FR16CR02

AS (2016) CR 02

SESSION ORDINAIRE DE 2016

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la deuxième séance

Lundi 25 janvier 2016 à 15 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 5 sous la présidence de Mme Mateu, Vice-Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

1. Modifications dans la composition des commissions

LA PRÉSIDENTE – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2016) 01 Addendum 2.

En l’absence d’opposition, elles sont adoptées.

2. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (Doc. 13945 + Addendums I et II, Doc. 13952).

Nous abordons la discussion générale en commençant par les porte-parole des groupes.

M. FISCHER (Allemagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Au nom de mon groupe, je tiens à vous remercier très chaleureusement, Madame Brasseur, pour ces deux années pendant lesquelles vous avez présidé, et de quelle manière, les travaux de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. (Applaudissements) Ces applaudissements sont loin d’être déplacés.

Nous vous remercions sincèrement pour tout ce que vous avez accompli, le terme d’accomplissement étant bien celui qui s’impose en l’occurrence. Vous avez indiqué tout à l’heure avoir effectué 137 visites pendant votre présidence et prononcé d’innombrables discours. Au fond, ce ne sont pas les chiffres qui comptent, mais la qualité de l’engagement. Vous avez permis à l’Assemblée parlementaire d’être plus visible en Europe. C’était pour nous un vrai problème par le passé. Je suis donc particulièrement ravi que vous ayez présidé cette Assemblée pendant deux ans.

Nous avons pris bonne note de votre rapport, qui montre bien qu’il reste encore à faire. Comme vous l’avez vous-même souligné, si beaucoup de choses ont été accomplies, de nombreux problèmes demeurent. Vous avez en tout cas su faire face à des questions difficiles avec beaucoup de finesse et d’intelligence. Il ne sera pas simple de prendre votre relève.

Une Présidente de l’Assemblée peut également en demeurer un membre normal et je suis certain que nous tirerons un grand bénéfice à l’avenir de votre présence au sein de l’hémicycle. Nous ne serons sans doute pas d’accord sur tout, bien entendu, mais en tant que démocrates, nous serons toujours heureux de vous entendre, sachant qu’il nous faut parler les uns avec les autres pour tenter de régler les crises par la parole et la communication. Tel est bien le message que vous nous avez donné et qui sera très utile pour le Conseil de l’Europe. Il faut élargir les horizons et écouter les autres points de vue. Même lorsque l’on n’est pas d’accord, on doit s’efforcer de rechercher ensemble des solutions. C’est très exactement ce que vous avez fait en tant que Présidente, Madame Brasseur, puisque vous avez su dégager des consensus à partir de positions opposées.

Je tiens à vous remercier tout particulièrement pour la dernière réunion à laquelle vous avez participé en Allemagne. Vous avez choisi de vous rendre dans l’école d’une municipalité qui a accueilli un grand nombre de familles de réfugiés. Nous avons souvent évoqué la question des réfugiés à l’Assemblée parlementaire et vous souhaitiez vous rendre dans un endroit où l’accueil des réfugiés était vécu comme une expérience positive. Ce choix était remarquable.

Le Groupe du Parti populaire européen soutiendra le rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – J’aimerais à mon tour rendre hommage au travail de Mme Brasseur, qui n’est pas seulement une femme politique remarquable, une femme admirable et une excellente Présidente, la deuxième de l’histoire du Conseil de l’Europe, mais qui a également accompli de grandes actions dans les temps particulièrement difficiles que nous avons connus au cours des deux dernières années.

La crise en Ukraine, les relations de l’Assemblée avec la Fédération de Russie, le débat sur les prisonniers politiques et les journalistes en détention, l’afflux des réfugiés en Europe, sont autant de questions que vous avez prises à bras-le-corps, Madame Brasseur. Vous vous êtes rendue dans des camps de réfugiés en Autriche pour favoriser des projets d’intégration, et je tiens à vous remercier pour tous vos efforts, qui m’ont extrêmement impressionné. Je suis très heureux de savoir que vous entendez les poursuivre à l’avenir au sein de cette Assemblée.

Avec votre départ, c’est aussi une femme que nous perdons à la présidence, alors que nous avons encore beaucoup d’efforts à faire en matière de parité entre les hommes et les femmes. À cet égard, toutes les délégations ne peuvent pas faire aussi bien que celle d’Andorre!

Concernant le rapport lui-même, j’insisterai sur l’initiative de lutte contre le discours de haine. C’est l’un des problèmes de notre temps – je pense aux attentats terroristes de Paris et d’ailleurs. Dans ce contexte, il est particulièrement important de soutenir cette initiative, d’expliquer aux jeunes que la haine ne mène à rien, mais risque de nous faire tout perdre – tout, c’est-à-dire la démocratie.

Après Anne Brasseur, je souhaite enfin évoquer ici Nadiia Savchenko et Grigore Petrenco, respectivement membre et ancien membre de notre Assemblée, qui sont actuellement en prison.

Je consacrerai les dernières secondes qui me restent à un collègue qui quitte notre Assemblée au bout de vingt ans de mandat, après avoir pris part à tous les votes et à 95 observations d’élections: Andreas Gross, qui a également contribué à ce rapport.

Au nom de mon groupe, je remercie donc Anne Brasseur ainsi qu’Andreas Gross.

M. XUCLÀ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – C’est l’ADLE qui a eu l’honneur de présenter la candidature d’Anne Brasseur à la présidence de l’Assemblée. De fait, au-delà des mois qui viennent de s’écouler, c’est de ses deux années de mandat que ce rapport doit nous amener à discuter.

La table des matières montre bien toute l’étendue des activités de Mme Brasseur. Ce n’est pas là un rapport d’activité de routine: il rassemble une masse considérable d’événements très importants qui se déroulés au cours de ces deux dernières années. Le rapport commence ainsi par évoquer le conflit en Ukraine, aborde les contacts avec la délégation russe, avant de traiter des activités ayant trait au phénomène des migrations, au problème des réfugiés; puis il en vient à la lutte contre la haine et l’intolérance et à la défense des normes et des valeurs du Conseil de l’Europe.

Aussi, je vous invite tous à lire attentivement l’ensemble de ce rapport qui n’est pas un rapport de plus. Il reflète l’intense activité de Mme Brasseur, qui a effectué pas moins de 921 visites officielles et plus de 130 visites dans les pays membres du Conseil de l’Europe.

Cette présidence a été exceptionnelle. Anne Brasseur nous laisse un héritage tout à fait remarquable. Nous avons été très heureux de travailler au sein de l’Assemblée sous votre conduite, Madame. Vous avez toujours su distinguer parfaitement ce qu’il est possible de dire ou de faire de ce qui ne l’est pas. Vous avez admirablement dirigé nos travaux, et vous méritez pleinement les applaudissements qui ont retenti tout à l’heure dans cet hémicycle.

Je tiens à vous remercier en mon nom propre comme au nom de l’ADLE: nous sommes très fiers de vous avoir eue comme Présidente de l’Assemblée.

M. LIDDELL-GRAINGER (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Je suis ravi d’avoir l’occasion de dire quelques mots de la présidence de Mme Brasseur et du présent rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente, qui est très important. Mon premier mandat au sein du Bureau a d’ailleurs été très intéressant: j’avais beaucoup à apprendre, et Mme Brasseur m’y a aidé; je l’en remercie, elle qui a également su faire œuvre de continuité au sein du Bureau.

Le Conseil de l’Europe a des défis considérables à relever. Nous avons décidé ce matin de tenir plusieurs débats, notamment sur des violences contre les femmes. C’est ce qui est extraordinaire ici: nous pouvons vraiment prendre de telles décisions, et je félicite l’ancienne présidente de nous avoir aidés dans ces choix.

Je suis à cet égard particulièrement sensible à la manière remarquable dont vous avez fait œuvre d’équilibre, Madame, s’agissant de trois nouveaux membres appartenant respectivement au Groupe du Parti populaire européen, au Groupe des conservateurs européens et au Groupe socialiste qui, tous les trois, avaient beaucoup à apprendre! Notre organisation a été fondée en 1949 pour défendre la démocratie et représenter les droits de tous ceux qui sont sans voix et sans possibilité de se défendre. J’ai pris conscience de l’importance du travail du Bureau et de la Commission permanente à cet égard.

C’est unis que nous pouvons être forts: pris individuellement, nous ne sommes rien. La force de cette institution est de réunir des pays qui ne sont pas toujours d’accord. C’est essentiel. Il en est allé ainsi, par exemple, pour deux pays qui ont pu se parler franchement alors qu’ils s’opposent.

Vous nous avez permis à tous, Madame, de parler des droits et des responsabilités inhérents à toute démocratie; c’est un exercice très difficile. Pour ces raisons, le travail du Bureau et de la Commission permanente est utile à tous.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Ces deux dernières années n’ont pas été les meilleures depuis la création du Conseil de l’Europe et de notre Assemblée. La situation s’est détériorée dans l’un de nos plus grands Etats membres, l’Ukraine, où des milliers de personnes ont perdu la vie – cela a été dit et redit. Le pays n’a pas pu surmonter ses problèmes et nous n’avons pas été en mesure de l’aider. Les problèmes se sont également aggravés avec l’un de nos membres les plus importants, la Fédération de Russie.

Les inégalités se sont creusées du fait de la crise économique sur notre continent. Nous avons vu émerger la crise des réfugiés et les immenses difficultés qu’ont les Etats membres du Conseil de l’Europe d’y faire face et d’agir de manière solidaire.

Nous avons vu aussi la situation se détériorer dans un grand nombre de domaines dans lesquels notre institution ne peut pas fonctionner parce qu’il y a des «trous noirs», des conflits gelés.

Nous avons vu également les pressions croissantes – notre rapporteure elle-même nous l’a confirmé – sur la Convention européenne des droits de l’homme et sur la Cour européenne des droits de l’homme.

Ces faits, très négatifs, ne constituent pas des progrès mais des régressions. Nous devons être conscients, en tant que responsables politiques, que c’est à nous qu’incombe cette responsabilité, c’est à nous qu’incombe la faute: nous n’avons pas su transformer tout cela en progrès authentiques.

Même si vous avez accédé à la présidence de l’Assemblée parlementaire en vertu du principe de rotation, nous devons tous nous féliciter de votre présence pendant ces deux années difficiles, parfois bien sombres, car vous avez pleinement assumé ces fonctions et imprimé un élan à cette Assemblée, à notre Organisation.

J’ai coopéré avec vous au Comité des Présidents, au Bureau, à la Commission permanente, à l’Assemblée et dans bien d’autres instances, et ainsi que j’ai eu l’occasion de le dire ce matin au Bureau, jamais vous n’avez claqué la porte, jamais vous n’avez posé d’ultimatum. Pendant ces deux années, vous avez pleinement assumé vos fonctions, très courageusement, avec une grande responsabilité.

Au sein de cette assemblée, trop souvent, nous agissons par la confrontation; mais grâce à vous, nous avons travaillé dans un esprit de consensus pour essayer de surmonter nos différends, nos divergences de vues. Ce fut un honneur que de travailler sous votre présidence, Madame Brasseur, et votre successeur devra tout faire pour se montrer à la hauteur, et c’est à nous de l’assister et de lui permettre de travailler en ce sens. Vous n’avez pas seulement été une excellente présidente, vous êtes aussi une grande amie de tous à l’Assemblée: j’espère que vous resterez des nôtres car vous nous manqueriez beaucoup!

Mme BARTOS (Hongrie)* – Nous vivons une époque dont beaucoup pensent qu’elle traverse la crise la plus importante que connaissent l’Union européenne et l’Europe dans son ensemble. L’Assemblée parlementaire est une institution d’une des organisations les plus importantes en matière de droits de l’homme. Avec les organisations défendant les droits de l’homme, le Conseil de l’Europe partage à cet égard une responsabilité importante, mais qui est aussi une opportunité, celle de surmonter les difficultés rencontrées aujourd’hui.

