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AS (2015) CR 32

SESSION ORDINAIRE DE 2015

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(Quatrième partie)

COMPTE RENDU

de la trente-deuxième séance

Mercredi 30 septembre 2015 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5 sous la présidence de Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE* – La séance est ouverte.

1. Vérification des pouvoirs de membres de la délégation estonienne

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle la vérification des pouvoirs de membres de la délégation estonienne, qui ont été remis à la Présidente dans les formes prévues à l’article 6 du Règlement.

Les noms des représentants et des suppléants en question figurent dans le Doc. 13882 Addendum.

En l’absence d’objection, les pouvoirs sont ratifiés.

LA PRÉSIDENTE* – Je souhaite la bienvenue à nos nouveaux collègues.

2. Modifications dans la composition des commissions

LA PRÉSIDENTE* – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2015) 07 Addendum 3.

En l’absence d’opposition, les modifications sont adoptées.

3. Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)
en 2014-2015

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle le débat élargi de l’Assemblée parlementaire sur «Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2014-2015».

Conformément au règlement relatif aux débats élargis de l’Assemblée parlementaire sur les activités de l’OCDE, le vote aura lieu à main levée afin de permettre aux délégations des pays non européens, membres de l’OCDE mais qui n’appartiennent pas au Conseil de l’Europe, de participer au scrutin.

Je souhaite la bienvenue aux délégations parlementaires du Canada, d’Israël, du Japon et du Mexique. À nos collègues du Japon, je dis Yôkoso !

Cette discussion commencera par la présentation du rapport de M. Elzinga, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 13865). M. Elzinga est, d’une certaine manière, notre rapporteur traditionnel sur cette question. Puis, l’Assemblée entendra l’intervention de M. Gurría, Secrétaire général de l’OCDE.

Monsieur le rapporteur, je vous rappelle que vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir, à votre convenance, entre la présentation de votre rapport et la réplique aux orateurs.

M. ELZINGA (Pays-Bas), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* –
J’ai honneur de vous présenter mon rapport sur les activités de l’OCDE pendant l’année écoulée.

Sauf erreur de ma part, c’est la première fois qu’un représentant du Groupe de la gauche unitaire européenne élabore des rapports sur l’OCDE. Qu’un socialiste rédige un rapport sur le «club des riches» et que le projet de résolution ne soit pas seulement soutenu par la commission des questions politiques mais soit adopté largement par l’Assemblée pourrait sembler étonnant. Je vous laisse méditer cette réflexion!

Notre débat en commission a démontré que nous pouvions fonder nos discussions sur les données objectives et les recommandations de l’OCDE. De toute évidence, l’image que l’on se fait du «club des riches» est caricaturale et simpliste. J’ai découvert, au fil des ans, que l’OCDE est une organisation qui ancre ses analyses sur des données solides. J’ai beaucoup de respect pour l’OCDE et son Secrétaire général.

Je tire par ailleurs beaucoup de fierté du fait que les débats de notre Assemblée élargie et le dialogue entre l’Assemblée parlementaire et l’OCDE en général, aient permis de renforcer les compétences de cette organisation. En 2008, lors de mon premier débat avec M. Gurría, nous étions tous inquiets de la crise financière qui venait d’éclater et nous craignions une contamination de l’économie. J’avais dit à l’époque que la crise financière qui s’abattait sur nous avec tant de force devait nous conduire à produire de nouveaux types de recommandations. Un processus de réflexion collective a commencé ensuite et un dialogue permanent s’est instauré entre nos organisations, qui a abouti aux Nouvelles approches face aux défis économiques (NAEC).

Dans le rapport de synthèse final de l’initiative NAEC, sorti cette année, l’OCDE tire les leçons de la crise récente et identifie les défis économiques actuels. Pourquoi de nouvelles approches face aux défis économiques sont-elles nécessaires? En quoi consistent-elles? Comment ces nouvelles approches peuvent-elles nous aider à relever les défis de l’avenir? Telles sont les questions auxquelles s’efforce de répondre ce rapport, qui m’a beaucoup aidé dans la préparation de mon propre rapport. Le rapport de synthèse final NAEC se penche notamment sur les enjeux de la croissance économique, de la stabilité financière, de la durabilité écologique, de la cohésion sociale et du bien-être social. Il permet de comprendre que les inégalités croissantes entravent la croissance économique. Une imposition progressive ne réduit pas nécessairement l’activité économique et la redistribution doit faire partie d’un développement économique inclusif. Si l’activité économique a un impact négatif sur notre écosystème, la pression exercée sur l’environnement aura demain un prix lourd à payer. Un secteur financier sain peut soutenir l’économie réelle mais des secteurs financiers trop importants sont un fardeau pour la productivité.

Le rapport de synthèse final NAEC examine par ailleurs les grands défis de l’avenir en analysant les grandes tendances de l’économie. La dégradation de l’environnement et la perte de la biodiversité constituent des menaces réelles. Le vieillissement de la population, le ralentissement de la croissance dans les pays occidentaux, la mondialisation économique, l’accumulation du capital au sein des entreprises, la concurrence fiscale, le poids du secteur informel et la baisse de l’emploi formel, la moindre protection de l’emploi, des rémunérations plus faibles et des conditions de travail dégradées: telles sont quelques-unes des grandes tendances évoquées par le rapport.

Pour relever ces différents défis, nous devons dès aujourd’hui adopter de nouveaux paradigmes. Nous n’avons d’autre choix que de penser autrement. L’initiative NAEC de l’OCDE constitue une aide précieuse à cet égard et nous avons déjà identifié quelques réponses de court terme. Le projet de résolution propose, en effet, de ne pas attendre la fin du processus de réflexion, mais d’agir dès maintenant, en fixant des objectifs d’émissions de COet de financement des objectifs climatiques, mais aussi des objectifs stricts pour limiter l’utilisation de l’eau et des autres ressources naturelles à des niveaux viables. Nous proposons également de commencer à investir dans le développement et la recherche pour la croissance verte, de freiner les activités financières improductives, de réformer le secteur financier afin qu’il soit au service d’une croissance durable et inclusive de l’économie réelle, de stopper les inégalités croissantes et de promouvoir une répartition plus équitable des revenus, des richesses et du bien-être, mais aussi d’enrayer la progression du travail précaire, informel ou illégal, et d’investir dans l’éducation et la cohésion sociale.

J’ai bon espoir que nous puissions atteindre ces différents objectifs. C’est de toute manière indispensable. On disait autrefois qu’il fallait travailler dur pour faire croître l’économie avant de commencer à parler de redistribution des richesses. La durabilité de notre écosystème et de notre société n’est pourtant pas une question morale. Sans la société, il ne peut y avoir d’économie. Sans notre planète, nous n’existerions pas non plus. Le développement économique exige la cohésion sociale et un écosystème durable. L’initiative NAEC de l’OCDE, favorable à la croissance verte et inclusive, permet de diffuser de nouveaux paradigmes dans notre pensée économique. Nos gouvernements et nos parlements doivent s’en saisir de toute urgence pour appliquer de nouvelles politiques en faveur d’un nouveau type de développement économique, inclusif et vert.

LA PRÉSIDENTE* – Notre débat appelle maintenant l’intervention de M. Gurría, Secrétaire général de l’OCDE.

Monsieur le Secrétaire général, c’est pour nous un grand plaisir de vous accueillir dans cet hémicycle. Vos discours sont comme des feux d’artifice, si ce n’est que leur effet sur chacun d’entre nous se prolonge pendant longtemps. Lors du bref échange de vues que nous avons eu tout à l’heure dans mon bureau, vous m’avez remis un nombre impressionnant de rapports de l’OCDE. Je me félicite que mon mandat arrive à son terme, ce qui me donnera le temps de lire tous ces documents! Je serai ainsi plus utile en tant que parlementaire lors de notre prochain débat sur votre organisation.

Nous avons parlé hier d’immigration et d’intégration des migrants, et des différents rapports de l’OCDE, car tout est lié; on ne peut séparer les questions économiques des problèmes de croissance, d’environnement, de flux migratoires, de démographie.

C’est donc avec un vif intérêt que nous allons vous écouter. Je me réjouis que nous ayons ici une délégation du Mexique, mais aussi du Japon: grâce à l’OCDE, nous resserrons encore nos liens avec ces délégations nationales.

Vous avez la parole, Monsieur le Secrétaire général.

M. GURRÍA, Secrétaire général de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)*– Nous allons accorder à M. Elzinga les mêmes privilèges qu’à vous, Madame la Présidente! Voici donc pour vous, Monsieur Elzinga, nos «Perspectives des migrations internationales», un document que nous publions chaque année depuis 39 ans; notre premier document sur les indicateurs de l’intégration des immigrés, intitulé «Trouver ses marques», élaboré avec la Commission européenne et publié il y a quelques semaines; et notre synthèse relative aux débats sur la politique migratoire. Voilà pour ce qui concerne les migrations.

Nous allons également vous donner l’édition la plus récente de nos perspectives économiques intérimaires, qui met en évidence la médiocre performance de l’économie mondiale, ainsi que notre publication «Tous concernés», sur les inégalités et leur remède, la croissance inclusive. Voici aussi la dernière édition de NAEC (New Approaches to Economic Challenges). Quant au climat, voici notre dernière contribution aux discussions préparatoires à la COP 21, et un rapport très important qui montre tout ce que nous ne faisons pas, tout ce que nous faisons mal et que nous devrions faire différemment. Nous subventionnons les carburants fossiles et le parc automobile tout en tentant de réduire les émissions de carbone: c’est de la schizophrénie! Eh bien, ce rapport montre combien nous sommes schizophrènes.

Voici encore nos «Perspectives sur l’entreprise et la finance» pour 2015. Le dernier document que je vous donne, et non le moindre, porte sur l’avenir de la productivité – un facteur essentiel d’amélioration des salaires et de reprise de la croissance.

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les parlementaires, chers amis, c’est avec un grand plaisir que je me joins à vous pour évoquer dans cet hémicycle les activités de l’OCDE. Cet échange est désormais une tradition annuelle, particulièrement gratifiante. Vos réflexions, vos réactions, vos questions stimulantes nous incitent chaque fois à aller toujours plus loin dans notre quête de meilleures politiques pour des vies meilleures.

Je remercie singulièrement l’auteur du rapport qui nous est soumis cette année, M. Elzinga. Je vous félicite, Monsieur, de ce travail très complet qui pousse à réfléchir et fournit une excellente base de discussion. Vous avez occupé une place de choix dans le dialogue que nous menons avec le Conseil de l’Europe depuis des années – cela fait dix ans que je viens, Madame la Présidente!

LA PRÉSIDENTE* – Joyeux anniversaire!

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’OCDE* – Et ce n’est pas la dernière fois que vous me voyez ici, puisque mon mandat vient d’être renouvelé!

Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’ai une pensée pour les dizaines de milliers de migrants qui risquent leur vie dans l’espoir de trouver la sécurité, un travail et une vie meilleure pour leur famille. Nous avons été profondément touchés par les tragédies dont nous avons été témoins en Europe au cours des derniers mois. L’Europe peut et doit s’appuyer sur ses valeurs essentielles de solidarité et d’humanité pour relever ce défi. Au-delà des questions essentielles de quotas et de réinstallation qui, malheureusement, restent en partie à trancher, les programmes d’intégration doivent être développés et adaptés de sorte que les réfugiés puissent s’intégrer aussi vite et efficacement que possible dans les pays d’accueil. Il faut mettre l’accent sur l’intégration, encore l’intégration, toujours plus d’intégration.

Nous devons également favoriser le dialogue avec les pays d’origine et de transit et avec tous les pays de l’OCDE. Notre organisation bénéficie d’une longue expérience en la matière et offre son aide aux Etats membres pour réussir le processus d’intégration.

Nous venons de publier la 39e édition de nos «Perspectives des migrations internationales», que j’ai remise à M. Elzinga et qui analyse les dernières tendances en matière de migrations; nous avons également proposé une synthèse sur la crise actuelle. Il y a quelques semaines, nous avons publié le rapport «Trouver ses marques», qui permet la première grande comparaison internationale entre tous les pays de l’Union européenne et de l’OCDE concernant les perspectives économiques et sociales des immigrés et de leurs enfants dans les pays hôtes. Il montre tout ce qui reste à faire pour améliorer leur intégration afin que nous puissions bénéficier de leur énergie et de leur diversité. L’immigration est en effet un atout, et nous pouvons transformer la crise humanitaire actuelle en un bénéfice net du point de vue économique, fiscal et social.

J’en viens à la situation économique actuelle. Selon nos dernières perspectives économiques intérimaires, la croissance mondiale restera médiocre en 2015: on annonce un ralentissement qui devrait la ramener à 3 %. Je rappelle que, au cours des dix années qui ont précédé la crise, elle atteignait 4 % en vitesse de croisière: on en est loin. La croissance reprendra un peu en 2016, pour atteindre 3,6 %.

Nous avons une raison d’espérer grâce aux Etats-Unis, où la reprise, poussée par la consommation privée, demeure robuste. La croissance dans la zone euro s’améliore, mais plus lentement que ce qui était attendu, tandis que la reprise japonaise reste faible. Le commerce international, l’investissement, le crédit, c’est-à-dire les cylindres du moteur de la croissance, ne tournent qu’à demi. S’ils restent à leur niveau actuel, nous ne connaîtrons pas la croissance.

Un ralentissement beaucoup plus marqué que prévu en Chine et dans d’autres économies émergentes représente un risque majeur, comme les turbulences financières qu’il pourrait entraîner pour l’économie mondiale.

Malgré de récents progrès, l’héritage de la crise se fait encore fortement sentir. Nos perspectives en matière d’emploi, publiées en juillet, montrent que 42 millions de personnes sont encore éloignées du marché du travail dans les pays de l’OCDE, soit 10 millions de plus que juste avant la crise! Au plus fort de la crise, elles étaient 15 millions de plus qu’avant la crise; l’écart a été ramené à 10 millions, mais nous sommes encore sous l’eau.

En ce qui concerne les inégalités, notre récent rapport «Tous concernés: pourquoi moins d’inégalité profite à tous» montre que le fossé continue de se creuser. Dans les pays de l’OCDE, les 10 % les plus riches gagnent désormais près de 10 fois le revenu des 10 % les plus pauvres. Alors que faire? Est-ce beaucoup? Autrefois, cet écart était de 7 ou 8: la situation empire, et elle empire très vite.

Toujours selon ce rapport, cette aggravation des inégalités a rogné la croissance de près de 9 points au Royaume-Uni, en Finlande et en Norvège, et de 6 à 7 points aux Etats-Unis, en Italie et en Suède. A contrario, une plus grande égalité avant la crise a permis l’augmentation du PIB par tête en Espagne, en France et en Irlande quand la reprise est venue.

Au sein de l’OCDE, nous admettons que nos modèles économiques et nos économies ne fonctionnent pas pour le bénéfice de tous. Il faut donc les repenser sur le fondement de nouvelles théories économiques, plus satisfaisantes. Nous avons donc fait effort pour renouveler notre réflexion dans tous les services et sur tous les thèmes. Voici quelques exemples concrets.

Depuis son lancement en 2012, la nouvelle approche NAEC qui vous a été décrite par M. Elzinga a joué un rôle crucial dans la définition de ce que nous avons appelé notre programme d’action pour une croissance inclusive. Comment réagir à l’aggravation des inégalités? Par un programme d’action pour la croissance pour tous, par un programme de productivité inclusive: c’est le document que je vous ai remis, Monsieur Elzinga.

Il faut tirer des leçons de cette crise et améliorer la façon dont nous nous attaquons aux défis qui s’inscrivent sur le long terme.

Cette réflexion trouve son expression dans nos analyses, dans les conseils que nous apportons à nos Etats membres et nos Etats partenaires. Nous disposons d’un nouvel indicateur, que nous avons conçu; nous l’appelons «l’indicateur du niveau de vie pluridimensionnel». Il pose un nouveau cadre qui nous permet d’évaluer la qualité du travail et pas seulement le nombre d’emplois ou le niveau de rémunération. Il permet de mesurer la protection dont bénéficient les travailleurs, la qualité du travail, de l’environnement sur le lieu de travail.

Nous proposons également une nouvelle analyse sur les liens existants entre la finance et la croissance inclusive.

