l’opinion publique pour qu’elle respecte la diversité ethnique, culturelle et religieuse. La solidarité avec les groupes victimes de racisme et qui font l’objet de discours de haine contribue à lutter contre le racisme et la discrimination.

Un grand nombre de mes amis ont été menacés, dont Aisha, alors qu’elle parlait des refuges pour femmes, à Almedalen, sur l’île de Gotland, en Suède, où chaque année, des responsables politiques et différentes organisations se réunissent pour débattre de divers sujets. Les membres du parti raciste ont attendu qu’elle soit seule et lui ont demandé avec insistance pourquoi elle vivait en Suède – elle est d’origine érythréenne. Ils sont même devenus menaçants. Elle est allée en parler à la police, mais ne se sentait pas très à l’aise. Cependant, la colère, qui est née en elle ce jour-là, l’a conduite à s’engager dans un parti politique pour participer aux changements des mentalités. Elle est aujourd’hui membre du parti social-démocrate en Suède.

Sofia, quant elle, travaille dans le cadre d’un projet intitulé « Football pour tous ». Des hooligans et des nazis l’ont menacée sur internet et ont même publié sa photo. Elle a été effrayée. Ils disaient qu’ils ne voulaient pas qu’une « féministe » détruise les valeurs des clubs de football. Elle a cessé de travaillé un certain temps, mais après quelques mois, elle est prête à reprendre son travail au sein d’une autre organisation

Nous devons insister sur cette dimension émotionnelle du néo-racisme afin de définir des mesures de prévention et de lutte qui ne soient pas uniquement de nature cognitive ou rationnelle, mais fondées sur l’expérience et le ressenti des gens. L’éducation civique et politique ne doit pas simplement informer, mais doit permettre de sensibiliser les gens et de développer leur empathie.

L’Assemblée parlementaire doit en appeler aux autorités nationales et à la société civile pour qu’elles soient extrêmement vigilantes. Il convient de prévenir et de lutter contre le racisme, l’intolérance, la xénophobie ; cela doit être une priorité pour les Etats membres du Conseil de l'Europe. Et les responsables politiques doivent être les premiers à prévenir ce racisme et à lutter contre. Ce rapport propose de nombreux instruments en ce sens, je vous invite donc à l’adopter.

LE PRÉSIDENT* - Mme la rapporteure répondra aux porte-parole des groupes à la fin de la discussion.

Mme HEINRICH (Allemagne)* – Je tiens à remercier Mme Santerini pour son excellent rapport, qui décrit très clairement ce nouveau phénomène qu’est le néo-racisme et que l’on observe dans de nombreux pays européens depuis un certain temps. Il était important de le nommer et de l’identifier, car sous prétexte d’une prétendue « liberté d’expression » on ne le reconnaît pas toujours : discrimination, humiliation, haine.

Certains groupes sont considérés comme incompatibles avec la culture nationale – discours que l’on a déjà entendu ici, au sein de l’Assemblée parlementaire. Les réfugiés, les étrangers, les personnes qui ont une religion ou une orientation sexuelle différentes sont la cible de ces discours. Cela commence par un discours de haine à leur égard, puis par l’organisation de manifestations censées représenter une majorité – on l’a vu en Allemagne – et enfin par des actes de violence.

Le néo-racisme est diffus et prétend protéger les valeurs de la société. Nous devons agir conjointement, afin qu’il ne devienne pas un mouvement majoritaire. Il est important, quand des néo-racistes manifestent de leur côté, qu’un grand nombre de personnes manifestent pour une société mixte. En tant que responsables politiques défenseurs des droits de l’homme, il est de notre devoir d’agir. Les idées néo-racistes ne peuvent pas être promues pour des raisons tactiques ; M. Badea en a parlé.

Nous devons nous différencier des populistes de droite qui surfent sur cette vague pour toucher plus d’électeurs. Car à force de les laisser dire qu’ils émanent de la majorité silencieuse, les discours néo-racistes pourraient devenir de plus en plus « acceptables ». L’Europe n’est pas marquée par les préjugés et les exclusions. L’Europe est une communauté de valeurs, elle représente la diversité, la société multiculturelle. Or si nous ne luttons pas pour préserver ces valeurs, alors c’est l’idée européenne qui meurt. La tolérance, la discrimination, les préjugés cachés sous le manteau de la liberté d’expression menacent les sociétés pluralistes et démocratiques de l’Europe.

En 2011, la fondation Friedrich Ebert a fait publier une étude, « la dévalorisation des autres », qui décrit cette xénophobie qui cible certains groupes. Les résultats de cette étude sont préoccupants. Elle constate une xénophobie importante en Europe, et pas seulement au sein de groupes marginaux. Les préjugés à l’égard d’un groupe vont de pair avec les préjugés à l’égard d’autres groupes. Les recommandations de cette étude sont d’ailleurs très similaires à celles que nous trouvons dans le rapport.

Le néo-racisme est une attitude sociale contre laquelle il faut lutter avec des moyens sociaux. Il convient de combattre les discours de haine diffusés sur les réseaux sociaux et, dans le cadre de l’éducation, il faut transmettre les valeurs de la diversité ; c’est ainsi que nous pourrons lutter contre la haine.

J’ai beaucoup apprécié les propos de Mme Ohlsson qui faisait référence à la dimension émotionnelle. En effet, en Allemagne notamment, si l’on offre une formation aux droits de l'homme à l’école, nous le faisons sur le plan cognitif. Or, nous devons faire beaucoup plus pour toucher les gens et les sensibiliser ; la dimension émotionnelle est un bon moyen.

M. NICOLETTI (Italie)* – Cet excellent rapport nous propose des réflexions importantes et des mesures concrètes à adopter pour combattre un phénomène qu’il ne faut pas sous-évaluer.

Le rapport souligne à juste titre combien le néo-racisme est différent du racisme que nous connaissions que trop bien sur notre continent. Un racisme qui n’avait aucun fondement scientifique. Il était lié à l’idée de la décadence de la société. Une société malade qui était à la recherche de la cause de cette maladie : il fallait prendre des mesures d’hygiène pour combattre tout ce qui était différent, extérieur, porteur de décadence et d’impureté. Le langage du racisme était un langage médical.

Le langage du néo-racisme, le langage de la haine, laisse transparaître cette même peur, ce même dégoût envers des minorités considérées comme portant atteinte à notre santé. Dans ce contexte, nous devons avoir la force et le courage d’afficher la plus grande intransigeance.

Il convient de mesurer l’impact de ce langage sur les plus vulnérables, tels que les enfants. Que peuvent penser les enfants qui, du seul fait de la couleur de leur peau ou de leur appartenance religieuse, sont présentés comme un danger, pire, porteurs de maladie ? Nous n’avons pas le droit de faire vivre les gens dans la peur. Être libéré de la peur est l’une des plus grandes aspirations de l’être humain. Aussi, devons- nous nous battre pour le respect égal dû à chaque être humain, considéré comme porteur d’une dignité infinie et de la même dignité morale. Quiconque dégrade ou se dégrade est exposé. Nous devons prendre toutes les mesures nécessaires contenues dans la recommandation, nous le devons aussi par respect pour nous-mêmes. Faisons preuve de plus de courage, de plus d’intransigeance dans la lutte contre le néo-racisme.

M. JAKAVONIS (Lituanie) – Le thème présenté méritait d’être étudié. Le racisme, le nazisme, voilà des problèmes qui touchent l’Europe entière.

Le nazisme est une idéologie effrayante. J’en ai pris pleinement conscience quand mes parents ont été abattus par les nazis allemands sous mes yeux. C’est, vous le comprendrez, une thématique à laquelle je m’intéresse depuis très longtemps. Il faut l’étudier et user de termes précis. Le mot national-socialisme ne revêt pas toujours le même sens. On peut se tromper lorsqu’on le traduit et qu’on l’interprète.

Une symbolique se rattache à l’idéologie nazie ou à celle de l’Union soviétique. Par exemple, le symbole de la croix gammée est souvent utilisé dans mon pays par les nazis. À diverses occasions, des personnes ont manifesté dans les rues arborant la croix gammée. Elles disaient que leurs propos n’avaient pas de lien avec celui du troisième Reich. Considérons le contexte dans lequel la Fédération de Russie, membre de notre Organisation, spécule sur le néo-nazisme, non seulement dans sa rhétorique vis-à-vis de l’Ukraine, mais aussi de la Lituanie, de la Lettonie comme des pays Baltes.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la Lituanie n’a pas coopéré avec l’Allemagne. Nous ne comptions aucune division SS lituanienne sur notre territoire. À l’Ouest, les gens ignorent que des partisans luttaient contre les nazis. Dix ans après la fin de la guerre, nous étions encore en train de résoudre les problèmes venus du passé. On oublie aussi de dire souvent que certains nazis sont restés en Lituanie.

Cette année, nous avons fêté la victoire sur le nazisme. Nos résistants, nos partisans ont voulu défendre la liberté, mais on ne nomme toujours pas les nazis par leur nom, on les qualifie de bandits. Des néo-nazis en Russie sont, selon moi, déjà incontrôlables.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – Je veux féliciter et remercier Mme Santerini de son rapport. Il est extrêmement important, en effet, d’évoquer le sujet, tant il est vrai que le néo-racisme est un phénomène qui s’étend en Europe. Ce rapport vient donc à point nommé.