Cette dynamique doit permettre de répondre aux défis contemporains, et je pense là en particulier à la dimension temporelle de nos actions: le Conseil de l’Europe peut-il jouer un rôle prépondérant pour répondre aux problèmes des sociétés? Le Conseil de l’Europe peut-il façonner l’avenir de notre continent pour qu’il fonctionne mieux et relève mieux les défis de l’avenir? Ce sont des questions que le nouveau Président, M. Agramunt, devra examiner; j’espère qu’il aura l’occasion d’apporter des réponses aux défis d’aujourd’hui pour faire de l’Assemblée le moteur au sein du Conseil de l’Europe.

L’Assemblée parlementaire devrait être précurseur du développement en matière des droits de l’homme; elle devrait être capable de réagir rapidement aux nombreux défis que nous devons relever sur notre continent. À cet effet, permettez-moi de souhaiter beaucoup de succès à M. Agramunt.

Mme DURRIEU (France) – Je remercie Anne Brasseur pour sa présidence et pour l’action qu’elle a menée. Vraiment, je lui adresse un grand merci!

Je dirai pour ma part quelques mots sur les élections au Kirghizstan – notre ancienne présidente faisait d’ailleurs partie de l’équipe des observateurs – qui ont été pour moi une révélation pour ce qui concerne l’organisation des modalités de vote à l’aide des nouvelles technologies.

Que ce petit pays en plein cœur du Caucase, au demeurant pauvre, ait constitué cet espace d’expérimentation, j’ai trouvé cela assez exceptionnel, d’autant plus que ce fut une réussite de l’avis général, alors que tout était extrêmement complexe: enregistrement biométrique des listes, vote électronique, bulletins scannés, dépouillement électronique avec le résultat en quelques minutes! On veut pourtant à tout prix voir des dysfonctionnements majeurs là où, à mon avis, il n’y en pas eu. Certes, il y a eu un certain nombre de problèmes mais, en tant que membre de la Commission européenne pour la démocratie par le droit, ou Commission de Venise, je trouve qu’il faut retenir cette expérience, laquelle a d’ailleurs été financée par le Japon, la Corée du Sud et l’Allemagne. Peut-elle constituer un exemple et une référence? La réponse est oui, même s’il faut certainement maîtriser nombre d’aspects de la technologie utilisée.

Dans les élections que nous observons aujourd’hui, nous devons cependant faire attention: si, d’une manière générale, la journée du vote se déroule toujours très bien – les choses sont maintenant maîtrisées et respectées –, ce sont les campagnes électorales qu’il faudra en revanche scruter de plus près, avec beaucoup plus d’exigence. Je veux parler des questions qui font l’objet d’un grand débat au sein de la Commission de Venise, de l’utilisation des moyens publics et des moyens tout court, lesquels sont extrêmement divers et déséquilibrés. Il faut donc s’inspirer de cette opération, sans doute en améliorer les performances techniques, mais surtout se préoccuper beaucoup plus de la phase amont au stade des observations.

LA PRÉSIDENTE – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs.

Je vous précise que les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent déposer leur intervention dactylographiée, dans la mesure du possible par voie électronique, dans les quatre heures suivant l’interruption de la liste des orateurs au service de la séance pour publication au compte rendu.

Madame la rapporteure, il vous reste 4 minutes.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), rapporteure – Le premier orateur, M. Fischer, a dit que dorénavant, je serai «ein normales Mitglied». J’espère que, même en tant que présidente, j’étais normale! Il est vrai que les présidents, même lorsqu’ils assument cette fonction, sont également membres de l’Assemblée, mais ils n’ont pas le droit de vote, ce qui est exceptionnel dans un parlement: ils ne peuvent pas exercer leur droit de vote, comme tout membre. Je redeviens donc, c’est vrai, un membre normal de cette Assemblée parce que j’ai de nouveau tous mes droits, que je n’avais pas en tant que présidente.

Par ailleurs, certains se sont adressés à moi en m’appelant «Madame la Présidente» ou «ex Présidente». Nous sommes en France où l’on conserve, il est vrai, toujours son titre et comme j’ai occupé beaucoup de fonctions dans ma vie, j’accumule les titres. Pour autant, je n’ai pas la prétention que l’on m’appelle encore «Présidente». Désormais, en effet, nous avons un Président, et à cet égard je voudrais encore une fois le féliciter et lui dire que nous le soutenons tous et toutes dans sa tâche difficile.

Je remercie encore une fois les intervenants pour leurs paroles élogieuses. Passer le flambeau est un moment difficile, mais je l’ai réussi grâce à votre soutien. J’ai hâte de commencer mon travail au sein des commissions et suis fière de continuer avec cette campagne contre la haine. Il faut être tous ensemble pour dire non à la haine, non à l’intolérance. Cet après-midi, le Secrétaire Général a annoncé à la commission des questions politiques que j’étais nommée ambassadrice de cette campagne. J’ai occupé beaucoup de fonctions dans ma vie mais jamais dans le corps diplomatique; aussi, je suis fière de recevoir cette nouvelle mission du Conseil de l’Europe. C’est une noble tâche, que je mènerai avec votre aide.

J’espère que vous soutiendrez tous le rapport d’activité que je viens de vous présenter, avec les décisions que le Bureau a souhaité soumettre à votre approbation.

LA PRÉSIDENTE – La discussion générale est close.

Avant de procéder à l’approbation du rapport d’activité, nous devons nous prononcer sur les propositions du Bureau figurant dans ce rapport.

Le Bureau a décidé de proposer à la ratification de l’Assemblée plusieurs saisines de commissions (Doc.13945 et Addendum I).

Ces saisines sont ratifiées.

LA PRÉSIDENTE - Nous devons maintenant nous prononcer sur les autres propositions du Bureau figurant dans son rapport d’activité contenues dans le Document 13945 et Addendum I.

Les autres propositions sont adoptées.

M. Agramunt, Président de l’Assemblée, prend place au fauteuil présidentiel.

3. Communication du Comité des Ministres

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la communication du Comité des Ministres à l’Assemblée, qui sera présentée par M. Mitov, ministre des Affaires étrangères de la Bulgarie, Président du Comité des Ministres.

Après sa communication, M. Mitov répondra aux questions des membres de notre Assemblée.

(Poursuivant en anglais) Monsieur Mitov, j’ai été très heureux de vous rencontrer, dans mon bureau, et de notre échange de vues sur la situation en Europe, et les orientations que vous avez définies concernant notamment la protection des droits de l’enfant, la protection des médias contre l’ingérence extérieure, la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation. Nous nous réjouissons de vous entendre nous présenter les activités en cours de la présidence du Comité des Ministres. Nous souhaitons également connaître votre point de vue, en tant que ministre des Affaires étrangères de la Bulgarie, sur l’évolution des choses dans votre pays.

M. MITOV, ministre des Affaires étrangères de la Bulgarie, Président du Comité des Ministres *– Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire, je vous remercie de votre accueil chaleureux et des paroles d’encouragement adressées à la présidence bulgare du Comité des Ministres. C’est un grand honneur pour moi de prendre la parole devant l’Assemblée parlementaire à sa session plénière, ici à Strasbourg, en ma qualité de Président du Comité des Ministres. C’est la deuxième fois depuis son adhésion au Conseil de l’Europe que la Bulgarie assume la présidence de cette Organisation.

En novembre dernier, j’ai déjà eu le plaisir de m’adresser à votre Commission permanente à Sofia. À cette occasion, j’ai présenté les priorités qui seront les nôtres au cours de notre mandat. Je n’ai pas l’intention de les exposer aujourd’hui en détail et me concentrerai sur quelques-uns des principaux points. J’évoquerai également plusieurs activités menées au niveau du Comité des Ministres.

Trois jours après ma prise de fonctions, le 10 novembre, nous avons tous été bouleversés par les attentats terroristes barbares commis à Paris et qui ont ôté la vie à plus de 130 personnes. À ma grande tristesse, la toute première déclaration que j’ai dû faire en ma qualité de Président a été un message de condoléances, de sympathie et de soutien au peuple français et à ses autorités dans cette terrible épreuve. Les Délégués des Ministres ont également adopté une déclaration sur ces attentats terroristes. Malheureusement, les événements tragiques de Paris ont été suivis d’autres actes terroristes en Europe, comme l’attentat à la bombe perpétré à Istanbul au début de ce mois. Ces actes constituent la négation la plus flagrante de nos valeurs fondamentales communes dont, en tout premier lieu, le droit à la vie. Le terrorisme cherche à susciter la peur, à provoquer la haine et des antagonismes au sein de nos sociétés, pour les déstabiliser. Nous devons tout faire pour empêcher qu’il en soit ainsi.

Grâce à son arsenal d’instruments juridiques, le Conseil de l’Europe a un rôle important à jouer pour aider nos pays à lutter contre le terrorisme tout en respectant la prééminence du droit et les libertés fondamentales.

En mai 2015, le Comité des Ministres a adopté un plan d’action ambitieux sur la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation conduisant au terrorisme. Nous continuerons avec la plus grande détermination à accorder la priorité à la mise en œuvre rapide, pleine et entière de ce plan d’action, dont la mise en œuvre a été passée en revue par les Délégués des Ministres au début du mois de décembre sur la base d’une synthèse établie par le Secrétaire Général.

Je souhaite également appeler votre attention sur le Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme qui vise à s’attaquer au problème des «combattants terroristes étrangers»; ce Protocole est à présent ouvert à la signature. Vingt Etats membres, dont mon propre pays, la Bulgarie, et l’Union européenne l’ont déjà signé. Je vous invite à encourager les gouvernements qui ne l’ont pas encore fait à le signer et à le ratifier de manière à assurer son entrée en vigueur effective dans les meilleurs délais.

Il ne fait aucun doute que la lutte contre le terrorisme continuera d’être une priorité pour le Conseil de l’Europe bien au-delà de notre présidence. Une organisation comme la nôtre doit mener des actions à long terme afin de garantir à chacun un avenir sûr, tout en veillant au respect des libertés fondamentales et de l’Etat de droit. Nous devons aussi offrir aux jeunes des perspectives d’avenir et leur assurer des conditions de vie qui ne leur donnent pas le sentiment d’être exclus, qui leur permettent de s’épanouir pleinement et de trouver leur juste place dans nos sociétés.

J’en viens ainsi à la première grande priorité de la présidence bulgare, à savoir renforcer la protection des droits de l’enfant et faciliter l’accès des jeunes à la culture.

Nous estimons que tous les enfants doivent jouir pleinement de la protection qu’offrent les instruments juridiques internationaux applicables. Nous soutenons sans réserve les activités du Conseil de l’Europe dans ce domaine, notamment l’élaboration de la nouvelle stratégie 2016-2021 du Conseil de l’Europe sur les droits de l’enfant qui fournira des lignes directrices sur la façon de surmonter les obstacles actuels à l’exercice de ces droits et d’assurer leur mise en œuvre effective. La présidence bulgare prévoit d’organiser, en avril à Sofia, une conférence à haut niveau pour promouvoir cette nouvelle stratégie. Comme les droits de l’enfant figureront aussi au premier rang des préoccupations des futures présidences de l’Estonie et de Chypre, je suis convaincu que la dynamique du lancement de la nouvelle stratégie sera maintenue.

Nous accordons également une attention particulière à la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, comme en témoigne la récente ratification de la Convention de Lanzarote par la Bulgarie. Le 18 novembre, à l’occasion de la première Journée européenne pour la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, j’ai publié une déclaration appelant les Etats membres qui n’ont pas encore ratifié la Convention de Lanzarote à le faire. J’ai également appelé tous les gouvernements, parlementaires, ONG, professionnels en charge des enfants et le grand public à faire leur la Journée européenne en agissant ensemble pour lutter contre ces crimes.

Sous la présidence bulgare, une Conférence internationale sur le thème «Construire une culture de prévention chez les enfants et les adolescents par l’amélioration de l’information et des connaissances sur les risques en cas de catastrophes naturelles» s’est tenue en décembre 2015, à Sofia, dans le contexte du plan à moyen terme 2016-2020 de l’Accord européen et méditerranéen du Conseil de l’Europe sur les risques majeurs.

La Conférence avait pour objectif principal de réunir des experts et praticiens européens pour faire le bilan des progrès réalisés dans l’amélioration de la résilience des enfants et des adolescents face aux catastrophes. Sur la base des bonnes pratiques recensées dans différents pays, les participants ont examiné les mesures à prendre pour élaborer une stratégie visant à promouvoir une culture de prévention chez les enfants et les adolescents et ont envisagé des actions concrètes.