Nous appuyant sur la conférence du Conseil ministériel de l’OCDE de cette année qui a mis l’accent sur l’investissement, dont j’évoquais l’importance précédemment, nous travaillons à ce programme de travail sur la productivité et l’inclusion. Accroître la productivité sera le grand thème de l’année 2016, lors de la réunion ministérielle qui sera présidée par le Chili, qui est le deuxième membre latino-américain de l’OCDE après le Mexique.

Nous avons, comme je le dis, décodé le génome des échanges commerciaux. Nous travaillons sur les chaînes de valeur à l’échelle internationale, sur l’indice de restriction réglementaire au commerce de services et sur le moyen de mesurer les échanges en valeur ajoutée. Nous étudions ce qu’il en est de la falsification des échanges. Nous nous penchons sur tous ces indicateurs pour savoir où nous en sommes. C’est un peu un GPS en matière de facilitation des échanges.

Tous ces éléments réunis, associés à un nouveau cadre politique pour l’investissement – il s’agit de s’occuper du commerce d’une part, et de l’investissement, d’autre part – devraient nous aider à surmonter certains des obstacles qui nous empêchent de renouer avec la croissance.

Je suis rentré il y a quelques heures à peine de New York. J’y ai pris part au Sommet spécial des Nations Unies, lors duquel ont été adoptés les objectifs du développement durable: 17 objectifs, 169 sous-objectifs et quelque 400 indicateurs. C’est un agenda extrêmement ambitieux, mais nous devons absolument le prendre à bras-le-corps. C’est sans doute l’un des événements les plus importants de cette année. Il faut que le multilatéralisme prenne une forme dynamique et vivante.

Nous disposons de 800 semaines pour éradiquer l’extrême pauvreté où qu’elle prévale. Huit cents semaines pour sortir de la misère 800 millions de personnes – ce n’est que le premier de ces objectifs. Nous devons le faire de telle façon que nous arrivions également à rectifier les inégalités, à promouvoir l’égalité des chances pour tous et à garantir la pérennité de nos efforts pour les années à venir.

L’OCDE jouera pleinement son rôle. Elle se mobilise d’ores et déjà pour soutenir la mise en œuvre des objectifs pour le développement durable en offrant toute une gamme d’activités et de conseils, surveillant les progrès des pays et offrant une enceinte de dialogue politique.

La réunion de la COP 21 qui aura lieu à Paris en décembre prochain nous offre une autre occasion à ne pas laisser passer.

Ban Ki-moon était à l’OCDE il y a quelques semaines de cela, Madame la Présidente, où il a dit que 2015 était l’année la plus importante que nous vivions depuis la fondation des Nations Unies: cette année, le financement pour le développement a connu son sommet à Addis-Abeba; cette année également, pas plus tard qu’avant-hier, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté les objectifs pour le développement durable; nous nous acheminons vers Paris et la COP 21; et, à la fin de l’année, nous célébrerons les négociations de l’OMC à Nairobi.

Je reprends donc les mots du Secrétaire général des Nations Unies: 2015 est effectivement l’année la plus importante que les Nations Unies aient connu depuis leur création.

Nous devons être plus ambitieux également dans le domaine du changement climatique. À cet égard, abandonner les carburants fossiles suppose une transformation qui touchera tous les secteurs de l’économie, et partant, tous les domaines politiques.

Le rapport «Aligner les politiques pour une économie bas-carbone», que nous venons de produire, esquisse l’envergure de ce défi. Ce sera une transformation de fond en comble. Il s’agit pour nous, dans ce rapport, de souligner ce paradoxe que nous vivons chaque jour: les technologies que vous choisirez de retenir aujourd’hui prendront forme concrète dans 40 ans. Nous parlons donc de ce qui sera entre les mains des prochaines générations.

Nous travaillons d’arrache-pied pour aider les pays à améliorer les conditions qui seront propices à l’émergence d’investissements dits verts. Il s’agit aussi de mieux identifier les mécanismes de financement du changement climatique.

L’année 2015 sera aussi l’année de la Troisième conférence internationale sur le financement du développement. Je parlais d’Addis-Abeba: les problèmes d’imposition y ont été au centre des discussions.

À cet égard, chaque année, depuis que je viens vous rencontrer, j’évoque le besoin de changer les choses en matière d’imposition dans le monde: il faut en finir avec les paradis fiscaux, éviter que ceux qui veulent échapper au fisc trouvent des havres où ils sont protégés. Il faut que chacun s’acquitte d’un impôt équitable.

Si nous voulons éviter la double imposition, il ne faut pas pour autant mettre sur pied un système de double exonération. Nous ne voulons ni l’un ni l’autre de ces extrêmes. J’ai donc le grand plaisir de vous annoncer que le projet OCDE-G20 sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices a atteint désormais sa vitesse de croisière. Les résultats définitifs seront soumis pour approbation lors de la réunion des ministres des finances du G20 qui se tiendra à Lima la semaine prochaine avant qu’ils soient présentés au Sommet du G20 qui se tiendra à Antalya en Turquie mi-novembre.

Nous nous appuyons aussi sur les deux piliers de notre programme fiscal international – la norme d’échange informatique d’informations fiscales et l’initiative « Inspecteurs des impôts sans frontières » – qui a pour objet d’aider les pays en voie de développement à tirer le plus grand profit de ce projet OCDE-G20, action que nous avons menée de front en collaboration avec le PNUE, le programme des Nations Unies pour l’environnement, qui est présent sur le terrain dans 150 pays. Nous conduisons une transformation sans précédent visant à instaurer un système fiscal international plus juste et plus efficace.

Je reviens sur un sujet que j’ai évoqué avec Mme la Présidente Brasseur: aujourd’hui, 40 milliards d’euros ont déjà été reversés dans les coffres de nos pays, parce que les contribuables savent bien que, d’ici deux ans, il y aura échange automatique d’informations et que les autorités se montreront alors moins clémentes. C’est cent fois le budget de l’OCDE. En termes de retour sur investissement, c’est intéressant! N’oubliez pas de le souligner dans votre rapport de l’année prochaine, Monsieur Elzinga.

Je mets également l’accent sur la mise en œuvre de ces mesures de transformation dans le domaine fiscal. Elles doivent être globales et inclusives: les règles doivent être identiques pour tous. Les failles en matière fiscale ne peuvent continuer d’exister. Elles ne peuvent pas se déplacer d’un pays à l’autre; il faut les éliminer partout. Sinon, le problème perdurera.

Il est tout aussi important de permettre aux pays en développement d’avoir voix au chapitre. C’est la raison pour laquelle j’ai le grand plaisir de vous indiquer que nous avons reçu un mandat des ministres des finances du G20 il y a deux semaines à Ankara, en Turquie, qui nous permet de concevoir un cadre propre à faire participer activement les pays en voie de développement.

Chers amis, nous traversons un moment exceptionnel, d’une extraordinaire complexité: 2015 est une année riche de défis, mais également riche de promesses et de possibles. Ne laissons pas passer cette chance historique.

Boris Pasternak a dit un jour que «Lorsqu’un grand moment frappe votre porte, il ne fait souvent pas plus de bruit que le battement de votre cœur, et il est très facile de le manquer.» Saisissons cette chance, tirons-en le plus grand parti. Nos discussions et nos travaux avec vous, qui êtes législateurs, sont indispensables en ce qu’ils nous permettent de prendre le pouls de la société et de concevoir et proposer de meilleures politiques pour des vies meilleures.

LA PRÉSIDENTE* – Merci beaucoup, Monsieur le Secrétaire général, pour votre discours et pour la manière dont vous faites passer vos messages. Nous nous devons de vous écouter et de donner suite, dans nos parlements nationaux, à ce que vous venez de dire.

Je vous remercie également d’avoir été notre hôte le plus fidèle puisque, comme vous l’avez rappelé, c’était la dixième fois que vous vous exprimiez dans cet hémicycle.

Je vous remercie enfin pour l’appui que vous avez apporté à notre campagne contre le discours de haine, dont vous arborez l’emblème à la boutonnière.

Vous pourrez répondre tout à l’heure aux interventions et aux questions des membres de l’Assemblée.

Nous abordons maintenant la discussion générale.

Je rappelle à l’ensemble de nos collègues que leur temps de parole est limité à 3 minutes.

M. VILLUMSEN (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Il est très important de lutter contre l’évasion fiscale et les inégalités et de veiller au respect des droits des travailleurs, non seulement dans le cadre du développement économique, mais aussi dans les accords commerciaux de libre-échange. Si ces dimensions ne sont pas intégrées dans les politiques nationales de nos différents parlements, le développement restera réservé à quelques-uns au lieu de profiter à la majorité de nos concitoyens.

Il est très important qu’ici, à l’Assemblée, mais aussi dans nos pays respectifs, nous retenions les enseignements de la crise financière. Nous devons réglementer le système financier; nous devons corriger les politiques d’austérité malavisées de l’Union européenne. Nous ne devons pas laisser les banquiers et les spéculateurs décider une fois de plus du sort de nos nations et créer une nouvelle crise dont les conséquences, au niveau social, seront dévastatrices.

Nous devons aussi nous attaquer à la crise climatique et intégrer cette dimension dans nos politiques économiques. Si les politiques menées aujourd’hui doivent compromettre l’avenir de nos enfants, c’est qu’elles sont mauvaises, et il convient de les rejeter. L’enjeu climatique doit faire partie des politiques que nous menons au quotidien.

Notre Assemblée a une obligation cruciale: préserver les droits fondamentaux. Même quand il s’agit de développement économique et de commerce, il convient de ne pas oublier les droits de l’homme. La négociation collective, par exemple, est un droit fondamental qui doit être garanti dans nos Etats membres comme dans les politiques de l’Union européenne, lesquelles sont malheureusement fondées sur l’austérité et s’imposent à tous nos pays, entraînant un certain nombre de problèmes.

Permettez-moi, pour conclure, d’appeler votre attention sur le TTIP – le partenariat transatlantique de commerce et d’investissement entre l’Union européenne et les Etats-Unis, en cours de discussion. Il est essentiel que notre Assemblée n’oublie pas qu’il convient de sauvegarder la démocratie jusque dans les accords commerciaux de libre-échange. Or je suis très préoccupé par le fait que les entreprises multinationales pourraient, à la faveur de ces accords, se voir autorisées à ne pas respecter les règles inhérentes à la démocratie. Celle-ci doit être respectée non seulement en matière de politique économique, mais aussi en matière de politique commerciale.

Je vous remercie, Monsieur le rapporteur, pour votre travail d’excellente facture. Je remercie également M. le Secrétaire général pour la qualité de notre coopération.

M. Mogens JENSEN (Danemark), porte-parole du Groupe socialiste* – Les activités de l’OCDE, sur lesquelles porte le rapport très complet et équilibré de M. Elzinga, ont eu, depuis de nombreuses années, une grande influence sur le développement économique et dans le domaine politique, en Europe et dans le reste du monde. Il est donc tout à fait satisfaisant de voir que, au cours des dernières années, de nombreux changements sont intervenus dans la façon dont l’OCDE oriente ses travaux, lesquels sont davantage ciblés sur la croissance verte, les inégalités dans le monde, la fraude et l’évasion fiscales et les vertus du dialogue social, pour parvenir à une croissance plus inclusive et pour créer de meilleurs emplois. Ces dimensions, comme l’a rappelé M. Gurría, sont désormais très importantes dans l’approche de l’OCDE.

Il y a quelques jours, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté les nouveaux objectifs de développement durable – au nombre de 169 –, qui incluent des enjeux fondamentaux tels que la fin de la pauvreté extrême et la famine, l’amélioration de l’éducation et de la santé, le combat contre le changement climatique, ou encore la protection des forêts et des océans. L’OCDE et ses Etats membres doivent bien entendu assumer eux aussi leurs responsabilités et agir dans le sens de ces objectifs de développement durable d’ici à 2030.

Au nom du Groupe socialiste, je tiens à souligner certaines des recommandations importantes contenues dans le présent rapport. Nous sommes d’accord pour dire que le souci de promouvoir la croissance durable n’a, pour l’instant, pas eu un impact suffisant sur la croissance verte. Il faut faire plus. Il faut mettre un terme aux inégalités, promouvoir une croissance inclusive et veiller à une meilleure distribution des richesses. L’OCDE doit renforcer ses activités pour ce qui est de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.

En conclusion, je félicite M. Gurría, dont le mandat de Secrétaire général de l’OCDE a été renouvelé. Vos rapports – j’en ai lu un certain nombre – sont très utiles à l’ensemble de nos pays, que ce soit pour l’Europe ou pour l’ensemble du monde.

M. MANNINGER (Hongrie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je remercie le rapporteur pour ce travail approfondi qui évoque l’importance de la lutte contre les inégalités et du dialogue social pour construire une croissance plus inclusive et pour créer des emplois de qualité.

La situation actuelle des migrations montre que les crises se mondialisent de plus en plus et qu’elles ne peuvent être gérées que par des efforts conjoints au niveau mondial et par la coopération étroite entre les Etats, les organisations internationales et d’autres protagonistes. Nous saluons donc ce rapport qui représente un effort important pour inventer de nouvelles approches face aux défis économiques.

De fait, les politiques économiques menées avant la crise sous-estimaient les risques et ignoraient les tensions croissantes qui s’étaient fait jour. La réponse politique à la crise n’a pas été la bonne puisqu’elle a freiné la redistribution et entravé l’équilibre du marché. Sur la base de cette expérience, on peut affirmer que la résilience des économies doit être renforcée, ce qui suppose souvent de mener des politiques économiques contracycliques. La durabilité doit être définie comme une priorité et la confiance des marchés doit être restaurée. Le bon fonctionnement du secteur bancaire doit également être assuré tout en tenant compte des besoins sociaux. La croissance des inégalités et les pertes économiques qui en découlent doivent être gérées par le biais d’une croissance inclusive, laquelle peut être obtenue notamment en améliorant l’éducation.

La formation professionnelle est justement une des priorités du Gouvernement hongrois pour dynamiser la croissance économique, composante essentielle de l’inclusion économique et sociale.

La création d’emplois de qualité est également essentielle pour la reprise économique. Cela peut être facilité en démantelant les barrières qui s’opposent au fonctionnement du marché, en soutenant les jeunes entrepreneurs et en améliorant l’accès au crédit pour les sociétés et les entreprises innovantes.

En outre, les changements démographiques, les défis écologiques, la pénurie de matières premières et le changement technologique rapide doivent également être pris en compte. Face à tous ces enjeux complexes interconnectés, il est clair que seule une approche intégrée peut réussir. J’aimerais remercier le rapporteur pour son excellent rapport, qui représente un effort commun pour créer de nouvelles approches face au défi économique.

M. PASQUIER (Monaco), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* –
Je remercie M. Elzinga pour la qualité de son rapport et M. Gurría ainsi que l’OCDE pour les activités de l’organisation.

En tant que libéraux, axés sur le marché, nous partageons cette conviction que les initiatives privées et l’égalité des chances pour tous sont des ingrédients essentiels de la croissance économique et de la lutte contre la pauvreté.

J’aimerais ajouter une remarque au nom de mon groupe: l’OCDE, à l’instar du Conseil de l’Europe, doit veiller à ce que les conditions soient égales pour tous. À quoi bon permettre à des gens de quitter des banques s’ils peuvent ensuite déplacer leurs actifs en toute impunité dans d’autres paradis fiscaux? Les petits pays doivent être traités exactement comme les grands pays, quel que soit le montant de leur contribution au budget de l’OCDE ou du Conseil de l’Europe, qu’ils soient membres de ces institutions ou non.

J’exprimerai en outre quelques préoccupations, sous la forme d’une demande faite à l’OCDE: il s’agit de consacrer davantage de ressources à deux domaines. Le premier concerne la concentration des richesses et du patrimoine que nous constatons depuis plus de vingt ans. Si les gens sont privés d’espoir et de possibilités, s’ils ne peuvent plus espérer devenir riches par leur travail et par leur intelligence, si nous passons d’un système de prospérité pour tous à un système où le gagnant emporte tout, alors il y a de quoi être préoccupé. En termes politiques, la démocratie est alors remplacée par la ploutocratie.