Le néo-racisme, dont le nationalisme est la principale composante, n’est pas un phénomène nouveau en soi. La communauté mondiale reste confrontée à de nombreuses violations des normes et principes fondamentaux du droit international commises au nom de ce nationalisme agressif et raciste. Aussi, partout dans le monde, des femmes et des hommes continuent de souffrir de la guerre, d’agressions, de l’occupation militaire et du nettoyage ethnique. Les Azerbaïdjanais présents dans l’hémicycle savent mieux que quiconque de quoi il est question. En effet, le nettoyage ethnique a été réalisé par l’Arménie contre un million d’Azerbaïdjanais pendant plus de vingt ans. En violation de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de notre pays, l’Arménie a eu recours à la force et 20% de nos territoires sont occupés. Suite à ce nettoyage ethnique, il n’y a plus un seul citoyen azerbaïdjanais en Arménie ni dans les territoires occupés par l’Arménie en Azerbaïdjan, le Haut-Karabakh et sept provinces de l’Azerbaïdjan.

L’existence de religions et de cultures différentes ne doit jamais nous diviser ; au contraire, nous devrions sauvegarder toutes les valeurs humaines, coopérer, nous respecter les uns les autres, montrer de la tolérance envers les croyances de tout un chacun et ne jamais être tentés d’imposer nos idées aux autres.

Afin de faire contrepoids au racisme, il faut faire appel à la tolérance et au multiculturalisme. En Azerbaïdjan, je suis fière de le souligner, la tolérance et le multiculturalisme sont pratiqués depuis des siècles. En effet, l’Azerbaïdjan est un pays où cohabitent en toute paix et amitié des représentants de nombreuses religions et de nations. Pour preuve, l’Etat participe financièrement à la protection des lieux saints des communautés juive et chrétienne et toutes les conditions sont réunies pour que les services religieux puissent se dérouler sereinement. D’ailleurs, à l’occasion de sa venue dans notre pays en 2002, le pape Jean Paul II a souligné la grande tolérance qu’il y a rencontrée.

L’an dernier, l’Azerbaïdjan a ouvert le Centre international de Bakou pour le multiculturalisme. Unique en son genre, il a pu être mis en place grâce à un décret présidentiel. La création de ce centre est nécessaire pour l’enrichissement culturel accumulé au fil de siècles en expériences historiques du multiculturalisme. Chaque année, un forum humanitaire est organisé à Bakou qui donne lieu à de nombreux débats portant sur le multiculturalisme.

Il n’y a pas d’alternative à la tolérance et à la multiplicité des cultures. Il est possible de garantir la tolérance et le pluriculturalisme en Europe, notre espace commun.

Mme FABER-Van De KLASHORST (Pays-Bas)* – Le rapport décrit une préoccupation croissante face au néo-racisme. On y mélange différentes problématiques. Le rapport ignore que la source principale de l’intolérance et des conflits violents vient de l’islam. De nombreux juifs qui ont fui le Proche-Orient et l’Afrique du Nord ont rejoint la communauté juive de France, où, une fois de plus, ils sont menacés par un islam intolérant. Une fois de plus, l’élite politique est trop timorée pour identifier les vraies causes.

Face à l’islam intolérant, on a inventé le mot « islamophobie ». L’islamophobie est une arme dans les mains du djihad, dont le but est de museler quiconque exprime un avis critique de l’islam. Liberté d’expression ? Certainement pas ! On est déjà coupable vis-à-vis de l’islam de ne pas être musulman. Quel pays musulman nous laissera exprimer notre chrétienté ou nous dire athée, ce qui semble encore pire que d’être chrétien ou juif ? L’islam n’accepte aucune des idées du monde occidental.

Le rapport précise qu’il convient de se fonder sur des faits. Très bien ! Faites une étude du Coran, de la charia et de la vie de Mahomet. Toute personne intelligente parviendrait à la conclusion que l’islam est raciste et intolérant.

Afin de mener un débat sérieux et de régler le problème, nous devons identifier les faits, même s’ils sont douloureux. Il ne faut pas dire que les messagers sont racistes ou les accuser de discours haineux : ce serait une preuve de faiblesse.

Les djihadistes, le Coran en main, suivant l’exemple de Mahomet, s’écrient : « Allah Akbar ! » chaque fois qu’ils coupent la tête d’une personne. Or on nous dit que cela n’a rien à voir avec l’islam, religion de paix. C’est étrange ! Comment peut-on respecter l’islam en sachant qu’il veut convertir par l’épée et que l’apostasie est punie de mort ?

L’islamisation de l’Europe n’est pas un mythe mais une réalité. C’est l’objectif des Frères musulmans, qui se fondent dans nos sociétés, rêvant de leur califat. Tout politicien européen qui l’accepte se rend coupable de trahison à l’encontre de l’Ouest libre.

Pour arrêter les discours de haine, il faut arrêter l’immigration et fermer les mosquées. N’essayez pas d’endoctriner notre jeunesse au sein du système éducatif. Il ne faut pas lui mentir. Arrêtons la pourriture d’une société multiculturelle qui réclame des droits dans des circonstances inégales et hostiles à la civilisation judéo-chrétienne !

Mme JOHNSSON FORNARVE (Suède)* – Avant de remercier Mme Santerini de son rapport très important, je tiens à me désolidariser des propos qui viennent d’être tenus. Cette intervention horrible est très clairement un discours de haine.

En Europe, aujourd’hui, tout comme en Suède, nous assistons à la montée du racisme, de la xénophobie et de l’intolérance à l’encontre principalement des migrants, des musulmans, des juifs et des Roms. Il est donc important de prendre des mesures concrètes pour lutter contre toute forme de racisme et de discrimination.

Le rapport contient des paragraphes importants qui, de différentes manières, conforteront le travail contre le racisme et la discrimination.

Je tiens à souligner le rôle de la société civile en la matière. Il est capital pour des personnes issues de contextes différents de se rencontrer et d’apprendre à se connaître. C’est en jetant des passerelles entre les peuples qu’on pourra lutter plus efficacement contre le racisme.

J’aimerais souligner également l’importance du rôle des autorités et des partis politiques dans l’introduction de règles visant à bannir les commentaires racistes et les discours de haine. Il ne faut pas non plus oublier le rôle de l’éducation et de l’information dans la lutte contre le racisme. Le dialogue et le savoir permettent de prévenir le racisme.

L’arme la plus efficace, toutefois, c’est la lutte contre les causes : l’inégalité entre les hommes et les femmes, le chômage ou les inégalités économiques. Ceux qui cherchent à diviser et à créer la peur inventent un ennemi différent au plan culturel ou religieux pour accuser les migrants de tous les maux de la société.

C’est vrai, des difficultés existent. Nous ne saurions toutefois les résoudre en nous montant les uns contre les autres. Les problèmes seront réglés par des décisions politiques et par l’investissement dans l’emploi et la protection sociale. Si le chômage et les injustices étaient éradiqués, alors ceux qui tentent de nous diviser auraient perdu tous leurs arguments.

La communauté la plus forte et la plus résiliente est celle qui accueille bras ouverts les nouveaux citoyens. Une société qui se ferme au monde extérieur est condamnée à la stagnation, à la peur et à la haine. Une société ouverte au monde est créative et accueillante aux nouvelles idées. Elle est progressiste et promeut la démocratie, la paix et la sécurité.

Mme KRONLID (Suède)* – Cette semaine, notre assemblée a tenu un excellent débat conjoint sur les questions liées aux médias. Le rapport de M. Ariev a mis l’accent sur la nécessité d’éviter dans les médias tout discours de haine ou discriminatoire, en particulier de nature raciste. Nous nous rejoignons tous ici pour affirmer qu’il convient de nous montrer fermes dans la lutte contre le racisme et la haine.

Aujourd’hui, nous examinons un autre rapport sur les médias, dont le titre laisse perplexe : « Reconnaître et prévenir le néo-racisme » dans les médias en ligne et traditionnels.

Ma première réaction, lorsque j’ai lu le titre, a été de me demander : « Qu’entend-on par néo-racisme ? » Mon embarras n’a fait que croître à la lecture du deuxième paragraphe du projet de résolution, eu égard à la question du droit à la liberté d’expression inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme.

Le projet de résolution m’inquiète en effet quant à la question de la protection des médias libres car il contient des mesures qui ne sont pas sans nous interroger en matière de liberté d’expression. C’est ainsi que le paragraphe 6.3.4. du projet demande aux Etats membres de « promouvoir l’activité des modérateurs et médiateurs en ligne, qui s’emploient à identifier les contenus offensants et à établir un dialogue avec leurs auteurs à des fins de prévention ». Si l’idée part d’un bon sentiment, j’aimerais toutefois en appeler à la prudence. Ne risque-t-on pas de conduire à un contrôle politique des messages publiés et à une remise en question des acquis, par exemple, précisément, qu’il faut lutter contre le racisme et l’intolérance ?

Autre mesure, prévue au paragraphe 6.3.2. : les Etats devraient « encourager les fournisseurs de services internet et les réseaux sociaux » à se doter de « critères clairs pour établir quels contenus devraient être supprimés ». Là encore, si je comprends les bonnes intentions du texte – lutter contre toute forme de discours de haine –, ne risque-t-on pas de limiter la liberté d’expression des médias ?

Je tiens à féliciter la rapporteure : l’objectif de la proposition de résolution est bon. Il nous faut lutter contre le racisme et l’antisémitisme qui vont croissant en Europe. J’ai d’ailleurs moi-même rédigé une proposition de résolution visant à lutter contre l’antisémitisme. Il convient toutefois de trouver un juste équilibre car la liberté d’expression et l’indépendance des médias sont les pierres angulaires d’une société démocratique et libre.

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan)* – Je tiens tout d’abord à me désolidariser des propos tenus par Mme Faber-Van De Klashorst. L’islam est bel et bien une religion de paix.

Je veux féliciter Mme Santerini de son rapport exhaustif. Le sujet qu’il traite est très important pour le présent et l’avenir de l’Europe et, plus généralement, du monde. Nous devons nous inquiéter sérieusement du racisme, un sentiment dicté par la haine et l’intolérance. Les Etats membres du Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire doivent prendre autant de mesures qu’il est possible pour les prévenir. Comme l’a souligné la rapporteure, nous devons non pas rester indifférents mais tout faire pour prévenir ce fléau.