La Bulgarie considère, en outre, qu’il est particulièrement important d’aider les jeunes à devenir des citoyens responsables et actifs au sein de sociétés démocratiques. À une époque où les jeunes sont gravement touchés par le chômage et la pauvreté, les pratiques démocratiques, l’éducation et l’autonomisation des jeunes sont, pour les Etats, un rempart contre les conflits internes: elles constituent le meilleur, sinon le seul antidote contre les opinions et mouvements extrémistes qui propagent le racisme et la xénophobie. Dans cette optique, la présidence bulgare organisera deux événements centrés, l’un sur l’accès des jeunes à la culture, l’autre sur la gouvernance du patrimoine culturel. Ces forums seront une bonne occasion de discuter de l’accès à la culture comme condition nécessaire à l’expression libre et aux progrès personnels, qui peuvent aussi faciliter l’intégration sociale et réduire le risque d’actes racistes et xénophobes.

Nous nous félicitons grandement de la récente décision du Comité des Ministres de tenir la 25e session de la Conférence du Conseil de l’Europe des ministres de l’éducation à Bruxelles, en avril prochain, sur le thème général «Le rôle de l’éducation dans le développement des compétences requises pour la culture de la démocratie».

La présidence bulgare a choisi de faire de la protection des médias contre toute influence extérieure sa deuxième grande priorité. Nous entendons centrer notre attention sur les moyens de soumettre le discours de haine à la régulation et à l’autorégulation des médias ainsi que sur le rôle des médias indépendants et de la liberté d’expression dans la promotion de la tolérance au sein de nos sociétés. Nous organiserons un événement spécialement consacré à ces questions.

Des médias libres et florissants constituent la pierre angulaire de nos sociétés démocratiques. Or, la liberté des médias est actuellement en butte à diverses attaques. À cet égard, nous souscrivons aux conclusions du deuxième rapport du Secrétaire Général, M. Jagland, selon lequel les conditions de travail des médias libres se détériorent et nous soutenons pleinement ses efforts pour s’atteler à ce problème sous tous ses aspects. Le Comité des Ministres a récemment exprimé son inquiétude concernant la situation des médias dans certains Etats membres. Le Conseil de l’Europe qui, à nos yeux, a prouvé au fil des années son fort attachement à l’existence de médias libres et indépendants et acquis en la matière une expertise sans égale, constitue un cadre approprié pour travailler de concert avec les Etats membres pour relever les défis auxquels ils doivent faire face.

Un autre aspect, tout aussi essentiel, de cette même question est la liberté d’expression sur internet. Le 10 décembre, à l’occasion de la Journée internationale des droits de l’homme, deux ONG bulgares ont organisé, dans le cadre de notre présidence et avec le soutien du Conseil de l’Europe, une activité de sensibilisation à Sofia. La conférence intitulée «Droits de l’homme des utilisateurs d’Internet» a attiré des experts bulgares et internationaux de diverses institutions et organisations, des représentants des milieux d’affaires et du monde politique, des militants des droits de l’homme et des journalistes qui ont présenté et analysé les tendances, initiatives et perspectives en matière de protection des droits fondamentaux des utilisateurs d’internet. Les discussions étaient axées sur Le Guide des droits de l’homme pour les utilisateurs d’internet publié par le Conseil de l’Europe.

La Bulgarie s’attache à poursuivre sa politique de protection des droits des personnes appartenant à des groupes vulnérables, dont les personnes âgées, les handicapés, les Roms et les migrants, ainsi qu’à prévenir leur marginalisation et leur exclusion sociale. C’est pourquoi nous avons décidé de faire de la protection des groupes vulnérables notre troisième grande priorité. Au cours de notre présidence, nous organiserons plusieurs événements centrés notamment sur les droits des enfants réfugiés, sur les personnes handicapées et sur les Roms.

Permettez-moi, à présent, d’en venir à quelques-unes des principales activités menées par le Comité des Ministres depuis l’automne dernier.

La liberté de réunion et d’association a fait l’objet d’un débat thématique des Délégués des Ministres en octobre. Dans le prolongement de ce débat, les Délégués ont adopté plusieurs décisions. Ils ont notamment rappelé que, conformément à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme et à la jurisprudence applicable de la Cour européenne des droits de l’homme, les Etats membres avaient l’obligation de garantir le respect du droit à la liberté de réunion et d’association, ce qui suppose l’obligation positive pour les Etats membres de créer un environnement favorable à l’exercice de cette liberté.

À titre de suivi opérationnel au débat, le Secrétaire Général a été invité à examiner la faisabilité de la mise en place d’un mécanisme de protection des défenseurs des droits de l’homme en vue de soumettre des propositions concrètes en la matière et de préparer un aperçu des bonnes pratiques concernant la promotion de la liberté de réunion et d’association.

Je me réjouis de constater qu’au cours de cette session, votre Assemblée étudiera les moyens de renforcer la protection et le rôle des défenseurs des droits de l’homme ainsi que la question des restrictions inappropriées aux activités des ONG. Le Comité des Ministres examinera attentivement vos conclusions dans la perspective de la poursuite de ses activités dans ce domaine. Plus généralement, je suis convaincu qu’en faisant fond sur les bonnes relations de travail entre l’Assemblée et le Comité des Ministres, nous progresserons ensemble vers la mise en œuvre de notre programme commun de défense des droits de l’homme et de la démocratie en Europe.

Depuis octobre dernier, le Comité des Ministres a tenu plusieurs échanges de vues intéressants avec M. Spielmann, alors président de la Cour européenne des droits de l’homme, ainsi qu’avec le Commissaire aux droits de l’homme, le président de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice et des représentants du Conseil consultatif des juges européens et du Conseil consultatif des procureurs européens.

En novembre dernier, les Délégués des Ministres ont approuvé le Programme et budget du Conseil de l’Europe pour 2016-2017. C’est le troisième Programme et budget biennal de l’Organisation. Dans ce contexte, la décision de la Turquie de devenir un grand contributeur à partir de 2016 permet à l’Organisation de disposer d’importants moyens supplémentaires, lui donnant ainsi la possibilité de renforcer sa capacité opérationnelle et son action. En approuvant les décisions budgétaires, les Délégués ont en outre soutenu la poursuite du processus de réforme engagé par le Secrétaire Général et les résultats obtenus à ce jour.

La surveillance de l’exécution des arrêts et des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme continue de figurer au nombre des fonctions et responsabilités majeures des Délégués des Ministres. Lors de leur réunion des droits de l’homme en décembre dernier, les Délégués sont convenus de clore l’examen de 831 décisions et arrêts de la Cour. Comme vous le voyez, ce chiffre est tout à fait encourageant au vu des efforts constants déployés pour améliorer encore l’exécution des arrêts.

S’agissant de la coopération avec d’autres organisations, je tiens à signaler que le Comité des Ministres a eu, le 1er décembre, un échange de vues avec Mme Astrid Thors, Haute-Commissaire de l’OSCE aux minorités nationales. En outre, à sa 22e réunion, tenue en octobre à Vienne, le Groupe de coordination entre le Conseil de l’Europe et l’OSCE a examiné l’état de la coopération entre les deux organisations concernant la lutte contre le terrorisme et la traite des êtres humains. Le groupe se réunira au cours du premier semestre 2016, à Strasbourg, pour faire le point sur la coopération en matière de promotion de la tolérance, de lutte contre la discrimination et de protection des droits des personnes appartenant à des minorités nationales.

Depuis octobre dernier, un certain nombre de questions politiques, parmi lesquelles le conflit en Géorgie, ont également figuré à l’ordre du jour du Comité des Ministres. En novembre, les Délégués des Ministres ont examiné le douzième rapport de synthèse du Secrétaire Général sur ce sujet. L’examen régulier des rapports du Secrétaire Général permet au Comité des Ministres de suivre de près la situation en Géorgie. Le Comité est prêt à renforcer son action pour garantir la protection des droits de l’homme dans les zones touchées par le conflit. Cependant, pour ce faire, le libre accès aux régions concernées est essentiel; j’exhorte donc à nouveau toutes les parties qui sont en mesure de faciliter cet accès à le faire.

S’agissant de la même région – le Caucase –, le Comité des Ministres a examiné, en octobre dernier, l’état de la mise en œuvre des engagements contractés par l’Azerbaïdjan lors de son adhésion au Conseil de l’Europe. Dans leurs décisions, les Délégués des Ministres ont exprimé leur profonde inquiétude face, d’une part, à la détérioration du cadre juridique et administratif dans lequel fonctionnent la société civile et les médias indépendants et, d’autre part, au nombre croissant d’actions en justice intentées contre des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes. Ils se sont, dans le même temps, félicités des progrès accomplis par l’Azerbaïdjan dans certains domaines et ont pris acte des efforts soutenus déployés par les autorités azerbaïdjanaises pour promouvoir le dialogue interculturel et interreligieux grâce, notamment, au «Processus de Bakou». Les Délégués ont réaffirmé leur engagement à continuer de prêter leur assistance à l’Azerbaïdjan et souligné, à cet égard, l’importance de la mise en œuvre effective du plan d’action 2014-2016.

Un examen similaire du respect des engagements est en cours concernant l’Arménie, en s’appuyant sur un rapport du Secrétariat relatif à l’état de mise en œuvre des engagements contractés par l’Arménie pour la période allant de mai 2013 à juin 2015. Les Délégués des Ministres devraient adopter, dans un proche avenir, des décisions faisant suite au rapport et aux recommandations qu’il contient.

Le Comité continue d’accorder une grande attention à tous les aspects de la situation en Ukraine et suit de près son évolution, notamment en Crimée. En novembre dernier, il a tenu un échange de vues avec Sir Nicolas Bratza, président du Comité consultatif international sur l’Ukraine, qui a présenté le rapport du Comité sur les enquêtes menées au sujet des événements qui se sont produits en 2014 à Odessa. Le vice-ministre des Affaires étrangères de l’Ukraine a participé à cet échange de vues. Le Comité des Ministres suit également de près le processus de réformes constitutionnelles en Ukraine concernant la décentralisation et le pouvoir judiciaire, réformes destinées à renforcer les institutions démocratiques, l’Etat de droit et la protection effective des droits de l’homme ainsi qu’à lutter contre la corruption. Je tiens à saluer et à encourager ces réformes qui, dans de nombreux domaines, sont menées avec le concours de l’Organisation grâce au plan d’action 2015-2017 pour l’Ukraine.

Je ne saurais, bien sûr, omettre de mentionner le flux migratoire ininterrompu vers l’Europe qui, une fois de plus, sera au cœur de vos débats cette semaine. Cette question reste un grand sujet de préoccupation. Nos Etats membres, dont la Bulgarie, doivent faire face à de graves difficultés matérielles dans la gestion de cette crise. Néanmoins, les réfugiés et les demandeurs d’asile ont droit à la protection que leur assure la Convention européenne des droits de l’homme lorsqu’ils arrivent en Europe. J’appelle tous les gouvernements et vous, Mesdames et Messieurs les parlementaires, à ne pas relâcher les efforts pour accueillir les réfugiés de manière humaine et digne, malgré toutes les difficultés. Nous devons être conscients que ce ne sont pas seulement les réfugiés qui sont concernés par la façon dont nous les traitons mais nous-mêmes et notre propre avenir.

Je voudrais ajouter quelques mots concernant les événements regrettables qui se sont récemment produits à Cologne et dans plusieurs autres villes européennes. Sans préjuger des conclusions des enquêtes en cours sur les plaintes déposées, force est de constater que ces événements reflètent quelques-uns des problèmes auxquels nous nous heurtons. À cet égard, l’expertise du Conseil de l’Europe en matière d’intégration, d’éducation et d’égalité serait utile.

Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée parlementaire, je ne peux conclure mon intervention sans remercier Mme Brasseur pour le travail remarquable qu’elle a accompli au cours des deux années de son mandat de Présidente de votre Assemblée ni sans féliciter votre Président nouvellement élu, M. Agramunt. Je ne doute pas que, sous sa direction avisée, l’Assemblée et le Comité des Ministres poursuivront leur coopération fructueuse en faisant entendre la voix du Conseil de l’Europe et en garantissant le respect de nos principes démocratiques et des droits de l’homme en ces temps difficiles.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Mitov, je vous remercie. Votre communication a vivement intéressé l’Assemblée.

Nous allons maintenant aborder les questions des parlementaires. Je vous rappelle que celles-ci doivent avoir un caractère vraiment interrogatif et ne pas dépasser 30 secondes. Je propose que nous prenions les questions par groupes de trois, en commençant par les porte-parole des groupes.

M. VAREIKIS (Lituanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Monsieur le Président du Comité des Ministres, la guerre sévit dans des régions proches de l’Europe – notamment la Syrie, avec le flux de réfugiés qui s’ensuit, passant par la Turquie, la Bulgarie et d’autres pays européens. J’aimerais savoir quel sera, dans vos projets pour la présidence du Comité des Ministres, le rôle de la Turquie, du fait, en particulier, de son voisinage avec la Syrie.

Mme MEHMETI DEVAJA («L’ex-République yougoslave de Macédoine»), porte-parole du Groupe socialiste* – Ma question porte elle aussi sur la crise des réfugiés. Est-ce que la présidence bulgare réfléchit à la manière dont on peut concilier la liberté de circulation – droit fondamental garanti par la Convention – et les contrôles aux frontières destinés à garantir davantage de sécurité au continent européen?

Mme LUNDGREN (Suède), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Monsieur le Président du Comité des Ministres, je vous remercie pour votre allocution. Pour la première fois, une partie à la Convention européenne des droits de l’homme s’est octroyé le droit de ne pas tenir compte des arrêts de la Cour. La Russie a récemment voté une loi en ce sens. Quelles sont les mesures prévues pour réagir à cette initiative?

M. LE PRÉSIDENT DU COMITÉ DES MINISTRES* – La crise des réfugiés intéresse tous les pays, il s’agit de l’un des défis les plus importants que nous avons tous à relever. C’est la raison pour laquelle, une approche globale est nécessaire.

Il existe trois catégories de pays en Europe, au regard des flux migratoires: les Etats membres de l’Union européenne qui font partie de l’espace Schengen, les Etats membres de l’Union européenne qui n’appartiennent pas à l’espace Schengen et les pays qui sont ni membres de l’Union européenne ni membres de la zone Schengen. Une réalité qui ne fait qu’ajouter à la complexité de la situation.

Cependant, nous ne pouvons pas nous payer le luxe d’aborder cette question par petits morceaux séparés. Nous devons traiter le problème dans sa globalité et appliquer les mêmes règles aux migrants, aux demandeurs d’asile et aux réfugiés. Ces discussions ont lieu, principalement, au Parlement européen, le Conseil de l’Europe ne pouvant traiter que des thèmes faisant partie de ses prérogatives.

Les mesures que nous prendrons ne seront d’une réelle efficacité que si elles sont accompagnées d’une campagne d’information, laquelle devrait également nous permettre de gérer la crise. Il convient de renforcer les contrôles aux frontières, de travailler ensemble pour lutter contre la traite des êtres humains, contraire au droit international. En effet, l’un des problèmes les plus importants est précisément le trafic des êtres humains. S’il a souvent été dit que l’origine de cette crise migratoire est le conflit en Syrie, la traite des êtres humains est l’un des problèmes majeurs auxquels nous avons à faire face. Même si nous arrivons à surmonter le problème syrien, nous devrons apporter des réponses au trafic des êtres humains. C’est la raison pour laquelle la Bulgarie a modifié sa législation, afin d’incriminer plus durement les personnes qui participent à ce trafic, et de prononcer des peines plus lourdes à l’encontre des individus qui abusent de la faiblesse de ceux qui sont à la recherche d’une meilleure vie.

S’agissant de la Turquie, elle a réalisé des efforts considérables pour aider les réfugiés. Le Comité des Ministres a félicité ce pays à plusieurs reprises. La crise des réfugiés ne pourra pas être réglée par un seul pays; il en va de la responsabilité de tous les Etats membres. Les accords passés en novembre dernier entre l’Union européenne et la Turquie pour gérer la crise sont une illustration de cette réponse collective qui doit être mise en place par l’Europe. Dans cette gestion de crise, les Etats membres doivent respecter le droit international: les migrants et les réfugiés doivent jouir de la protection que leur donne la Convention européenne des droits de l’homme. Nous pouvons apporter une protection dans nos domaines de compétence. Nous le proposons à tout Etat membre qui le souhaite, y compris par des échanges de bonnes pratiques.

La Bulgarie, après la Turquie, est le pays qui reçoit en premier les réfugiés. Nous travaillons donc très étroitement avec elle pour nous assurer que toutes les mesures sont prises pour contrôler nos frontières. Cela passe d’abord par un échange d’informations, mais nous avons également signé un accord, avec la Grèce et la Turquie, relatif à un contrôle trilatéral des frontières. Mais il reste beaucoup à faire.

Les citoyens européens attendent que nous reprenions le contrôle de la situation et que nous appliquions nos règles. Le sentiment général d’avoir perdu le contrôle de la situation engendre l’apparition de mouvements populistes et extrémistes.

Répondre à la crise est de la responsabilité de tous les Etats membres. Cela relève de leurs obligations au regard du droit international, notamment de la Convention de Genève de 1951 sur le statut des réfugiés et de son protocole de 1967, de la Convention européenne des droits de l’homme et de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. La Conseil de l’Europe suit le respect de ces engagements par tous ses Etats membres. Le Secrétaire Général établit des rapports sur la situation et a désigné récemment un représentant spécial pour les réfugiés et les migrants à cette fin.

Le Conseil de l’Europe apporte son assistance dans ses domaines de compétence aux Etats membres qui le souhaitent, avec tous les outils dont il dispose afin de promouvoir les échanges de bonnes pratiques au niveau national, régional et local. Son action concerne: l’amélioration des conditions d’accueil; l’accès à des procédures équitables; la lutte contre la traite des êtres humains et toutes formes de trafic; la protection des enfants; les mesures de promotion de lutte contre la discrimination. Notre présidence organisera deux conférences internationales: l’une sur la question des migrations, l’autre sur les enfants de réfugiés.

En ce qui concerne la question de Mme Lundgren, je vous rappelle que le Comité des Ministres a débattu, au mois de décembre, de la tendance croissante de certains Etats membres à remettre en cause la nature contraignante des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme qui sont pourtant le fondement même du système de protection des droits de l’homme. Les Etats membres du Conseil de l’Europe ont tous accepté le caractère contraignant de la Convention, y compris son article 46 exigeant des Etats qu’ils exécutent les arrêts de la Cour.

Le système conventionnel a permis d’améliorer la protection des droits de l’homme sur notre continent à de nombreux égards; je vous renvoie aux documents préparés récemment par votre commission des questions juridiques et des droits de l’homme relatifs à l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. En tant qu’élus, nous devons expliquer le rôle important que joue le système conventionnel dans la protection des droits de l’homme, de l’Etat de droit et des valeurs démocratiques.

S’agissant de la Fédération de Russie, trouver le moyen de concilier la Convention européenne des droits de l’homme et les dispositions de droit interne concerne les plus hautes juridictions de toutes les parties à la Convention. La nouvelle loi adoptée par la Douma le 4 décembre dernier a été discutée au Comité des Ministres le 16 décembre.

Ainsi que l’a souligné le Secrétaire Général, aucun pays ne peut invoquer sa constitution pour se soustraire à ses obligations au regard d’un traité international. Je ne doute pas que lors de la mise en œuvre de cette loi, les autorités russes chercheront des solutions constructives dans l’intérêt de la protection des droits de l’homme.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le ministre, à la suite de vos commentaires, quels sont, en résumé, les accomplissements à attendre de votre présidence? Dans quelle mesure votre approche est-elle aujourd’hui plus proactive que celles de vos prédécesseurs? Enfin, quelles mesures entendez-vous prendre pour encourager votre successeur à la présidence à poursuive les efforts qui auront été engagés?

M. HUNKO (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Président du Comité des Ministres, vous avez déclaré, à juste titre, que la guerre en Syrie était la cause de grands mouvements de population. Dans le journal autrichien Der Standard, je lis le titre suivant: «Fournitures bulgares pour la guerre en Syrie». Des livraisons d’armement auraient transité par la Bulgarie avec l’aide de l’Arabie saoudite et des Etats-Unis. Ces livraisons d’armement sont-elles avérées et, si oui, se poursuivront-elles?

Mme DURANTON (France) – Monsieur le Président, la mission d’observation de notre Assemblée a appelé «à des réformes pour remédier aux insuffisances considérables observées lors de l’élection présidentielle» du 11 octobre dernier en Biélorussie.

Ce pays évolue trop lentement sur le plan tant politique qu’économique. Pour autant, il affiche une volonté indéniable de se rapprocher de l’Europe. La tenue des négociations sur le conflit en Ukraine à Minsk n’est pas fortuite.

Où en sont les relations de notre Organisation avec la Biélorussie et quelles sont leurs perspectives d’évolution?

M. LE PRÉSIDENT DU COMITÉ DES MINISTRES* – S’agissant des priorités que s’est fixées la présidence bulgare, je ferai référence à mon intervention ici même. J’en rappellerai les principaux points.

Nous partageons des priorités avec l’Estonie et Chypre pour veiller à la continuité de l’action déployée par les présidences successives. À cet égard, nous accordons une grande importance aux valeurs fondamentales de l’Organisation et œuvrons à les promouvoir et à les protéger. Sur la base des deux rapports préparés par le Secrétaire Général et les présidences précédentes sur l’état de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit, nous continuerons à œuvrer pour la réforme de l’Organisation, conformément aux priorités du Comité des Ministres et à accorder une attention toute particulière à la stabilité politique en réagissant de façon adaptée aux défis politiques du moment.

Sur ces priorités, j’apporterai quelques précisions.

Renforcer la protection des droits de l’enfant et faciliter l’accès des jeunes à la culture figure parmi les priorités clés de la présidence bulgare comme des autres présidences, cette priorité étant renforcée par le mécanisme national de coordination des droits de l’homme. En outre, sous notre présidence, la nouvelle stratégie sur les droits de l’enfant 2016-2021 sera adoptée et une conférence à haut niveau se tiendra pour en promouvoir la stratégie.

Nous organiserons également une conférence sur l’accès des enfants et des jeunes à la culture par l’amélioration de l’information et des connaissances sur les risques en cas de catastrophes naturelles. J’ai déjà mentionné ces travaux. Une attention particulière sera également accordée à l’accès à la culture qui permet l’expression de la personne, facilite son intégration et permet de prévenir le racisme et la xénophobie.

Une autre priorité concerne à la protection des médias d’influences extérieures, avec une attention particulière accordée à la liberté d’expression, au pluralisme et à l’égalité dans le paysage médiatique, des points précis ayant trait aux discours de haine et à la réglementation d’Internet.

S’agissant de la protection des groupes vulnérables, la Bulgarie accorde une grande importance à l’amélioration de la vie des personnes souffrant de handicap. Nous organiserons à ce sujet une conférence d’experts sur les échanges de bonnes pratiques.

La Bulgarie considère également que le bon fonctionnement des institutions est une condition préalable à une bonne gestion du processus migratoire, que nous évoquons depuis un temps déjà. Très prochainement, une conférence de haut niveau se tiendra sur le pouvoir judiciaire, qui traitera de nombre de ces sujets. Ayant fait une présentation des priorités au début de la présidence bulgare, je ne m’y attarderai pas, mais si vous avez besoin d’informations plus détaillées, je serai à votre disposition pour répondre par écrit.

J’en viens au Bélarus qui est l’une de nos autres priorités. L’objectif stratégique du Comité des Ministres vise, certes, à intégrer le Bélarus au sein du Conseil de l’Europe, mais nombre de faiblesses et de manques demeurent, dont il faut être pleinement conscients.