Le deuxième domaine concerne le marché du travail, alors que nous constatons des flux migratoires considérables en Europe. Je ne parle pas de crise des migrations, car ces flux migratoires peuvent et doivent être vus comme une chance à saisir, tant pour les migrants que pour les pays qui les accueillent. Mais où sont les analyses académiques, les recherches universitaires sur ce sujet? Nombre d’études existent sur la libéralisation des flux de capitaux, la libéralisation des services; mais, pour ce qui est de la libéralisation du marché du travail, sur les avantages de la migration pour les pays qui connaissent une crise démographique, il n’y a pas beaucoup d’études. En tant que responsables politiques, nous avons besoin d’être crédibles sur ce sujet; or, si nous n’avons pas de bases théoriques, je crains fort que les forces anti-migratoires ne l’emportent finalement, avec un coût économique, social et politique très lourd pour nous tous.

Mme ERKAL KARA (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens – Je tiens à remercier le rapporteur pour cet excellent rapport qui met l’accent sur les notions essentielles de l’économie mondiale.

L’un des points essentiels sur lesquels le rapport insiste est la durabilité écologique. La durabilité est un concept qui favorise l’égalité entre les hommes d’aujourd’hui et de demain. La durabilité écologique repose en outre sur le fait que les humains ont la capacité d’abuser de nos ressources naturelles, ne laissant que l’eau polluée et le sol infertile pour les générations futures. De l’eau, du sol et de nombreuses ressources naturelles sont surexploitées par nos activités économiques. Comme le rapport le suggère, nous devons fixer des objectifs spécifiques pour maintenir l’utilisation de l’eau, du sol et d’autres ressources naturelles à des niveaux durables.

Un autre concept sur lequel je voudrais mettre l’accent est la croissance verte. La croissance verte est le nouveau modèle de développement révolutionnaire qui soutient la croissance économique tout en assurant la durabilité climatique et environnementale. La croissance verte souligne le progrès économique durable de l’environnement pour favoriser une économie à faible émission de carbone, et le développement socialement inclusif.

La croissance inclusive est un autre aspect important de l’économie mondiale sur laquelle nous devrions réfléchir. Les niveaux de croissance, même les niveaux record, ne sont pas parvenus à s’attaquer à la pauvreté, aux inégalités et au chômage. Il est certain que toute croissance n’est pas inclusive. Atteindre des taux de croissance élevés devrait réduire la pauvreté et accroître le bien-être humain. Par conséquent, les gouvernements devraient prendre des mesures pour augmenter les revenus des ménages moyens et inférieurs.

Une croissance inclusive qui produit des emplois de qualité suffisante est devenue un point focal pour l’OCDE, laquelle devrait examiner les causes de la faible productivité, de la croissance du travail informel et du nombre d’emplois non standard, de la diminution de la part du travail et de la montée des inégalités. De même, les stratégies pour faire face à ces tendances et à leurs effets sur la répartition du bien-être devraient être développées et améliorées. Nous devrions tous nous rappeler qu’un partage équitable des bénéfices de la croissance ne sera possible que par la réalisation d’une croissance inclusive.

LA PRÉSIDENTE – Cette intervention conclut la liste des orateurs au nom des groupes politiques.

(Poursuivant en anglais) Monsieur le rapporteur, souhaitez-vous répondre maintenant ou après les questions des orateurs inscrits?

M. ELZINGA (Pays-Bas), rapporteur* – Je répondrai à la fin.

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur le Secrétaire général, souhaitez-vous répondre aux questions des représentants des groupes politiques dès maintenant ou souhaitez-vous attendre que tous les orateurs soient intervenus?

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L’OCDE* – Je ferai brièvement quelques commentaires, d’abord en réaction aux propos de M. Villumsen. Il est vrai que la question du commerce doit revenir sur le devant de la scène. Les échanges commerciaux devraient connaître une croissance double de celle de l’économie et prendre la tête de la croissance. Il n’y a actuellement pas de locomotive: le commerce est à la traîne d’une croissance médiocre.

Vous avez parlé de l’importance de la négociation collective: comme vous le savez, le thème principal de nos Perspectives de l’emploi 2016 sera précisément la négociation collective. Il faut analyser objectivement si l’affaiblissement de la négociation collective ou sa reprise dynamique dans certains pays ont eu une incidence sur le poids des travailleurs dans l’économie, sur le poids des revenus du travail dans le PIB et dans l’économie de façon plus générale.

La gestion des grandes entreprises est revue à la lumière d’une gestion sociale responsable. Nos lignes directrices en matière de gestion des entreprises ont été remises à jour en commun avec le G20: c’est une excellente chose car nous couvrons ainsi 85 % de l’économie mondiale. Il s’agit d’analyser comment les grandes multinationales choisissent de mener leurs affaires.

J’entends bien également ce que vous dites de ces leçons dont nous devons tenir compte: oui, il faut travailler encore à la consolidation du secteur bancaire. Le débat qui oppose l’austérité à la croissance pose un faux dilemme: il faut d’abord une consolidation budgétaire, qui est nécessaire lorsque la dette menace la stabilité du pays, mais il faut ensuite tout miser sur la croissance.

Monsieur Jensen, vous avez évoqué l’économie verte, l’inégalité des taxes, le dialogue social, la qualité des emplois. À cet égard, un changement des priorités est intervenu: ces sujets sont inscrits à notre ordre du jour.

Hier, l’ambassadeur de Norvège auprès de l’OCDE a déclaré que ces objectifs de développement durable correspondaient au programme de travail de l’OCDE. Disant cela, il avait raison: nous allons pouvoir travailler aux côtés des pays qui essaieront de mettre en œuvre de tels objectifs. Qu’il s’agisse d’un objectif en matière économique, sociale, de bonne gouvernance ou de protection de l’environnement, chacun est fortement lié à l’action de l’OCDE. C’est ainsi que nous proposerons une forme de GPS, qui nous indiquera où nous en sommes, vers quoi nous nous dirigeons et comment atteindre le plus rapidement possible ce que nous nous sommes fixé, à savoir 17 objectifs, composés de 169 sous-objectifs et de 400 indicateurs.

Monsieur Manninger, vous avez évoqué la mauvaise évaluation des risques dont nous sommes coupables. Vous avez raison, mais mettre l’accent sur la productivité et sur l’éducation est fondamental. Revenir en arrière n’est pas possible. Aussi convient-il de promouvoir l’éducation et la prise en charge de la petite enfance. Nous évaluerons ensuite les jeunes à quinze ans à l’aune de l’indicateur du programme Pisa, puis les jeunes adultes. Nous voulons également évaluer la formation professionnelle car si tout le monde ne peut étudier à l’université, tout le monde doit avoir une chance d’améliorer ses compétences. Tout doit donc être fait pour mobiliser les compétences. C’est pourquoi il convient aussi de déterminer si les compétences correspondent au marché.

Monsieur Pasquier, vous souhaitez que les règles du jeu soient les mêmes pour tous. Tel est notre objectif. Monaco est un excellent exemple de ce qui peut être entrepris. La principauté a fait preuve de la plus grande coopération au moment de rejoindre le projet BEPS ou le programme d’échange automatique d’information.

S’il y a eu des lacunes au Delaware ou dans certaines îles de la Manche, il n’en reste pas moins que ces dernières, par exemple, ont été efficaces dans leur démarche. Après avoir consenti à certains efforts, elles sont aujourd’hui automnes sur le plan de leur politique fiscale et ont honoré les engagements pris auprès de l’OCDE. En revanche, Panama est un moins bon élève et reste toujours en marge de l’action menée. C’est sans doute le pays où se déroulent les plus grandes transactions financières au monde qui n’ait pas rejoint notre groupe. S’il ne le fait pas, les règles du jeu ne seront pas les mêmes pour tous.

Vous terminez en nous demandant une trame à suivre en matière de migrations, sans quoi les forces d’extrême droite et d’exclusion prendront le dessus. Nous essayons de tisser la trame, nous continuerons à œuvrer en ce sens, car il s’agit de promouvoir partout l’intégration. Nous savons comment y parvenir: par l’enseignement des langues non pas en cinq ans mais en six mois, en immersion totale. D’autant que les flux issus de Syrie sont constitués de personnes bénéficiant d’un niveau d’éducation plus élevé que cela n’était le cas par le passé. Il faut en profiter. Ils doivent accéder dès leur arrivée à des cours de langues.

Nous avons besoin de la force de travail que constituent ces flux migratoires, car nos sociétés sont vieillissantes. Ils viendront pallier la baisse de la courbe démographique.

(Poursuivant en français) Mme Erkal Kara a parlé de la croissance verte, une expression qui est apparue vers 2010-2011. Nous ne sommes plus en effet dans des considérations d’ordre général en la matière, mais déjà dans la comparaison d’un pays avec l’autre s’agissant de la croissance verte au plan national.

Mme Erkal Kara est surtout revenue sur la question centrale de la productivité. C’est presque une malédiction présente quasiment partout: au Royaume-Uni, au Mexique, y compris aux Etats-Unis. La tendance est historique: la chute de la croissance de la productivité est en cours depuis quinze ans dans tous les pays. Or, sans croissance de la productivité, nous ne pouvons pas avoir l’ambition d’une croissance plus impulsive et d’une amélioration des conditions des travailleurs les plus vulnérables.

Mme Korenjak Kramar, Vice-Présidente de l’Assemblée, remplace Mme Brasseur au fauteuil présidentiel.

LA PRÉSIDENTE* – Nous reprenons la liste des orateurs.

Mme VĖSAITĖ (Lituanie)* – Une économie en bonne santé est indispensable à la démocratie et d’aucuns sont justement préoccupés par la lenteur de la reprise après la plus grave crise économique que l’on ait connue depuis la naissance de l’OCDE.

Je suis entièrement d’accord avec notre rapporteur quand il relève que l’aggravation des inégalités est une tendance qui risque de s’amplifier avec le temps. Elle aura des conséquences non seulement sur les revenus mais aussi sur la santé, l’éducation et le bien-être en général. C’est un problème pour la société. Les inégalités ne sont pas seulement une question morale, leur progression est un frein à la croissance économique, à la consommation.

En tant que parlementaires, que pouvons-nous faire pour réduire la fracture? Quelles sont les recommandations de l’OCDE en ce domaine?

Il y a cinq ans, j’ai été rapporteur des activités de l’OCDE. Monsieur le Secrétaire général, vous avez introduit un indice de mesure du bonheur dans les pays. Une initiative a également été lancée pour que des femmes accèdent à des postes de direction importants. Quel a été l’impact de telles initiatives sur les stratégies de l’OCDE? Quels sont les progrès enregistrés en ce domaine?

Hier, nous avons longuement débattu de la crise des migrations. Avoir une attitude ouverte à l’intégration des réfugiés pourrait aider à combattre certains des problèmes structurels relevés par l’OCDE: populations vieillissantes, manque de main-d’œuvre, défis temporaires. De ces difficultés, nous pouvons faire des opportunités.

Un nombre élevé de migrants ont bénéficié d’une éducation, sont motivés et souhaitent se construire un nouvel avenir dans leur pays d’accueil. C’est ainsi plusieurs des défis qui se posent à nous qui pourraient être convertis en avantages.

M. FOURNIER (France) – Je tiens d’abord à saluer la présence parmi nous du Secrétaire général de l’OCDE, M. Gurría, et je le félicite pour le renouvellement de son mandat. Je soutiens également le projet de résolution ambitieux que nous soumet notre collègue M. Elzinga.

Ce texte souligne les apports de l’initiative de l’OCDE sur les Nouvelles approches face aux défis économiques, et insiste à juste titre sur trois tendances lourdes qui vont influencer le développement économique au cours des années à venir: les pressions sur l’environnement – à cet égard, il est vital que la COP 21 qui se tiendra à Paris en décembre prochain soit une réussite –, l’accroissement des inégalités et le ralentissement de la productivité.

Pour ma part, je souhaiterais insister sur ces deux derniers aspects et mettre en évidence leurs conséquences funestes.

Comme le rappelle le rapport, les inégalités de revenus et celles de la répartition des richesses ont atteint des niveaux inégalés depuis 50 ans. Cette situation est particulièrement inquiétante et suscite un vif débat jusqu’aux Etats-Unis où le succès du livre de l’économiste français Thomas Piketty, Le Capital au XXIe siècle, a mis en évidence la panne de l’ascenseur social.

Ce niveau d’inégalités pourrait même être à l’origine de la crise actuelle et freinerait la reprise dans les pays industrialisés, sans même parler de ses effets délétères sur l’adhésion aux idéaux démocratiques. Le retour à une croissance dynamique et durable conditionnera celui de la consommation des classes moyennes, qui constitue l’un des moteurs de l’activité.

On entend trop souvent dire que ce creusement des inégalités serait une conséquence inévitable de la mondialisation. Je ne le crois pas. Selon le prix Nobel d’économie américain Joseph Stiglitz, il est possible de conjuguer croissance et équité, dès lors qu’il s’agit d’un objectif politique que les Etats ont décidé de se fixer. Il a ainsi mis en évidence les expériences intéressantes dans certains pays tels que l’île Maurice ou Singapour, qui affichent des indices de développement humain parmi les plus élevés. Ces résultats sont fondés sur une action résolue en faveur de la réduction des inégalités, en particulier dans les domaines fiscal et scolaire. À cet égard, le coût exorbitant qu’atteint l’enseignement supérieur dans certains pays devient une machine à fabriquer de la pauvreté.

Mais il est aussi indispensable de favoriser les investissements publics et privés de manière à alimenter l’innovation et les gains de productivité qui sont aujourd’hui atones. C’est mon second point.

Nos économies développées sont menacées de s’enfoncer dans une «stagnation séculaire», selon l’expression de Lawrence Summers, l’ancien secrétaire du Trésor américain, qui pourrait prendre la forme d’une longue période de croissance faible mettant nos systèmes sociaux en péril. Nos pays industrialisés sont-ils condamnés à une absence durable de croissance? Il est vrai qu’il existe des causes structurelles inquiétantes telle que le vieillissement démographique, l’excès d’épargne dans les pays émergents, l’explosion des dettes publiques, la hausse des inégalités ou encore l’épuisement du progrès technique. Les inventions de la révolution numérique améliorent certes le bien-être des utilisateurs, mais n’engendrent guère de gains de productivité.

C’est pourquoi, comme le propose notre rapporteur, il est impératif de faire de la mobilisation de l’investissement une priorité politique.

M. ŠIRCELJ (Slovénie)* – M. Elzinga, dans son rapport, et le Secrétaire général, ont tous les deux évoqué les évolutions récentes de l’économie mondiale et les croissances des PIB. Les projections sont quelque peu optimistes pour 2016: elles se sont beaucoup améliorées pour la zone euro, le Japon devrait mieux s’en sortir l’année prochaine, mais les Etats-Unis et les pays BRIC, eux, seront moins performants que ce qui avait été prévu.

C’est une croissance globale de 3,1% qui est prévue pour cette année. La Banque mondiale est plus prudente, puisqu’elle parle de 2,8%. Ces projections montrent que l’économie globale s’améliore, mais des risques de ralentissement existent toujours et les défis politiques persistent – instabilité dans certaines régions, telles que la Russie ou l’Ukraine et crise des réfugiés.

L’investissement reste faible et les flux d’investissement directs restent à 40 % en dessous de leur niveau d’avant la crise. Le ralentissement économique a mené au chômage. Dans certains pays d’Amérique latine, en Afrique ou en Asie, l’emploi dans l’économie informelle, hors agriculture, représente entre 30 et 80 %.

Les nouvelles approches face au défi économique ont montré qu’il était nécessaire de tenir un nouveau discours en matière de croissance et d’envisager une croissance plus durable axée sur le bien-être des personnes. Cela signifie qu’il faut travailler sur le chômage des jeunes et créer des marchés de l’emploi plus inclusifs. Il faut également mettre en commun les actions tendant à promouvoir cette croissance inclusive.

Par ailleurs, les investissements dans les PME sont un élément essentiel pour parvenir à de nouvelles sources de croissance. Il convient de travailler davantage sur le lien qui existe entre les inégalités et la croissance, ainsi que sur les effets que cela a sur la concurrence. Ces efforts doivent être menés en matière de cohésion sociale et de lutte contre le chômage des jeunes.

Mme ANTTILA (Finlande)* – J’aimerais remercier M. Elzinga pour son excellent rapport et M. Gurría pour sa présentation. Monsieur le Secrétaire général, votre message a été particulièrement clair.

