FR15CR29

AS (2015) CR 29

SESSION ORDINAIRE DE 2015

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la vingt-neuvième séance

Lundi 28 septembre 2015 à 15 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 5 sous la présidence de M. Rouquet, Vice-Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2015) 07 Addendum 2.

En l’absence d’opposition, ces modifications sont adoptées.

2. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (Doc. 13872 et Addendums I et II, et Doc. 13883), présenté par M. Gross.

Monsieur Gross, je vous rappelle que vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. GROSS (Suisse), rapporteur – Monsieur le Président, je m’exprimerai en allemand, ce qui me permettra d’être plus précis et d’en dire davantage dans le temps qui m’est imparti.

(Poursuivant en allemand) Ce rapport d’activité a quelque chose d’un peu anachronique. En effet, au cours des trois derniers mois, nous avons été témoins d’une série de catastrophes. Comment en sommes-nous arrivés là? Pourquoi n’avons-nous pas été capables de mieux gérer cette crise, de sorte que nous avons désormais sur les bras une véritable catastrophe humanitaire? C’est à cette question que je consacrerai ma présentation, vous renvoyant au rapport pour les détails.

À la fin de la partie de session de juin, nous étions déjà en pleine crise humanitaire sous l’effet de l’afflux de réfugiés – une crise qui, à l’époque, touchait la Grèce où 30 à 40 % de la population vivaient déjà dans la pauvreté à cause de la crise économique. Les Grecs ont d’ailleurs fait de leur mieux, au niveau institutionnel, pour affronter cette dernière situation. Mais la démocratie – c’est l’une des questions que je voudrais évoquer – ne suffit plus pour décider de la manière dont les gens sont traités: ils n’ont pas le droit de décider de leur propre vie.

Cela étant, nous avons dû faire face à l’afflux de réfugiés arrivant essentiellement par la Méditerranée. Au cours des six premiers mois de l’année, ce sont 300 000 à 400 000 personnes qui ont tenté de la traverser, et la Méditerranée est devenue un vaste cimetière: près de 1 % de ces réfugiés sont morts en mer. C’est une catastrophe véritablement indigne de l’Europe et qui remet en question ses valeurs mêmes. On ne peut pas simplement parler à propos de ces personnes de «migrants économiques»: les flux de capitaux de l’Afrique vers l’Europe représentent 50 milliards de dollars par an, beaucoup plus que l’argent que nous consacrons à l’aide aux réfugiés tandis que nous vendons à l’Afrique des produits agricoles très coûteux, de sorte qu’ils ne peuvent vivre de la vente de leurs propres productions. Voilà comment on en est arrivé à la situation catastrophique que nous n’avons pas les moyens de maîtriser. Voilà pourquoi nous nous sentons aussi impuissants à agir.

Aujourd’hui, ce ne sont plus quelques milliers de personnes, mais 500 000 qui sont aux portes de l’Europe. Il s’agit de toute évidence de réfugiés de guerre, venus de Syrie: ce ne sont pas des réfugiés économiques, ils fuient une situation politique; ils sont donc entièrement couverts par la Convention de Genève. Et qu’a fait l’Europe? Elle leur a fermé la porte, s’entourant de barbelés et utilisant des gaz lacrymogènes, bref rejetant ces candidats à l’asile.

Le Gouvernement allemand a changé d’attitude et décidé d’admettre un grand nombre de réfugiés. Mais face au nombre croissant, la capacité d’accueil aurait atteint ses limites. Pourtant, la Turquie, 74 millions d’habitants, a accueilli 2 millions de réfugiés, le Liban un nombre équivalant à un quart de sa population tandis qu’en Jordanie les réfugiés en représentent un tiers. Et l’Europe n’arriverait pas en gérer un demi-million!

L’Europe a vraiment un problème. Elle ne dispose pas des institutions dont elle aurait besoin pour être à la hauteur des valeurs qui sont les nôtres, ces valeurs dont nous sommes si fiers, à savoir que chaque personne qui entre sur le sol européen peut être protégée et traitée avec dignité, au même titre que nous le voudrions pour nous-mêmes. Même cela, nous n’arrivons pas à le garantir! Et non seulement les institutions manquent pour cela, mais nous ne disposons pas non plus de celles qui permettraient de gérer les conflits entre nous afin d’éviter tout risque de faire exploser l’Europe.

Nous avons besoin d’un nouvel ordre en Europe, au sein et en dehors de l’Union européenne, pour être à la hauteur de ce que l’on attend de nous.

Personne ne peut dire que cela ne concerne pas le Conseil de l’Europe car, à l’origine, ce dernier était une assemblée constitutionnelle pour l’Europe. D’emblée, de nombreux membres du Conseil de l’Europe voulaient mettre en place une démocratie, des institutions transnationales. C’était une des conséquences de l’expérience de la guerre.

La mondialisation, l’euro devaient renforcer cette nécessité. Or le problème de l’euro est que nous manquons de ce qui permettrait d’en faire quelque chose qui profite à tous. Il manque, par exemple, une politique fiscale commune, dont nous aurions besoin à l’échelle européenne pour mettre en place les institutions qui auraient la légitimité nécessaire. Voilà qui persuaderait nos concitoyens: s’ils ont une possibilité d’influence sur l’Europe, ils ne sont pas contre plus d’Europe. Mais si plus d’Europe signifie plus de mépris à leur égard, si plus d’Europe signifie que des décisions sont prises sans que leurs intérêts soient considérés, ils sont contre. Nous l’avons vu à plusieurs reprises ces derniers mois.

C’est la raison pour laquelle nous devrions avoir enfin le courage de considérer les choses sous cet angle et ne pas nous borner à remercier Václav Havel pour avoir dit que nous n’avancerons que si nous osons regarder au loin. Non! Il nous faut aujourd’hui du courage. Telle est la leçon à tirer de ces catastrophes humanitaires que nous avons vécues ces derniers mois.

On ne peut absolument pas continuer à faire ce que nous avons fait jusqu’à présent: prendre des vacances durant l’été pendant que d’autres vont très mal.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, il vous restera 5 minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. IWIŃSKI (Pologne), porte-parole du Groupe socialiste* – M. Gross a fait une présentation qui n’était pas formelle mais qui touchait vraiment au fond, ayant, dans son rapport écrit, fait un tour d’horizon des activités du Bureau de l’Assemblée et de la Commission Permanente durant cette période assez chargée des trois derniers mois.

Il est bon que nous ayons envoyé des délégations pour surveiller les élections au Kirghizstan, au Bélarus et en Azerbaïdjan, où c’était particulièrement difficile. Il vaut mieux voir les choses de ses propres yeux.

Notre rapporteur a raison de dire que nous vivons une ère de chaos. La situation est toujours bloquée en Ukraine, très complexe au Proche-Orient, des Etats s’effondrent, comme la Syrie et la Libye, les activités de Daech se poursuivent et la déstabilisation frappe plusieurs pays d’Afrique. Tout cela forme un tableau d’ensemble particulièrement sombre. On voit se développer des tendances sécessionnistes en Espagne, au Royaume-Uni. Sans oublier ces énormes mouvements migratoires et la crise des migrants en Europe.

Le chaos, dit-on, l’emporte sur l’ordre parce qu’il est mieux organisé. Nous devrions tout faire en Europe pour réagir de manière appropriée en coopération avec d’autres organisations internationales pour faire face à ces défis gigantesques. Comme le disait ce matin notre Présidente, à juste titre: il faut des actes concrets et non des paroles.

Le prétendu Etat islamique est un problème majeur, mais c’est une erreur fondamentale que de concentrer son attention sur ce seul point. Il ne faut pas oublier dans quel contexte il a vu le jour. C’est une question essentielle parce que les activités de Daech et la guerre civile en Syrie sont la principale source de cet énorme afflux de réfugiés en Europe. La désintégration progressive de l’ordre ancien au Moyen-Orient est à l’origine de tout ce processus. L’apparition de ce prétendu Etat islamique est un effet et non une cause première.

La lutte contre Daech est très difficile, non pas tant sur le plan militaire que sur le plan politique. A ce jour, même en cas de défaite de Daech, il n’existe aucun plan réaliste pour stabiliser durablement la région, sauf s’il pouvait y avoir une coopération entre les Etats-Unis et la Russie dans ce domaine – ce qui n’est pas acquis.

Les dirigeants européens, en ce moment historique, ne peuvent pas se permettre d’être effrayés devant cet afflux de réfugiés. Malheureusement, le coût humain de cette crise des réfugiés est énorme et tandis que certains responsables craignent le fardeau que représenteraient ces réfugiés sur les communautés locales et les contribuables, d’autres se préoccupent des répercussions que cela pourrait avoir sur l’opinion publique, qui reste hésitante, voire hostile à la perspective de voir affluer encore plus de migrants de ces pays, surtout lorsqu’ils sont d’une autre religion, l’islam.

La tâche principale du Conseil de l’Europe dans ce contexte est de changer cette attitude à l’égard des migrants. C’est de faire le pari du dialogue des civilisations et non du choc des civilisations, et de mettre en place des mesures spéciales à cet égard.

Voilà un certain nombre d’années, j’ai collaboré avec Samuel Huntington, l’auteur de cette notion de «choc des civilisations», lequel est la plus grande menace pour chacun d’entre nous.

M. CONDE (Espagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je suis pleinement d’accord avec ce que nous disait M. Gross, notre rapporteur.

Au sein de notre groupe politique, nous sommes très préoccupés par tous les points évoqués dans son rapport ainsi que dans l’intervention de M. Iwiński. Je tenais à le souligner au nom de mon groupe.

M. XUCLÀ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Je remercie M. Gross pour ce rapport qui porte sur la question centrale qui va dominer le débat cette semaine. Je parle bien entendu des migrations.

Vous avez, Monsieur le rapporteur, bien présenté la situation et vous avez su aller à la racine du problème. Il est vrai qu’il y a deux aspects dont il faut tenir compte.

D’une part, nous sommes arrivés à la fin des frontières coloniales au Proche-Orient, qui constitue l’une des trois régions en cause avec les Balkans, qui ont beaucoup souffert au moment de leur réorganisation – il y a eu une guerre là-bas dans les années 1990 –, et le Caucase. Il est vrai que nous sommes confrontés à une situation telle que l’on ne sait pas très bien à quoi ressembleront, à l’avenir, les frontières de ces trois régions.

Le problème des migrations intervient dans le contexte d’une guerre de religion – en l’espèce, entre chiites et sunnites. Nous ne pouvons, ici, prendre parti pour les uns ou pour les autres dans cette guerre entre ceux qui se réclament du prophète Mahomet. En Europe, comme on le sait, les guerres de religion ont été très longues. On peut donc imaginer que cette guerre-là le sera elle aussi. Cela dit, le Conseil de l’Europe doit essayer de trouver des réponses, en particulier dans le domaine humanitaire.