Après l’élection présidentielle du 11 octobre 2015, bien des actions restent à entreprendre. Il convient de se pencher sur les droits humains qui appellent des progrès impératifs. Nous nous concentrons spécifiquement sur la peine capitale: deux peines ont été prononcées en 2015 et une l’a d’ores et déjà été en janvier 2016. C’est regrettable. Notre objectif est donc de convaincre nos homologues du Bélarus que la peine de mort doit être abolie avant de progresser sur d’autres dossiers. La libération de six prisonniers politiques, dont un candidat à la présidence, constitue une étape positive. J’espère que d’autres pas seront faits en ce sens pour répondre aux principes du Conseil de l’Europe. Bien sûr, nous engagerons tous les efforts nécessaires pour rapprocher le Bélarus du Conseil de l’Europe si, au plan pratique, il prouve sa volonté de s’en tenir aux principes et aux valeurs de l’Organisation, notamment sur ce sujet.

À Mme Duranton, je répondrai que la question des armes est un sujet à caractère national. L’Etat bulgare, je vous l’assure, applique toutes les règles portant sur le commerce des armes et respecte toutes les conventions qu’il a signées.

Toutes les conventions que nous avons signées sont respectées. Je ne souhaite donc pas commenter les allégations de certains médias. Les faits sont vérifiables et nous sommes en relation avec de nombreuses organisations internationales.

Notre intérêt est de mettre le plus rapidement possible un terme à la guerre en Syrie et de vaincre la bataille contre Daech. Nous voulons une Syrie stable et démocratique, avec des perspectives d’avenir. Cet avenir doit être décidé par les citoyens eux-mêmes par le biais d’élections équitables, justes et libres, organisées sous l’égide des Nations Unies.

Mme HOFFMANN (Hongrie)* – Les droits des enfants sont l’une des priorités de la Présidence bulgare. La nouvelle Stratégie du Conseil de l’Europe sur les droits de l’enfant sera adoptée au cours de la Présidence bulgare, à Sofia. Ce document ambitieux énonce les cinq priorités du Conseil de l’Europe dans ce domaine. La participation des enfants à la démocratie est l’une d’elle. Quels sont les plans spécifiques de la Présidence bulgare sur ce sujet?

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Le dialogue interreligieux et interculturel est un thème fréquemment évoqué au sein de notre Assemblée. En Azerbaïdjan, le multiculturalisme revêt une signification toute particulière et, d’ailleurs, nous avons déclaré l’année 2016 Année du dialogue multiculturel. Malheureusement, cette question reste difficile dans de nombreux pays membres du Conseil de l’Europe. C’est pourquoi je demande au Comité des Ministres de s’en saisir.

Monsieur Mitov, en tant que ministre des Affaires étrangères de la Bulgarie, vous connaissez bien les problèmes liés au dialogue interreligieux et interculturel. Quelle est votre position à leur sujet?

Mme MAIJ (Pays-Bas)* – La lutte contre les violences faites aux femmes et contre la violence domestique fait l’objet d’une attention croissante. Les événements récents de Cologne nous ont tous choqués, mais le problème existe dans de nombreux pays et depuis longtemps. Comment la Présidence bulgare entend-t-elle promouvoir la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique?

M. LE PRÉSIDENT DU COMITÉ DES MINISTRES* – Les enfants doivent jouir de tous les droits inscrits dans la Convention européenne des droits de l’homme, dans la Charte sociale européenne et dans la Convention sur les droits de l’enfant des Nations Unies. Le Comité des Ministres adoptera bientôt la nouvelle Stratégie du Conseil de l’Europe sur les droits de l’enfant, valable jusqu’en 2021. Les priorités pour 2016 et 2017 seront l’éradication des violences faites aux enfants, en particulier les violences sexuelles, dans le cadre de la Convention de Lanzarote, mais aussi la participation des enfants aux sujets qui les concernent, l’égalité des chances pour les enfants en situation vulnérable, la sensibilisation des enfants aux outils numériques et une justice adaptée aux enfants. Pour faire vivre les droits des enfants dans la pratique, nous aurons besoin de l’aide de tous les Etats membres. Les parents, les professionnels de l’éducation et la société tout entière doivent également être associés à ce combat, dans le cadre d’une grande campagne de sensibilisation. La Présidence bulgare a l’intention d’organiser une conférence de haut niveau afin de promouvoir la nouvelle Stratégie du Conseil de l’Europe sur les droits de l’enfant.

En ce qui concerne le dialogue interculturel et sa dimension religieuse, il est bien entendu essentiel pour la compréhension réciproque dans notre monde interconnecté. Les groupes terroristes appellent au meurtre en bafouant les principes religieux dont ils se réclament et qu’ils détournent au profit de la violence. Nous sommes très préoccupés par la situation de plusieurs pays du Moyen-Orient. Dans les pays musulmans, le paradigme du rapport entre l’islam et le pouvoir politique a changé. Les racines des idéologies extrémistes doivent être étudiées et comprises, mais c’est au niveau local que des solutions pourront être trouvées. Nous pouvons participer à la discussion et aider les pays du Moyen-Orient à respecter les droits de l’homme. Le Conseil de l’Europe a un rôle essentiel à jouer pour la promotion du dialogue interculturel et interreligieux. C’est tout le sens du plan d’action adopté au mois de mai par le Comité des Ministres pour lutter contre l’extrémisme et la radicalisation conduisant au terrorisme. La Rencontre sur la dimension religieuse du dialogue interculturel lancée en 2008 s’est poursuivie en novembre 2015 à Sarajevo.

Au cours de sa Présidence du Comité des Ministres, la Bulgarie a adopté la Convention d’Istanbul. L’égalité entre les hommes et les femmes est essentielle à la démocratie. Le Conseil de l’Europe joue un rôle pionnier pour ancrer cette exigence dans la réalité. La mise en œuvre politique de la Convention d’Istanbul est nécessaire pour parvenir à une véritable égalité entre les genres. Des approches intégrées sont nécessaires pour sensibiliser à l’égalité des chances et au respect des droits des femmes. Notre Présidence travaillera ardemment à la protection des droits des femmes. Les événements de Cologne font réfléchir. Les femmes ont droit au respect de leur intégrité physique. Il est intolérable d’y porter atteinte. Tous les Etats membres se sont engagés en ce sens et le Conseil de l’Europe offre un cadre politique pour la protection et la promotion des droits des femmes. Les différents instruments du Conseil de l’Europe doivent être pleinement appliqués pour lutter contre les violences faites aux femmes. Nous allons nous concentrer sur ce sujet dans le cadre des priorités de notre Présidence. Les pays qui n’ont pas encore signé la Convention d’Istanbul doivent le faire sans plus tarder.

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, il nous faut maintenant arrêter là les questions à M. le Président du Comité des Ministres, que je remercie vivement.

Mme Schou, Vice-Présidente de l’Assemblée, remplace M. Agramunt au fauteuil présidentiel.

4. Débat libre

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle le débat libre.

Je vous rappelle que ce débat ne peut porter que sur des questions ne figurant pas à l’ordre du jour adopté ce matin.

Votre temps de parole, mes chers collègues, est limité à 3 minutes. Le débat libre se terminera à 17 h 30.

M. ÇAKIRÖZER (Turquie), porte-parole du Groupe socialiste* – Je suis un nouveau membre de cette honorable Assemblée, connue pour être la conscience de l’Europe depuis sa création. Je tenais à appartenir à cette Assemblée, que je considère comme notre maison commune. Je suis ravi de lutter à vos côtés pour les droits de l’homme, l’Etat de droit et la démocratie en Europe. Ma langue maternelle, le turc, étant désormais l’une des langues de travail officielles de l’Assemblée, ce qui m’honore, je me permettrai de poursuivre dans cette langue.

J’ai travaillé – c’était mon dernier poste – au journal Cumhuriyet, l’un des plus anciens quotidiens turcs. Son directeur de la publication, M. Can Dündar, et son chef du bureau d’Ankara sont en détention provisoire depuis soixante et un jours. Ils n’ont fait que leur travail de journalistes, mais ils sont accusés d’avoir divulgué des informations confidentielles et d’avoir soutenu des organisations terroristes. M. Jagland, Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, a présenté la situation au Comité des Ministres le 13 janvier.

Nous avons des problèmes avec la liberté de la presse en Turquie. De nombreux exemples en attestent, le dernier en date étant l’accusation de traîtrise adressée à certains professeurs d’université, tandis que d’autres étaient arrêtés, d’autres encore exposés au risque de perdre leur poste.

L’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme le souligne, la liberté d’expression fait partie des droits fondamentaux des individus. Comme le Secrétaire Général, M. Jagland, l’a rappelé, la lutte contre le terrorisme ne se justifie que si elle n’empêche pas de continuer de protéger la liberté d’expression. La liberté d’expression et la liberté de parole font partie des grandes valeurs du Conseil de l’Europe.

Il est donc fondamental de suivre de près la situation en Turquie et d’adopter les politiques appropriées.

LA PRÉSIDENTE* – Mme Zelienková, inscrite dans le débat comme porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. David DAVIES (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Nous sommes tous touchés par les réfugiés qui fuient la violence au Moyen-Orient. Mais le temps est venu de dire que l’on ne peut autoriser ces millions de personnes à venir en Europe sans veiller à établir certains freins et contrepoids. Il faut reconnaître que, dans bien des cas, ces personnes viennent de cultures totalement différentes de la nôtre et ont un point de vue tout autre sur les femmes et sur les homosexuels. Nous ne pouvons pas ne pas leur demander d’adopter les valeurs culturelles européennes, sinon nous courons à la catastrophe.

Nous commençons à observer le résultat désastreux de cette situation; pourtant, nous ne sommes pas prêts à y faire face. M. Mitov a évoqué tout à l’heure les incidents survenus à Cologne: en clair, des centaines de femmes ont été entourées par des milliers d’hommes qui ont tenté de se livrer à des attouchements sur elles – et c’est arrivé dans des villes européennes, chez nous! Mais personne ne veut en parler: la presse essaie de cacher les faits et la police n’a pas voulu dire ce qui s’était passé. Pourtant, ce n’est pas en évitant ces sujets délicats que l’on résoudra le problème.

Les politiques doivent se réveiller. Il faut faire en sorte que les valeurs européennes s’appliquent à toute personne qui souhaite venir en Europe. Une femme devrait pouvoir se déplacer librement, aller où elle veut, vêtue comme elle l’entend, sans s’exposer à un danger. De même, les homosexuels ne devraient pas pouvoir être attaqués par des extrémistes religieux – je songe à ce qui s’est passé il y a quelques années dans le pub George and Dragon. De tels extrémismes ne sont pas acceptables.

Mais, comme dans les nombreux exemples d’agressions contre des juifs, on ne veut pas traiter ce problème en profondeur: il s’agit d’extrémistes musulmans et de personnes issues de cultures qui réservent aux juifs, aux homosexuels, aux femmes un traitement bien différent de celui auquel nous sommes en droit de nous attendre.

Nous devons être fiers de nos valeurs européennes et les diffuser sur notre continent, fiers de l’héritage de ceux qui ont défendu le droit des citoyens à décider eux-mêmes au lieu de se voir imposer des choses, qui ont lutté pour le droit des politiques comme nous, mais aussi des citoyens, à interroger les dirigeants spirituels et politiques, fiers de ceux qui se sont battus pour l’égalité entre les hommes et les femmes. Ce sont ces valeurs qui nous unissent. Or elles sont menacées comme jamais auparavant.

Réveillez-vous, hommes et femmes politiques! Si vous n’êtes pas prêts à faire face à ce problème, ce sont d’autres personnes qui agiront.

M. KÜRKÇÜ (Turquie), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – J’aimerais appeler votre attention sur le conflit et les violations des droits humains qui ont lieu dans le Sud de la Turquie – une région majoritairement habitée par des populations kurdes.

Dans ces régions, dans ces provinces, de nouvelles vagues de violence ont eu lieu après la suspension des pourparlers de paix entre le PKK et le Gouvernement turc. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe s’était saisie de ce dossier en 2013 dans le cadre du rapport d’avancement. Depuis, la violence s’est emparée des provinces et des villes kurdes. 150 civils au moins sont déjà morts et le nombre total de terroristes, d’après le Gouvernement turc, est important; mais jamais il n’admet qu’il y a eu des pertes civiles.