Le rapport reconnaît les controverses qui entourent les nouveaux types de traités d’investissement et d’échanges commerciaux, ainsi que les bénéfices engrangés suite à l’ouverture des marchés internationaux. Je partage l’objectif du rapport qui consiste à en appeler à l’OCDE pour étudier attentivement les nouveaux enjeux.

Le rôle de l’OCDE est de proposer des recommandations politiques, mais également d’aider les pays à se doter de nouveaux équipements, de nouveaux outils. Elle recommande, par exemple, de procéder à plus de réformes structurelles en Finlande pour stimuler notamment le secteur des exportations. Notre nouveau Premier ministre et son gouvernement font de leur mieux pour résoudre nos problèmes financiers et notre taux de chômage qui reste élevé.

En tant que responsables politiques, nous savons que nous devons réduire nos coûts de production de 15 %, surtout dans le secteur de l’exportation, afin d’être plus compétitifs. Nous avons perdu 8 milliards d’euros par an sur nos revenus à l’exportation, que nous voulons récupérer.

Le rapport de l’OCDE souligne les mesures qui doivent être prises pour favoriser une croissance verte. Mais il faut des efforts bien plus importants pour que les priorités écologiques soient incorporées aux agendas politiques, pour promouvoir le développement durable et le bien-être dans le monde.

Nous partageons les objectifs de la COP 21, et à Paris nous devrons adopter des conclusions communes. Mais nous ne pouvons pas faire abstraction des réalités du marché. La promotion du développement durable et du bien-être doit être intégrée simultanément dans la législation de tous les pays. Faute de quoi, certains pays auront des coûts de production moins élevés que les autres et ne partageront pas les mêmes responsabilités en termes d’environnement.

M. GÁNDARA CAMOU (Mexique, observateur)* – Je voudrais d’abord féliciter M. Elzinga, pour son rapport extrêmement complet sur les activités de l’OCDE pour la période 2014-2015, ainsi que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe dont le travail a permis ce débat aujourd’hui. Je remercie ensuite mon concitoyen, M. Gurría, de sa présence et le félicite pour le renouvellement de son mandat et sa brillante intervention.

Nous vous remercions de nous permettre de participer à ce débat sur la situation économique mondiale et de pouvoir expliquer de quelle manière le Mexique répond aux défis auxquels il est confronté.

Le rapport met à juste titre l’accent sur la nécessité de proposer des emplois décents, de promouvoir une croissance inclusive, d’améliorer la redistribution des richesses et des revenus, cela afin d’accroître le bien-être de nos populations. Il faut en outre renforcer le développement durable: l’eau, les sols sont des ressources surexploitées à cause de notre activité économique et, si nous ne faisons rien, nous devons nous préparer à une catastrophe. Dans ce contexte, les informations fournies par l’OCDE sont d’une très grande utilité dans la définition des politiques publiques.

Au Mexique, nous avons lancé des réformes structurelles visant à améliorer la productivité. Nous avons, au cours des dernières années, entamé des transformations destinées à favoriser le libre-échange, ce qui devrait nous permettre de bénéficier de retombées économiques, à nous mais également à d’autres régions du monde comme l’Europe. Nous avons aussi lancé des réformes structurelles très importantes dans le domaine énergétique, dans le secteur des télécommunications, en matière de fiscalité mais aussi d’éducation. Le Congrès mexicain a pleinement joué son rôle dans l’impulsion de ces réformes, même si beaucoup reste à faire dans de nombreux domaines.

L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe représente pour nous un lieu de débat très important, notamment en ce qu’il permet des relations régulières avec l’OCDE.

La délégation mexicaine salue ce rapport qui doit permettre à nous tous de passer de la théorie à la pratique en adoptant les lois que la situation rend nécessaires, et des mesures communes pour le bien de nos populations. Saluons pour finir l’assistance technique apportée par l’OCDE, institution ô combien importante.

M. KORODI (Roumanie)* – L’Assemblée générale de l’Onu vient d’adopter de nouveaux objectifs en matière de développement durable pour l’après 2015. Si nous parvenons à un bon accord à Paris, à la fin de l’année, nous pourrons dire que celle-ci aura été capitale pour nous tous.

Nous évoquons de plus en plus dans nos discussions la pollution, l’empreinte carbone… C’est dire que la question des bénéfices des entreprises n’est pas la seule qui compte. Il ne s’agit pas de déplacer la production vers des pays où les normes environnementales sont laxistes, ce qui risquerait de mettre les pays de l’Union européenne, en particulier, dans une situation désavantageuse puisqu’ils ont pour leur part adopté des normes écologiques strictes.

Il m’a semblé que les objectifs que je suis en train d’évoquer respectaient un excellent équilibre entre les impératifs économiques, sociaux et écologiques. Nous devons par conséquent y donner suite dans nos pays respectifs, en prenant des décisions dans le cadre d’organisations internationales, afin que nous soyons régis par des normes communes. La croissance économique n’est pas la seule à compter, j’y insiste.

Le rapport revient sur le marché du travail, sur les ambitions que nous devons avoir dans la perspective de la COP 21, sur les accords commerciaux internationaux de libre-échange. J’en retiendrai le passage suivant: «L’Assemblée élargie appelle les Etats membres de l’OCDE à ne pas se précipiter vers des accords de commerce et d’investissement qui ne sont pas susceptibles de générer des bénéfices concrets et substantiels pour nos économies en général et d’étudier en premier lieu les effets des arbitrages opérés entre la croissance, la stabilité, la durabilité, l’inclusion et l’équité. Elle appelle aussi l’OCDE à proposer des ensembles de mesures pour les politiques commerciales et d’investissement qui portent sur ces arbitrages et qui assurent un bien-être maximal dans les pays membres, ainsi que dans les pays qui sont des partenaires commerciaux et d’investissement.»

En Roumanie, les grandes entreprises, notamment minières, entendent utiliser certains de ces accords commerciaux pour échapper aux normes environnementales locales et européennes. Aussi est-il de notre responsabilité d’inclure dans ces accords des stipulations garantissant le développement local durable.

M. MOTA AMARAL (Portugal)* – Je félicite à mon tour M. Elzinga pour son rapport ainsi que le Secrétaire général de l’OCDE pour sa présentation – mais aussi, au passage, pour les quelque 400 millions d’euros de budget de l’institution qu’il dirige.

J’appelle l’attention de l’Assemblée depuis plusieurs années sur les principes qui constituent le modèle politique européen: respect des droits de l’homme, démocratie parlementaire, prééminence du droit, modèle social – plein emploi, emplois décents et sécurité sociale pour les salariés –, contrôle démocratique des forces économiques et financières. Or la crise à laquelle l’Europe est confrontée est la conséquence du relâchement du lien unissant ces principes. Apparemment, en effet, tout le monde semble avoir cédé à l’idéologie néo-libérale, partis du centre droit et du centre gauche compris. Voilà qui met le modèle européen en péril.

La mondialisation permet certes à des millions de personnes de sortir de l’extrême pauvreté dans les pays les moins développés, mais elle doit être réglementée, sans quoi elle continuera de détruire les emplois dans les pays industrialisés, phénomène qui s’en trouvera aggravé par la révolution technologique en cours.

Nous devons globaliser les droits de l’homme. Le commerce équitable entre les nations doit en outre être fondé sur des règles équilibrées garantissant la protection du travail et de l’environnement. Or la réalité continue d’être caractérisée, souvent, par l’exploitation de travailleurs mal rémunérés, le quasi-esclavage d’enfants, la destruction des équilibres écologiques, cela au péril de l’avenir de l’humanité. Il est choquant d’assister à la spéculation, à la concentration des richesses, à l’appauvrissement consécutif des classes moyennes. Ce phénomène, je le répète, met en danger les démocraties dans le monde.

Dans certains pays membres du Conseil de l’Europe on est confronté au comportement scandaleux de multinationales dans le secteur de la finance, de grands groupes industriels aussi, qui violent la loi, payent des milliards d’euros d’amendes pour échapper à des poursuites pénales. Tout cela au profit des actionnaires puisque ces sociétés encaissent d’énormes bonus, parvenant même, parfois, à faire adopter des lois leur permettant d’étouffer leurs méfaits. L’influence de l’argent sur la politique est en effet indéniable et, je le répète, met en péril les institutions démocratiques.

Au nom des principes du Conseil de l’Europe, nous devons donc adopter des réformes pour corriger ce phénomène. Ne fermons pas les yeux; agissons et agissons maintenant.

Mme ISHII (Japon)* – Je vous remercie de l’occasion qui m’est donnée de prendre la parole. Je suis membre du parti libéral-démocrate du Japon et membre de la Chambre des conseillers du Parlement japonais. Je tiens à vous faire part de la situation économique et fiscale du Japon à la lumière de la récente enquête de l’OCDE sur mon pays.

Cette enquête économique, publiée en avril dernier, montre qu’il faut résolument mettre en œuvre les trois axes de la doctrine économique du Premier ministre Abe, promue, donc, par notre gouvernement: politiques financières audacieuses, politiques fiscales souples et stratégie de croissance destinée à stimuler l’investissement dans le secteur privé.

J’aimerais remercier le Secrétaire général de l’OCDE et son organisation pour leur soutien aux politiques économiques et fiscales japonaises.

Les recettes fiscales pour l’exercice 2014 sont en augmentation de 14,9 % grâce à une amélioration de la situation économique du Japon. À l’origine, l’augmentation de la taxe à la consommation était prévue au mois d’octobre mais nous l’avons reportée à avril 2017. Nous veillerons à ce que cette mesure soit associée à des dispositions législatives permettant de renforcer notre système de sécurité sociale, l’un des meilleurs du monde, et de renforcer notre crédibilité auprès des marchés internationaux.

La principale recommandation formulée par l’OCDE à l’égard de notre pays porte sur la nécessité de contenir les dépenses publiques d’ici à 2020. Le Japon a préparé un plan de relance économique et fiscal à l’horizon de 2018. Le gouvernement Abe a également fait de la participation active des femmes à la croissance économique l’une de ses priorités. L’objectif est que 30 % des postes à responsabilité soient pourvus par des femmes d’ici 2020. Le 28 septembre dernier, la loi sur la promotion de la participation active des femmes à la croissance économique a été promulguée. Au titre de cette loi, toutes les entreprises japonaises de plus de 300 salariés devront adopter des plans d’action en ce sens d’ici 2016.

M. STROE (Roumanie)* – À n’en pas douter, les activités de l’OCDE sont indispensables pour le développement économique au XXIe siècle, la consolidation de nos démocraties, le développement durable et la croissance inclusive. Après plusieurs années de crise économique, la reprise, bien que lente, semble s’amorcer. Les investissements privés et publics demeurent toutefois en deçà de leur niveau d’avant la crise. Nous devons tirer les leçons du passé pour jeter les nouvelles bases d’une croissance économique pérenne.

Je voudrais souligner le rôle essentiel de l’investissement productif, qui permet la création d’emplois et favorisera la transition vers une économie sobre en carbone et résiliente. Il est indispensable de débloquer l’investissement. La crise a eu un coût social énorme dans de nombreux pays. La souffrance des populations a érodé leur confiance dans la capacité de leur gouvernement à diriger le pays. Renforcer la confiance et consentir des investissements publics ciblés pour favoriser la création d’emplois verts et dignes, voilà ce que nous devons faire. La recherche est indispensable pour permettre un accroissement de la productivité et la création de nouveaux emplois. L’investissement, notamment dans la recherche et développement, contribue à la productivité totale des facteurs et à la croissance de la productivité.

Une économie qui promeut la recherche est plus productive et croît plus vite. Elle génère plus de redistribution pour les travailleurs et augmente le niveau de vie. Nous devons regagner la confiance de nos citoyens. C’est d’une importance fondamentale.

M. VALEN (Norvège)* – Le rapport qui nous est présenté aujourd’hui est important. Pour ma génération, celle des enfants des années 1990, la croissance est synonyme de prospérité. Nous avons grandi dans l’idée que le PIB par habitant d’un pays était le meilleur outil pour évaluer la richesse de ses citoyens. Nous savons aujourd’hui que ce n’est pas vrai et ce rapport l’affirme de manière on ne peut plus claire.

La part du travail dans les revenus des pays de l’OCDE se réduit à l’heure actuelle, malgré les avancées techniques et les gains de productivité. Les travailleurs retirent aujourd’hui une part plus faible qu’autrefois des richesses qu’ils contribuent à créer. Ils sont nombreux à être pris au piège d’un emploi à faible revenu et d’un statut précaire. Il est difficile pour eux d’obtenir des crédits, de trouver un logement ou de fonder une famille. Et surtout, la majeure partie des nouvelles richesses créées par les pays de l’OCDE bénéficient au 10 % d’individus qui ont déjà les revenus les plus élevés.

Tant les systèmes européens de protection sociale que le rêve américain ont été rendus possibles et légitimes grâce à un système fiscal qui permettait de redistribuer les richesses. L’idée que des baisses d’impôt sans fin vont stimuler l’économie n’a plus de sens. De telles mesures accroissent les inégalités et menacent la stabilité sociale en Europe, particulièrement en temps de crise. Nos concitoyens ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts, même s’ils se tuent au travail, et même dans un contexte de croissance.

Il est possible d’accroître l’égalité en Europe et nous connaissons déjà les solutions. Ce sont la syndicalisation des travailleurs, un système fiscal progressif sur les revenus comme sur le patrimoine, de bons services publics, une protection sociale de qualité et la lutte contre l’évasion fiscale.

M. SABELLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Le rapport de M. Elzinga est à la fois passionnant et opportun. Le discours du Secrétaire général de l’OCDE a souligné l’importance de s’attaquer aux inégalités et de renforcer le dialogue social pour favoriser une croissance inclusive et des emplois de qualité. Comment le partenariat entre le Conseil de l’Europe et l’OCDE peut-il contribuer à cette lutte contre les inégalités en Europe, mais aussi dans les pays du sud de la Méditerranée? C’est la question essentielle.

Le dialogue social souhaité en Europe peut-il prendre en compte les conflits des pays du sud de la Méditerranée? En Afrique du Nord et au Moyen-Orient, 100 millions de nouveaux emplois seront nécessaires au cours des dix prochaines années. Des millions de jeunes n’ont pour le moment aucune perspective d’avenir. Ils sont poussés vers l’extrémisme. On peut craindre que le fait de ne pas régler les problèmes en Syrie et dans les territoires occupés par Israël favorise la montée de ce phénomène. Comment, dans ce contexte, le Conseil de l’Europe et l’OCDE peuvent-ils intervenir pour contribuer à une solution?

Mme Brasseur, Présidente de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

Mme ZIMMERMANN (France) – Monsieur le rapporteur, Monsieur le Secrétaire général, alors que mon pays, la France, s’apprête à accueillir la Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de 2015, j’aimerais revenir sur la notion de croissance verte développée dans plusieurs documents de l’OCDE.

L’engagement à limiter les émissions de COet la question du financement écologique me paraissent particulièrement importants. La mise en place d’une fiscalité adaptée est devenue plus que nécessaire. Mais les nouvelles taxes fondées sur le principe pollueur-payeur n’ont de sens que si l’ensemble des pays d’une même région les appliquent. Dans le cas contraire, nous nous trouvons confrontés à des distorsions et à un « déplacement » de la pollution au gré de la fiscalité applicable.

Un exemple particulièrement significatif est fourni par l’écotaxe, plus précisément l’écotaxe poids lourds. Un tel principe permet de faire face aux nuisances générées, mais il a bien d’autres avantages.

D’une part, son incidence financière favorise les solutions alternatives, comme le ferroutage, qui devient de fait plus compétitif. D’autre part, cette taxe peut être utilisée pour financer d’autres infrastructures de transport, un point non négligeable en période d’économies budgétaires! Par exemple, pour la France, le rendement brut estimé serait supérieur à 1 milliard d’euros, dont 160 millions pour les collectivités territoriales.

Enfin, cette écotaxe est juste car elle cible non le contribuable, déjà très sollicité, mais les usagers des infrastructures routières; rappelons qu’un poids lourd dégrade autant les routes que 1 000 voitures particulières.

Cependant, en l’absence de coordination ou d’harmonisation fiscale entre pays voisins, on assiste à un report du trafic qui pénalise les pays n’ayant pas d’écotaxe. C’est notamment le cas des régions frontalières de l’Allemagne.