Il y aussi une dimension militaire au problème. Même si cette dimension n’est pas de notre compétence, il faut tenir compte du fait que des erreurs ont été commises – je pense à l’invasion de l’Irak et aux opérations en Libye. On n’exporte pas aussi facilement la démocratie que les fastfoods; très souvent, les effets de telles entreprises se révèlent contreproductifs et même pervers.

Il nous faut essayer de trouver la réponse au défi que représente l’Etat islamique et de réagir face à la situation des migrants entassés dans des camps de réfugiés dans les Balkans et en Turquie, tout en sachant que, parmi eux, certains peuvent certainement être comptés dans la catégorie de ceux qui sont attirés par une Europe riche et prospère, ce qui est aussi un des fruits de la mondialisation.

Je tenais aussi à intervenir dans ce débat parce que, même si nous allons encore travailler avec M. Gross lors des prochaines réunions de commission, c’est la dernière session plénière au cours de laquelle ce grand socialiste sera parmi nous. En effet, il a décidé de ne pas se présenter aux prochaines élections en Suisse, qui se tiendront le 18 octobre. Au nom de mon groupe, mais aussi à titre personnel, je tiens à le remercier particulièrement pour toutes ses années d’engagement au service de notre institution.

Nous n’avons pas toujours été d’accord. Parfois, nous avons même eu des divergences très profondes, mais je dois reconnaître, Monsieur Gross, que vous avez toujours participé à nos débats avec beaucoup d’honnêteté intellectuelle. Je sais que cela vous énerve quand certains, plutôt que de faire preuve d’honnêteté intellectuelle, défendent les intérêts de leur parti. Je dois vous dire que vous avez souvent eu raison et que nous nous sommes parfois trompés. Vous vous êtes toujours défini comme un social-démocrate. Loin de moi l’idée de remettre en cause la définition que vous donnez de vous-même, mais je crois que vous êtes aussi un radical-libéral, dans la lignée des révolutions européennes, ce qui est, de ma part, une appréciation très positive, et une position autour de laquelle nous nous retrouvons. Merci encore, Monsieur Gross, pour votre engagement au service de l’Assemblée parlementaire de notre Organisation.

M. CHOPE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Je voudrais rebondir immédiatement sur les paroles de M. Xuclà au sujet de M. Gross. J’ai appris beaucoup de choses de M. Gross. Certaines de ces leçons étaient bonnes, d’autres l’étaient peut-être moins, mais je lui suis très reconnaissant pour sa contribution aux travaux de notre Assemblée.

Permettez-moi de dire aussi que je suis très heureux de m’exprimer à la suite de M. Xuclà, lequel, dans la période que couvre ce rapport, a dirigé la mission d’observation des élections législatives en Azerbaïdjan. Cette mission, à l’unanimité, a recommandé au Bureau, à travers son rapport, que nous envoyions une délégation en bonne et due forme pour surveiller les élections présidentielles en Azerbaïdjan. J’ai été heureux d’apprendre que, ce matin, ce rapport a été approuvé par le Bureau. J’espère qu’il le sera aussi par l’Assemblée cet après-midi.

Monsieur Gross a évoqué la prééminence du droit et l’absence d’ordre en Europe. De fait, l’échec de nombreuses institutions européennes lorsqu’il s’agit de faire respecter la prééminence du droit est manifeste. Ces derniers jours, nous avons reçu des informations témoignant de l’incapacité de l’Union européenne à se montrer franche et ouverte avec la population européenne sur la question des émissions polluantes des véhicules, ce qui est un sujet très important pour un grand nombre de membres de cette Assemblée qui se préoccupent des questions environnementales. Il a fallu qu’une organisation américaine enquête sur la question pour que l’on découvre que l’Union européenne n’avait pas respecté ses propres règles et qu’elle semblait même avoir couvert ces agissements pour protéger son industrie automobile.

C’est cette incapacité à se montrer vraiment responsable et visionnaire qui contribue aussi aux problèmes que nous connaissons aujourd’hui en Afrique, notamment avec les migrants venant de ce continent. J’ai déjà eu l’occasion de le rappeler dans cet hémicycle: il y a quelques années, Chris Patten, Commissaire britannique, quand on lui a demandé ce que l’on allait faire pour réduire les migrations en provenance d’Afrique, a déclaré: «Commencer par acheter leurs tomates.» Alors que l’Europe devrait s’ouvrir au commerce avec le reste du monde, un grand nombre de nos Etats membres ont tendance à faire l’inverse. Le résultat de cette démarche protectionniste, comme l’a souligné le rapporteur dans ses remarques liminaires, est que les Africains sont obligés de venir en Europe pour gagner leur vie, alors que nous, en Europe, avec notre économie fondée sur la consommation, pourrions acheter des produits que les Africains auraient fabriqués dans leur pays.

Cette question est liée à celle de la prééminence du droit. À cet égard, nous parlerons demain de l’échec de l’Union européenne dans l’application de ses propres règles s’agissant de la Convention de Dublin. Quand on entre dans un pays européen depuis un pays qui n’appartient pas à l’Europe, ce pays d’entrée a le devoir de vous enregistrer. Si vous voulez demander l’asile, vous devez le faire dans ce pays et, si vous déposez votre demande dans un autre pays, la Convention de Dublin exige que celui-ci vous renvoie dans le premier pays d’accueil. Or cette règle n’a pas été appliquée. C’est un échec flagrant. Voilà un autre exemple du fait que nous n’arrivons pas à appliquer nos propres règles. Dans cette Assemblée, nous estimons que la prééminence du droit est un principe important. Il faut donc veiller à ce qu’il soit garanti de manière plus cohérente.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Comme l’ont dit les autres intervenants, Andy Gross défend aujourd’hui son dernier rapport devant l’Assemblée. C’est donc, pour notre institution, un moment historique, même si ce dernier sera encore avec nous pour quelque temps puisqu’il présidera la mission d’observation des élections en Turquie et nous présentera un rapport à Sofia.

Ce rapport retrace l’activité du Bureau, la manière dont les dossiers avancent, mais Andy Gross sera le premier à dire que, précisément, l’on n’a pas beaucoup avancé ces derniers temps. J’ai même parfois l’impression que l’on fait marche arrière. Je sais que cette situation inquiète notre rapporteur. Il a souvent parlé de l’«école de la démocratie» qu’est le Conseil de l’Europe et du fait que, finalement, il donne souvent l’impression d’être plutôt un hôpital de la démocratie.

On constate aujourd’hui de nombreuses évolutions négatives dans des domaines comme la liberté d’expression et de vote, qui constituent sans aucun doute la base de toute démocratie. Andreas Gross est certainement celui qui a participé le plus souvent à des missions d’observation des élections, souvent en tant que président. Son expérience nous manquera donc. Il aura désormais du temps: peut-être rédigera-t-il une dernière contribution à nos travaux, par exemple pour proposer son analyse de ce que nous faisons bien et de ce qui s’est mal passé en matière d’organisation d’élections dans nos 47 Etats membres.

Son analyse m’intéresserait énormément, tout comme elle intéresserait d’autres collègues. Les missions d’observation électorale, qui constituent l’une des principales activités de notre Organisation, doivent permettre d’améliorer les élections et non de diminuer le respect des droits de l’homme dans les processus électoraux. Nous assistons de plus en plus à l’exclusion ou à l’interdiction de partis politiques qui ne peuvent plus participer aux élections ou à la vie politique.

Il est très inquiétant que les États membres eux-mêmes excluent de plus en plus des élus politiques et les empêchent de faire leur travail. Nombre de pays pensent qu’il est approprié de refuser à certains membres de l’Assemblée de participer à des missions d’observation électorale ou à nos réunions de commission en dehors de Strasbourg et de Paris. Parfois, les parlements ne permettent pas à leurs propres membres de participer à ces activités. Certains pays refusent aux nôtres d’entrer: l’Ukraine, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, pour n’en mentionner que quelques-uns.

Par ailleurs, certains pays dressent des listes noires de politiciens, de journalistes, de militants des droits de l’homme. Ces personnes ne peuvent plus entrer dans ces pays: la Russie est bien connue pour cela. L’Ukraine vient de publier une liste de 400 personnes blacklistées, et les Etats membres de l’Union européenne ont dressé une longue liste d’élus politiques de la Fédération de Russie et de l’Ukraine qui ne peuvent plus entrer sur le territoire de l’Union européenne. Si nous ne permettons pas aux parlementaires de se rencontrer, de discuter et de prendre des décisions conjointement, alors nous ne sommes plus sur la bonne voie en Europe!

Cette Assemblée a exclu, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, la délégation de notre plus grand Etat membre, lequel ne peut plus participer aux débats pour avoir interdit à certains de nos parlementaires de participer à des travaux en Russie. Quelles qu’en soient les raisons, cette exclusion n’a pas de sens. Tout cela ne fait que nous affaiblir et nous paralyser. M. le rapporteur est-il d’accord pour dire que nous devrions tout faire pour surmonter ce problème d’exclusion dans nos États membres et au sein de notre Assemblée? Est-il d’accord pour dire que cette Assemblée devrait demander qu’il soit mis un terme à cette pratique de listes noires, qui empêche certains parlementaires de faire leur travail?

Merci, cher Andreas, pour votre engagement et pour votre fantastique travail. Le Groupe pour la gauche unitaire européenne vous remercie et vous souhaite bon vent pour l’avenir.

M. ARIEV (Ukraine)* – Au cours de cette session, nous parlerons beaucoup de la crise des migrants en Europe, source d’instabilité sur le continent, qui nous amène à relever de nouveaux défis. Dans ce cadre, la commission des migrations et son président jouent un rôle directeur dans tous les actes de l’Assemblée. Lors de la réunion du Bureau au mois d’août, à Paris, nous avons débattu des événements de cet été. Le président de la commission des migrations, M. Mariani, ainsi que dix membres de l’Assemblée française, dont M. Pozzo Di Borgo et Mme Dalloz, ont transgressé la loi ukrainienne et la législation internationale en se rendant en Crimée occupée par la Fédération de Russie. Ces actes sont un manquement de respect à l’égard de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Selon le paragraphe 7 du code de conduite des membres de l’Assemblée parlementaire, «Les membres respectent les valeurs du Conseil de l’Europe et les principes généraux de conduite de l’Assemblée, et n’entreprennent aucune action susceptible de porter atteinte à la réputation et à l’intégrité de l’Assemblée ou de ses membres.»

Les actes des membres cités contreviennent non seulement à ce paragraphe du code de conduite, mais également à cinq résolutions de l’Assemblée parlementaire adoptées au cours de l’année écoulée, dont deux sont issues de la commission des migrations: voilà qui est particulièrement ironique et qui réduit la crédibilité du président de cette commission! Des membres de la délégation ukrainienne ont d’ailleurs entamé une action pour mettre en question le mandat de M. Mariani.