J’en appelle à cette Assemblée pour qu’elle assure un suivi de la situation en Turquie. Le monde occidental, les Etats-Unis, les pays européens sont restés aveugles à ce qui se passe en Turquie, tout cela pour pouvoir recourir à nos bases aériennes et pour que le pays continue à accueillir des réfugiés. Ces violations des droits de l’homme ont été ignorées en Europe!

J’en appelle à cette Assemblée pour qu’elle observe de très près ce qui se passe en Turquie: c’est un devoir, une obligation. Des mesures intérimaires ont été décidées par la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’aide à apporter aux civils dans les villes assiégées; or elles ont été refusées par le Gouvernement turc. Au moins trois personnes sont mortes en perdant leur sang alors qu’elles attendaient dans la neige l’arrivée des ambulances. On peut assister à cette tragédie sans rien faire, ou bien agir.

Le Comité des Ministres doit pouvoir intervenir dans ce processus afin de veiller à ce que le Gouvernement turc respecte les arrêts de la Cour européenne visant à apporter aide et refuge à ces personnes, et pour qu’il arrête ces violations flagrantes des droits humains en Turquie.

M. NIKOLOSKI («L’ex-République yougoslave de Macédoine»), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – C’est un honneur de m’exprimer au nom du Groupe PPE. L’Assemblée traite de différentes élections; des personnes nous ont élus pour les représenter, pour que nous parlions en leur nom, pour que nous partagions leurs visions, désirs, espoirs, attentes, et pour que nous travaillions pour elles.

Comme vous le savez, l’année dernière, l’ex-République yougoslave de Macédoine a été confrontée à des actions de l’opposition politique qui a publié de façon illégale du matériel d’écoute concernant les personnes au pouvoir dans le pays. Nous avons décidé de résoudre ce problème politique par un accord politique signé par les principaux partis politiques: il s’agit de l’Accord de Prizno de juillet. Cet accord a pour objectif de partager la responsabilité du Gouvernement dans l’organisation des élections, permettant ainsi à l’opposition d’obtenir un certain nombre de sièges. À la suite de cet accord, des élections se tiendront le 24 avril de cette année.

Toutefois, nous nous trouvons maintenant dans une situation sans précédent: l’Union démocrate sociale, parti d’opposition, veut boycotter les élections prévues. C’est tout à fait inouï! Il n’y a pas d’autre exemple, dans vos pays et parlements, d’une opposition qui fuirait les élections. En général, c’est le contraire: l’opposition demande toujours que l’on organise au plus vite d’autres élections et n’envisage jamais de les boycotter. J’espère que ces pratiques européennes seront adoptées par l’opposition de mon pays!

Les élections sont la partie la plus importante de toute démocratie, car c’est le jour où les citoyens choisissent leurs représentants. Aucun parti, aucune organisation ou institution ne peut bloquer ce processus. Je suis heureux que cette Assemblée ait décidé ce matin d’envoyer une mission d’observation le 24 avril afin d’assister aux élections parlementaires, montrant ainsi aux citoyens qu’ils sont à la tête du processus démocratique. J’invite chacun d’entre vous à observer ces élections: soyez attentifs car il est de la responsabilité de toutes les parties prenantes de faire de leur mieux afin que les élections soient démocratiques, libres et équitables.

Je tiens à vous rappeler l’intégration de mon pays à l’Otan: c’est une responsabilité conjointe du Gouvernement et des partis d’opposition. Nous espérons tous que les partis politiques qui ont signé l’accord en juillet le respecteront et participeront aux élections du 24 avril, permettant ainsi d’accélérer le processus d’intégration pour mon pays et ses citoyens.

Pourquoi avons-nous besoin de ces élections? Pourquoi maintenant? Parce que l’ex-République yougoslave de Macédoine en a besoin et que son peuple mérite un gouvernement qui puisse agir dans l’intérêt national sans le spectre d’une crise politique. Le moment est venu pour nous tous, aussi bien politiques que citoyens, de mettre de côté notre intérêt propre et de participer au processus démocratique qui est le nôtre.

Enfin, autre point essentiel, l’Europe se retrouve face à la plus grande crise humanitaire depuis la Seconde Guerre mondiale. La Macédoine est la première porte que passe la majorité des réfugiés arrivant chez nous. Nous avons donc besoin d’un gouvernement stable qui puisse canaliser ce flux et donner une approche humanitaire aux personnes subissant cette situation difficile. C’est important pour mon pays, mais également pour l’Europe et pour le monde; c’est pourquoi j’espère que cette Assemblée sera à même d’observer les élections.

M. ROCHEBLOINE (France) – Ici même, le 25 avril 2012, je défendais mon rapport sur la bonne gouvernance et l’éthique du sport. Quatre années se sont bientôt écoulées: qu’est-ce qui a changé? Si la Fédération internationale de football – la Fifa – nous montre bien qu’elle cherche à se réformer, que retiendra-t-on en faisant le bilan du temps passé? Quatre années! II s’agit de quatre années difficiles. Chacune d’entre elles a donné un peu plus l’image d’un football déconnecté de la réalité, d’un football bafoué, d’un football méprisé.

Rappelons-nous, l’an dernier, les arrestations de membres de son comité exécutif faisant la une des journaux du monde entier. Ces images ont profondément heurté les opinions publiques en Europe, désormais convaincues de l’existence d’un système de corruption et de blanchiment d’argent.

Le Conseil de l’Europe est dans son rôle lorsqu’il lutte contre les pratiques illégales car elles sont autant de graves menaces pour nos démocraties.

La Fifa évoque de prétendus investissements directs dans le football en citant la construction de sièges de fédérations. Sachant que l’organisation à elle seule d’une coupe du monde représente la moitié des dépenses quadriennales de la Fifa, soit plus de deux milliards de dollars, où sont les projets sociaux, culturels ou éducatifs en lien avec la pratique sportive?

Le football est le sport le plus populaire de la planète et 1’Europe en est le berceau. Ne le laissons pas sombrer! La Fifa doit revoir en profondeur sa position.

En ces temps difficiles pour la France, l’Europe et le monde, le football, ce loisir presque insignifiant aux yeux de la politique, n’en occupe pas moins une place importante dans la vie de bon nombre de nos concitoyens. Albert Camus nous disait même : «Il n’y a pas d’endroit dans le monde où l’homme est plus heureux que dans un stade de football», et il avait raison!

Lorsque Michel Platini vise publiquement l’indépendance de la commission d’éthique de la Fifa, cela ne devrait-il pas interpeller le mouvement sportif dans son ensemble? Les fédérations sportives sont-elles les mieux à même de juger des infractions à l’éthique et aux valeurs? Face à l’ampleur et la complexité des mécanismes en cause, ont-elles les moyens de déceler les actes de corruption et les conflits d’intérêts? L’injustice, même lorsqu’il s’agit des loisirs, est inacceptable.

L’éthique et les valeurs sont, de surcroît, des notions très subjectives: est-il légitime d’en laisser l’appréciation à la seule Fifa? Ne faudrait-il pas que la commission d’éthique soit rattachée à une institution extérieure comme la nôtre? Le Conseil de l’Europe a l’expertise et les compétences en la matière.

J’ajoute par ailleurs que le président de la commission des réformes de la Fifa est loin d’être neutre et indépendant à l’égard du président Blatter.

Faut-il rappeler que les critiques formulées par la Fifa au Conseil de l’Europe le 14 janvier 2015 ont été validées dans deux courriers de 2012 et 2014 signés par Jérôme Valcke, qui vient d’être limogé pour violation du code d’éthique: manque de «loyauté», «conflit d’intérêts», «acceptation et distribution de cadeaux et autres avantages». Rien de moins!

Combien de temps encore la Fifa va-t-elle échapper au contrôle des juges? Est-elle au-dessus des lois? Un délit sportif est un délit, et il doit être jugé par un tribunal. C’est une question de principe, qu’il est de notre devoir de rappeler inlassablement entre ces murs, car il en va de la défense du droit et de l’Etat de droit. Et pour tous ceux qui aiment le football, ce très beau sport, c’est bien entendu lui rendre ses lettres de noblesse que d’invoquer ses valeurs et ses fondements éthiques.

Mme CROZON (France) – Je me suis exprimée à de nombreuses reprises devant cette Assemblée pour regretter – par exemple à l’occasion des débats qui ont enflammé l’Espagne autour de l’IVG – l’absence de traduction explicite des droits sexuels et reproductifs dans les grands textes créateurs de droits au niveau international, et notamment dans la Convention européenne des droits de l’homme.

Qu’il s’agisse d’accès à la contraception ou à l’avortement, de prostitution, d’autodétermination en matière de genre, de procréation médicalement assistée ou de gestation pour autrui (GPA), les droits sexuels, et notamment ceux des femmes, sont interprétés de façon très différente et souvent contradictoire par les Etats membres du Conseil de l’Europe, alors même que ces droits me paraissent relever de libertés fondamentales qui ne peuvent être réduits à une question culturelle ou religieuse, car ils sont inhérents à la condition humaine.

Si notre Assemblée édicte régulièrement des recommandations sur l’interprétation de ces droits, c’est bien la Cour européenne des droits de l’homme, et elle-seule, qui est productrice de droits concrets. Et elle ne peut le faire qu’en interprétant d’autres principes. Je pense en particulier à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants, inscrite à l’article 3, au droit au respect de la vie privée, à l’article 8, ou encore à l’interdiction des discriminations, à l’article 14. Or, sur ces questions, nous le savons bien, ces principes entrent en contradiction les uns avec les autres.

C’est notamment le cas en matière de gestation pour autrui. La France, vous le savez, reste attachée à un principe de prohibition, affirmé par l’article 16-7 de notre Code civil, qui frappe toute convention de GPA de nullité, en application de l’article 16 qui proclame l’inviolabilité du corps humain et l’interdiction d’en tirer un quelconque droit patrimonial.

Mais en l’absence de consolidation de ces principes au niveau international, nous sommes en réalité dépourvus de toute capacité à les faire respecter. Nous voyons bien que, sur cette question, comme c’est également le cas sur la prostitution, la PMA ou l’avortement, nos législations sont régulièrement mises en concurrence par la mondialisation des échanges et l’émergence d’une nouvelle forme de tourisme sexuel et reproductif. Ce ne sont plus des principes universels qui sont ici créateurs de droits: la loi du marché met les Etats devant le fait accompli. Or la loi du marché, ce n’est rien d’autre que la loi de la jungle, qui transforme les plus faibles, les plus démunis, et le plus souvent les femmes, en objets au service des désirs des puissants, des riches, le plus souvent des hommes.

Je défends pour ma part deux principes simples: tout d’abord, le droit des femmes à disposer librement de leur corps, ensuite, une limite à ce premier principe dans l’interdiction faite à quiconque de disposer du corps d’autrui.

Nous ne pouvons plus, sur ces questions, nous contenter de recommandations qui ne règlent rien à l’incertitude juridique pesant sur les droits sexuels et reproductifs. Nous devons défendre un nouveau protocole qui amenderait la Convention en précisant l’exacte portée de ces droits, opposables à tous nos Etats.

M. FARMANYAN (Arménie)* – Dans un monde globalisé, il est d’autant plus important d’être conscient des différentes interprétations qui sont faites de l’Histoire, de l’influence de cette dernière et de ces interprétations sur la politique et les événements du monde actuel. Très souvent, les politiques se servent et abusent de l’Histoire. Je souhaite que l’on prenne conscience de cette tendance au révisionnisme, car il faut lutter contre.

L’Histoire est un dialogue continu entre le passé et le présent, mais le passé est parfois interprété de façon changeante, en fonction des nouvelles réalités politiques. En particulier dans notre région du monde, mais aussi au-delà, l’Histoire est politisée pour servir les intérêts de certains gouvernements, particulièrement de forme autocratique, qui tentent de consolider leur pouvoir en recourant à des mécanismes en flagrante contradiction avec les valeurs du Conseil de l’Europe. La Turquie n’est en rien une exception; la liste de ces pays est longue.

Une meilleure connaissance du passé est donc nécessaire. Il faut soutenir ceux qui élèvent la voix pour nous parler de l’histoire réelle plutôt que de chercher à en abuser.