La situation de la France est particulière: le Parlement a voté à la quasi-unanimité la mise en place d’une écotaxe poids lourds en 2014, mais l’application de ce dispositif a été suspendue. Je le regrette, et je pense que le principe de subsidiarité doit jouer en faveur des régions et des collectivités prêtes à s’engager dans une croissance verte effective. En effet, la mise en place de l’écotaxe permettrait, au-delà des avantages que j’ai cités, de rétablir en Europe un équilibre à la fois écologique et économique concernant les transports de marchandises. Elle encouragerait en outre une consommation plus locale, donc plus propice au développement durable.

L’Europe devra jouer un rôle moteur lors de la COP 21 de décembre. Or l’écotaxe régionale ou nationale correspond parfaitement à la volonté de l’OCDE d’aligner les politiques en vue d’une économie bas carbone. Sa mise en place uniforme serait un signe fort pour un véritable changement, pour la réussite de la COP 21, pour un meilleur avenir des générations futures.

M. ABAD (France) – L’OCDE est un organisme très important pour l’activité économique et la bonne compréhension de la situation économique mondiale. Le rapport qui nous est soumis comporte des éléments positifs et intéressants, mais il pèche par certains biais.

En ce qui concerne tout d’abord la croissance verte et inclusive, je ne vois pas pourquoi la croissance économique ne pourrait pas être verte, et nous sommes tous d’accord sur la nécessité d’un développement durable fondé sur les trois piliers économique, sociétal et environnemental. Toutefois, il est question dans le rapport d’une corrélation négative entre la croissance du PIB et la qualité de l’environnement. Je pense au contraire que l’augmentation du PIB peut aller de pair avec le bien-être et la qualité environnementale.

De même, le rapport condamne les marchés financiers, notamment le volume «improductif» des activités financières, qui serait néfaste pour notre croissance. Il me semble que, au-delà du volume, le problème est surtout la déconnexion entre l’économie financière et l’économie réelle.

Ensuite, le rapport critique le recours excessif au crédit, pourtant important pour l’économie: c’est souvent faute d’accès au crédit que les petites et moyennes entreprises ne peuvent se développer. Comme l’a dit le Secrétaire général, le ciment de la croissance, ce sont le crédit, les investissements et les échanges. Il aurait donc fallu insister davantage sur l’économie de l’offre et sur les facteurs de l’offre qui améliorent la croissance économique mondiale, notamment la flexisécurité et la flexibilité de l’emploi.

Un mot sur les inégalités. Il est exact qu’elles s’aggravent dans le monde et que la mauvaise répartition des richesses est un problème central. Mais comme toujours, pour mieux répartir le gâteau, il faudrait aussi qu’il y en ait plus!

Des économistes comme Amartya Sen ont montré la nécessité de tenir compte de la capacité et de la liberté de chacun, et développé de nouveaux indicateurs; les nouvelles approches de l’OCDE vont dans le même sens, ce qui est une bonne chose. La liberté, en effet, est essentielle en économie comme en politique.

La COP 21 devra contribuer à relever tous ces défis. En effet, la lutte contre le réchauffement climatique, essentielle, ne doit pas être opposée à la croissance économique, à l’investissement, aux échanges commerciaux; c’est au contraire en développant les synergies entre ces différents facteurs que nous renouerons avec la croissance mondiale.

M. REIMANN (Suisse)* – Pour ma part, je ne me joindrai pas cette fois-ci au concert de louanges adressé à l’OCDE. J’espère que cela ne froissera pas trop M. le Secrétaire général. Mais tout haut représentant d’une institution internationale doit être capable de s’exposer à la critique; il devrait le faire d’autant plus volontiers que, sans cela, son travail serait assez ennuyeux!

Bien entendu, je reconnais moi aussi tout ce que l’OCDE fait de bien pour l’économie mondiale. Mais il n’est pas de lumière sans ombre et la part d’ombre de l’OCDE, c’est son manque de légitimité démocratique. Ainsi, le consensus ou le principe d’unanimité applicable aux décisions et même aux recommandations est régulièrement ignoré. En outre, des listes grises et noires sont régulièrement dressées afin de faire pression sur certains pays. Je suis également déçu de la manière dont cette énorme machine qu’est l’OCDE se saisit de plus en plus de thèmes qui relèvent de la compétence nationale, par exemple en demandant l’augmentation du salaire minimal – une demande que les Suisses ont clairement rejetée par les urnes il y a peu.

L’OCDE devrait avant tout s’engager pour le plein emploi et contre le chômage, surtout le chômage des jeunes, qui est endémique. Le rapport de M. Elzinga n’en dit malheureusement pas un mot alors que le taux de chômage des jeunes est très élevé dans de nombreux pays européens.

En outre, le peuple suisse est contrarié par deux recommandations de l’OCDE que nous considérons comme des ingérences déplacées dans nos affaires intérieures. Je suis ravi de pouvoir vous le dire de vive voix, Monsieur le Secrétaire général.

Il s’agit d’abord de la manière dont l’OCDE nous encourage à augmenter la TVA. Cette décision relève du peuple. Jusqu’à présent, nous nous en sommes bien sortis avec notre système fiscal; nous n’avons pas besoin des conseils d’une organisation internationale.

Il nous semble également déplacé que l’OCDE nous demande de veiller à ce que les femmes mariées et les mères soient plus présentes dans la vie active et qu’en compensation soient développées des structures de crèche. Cela va trop loin pour ce pays dans lequel la liberté individuelle de ses citoyens est un bien suprême, un pays où, depuis des siècles, la démocratie directe a fait ses preuves.

Monsieur le Secrétaire général de l’OCDE, puis-je vous demander de ramener ses quelques observations avec vous à Paris?

M. YATIM (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Madame la Présidente, je tiens tout d’abord à saluer M. Elzinga pour la qualité de son rapport, et M. le Secrétaire général de l’OCDE pour sa participation. Je salue également l’intérêt que porte notre Assemblée aux activités de l’OCDE, qui nous permet de débattre sur la portée des enseignements de ses activités.

J’ai tenu à prendre part à ce débat pour deux raisons. D’une part, les relations de coopération ne cessent de se développer entre notre pays, le Maroc, et l’OCDE. D’autre part, j’y suis incité par ma sensibilité sociale en tant que dirigeant de l’un des grands syndicats marocains.

En ce qui concerne le volet de la coopération, il convient de signaler que le Maroc est l’une des trois économies partenaires de l’OCDE, aux côtés du Kazakhstan et du Pérou, à bénéficier d’un programme de coopération. Cette coopération vise à appuyer l’élaboration et la mise en œuvre réussie des réformes nécessaires au développement socio-économique du Maroc, et de rapprocher le pays des bonnes pratiques et standards de l’OCDE.

Un accord appelé «Programme pays» permettra l’examen des politiques publiques. Ce programme inclut 17 examens de politiques publiques, l’adhésion aux instruments juridiques de l’OCDE et la participation renforcée à 9 comités de l’organisation. Il est construit sur trois piliers pour le Maroc: le renforcement de la croissance économique, l’amélioration des mécanismes de gouvernance et l’inclusion sociale.

Eu égard à ma sensibilité sociale et de syndicaliste, je trouve dans les rapports de l’OCDE et dans les recommandations de notre rapporteur plusieurs appels à la nécessité de s’intéresser à la montée des inégalités et à la valeur du dialogue social pour parvenir à une croissance inclusive, à des emplois de qualité et à la croissance verte, pour accroître la part de revenu du travail dans le produit brut intérieur, autrement dit pour enrayer la croissance des inégalités et promouvoir une répartition plus équitable des revenus, des richesses et du bien-être.

Madame la Présidente, je conclurai en indiquant que le Maroc, partenaire du Conseil de l’Europe, mais aussi de l’OCDE, qui lutte pour redresser son économie et ses équilibres macro-économiques dans une conjoncture de crise mondiale, qui lutte également pour atténuer les écarts entre les régions et les catégories et qui aspire à devenir une économie émergente, ne peut qu’être très attentif aux conclusions et recommandations qui émergent de notre débat relatif au rapport d’activité de l’OCDE.

LA PRÉSIDENTE* – La liste des orateurs est épuisée.

Nous en arrivons à la réplique de la commission. Monsieur le rapporteur, il vous reste 4 minutes.

M. ELZINGA (Pays-Bas), rapporteur* – Je devrai malheureusement renoncer à répondre à tous les orateurs, faute de temps. Permettez-moi toutefois de vous remercier, toutes et tous, pour votre soutien chaleureux, et tout particulièrement M. Gándara Camou de la délégation mexicaine et Mme Ishii de la délégation japonaise. Je tiens aussi à remercier la délégation japonaise pour avoir pris part aux discussions lors de la réunion de notre commission qui s’est tenue à Paris. Cela a été fort utile.

J’adresse aussi mes remerciements aux orateurs des groupes, MM. Jensen et Manninger pour leur soutien au rapport. Monsieur Villumsen, je partage pleinement votre avis: s’agissant du développement économique, en tant que membres de cette Assemblée, nous devons toujours faire en sorte que les droits de l’homme et la démocratie soient au cœur de nos préoccupations. Nous devons constamment défendre ces valeurs de notre Organisation.

Monsieur Pasquier, vous vous êtes exprimé au nom du groupe ALDE, mais sans doute aussi au nom des petits pays. En évoquant l’érosion de la base d’imposition, c’est probablement ce que vous sous-entendiez. Je comprends très bien votre message en faveur de la recherche de la prospérité pour tous.

Madame Erkal Kara, je vous sais gré d’avoir souligné l’importance de la durabilité pour les générations futures, de la croissance verte et de la croissance inclusive, mais aussi de la productivité inclusive.

Monsieur Reimann, si vous avez remis en question la légitimité démocratique de l’OCDE, c’est surtout parce que vous cherchez à défendre les paradis fiscaux. N’oubliez pas, s’il vous plaît, que l’OCDE est une organisation intergouvernementale dont tous nos gouvernements sont membres. Nous sommes ici des parlementaires de tous les pays membres de l’OCDE et c’est à ce titre que nous débattons des politiques de l’OCDE.

Vous avez aussi regretté que je ne traite pas plus du chômage. Je vous rappelle que l’un des grands thèmes de mon rapport est précisément le chômage et le niveau de vie. Je crois en avoir traité de façon approfondie.

Monsieur Korodi, je vous remercie d’avoir évoqué la situation de l’exploitation minière en Roumanie pour illustrer les coûts des accords d’investissements internationaux. Votre intervention a bien illustré certains passages de mon rapport.

Monsieur Mota Amaral, merci d’avoir mentionné le besoin de réglementer la mondialisation économique, mais aussi de tendre vers le respect des droits de l’homme sur le plan mondial.

Monsieur Sabella, je vous remercie d’avoir souligné le besoin de créer davantage d’occasions de croissance inclusive dans une région marquée par des tensions et la montée de l’extrémisme. Merci de cet important message.

Monsieur Abad, vous avez remis en question la corrélation négative entre croissance économique et coûts pour nos écosystèmes et notre biodiversité. Je suis d’accord avec vous pour dire que la situation ne doit pas perdurer. Je cherchais simplement à préciser ce qui s’était produit par le passé.

Monsieur le Secrétaire général, félicitations à l’occasion de ce 10e anniversaire et félicitations pour votre réélection! Nous pourrons encore débattre avec vous pendant les cinq prochaines années, au moins!

Merci aussi de vos paroles chaleureuses et de votre discours. Vous avez mis l’accent sur la question des migrations. J’ai rédigé mon rapport avant l’été mais, évidemment, ce thème a été examiné par la commission des questions politiques. C’est la raison pour laquelle j’ai rédigé un paragraphe qui traite de la migration.

LA PRÉSIDENTE *– Je me tourne vers le Secrétaire général de l’OCDE pour lui demander de répondre aux multiples questions. Malheureusement, comme à l’accoutumée, nous allons manquer de temps.

M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE l’OCDE* – Mais nous saurons opérer des choix, Madame la Présidente!

Madame Vésaité, l’indice de la qualité de vie est le résultat d’un travail très important et d’une analyse qui va au-delà du simple PIB: comment réunir les conditions d’une vie agréable?

Par ailleurs, il nous importe aussi de combler le déficit de participation au marché du travail. Nous voulons réduire cette lacune de 25 % d’ici à 2025. C’est une idée que nous avons soumise au G20.

Notre sherpa a été chargée de ce message. Elle a travaillé en étroite coopération avec une autre sherpa, venue d’Australie et, de fil en aiguille, cette idée a fait son chemin. Elle est arrivée jusqu’à un haut représentant japonais qui l’a mise officiellement sur la table du G 20. Tout le monde a salué cette idée comme étant tout à fait remarquable et nous avons désormais cet objectif de 25 % d’ici à 2025. Il faut absolument mettre en avant ce qui peut être fait lorsque des femmes intelligentes s’associent à des hommes qui ont le sens de l’engagement.

Monsieur Fournier, vous avez dit qu’il faut mettre l’accent sur les inégalités, en rapport avec la productivité. Mais est-ce que moralement, politiquement et sur le plan économique, cela tient la route? Ce qui est tout à fait certain, c’est que ce que nous avons fait, nous pouvons le défaire: du fait de l’activité humaine, nous avons provoqué des inégalités et nous devons y remédier. Toutefois, ce n’est pas là chose simple. Pourquoi n’avons-nous pas un accroissement de la productivité si elle constitue vraiment la panacée à nos problèmes? Il faut bien comprendre qu’il y a d’autres facettes. La diffusion de la technologie dans l’économie, par exemple, se fait aujourd’hui de façon beaucoup plus lente qu’auparavant, et il convient de se demander pourquoi.

Vous nous avez dit également que certains choix devaient être faits s’agissant de l’économie souterraine et de l’économie réelle. Certains poursuivent avant tout leur propre intérêt, mais il est vrai qu’il faut inventer des politiques incitatives permettant à chacun d’accéder au marché du travail au lieu de rester dans l’économie souterraine.

En ce qui concerne le programme de développement, Monsieur Šircelj, je vous renvoie une fois encore aux objectifs de développement durable. Avant même que l’on ait commencé à y réfléchir, la Slovénie travaillait d’ailleurs sur un programme de développement respectueux de ces objectifs. Voilà un exemple de ce qui peut être fait en coopération avec les pays membres.

Madame Anttila, il faut changer de modèle, dites-vous. Pour la Finlande, c’est sans doute vrai, car l’industrie de la pâte à papier et les autres industries traditionnelles qui alimentaient l’économie finlandaise subissent d’importants changements. C’est un défi considérable, mais, encore une fois, l’objectif d’un développement durable doit occuper une place centrale dans votre réflexion. L’égalité d’accès aux échanges commerciaux doit progresser. Actuellement, les accords sur ce point sont bloqués: nous n’arrivons pas à conclure un accord au niveau mondial. Nous avançons seulement par à-coups, mais ce n’est pas pour autant que nous devons interrompre nos efforts.

Monsieur Gándara Camou, en matière de réformes, l’OCDE considère que c’est le Mexique qui a œuvré le plus. Vous avez consenti d’importants efforts pour engager un train de réformes qui doivent maintenant se concrétiser. Le Mexique connaît la croissance alors que tous les autres pays de la région souffrent économiquement. Il récolte donc les fruits de ses efforts, mais attention: la mise en œuvre concrète des réformes doit devenir votre leitmotiv. Vous devez maintenant travailler à améliorer la qualité de vos services juridiques pour veiller à l’application de la législation. La qualité doit maintenir devenir votre préoccupation principale.

La question de la redistribution des fruits de la croissance est bien sûr fondamentale, mais on ne saurait minimiser l’importance des réformes. Il faut d’ailleurs aborder ce sujet avec un certain état d’esprit: il ne faut pas craindre les réformes. En outre, celles-ci doivent être conçues, non pas comme quelque chose qui a un début et une fin, mais comme un processus qui doit se dérouler en continu. Les gouvernants doivent toujours conserver cette idée à l’esprit.