J’ai soulevé la question lors de la réunion du Bureau au mois d’août; M. Mariani a répondu que si l’on pouvait citer un seul exemple où il ne se serait pas montré équitable en tant que président, il était prêt à se retirer. Aujourd’hui, un de nos collègues a proposé de discuter de cette question, mais M. Mariani a tout fait pour éviter le débat au sein de la commission à ce sujet. M. Mariani joue avec le règlement mais ne le respecte pas! J’espère qu’il tiendra sa promesse.

Nous avons également discuté ce matin d’une autre situation de conflit potentiel: M. Hunko s’est lui aussi rendu illégalement dans la région de Donetsk, et il est membre d’une mission d’observation des élections locales en Ukraine. Il n’a présenté ni regrets, ni excuses à la délégation ukrainienne. Nommer cette personne membre d’une telle mission en Ukraine constitue un acte de provocation qui viole la législation ukrainienne et la législation internationale, en dépit de l’existence d’un code de conduite pour les membres de l’Assemblée parlementaire.

Ces deux cas, et d’autres similaires, doivent être renvoyés à la commission du Règlement pour savoir comment éviter des conflits entre les dispositions sur l’immunité des membres de l’Assemblée et la législation des Etats membres. J’en appelle à tous les groupes pour qu’ils s’abstiennent de désigner des personnes avant la décision de la commission du Règlement. J’appelle également tous les membres de cette Assemblée à ne pas se rendre dans les territoires occupés par la Russie, en violation des législations ukrainienne et internationale.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je souhaite rendre un hommage personnel à Andy Gross, que je remercie pour tout le travail qu’il a réalisé pendant toutes ces années au sein du Conseil de l’Europe. Nous avons souvent eu des divergences, mais nous avons toujours eu la capacité de discuter, de dialoguer et de trouver un accord. Parfois, ses positions recueillaient la majorité; parfois, c’étaient les miennes, mais, au bout du compte, il en est toujours ressorti un consensus démocratique, un dialogue et une capacité à défendre des avis contraires. Merci beaucoup, Andy Gross!

Je souhaite revenir sur trois questions qui sont abordées dans le rapport de notre collègue.

La démocratie, telle qu’elle est traitée au Forum mondial de la démocratie, est une plante très fragile. Elle est menacée, en Europe et dans le monde, par le populisme, de droite comme de gauche, par l’extrémisme, par la xénophobie, par l’intolérance, par l’incapacité de comprendre les autres. Tout notre travail vise à favoriser l’ouverture et la compréhension de l’opinion des autres. Je lance donc un appel en faveur du consensus démocratique et d’une politique de la raison.

En Europe, il y a de moins en moins d’espace pour exprimer une opinion démocratique et pour parvenir à des accords: et pourtant, c’est cela, la démocratie! Il est très préoccupant que les populismes, les nationalismes, les extrémismes se développent et menacent la politique du dialogue incarnée ici même par Andy Gross.

Il faut un dialogue interculturel et inter-religieux: c’est nécessaire pour l’avenir de l’Europe. On ne peut pas renoncer au dialogue avec les autres religions ni à la pluralité culturelle et religieuse, qui font partie de l’identité culturelle de l’Europe. Le patrimoine culturel européen, c’est la base de la démocratie européenne!

À de nombreuses occasions, l’Union européenne et de fait l’intégration européenne ont été trop axés sur des critères économiques et technocratiques. Mais le Conseil de l’Europe est la conscience de l’Europe, la conscience des citoyens européens. Il ne faut jamais oublier que la culture et le patrimoine culturel européens sont inscrits dans l’ADN du Conseil de l’Europe. Le Conseil de l’Europe a été fondé sur cette idée de la culture européenne qu’il faut protéger, maintenir et renforcer comme l’ont fait les membres de notre Organisation depuis ses pères fondateurs.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Pour l’Azerbaïdjan, ce rapport revêt un caractère symbolique, car c’est le quinzième anniversaire de notre adhésion à l’Assemblée parlementaire. Et ce rapport de la Commission permanente et du Bureau est le soixantième consacré aux activités de ces deux instances. Quinze années représentent une longue période et soixante rapports permettent de tirer des conclusions logiques sur les aspects les plus positifs comme les plus négatifs de nos travaux.

Ce rapport montre également une certaine évolution des activités de l’Assemblée parlementaire et de l’attitude du Conseil de l’Europe confronté aux problèmes les plus brûlants de la vie politique et sociale de l’Europe.

Toutefois, parmi les activités du Conseil de l’Europe, nous relevons des approches à géométrie variable reposant sur le principe «deux poids, deux mesures». En effet, si, dans le cadre des évaluations des activités du Bureau et de la Commission permanente, il faut tenir compte des activités qui ont été menées à bien, il convient également de relever celles qui n’ont pas été réalisées.

Notre Organisation est animée par un principe: si un Etat membre empêche un rapporteur désigné par le Bureau de se rendre dans un pays pour effectuer son travail sur place, le pays en question doit faire l’objet de sanctions. Dès lors, pourquoi ce principe n’est-il pas appliqué également à tous les Etats? Pourquoi le rapport d’activité du Bureau ne dit-il pas un mot des activités illégales de l’Arménie? Pendant la période couverte par ce travail, l’Arménie a empêché deux rapporteurs de se rendre en Arménie alors qu’ils avaient été mandatés par le Conseil de l’Europe pour réaliser une enquête sur deux sujets d’importance. Mme Milica Marković, rapporteure sur les habitants des régions frontalières de l’Azerbaïdjan privés d’eau, et M. Robert Walter, rapporteur sur l’escalade et la tension dans le Haut-Karabakh et d’autres territoires de l’Azerbaïdjan occupés, avaient peu de temps pour conclure leur travail et pour présenter leurs rapports. Néanmoins, à plusieurs reprises, l’Arménie a refusé de leur accorder l’entrée sur son territoire et s’est abstenue de répondre à leur demande. Le précédent est grave qui peut donner un exemple négatif à d’autres Etats membres.

Par ailleurs, pourquoi le Bureau trahit-il ses principes et ses règles les plus importantes dans le cas de l’Arménie? Quelles sont les raisons secrètes pour lesquelles l’Arménie bénéficie d’une telle attitude de sympathie et de protection, y compris quand elle est insultante à l’égard du Bureau et généralement du Conseil de l’Europe en refusant l’entrée de rapporteurs sur son territoire? Comment ne pas voir qu’avec une telle attitude, l’image du Conseil de l’Europe est discréditée?

C’est la raison pour laquelle nous souhaiterions que ces faits alarmants soient dûment reflétés dans les rapports du Bureau et de la Commission permanente. Hélas! Une fois de plus, cela n’a pas été le cas. Cette approche «deux poids, deux mesures», cette injustice risque de s’enraciner plus profondément dans nos façons de travailler, ce qui ne sera pas sans conséquences à l’avenir. On ne peut que le déplorer.

Mme ZIMMERMANN (France) – Ces derniers temps, beaucoup se sont émus du manque de visibilité du Conseil de l’Europe. Il est vrai que nous aimerions que nos travaux soient mieux connus. Aussi devons-nous soutenir et encourager le Conseil de l’Europe. J’aimerais citer l’exemple de deux conventions qui montrent que lorsque nous défendons avec courage nos valeurs et nos convictions, nous pouvons faire bouger les droits de l’homme non seulement en Europe, mais aussi dans le monde.

Ainsi, alors que nous venons de célébrer la première année de l’entrée en vigueur de la Convention d’Istanbul, premier traité juridiquement contraignant traitant des violences faites aux femmes, comment ne pas nous réjouir du succès et de l’intérêt que suscite ce texte? Cette convention est pionnière. Pour la première fois les violences faites aux femmes sont reconnues comme des violations des droits humains; pour la première fois, est affirmé avec force que le principe de tolérance zéro doit s’appliquer en ce domaine. Notre Assemblée a un rôle inédit d’évaluation de sa mise en œuvre. Certes, le Livre noir des violences subies par les femmes est loin d’être refermé, mais je crois que nous devons être fiers et fières de notre travail et faire savoir que cet outil indispensable est une convention du Conseil de l’Europe!

La ratification de la Convention Médicrime par la Guinée le 30 mai a permis d’atteindre le nombre de ratifications nécessaire à l’entrée en vigueur de la convention et a donc ouvert de nouvelles portes à la lutte contre la contrefaçon de médicaments, alors que nous débattrons demain du coût des médicaments, de la transparence et surtout des conflits d’intérêts. Cette convention est la seule visant à mutualiser la lutte contre les médicaments contrefaits. Mais ce texte porte aussi nos valeurs car ces contrefaçons ébranlent la confiance du public dans les systèmes de santé et dans leurs autorités de surveillance. Elles mettent en péril nos démocraties. C’est pourquoi, j’espère que la France, qui a signé le texte dès 2011, et que beaucoup d’autres pays membres ou non membres, ratifieront bientôt cette convention. Le texte est d’ailleurs déposé au Parlement français.

Là encore, je pense que notre Assemblée, que nous tous parlementaires, pouvons et devons défendre ces conventions devant nos parlements, nos gouvernements et expliquer à nos citoyens que le Conseil de l’Europe ne se limite pas aux seuls arrêts de la Cour.

Cette visibilité est essentielle à la survie même de cette Assemblée dont nous ne devons pas oublier qu’elle est, parmi les assemblées interparlementaires, l’une des rares à détenir un vrai pouvoir, à commencer par la nomination des juges de la Cour européenne des droits de l’homme.

Nous sommes à la croisée des chemins face à des tensions toujours plus proches, des crises toujours plus graves. La plus vieille assemblée européenne ne saurait baisser ni la tête ni la garde: il en va de notre dignité de parlementaire, il en va aussi de l’espoir de ceux et celles qui partout en Europe et dans le monde défendent nos valeurs, l’Etat de droit et la démocratie.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan)* – Je tiens à remercier M. Gross de son rapport, car il est fondamental de comprendre que l’une des personnes les plus expérimentées de cette Assemblée parlementaire critique les institutions européennes. Je vous remercie donc, Monsieur Gross, d’avoir compris la situation et d’avoir adopté l’approche que vous avez retenue.

Cela fait vingt ans que l’Azerbaïdjan est confrontée à la problématique des réfugiés et des personnes déplacées: un million de réfugiés sur une population qui en compte neuf millions! Nous avons installé les réfugiés et nous leur avons offert la possibilité de vivre une vie normale et décente.

Récemment, la Turquie, à elle seule, a accueilli deux millions de Syriens et a dépensé pour cela plus de six milliards de dollars.

Aujourd’hui, je tiens à féliciter la Hongrie. Lors de la réunion de notre groupe politique, le responsable hongrois nous a expliqué combien il était difficile de se trouver «sur la ligne de front de la zone Schengen», si vous me permettez cette expression.