Mme DURRIEU (France) – L’accord de Vienne sur le nucléaire signé au mois de juillet 2015, et qualifié d’historique, avait pour objectif de mettre un terme au programme militaire nucléaire de l’Iran, en limitant la capacité nucléaire de ce pays et son accès à la bombe: 5 000 centrifugeuses, un seul site d’enrichissement d’uranium, à Natanz, une limite fixe à l’enrichissement de 3,67 %, la neutralisation du réacteur d’Arak. Autant de mesures importantes qui imposaient une certaine transparence – c’est le rôle de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) – et qui pouvaient conduire, s’ils étaient respectés, à la levée des sanctions.

Cet accord est entré en vigueur le 18 octobre 2015. C’est un moment historique. L’AIEA a considéré que l’Iran avait rempli ses obligations et que la levée des sanctions principales pouvait être immédiate. L’accord, sous cette forme, a été approuvé par le Parlement iranien et le Congrès américain. Un certain nombre de sanctions sont toutefois maintenues, notamment dans les domaines du terrorisme et des droits de l’homme, jusqu’en 2020-2023.

Voilà donc un accord important, que le président Rohani a qualifié de page nouvelle de l’histoire de l’Iran.

Le président Obama, prudent mais tout de même enthousiaste, a évoqué les profondes différences qui subsistent encore. Mais nous, au sein du Conseil de l’Europe, nous devons nous réjouir de cet accord qui limite le nucléaire et la prolifération et annonce le retour de l’Iran dans le concert des nations, car il en est l’un des acteurs essentiels. Émettons le vœu, au regard de son histoire, de sa culture et de la place qu’il va occuper et qu’il occupe déjà dans la région, qu’il en soit un acteur constructif.

Tant mieux que le dialogue soit ouvert! J’espère que la commission des questions politiques pourra envoyer ses rapporteurs, dont je suis, en Iran dans les meilleurs délais.

LA PRÉSIDENTE* – M. Zourabian, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Je tiens à aborder un sujet important sur lequel nous ne saurions nous taire.

Nous avons déjà parlé de l’opposition en Russie. Boris Nemtsov a été assassiné en plein centre de Moscou, à quelques pas du Kremlin, mais ce n’est pas le seul exemple. On voit bien comment est traitée l’opposition en Fédération de Russie sous Poutine.

Des enquêtes menées par la justice britannique sur le cas de Litvinenko – et il ne s’agit pas d’élucubrations politiques ou de conclusions d’émissions de grande écoute –, il ressort que ce dernier a été tué par le régime de Poutine, notamment par une personne qui est membre de la Douma d’Etat et siège dans cet organe législatif important de la Fédération de Russie, aux côtés de parlementaires qui ont voté en faveur de l’occupation par les troupes russes d’une partie de l’Ukraine!

Toutes ces affaires ont fait l’objet d’enquêtes. Mais si se pencher sur des crimes perpétrés par des groupes criminels est une chose, se pencher sur des affaires organisées par le Président de la Russie, à savoir Poutine, et ses services secrets, est autre chose.

Pourquoi les représentants russes ne sont-ils pas là? Ont-ils peur de répondre à nos questions? Pourtant, il faudra bien qu’ils répondent sur le sort de Boris Nemtsov et de Nadiia Savchenko, car ce sont de vraies tragédies.

Des protestations se sont élevées dans les prisons russes et, quand on voit qu’en deux ans, la justice russe n’a pas été capable de faire la lumière sur une seule affaire, cela illustre parfaitement le fait que le régime russe est un régime terroriste, organisé au plus haut niveau par Poutine et ses services.

C’est la raison pour laquelle il nous faut agir. Nous ne devons pas rester silencieux et devons prendre des résolutions, car certaines résolutions peuvent diviser les organisations terroristes qui souhaitent imposer leur loi sur le continent tout entier.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – Nul ne peut nier le fait qu’aujourd’hui, la communauté internationale se trouve confrontée à de multiples menaces: les économies des différents pays subissent des dommages liés à des processus nouveaux et aux conséquences de la crise financière, et se posent également tous les problèmes de la confrontation dans l’arène politique.

On assiste, par ailleurs, à des discriminations religieuses, raciales et à des actes terroristes qui ne peuvent nous laisser indifférents. Je pense notamment aux actes terroristes de l’année dernière, qui nous ont prouvé qu’aucun pays, qu’aucune nation n’était à l’abri d’événements de ce type. Dès lors, la coopération, la bonne foi, le respect mutuel, le respect de valeurs différentes sont plus importants que jamais.

Dans l’environnement actuel, alors que la religion est utilisée par des groupes pour semer la haine entre les nations, il importe de susciter le dialogue entre les différentes religions et cultures. La tolérance religieuse devient une condition nécessaire pour assurer la sécurité dans le monde moderne. Les gouvernements nationaux se doivent de veiller à la question, sachant que le renforcement de la tolérance religieuse est le meilleur moyen de garantir une paix durable et d’éviter les conflits fondés sur la religion.

Mesdames et Messieurs, le seul choix qui s’offre à nous est la coopération. C’est en nous appuyant sur la coopération et le respect mutuel, en créant les conditions nous permettant de mettre en œuvre nos intérêts, en abandonnant les tensions derrière nous et en nous fondant sur la bonne foi que nous pourrons résoudre les nombreux problèmes qui se posent aujourd’hui.

La République d’Azerbaïdjan a toujours conduit une politique étrangère fondée sur ces valeurs. Forte de son expérience, elle a montré que la tolérance et le respect mutuel des valeurs nationales et spirituelles sont la meilleure façon de créer un environnement paisible et sûr pour les représentants des différentes religions et leurs traditions.

Aujourd’hui, dans mon pays, les membres des communautés chrétiennes et juives ont les mêmes droits que la majorité musulmane. L’Azerbaïdjan est un véritable centre de dialogue interculturel, c’est un lieu important pour le débat sur les questions humanitaires. Je suis ravie de vous annoncer que le président de la République d’Azerbaïdjan a déclaré l’année 2016 comme étant l’année du multiculturalisme dans notre pays. Cela montrera au monde le visage de tolérance et de multiculturalisme qui est celui de l’Azerbaïdjan.

Cela montre toute l’importance que notre pays accorde à la paix dans le monde, à l’harmonie et au dialogue entre les cultures. J’espère que ce message de Bakou sera apprécié à sa juste valeur et que ces initiatives trouveront des réponses adéquates.

Je conclurai en disant que, dans un monde moderne, il n’existe pas d’alternative à la tolérance et au multiculturalisme. Nous pouvons y parvenir puisque l’Europe est un espace commun pour nous tous.

M. NEGUTA (République de Moldova)* – Je comptais évoquer la situation dans mon pays, mais notre collègue M. Xuclà, lors de la séance d’ouverture de notre session, a contesté les pouvoirs de la délégation de la République de Moldova. J’utiliserai donc mon intervention pour éclaircir ce sujet.

La République de Moldova compte cinq représentants et cinq suppléants. Aujourd’hui, dans cet hémicycle, se trouvent quatre membres de notre délégation: trois représentants et un suppléant.

En fait, il n’y a aucun problème concernant notre délégation. Une décision a été prise par le bureau de notre parlement parce que M. Igor Corman a quitté ce dernier. En conséquence, notre bureau a procédé à des changements au sein de notre délégation. C’est ainsi que Mme Buliga devient membre représentant et que M. Sergiu Sîrbu est nommé suppléant.

Par ailleurs, les deux sièges de suppléant non pourvus ne posent pas problème non plus puisque, au moment de la formation de notre délégation, un des cinq partis parlementaires, le parti libéral, avait refusé de proposer des candidats mais, depuis, le parti libéral a adressé une lettre au bureau du parlement comportant les noms des membres qu’il propose pour cette délégation.

Notre session parlementaire s’ouvre dans les premiers jours de février. Tous les changements que je vous ai exposés ont été adoptés à 80 % ou à 100 % par notre parlement. Il n’y a donc aucun problème en ce qui concerne les pouvoirs de la délégation de la République de Moldova. Je souhaite demander à celui de nos collègues qui a contesté les pouvoirs et aux autres membres de la commission du Règlement la chose suivante: demain, lors de la réunion de la commission, prenez s’il vous plaît en considération les informations que je viens de vous donner.

Je le répète, il n’y a donc pas de problème avec les pouvoirs de la délégation moldove. En revanche, il y a d’autres problèmes plus importants en Moldavie et nous devrions chercher ensemble à les résoudre.

M. Geraint DAVIES (Royaume-Uni)* – Les principes fondamentaux du Conseil de l’Europe – la démocratie, l’Etat de droit et les droits de l’homme – sont menacés par l’accord de partenariat transatlantique en cours de négociation. Une partie de cet accord, conclu avec le Canada, peut être mis en œuvre à titre provisoire, sans même avoir été ratifié par les pays parties, dont le Royaume-Uni. Je suis favorable à davantage de commerce – et à l’Union européenne – mais, avec de tels accords, de grandes compagnies peuvent attaquer des gouvernements régulièrement élus au motif que ces derniers votent des lois visant à protéger ses citoyens, l’environnement et la santé publique – on a encore vu ce qu’il en était après la décision d’Obama concernant le projet d’oléoduc entre le Canada et les Etats-Unis.

Certains gouvernements comme celui du Royaume-Uni disent qu’ils n’ont pas été poursuivis, mais c’est parce que les accords en vigueur consistent à envoyer des investissements en dehors de la Grande-Bretagne. Quand les sociétés américaines – en particulier celles qui sont spécialisées dans la fracturation hydraulique – seront autorisées à attaquer la Grande-Bretagne et d’autres pays européens, elles le feront, même une fois que des lois protégeant l’environnement auront été prises, à la suite de la COP 21 à Paris. En effet, le chapitre du projet de partenariat transatlantique concernant les investissements donne aux investisseurs la possibilité de détourner les accords environnementaux. Avec ce traité, la loi du commerce prévaut sur le droit des différents pays, sans tenir compte de l’intérêt public, y compris en ce qui concerne l’environnement – on le voit par exemple dans l’affaire opposant Santa Elena au Costa Rica. Le traité transatlantique supplante les cours suprêmes d’Etats souverains – nous avons vu que la Deutsche Bank l’utilisait contre le Sri Lanka. Cet accord et d’autres du même type nous engagent pour l’avenir, alors même qu’ils sapent la souveraineté populaire et la démocratie.

Certes, il faut que les investisseurs soient protégés par le droit, mais il ne faut pas que le commerce passe avant le respect de la démocratie, de l’environnement et des obligations en matière de droits de l’homme. Oui, faisons du commerce, mais ne bradons pas la primauté du droit, les droits de l’homme et la démocratie.

LA PRÉSIDENTE* - Mme Spadoni, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. BADEA (Roumanie)* – Je voudrais vous parler de la situation extrêmement préoccupante d’une famille, en Norvège. Il s’agit de la famille Bodnariu – le mari, Marius, est roumain, et la femme, Ruth, norvégienne; ils ont cinq enfants. Les autorités du comté de Sogn og Fjordane en charge de la protection de l’enfance ont décidé de séparer les enfants de leurs parents. Une plainte déposée auprès de la police évoque un endoctrinement religieux dont les enfants auraient été victimes, alors même que la loi norvégienne ne reconnaît pas cette incrimination. En définitive, la décision rendue évoque de mauvais traitements supposés, dont la preuve n’a d’ailleurs pas été apportée.

Plus grave: l’un des enfants était âgé de trois mois seulement au moment de la séparation. Il a ainsi été privé de l’allaitement et de l’affection maternels, dont on sait combien ils sont nécessaires à cet âge. La mesure prise par les services de protection de l’enfance – Barnevernet en norvégien – est totalement abusive et disproportionnée, d’autant que la législation norvégienne prévoit que les mesures de séparation des enfants et des parents ne peuvent être prises qu’en tout dernier recours, ce qui n’a pas été le cas. Des étapes ont en effet été brûlées: pas d’enquête sociale, de médiation ou encore de rencontre avec des psychologues, qui auraient pourtant permis d’établir les faits et de légitimer ensuite une décision prise en toute de connaissance de cause. On ne peut décider aussi facilement de diviser une famille en invoquant le principe de confidentialité et l’intérêt supérieur de l’enfant.