Oui, Monsieur Korodi, nous sommes à la croisée des chemins. Il ne faut pas penser que ce qui relève de l’économique et ce qui relève du social sont nécessairement antagoniques. La croissance et la cupidité peuvent-elles aller de pair? Pas forcément, mais l’égalité et la croissance le peuvent quant à elles: on peut avoir à la fois plus de créations d’emplois et plus de productivité. Les analyses orthodoxes voyaient souvent une contradiction entre ces deux éléments, mais l’approche en est désormais différente, et nous considérons que nous pouvons les combiner, pour notre plus grand bénéfice. Il est vrai que certaines économies dépendent beaucoup de l’exploitation minière, mais elles peuvent se tourner vers nous pour recevoir de l’aide.

Monsieur Mota Amaral, les 40 milliards d’euros supplémentaires qui sont arrivés dans nos coffres depuis que nous avons mis sur pied les systèmes informatiques d’échanges d’informations représentent cent fois notre budget. Voilà comment on sait faire des affaires à l’OCDE – il faut investir dans l’OCDE, la preuve en est faite!

Vous avez évoqué également la technologie. Celle-ci menace 40 % de nos actifs si nous ne leur permettons pas de monter en compétences et d’en acquérir de nouvelles. Attention: il ne faut pas laisser de côté des franges de la population active; elles doivent maîtriser les nouvelles technologies, sinon leurs revenus vont diminuer et toutes ces personnes vont disparaître de nos radars. Les compétences, encore et toujours: c’est la réponse à ce terrible problème auquel nous sommes confrontés. Il faut que les actifs acquièrent de nouvelles compétences.

L’image des trois flèches a été utilisée par le Premier ministre japonais pour repenser l’économie. Nous devons nous concentrer sur la troisième de ces flèches, à savoir l’acquisition des compétences. Les banques centrales peuvent faire beaucoup, même si nous ne pouvons pas exiger d’elles qu’elles fassent tout, car il revient aux gouvernements de prendre des décisions, encouragés par vous, parlementaires, qui êtes là pour poser vos exigences. Les banques centrales n’ont tout de même à leur disposition qu’un éventail d’instruments assez limité.

La dette du Japon dépasse les 200 % du PIB. Voilà qui obère sa capacité de reprise. Le Japon présente également un grand déficit pour ce qui est de la participation des femmes au marché du travail. Il y a là un potentiel que le Japon doit exploiter s’il veut continuer à connaître la croissance. Même si le Japon a la société la plus vieille de l’OCDE, il aura la chance d’inverser la tendance et d’assurer sa pérennité économique sur une très longue période s’il fait entrer les femmes sur le marché du travail.

Monsieur Stroe, la confiance est quelque chose de très important. La crise nous a laissé en héritage une faible croissance, un chômage très élevé, des inégalités croissantes, mais aussi, effectivement, la destruction de la confiance dans toutes les institutions que nous avions créées au fil des derniers siècles, ce dont on ne peut guère s’étonner.

Il faut créer plus de croissance, plus d’emplois et augmenter la productivité, mais nous devons aussi comprendre qu’en faisant tout cela, nous suscitons aussi des phénomènes multiples de corruption. Il y a des choses dans lesquelles nous avions une confiance aveugle: les voitures allemandes, par exemple. Voyez où nous en sommes… Toutes les valeurs s’effondrent les unes après les autres. La question de la confiance est donc fondamentale.

Il est vrai, Monsieur Valen, que la pauvreté ne touche pas seulement les chômeurs. Il y a aussi des travailleurs pauvres, du fait de rémunérations précaires et de conditions de travail qui ne sont pas ce qu’elles devraient être.

Monsieur Sabella, les jeunes se tournent vers l’intégrisme parce qu’ils n’ont aucune perspective. Ils ne connaissent rien d’autre et on ne leur propose aucun autre choix. Cela vaut au Royaume-Uni, mais aussi en France. Tout récemment, j’étais en Tunisie, d’où partent le plus grand nombre de futurs djihadistes. Pourquoi? Parce que la Tunisie a pensé que chacun devait avoir accès à l’éducation supérieure et décrocher un diplôme, mais sans permettre à ses diplômés d’obtenir un emploi. Vous avez donc des jeunes gens très bien formés qui sont aussi extrêmement frustrés parce qu’ils n’ont aucune perspective d’avenir. Nous travaillons étroitement avec la Tunisie pour voir ce que nous pouvons faire pour l’aider.

Madame Zimmermann, vous avez évoqué la COP 21, le financement du changement climatique et le principe pollueur-payeur qui est, je vous le rappelle, un concept auquel l’OCDE a donné naissance, ce dont nous sommes très fiers.

Je souhaite dire une chose très simple: nous savons que le carbone est notre très grand ennemi. Il faut donc un impôt très lourd sur le carbone mais, pour la quatrième fois, nos efforts ont été voués à l’échec: nous n’arrivons pas à fixer les prix qui feront mal au CO2. La Chine a lancé sept projets pilotes pour réduire les émissions de carbone et pour procéder à un échange d’émissions de carbone, mais cela ne fonctionne pas. Que l’on impose le carbone et que cela pèse lourd, que cela fasse mal!

Pourquoi n’arrivons-nous pas à adopter ce type de mesures? Les hommes et les femmes politiques n’aimeraient pas le mot «impôt»: pour ma part, je ne trouve pas cet argument bien convaincant! Ce serait un bon impôt: il en va de notre responsabilité à l’égard des générations futures. Nous devons faire ce qui est juste.

L’abandon du charbon est inévitable. Pourtant, c’est la source d’énergie la moins lourdement imposée, alors qu’elle est celle qui pollue le plus: encore un terrible paradoxe! Nous imposons plus lourdement les carburants qui polluent le moins: quelle contradiction! Voilà typiquement ce sur quoi il faut travailler, et nous pouvons le faire assez aisément. Nous nous demandons encore s’il convient de financer l’ouverture de nouvelles exploitations minières, mais ce n’est pas la bonne question.

Monsieur Abad, la protection de l’environnement est tout à fait compatible avec la croissance. Oui, nous devons financer l’économie réelle et nous devons travailler sur l’offre. Mais, en matière de politique monétaire, nous n’avons guère le choix, et nous avons tout essayé en matière de politique budgétaire. La réponse se trouve encore et toujours dans le changement structurel.

Monsieur Reimann, avec tout le respect que je vous dois, il est de notre devoir de dire aux pays ce que nous pensons qu’ils devraient améliorer pour le plus grand bénéfice de leur propre population. C’est pour cela que nous existons, c’est notre raison d’être: on exige de nous cette démarche. Il ne s’agit pas seulement d’impôt, mais d’encourager les femmes à entrer sur le marché du travail plutôt qu’à rester chez elles. Il s’agit là d’un élément indispensable de toute politique nationale couronnée de succès. Il faut affranchir les femmes de ces tâches domestiques que sont l’éducation des enfants ou la prise en charge des plus âgés. Pour cela, il faut créer des structures d’accueil pour la petite enfance et pour les personnes âgées: c’est ainsi et seulement ainsi que nos sociétés vieillissantes continueront à connaître la croissance.

Nous ne disons pas aux pays ce qu’ils doivent faire, mais nous partageons avec nos pays membres les bonnes pratiques qui ont fait leurs preuves ailleurs et nous continuerons à le faire. Ce n’est pas une ingérence de notre part: c’est notre devoir.

Enfin, dernier point très important: au Maroc, nous travaillons très étroitement avec les autorités nationales. Nous sommes très fiers du programme que nous avons mené avec le Maroc sur le front économique, social et de la bonne gouvernance. Nous saluons ici les efforts du Maroc qui, en dépit d’un voisinage et de circonstances ô combien difficiles, a gardé le cap des changements structurels.

LA PRÉSIDENTE* – Je remercie M. Gurría, que nous avons écouté avec beaucoup d’attention.

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel un amendement a été déposé.

J’ai cru comprendre que le vice-président de la commission des questions politiques et de la démocratie souhaite proposer à l’Assemblée de considérer l’amendement 1, qui a été adopté à l’unanimité par la commission, comme adopté par l’Assemblée. C’est bien cela, Monsieur le vice-président?

M. GARÐARSSON (Islande), vice-président de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, cet amendement est déclaré adopté définitivement.

Nous allons maintenant procéder au vote à main levée sur le projet de résolution, sur lequel la majorité simple est requise. Vous trouverez ce projet dans le Doc. 13865, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Chers collègues, si vous en êtes d’accord, nous allons devoir prolonger la séance jusqu’à 13 h 15.

4. Discours de M. Zvizdić, Président du Conseil des ministres
de Bosnie-Herzégovine

LA PRÉSIDENTE*– L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Zvizdić, Président du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine.

Monsieur le Président du Conseil des ministres, permettez-moi de vous accueillir chaleureusement au sein de notre Assemblée. Soyez le bienvenu. Votre visite aujourd’hui est un événement important et symbolique pour votre pays, la Bosnie-Herzégovine, et pour le Conseil de l’Europe.

En notre nom à tous, bienvenue! Dobrodošli !Votre visite est signifiante et symbolique, d’abord, parce que la Bosnie-Herzégovine préside actuellement le Comité des Ministres de notre Organisation. Les défis auxquels nous sommes actuellement confrontés, notamment l’arrivée massive de réfugiés et de demandeurs d’asile, parallèlement à la montée des extrémistes de la haine et de l’intolérance, sont des défis d’envergure mondiale. Les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe doivent y répondre en se montrant unis, résolus et forts.

Le pays qui préside le Comité des Ministres a donc un rôle crucial à jouer: il doit fixer le cap des activités menées par notre Organisation. Il y a deux jours, j’ai félicité M. Igor Crnadak, ministre des Affaires étrangères de Bosnie-Herzégovine de la façon qu’il avait conduit les activités de la présidence. D’ores et déjà, je me réjouis de la poursuite de notre excellente coopération.

Votre visite est signifiante et symbolique, ensuite, parce que, cette année, la Bosnie-Herzégovine célèbre le vingtième anniversaire des Accords de Dayton. Les accords de paix de Dayton ont mis un terme à la guerre et ont engagé votre pays sur la voie de la paix, de la réconciliation et de l’intégration européenne. Depuis 1995, la Bosnie-Herzégovine a réalisé des progrès importants de consolidation de ses institutions, progrès qui furent reconnus en 2002, date à laquelle la Bosnie-Herzégovine a adhéré au Conseil de l’Europe. Néanmoins, vous le savez comme nous, bien des réformes restent à engager, que l’on retrouve d’ailleurs dans l’agenda de réformes approuvé cette année à tous les échelons de votre gouvernement. Nous savons tous ce qui doit être fait. Le temps est venu de travailler main dans la main afin de parvenir à des résultats concrets.

Plusieurs des réformes nécessaires sont en grande partie liées à la mise en œuvre des engagements et obligations relatifs à l’adhésion et à l’intégration au sein de l’Union européenne. Monsieur le Président, je puis vous assurer de notre soutien, surtout lorsqu’il en va des valeurs les plus fondamentales de notre Organisation. Je pense à la mise en œuvre de l’arrêt Sejdic–Finci de la Cour européenne des droits de l’homme. J’ai trouvé très encourageante la conversation que j’ai eue avec votre ministre des Affaires étrangères qui a souligné que toutes les parties prenantes en Bosnie-Herzégovine étaient conscientes de la nécessité d’exécuter cet arrêt. Je vous demande que cette question reste au centre de l’attention du Conseil des ministres, car c’est là une étape fondamentale.

Signifiante et symbolique enfin, parce que votre visite à Strasbourg est une excellente opportunité de promouvoir la Bosnie-Herzégovine à l’échelle européenne et internationale. Votre pays a une histoire et une culture très riches et les activités sociales de la présidence de la Bosnie-Herzégovine du Comité des Ministres nous permettent de les découvrir. À cet égard, avec votre participation, nous allons inaugurer une exposition consacrée au projet Ars Aevi, qui représente un ensemble unique d’œuvres d’art de plus de 200 artistes éminents de par le monde. Je vous encourage donc tous à participer à cet événement avec nous.

Monsieur le Président, c’est un grand plaisir que de vous donner la parole.

M. ZVIZDIĆ, Président du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine* – Chère Madame la Présidente, Monsieur le Secrétaire Général, honorables parlementaires, chers invités, au nom du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine et en mon nom personnel, je suis très honoré de m’adresser à votre Assemblée en qualité de Président du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine, un Etat qui pour la première fois de son histoire préside le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe.

L’occasion nous est ainsi donnée d’affirmer politiquement les valeurs de notre société, fondées sur le respect de la dignité humaine et la protection des droits de l’homme, mais aussi de promouvoir notre potentiel économique, culturel et touristique.

Autre élément essentiel de notre présidence, nous avons l’intention de nous présenter auprès de la communauté des pays européens comme un partenaire crédible et un facteur constructif dans les relations européennes et internationales. Je suis persuadé que l’expérience acquise par la Bosnie-Herzégovine au cours des dernières 25 années en relevant les défis politiques, économiques et sociaux représente un atout pour résoudre des problèmes auxquels le monde contemporain est actuellement confronté.

La présidence du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe fournit l’occasion de souligner le grand pas en avant réalisé par l’Europe du Sud-Est au cours des deux dernières décennies. Elle a réalisé des efforts continus pour atteindre les normes et les valeurs européennes, efforts couronnés par l’adhésion de la Slovénie et de la Croatie à l’Union européenne. Il convient également de relever les efforts permanents des autres pays de l’Europe du Sud-Est pour devenir partie intégrante de la grande et prospère famille des Etats européens.

Vous n’êtes pas sans savoir que le chemin de la Bosnie-Herzégovine vers l’intégration européenne au cours de différentes périodes a été parsemé d’embûches, voire d’arrêts. Or l’orientation européenne de la Bosnie-Herzégovine n’a été jamais remise en question. La majorité des citoyens de Bosnie-Herzégovine est convaincue que nous appartenons de facto à l’Europe et que l’Europe est la seule possibilité envisageable. Je le souligne pour montrer notre détermination et notre volonté de remplir l’ensemble des obligations qui nous attendent sur le chemin exigeant de l’intégration à l’Union européenne. C’est pourquoi nous avons assumé la présidence du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, persuadés que ce serait un stimulus supplémentaire à l’aboutissement plus rapide de notre processus d’intégration.

Conscient du large éventail de vos compétences, des sujets importants inscrits à l’ordre du jour des travaux de votre Assemblée, des nombreux instruments dont vous disposez pour la mise en œuvre de conventions fondamentales, je puis dire que la présidence du Comité des Ministres et le soutien dont bénéficie la Bosnie-Herzégovine comblent nos attentes. Nous participons désormais aux instances européennes et internationales les plus importantes mais, à la différence du passé, en tant qu’acteurs et partenaires crédibles, voire en tant que moteur de la coopération régionale et internationale.

Face aux problèmes auxquels nous sommes confrontés, je vous informe de la présence d’une volonté politique positive en Bosnie-Herzégovine depuis les dernières élections législatives.

C’est la raison pour laquelle je vous présenterai nos actions qui marque notre volonté politique d’atteindre un consensus dans notre pays, ainsi que les réformes que nous avons adoptées en urgence afin de favoriser notre adhésion à l’Union européenne et de renforcer notre cadre économique et judiciaire.

J’évoquerai d’abord l’initiative allemande et britannique prise juste après les élections législatives de Bosnie-Herzégovine en octobre 2014 et qui a permis le lancement de nombreuses réformes politiques, économiques et sociales ayant pour objet la mise en conformité de nos normes de gestion et de développement durable avec celles des pays membres de l’Union européenne.

Au début de l’année 2015, la présidence collégiale de la Bosnie-Herzégovine, l’Assemblée parlementaire de Bosnie-Herzégovine et les dirigeants de tous les partis politiques ont adopté et signé la déclaration sur l’orientation européenne et sur les réformes nécessaires à l’avancement de la Bosnie-Herzégovine dans le processus d’adhésion à l’Union européenne.

En juin 2015, sept ans après la signature, l’accord de stabilisation et d’association est entré en vigueur. Cet accord a établi un partenariat étroit entre l’Union européenne et la Bosnie-Herzégovine. Au mois de juillet, l’agenda 2015-2018 des réformes économiques nécessaires à la Bosnie-Herzégovine a été adopté. Ces réformes concernent notamment: les finances publiques, le climat des affaires, le marché du travail, la sécurité sociale, l’Etat de droit, la gouvernance de droit et l’administration publique.