Ma question est donc la suivante: pourquoi ces trois pays parviennent-ils, certes avec difficulté, à gérer la situation? Parce qu’il s’agit de pays dotés d’institutions adaptées, contrairement à l’Union européenne.

Depuis plus de 20 ans, nous faisons de notre mieux, ici, à l’Assemblée parlementaire, pour donner une image plus visible des institutions non gouvernementales et gouvernementales. Nous avons fait de notre mieux pour donner une bonne image de la société civile, et non pas des parlements des Etats. Or aujourd’hui, nous nous rendons compte que sans Etat, sans gouvernement et sans parlement, nous ne sommes pas en mesure de gérer la crise.

Avant de critiquer tel ou tel Etat, nous devons veiller que les gouvernements et les parlements ne détruisent pas leurs propres institutions. L’Assemblée parlementaire commence à comprendre cette nécessité.

La démocratie n’est pas une plante exportable, comme l’a dit M. Xuclà. Nous devons, protéger ensemble – et non dans un seul pays – les droits humains qui sont si précieux, et partager, au quotidien, les valeurs de la démocratie.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Le travail des parlements ne consiste pas uniquement rédiger des rapports et celui d’un parlementaire à assister à des réunions ou à marteler sa position sur un seul et même thème. Nous devons, ensemble, tenter de surmonter nos différences et souligner le fait que les problèmes rencontrés en Europe et dans les pays du Sud nous touchent tous. Nous devons donc rechercher ensemble des solutions.

Monsieur Gross, dans son travail, a montré l’exemple en soutenant l’idée qu’il convient de travailler ensemble malgré toutes nos différences. Au nom de la délégation palestinienne, je tiens à le remercier pour l’image exemplaire qu’il a donnée de l’activité d’un parlementaire.

Que pouvons-nous faire pour encourager les mêmes valeurs en Europe, sur la rive sud de la Méditerranée ou en Afrique, lorsque les indicateurs, notamment économiques, montrent que les inégalités s’accroissent, que les disparités s’aggravent entre une Europe relativement riche et des pays du Sud de plus en plus désavantagés?

Comment pouvons-nous utiliser le statut de partenaire pour la démocratie – dont sont membres le Maroc, la Palestine, le Kirghizistan et bientôt, nous l’espérons, la Jordanie et d’autres pays encore – pour trouver des réponses institutionnelles au problème qui nous touche tous? Là encore, l’exemple donné par des parlementaires tel que M. Gross doit nous inciter à travailler ensemble pour chercher des solutions et ne pas se contenter de continuer à marteler notre position ad nauseam et ad infinitum.

M. BABAYAN (Arménie)* – Je souhaiterais répondre à M. Seyidov, qui prétend que l’Arménie a refusé d’accueillir des rapporteurs. C’est un mensonge. Les consultations sur la date de leur visite sont en cours. En revanche, l’Azerbaïdjan n’a cessé de rejeter la visite de M. Strässer, tout le monde le sait.

Je remercie M. Gross pour son excellent travail. La question du Haut-Karabakh a été beaucoup discutée au sein de la commission des questions politiques. L’escalade, récente, de la violence à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est très préoccupante. Les principes du Groupe de Minsk n’ont pas été respectés par l’Azerbaïdjan, qui viole le cessez-le-feu en utilisant des armes lourdes, non seulement sur la ligne de contact avec le Haut-Karabakh, mais également dans la zone frontalière de la région de Tavush en Arménie. Quatre citoyens pacifiques en ont été victimes. Quatre jeunes soldats arméniens qui s’adonnaient à leurs activités quotidiennes à cinq kilomètres de la ligne de front ont été tués et 16 autres blessés. Hier, trois femmes ont également été tuées dans leur jardin, alors qu’elles s’occupaient de leur famille.

Mes collègues et moi, nous nous sommes personnellement rendus dans ces régions et avons pu constater les nombreuses destructions. Bakou se rend coupable de provocations et montre son mépris à l’égard de la vie humaine et de ses engagements. Il s’agit d’une nouvelle tentative des autorités azerbaïdjanaises de dévier l’attention de la situation désastreuse des droits de l’homme dans leur pays. L’Azerbaïdjan viole ses engagements, car elle considère que les critiques de la communauté internationale à l’égard de Bakou n’ont pas lieu d’être.

J’en appelle à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour qu’elle soit attentive au comportement de l’Azerbaïdjan et qu’elle prenne les mesures qui s’imposent. Il est en effet évident que c’est elle qui provoque de nouvelles tensions à la frontière. L’Azerbaïdjan doit assumer toute la responsabilité de l’évolution de la situation.

L’armée arménienne est en mesure de protéger ses frontières, comme elle l’a prouvé à de nombreuses reprises.

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée.

Monsieur Gross, il vous reste 5 minutes pour répondre aux orateurs.

M. GROSS (Suisse), rapporteur* – Je remercie MM. Xuclà, Beneyto, Kox et tous ceux qui, comme eux, ont prononcé de généreuses paroles qui resteront gravées dans mon cœur. Je vous suis tout aussi reconnaissant de cet esprit de grande coopération dans lequel nous avons travaillé.

MM. Xuclà et Iwiński ont eu raison de dire que nous avions beaucoup à apprendre du cas libyen. La France bombarde aujourd’hui Daech; c’est peut-être une bonne chose mais certainement pas la seule à faire. Si nous voulons en finir avec ces guerres, nous ne devons pas nous contenter de bombarder. Ce faisant, en Libye, nous n’avons fait qu’attiser les difficultés. Voilà donc une leçon dont il nous faut tenir compte.

Ensuite, comme l’a souligné M. Kox, nous pouvons attiser la crise au lieu de la résoudre, ce qui ne constituerait pas vraiment un progrès mais plutôt une régression.

S’agissant de la Fédération de Russie, je prendrai l’exemple de l’élu d’une petite ville proche de Saint-Pétersbourg qui a perdu son siège immédiatement après avoir plaidé la cause de la Crimée, critiquant l’action du Gouvernement russe. Nous devons protéger ceux qui se lèvent pour parler. Il nous faut accueillir à nouveau les délégués russes afin de reprendre le dialogue, de favoriser un retour qui pourrait être assorti, certes, de certaines conditions. Si nous ne faisons rien, une majorité leur sera hostile en janvier. Nous pourrions lancer par exemple un groupe de travail réunissant des représentants du Parlement ukrainien, des représentants du Parlement de la Fédération de Russie et des représentants de l’Assemblée parlementaire, afin d’examiner la situation qui prévaut en Crimée – nous avons d’ailleurs évoqué cette hypothèse au sein du Bureau et du Comité présidentiel.

Comme l’ont dit MM. Ariev et Kox nous ne devons pas multiplier les obstacles. Sans doute des règles internes n’ont-elles pas été respectées, mais les normes en matière de coopération internationale l’emportent. Nous devons nous montrer tolérants: une éventuelle erreur ne doit pas miner notre capacité à travailler ensemble pour notre bénéfice mutuel.

Monsieur Beneyto l’a souligné: nous sous-estimons le rôle du Forum mondial de la démocratie au sein duquel le Conseil de l’Europe tâche de devenir une plateforme de réflexion. Il s’agit de faire de bonnes propositions pour la démocratie. Nous, députés, oublions que le grand capital du Conseil de l’Europe, ce sont ces dizaines de milliers de jeunes qui travaillent au sein des universités d’été pour la démocratie et qui sont invités – récompense de leur effort – à prendre place dans ce grand rassemblement. L’Assemblée parlementaire devrait sans doute prendre cet événement plus au sérieux en y jouant un rôle actif. En tant que membre du comité scientifique, j’estime qu’il faut également réfléchir à l’amélioration de la qualité des intervenants, à l’amélioration de l’organisation de l’événement – si je puis me permettre cette remarque.

Monsieur Huseynov, l’Arménie n’a jamais été évoquée lors des réunions du Bureau, d’où le fait qu’elle n’est pas évoquée dans le rapport. Pour sauver la démocratie, il faut savoir dépasser les questions nationales. Ce qui manque à l’Europe, ce sont précisément des institutions transnationales qui prennent à leur compte ce que l’Etat seul ne peut mener à bien. Les catastrophes que nous connaissons débordent les frontières et un Etat seul ne peut s’y attaquer. Or, pour travailler ensemble, nous avons besoin de nous doter de nouvelles institutions démocratiques.

Monsieur Sabella, le temps me manque pour vous répondre, mais je vous promets de me rendre dans votre pays pour discuter sérieusement.

Je vous souhaite à tous plein succès dans vos entreprises.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée, prend place au fauteuil présidentiel.

LA PRÉSIDENTE – Je tiens à renouveler mes remerciements à M. Gross pour tout le travail accompli au long de ces dernières années au sein de l’Assemblée parlementaire. Sa voix va nous manquer, ses idées aussi – quoique très controversées. Reste qu’il est important de pouvoir mener des débats nourris d’idées très diverses. Dans cet esprit, j’ai écouté attentivement ses réponses aux parlementaires: elles donnent matière à réflexion. En effet, la solution à bien des problèmes ne peut qu’être de nature transnationale: le repli sur soi ne peut en aucun cas donner de bons résultats.

Avant de procéder à l’approbation du rapport d’activité, nous devons nous prononcer sur les propositions du Bureau figurant dans ce rapport.

Dans l’Addendum I de son rapport d’activité, le Bureau approuve la proposition de la commission de suivi de ne pas ouvrir une procédure de suivi à l’égard de la France.

En l’absence d’objection, la proposition du Bureau et de la commission de suivi est approuvée.

Le Bureau a décidé de proposer à la ratification de l’Assemblée plusieurs saisines de commissions.

En l’absence d’objection, ces saisines sont ratifiées.

Nous devons maintenant nous prononcer sur les autres décisions du Bureau figurant dans son rapport d’activité et contenues dans le Doc. 13872 et Addendum I.

En l’absence d’objection, le rapport d’activité est approuvé.

3. Questions à M. le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur le Secrétaire Général, c’est avec un très grand plaisir que je vous souhaite à nouveau la bienvenue dans cet hémicycle. Je déroge ainsi à une habitude, car nous faisons partie d’une même famille; mais c’est la dernière fois que j’ai la possibilité, devant cette Assemblée, de m’adresser à vous puisque vous devez partir mercredi pour honorer d’autres engagements.

Nous devons faire face à des défis redoutables et je pense que le Conseil de l’Europe, en unissant ses institutions, en mobilisant toutes ses instances, pourra peser plus fortement que jamais. Nous nous trouvons en effet au cœur d’une grave crise humaine: les droits de l’homme sont menacés, l’engagement de certains Etats membres, en la matière, va faiblissant. Or nous devons à tout moment défendre les principes du Conseil de l’Europe. Je tiens donc à vous remercier de l’excellente coopération qui a caractérisé nos réunions de travail. Vous remplissez une tâche très difficile et nous sommes parvenus à maintenir des échanges très ouverts.