Il est indispensable d’habituer dès l’enfance les jeunes générations à la tolérance, au respect et à la compréhension des différences ethniques, religieuses, sociales ou sexuelles. L’éducation, la presse et les médias jouent un rôle déterminant en la matière. Ne pas prévenir la montée du racisme, de la haine et de l’intolérance pourrait conduire à de graves tragédies dans un proche avenir.

Nous devons comprendre quelle est notre responsabilité qui est la nôtre aujourd’hui et nous ne devons pas oublier les tragédies qui ont marqué le XXe siècle. Je suis citoyenne d’un pays qui souffre de problèmes de ce type. Je rappellerai qu’à cause de l’intolérance et de la haine exacerbée par les responsables politiques dans le système éducatif et dans les médias arméniens à l’encontre de l’Azerbaïdjan, en 1988, des centaines de milliers d’Azerbaïdjanais ont dû quitter leur territoire natal, et l’Arménie est devenue un pays mono-ethnique.

Puis, les forces armées arméniennes ont occupé une partie du territoire de l’Azerbaïdjan, tuant encore 20 000 Azerbaïdjanais et commettant les massacres de civils azéris à Khodjaly. 4 000 Azerbaïdjanais ont disparu dans les territoires occupés et plus d’un million d’entre eux ont été expulsés de leur foyer et sont depuis plus de vingt ans des réfugiés et des personnes déplacées. Les forces arméniennes ont détruit le patrimoine culturel, historique et religieux, les cimetières et les monuments des territoires occupés en Azerbaïdjan.

Cette grave tragédie humaine peut sans doute mieux nous aider à comprendre de quoi il est aujourd’hui question dans ce rapport. De nombreuses questions y sont évoquées et les Etats membres sont appelés à réagir contre ce fléau.

L’Azerbaïdjan est un peuple multiculturel et multireligieux, dont les citoyens vivent ensemble pacifiquement, qui fait tout pour améliorer la tolérance, aussi bien dans son système éducatif que dans les médias, car nous considérons que la progression du néo-racisme et de l’intolérance religieuse vont finir par poser problème et causer des tragédies.

Les différentes nationalités cohabitent pacifiquement en Azerbaïdjan et n’ont jamais souffert de xénophobie ou d’intolérance. Je suis fière de dire que la tolérance et le multiculturalisme existent depuis des siècles en Azerbaïdjan. Elles sont la meilleure arme contre l’intolérance et la xénophobie. Un décret présidentiel a mis en place le Centre international du multiculturalisme de Bakou. Il n’y a pas d’autre solution que le multiculturalisme et la tolérance dans le monde actuel. Le Conseil de l’Europe et ses Etats membres ne doivent pas perdre de vue cela : nous devons accroître nos efforts pour éviter que les tendances négatives ne s’étendent.

J’espère que les conclusions du rapport et la proposition de résolution permettront d’éviter que le néonazisme et la xénophobie ne s’établissent en Europe.

Mme NAGHDALYAN (Arménie)* – Je tiens à remercier Mme Santerini, dont le rapport est extrêmement important.

Aujourd’hui, au XXIe siècle, nous voyons se développer de nouvelles formes d’extrémisme politique, et le monde civilisé est confronté à de nouveaux défis, tels que l’intolérance, le racisme, la xénophobie. À l’ère de la mondialisation, traversée par de nombreux flux migratoires, les cultures sont de plus en plus diverses – ce qui pose de nouveaux problèmes sociaux et culturels – et l’intolérance est certainement l’un des grands défis à relever en Europe.

L’intolérance est souvent la conséquence d’une propagande de haine fondée sur des raisons religieuses et ethniques, une haine qui s’accompagne de discours agressifs menant à l’escalade des conflits et à des crimes contre l’humanité.

La région du Sud-Caucase est témoin de phénomènes de ce type, notamment des discours de haine émanant des autorités azerbaïdjanaises et visant l’Arménie. Or cela conduit souvent à une escalade des tensions situation aux frontières et à des morts.

Le Président de l’Azerbaïdjan a fait de l’Arménie son ennemi numéro un, et ce qui est considéré comme un crime dans le reste du monde est considéré là comme un acte glorieux, nous l’avons vu dans l’affaire Safarov. Ce dernier a été libéré et est considéré comme un héros en Azerbaïdjan, alors qu’il a tué un soldat arménien. Mais le plus regrettable est qu’à cause de cette politique xénophobe, la jeune génération azerbaïdjanaise grandit dans un climat de haine et d’intolérance. Toute tentative de créer des contacts pour établir la confiance entre les deux sociétés se heurte à la résistance des responsables politiques et fait l’objet d’une répression brutale.

Les autorités azerbaïdjanaises ne cessent de prononcer des discours de haine dirigés contre l’Arménie, portant atteinte à notre réputation. L’Azerbaïdjan fait preuve de xénophobie, de racisme et d’intolérance. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, dans son rapport sur l’Azerbaïdjan, constate que le discours officiel azerbaïdjanais contre la République arménienne n’est pas approprié et qu’il convient de réagir à tous les cas de discrimination et de discours de haine contre les Arméniens.

Chers collègues, ces problèmes sont préoccupants, pas seulement pour notre région mais pour le continent européen dans son ensemble. Il ne doit y avoir aucune place pour une politique de haine et d’intolérance.

LE PRÉSIDENT* - Il nous reste quelques minutes avant de conclure ce débat. L’un ou l’autre des parlementaires non inscrits sur la liste des orateurs, souhaite-t-il apporter sa contribution au débat ?

M. DÍAZ TEJERA (Espagne)* – Après avoir entendu ce débat, plusieurs mots me viennent à l’esprit.

Le premier est le mot « toxique ». Car il est des idéologies toxiques qui corrompent les valeurs du Conseil de l’Europe. L’Europe connaît une crise, c’est vrai, et nous ne voyons pas toujours l’utilité de notre action au sein de cette institution, mais ces idéologies racistes et intolérantes à l’égard de personnes de certaine couleur ou religion sont toxiques. Certaines blagues que l’on fait au quotidien et qui font rire tout le monde participent, souvent, de cette idéologie toxique.

Le second terme, ou plus exactement la seconde expression qui me vient à l’esprit est : « la banalité du mal » décrite par la philosophe Hannah Arendt. Quand on banalise le mal, quand on rit du mal, l’être humain perd sa capacité de discernement entre le bien et le mal. La philosophe parlait analysait des actions criminelles commises par des personnes cultivées sous le régime nazi, sous le régime fasciste, sous le régime franquiste. En termes psychanalytiques, on parle aussi de « perte de discernement » à l’égard de la barbarie. Mais n’oubliez jamais ce petit homme debout face à un char sur la place Tiananmen. Les êtres humains sont capables du plus beau comme du plus abject.

Le troisième terme est celui de « courage ».

Le courage, dans la vie privée, consiste, quand un ami fait une blague sur une religion, une race ou une culture, à lui dire : « Écoute, dans une conversation entre nous, cela n’a pas d’importance, mais le problème est que l’idéologie qui se reflète dans ta plaisanterie est toxique et nuit au vivre ensemble. »

Le poète espagnol Antonio Machado, mort en exil en France a dit : « Nul n’est plus qu’un autre, nul n’est moins qu’un autre. » Il faut le répéter : les êtres humains sont égaux, quels que soient leurs chromosomes, leur race, leur couleur de peau ou leur religion. Il ne faut surtout pas avoir peur de l’autre, car il a toujours quelque chose à nous enseigner, notamment sa culture – que ce soit une musique ou une danse. Il existe une égalité radicale entre tous les êtres humains. J’appuie donc votre rapport avec plaisir, Madame Santerini. Il a pour but de renforcer les valeurs de l’Europe. Or beaucoup viennent ici car ils savent qu’on y défend les principes fondamentaux permettant à chacun de s’épanouir, individuellement ou au sein de sa famille. Travailler sur ce type de rapport est donc fondamental pour renforcer le Conseil de l’Europe et toutes les valeurs qui sont nécessaires entre les êtres humains au XXIe siècle.

Je vous remercie, Monsieur le Président, de m’avoir spontanément donné la possibilité d’intervenir.

M. KOX (Pays-Bas)* – Je vous remercie à mon tour, Monsieur le Président, de me permettre d’intervenir dans ce débat.

Ici, nous avons le droit de dire ce que nous voulons, parce que c’est précisément l’endroit où les idées peuvent s’échanger, même si ces idées sont différentes, voire controversées. Tout doit être autorisé, et il faut défendre le droit de pouvoir tout dire. Nous l’avons entendu : beaucoup d’entre nous sont favorables au rapport et aux propositions de la rapporteure. D’autres sont plus critiques à l’égard de certains aspects du rapport, ou même du rapport en tant que tel. Aucun problème à cela. En revanche, comparez ce qu’a dit Mme Kronlid, qui a critiqué certains éléments du rapport, mais en restant équilibrée, avec les propos de ma collègue du Sénat néerlandais, Mme Faber-Van De Klashorst !

Je vous le demande : pourquoi dites-vous de telles choses ? Vous pouvez tout à fait donner votre avis sur le rapport, mais pourquoi le faire ainsi, d’une manière aussi déséquilibrée et insultante pour tous ceux qui se disent musulmans ? Cela me dépasse ! Vous voulez débattre ? D’accord, même si c’est avec une certaine vigueur. Mais pourquoi insulter l’autre ? Ne faites plus cela. Vous pouvez parler franchement, mais en restant dans des limites acceptables – je vous le dis en vous regardant, vous et M. Dişli, lequel est assis à côté de vous. Que va-t-il penser de vous, de votre parti et des Pays-Bas, lorsque vous l’insultez en souriant ? M. Dişli sourit lui aussi, car il sait que vous ne représentez pas tout mon pays – et c’est tant mieux.