De stratégies et des plans d’action ont été adoptés pour lutter contre la corruption, le terrorisme et le crime organisé, la violence faite aux femmes et aux enfants, ainsi que pour réformer la justice. De nombreuses lois ont été adoptées relatives notamment au travail en Bosnie-Herzégovine, afin de tenir compte des lignes directrices européennes.

La mise en place de ces réformes a déjà commencé à donner des résultats. De sorte que tous les paramètres économiques sont en légère hausse par rapport à 2014: sur le marché du travail, le nombre de salariés est en progression de 1,8%; la production industrielle a augmenté de 2%; les revenus bruts des impôts indirects ont augmenté de 4,2%; les exportations sont en hausse de 4,4%; la couverture des importations par les exportations est en hausse de 2,58%; le déficit commercial a été réduit de 5,54%; le nombre de touristes a augmenté de 25,7% et le nombre de nuitées de 27,2%.

Les exportations de viandes connaissent une hausse importante; une croissance est également attendue dans les exportations de lait et de produits laitiers en Union européenne dès que nous aurons rempli les conditions exigées. La qualité de nos produits est maintenant reconnue; ils deviennent ainsi compétitifs au niveau régional, voire européen.

Malgré ces évolutions positives, des problèmes demeurent, liés à notre structure politique et à nos procédures complexes, quand nous devons atteindre un consensus sur des questions fondamentales à la réalisation de nos priorités. Ces priorités sont les suivantes: poursuivre notre chemin vers l’adhésion à l’Union européenne; le développement économique; l’Etat de droit. Pour atteindre ces objectifs, j’en appelle à votre soutien.

Nous avons encore de nombreuses obligations à remplir dans un temps très court, mais les réformes ont été lancées et nous avons la volonté de surmonter les obstacles que nous rencontrerons. L’intégration européenne, la croissance et l’emploi, la gouvernance de droit, la lutte contre la corruption et contre toutes les formes d’extrémisme sont les lignes directrices du Conseil des ministres et de toutes les institutions de la Bosnie-Herzégovine.

Chers parlementaires, en tant que représentant d’un Etat qui a vécu, dans son histoire récente, exil, meurtres et destructions, je souhaite partager avec vous mes réflexions sur les événements qui se déroulent actuellement en Europe, afin d’enrichir votre débat sur la question des migrants – qui fuient le barbarisme et tentent de trouver asile dans des pays plus sûrs – en y apportant un point de vue différent.

Il y a quatre ans, nous avons été les témoins d’insurrections populaires importantes qui ont bouleversé le monde arabe. Le «printemps arabe» s’est inspiré des mouvements de 1989 dans les pays de l’ancien Pacte de Varsovie. On y a deviné les signes précurseurs de la liberté, de la démocratie, de la solidarité et du respect des droits de l’homme. Mais aujourd’hui, à la place de la paix et de la prospérité, nous sommes les témoins de conflits dévastateurs en Syrie et en Libye. L’instabilité de la région et les violences qui y sont commises font le terreau de l’extrémisme et du terrorisme. Les civils sont tués, des villes et des monuments culturels sont détruits; le désespoir règne dans une société sans avenir.

Nous ne pouvons donc pas être surpris par les dernières vagues de réfugiés. Nous ne devons pas être choqués par leur volonté de fuir la violence et la terreur qui se déroulent dans leur pays, ni par le fait qu’ils souhaitent séjourner, temporairement ou de façon permanente, dans l’Union européenne, porteuse des valeurs de respect de la dignité humaine, de la liberté, de la démocratie, de l’égalité, de la prééminence du droit et du respect des droits de l’homme. Des valeurs communes à tous les pays européens.

On a toutefois l’impression que l’arrivée de réfugiés a provoqué un chaos sans précédent dans l’histoire de l’Union européenne. En effet, l’érection de hautes barrières métalliques, la fermeture de lignes de chemin de fer, d’autoroutes a été la réponse inattendue de certains pays membres de l’Union européenne qui pourtant, pendant des siècles, ont promu dans le monde entier les principes humanistes.

Ceux qui, parmi vous, ont consacré leur vie à défendre ces principes ont-ils vraiment cru que l’arrivée de plusieurs centaines de personnes pourrait mettre en danger le mode de vie européen? Nous sommes tous conscients que c’est impossible et qu’il ne s’est agi là que d’une peur irrationnelle, injustifiée. Reste que cette peur, mère de l’égoïsme, peut mettre en péril notre unité et notre stabilité. Un problème ne saurait être résolu sans qu’on imagine une solution à sa mesure. C’est pourquoi nous devons agir à temps et ensemble.

Je suis fier, en attendant, de la réaction du Conseil de l’Europe, fondée sur les principes européens. J’ai beaucoup apprécié la lettre que le Secrétaire Général a envoyée aux chefs des Etats membres de notre Organisation, leur rappelant leurs obligations vis-à-vis de la Convention européenne des droits de l’homme. Les autorités nationales doivent en effet veiller à la façon appropriée dont leurs forces de police traitent les réfugiés, afin d’assurer le strict respect desdites obligations. La lettre du Secrétaire Général définit par ailleurs la solidarité, principe européen fondamental ici mis à l’épreuve, comme la clef de la crise.

Je rappellerai également que le président de la Commission européenne, M. Junker, dans son discours annuel sur l’état de l’Union européenne, a proposé un plan pour une solution rapide, ferme et universelle, prévoyant l’instauration de quotas pour chaque pays membre. J’estime que le Conseil de l’Europe devrait sérieusement envisager l’extension de ce plan aux 47 Etats membres. Ce serait un geste indispensable de solidarité. Dans cette hypothèse, la Bosnie-Herzégovine serait prête à assumer sa part de responsabilité quand bien même ses capacités sont limitées – car je crois à l’importance symbolique d’un tel message, lancé par un pays qui aspire à devenir membre de l’Union européenne.

J’ignore évidemment quand s’achèvera cette crise, mais il est clair que la froideur de l’hiver n’arrangera rien. L’improvisation pour loger les réfugiés ne suffira plus. C’est pourquoi je lance un appel à tous les pays membres pour qu’ils fassent preuve de bonne volonté et prêtent leur concours aux Etats particulièrement touchés par cette crise: il s’agit d’éviter une catastrophe humanitaire.

Mon Etat n’est pas encore concerné par l’afflux de réfugiés. Nous n’en demeurons pas moins attentifs à l’évolution de la situation et avons prévu un plan devant nous permettre de faire face à une arrivée massive de migrants. Ce plan prévoit, d’une part, une action humanitaire visant à loger, nourrir, soigner, vêtir les arrivants… et, d’autre part, des mesures de sécurité consistant à recueillir des données sur les réfugiés afin d’identifier parmi eux d’éventuels terroristes.

Nous sommes vraiment prêts à apporter notre aide; c’est pour nous une obligation morale. Seulement, si l’Union européenne ferme ses frontières et si les réfugiés se retrouvent par conséquent bloqués dans les Balkans de l’Ouest, nos capacités logistiques seront débordées. Or la Bosnie-Herzégovine, qu’il me soit permis de le rappeler, doit déjà faire face à la situation de milliers de personnes déplacées sur son territoire à la suite de la guerre des années 1990.

En revanche, si les frontières avec l’Union européenne restent ouvertes, la Bosnie-Herzégovine et les autres pays de la région n’auront pas de difficultés à assurer le transit régulier des réfugiés.

Je ne m’attends pas à recevoir un nombre important de demandes d’asile dans mon pays car, de toute évidence, les Balkans ne sont considérés par les migrants que comme un point de passage et non comme une destination.

La question des réfugiés peut être à mon sens résolue rapidement et avec succès pour peu que nous organisions nos efforts et fassions preuve de la solidarité nécessaire. Reste qu’il nous faut trouver une solution durable et pour cela nous attaquer à la racine du problème: la situation des pays d’origine des migrants. Je suis conscient que l’action du Conseil de l’Europe est limitée mais nous avons à notre disposition de nombreuses conventions, organismes d’experts et mécanismes de suivi à même de nous permettre une importante contribution à la paix et à la stabilité de notre voisinage.

J’en profite pour remercier la Banque de développement du Conseil de l’Europe (CEB) qui a débloqué des fonds en urgence pour aider les pays membres touchés par la crise des réfugiés. Au cas où la Bosnie-Herzégovine deviendrait un point de passage pour les réfugiés, il est tout à fait probable que nous demandions à bénéficier de ce fonds.

J’appelle maintenant votre attention sur un problème des plus sérieux auquel fait face, notamment, la Bosnie-Herzégovine: la traite des êtres humains. Nous avons réalisé d’importants progrès en vue de le résoudre mais la crise des réfugiés risque bien de le faire ressurgir. Les abus commis contre les réfugiés de la part des trafiquants d’êtres humains est l’un des pires crimes et il ne saurait rester impuni. Nous devons par conséquent redoubler d’efforts pour enrayer ce phénomène. Cette question sera, me semble-t-il, prochainement abordée par le Comité des Ministres, par l’Assemblée parlementaire et par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. À la lumière de l’évolution de la situation, il est fort probable qu’il soit nécessaire d’amender les textes en vigueur. J’espère que les experts concernés agiront à temps afin d’éviter que le problème ne s’aggrave.

La Bosnie-Herzégovine, en tant que pays particulièrement concerné, continuera de veiller à la manière dont la question sera traitée au sein du Conseil de l’Europe. J’espère que les autres Etats, notamment ceux qui partagent nos préoccupations agiront de même.

Le terrorisme est une autre préoccupation qui pèse sur nos sociétés. La Bosnie-Herzégovine soutient le plan d’action du Conseil de l’Europe de lutte contre l’extrémisme violent et contre la radicalisation conduisant au terrorisme, ainsi que le protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme concernant les combattants étrangers. Le Président du Comité des Ministres et ministre des Affaires étrangères de Bosnie-Herzégovine vous a déjà informés que nous sommes parvenus à un consensus: ledit protocole sera signé à Riga, en Lettonie, le 22 octobre prochain; aussi, j’invite tous les Etats membres à s’y rendre pour le signer eux aussi.

Parallèlement à l’utilisation d’instruments de nature juridique, le Conseil de l’Europe doit intensifier ses actions contre la haine, l’intolérance et les phénomènes de radicalisation. Notre message doit être qu’une société basée sur l’égalité des droits, l’acceptation de la diversité et le respect des droits de l’homme, peut être une société prospère. L’Alliance parlementaire contre la haine et les débats récents sur les discriminations en Europe, le terrorisme et la crise des réfugiés, démontrent la volonté de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe d’agir sur ces questions essentielles. On ne peut que l’en féliciter.

Pour conclure, je voudrais saluer le rôle du partenariat pour la démocratie dans les pays du voisinage du Conseil de l’Europe. Il constitue un élément clé pour la consolidation des jeunes démocraties et pour le renforcement de la coordination des activités sur des questions d’intérêt commun.

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur le Président, je vous remercie pour votre discours, qui a vivement intéressé les membres de notre Assemblée.

Plusieurs de nos collègues ont exprimé le souhait de poser une question. Nous commençons par les porte-parole des groupes politiques.

Mme DURRIEU (France), porte-parole du Groupe socialiste – Vingt ans de paix depuis les Accords de Dayton: c’est essentiel et vous l’avez rappelé, Monsieur le Président du Conseil des ministres. La stabilité des Balkans est indispensable pour la paix en Europe, mais le processus politique semble malheureusement bloqué à l’heure actuelle à Sarajevo.

Est-il nécessaire, selon vous, de modifier la Constitution? La tutelle du Haut Représentant de la communauté internationale n’est-elle pas un obstacle à l’émergence d’une conscience nationale et à l’engagement politique du peuple?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE BOSNIE-HERZÉGOVINE* – Le processus engagé en Bosnie-Herzégovine commence à porter ses fruits. Nous poursuivons trois objectifs prioritaires, l’intégration européenne, le développement économique et la primauté du droit, tout en nous efforçant de répondre à nos obligations dans le cadre du processus de paix. Dès lors que la Bosnie-Herzégovine aura démontré sa capacité à assumer les responsabilités aujourd’hui confiées au Haut Représentant, nos institutions pourront jouer pleinement leur rôle au plan législatif comme au plan exécutif.

M. VAREIKIS (Lituanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – De nombreux problèmes liés à l’éducation et au patrimoine culturel existent actuellement en Bosnie-Herzégovine, or vous ne possédez pas, au niveau national, de ministères de l’éducation et de la culture. Nous pensons quant à nous qu’ils sont indispensables dans le cadre des changements que connaît aujourd’hui votre pays. Quelle est votre position sur cette question?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE BOSNIE-HERZÉGOVINE* – La création de tels ministères en Bosnie-Herzégovine ne pourrait être le fruit que de procédures très longues et complexes. Une entité est aujourd’hui chargée d’assurer une coordination sur ces questions au sein de la Fédération de la Bosnie-Herzégovine. En Republika Srpska, c’est le gouvernement qui est compétent pour l’éducation et la culture. Je ne pense pas que dans un avenir immédiat nous adoptions un système identique à celui des autres pays de l’Union européenne. Notre intention est avant tout d’aider nos jeunes à acquérir des compétences qui correspondent aux exigences du marché du travail.

Nous devons également respecter le processus de Bologne et assurer la protection des droits de l’homme des minorités ethniques et culturelles. Tout citoyen de notre pays doit jouir des droits fondamentaux, ce qui supposera à terme la création de ministères de l’éducation et de la culture. Un amendement de notre Constitution sera nécessaire. Il prendra du temps, car un consensus est indispensable sur ces questions. Le temps viendra pour nous, j’en suis sûr, de mener des réformes importantes dans ces domaines essentiels. D’ici là, nous continuerons de travailler à l’amélioration du système existant, dans le secteur de la culture et du sport notamment.

Mme PALLARÉS CORTÉS (Andorre), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Malheureusement, les responsables politiques de la Bosnie-Herzégovine s’intéressent peu à la manière de redynamiser l’économie du pays. Quels sont vos projets pour réduire la dépense publique et relancer le secteur privé et l’emploi des jeunes?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE BOSNIE-HERZÉGOVINE* – Permettez-moi de le répéter: il y a quelques mois, nous avons adopté un texte très important, l’agenda pour la réforme économique, dans lequel nous avons défini un ensemble de mesures et d’activités destinées à améliorer l’environnement pour les entreprises, en nous appuyant sur nos ressources naturelles, le développement des petites et moyennes entreprises et la réforme du secteur public, et en mettant l’accent sur la création d’emplois pour les jeunes, afin que ces derniers restent en Bosnie-Herzégovine.

Nous cherchons à rationaliser la dépense publique. À cette fin, nous avons mis en œuvre l’interdiction du recrutement dans le secteur public et nous y avons gelé les salaires; nous avons également gelé d’autres fonds, puisque nous voulons surtout promouvoir des prêts à taux avantageux afin de permettre aux jeunes de créer leurs propres entreprises, ce qui contribuera à améliorer l’environnement pour les entreprises, ainsi que le taux d’emploi.

Pour un environnement plus favorable aux entreprises, il faut amender le droit du travail. Ce projet est lancé: notre nouvelle loi sur le travail a été adoptée dans l’une des entités, en Fédération de Bosnie-Herzégovine, et doit bientôt l’être en Republica Srpska.

Les paramètres qui permettent de mesurer la qualité de cet environnement se sont améliorés; selon certains indicateurs, la création d’entreprises et le potentiel économique du pays sont en augmentation. Cela concerne surtout les jeunes. Or le fait que ces derniers créent des entreprises contribue à réduire le nombre de personnes qui quittent la Bosnie-Herzégovine.

M. BINLEY (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le Président, vous avez évoqué les stratégies employées par votre pays pour éradiquer la corruption. Pourriez-vous nous indiquer les mesures concrètes qui y contribuent, s’agissant notamment des possibilités d’emploi dans le secteur public? Que faites-vous pour mettre un terme à l’utilisation des pots-de-vin pour accéder à ces emplois, une pratique qui fait tant de mal à la jeune génération, en particulier?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE BOSNIE-HERZÉGOVINE* – En Bosnie-Herzégovine, nous sommes tout à fait conscients des conséquences extrêmement négatives qu’engendre la corruption. Il n’y a pas de différence à cet égard entre mon pays et les autres pays de la région, de l’Union européenne ou du monde. La corruption est un fléau dévastateur pour tout pays.