L’ordre du jour appelle donc les questions à M. Thorbjørn Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Monsieur le Secrétaire Général, l’Europe a aujourd’hui le sentiment d’être soumise à d’intenses pressions migratoires, mais l’Union européenne est marquée par la désunion. Il revient donc au Conseil de l’Europe de garantir la protection des droits de l’homme de tous ceux qui arrivent sur les territoires des Etats membres de l’Organisation.

Quel devrait être, d’après vous, le rôle spécifique du Conseil de l’Europe dans cette crise des migrants? Où en sont, sur cette question, les discussions du Comité des Ministres?

M. JAGLAND, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe* – Avant de répondre à vos questions, permettez-moi de remercier la Présidente pour ses aimables paroles. Anne, je vous rends le compliment: nous avons su, en effet, travailler dans un excellent esprit de coopération, et cet esprit perdurera lors des prochaines sessions.

Force est de le constater, nous traversons une crise européenne. Peut-être ne pouvions-nous pas l’éviter, mais nous aurions pu faire plus et plus tôt pour aider les principaux pays touchés par cette crise, la Turquie, l’Italie, la Grèce et Malte. J’ai rencontré il y a quelques semaines le haut-commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, à Genève. Il m’a indiqué que les opérations du HCR en Syrie étaient très difficiles à mener. Seulement 20 % des besoins ont été financés et le Programme alimentaire mondial a dû réduire ses budgets. Il n’est guère surprenant, dans ce contexte, que les réfugiés quittent massivement les camps d’accueil pour se rendre en Europe. Nous aurions pu faire beaucoup plus, plus tôt, et nous pouvons faire beaucoup plus, maintenant.

Quant au rôle du Conseil de l’Europe, il est clairement de faire en sorte que tous ceux qui arrivent sur le continent européen soient placés sous la protection de la Convention européenne des droits de l’homme. Ces hommes, ces femmes et ces enfants jouissent strictement des mêmes droits que tous ceux qui relèvent d’ores et déjà de cet instrument. C’est pourquoi j’ai rédigé un document qui énonce les normes auxquelles tous les Etats doivent se conformer. J’arrive à l’instant d’une réunion avec le ministre hongrois de la Justice. J’ai envoyé un courrier au Premier ministre de la Hongrie, Viktor Orbán, à la suite des récents événements dans son pays et des nouveaux textes de loi adoptés par le Parlement hongrois. Nous suivons de près l’évolution de la situation et nous agissons dès que nécessaire.

Nous n’avons pas voix au chapitre dès lors qu’il s’agit de dire combien d’hommes et de femmes doivent avoir le droit d’accéder au continent européen et selon quelle répartition par pays, mais notre mandat reste fondamental: il s’agit de garantir les droits de toutes les réfugiés, quel que soit leur pays d’origine, leur profil ou leur statut. Ceux qui n’ont pas de papiers d’identité jouissent également des droits humains fondamentaux.

M. ARIEV (Ukraine), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Lors de la dernière partie de session de l’Assemblée, nous avons adopté la Résolution 2034 sur la contestation, pour des raisons substantielles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation de la Fédération de Russie. Dans ce texte, nous vous encouragions à préparer un rapport sur la situation relative aux droits de l’homme et à la démocratie dans ce pays. Pouvez-vous, Monsieur le Secrétaire Général, nous informer de l’état d’avancement de ce rapport?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je prépare actuellement mon rapport annuel sur la situation des droits de l’homme, de la primauté du droit et de la démocratie dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. À ce titre, je collecte des informations auprès de tous les Etats membres. Je dialogue donc régulièrement avec les autorités de la Fédération de Russie. Sur la base des derniers rapports annuels, nous avons décidé de nous pencher de manière plus approfondie sur deux sujets en particulier, l’indépendance du système judiciaire et la liberté des médias. Les organes pertinents de l’Organisation ont été chargés d’élaborer des rapports qui seront prêts d’ici la fin de l’année et qui seront examinés par le Comité des Ministres. Les lois relatives aux ONG, adoptées par la Fédération de Russie, nous préoccupent tout particulièrement.

M. GARÐARSSON (Islande), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Aujourd’hui même, une rencontre entre le Président Poutine et le Président Obama a lieu à New York. Les discussions vont porter notamment sur la situation de l’Ukraine et sur l’engagement militaire en Syrie, le président syrien Bachar el-Assad ayant demandé aux pays occidentaux de revoir leurs sanctions à l’égard de son pays.

Des discussions sont-elles en cours entre le Conseil de l’Europe et la Fédération de Russie sur la situation de la délégation russe au Conseil de l’Europe?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Oui, des discussions sont en cours, qui ne portent pas sur la situation de la Syrie. De nombreuses décisions ont été prises par le Comité des Ministres sur l’annexion illégale de la Crimée et sur la participation de la Fédération de Russie aux troubles dans l’est de l’Ukraine. Nous apportons un soutien marqué aux efforts de l’Ukraine sur la voie de la démocratisation et dans la lutte contre la corruption.

La rencontre entre les présidents russe et américain, dont on doit se féliciter, était plus que nécessaire. D’après la Charte des Nations Unies, le Conseil de Sécurité a la responsabilité d’assurer la paix et la sécurité dans l’ensemble des pays de la famille des Nations Unies. De toute évidence, les membres de cette famille n’ont pas assumé leur rôle au cours des dernières années.

Voilà pourquoi il est heureux que la Fédération de Russie et les Etats-Unis commencent à discuter des moyens de trouver un compromis sur la Syrie. Ils l’ont fait à propos des armes nucléaires en Iran; les membres du P5 étaient tous présents, ils ont signé l’accord. J’espère qu’ils pourront faire de même s’agissant de la Syrie, et j’espère aussi vraiment qu’ils trouveront une solution à la crise qui sévit en Ukraine, pour que l’indépendance et l’intégrité territoriale de ce pays soient préservées. Dans le cas contraire, c’est la loi du plus fort qui l’emportera, une loi dont nous pensions nous être débarrassés après la guerre, en plaçant ce pouvoir entre les mains des Nations Unies. Je formule l’espoir que ces Etats se souviendront de la responsabilité que leur confère la Charte des Nations Unies.

M. WOLD (Norvège), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Nous sommes tous préoccupés par la question des migrations et des réfugiés, surtout en Méditerranée. Certains pays n’enregistrent pas les migrants ou les réfugiés, craignant que des combattants de l’Etat islamique ne se trouvent parmi eux. Dans ce contexte, il est difficile de critiquer les nations qui, comme la Hongrie, contrôlent les migrants et les réfugiés pour protéger leurs frontières.

Selon vous, quel rôle le Conseil de l’Europe devrait-t-il jouer dans cette crise?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – J’ai déjà dit quelques mots à ce sujet. Je suis d’accord avec vous: il est malheureux que des Etats membres se renvoient ainsi ces personnes les uns aux autres. Pendant très longtemps, il n’a pas été possible d’enregistrer ceux qui arrivaient à la frontière Schengen. L’itinéraire qu’ils suivent passe par la Grèce et la Macédoine: beaucoup, venus de Turquie, arrivent en Grèce, en Macédoine puis en Serbie, en Hongrie et, à la suite des mesures prises par ce dernier pays à sa frontière, ils se dirigent vers la Croatie pour rejoindre d’autres Etats européens dont l’Allemagne.

Cette situation est due à l’absence d’une politique à l’échelle européenne. J’observe que l’Union européenne tente de mettre sur pied une telle politique, ce qui est extrêmement difficile car les avis sont très divergents sur cette question. Mais le moment est vraiment venu de le faire.

Quant au rôle du Conseil de l’Europe, il est de veiller à ce que tous ceux qui arrivent sur le continent soient traités conformément à la Convention européenne des droits de l’homme. Tous sont égaux et tous ceux qui arrivent doivent jouir de certains droits au titre de la Convention. Nous y veillons, avec le Commissaire aux droits de l’homme et avec le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et, bien entendu, mon secrétariat œuvre également en ce sens.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Secrétaire Général, j’aimerais avoir votre avis à propos d’événements très préoccupants qui sont survenus dans deux de nos Etats membres, et savoir ce que le Conseil de l’Europe pourrait faire pour apaiser les tensions qui en ont résulté.

Il s’agit d’abord de la petite République de Moldova, où, à la suite d’une série de scandales, des milliers de personnes manifestent jour après jour devant le parlement; le gouvernement a réagi en arrêtant certains manifestants, dont notre ancien collègue Grigore Petrenco.

Il s’agit ensuite de la Turquie, où les tensions ne font que croître à la veille des élections anticipées. Là aussi, le gouvernement semble faire partie du problème plutôt que de la solution.

Que fait le Conseil de l’Europe pour empêcher l’escalade, voire l’explosion dans ces deux pays membres?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je suis moi aussi très préoccupé par ce qui se passe en République de Moldova. Nous mesurons une fois de plus l’importance du respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit pour la sécurité en Europe. En effet, nous l’avons constaté à de multiples reprises: lorsque la corruption devient rampante, cela provoque des troubles sociaux, des insatisfactions, puis des manifestations, voire des révolutions et l’instabilité qui les accompagne. Il y a peu, en République de Moldova, un milliard de dollars américains a purement et simplement disparu des banques. Nous parlons du pays le plus pauvre d’Europe! Comment la population ne serait-elle pas en colère, comment ne descendrait-elle pas dans la rue? On voit combien il importe de lutter contre la corruption et les abus de pouvoir.

Ce que nous faisons à cet égard, c’est ce que nous avons toujours fait: nous essayons d’aider le gouvernement et les autorités moldoves à mettre en œuvre les réformes nécessaires au sein de la justice, du Bureau du procureur général. Nous voulons, en effet, une institution judiciaire indépendante. Nous faisons en République de Moldova ce que nous avons déjà fait en Ukraine. C’est un processus long, mais il faut le lancer pour que la population ait une perspective d’avenir, même si elle voit depuis longtemps la corruption se propager et priver le pays d’opportunités de développement.

Quant à la Turquie, je suis également préoccupé par nombre de choses qui s’y passent. À l’approche des élections, des représentants des médias sont agressés et le couvre-feu a été décrété dans une ville du sud-est. La situation est très complexe. J’ai eu une conversation téléphonique avec le Premier ministre Davutoğlu il y a une semaine; aujourd’hui, j’ai rencontré l’un des principaux partis d’opposition, le parti kurde HDP; jeudi dernier, je rencontrais le président de l’autre principal parti d’opposition, le CHP, le tout afin de réunir autant d’informations que possible, de saisir les différents points de vue et de voir ce que nous pouvons faire.

Nous ne voulons évidemment pas nous immiscer dans la campagne électorale, mais celle-ci doit garantir à chacun la liberté d’expression et la possibilité de voter.