La bonne nouvelle est qu’après avoir entendu ce que vous avez dit, on sait clairement ce que le Parti pour la liberté – dont le nom mérite d’être relevé – pense de la liberté des autres. Votre parti rencontre un certain succès au Parlement européen, où il a pu constituer un nouveau groupe en s’associant à d’autres partis qui pensent comme lui, mais je suis sûr que, si leurs membres lisaient votre intervention, ils y réfléchiraient à deux fois : ils se demanderaient certainement s’il est utile de soutenir un parti qui éprouve autant de haine et recourt aussi facilement à l’insulte envers l’autre. Madame Faber-Van De Klashorst, vous êtes l’une de mes collègues au Parlement néerlandais, mais je vous le demande : de grâce, ne continuez pas à insulter les gens ! Ce n’est pas nécessaire et cela ne nous conduit nulle part.

LE PRÉSIDENT* - La discussion générale est close.

J’appelle maintenant la réplique de la commission.

Madame la rapporteure, il vous reste 5 minutes pour répondre aux orateurs.

Mme SANTERINI (Italie), rapporteure* – J’aimerais remercier tous nos collègues pour ce débat très riche, qui correspond bien à l’esprit du Conseil de l’Europe. La quasi-unanimité qui s’est dégagée sur le rapport et ses recommandations n’était pas acquise d’avance, mais je la comprends surtout comme une réaffirmation des valeurs qui sont les nôtres – les valeurs européennes. Parfois, l’on est un peu perdu et même dépourvu face aux formes subtiles, implicites, banales d’hostilité et d’intolérance. Je voulais donc tout simplement donner plus d’outils pour lutter contre ce phénomène qui, selon les mots de Mme Ohlsson, est très complexe.

J’aimerais dire à Mme Kronlid et à M. Kox que je prends tout à fait au sérieux les problèmes qu’ils ont soulevés : nous savons tous que les questions telles que la limite de la liberté d’expression, le respect des opinions de l’autre et le moyen de faire reculer le discours de haine, voire de l’interdire, sont subtiles et complexes. D’ailleurs, la Cour européenne des droits de l’homme décide toujours au cas par cas s’il y a eu, ou non, violation de la liberté d’expression. Juridiquement, nous avons donc la possibilité d’agir. La politique, quant à elle, peut encourager, recommander, créer des anticorps afin de lutter contre l’intolérance, ce qui lui donne toute son importance.

Plusieurs collègues l’ont souligné : il faut aussi un engagement de la société civile. Mme Fiala l’a dit très justement : le néonazisme apparaît de manière insidieuse. Comme l’a souligné M. Badea, la démocratie n’est jamais acquise une fois pour toutes – l’histoire tragique que rapportait M. Jakavonis nous le rappelle douloureusement.

Madame Heinrich a parlé du risque de minimiser, de banaliser. Le risque est réel. Cela ne veut pas dire que la réponse soit nécessairement la sanction, mais il faut prendre ces problèmes au sérieux et les affronter courageusement, comme on n’a cessé de le répéter au cours du débat.

Madame Faber-Van De Klashorst, le fait que la société soit multiculturelle ne nous porte en rien préjudice. C’est même tout simplement la réalité de notre vie. Il n’y a pas de purs et d’impurs, de bons et de mauvais. La société judéo-chrétienne n’a pas d’ennemi extérieur – en l’occurrence l’islam. Comme le disait M. Nicoletti, l’ennemi est en nous-même. Se fermer à l’autre, refuser d’être tolérant, conduisent à la mort des civilisations. Jean-Paul II le disait justement : quand on n’arrive plus à dialoguer, on peut même tuer une religion. J’ai donc envie de vous dire, Madame, que nous ne pouvons pas vivre dans l’hostilité et la haine, car l’ADN même de la société judéo-chrétienne s’oppose à cette conception. Comme le disait M. Nicoletti : qui dégrade l’autre se dégrade lui-même. On l’a rappelé dans le débat : nous devons trouver une solution pour cohabiter en bonne intelligence.

Je remercie le secrétariat pour son aide. Les formes du néo-racisme sont diverses, mais le préjudice est le même. Nous devons lutter ensemble contre les différentes formes de discrimination, et nous devons encourager ici même, partout, des projets communs de solidarité et de lutte contre la discrimination.

LE PRÉSIDENT - Madame la présidente de la commission désire-t-elle répondre ?

Mme BİLGEHAN, (Turquie), présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination – Nous traitons aujourd’hui d’un thème qui devrait être constamment au cœur de notre attention : la lutte contre le racisme sous toutes ses formes. En effet, le rejet de l’autre, la discrimination et toutes les formes d’intolérance viennent contredire les fondements du Conseil de l’Europe et de son Assemblée : les valeurs de démocratie, de défense des droits humains et de l’Etat de droit que nous avons en partage.

Comme l’explique l’excellent rapport de Mme Santerini, la situation actuelle en Europe est parfois difficile à interpréter. Aujourd’hui, un responsable politique qui affirmerait publiquement qu’il y a des populations supérieures ou inférieures à d’autres serait automatiquement considéré comme extrémiste et serait isolé. Nous avons malheureusement un exemple au sein même de notre Assemblée. Il est facile de gagner le soutien des électeurs en agitant l’épouvantail d’une prétendue invasion de l’Europe, quand, à nos frontières, des dizaines de milliers de personnes, hommes, femmes et enfants, tentent de fuir la violence, les guerres et les dictatures.

Le rapport de Mme Santerini constitue une mise en garde salutaire contre les risques de manipulation et un appel à la responsabilité des hommes et des femmes politiques.

Notre commission a contribué au travail de Mme la rapporteure et l’a fait sien. Je vous invite à faire de même et à accorder votre plein soutien à cette résolution.

Ne perdons aucune occasion de combattre le racisme. Ne nous laissons pas induire en erreur par des justifications prétendument culturelles, hypocrites et insidieuses. Faisons attention à toute phrase qui commence par : « Je ne suis pas raciste, mais… » Rappelons-nous, avec le célèbre écrivain marocain Tahar Ben Jelloun, que nous sommes tous l’étranger de quelqu’un.

LE PRÉSIDENT* - La discussion générale est close.

Nous avons entendu dix-huit orateurs. Je ne devrais pas le dire, mais quatre d’entre eux sont des musulmans sans le moindre soupçon d’intolérance raciale ou religieuse dans leurs propos ! Je souhaitais le souligner.

La commission sur l’égalité a présenté un projet de résolution sur lequel aucun amendement n’a été adopté.

Nous allons maintenant procéder au vote sur ce projet de résolution contenu dans le Doc. 13809.

Le projet de résolution est adopté (60 voix pour, 1 voix contre et 0 abstention).

2. Renforcer la coopération contre le cyberterrorisme et d’autres attaques de grande ampleur sur internet

LE PRÉSIDENT* - L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Franken, au nom de la commission de la culture, intitulé « Renforcer la coopération contre le cyberterrorisme et d’autres attaques de grande ampleur sur internet » (Doc. 13802).

Je vous rappelle que le temps de parole des intervenants est limité à quatre minutes.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de treize minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. FRANKEN (Pays-Bas), rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Il s’agit de notre dernier débat pour cette session de juin, néanmoins le thème est important et mérite d’être relevé. Peut-on imaginer, aujourd’hui ou demain, vivre sans internet ? Nous connaissons tous l’impact positif des nouvelles technologies de l’information dans tous les domaines de notre société et de notre vie.

Cependant, elles nous rendent aussi vulnérables. Des criminels, voire des terroristes, peuvent utiliser internet à leurs fins, pour menacer notre sécurité nationale, notre sécurité publique et le fonctionnement de notre économie.

Nous sommes tous confrontés à ce phénomène. Je ferai référence, entre autres, au problème de l’aéroport de Varsovie la semaine dernière, à l’attaque du système des technologies de l’information du Parlement allemand le mois dernier, à l’attaque contre TV5 Monde en avril et à l’ingérence dans l’infrastructure informatique de l’Estonie en 2007.

Une étude de McAfee sur les pertes nettes de 2014 chiffre le coût international de la cybercriminalité à 400 milliards de dollars par an, faisant 800 millions de victimes pour la seule année 2013. L’agence fédérale de la sécurité et des technologies de l’information en Allemagne a constaté dans les courriers électroniques, en 2014, une augmentation de 36 % des pièces attachées portant des virus, et estime qu’il existerait quelque 250 millions de programmes de virus pour PC.

Ainsi, la cybercriminalité et le cyberterrorisme sont deux points qui doivent être inscrits aux agendas politiques partout dans le monde. L’internet n’a aucune frontière. Les Etats individuels ne peuvent prendre de contre-mesures à eux seuls, d’où une activité croissante au niveau international.

Le Conseil de l’Europe, ici, est chef de file. C’est dans cette maison qu’a été adoptée la Convention sur la cybercriminalité, signée non seulement par des pays européens, mais aussi par l’Australie, le Japon et les Etats-Unis. Dans cette convention, nous présentons quatre catégories de cybercrimes. Cela signifie que tous les pays qui ont adhéré à la Convention ont adopté, dans leur droit national, ces normes minimales sur la cybercriminalité. Par ailleurs, la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme a adopté une réponse au problème du cyberterrorisme.

Aujourd’hui, la cybercriminalité en tant que telle a connu une grande évolution. De nouvelles formes de criminalité sont nées, et d’anciennes formes ont évolué pour devenir plus sophistiquées. C’est à cette lumière que nous voyons de nouvelles activités criminelles telles que les Botnets et les cyberattaques de grande échelle, insuffisamment couvertes par la Convention sur la cybercriminalité.