Voilà pourquoi la Bosnie-Herzégovine concentre ses efforts sur la lutte contre ce phénomène. Nous avons créé une agence de lutte contre la corruption à l’échelle du pays, partagé nos expériences dans ce domaine avec nos collègues européens, instauré des procédures permettant de signaler les cas de corruption et d’assurer un suivi constant au sein des institutions. Nous avons adopté il y a trois mois une stratégie et un plan d’action pour la période 2015-2020.

Cette stratégie se répercutera jusqu’aux échelons inférieurs du gouvernement grâce à la synergie entre les divers niveaux des institutions publiques. Nous espérons ainsi agir ensemble pour prévenir la corruption dans l’ensemble des institutions publiques. Une nouvelle réforme de l’administration publique va y contribuer. Nous voulons aussi développer les capacités des fonctionnaires, qui seront mieux formés pour répondre aux besoins des institutions comme des citoyens, dans le respect des procédures établies, en vue d’éviter tout acte de corruption, notamment lorsque l’administration doit répondre aux requêtes des citoyens dans un délai donné.

Nous sommes touchés par la corruption, comme d’autres pays de la région et du monde. C’est un fait, je ne le nie pas. Mais je peux vous assurer que nous œuvrons activement pour combattre la corruption et mener des poursuites dans tous les cas qui sont attestés. Nous faisons beaucoup pour prévenir la corruption à la source. Nous avons bien l’intention de poursuivre sur cette voie. Notre action a déjà porté ses fruits, mais nous allons redoubler d’efforts et vous verrez que l’administration de Bosnie-Herzégovine gagne en efficacité et en professionnalisme en respectant la loi.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons maintenant entendre la dernière question, car nous n’avons malheureusement pas le temps de laisser s’exprimer tous les orateurs inscrits.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Merci, Monsieur le Président, pour ces bonnes nouvelles de votre magnifique pays. Vous avez maintenant un gouvernement qui fonctionne et le climat politique est constructif.

Lorsque nous sommes venus observer les élections l’an dernier, nous avons toutefois constaté que l’opinion publique n’avait pas confiance dans le fonctionnement des institutions démocratiques, ce qui, à long terme, risquait de mettre en péril la vie démocratique du pays. Comment le gouvernement et la classe politique pourraient-ils retrouver la confiance de l’opinion publique?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL DES MINISTRES DE BOSNIE-HERZÉGOVINE* –Nous pouvons effectivement recouvrer la confiance de l’opinion publique. C’est d’ailleurs l’effort que réalise, sur la voie de l’intégration européenne, le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine à l’heure actuelle, en mettant en place de façon cohérente des réformes en matière d’économie et d’Etat de droit. Ces réformes démontrent une volonté politique très claire d’atteindre, au bout du compte, des consensus internes sur les grandes priorités du développement économique et politique de la Bosnie-Herzégovine.

Au cours des cinq derniers mois, le Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine a approuvé plus de 800 documents à l’unanimité. Cela illustre bien l’existence d’une véritable volonté politique, puisque nous avons été en mesure de tomber d’accord sur des points importants sans mettre à mal notre unité. C’est une approche qui, je pense, permettra de recouvrer la confiance de l’opinion publique quant au bon fonctionnement des institutions de notre pays.

Nous allons mettre en œuvre toutes les réformes que j’ai mentionnées ainsi que toutes les stratégies que nous avons élaborées. Nous ferons preuve de sérieux, de cohérence et de persévérance dans nos travaux et nos activités. Cela viendra renforcer l’économie et améliorer notre compétitivité. J’espère que cela permettra de créer de nouveaux emplois et, à partir de là, je suis certain que les citoyens sauront à nouveau nous faire confiance.

Plusieurs exemples montrent que nous sommes dignes de confiance, à commencer par ce plan d’action économique que nous avons adopté avec les autres niveaux du gouvernement. Nous avons veillé à accroître les exportations de produits agricoles à partir de la Bosnie-Herzégovine, augmentant ainsi nos exportations de 220 %. Au cours des huit derniers mois, ce sont plus de 7 000 emplois que nous avons créés en Bosnie-Herzégovine. Donc, sur le plan économique, les résultats sont là. Ils sont concrets.

Nous avons aussi accéléré le processus d’intégration européenne. Nous remplissons nos obligations et engagements très rapidement et, d’ici à la fin de l’année ou au début de l’année prochaine, nous espérons être officiellement candidats à l’adhésion à l’Union européenne.

La prochaine étape devrait nous conduire à approfondir notre coopération avec l’Otan pour, un jour, devenir membre à part entière de cette organisation.

Tout cela va dans le sens d’un renforcement de la stabilité en Bosnie-Herzégovine, où nous avons consolidé l’Etat de droit et créé un nouveau climat pour les entreprises qui permettra d’attirer les investissements nationaux et surtout internationaux.

LA PRÉSIDENTE* – Je vous remercie, Monsieur le Président, d’avoir répondu aux questions qui vous ont été posées. Je vous souhaite plein succès pour la suite de votre présidence.

Nous allons maintenant pouvoir nous rendre ensemble à l’inauguration de l’exposition organisée par la représentation de Bosnie-Herzégovine, intitulée «Bosnie Herzégovine, nouveau centre européen d’art contemporain». Je vous invite donc tous, chers collègues, à nous suivre pour inaugurer cette exposition.

Nous remercions les interprètes qui nous ont permis de dépasser notre temps de travail habituel. Nous aurons tous une pause-déjeuner écourtée mais, tous ensemble, nous arrivons à travailler.

5. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 15.

SOMMAIRE

1. Vérification des pouvoirs de membres de la délégation estonienne

2. Modifications dans la composition des commissions

3. Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2014-2015

Présentation par M. Elzinga du rapport de la commission des questions politiques et de la démocratie (Doc. 13865)

M. Gurría, Secrétaire général de l’OCDE

Orateurs: MM. Villumsen, Mogens Jensen, Manninger, Pasquier, Mme Erkal Kara

Réponse de M. le Secrétaire général de l’OCDE

Orateurs: Mme Vésaité, MM. Fournier, Šircelj, Mme Anttila, MM. Gándara Camou, Korodi, Mota Amaral, Mme Ishii, MM. Stroe, Valen, Sabella, Mme Zimmermann, MM. Abad, Reimann, Yatim

Réponses de M. le rapporteur et de M. le Secrétaire général de l’OCDE

Vote sur un projet de résolution amendé

4. Discours de M. Zvizdić, président du Conseil des ministres de Bosnie-Herzégovine

Questions: Mme Durrieu, MM. Vareikis, Mme Pallarés Cortés, MM. Binley, Kox

5. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Alexey Ivanovich ALEKSANDROV*

Brigitte ALLAIN

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON*

Luise AMTSBERG

Athanasia ANAGNOSTOPOULOU/Antigoni Lymperaki

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Sirkka-Liisa ANTTILA

Ben-Oni ARDELEAN

Khadija ARIB/Tineke Strik

Volodymyr ARIEV

Anna ASCANI*

Egemen BAĞIŞ*

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE

Gérard BAPT/Geneviève Gosselin-Fleury

Doris BARNETT*

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Jana Fischerová

José María BENEYTO*

Levan BERDZENISHVILI

Deborah BERGAMINI/Giuseppe Galati

Sali BERISHA*

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ

Gülsün BİLGEHAN

Brian BINLEY

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN

Tilde BORK*

Olga BORZOVA*

Mladen BOSIĆ

António BRAGA

Anne BRASSEUR/Claude Adam

Piet De BRUYN/Petra De Sutter

Beata BUBLEWICZ*

Gerold BÜCHEL*

André BUGNON

Natalia BURYKINA*

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO*

Irakli CHIKOVANI

Vannino CHITI/Francesco Verducci

Christopher CHOPE

Lise CHRISTOFFERSEN

Henryk CIOCH*

James CLAPPISON

Igor CORMAN/Valentina Buliga

Telmo CORREIA*

Paolo CORSINI*

Carlos COSTA NEVES*

Celeste COSTANTINO*

Yves CRUCHTEN

Zsolt CSENGER-ZALÁN*

Katalin CSÖBÖR/Mónika Bartos

Joseph DEBONO GRECH

Reha DENEMEÇ

Renata DESKOSKA*

Alain DESTEXHE

Manlio DI STEFANO*

Arcadio DÍAZ TEJERA

Peter van DIJK

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ

Namik DOKLE

Elvira DROBINSKI-WEIß/Gabriela Heinrich

Daphné DUMERY

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON

Josette DURRIEU

Mustafa DZHEMILIEV/Serhii Kiral

Mikuláš DZURINDA/Helena Mezenská

Lady Diana ECCLES*

Tülin ERKAL KARA

Franz Leonhard EßL*

Samvel FARMANYAN*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU

Vyacheslav FETISOV*

Doris FIALA

Daniela FLIPIOVÁ*

Ute FINCKH-KRÄMER

Axel E. FISCHER

Gvozden Srećko FLEGO

Bernard FOURNIER

Hans FRANKEN

Béatrice FRESKO-ROLFO

Martin FRONC

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON*

Iryna GERASHCHENKO*

Tina GHASEMI

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Carlos Alberto GONÇALVES*

Mustafa Sait GÖNEN

Alina Ștefania GORGHIU*

Svetlana GORYACHEVA*

Sylvie GOY-CHAVENT

Fred de GRAAF/ Tuur Elzinga

François GROSDIDIER

Andreas GROSS

Dzhema GROZDANOVA

Mehmet Kasim GÜLPINAR*

Gergely GULYÁS/ Jenő Manninger

Jonas GUNNARSSON

Nazmi GÜR*

Antonio GUTIÉRREZ*

Maria GUZENINA/Susanna Huovinen

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV

Alfred HEER/Maximilian Reimann

Michael HENNRICH/Bernd Fabritius

Martin HENRIKSEN*

Françoise HETTO-GAASCH

Oleksii HONCHARENKO/Vladyslav Golub

Jim HOOD/David Crausby

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER/ Barbara Rosenkranz

Andrej HUNKO

Ali HUSEYNLI*

Rafael HUSEYNOV

Vitaly IGNATENKO*

Ekmeleddin Mehmet İHSANOĞLU

Florin IORDACHE/Daniel Florea

Tadeusz IWIŃSKI

Denis JACQUAT

Gedimnas JAKAVONIS

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Frank J. JENSSEN/Kristin Ørmen Johnsen

Florina-Ruxandra JIPA/Viorel Riceard Badea

Ögmundur JÓNASSON

Aleksandar JOVIČIĆ/Dejan Kovačević

Josip JURATOVIC*

Anne KALMARI

Mustafa KARADAYI/Hamid Hamid

Marietta KARAMANLI/Pascale Crozon

Niklas KARLSSON

Vasiliki KATRIVANOU*

Ioanneta KAVVADIA*

Danail KIRILOV*

Bogdan KLICH/Helena Hatka

Manana KOBAKHIDZE*

Haluk KOÇ/Metin Lütfü Baydar

Igor KOLMAN*

Željko KOMŠIĆ

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Ksenija KORENJAK KRAMAR

Attila KORODI

Alev KORUN*

Rom KOSTŘICA/Gabriela Pecková

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO

Julia KRONLID*

Eerik-Niiles KROSS

Marek KRZĄKAŁA/Killion Munyama

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Serhiy LABAZIUK *

Inese LAIZĀNE

Olof LAVESSON/Boriana Åberg

Pierre-Yves LE BORGN'

Jean-Yves LE DÉAUT

Igor LEBEDEV*

Valentina LESKAJ*

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Georgii LOGVYNSKYI

François LONCLE/Catherine Quéré

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA*

Philippe MAHOUX

Thierry MARIANI/Marie-Christine Dalloz

Soňa MARKOVÁ/Pavel Holík

Milica MARKOVIĆ

Meritxell MATEU PI/Carles Jordana Madero

Ana MATO

Frano MATUŠIĆ

Liliane MAURY PASQUIER/Eric Voruz

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Evangelos MEIMARAKIS/Liana Kanelli

Ivan MELNIKOV*

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY*

Jean-Claude MIGNON/ Damien Abad

Marianne MIKKO*

Olivia MITCHELL

Igor MOROZOV*

João Bosco MOTA AMARAL

Arkadiusz MULARCZYK*

Melita MULIĆ*

Oľga NACHTMANNOVÁ

Hermine NAGHDALYAN*

Piotr NAIMSKI*

Sergey NARYSHKIN*

Marian NEACȘU*

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH

Miroslav NENUTIL

Baroness Emma NICHOLSON*

Michele NICOLETTI

Aleksandar NIKOLOSKI*

Julia OBERMEIER*

Marija OBRADOVIĆ

Žarko OBRADOVIĆ

Judith OEHRI*

Carina OHLSSON

Joseph O'REILLY

Maciej ORZECHOWSKI/Michal Stuligrosz

Sandra OSBORNE/Joe Benton

Tom PACKALÉN

José Ignacio PALACIOS*

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS CORTÉS

Ganira PASHAYEVA*

Florin Costin PÂSLARU

Waldemar PAWLAK/Jan Rzymełka

Jaana PELKONEN

Vladimir PLIGIN*

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT*

Gabino PUCHE

Alexey PUSHKOV*

Lia QUARTAPELLE PROCOPIO*

Carmen QUINTANILLA/Jordi Xuclà

Kerstin RADOMSKI

Mailis REPS*

Andrea RIGONI*

François ROCHEBLOINE

Soraya RODRÍGUEZ

Alexander ROMANOVICH*

Maria de Belém ROSEIRA*

René ROUQUET/Jean-Claude Frécon

Rovshan RZAYEV/Fazil Mustafa

Àlex SÁEZ*

Vincenzo SANTANGELO*

Milena SANTERINI*

Nadiia SAVCHENKO/ Sergiy Vlasenko

Deborah SCHEMBRI/Joseph Sammut

Stefan SCHENNACH

Ingjerd SCHOU

Frank SCHWABE*

Urs SCHWALLER

Salvador SEDÓ

Predrag SEKULIĆ

Ömer SELVİ*

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV*

Jim SHERIDAN*

Bernd SIEBERT/Thomas Feist

Valeri SIMEONOV/Kancho Filipov

Andrej ŠIRCELJ

Arturas SKARDŽIUS/Egidijus Vareikis

Jan ŠKOBERNE

Leonid SLUTSKY*

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK

Lorella STEFANELLI/Gerardo Giovagnoli

Yanaki STOILOV/Valeri Jablianov

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE

Valeriy SUDARENKOV*

Krzysztof SZCZERSKI/Iwona Guzowska

Damien THIÉRY

Lord John E. TOMLINSON

Antoni TRENCHEV*

Goran TUPONJA

Ahmet Kutalmiş TÜRKEŞ*

Tuğrul TÜRKEŞ*

Theodora TZAKRI*

Ilyas UMAKHANOV*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN

Petrit VASILI*

Imre VEJKEY/Rózsa Hoffmann

Stefaan VERCAMER

Birutė VĖSAITĖ

Nikolaj VILLUMSEN

Dimitris VITSAS*

Vladimir VORONIN

Viktor VOVK

Klaas de VRIES

Nataša VUČKOVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ/Snežana Jonica

Piotr WACH

Robert WALTER

Dame Angela WATKINSON*

Tom WATSON/Jeffrey Donaldson

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER*

Morten WOLD/Tore Hagebakken

Bas van 't WOUT*

Gisela WURM

Maciej WYDRZYŃSKI

Leonid YEMETS/Pavlo Unguryan

Tobias ZECH

Kristýna ZELIENKOVÁ

Sergey ZHELEZNYAK*

Marie-Jo ZIMMERMANN

Emanuelis ZINGERIS*

Guennady ZIUGANOV*

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Estonie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Turquie*

Siège vacant, Royaume-Uni*

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Aaja Chemnitz LARSE

Kerstin LUNDGREN

Bernard PASQUIER

Marc SPAUTZ

Partenaires pour la démocratie

Hanane ABOULFATH

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

Nezha EL OUAFI

Qais KHADER

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM

Mohammed Mehdi BENSAID

Membres d’un parlement d’un Etat membre de l’OCDE

non membre du Conseil de l’Europe

George FUREY, Canada

Ernesto GÁNDARA CAMOU, Mexique

Midori ISHII, Japon

Héctor LARIOS CÓRDOVA, Mexique

Javier LOZANO ALARCÓN, Mexique

Ghislain MALTAIS, Canada