M. VILLUMSEN (Danemark)* – Monsieur le Secrétaire Général, je suis moi aussi très préoccupé par ce qui se passe en Turquie: des journalistes sont menacés, des médias attaqués, des maires incarcérés, des zones civiles bombardées. Voilà un contexte qui n’est guère favorable à la tenue d’élections libres et ouvertes. Qu’en pensez-vous? Le Gouvernement turc devrait-il agir pour assurer la tenue de telles élections, et si oui, comment?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Vous avez répondu vous-même: le Gouvernement turc a l’obligation d’assurer la liberté d’expression, de réunion, de protéger les médias et de garantir à tous le droit d’aller voter. Il existe effectivement des sujets de préoccupation; les tensions sont exacerbées, notamment au sud-est du pays. Nous suivons tout cela de très près.

Voici une bonne nouvelle: j’ai demandé aujourd’hui au chef du parti kurde si la Cour constitutionnelle fonctionnait toujours – vous savez que nous avons insisté sur la création d’une Cour constitutionnelle indépendante, qui fonderait ses arrêts sur la jurisprudence de la Cour de Strasbourg; la réponse a été positive. Il n’est évidemment pas question d’ingérence directe dans la campagne, mais cela peut contribuer à garantir les principes fondamentaux et l’Etat de droit, y compris après les élections.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège)* – Monsieur le Secrétaire Général, le 8 septembre dernier, vous avez envoyé un courrier à tous les Etats membres relatif à cette crise des migrations, que nous connaissons actuellement en Europe. Vous mettiez en avant le fait que l’on demandait à un nombre de pays très restreint d’accueillir le plus grand nombre d’arrivants, ce qui mettait durement à l’épreuve la solidarité politique entre nos pays membres.

Avez-vous eu des réponses, positives ou négatives, à votre courrier? Quelles réactions avez-vous enregistrées à cet appel à faire la démonstration de la solidarité paneuropéenne?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je ne peux pas dire que nous ayons reçu de réponses positives directes à cet appel à la solidarité. Vous avez pu constater qu’au sein de l’Union européenne, malgré de multiples discussions, les points de vue diffèrent.

J’ai toutefois reçu une réponse très positive sur l’aspect suivant. Nous avons, en effet, rappelé aux Etats membres leurs obligations fondamentales – j’y ai déjà fait référence à deux ou trois reprises dans le cadre de mes réponses antérieures. Nous leur avons transmis les normes qui sont les nôtres et auxquelles ils doivent se conformer. Nous leur avons notamment rappelé les normes à respecter lorsque des personnes arrivent à la frontière et sont placées en rétention, ou encore lorsqu’elles se retrouvent dans des zones de transit, comme c’est le cas en Hongrie. On ne peut pas dire qu’en zone de transit, les articles de la convention ne sont pas applicables. Ce n’est pas exact: les articles de la convention sont d’application sur chaque centimètre carré du territoire européen, quel que soit le nom que porte ce morceau du territoire. Ce rappel important a été effectué et a été salué par de nombreux pays, par des organisations internationales et l’Union européenne.

Lorsque j’ai rencontré le haut-commissaire des Nations Unies, il s’est vraiment félicité de cette démarche. Il a lui-même très souvent rappelé la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme eu égard à la multiplicité des questions qui se posent à l’heure actuelle du fait des défis auxquels nous sommes confrontés.

Il est bon de disposer de ces éléments lors de nos discussions avec nos gouvernements.

M. HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Les flux migratoires ont plongé l’Europe dans un état de choc. Certains pays ont fermé leurs frontières, refusant que des migrants arrivent en masse apportant leur lot de problèmes.

Je poserai deux questions.

Tout d’abord, avez-vous enfin pris conscience à quel point, depuis 25 ans, l’Azerbaïdjan avait souffert de ce problème dévastateur, lorsqu’elle a accepté d’accueillir toutes ces personnes en leur fournissant un toit et des conditions de vie normales? Il s’agissait de un million de personnes issues de pays différents et de nationalités variées.

Ensuite, avez-vous pris conscience de la différence de niveau de tolérance existant entre ceux qui se sont comportés vis-à-vis des migrants musulmans en étant guidés par des sentiments fascistes et racistes et l’Azerbaïdjan qui a accueilli tous les réfugiés avec la même sollicitude, quelles que soient leur nationalité, leur religion ou leur origine, y compris lorsqu’ils arrivaient d’Arménie?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Malheureusement, étant submergés par les réfugiés qui viennent de l’extérieur, nous avons parfois tendance à oublier toutes les personnes déplacées à l’intérieur des frontières sur notre continent. Ce problème se pose depuis longtemps. Vous en mentionnez un, mais il en existe ailleurs, notamment un de très grande ampleur en Ukraine où près de un million de personnes se trouve aujourd’hui déplacé à l’intérieur des frontières de ce pays… On me fait signe que je me trompe, mais le chiffre n’en demeure pas moins considérable.

C’est le problème auquel nous étions confrontés avant cette «crise des réfugiés», comme nous l’appelons, qui a éclaté il y a deux ou trois mois.

Je suis également conscient du fait que des pays comme la Turquie et l’Azerbaïdjan, dont la population est majoritairement musulmane, sont plus disposés à ouvrir leurs portes quand l’Europe a plutôt tendance à fermer ses frontières et à repousser ces personnes.

Je suis pleinement conscient de la situation et c’est un point que nous devons garder à l’esprit lorsque nous essayons de trouver une solution à la crise.

M. ROCHEBLOINE (France) – Vingt-et-un années après le cessez-le-feu dans le conflit du Haut-Karabakh, des incidents de frontière meurtriers se succèdent, à l’initiative des forces azéries. Quelles initiatives comptez-vous prendre pour aider à mettre un terme à cette spirale dangereuse? Quel peut être, à côté des négociations du Groupe de Minsk, l’action complémentaire du Conseil de l’Europe?

Enfin, Monsieur le Secrétaire Général, êtes-vous intervenu à propos de la situation de Mme Leyla Yunus et de son mari?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Pour ce qui est de la réponse à votre dernière question, et pas uniquement concernant Mme Leyla Yunus et son époux, car il existe d’autres cas également, nous avons effectivement soulevé ce point avec les autorités azerbaïdjanaises et la Cour est intervenue pour un cas. Donc, non seulement nous suivons la situation, mais nous nous efforçons aussi de trouver une solution, tout comme le Comité des Ministres.

Je suis conscient que les tensions se sont exacerbées entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. J’ai reçu des informations selon lesquelles il y a eu un échange de tirs à l’arme lourde entre les deux pays – non pas entre le Haut-Karabakh et l’Azerbaïdjan, mais directement entre les deux pays. C’est extrêmement préoccupant.

Vous avez fait référence au Groupe de Minsk. C’est le seul instrument à ma disposition à l’heure actuelle. Nous avons, en effet, demandé aux deux parties si elles souhaitaient s’impliquer d’une manière ou d’une autre, mais aucune n’a répondu de manière positive. Toutes deux continuent d’affirmer que tout est entre les mains du Groupe de Minsk.

Cependant, lorsque ces deux pays ont adhéré au Conseil de l’Europe, l’une des raisons de l’octroi de leur statut d’Etat membre était de les amener à trouver une solution pacifique au conflit. Les Etats membres doivent régler leurs différends de manière pacifique. Or l’échange de tirs à l’arme lourde n’est pas un procédé pacifique!

M. RIGONI (Italie)* – Monsieur le Secrétaire Général, je souhaiterais vous poser une question sur un pays qui n’est pas membre du Conseil de l’Europe, mais qui n’en demeure pas moins un pays européen situé au cœur même de l’Europe, à savoir le Bélarus.

Il est à nouveau à la mode d’ériger des murs, mais le Conseil de l’Europe s’est toujours efforcé de les abattre. C’est pourquoi je pense qu’il faut casser le mur de méfiance à l’égard du Bélarus et rétablir des liens entre l’APCE et le Parlement du Bélarus.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je ne peux pas m’exprimer ici au nom de l’Assemblée parlementaire, puisque je sais que vous avez retiré au Bélarus le statut d’invité il y a quelques années, et ce pour des raisons tout à fait compréhensibles. Toutefois, au niveau intergouvernemental, nous avons mis sur pied un bon processus et le Bélarus a adhéré à plusieurs de nos conventions et est intéressé par d’autres.

Le Conseil de l’Europe est également la seule institution à avoir maintenu une présence à Minsk, où nous avons un bureau – certes pas très grand, mais nous en avons tout de même un, alors que l’OSCE a été jetée en dehors du pays il y a quelques années. Le Conseil de l’Europe peut donc, quant à lui, poursuivre son travail sur place. Il peut diffuser des informations sur la Convention européenne des droits de l’homme et lancer des campagnes contre la peine de mort, laquelle constitue, me semble-t-il, un obstacle majeur – y compris aux yeux de l’Assemblée parlementaire –à l’avancée de la situation.

Nous nous félicitons de la libération récente de quelques prisonniers politiques au Bélarus et nous espérons qu’un moratoire sur la peine de mort sera bientôt introduit.

Par ailleurs, le Bélarus n’a pas dit qu’il souhaitait devenir membre à part entière du Conseil de l’Europe. Toutefois, je suis d’accord pour dire avec vous que le Bélarus se trouve en Europe et qu’il faudrait qu’il fasse partie de notre famille. Cela dit, je le répète, ce pays n’a pas fait de demande en ce sens et il est plutôt intéressé par le processus que je viens de vous expliquer.

M. BENEYTO (Espagne)* – Je voudrais, Monsieur le Secrétaire Général, revenir à la question de l’aide que le Conseil de l’Europe peut apporter, de manière très concrète, pour gérer la crise des réfugiés. Je me demande notamment si la Banque de développement du Conseil de l’Europe aide à mettre en place des structures dans les pays d’origine et dans les camps de réfugiés. Intervient-elle lorsque ces personnes se présentent aux différents points d’entrée sur le continent européen? Apportons-nous, par exemple, une aide pour établir des bureaux d’accueil des réfugiés? C’est peut-être là le moyen de donner plus de visibilité au travail que mène le Conseil de l’Europe dans ce domaine.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – La question que vous soulevez est très importante et vous m’avez rappelé que j’ai oublié d’en parler, alors que je souhaitais vraiment le faire. La Banque souhaite effectivement apporter une contribution, sous la forme de prêts, qui devrait permettre d’ouvrir des hotspots, des centres où les migrants peuvent être enregistrés en bonne et due forme. Un fonds a été créé à cette fin, avec pour but de mobiliser des ressources supplémentaires venant des Etats parties à la Banque. C’est là une excellente initiative et vous avez raison de dire que nous pouvons beaucoup apporter, notamment pour l’installation de centres d’enregistrement: nous pouvons, en nous fondant sur notre expertise, montrer comment il faut s’y prendre, dans de telles situations, pour mettre en place des structures respectueuses des normes conventionnelles. Nous pourrions également travailler main dans la main avec le HCR des Nations Unies, lequel est responsable au regard de la Convention de Genève.