Par ailleurs, des questions liées au droit de la procédure font naître de nouveaux obstacles sérieux dans les enquêtes et les poursuites de ces crimes. En particulier dans le cadre de réseaux internationaux.

Aujourd’hui, des mesures plus sévères et plus nombreuses sont nécessaires pour lutter contre ces attaques de grande ampleur. Néanmoins, notre objectif, à terme, reste bien celui d’un internet ouvert et sans censure. Il faut toutefois que cet internet soit sûr. Des mesures juridiques ne peuvent être prises que dans le plus grand respect des droits fondamentaux formulés dans la Convention européenne des droits de l’homme. Nous devons toujours trouver un délicat équilibre entre les mesures adoptées par les gouvernements et le respect des libertés de nos concitoyens.

Nous devons par ailleurs être conscients du fait que si nous voulons lutter contre les criminels et les terroristes sur internet, l’efficacité de nos mesures dépendra du produit de trois facteurs : le niveau de la sanction, la rapidité de la réaction de la police et de la justice, et la perception par le criminel du risque qu’il a de se faire prendre. Si l’un des facteurs est nul, le produit de ces trois facteurs sera nul aussi, et les différentes mesures qui auront été prises auront été inutiles.

En ce qui concerne le niveau des sanctions, nous ne proposons pas d’introduire de nouveaux articles pour décrire de nouveaux actes criminels. Nous demandons simplement que des sanctions plus dures soient prononcées à l’encontre de comportements déjà décrits comme criminels. L’ampleur des attaques et les dommages causés par les réseaux zombies doivent conduire à des peines plus sévères. Nous considérons donc que l’échelle des attaques et la gravité de leurs conséquences constituent des circonstances aggravantes. Je pense notamment à l’interruption de services publics, qui a eu un impact financier très élevé et conduit à la perte d’informations sensibles.

Un argument en particulier plaide en faveur de circonstances aggravantes : l’internet des objets est en passe de devenir une réalité. Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les ordinateurs et les smartphones qui sont connectés à internet, mais aussi tout un éventail d’objets : des appareils domestiques comme les réfrigérateurs, machines à laver, téléviseurs et thermostats, des voitures et des appareils surveillant par exemple les conditions environnementales, et même du matériel médical destiné à traiter des patients. Toute attaque contre l’un de ces terminaux peut conduire à de graves dommages pour l’outil lui-même et les personnes qui en dépendent.

Bien que quelques améliorations puissent être apportées au droit matériel pour répondre aux cyberattaques de grande ampleur, c’est le droit procédural qui pose le plus de difficultés. La plupart des cyberattaques tombent sous le coup d’une disposition pénale dans la plupart des systèmes juridiques, mais c’est généralement au niveau de l’enquête que le bât blesse, lorsqu’il s’agit d’identifier les suspects et de recueillir suffisamment de preuves. C’est alors que les deux autres facteurs entrent en jeu, la réaction rapide de la police et la perception du risque par le criminel.

En réalité, il nous manque une entraide judiciaire effective pour enquêter sur la criminalité internationale. La mise en place d’un Réseau 24/7 est particulièrement importante pour permettre des contacts rapides entre Etats et faciliter l’entraide. Il est urgent d’autoriser les enquêteurs chargés d’affaires de cybercriminalité à accéder à distance à des données, y compris lorsque ces dernière sont stockées sur le territoire d’autres pays. Ce thème est examiné au sein du Conseil de l’Europe par le groupe sur l’accès transfrontalier, sous-groupe ad hoc du Comité de la Convention sur la cybercriminalité travaillant sur la compétence et l’accès transfrontalier aux données. Je remercie d’ailleurs ce Comité d’avoir soutenu notre travail.

Mes chers collègues, l’ordre du monde virtuel ne dépend pas uniquement de mesures réglementaires. Les mesures extra-juridiques et judiciaires sont peut-être plus pertinentes encore. En effet, le renforcement des capacités, les programmes de formation à destination des policiers et la sensibilisation du public peuvent jouer un rôle important dans la construction d’un internet ouvert et sûr. Toutefois, nous devons être conscients que l’insécurité existe sur internet et qu’elle existera toujours, comme dans la vraie vie.

LE PRÉSIDENT* - Monsieur le rapporteur, il vous restera 4 minutes pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. SELVİ (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Depuis que l’internet a été inventé, il y a de cela un quart de siècle, nous profitons de ses bienfaits au quotidien. Pourtant, les risques sont de plus en plus nombreux. Les systèmes électroniques et numériques, les technologies de l’information et de la communication, tout en facilitant notre vie, sont aussi le lieu de cyberattaques qui menacent notre sécurité.

Nous sommes exposés à un risque important, qu’il faut gérer. L’environnement réglementaire international doit être amélioré. À cet égard, le rapport de M. Franken constitue un bon point de départ pour inviter les Etats à coopérer et sensibiliser la société aux menaces liées aux attaques de grande ampleur sur internet. Néanmoins, les législations actuelles deviennent obsolètes du fait des progrès rapides des technologies. La cybercriminalité devient de plus en plus sophistiquée. Nous sommes dans une véritable course contre la montre. Nous ne pouvons pas renoncer à notre bien-être, qui dépend de plus en plus des technologies en ligne, mais nous sommes exposés au cyberterrorisme et à ses conséquences financières pour les individus et les institutions. C’est pourquoi nous devons développer des procédures afin de développer la coopération internationale, dans le cadre notamment d’enquêtes transfrontalières. D’autres mesures, non juridiques, sont aussi nécessaires pour améliorer l’efficacité de la coopération internationale.

Comme le rapport l’indique à juste titre, la pénalisation et la répression ne suffisent pas contre le cyberterrorisme, qui constitue une véritable préoccupation pour la sécurité nationale. Dans le secteur de l’énergie, l’approvisionnement en eau, les télécommunications, le transport, le système bancaire ou la santé, les infrastructures sont la cible des cyberterroristes. Or elles sont fondamentales pour le fonctionnement de nos économies modernes. Il faut lutter contre ces menaces avec des mesures efficaces. Le secteur privé peut jouer un rôle décisif en coopération avec le secteur public.

Internet est l’un des principaux lieux de l’activité sociale et sociétale. Il est et restera un moteur pour la croissance économique. Nous avons la responsabilité d’améliorer la sécurité sur internet en renforçant la résilience de nos sociétés. Ce rapport prend le problème à bras-le-corps. C’est pourquoi mon groupe le soutiendra et demande à l’Assemblée de faire de même.

Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée, prend place au fauteuil présidentiel.

M. BUGNON (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Je tiens tout d’abord à remercier le rapporteur et la commission pour leur travail sur la cybercriminalité et les attaques de grande ampleur sur internet.

L’évolution des technologies de l’information et de la communication n’est pas achevée. Le monde de demain sera bien différent de celui d’aujourd’hui. De nouvelles sociétés se créent tous les jours dans le secteur informatique et dans le secteur bancaire.

Mais, en même temps que certains cherchent à développer les systèmes informatiques, d’autres utilisent internet pour commettre des méfaits.

Le rapport souligne les avantages, pour la société et les individus, de l’évolution des moyens de communication : ces avantages sont réels mais, comme chaque médaille a son revers, il en souligne aussi les dangers.

Il n’est pas facile de trouver la parade pour contrer les utilisations malveillantes des moyens modernes de télécommunication. Il y va en effet de la protection de la sphère privée. Personne ne souhaite un Big Brother qui l’espionnerait dans ses communications – nous avons tous à l’esprit les abus de la NSA, qui a mis en place un système de surveillance à l’échelle mondiale. Aussi les solutions retenues doivent-elles respecter le droit à la liberté de chacun.

Le rapport invite les pays membres à légiférer dans le sens des propositions du projet de recommandation. Il faut également trouver les moyens juridiques de faire condamner les cyberterroristes.

Cette démarche ne doit toutefois pas s’arrêter aux 47 pays du Conseil de l’Europe, car les cybercommunications ne s’arrêtent évidemment pas à leurs frontières. C’est au niveau mondial qu’il faut prévenir les attaques cyberterroristes, afin de renforcer la sécurité des populations de l’Europe et de la planète.

J’invite notre Assemblée à soutenir l’amendement 1, qui améliorerait encore les conclusions du rapport.

M. JÓNASSON (Islande), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Nous devrions en fait débattre de la cybercriminalité à chaque partie de session car nous vivons dans un monde complexe et, comme le souligne le rapport, en évolution permanente. Un tableau illustre d’ailleurs notre dépendance croissante aux ordinateurs et à internet. Une telle dépendance, dès lors qu’elle touche à tous les domaines d’activité, est-elle viable pour l’avenir ? Internet est et restera peu sûr quel que soit le nombre de mesures que nous adopterons ; mais nous l’utilisons au quotidien, et les abus dont il fait l’objet ont atteint des proportions massives. Des mesures de protection s’imposent donc. Un cambriolage ou un abus de vos enfants lors d’une intrusion dans votre domicile ne diffèrent pas, dans leur nature, à certains actes commis sur internet.

La question devient plus complexe encore s’agissant du terrorisme. À cet égard d’ailleurs, l’accession de Wikileaks à certains systèmes informatiques dans le but de révéler des informations sur le Partenariat transatlantique, par exemple, est parfois regardée comme un acte répréhensible, voire terroriste, mais, à mon sens, il s’agit plutôt d’un service rendu à la démocratie. En tout cas, si, comme cela est recommandé par le rapport, nous demandons des normes répressives unifiées contre le cyberterrorisme, nous devons aussi exiger des gouvernements qu’ils ne pénalisent pas le fait d’obtenir des informations relatives au bien public sous prétexte que cela ne serait pas démocratique.