Si nous réussissons à faire cela, nous aurons fourni une aide importante aux pays dotés de tels centres, mais aussi à l’Union européenne, qui soutient elle aussi cette initiative.

M. KHADER (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – À Jérusalem-Est, la situation est explosive et constitue une réelle menace: une guerre de religion pourrait éclater, ce qui aurait des conséquences lourdes sur la stabilité de l’Europe. Face à cette menace, que peut faire le Conseil de l’Europe, ne serait-ce que pour maintenir le statu quo?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Là encore, les possibilités qui s’offrent à nous sont limitées, car ce territoire ne dépend pas de notre juridiction. Cela dit, nous pouvons rappeler à toutes les parties – notamment à Israël – quelles sont leurs responsabilités.

Quand Ariel Sharon s’était rendu sur l’Esplanade des Mosquées, cela avait déclenché de nombreuses violences. À l’époque, plusieurs recommandations avaient été formulées, notamment en lien avec le président Clinton et Kofi Annan. Israël avait alors posé comme préalable un arrêt des violences pendant sept jours. De nouvelles violences avaient cependant éclaté, ce qui avait constitué un prétexte parfait pour ne pas mettre en œuvre les recommandations.

Je pense pour ma part que l’on devrait revenir à ces recommandations. Il faudrait, sinon obtenir un cessez-le-feu, du moins faire en sorte que les violences s’arrêtent afin que les discussions puissent reprendre, car toute personne doit avoir accès à ce lieu extrêmement important pour le monde entier.

M. TILKI (Hongrie)* – Depuis le début de la crise des migrations en Europe, vous n’avez pas ménagé vos efforts, Monsieur le Secrétaire Général, pour transmettre certains messages, que ce soit à l’intention des Etats membres ou des autres organisations internationales, notamment le Haut-Commissariat aux réfugiés. Vous avez indiqué à de nombreuses reprises que le Conseil de l’Europe avait un rôle à jouer pour résoudre ce qui constitue la plus grande crise migratoire que le monde ait connue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Comment voyez-vous donc le rôle du Conseil de l’Europe dans le contexte actuel?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je crois que nous devons suivre de très près ce que fait chaque Etat membre. Il y a à la fois des personnes qui ont droit à l’asile, à savoir des réfugiés, et des migrants. C’est au HCR, à la lumière de la Convention de Genève, qu’il revient de faire la différence entre ces deux catégories. Quant à nous, nous ne faisons pas de distinction entre les migrants et les demandeurs d’asile: même si les premiers n’ont pas le droit de demeurer sur le territoire européen, tous jouissent des mêmes droits tant qu’ils s’y trouvent. La Convention européenne des droits de l’homme doit être pleinement respectée, pour les uns et pour les autres.

Nous avons le devoir d’observer ce qui se passe dans chaque Etat membre, mais aussi aux frontières, et nous pouvons intervenir pour aider. Comme je l’ai dit, la Banque a lancé une initiative en ce sens. Nous pouvons également aider ceux qui sont responsables de la gestion des centres à respecter les normes fixées par la Convention.

En tant qu’élus, vous devez rappeler aux Etats membres ce que nous pouvons faire pour aider les pays situés dans notre voisinage. C’est une honte, c’est un scandale que le programme du HCR pour les civils et les réfugiés soit financé seulement à hauteur de 20 %. Le Programme alimentaire mondial a donc réduit le budget destiné aux personnes qui se trouvent dans les terribles camps de Jordanie. Si ces personnes meurent de faim, il est normal qu’elles cherchent à se rendre en Europe. Si nous étions, vous ou moi, dans une situation identique, nous essaierions nous aussi, par tous les moyens, de gagner l’Europe.

M. NEGUTA (République de Moldova) – Je souhaite aborder la situation en Moldavie. Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier pour votre analyse publiée le 10 août dans un article du New York Times. Nous sommes d’accord avec cette analyse. Depuis sept ans, il n’y a eu aucun changement favorable en Moldavie: aujourd’hui, alors que les réformes ne sont pas mises en œuvre, un milliard de dollars a disparu, provoquant la colère des citoyens qui descendent dans la rue. Monsieur le Secrétaire Général, quelles sont vos suggestions pour la Moldavie? Qu’est-il nécessaire de faire?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – C’est très concret: nous avons un plan d’action pour la République de Moldova qui se concentre sur les problèmes que vous avez mentionnés. Il s’agit, d’une part, de mettre sur pied un pouvoir judiciaire véritablement indépendant, en lequel la population pourrait avoir confiance et, d’autre part, de réformer le parquet afin de le rendre indépendant. Ces deux éléments sont extrêmement importants parce qu’il est impossible de lutter contre la corruption sans tribunaux indépendants, sans un parquet indépendant; or, la corruption est le problème principal. Vous pouvez lui donner les noms que vous voulez – oligarchie, etc. – ou dire que les instances politiques ont trop de pouvoir, mais cela nous ramène toujours à la même chose: la séparation des pouvoirs. Sans institutions indépendantes, nous faisons face à cette situation terrible: il faut donc beaucoup travailler à cette réforme, qui permettra de séparer le pouvoir judiciaire de l’arène politique et le bureau du procureur du monde politique.

M. HUNKO (Allemagne)* – Dans le cadre du rapport d’activité, nous avons constaté qu’une tendance émerge dans nombre de pays membres du Conseil de l’Europe: l’établissement de listes noires, permettant de prendre des sanctions contre des membres de l’Assemblée parlementaire et entravant notre capacité à travailler – je pense notamment à l’Azerbaïdjan, à la Fédération de Russie et à l’Ukraine. C’est une source de vives préoccupations pour nous. Aussi, je souhaite connaître votre avis sur cette question et savoir ce que vous pouvez faire pour que les membres de cette Assemblée puissent se déplacer librement afin de mener leurs tâches à bien.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – C’est en effet une source de vives préoccupations que de constater que l’on essaye d’entraver le travail des députés élus, alors que ceux-ci ont le droit de se déplacer dans les 47 Etats membres. Lorsque j’ai eu la possibilité de le faire, j’ai discuté de ces questions avec les autorités compétentes. Soyez assuré que j’ai cette question bien présente à l’esprit: je suis en plein accord avec les propos que vous venez de tenir.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Etant donné les problèmes posés par l’afflux de réfugiés et de migrants en Europe et ailleurs, quelles mesures le Conseil de l’Europe pourrait-il prendre pour traiter ce problème à la racine? Quelle que soit l’origine de ces flux – les guerres au Moyen-Orient ou les difficultés économiques, qui ne font que s’exacerber –, l’Europe attire comme un aimant. Le Conseil de l’Europe lui-même n’a certes pas de responsabilité en la matière; mais comment pouvez-vous influencer les gouvernements et les parlements européens pour que la situation en Syrie évolue?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Le moment est venu de nous concentrer sur les moyens de mettre un terme à cette guerre en Syrie. Nous devons poser la question de la responsabilité du Conseil de Sécurité, et notamment de ses membres permanents.

Il existe tout de même un élément prometteur dans la région: il s’agit de la Tunisie, où les forces politiques principales ont pu s’accorder sur une Constitution et sur la tenue d’élections présidentielles. La transition entre l’ancien président et le président actuel a été pacifique, la société civile ayant d’ailleurs joué un rôle extrêmement important dans cette transition pacifique. Le Conseil de l’Europe, via la Commission de Venise, a fourni une véritable assistance lors du processus constitutionnel. Voilà donc un bon exemple.

Si la situation est extrêmement fragile, cela n’est pas dû à la situation de la Tunisie elle-même mais plutôt à la situation dans les pays voisins de la Tunisie. Des réfugiés arrivent en masse de la Libye, Etat qui s’est totalement effondré. Nous pouvons aider les pays dans le voisinage de l’Europe, et nous devons faire plus pour aider la Libye et gérer la crise humanitaire.

Vous avez dit que l’Europe attirait comme un aimant: c’est vrai, mais cela est lié à la misère qui règne dans les camps et dans les pays d’origine de ces personnes. Il faut donc s’attaquer aux causes profondes.

Mme DURRIEU (France) – Nous parlons beaucoup des réfugiés, du drame qui les frappe et qui touche directement l’Europe; nous en évoquons toutes les causes: elles sont économiques – la pauvreté – et politiques – les conflits. Mais nous n’avons pas beaucoup parlé de cette cause majeure qui aura probablement des effets très lourds sur l’immigration future: les changements climatiques. Réchauffement, dérèglement: à la fin du siècle, 50 à 150 millions de personnes peuvent être mises en mouvement et, par conséquent, se rendre en Europe ou dans d’autres pays.

La COP 21 qui se tiendra à Paris est un moment essentiel: il faut un accord universel et contraignant. Comment comptez-vous mobiliser les pays d’Europe qui, dans l’immédiat, ne le sont pas encore, pour cette cause essentielle?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL* – Je ne sais pas ce que je peux faire. La France a pris l’initiative dans bien des domaines et je suis impatient de participer à ce sommet à Paris; j’espère que l’on parviendra à un accord.

Je ne sais pas très bien ce que je dois faire pour rallier chacun à cette cause. Si je devais intervenir, les Présidents et les Premiers ministres me demanderaient de m’occuper d’abord des droits de l’homme plutôt que de l’environnement. Je pourrais toujours répondre que les démocraties peuvent jouer un rôle important, même lorsqu’il s’agit d’assurer la sauvegarde de la planète. Nous n’avons pas grand-chose dans notre «boîte à outils» nous permettant d’exercer une influence sur ce processus.

Nous pouvons tous exercer des pressions auprès de nos pays respectifs pour qu’ils adoptent la position qui s’impose lors du sommet qui se tiendra à Paris.

M. XUCLÀ (Espagne)* – Madame la Présidente, je suis responsable du rapport d’évaluation du partenariat pour la démocratie avec le Conseil national palestinien. Sans doute un petit déficit de coopération entre l’exécutif et le Parlement est-il à relever. Cela dit, nous entretenons d’excellentes relations avec nos collègues de la Palestine et avec M. Sabella, chef de la délégation.

Je voudrais savoir comment se déroule cette coopération entre le Conseil de l’Europe et les autorités palestiniennes, coopération qui doit s’inscrire dans le sens de la construction d’une démocratie dans ces territoires.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL*– Il y a trois ans, je me suis rendu auprès des autorités palestiniennes. J’ai rencontré le Président Abbas et le Premier ministre, ainsi que d’autres représentants. Je connais certains d’entre eux depuis trente ans! Nous avons discuté ensemble de ce que nous pouvions faire pour resserrer notre coopération et pour une plus grande interaction. Nous avons interrogé sur les besoins ressentis, un grand intérêt a été manifesté, mais, reconnaissons-le, nous n’avons pas reçu de réponse concrète.