Le rapport se réfère aux révélations d’Edward Snowden, selon lesquelles les gouvernements peuvent se laisser emporter dans la mise en œuvre de mesures antiterroristes sans évaluer correctement si les mesures qui sont prises sont nécessaires, légitimes, efficaces et efficientes au regard de leur coût.

Pour ce qui est de la légitimité, le Conseil de l’Europe a un rôle fondamental à jouer au regard des valeurs qu’il défend en faveur de l’Etat de droit. Aussi nous faut-il devenir un forum pour ce type de débats. Le rapport constitue, de ce point de vue, une excellente contribution.

M. de VRIES (Pays-Bas), porte-parole du Groupe socialiste* – Le sujet dont nous parlons mérite davantage d’attention de notre part, y compris un vendredi matin.

Le Conseil de l’Europe a joué un rôle moteur dans la lutte contre la cybercriminalité à travers un certain nombre de conventions relatives à l’assistance mutuelle dans la lutte contre le terrorisme. La convention relative à la cybercriminalité, en particulier, a permis au Conseil de l’Europe de fixer des normes juridiques importantes. Le professeur Franken, dont nous examinons le rapport, a été un pionner en ce domaine ; il fut aussi l’architecte, dans les années 1980, du droit néerlandais, lui-même à la base de la convention européenne.

Celle-ci est un grand succès du Conseil de l’Europe, succès dont la paternité revient donc au professeur Franken. Mon groupe lui est reconnaissant pour son rapport, non seulement pour les recommandations qu’il contient, mais aussi pour la clarté avec laquelle il expose les fondements d’un cadre juridique complexe. Nous serons nombreux, je l’espère, à transmettre ce document à nos collègues.

Les technologies de l’information évoluent rapidement, nous apportant chaque jour des nouveautés qui nous étonnent. L’internet des objets – ordinateurs et smartphones, mais aussi appareils électroménagers, voitures et avions – se développe à un rythme croissant dans le monde entier. Nous utilisons de plus en plus d’appareils connectés, notamment dans le secteur médical.

Nous devons cependant être vigilants sur les abus auxquels peuvent se livrer les particuliers comme les Etats : la liste des menaces qui pèsent sur la sécurité d’internet est longue. Des données réputées sûres ont ainsi été exploitées : chaque internaute devrait savoir que les logiciels qu’il utilise peuvent être manipulés par des organisations criminelles, mais aussi par les services secrets.

De nombreux protocoles sur lesquels se fonde la sécurité d’internet contiennent des faiblesses permettant à ceux qui les ont identifiées de les exploiter et de nous écouter au travers de nos ordinateurs. Pour ceux d’entre nous qui veulent un monde plus sûr, il y a là un domaine, sans cesse plus grand, sur lequel il faudra travailler.

Monsieur Franken parle de la nécessité de lutter contre les attaques à grande échelle. Il décrit les logiciels, virus ou cheval de Troie, qui mettent en danger nos ordinateurs. Internet n’a pas de frontières. Et malheureusement, ceux qui veulent exploiter internet à des fins criminelles n’ont pas de frontières non plus. La coopération internationale est donc nécessaire et le Conseil de l'Europe, dans une large mesure, fournit les outils juridiques pour lutter contre les criminels. Ces outils et mécanismes doivent être développés de toute urgence.

Le Groupe socialiste a le plaisir de soutenir les propositions de M. Franken, et nous le remercions pour son dévouement au fil des années pour aider à protéger les utilisateurs.

M. ARIEV (Ukraine), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Voilà deux heures, un grand site d’information ukrainien a fait l’objet d’une attaque cybernétique ; ce rapport arrive vraiment à point nommé ! Il est de la plus grande actualité.

Les attaques cybernétiques se développent non seulement sur le territoire de l’Union européenne, mais partout dans le monde : les sites d’information et les sites d’ONG ukrainiennes sont régulièrement attaqués par des hackers de Russie ; des cyberattaques ont eu lieu dans les pays Baltes, contre le site du Parlement allemand, contre TV5 Monde, et les Américains ont également été victimes de hackers syriens.

L’hebdomadaire L’Express a enquêté sur ces attaques, cherchant les responsables, et il a trouvé une signature digitale extrêmement intéressante, celle de Pawn Storm, qui a lancé des attaques contre des sites américains, des journalistes, des Russes de l’opposition, des ONG polonaises et ukrainiennes. Entre 2014 et 2015 ces attaques ont été particulièrement graves et même réalisées au nom de l’Etat islamique Daech. Mais L’Express a pu démontrer que ces attaques ont été menées, à la source, par des programmeurs russes, le APT28, ce qui a été confirmé par la société japonaise Trend Micro, spécialisée dans les enquêtes sur la cybercriminalité.

Le rapport nous propose des recommandations pour améliorer la cadre légal actuel de la lutte contre la cybercriminalité, y compris la rédaction de protocoles additionnels à la convention du Conseil de l'Europe sur la cybercriminalité. Nous proposons d’ajouter d’autres mesures.

Tout élément d’une stratégie gouvernementale de lutte contre la cybercriminalité doit permettre de mieux armer la société face à un internet vulnérable aux attaques. Il s’agit non seulement de mettre en place un système d’alerte précoce et de réaction rapide, mais également de diminuer les effets des attaques. La menace qui a pesé sur une centrale nucléaire d’un pays Balte démontre d’ailleurs que les attaques cybernétiques ne visent plus uniquement internet. Elles peuvent faire dérailler un train, désorganiser le réseau routier ou ferroviaire, etc. Une cyberattaque peut causer la mort d’un très grand nombre de personnes.

Les propositions de M. Franken visent à améliorer la coopération entre les gouvernements, à mettre en place de nouveaux éléments de cyberdéfense. Toutes les recommandations sont extrêmement importantes, je vous invite donc à soutenir ce rapport.

M. RECORDON (Suisse) – Ce rapport est tellement riche qu’il n’est possible que d’en prendre les meilleurs morceaux, comme disent nos amis anglo-saxons.

Le rapporteur insiste très justement sur la fragilité d’internet – instrument puissant dont nous sommes devenus dépendants – et sur la nécessité de prendre des mesures pour sauvegarder tout ce que contiennent nos ordinateurs.

Internet est si puissant que des mesures à l’encontre de ceux qui en abusent sont indispensables ; et il n’y a pas que des cyberterroristes. Le rapport essaie d’ailleurs de différencier le cyberterrorisme de la cyberguerre et de la cybercriminalité. Mais le véritable problème est de savoir qui mène cette lutte et aussi comment nous surveillons ceux qui la mènent.

Bien sûr, nous avons besoin de moyens énergiques. Par exemple, s’agissant de la lutte contre le blanchiment – que fera l’objet d’un rapport que je suis en train d’élaborer –, il sera essentiel de souligner que le développement des moyens d’entraide doit être assuré – entraide judiciaire et policière. Mais nous ne devons pas oublier que ceux qui mènent cette lutte peuvent être tentés – ce sont des êtres humains – de causer du tort aux particuliers. Ai-je besoin, sans remonter au procès de Kafka, de vous rappeler l’excellent livre de Heinrich Böll, L’Honneur perdu de Katharina Blum, pour montrer que les cyberterroristes ne sont pas les seuls à pouvoir détruire une réputation ? Ce sont aussi les services de l’Etat. Dès lors qu’ils peuvent prendre la commande à distance d’un ordinateur, vous pouvez imaginer les drames auxquels cela peut mener.

C’est à son heure que le Conseil de l'Europe a publié le livre intitulé Democratic and effective oversight of national security services. Je ne dis pas cela pour jeter l’opprobre sur nos services, mais pour en garantir la crédibilité et le sens des limites.

M. VOGEL (Allemagne)* – Je remercie M. Franken pour ce rapport extrêmement équilibré, qui tient compte des particularités nationales, mais aussi les collègues de l’Assemblée parlementaire qui, depuis de nombreuses années, s’occupent de ce dossier.

La question nous intéresse tout particulièrement aujourd’hui, mais elle existe depuis un certain temps. Le Parlement allemand, par exemple, a été touché par des cyberattaques. Mais de telles attaques ne sont que la porte d’entrée à d’autres attaques, de plus grande ampleur : des attaques contre nos infrastructures, dans les secteurs des transports, de l’économie, de la sécurité, etc. Nous pouvons donc comparer cette menace à la menace nucléaire. Il est donc important que les Etats membres et la communauté internationale coopèrent étroitement en la matière.

Une fois ce type de cyberattaque détecté, une entraide judiciaire doit permettre à l’échelle internationale de contrer les terroristes et de les poursuivre. Une coopération et une coordination étroites s’imposent dès qu’il s’agit de prendre des mesures pénales contre les auteurs. Sur un plan plus global, il convient d’améliorer et de renforcer les normes de sécurité en instaurant les normes nationales dans le cadre d’une coordination internationale afin de s’assurer de leur compatibilité. Cela doit se faire dans un cadre juridique élaboré également avec les prestataires, les entreprises de communication et l’ensemble des acteurs du secteur, car nous avons besoin de leur soutien.

Ce rapport est le dernier inscrit à l’ordre du jour de la session de juin. Arriver à nous mettre d’accord et à prendre une décision seraient un signal fort. Pour autant, cela ne signifiera pas que le débat sera clos.

J’appuie mes collègues qui ont souligné la nécessité de mener ce débat car le monde ne cesse de se transformer et la forme des cyberattaques se renouvelle. À nous de réagir et de prendre les mesures qui s’imposent. Cela vaut pour les Etats membres et l’ensemble de la communauté internationale.

M. ROUQUET (France) – En 1993, le futurologue Alvin Toffler prédisait que des terroristes chercheraient à s’attaquer aux infrastructures informatiques et de télécommunications des Etats-Unis. Aujourd’hui, avec le développement des nouvelles technologies, le cyberterrorisme ne relève malheureusement plus du domaine de la science-fiction.

Monsieur le rapporteur, je vous remercie pour votre travail très complet qui montre combien la lutte contre ce nouveau visage du terrorisme est complexe et nécessite une coordination de tous les acteurs concernés.

Alors que l’armée de Daech progresse chaque jour en Syrie et que le recrutement de nos jeunes sur internet se multiplie, j’aimerais vous faire part de deux initiatives françaises qui me paraissent intéressantes.

À l’heure où internet et les réseaux sociaux prennent une place essentielle dans nos vies, il est apparu fondamental d’associer chaque citoyen à cette lutte. La plateforme de signalement Pharos, créée en 2009, permet ainsi à chaque internaute de signaler les contenus et comportements illicites sur internet. Des gendarmes et des policiers vérifient ces informations et, s’il y a infraction, alertent les services compétents en France mais aussi à l’étranger.

À la suite des attentats de janvier 2015, un pic d’activité de 6 000 signalements par jour a été observé, dont une majorité concernait des contenus djihadistes, alors qu’en 2014, ils représentaient seulement 1 % des signalements. Les effectifs seront renforcés dès cet été, ce dont on peut se réjouir. Cette plateforme gouvernementale travaille étroitement avec les grandes plateformes du web social.

Il faut être conscient qu’il sera impossible de supprimer tous les contenus extrémistes d’internet. D’ailleurs, ce n’est peut-être pas souhaitable car certains contenus peuvent être des sources de renseignement précieuses. Mais ce travail conjoint des internautes, du gouvernement, des opérateurs et des administrations concernées constitue, je crois, une bonne illustration de cette coordination que vous appelez de vos vœux dans votre rapport. La création en France d’un poste de préfet en charge de la lutte contre la cybermenace va également dans le sens d’une meilleure réactivité et d’une coopération accrue avec les opérateurs.

Les cyberattaques, dont on a pu constater lors de la guerre en Géorgie, l’efficacité redoutable pour désorganiser les armées régulières constituent un défi technologique d’une autre nature. Face à des hackers de plus en plus organisés et disposant souvent de moyens matériels ou financiers mis à disposition par certains Etats, il est devenu urgent de former et de recruter des ingénieurs informaticiens spécialisés pour contrer ces menaces. À la suite du rapport de notre collègue Jean-Marie Bockel en 2012, la création d’un réseau cyberdéfense de la réserve citoyenne vise à sensibiliser la société civile. Plusieurs experts suggèrent que ce réseau soit utilisé pour recruter des cybervigies dans la société civile parmi justement des personnes spécialisées en cybersécurité.

Nous devons également avoir conscience que, face à ce défi mondial, l’Europe a pris du retard. Hormis quelques pays sensibilisés à cette menace comme l’Estonie qui héberge le centre d’excellence en cyberdéfense de l’Otan, peu de nos pays sont prêts à faire face à une attaque informatique de grande ampleur. Pourtant, la capacité d’un Etat à se protéger contre des attaques informatiques majeures constitue un élément de souveraineté nationale. Certes, les attaques des hackers partant souvent du territoire russe ou chinois n’ont pas constitué pour l’instant des attaques terroristes. Mais il est facile d’imaginer qu’un cheval de Troie ou tout autre virus permettrait de désorganiser la distribution de l’eau potable ou pire de contrôler des centrales nucléaires ou des barrages et aurait des conséquences dramatiques.

L’Europe doit réagir maintenant, car le principe de proactivité est, dans ce domaine technologique, fondamental : les hackers-terroristes ont déjà un temps d’avance.

LA PRÉSIDENTE* – M. Corlăţean et M. Gyöngyösi, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l'hémicycle.

Monsieur Franken, vous disposez de quatre minutes pour répondre aux orateurs.

M. FRANKEN (Pays-Bas), rapporteur* – Ce rapport a été débattu à plusieurs reprises en commission, aux mois de mars et avril, à Paris. J’ai été contacté par la délégation allemande pour clarifier un certain nombre de points juridiques. De ce fait, des amendements ont été déposés que je soutiens.

Ce rapport ne souhaite pas restreindre la liberté sur internet, au contraire. L’internet ne peut être vraiment libre que s’il est protégé par des moyens techniques et par des lois. À chaque instant, nous devons être à la recherche de cet équilibre, ainsi que l’a souligné M. Jónasson, entre le respect de la liberté des citoyens et la nécessité de les protéger.

La loi interdit le hacking, mais, la plupart du temps, elle ne distingue pas entre l’ordinateur d’un particulier et l’infrastructure informatique d’un pays entier ou d’un ministère. L’ensemble des parties prenantes, y compris les parlements, doivent relever ces nouveaux défis et faire entendre leurs voix. Mon rapport vise à inscrire ce débat à l’ordre du jour politique, en coopération avec le groupe des experts du T-CY.

Je vous invite tous à voter en faveur de la résolution et de la recommandation dans l’intérêt de la sécurité, du bon fonctionnement et de la liberté d’internet, et je vous remercie de votre attention aujourd’hui, à la fin d’une longue semaine, sachant que je remercie tout particulièrement le secrétariat pour son soutien efficace.

Mme GAMBARO (Italie), présidente de la commission de la culture* – Ce rapport est éminemment important. M. Franken a réalisé un excellent travail, tout comme la commission dans son ensemble.

L’internet est un moyen de communication formidable, mais nous nous rendons compte très souvent que cela devient une sorte de no man’s land sans règles. S’agissant du cyberterrorisme, il faut commencer par prendre des mesures en coopération avec les polices nationales.

M. Franken a souligné qu’en 2013 les cyberattaques ont fait 800 000 victimes. Il s’agit donc d’un problème de très grande ampleur, qu’on ne saurait plus ignorer car il met en danger notre sécurité et la sécurité nationale. Les technologies ne cessent d’évoluer – beaucoup d’entre vous l’ont rappelé – et il est difficile de rester à jour. Nous n’en sommes qu’aux balbutiements. Il nous faudra continuer de mener ce débat, dont le Conseil de l'Europe doit être le chef de file.

J’espère vivement que chacun d’entre nous répercutera les propositions du rapport dans son parlement national, sinon ce texte restera lettre morte, et je remercie tous les parlementaires qui l’ont soutenu.

LA PRÉSIDENTE* - La discussion générale est close.

La commission de la culture a présenté un projet de résolution sur lequel 3 amendements ont été déposés et un projet de recommandation sur lequel 1 amendement a été déposé.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission de la culture propose de considérer les amendements 1, 2 et 3 au projet de résolution et l’amendement 4 au projet de recommandation, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente ?

Mme GAMBARO (Italie), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE * – En l’absence d’objection, les amendements 1, 2 et 3 au projet de résolution et l’amendement 4 au projet de recommandation sont déclarés définitivement adoptés.

Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le document 13802, tel qu'il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté à l’unanimité des 39 votants.

LA PRÉSIDENTE* - Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc 13802, tel qu'il a été amendé.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté à l’unanimité des 40 votants.

LA PRÉSIDENTE* - Je tiens à vous remercier et à vous féliciter, Monsieur le rapporteur : vous êtes le spécialiste de ce dossier. Nous avons de la chance de compter un tel expert parmi nous.

3. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

LA PRÉSIDENTE* - Le Bureau a décidé, ce matin, de proposer à la ratification de l’Assemblée la saisine de plusieurs commissions. Un document récapitulant ces saisines a été mis en distribution (Doc. 13813 Addendum IV).

Aux termes de l’article 26.3 du Règlement, ces saisines doivent être soumises à la ratification de l’Assemblée.

En l’absence d’opposition, ces saisines sont ratifiées.

LA PRÉSIDENTE* - Nous devons maintenant nous prononcer sur les autres propositions du Bureau figurant dans son rapport d’activité contenues dans le Doc. 13813 Addendum IV.

En l’absence d’opposition, l’Addendum IV au rapport d’activité est approuvé.

LA PRÉSIDENTE* - Avant de vous communiquer le palmarès des meilleurs votants, je tiens, mes chers collègues, à vous faire part d’une triste nouvelle.

Ce matin, ici en France, une terrible attaque terroriste aux explosifs s’est produite près de la ville de Grenoble contre une usine de gaz industriels. Une personne a été décapitée. On déplore également de nombreux blessés.

Je condamne cette attaque dans les termes les plus fermes. L’extrémisme violent et le terrorisme sapent les fondements mêmes des sociétés démocratiques, et sont absolument inacceptables.

Je tiens à envoyer un message de sympathie aux familles des victimes ainsi qu’au peuple français et aux autorités.

De Strasbourg, où nous sommes, je vous demande à tous d’élever la voix pour vous prononcer fermement contre le terrorisme, et contre la haine et l’intolérance qui le nourrissent.

4. Palmarès des meilleurs votants

LA PRÉSIDENTE* – Comme d’habitude, avant de déclarer close la présente partie de la Session ordinaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe de 2015, je vous communique le palmarès des champions des votes.

Voici, par ordre alphabétique, les parlementaires ayant participé à tous les votes cette semaine : M. Büchel, Mme Christoffersen, M. Dişli, M. Ghiletchi, M. Gross et M. Senić.

Chers collègues, je vous félicite. Vous servez d’exemple à tous nos autres collègues.

Monsieur Dişli, vous allez quitter notre Assemblée : je tiens à vous faire part de mes souhaits les plus sincères pour la suite de votre carrière en dehors de la politique.

Comme le veut la tradition, nous allons, chers collègues, vous remettre un petit présent en reconnaissance de votre investissement.

5. Clôture de la troisième partie de la Session ordinaire de 2015

LA PRÉSIDENTE* - Mes chers collègues, nous sommes arrivés au terme de nos travaux. Je remercie tous les membres de l’Assemblée, en particulier les rapporteurs des commissions qui ont accompli un travail considérable durant cette partie de session.