Mais voilà que les choses commencent à progresser. Les autorités palestiniennes se sont tournées vers nous et demandent une assistance qui prend une forme concrète dont nous allons discuter dans le détail avec elles. Félicitons-nous de cette évolution. J’espère qu’il n’est pas trop tard.

LA PRÉSIDENTE* – Je donne la parole à M. Ghiletchi, puis j’interromprai la liste des orateurs. A ceux qui sont inscrits sur la liste et présents dans la salle, je propose de transmettre leurs questions par écrit. J’espère que M. le Secrétaire Général en sera d’accord et pourra vous fournir une réponse par écrit.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Je vous remercie, Monsieur le Secrétaire Général, de votre appui aux réformes nécessaires en République de Moldova. J’ai entendu vos propos sur la corruption et sur l’indépendance du judiciaire. Sur ce dernier point, je suis en désaccord, car nous n’aurons pas de système judiciaire indépendant si l’on en juge par certaines déclarations politiques, dont les vôtres. Vous connaissez le temps nécessaire à l’application des recommandations et résolutions. Nous avons tous besoin d’une enquête juste et équitable.

Par ailleurs, la crise bancaire a éclaté pour différentes raisons, dont des raisons géopolitiques. Ne serait-il pas préférable de ne pas faire de déclarations politiques avant la fin de l’enquête?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL*– Je n’ai pas critiqué qui ce soit en particulier. Vous avez évoqué la corruption. Qu’un pays comme la République de Moldova, perde un milliard de dollars américains crée une situation grave. Tout le monde, y compris le gouvernement actuel, est conscient du problème de la corruption et de la nécessité de l’indépendance du pouvoir judiciaire et surtout du parquet. Il me semble donc important que nous prenions tous la parole. Je ne puis ne rien dire sur la République de Moldova.

Mesdames, Messieurs, je vous remercie de vos excellentes questions et de m’avoir donné la possibilité de vous expliquer notre action. Je suis attentivement les travaux de l’Assemblée parlementaire qui joue un rôle essentiel pour influencer l’Europe et ses gouvernements.

LA PRÉSIDENTE*– Je crois cet exercice très utile et j’espère que nous pourrons le poursuivre à l’avenir.

4. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté ce matin par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 17 h 5.

SOMMAIRE

1. Modifications dans la composition des commissions

2. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente

Présentation par M. Gross du rapport d’activité (Doc. 13872 et Addendums I et II, Doc. 13883)

Orateurs: MM. Iwiński, Conde, Xuclà, Chope, Kox, Ariev, Beneyto, Huseynov, Mme Zimmermann, MM. Seyidov, Sabella, Babayan

Réponse de M. Gross

Vote sur le rapport d’activité

3. Questions à M. le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe

Questions: MM. Schennach, Ariev, Garđarsson, Wold, Kox, Villumsen, Mme Christoffersen, MM. Huseynov, Rochebloine, Rigoni, Beneyto, Khader, Tilki, Neguta, Hunko, Sabella, Mme Durrieu, MM. Xuclà, Ghiletchi

4. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Brigitte ALLAIN/Geneviève Gosselin-Fleury

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON/Bernhard Ebner

Luise AMTSBERG*

Athanasia ANAGNOSTOPOULOU

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Sirkka-Liisa ANTTILA/Petri Honkonen

Ben-Oni ARDELEAN*

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Anna ASCANI*

Egemen BAĞIŞ/Ahmet Berat Çonkar

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE

Gérard BAPT*

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO/Ángel Pintado

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Jana Fischerová

José María BENEYTO

Levan BERDZENISHVILI*

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN

Tilde BORK

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ*

António BRAGA*

Anne BRASSEUR

Piet De BRUYN/Dirk Van Der Maelen

Beata BUBLEWICZ/Iwona Guzowska

Gerold BÜCHEL*

André BUGNON

Natalia BURYKINA*

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI/Francesco Verducci

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON*

Igor CORMAN/Valentina Buliga

Telmo CORREIA*

Paolo CORSINI

Carlos COSTA NEVES*

Celeste COSTANTINO*

Yves CRUCHTEN

Zsolt CSENGER-ZALÁN

Katalin CSÖBÖR

Joseph DEBONO GRECH

Reha DENEMEÇ

Renata DESKOSKA*

Alain DESTEXHE

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK*

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ

Namik DOKLE

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY*

- Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON/André Schneider

Josette DURRIEU

Mustafa DZHEMILIEV*

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Franz Leonhard EßL

Samvel FARMANYAN*

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA

Daniela FILIPIOVÁ*

Ute FINCKH-KRÄMER

Axel E. FISCHER

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON

Iryna GERASHCHENKO*

Tina GHASEMI

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Carlos Alberto GONÇALVES

Mustafa Sait GÖNEN*

Alina Ștefania GORGHIU*

Svetlana GORYACHEVA*

Sylvie GOY-CHAVENT

Fred de GRAAF*

François GROSDIDIER

Andreas GROSS*

Dzhema GROZDANOVA

Mehmet Kasim GÜLPINAR/ Ali Şahin

Gergely GULYÁS/Attila Tilki

Jonas GUNNARSSON

Nazmi GÜR*

Antonio GUTIÉRREZ/Jordi Xuclà

Maria GUZENINA/Susanna Huovinen

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV

Alfred HEER*

Michael HENNRICH*

Martin HENRIKSEN

Françoise HETTO-GAASCH

Oleksii HONCHARENKO/Vladyslav Golub

Jim HOOD/David Crausby

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI/Sahiba Gafarova

Rafael HUSEYNOV

Vitaly IGNATENKO*

Ekmeleddin Mehmet İHSANOĞLU*

Florin IORDACHE/Daniel Florea

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT/Jacques Legendre

Gedimnas JAKAVONIS

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Frank J. JENSSEN/Tore Hagebakken

Florina-Ruxandra JIPA*

Ögmundur JÓNASSON

Aleksandar JOVIČIĆ*

Josip JURATOVIC

Anne KALMARI

Mustafa KARADAYI*

Marietta KARAMANLI*

Niklas KARLSSON/Eva-Lena Jansson

Vasiliki KATRIVANOU

Ioanneta KAVVADIA

Danail KIRILOV*

Bogdan KLICH*

Manana KOBAKHIDZE*

Haluk KOÇ/Metin Lütfü Baydar

Igor KOLMAN*

Željko KOMŠIĆ*

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR/Brynjar Níelsson

Ksenija KORENJAK KRAMAR*

Attila KORODI*

Alev KORUN/Andreas Schieder

Rom KOSTŘICA/Gabriela Pecková

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Julia KRONLID/Johan Nissinen

Eerik-Niiles KROSS*

Marek KRZĄKAŁA*

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Serhiy LABAZIUK/Ihor Huz

Inese LAIZĀNE

Olof LAVESSON

Pierre-Yves LE BORGN'

Jean-Yves LE DÉAUT/Frédéric Reiss

Igor LEBEDEV*

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE*

Georgii LOGVYNSKYI*

François LONCLE/Pascale Crozon

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI

Soňa MARKOVÁ/Pavel Holík

Milica MARKOVIĆ*

Meritxell MATEU PI

Ana MATO

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Evangelos MEIMARAKIS*

Ivan MELNIKOV*

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY

Jean-Claude MIGNON

Olivia MITCHELL

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Melita MULIĆ*

Oľga NACHTMANNOVÁ

Hermine NAGHDALYAN/ Vahan Babayan

Piotr NAIMSKI*

Sergey NARYSHKIN*

Marian NEACȘU/ Titus Corlăţean

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH

Miroslav NENUTIL

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI*

Aleksandar NIKOLOSKI

Julia OBERMEIER*

Marija OBRADOVIĆ

Žarko OBRADOVIĆ

Judith OEHRI

Carina OHLSSON*

Joseph O'REILLY

Maciej ORZECHOWSKI/Michal Stuligrosz

Sandra OSBORNE/Joe Benton

Tom PACKALÉN

José Ignacio PALACIOS

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS CORTÉS*

Ganira PASHAYEVA/Sevinj Fataliyeva

Florin Costin PÂSLARU

Waldemar PAWLAK/Jan Rzymełka

Jaana PELKONEN/Anne Louhelainen

Vladimir PLIGIN*

Cezar Florin PREDA*

John PRESCOTT*

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV*

Lia QUARTAPELLE PROCOPIO*

Carmen QUINTANILLA*

Kerstin RADOMSKI*

Mailis REPS/Andres Herkel

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE

Soraya RODRÍGUEZ*

Alexander ROMANOVICH*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET

Rovshan RZAYEV/Fazil Mustafa

Àlex SÁEZ*

Vincenzo SANTANGELO*

Milena SANTERINI

Nadiia SAVCHENKO/ Sergiy Vlasenko

Deborah SCHEMBRI/Joseph Sammut

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU/Ingebjørg Godskesen

Frank SCHWABE

Urs SCHWALLER/Elisabeth Schneider-Schneiter

Salvador SEDÓ*

Predrag SEKULIĆ*

Ömer SELVİ/Suat Önal

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV

Jim SHERIDAN*

Bernd SIEBERT*

Valeri SIMEONOV*

Andrej ŠIRCELJ*

Arturas SKARDŽIUS

Jan ŠKOBERNE*

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK

Lorella STEFANELLI/Gerardo Giovagnoli

Yanaki STOILOV*

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE*

Valeriy SUDARENKOV*

Krzysztof SZCZERSKI*

Damien THIÉRY

Lord John E. TOMLINSON

Antoni TRENCHEV*

Goran TUPONJA

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ*

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI/Eirini Kasimati

Ilyas UMAKHANOV*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN*

Petrit VASILI*

Imre VEJKEY/Rózsa Hoffmann

Stefaan VERCAMER

Birutė VĖSAITĖ

Nikolaj VILLUMSEN

Dimitris VITSAS*

Vladimir VORONIN*

Viktor VOVK

Klaas de VRIES*

Nataša VUČKOVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ*

Piotr WACH

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Tom WATSON*

Karl-Georg WELLMANN/Johann Wadephul

Katrin WERNER*

Morten WOLD

Bas van 't WOUT/Marit Maij

Gisela WURM

Maciej WYDRZYŃSKI*

Leonid YEMETS/Pavlo Unguryan

Tobias ZECH

Kristýna ZELIENKOVÁ

Sergey ZHELEZNYAK*

Marie-Jo ZIMMERMANN

Emanuelis ZINGERIS

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Estonie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Royaume-Uni*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Boriana ÅBERG

Agustín CONDE

Jean-Claude FRECON

Kerstin LUNDGREN

Barbara ROSENKRANZ

Partenaires pour la démocratie

Qais KHADER

Bernard SABELLA

Najat AL-ASTAL