Je tiens également à remercier tous les Vice-Présidents qui m’ont apporté leur concours pendant cette semaine pour présider les séances de l’Assemblée : M. Wach, M. Rouquet, M. Bosić, M. Flego, M. Giovagnoli, M. Nikoloski, ainsi que M. Kox. Je souhaite aussi exprimer ma reconnaissance à tous les Vice-Présidents qui se sont proposés, mais qui n’ont pas été amenés à présider lors de cette session. Je les remercie pour tout ce qu’ils font pour l’Assemblée.

Mes remerciements vont également au Secrétaire Général et au Secrétariat Général, ainsi qu’à l’ensemble du personnel, qu’il soit permanent ou temporaire, qui nous permettent de mener de si bons débats. Je remercie d’ailleurs tous mes collègues car nous avons cette semaine mené des débats très difficiles, mais dans une ambiance de respect mutuel. C’est ainsi que nous devrions toujours débattre, quels que soient les sujets en discussion.

Je tiens enfin à remercier les interprètes qui, tous, ont contribué à faire de cette partie de session une réussite. J’ai l’habitude de passer d’une langue à l’autre, répondant spontanément dans celle de mon interlocuteur, et je les prie de m’en excuser.

J’informe l’Assemblée que la quatrième partie de la session ordinaire de 2015 se tiendra du 28 septembre au 2 octobre.

Je déclare close la troisième partie de la session ordinaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour 2015.

La séance est levée.

La séance est levée à 12 h 20.

SOMMAIRE

1. Reconnaître et prévenir le néo-racisme

Présentation par Mme Santerini, du rapport de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc. 13809)

Orateurs : M. Badea, Mmes Erkal Kara, Fiala, Werner, Ohlsson, Heinrich, M. Nicoletti, Jakavonis, Mmes Gafarova, Faber-Van de Klashorst, Johnsson Fornarve, Kronlid, Pashayeva, Naghdalyan, MM. Díaz Tejera, Kox

Réponses de Mme la rapporteure et de Mme la présidente de la commission sur l’égalité et la non- discrimination

Vote sur un projet de résolution

2. Renforcer la coopération contre le cyberterrorisme et d’autres attaques de grande ampleur sur internet

Présentation par M. Franken du rapport de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias (Doc. 13802)

Orateurs : MM. Selvi, Bugnon, Jónasson, de Vries, Ariev, Recordon, Vogel, Rouquet

Réponses de M. le rapporteur et de Mme la présidente de la commission de la culture

Votes sur un projet de résolution amendé et sur un projet de recommandation amendé

3. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

4. Palmarès des meilleurs votants

5. Clôture de la troisième partie de la Session ordinaire de 2015

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Brigitte ALLAIN*

Jean-Charles ALLAVENA*

Werner AMON*

Luise AMTSBERG*

Athanasia ANAGNOSTOPOULOU*

Liv Holm ANDERSEN*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI*

Sirkka-Liisa ANTTILA*

Ben-Oni ARDELEAN/Ion Popa

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Egemen BAĞIŞ*

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE/Chiora Taktakishvili

Gérard BAPT*

Doris BARNETT/Gabriela Heinrich

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL*

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Pavel Holík

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI*

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI*

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ/Nellija Kleinberga

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY*

Ľuboš BLAHA*

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN/Jean-Claude Frécon

Jean-Marie BOCKEL*

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR/Claude Adam

Alessandro BRATTI*

Piet De BRUYN*

Beata BUBLEWICZ*

Gerold BÜCHEL

André BUGNON

Natalia BURYKINA*

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO*

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI*

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON*

Igor CORMAN*

Telmo CORREIA*

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES*

Celeste COSTANTINO*

Yves CRUCHTEN*

Zsolt CSENGER-ZALÁN*

Katalin CSÖBÖR*

Joseph DEBONO GRECH*

Reha DENEMEÇ

Alain DESTEXHE*

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK/Marjolein Faber-Van De Klashorst

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ*

Namik DOKLE

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON*

Josette DURRIEU*

Mustafa DZHEMILIEV*

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Franz Leonhard EßL*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ/Miroslav Antl

Ute FINCKH-KRÄMER*

Axel E. FISCHER*

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER*

Hans FRANKEN

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Martin FRONC*

Sir Roger GALE*

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON*

Iryna GERASHCHENKO*

Tina GHASEMI/Boriana Åberg

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO*

Pavol GOGA*

Carlos Alberto GONÇALVES

Alina Ștefania GORGHIU/Viorel Riceard Badea

Svetlana GORYACHEVA*

Sandro GOZI*

Fred de GRAAF*

François GROSDIDIER*

Andreas GROSS

Dzhema GROZDANOVA

Mehmet Kasim GÜLPINAR*

Gergely GULYÁS*

Jonas GUNNARSSON/Lotta Johnsson Fornarve

Nazmi GÜR*

Antonio GUTIÉRREZ*

Maria GUZENINA

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV

Hannes HANSO

Alfred HEER/Raphaël Comte

Michael HENNRICH/Volkmar Vogel

Martin HENRIKSEN*

Françoise HETTO-GAASCH*

Oleksii HONCHARENKO

Jim HOOD*

Arpine HOVHANNISYAN

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV/Sevinj Fataliyeva

Vitaly IGNATENKO*

Florin IORDACHE*

Tadeusz IWIŃSKI*

Denis JACQUAT/André Schneider

Gediminas JAKAVONIS

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE*

Michael Aastrup JENSEN*

Frank J. JENSSEN

Florina-Ruxandra JIPA*

Ögmundur JÓNASSON

Aleksandar JOVIČIĆ*

Josip JURATOVIC*

Anne KALMARI*

Mustafa KARADAYI*

Marietta KARAMANLI*

Niklas KARLSSON*

Andreja KATIČ*

Vasiliki KATRIVANOU*

Ioanneta KAVVADIA*

Danail KIRILOV*

Bogdan KLICH*

Manana KOBAKHIDZE*

Haluk KOÇ

Igor KOLMAN*

Željko KOMŠIĆ*

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Ksenija KORENJAK KRAMAR/Matjaž Hanžek

Attila KORODI*

Alev KORUN*

Rom KOSTŘICA/Marek Černoch

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Julia KRONLID

Eerik-Niiles KROSS*

Marek KRZĄKAŁA*

Athina KYRIAKIDOU*

Serhiy LABAZIUK*

Inese LAIZĀNE

Olof LAVESSON

Pierre-Yves LE BORGN'*

Jean-Yves LE DÉAUT*

Igor LEBEDEV*

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN*

Inese LĪBIŅA-EGNERE/Boriss Cilevičs

Georgii LOGVYNSKYI*

François LONCLE*

George LOUKAIDES*

Yuliya L'OVOCHKINA*

Jacob LUND*

Trine Pertou MACH*

Philippe MAHOUX*

Thierry MARIANI*

Soňa MARKOVÁ*

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI/Sílvia Eloïsa Bonet Perot

Ana MATO*

Frano MATUŠIĆ*

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE*

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Evangelos MEIMARAKIS*

Ivan MELNIKOV*

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY

Jean-Claude MIGNON*

Philipp MIßFELDER*

Olivia MITCHELL*

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Melita MULIĆ*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Hermine NAGHDALYAN

Piotr NAIMSKI*

Sergey NARYSHKIN*

Marian NEACȘU*

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH*

Miroslav NENUTIL

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI

Aleksandar NIKOLOSKI*

Julia OBERMEIER*

Marija OBRADOVIĆ*

Žarko OBRADOVIĆ*

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY*

Maciej ORZECHOWSKI*

Sandra OSBORNE*

Tom PACKALÉN*

José Ignacio PALACIOS/Jordi Xuclà

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS CORTÉS

Ganira PASHAYEVA

Florin Costin PÂSLARU*

Waldemar PAWLAK*

Jaana PELKONEN*

Vladimir PLIGIN*

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT*

Gabino PUCHE*

Alexey PUSHKOV*

Carmen QUINTANILLA*

Mailis REPS*

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE*

Soraya RODRÍGUEZ*

Alexander ROMANOVICH*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Rovshan RZAYEV

Àlex SÁEZ*

Vincenzo SANTANGELO*

Milena SANTERINI

Nadiia SAVCHENKO*

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU

Frank SCHWABE*

Urs SCHWALLER/Luc Recordon

Salvador SEDÓ*

Predrag SEKULIĆ*

Ömer SELVİ

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN*

Bernd SIEBERT*

Valeri SIMEONOV*

Andrej ŠIRCELJ*

Arturas SKARDŽIUS*

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK*

Lorella STEFANELLI*

Yanaki STOILOV*

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE*

Valeriy SUDARENKOV*

Krzysztof SZCZERSKI*

Damien THIÉRY*

Lord John E. TOMLINSON*

Antoni TRENCHEV*

Goran TUPONJA*

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ*

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI

Ilyas UMAKHANOV*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN*

Petrit VASILI*

Imre VEJKEY*

Stefaan VERCAMER*

Birutė VĖSAITĖ*

Dimitris VITSAS

Vladimir VORONIN/Violeta Ivanov

Viktor VOVK

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ*

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH*

Robert WALTER*

Dame Angela WATKINSON*

Tom WATSON*

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER

Morten WOLD*

Bas van 't WOUT*

Gisela WURM*

Maciej WYDRZYŃSKI

Leonid YEMETS*

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ/Ivana Dobešová

Sergey ZHELEZNYAK*

Marie-Jo ZIMMERMANN*

Emanuelis ZINGERIS/Egidijus Vareikis

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, ''L'ex-République yougoslave de Macédoine''*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Royaume-Uni*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

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Observateurs

Aleida ALAVEZ RUIZ

Eloy CANTU SEGOVIA

Partenaires pour la démocratie

Najat AL-ASTAL

Bernard SABELLA