D’autres situations de ce type se sont déjà produites, qui ont mené elles aussi à la séparation des enfants et des parents, et il s’agissait toujours de familles étrangères. On compte environ 50 000 cas similaires en Norvège, dont 10 000 ont conduit à la séparation des parents et des enfants.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – Je voudrais évoquer devant l’Assemblée parlementaire une question pour ainsi dire symbolique, car il s’agit des emblèmes des drapeaux de collectivités plus ou moins grandes. La manière dont ces symboles sont créés conduit à soulever également des questions d’ordre constitutionnel.

La question que je voudrais poser est la suivante: les communautés locales ont-elles le droit fondamental de prendre des décisions concernant leurs propres affaires, voire de violer le principe de subsidiarité?

Le 13 mai dernier, le Parlement roumain a adopté une loi relative au choix et à l’utilisation des drapeaux des municipalités et des comtés. Bien que la Roumanie ait ratifié la Charte européenne de l’autonomie locale, ce texte prévoit que les drapeaux et écussons doivent être approuvés par le gouvernement, établit un certain nombre de restrictions à leur utilisation et punit d’amendes ceux qui ne respectent pas ces dispositions.

La loi dispose également que si l’on utilise un autre drapeau que ceux adoptés par le gouvernement sans préciser où, quand et dans quelles circonstances, outre que la personne sera condamnée à une amende, ce drapeau sera confisqué.

La Commission européenne de lutte contre le racisme et l’intolérance (Ecri) rapporte que les autorités roumaines sont engagées dans une guerre de plus en plus importante contre le drapeau du Pays sicule. Et là, une étape supplémentaire a été franchie. Nous devons également vérifier comment ces drapeaux sont utilisés.

Ce sont des exemples qui prouvent que la Roumanie est un pays qui s’est engagé à respecter les valeurs européennes et les instruments du Conseil de l’Europe, mais qui, dans les faits, les viole. C’est dans l’intérêt du Conseil national sicule que tous les thèmes de la vie publique en Roumanie soient en accord avec les résolutions et les recommandations du Conseil de l’Europe. Je suis convaincue que cette nouvelle norme roumaine ne respecte pas les dispositions de la Charte européenne de l’autonomie locale ni les principes de base de la démocratie et de l’Etat de droit.

Le Conseil national sicule doit traiter de cette question avec les autorités roumaines pour parvenir à une solution adaptée. Le Conseil de l’Europe devrait demander l’avis de la Commission de Venise sur ce point pour aider les autorités roumaines à faire marche arrière et à œuvrer pour la démocratie.

M. JAPARIDZE (Géorgie)* – Je voudrais tout d’abord féliciter Pedro Agramunt pour son élection au poste de Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Son expérience et sa patience permettront de sensibiliser la communauté internationale à l’action de notre Organisation en faveur de la démocratie.

Le transfert des pouvoirs au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe nous fait réfléchir au passé et à l’avenir. Le Président Agramunt a mentionné la Géorgie à plusieurs reprises dans son discours d’inauguration et il est vrai que l’Assemblée parlementaire a investi beaucoup de ses ressources dans mon pays. Il n’est pas parfait, mais qui l’est? Nous avons progressé et ces progrès ont été reconnus par les institutions européennes.

La Géorgie s’engage pour devenir une véritable démocratie, et pour ce faire nous avons besoin de l’Assemblée parlementaire. La Géorgie doit rompre avec l’époque où chaque transfert de pouvoir était considéré comme un changement de régime. Nous avons besoin d’un vrai débat sur les politiques à mettre en œuvre. Nous devons présenter nos programmes et laisser au peuple le soin de décider. Nous n’avons pas besoin de personnes qui placent leur avenir politique au-dessus des intérêts de notre pays. Or le mandat de l’Assemblée parlementaire est de veiller à ce que les élections soient justes et équitables; nous nous réjouissons d’ailleurs de toutes les missions d’observation des élections et de toutes les missions effectuées sur le terrain.

Si des faits dérangeants sont découverts, il convient d’abord de nommer les individus qui en sont coupables; mais il ne s’agit de pas dénoncer le peuple géorgien. Il faut des faits, pas des rumeurs.

M. Agramunt a parlé, dans son discours, d’une personne dont il a affirmé qu’elle était un prisonnier politique. Cette personne a été poursuivie pour abus de fonds publics. Suis-je satisfait que cette personne soit incarcérée? Non, bien sûr. Mais personne n’est au-dessus de la loi en Géorgie. La Géorgie n’est pas un «petit garçon», mais un Etat indépendant et souverain. Et il est important de le rappeler, notamment en année électorale.

L’objectif de l’Assemblée parlementaire est de consolider la démocratie en Géorgie, mais pas de manière partisane. Il convient de renforcer le pouvoir des citoyens, les institutions démocratiques, de solidifier le système de pouvoirs et de contre-pouvoirs; nous avons besoin d’élections. C’est tout cela qui nous unit – et non pas qui nous divise. C’est la raison pour laquelle nous appartenons à cette Organisation. Nous avons tous des préférences et des faiblesses, mais ce sont des questions personnelles. Les groupes politiques, les leaders, les présidents, les vice-présidents ont un mandat et des devoirs: servir la démocratie et les droits de l’homme.

M. YATIM (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Qui parmi nous n’a pas été secoué par l’image de la dépouille d’un petit garçon syrien sur une plage turque, le visage dans le sable? Sa famille avait fui les bombardements de la ville de Kobané. Qui parmi nous n’a pas été secoué par les images de personnes affamées et réduites à l’état animal – images de la ville de Madaya, assiégée par le régime syrien de Bachar-el-Assad et ses complices, des milices iraniennes et libanaises?

Le manque de nourriture a entraîné des cas de malnutrition sévère dans cette ville du sud de la Syrie. Les 40 000 habitants mangent des feuilles d’olivier, de mûrier et improvisent des bouillons en mélangeant des épices à l’eau chaude. Certains se sont même résignés à manger des chiens et des chats. Nous avons pu voir des images de corps squelettiques d’enfants rongés par la malnutrition. À qui incombe la responsabilité? On ne peut que pointer du doigt le régime de Bachar el-Assad et ses alliés, les groupes extrémistes et les responsables politiques de la région.

Mais il serait naïf ne de pas s’intéresser aux racines profondes du problème, à savoir de la crise politique et humanitaire en Syrie et dans toute la région. Cette crise n’est que le sous-produit tragique d’une politique de guerre menée depuis l’invasion de l’Irak en 1991, à laquelle il n’a pas encore été mis fin.

Ce que l’on récolte aujourd’hui, c’est ce que l’on a semé hier. Les menaces qui pèsent sur la stabilité régionale de demain découlent de nos maladresses politiques d’aujourd’hui. Rien n’est arbitraire dans l’histoire, nous enseigne le philosophe allemand Hegel. Il est temps de relire l’histoire des trois dernières décennies. Une histoire qui a été marquée par un double langage, par un laxisme envers les dictatures de la région, par une logique d’intérêts des grandes puissances qui a primé sur la logique de la démocratie et des droits de l’homme. Il est temps de mettre fin à la dualité entre la théorie et la pratique. C’est le seul chemin qui permettra de redonner confiance aux populations de la région dans le modèle démocratique. La sécurité démocratique, la démocratie par la sécurité sont la base de toute stabilité et de toute sécurité.

LA PRÉSIDENTE* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs.

Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent transmettre, dans les 4 heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance, pour publication au compte rendu. Cette transmission doit être effectuée, dans la mesure du possible, par voie électronique.

Le débat libre est clos.

5. Prochaine séance publique

LA PRÉSIDENTE* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté ce matin par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 17 h 30.

SOMMAIRE

1. Modifications dans la composition des commissions

2. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

Orateurs: MM. Fischer, Schennach, Xuclà, Liddell-Grainger, Kox, Mmes Bartos, Durrieu

Réponse de Mme Brasseur, rapporteure

Votes sur le rapport d’activité

3. Communication du Comité des Ministres

M. Mitov, ministre des Affaires étrangères de la Bulgarie, Président du Comité des Ministres

Questions: M. Vareikis, Mmes Mehmeti Devaja, Lundgren, Earl of Dundee, M. Hunko, Mmes Duranton, Hoffmann, M. Rafael Huseynov, Mme Maij

4. Débat Libre

Orateurs: MM. Çakirözer, David Davies, Kürkçü, Nikoloski, Rochebloine, Mme Crozon, M. Farmanyan, Mme Durrieu, M. Sobolev, Mme Gafarova, MM. Neguta, Geraint Davies, Badea, Csenger-Zalán, Japaridze, Yatim

5. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d’un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Tasmina AHMED-SHEIKH*

Brigitte ALLAIN/Pascale Crozon

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON*

Luise AMTSBERG*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Sirkka-Liisa ANTTILA

Ben-Oni ARDELEAN*

Iwona ARENT

Khadija ARIB/Marit Maij

Volodymyr ARIEV

Anna ASCANI*

Mehmet BABAOĞLU

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE/Giorgi Kandelaki

Gérard BAPT/Anne-Yvonne Le Dain

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Guto BEBB*

Marieluise BECK

Ondřej BENEŠIK*

Levan BERDZENISHVILI*

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA*

Włodzimierz BERNACKI

Anna Maria BERNINI/Claudio Fazzone

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ

Gülsün BİLGEHAN

Tobias BILLSTRÖM/Kerstin Lundgren

Oleksandr BILOVOL

Ľuboš BLAHA*

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN

Tilde BORK/Christina Egelund

Mladen BOSIĆ*

Anne BRASSEUR

Piet De BRUYN

Margareta BUDNER

Utku ÇAKIRÖZER*

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO*

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI

Anastasia CHRISTODOULOPOULOU*

Lise CHRISTOFFERSEN

Paolo CORSINI

David CRAUSBY/Lord George Foulkes

Yves CRUCHTEN

Zsolt CSENGER-ZALÁN

Katalin CSÖBÖR/Mónika Bartos

Geraint DAVIES

Joseph DEBONO GRECH*

Renata DESKOSKA

Alain DESTEXHE

Manlio DI STEFANO

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ*

Namik DOKLE

Jeffrey DONALDSON/David Davies

Elvira DROBINSKI-WEIß

Daphné DUMERY*

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON

Josette DURRIEU

Mustafa DZHEMILIEV

Mikuláš DZURINDA/Darina Gabániová

Lady Diana ECCLES*

Markar ESEYAN

Franz Leonhard EẞL

Nigel EVANS

Samvel FARMANYAN

Joseph FENECH ADAMI

Cătălin Daniel FENECHIU*

Doris FIALA/Elisabeth Schneider-Schneiter

Daniela FILIPIOVÁ*

Ute FINCKH-KRÄMER

Axel E. FISCHER*

Bernard FOURNIER

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Pierre-Alain FRIDEZ

Martin FRONC

Sahiba GAFAROVA

Sir Roger GALE*

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON*

Iryna GERASHCHENKO

Tina GHASEMI*

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Carlos Alberto GONÇALVES

Oleksii GONCHARENKO

Rainer GOPP

Alina Ștefania GORGHIU*

Sylvie GOY-CHAVENT

François GROSDIDIER/Yves Pozzo Di Borgo

Dzhema GROZDANOVA

Gergely GULYÁS*

Emine Nur GÜNAY*

Jonas GUNNARSSON*

Antonio GUTIÉRREZ

Maria GUZENINA/Olli-Poika Parviainen

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV/Sevinj Fataliyeva

Andrzej HALICKI

Alfred HEER

Gabriela HEINRICH*

Michael HENNRICH/Sybille Benning

Martin HENRIKSEN/Rasmus Nordqvist

Françoise HETTO-GAASCH/Serge Wilmes

John HOWELL*

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER/Barbara Rosenkranz

Andrej HUNKO

Rafael HUSEYNOV

Ekmeleddin Mehmet İHSANOĞLU

Florin IORDACHE*

Denis JACQUAT/Frédéric Reiss

Gediminas JAKAVONIS/Egidijus Vareikis

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE

Andrzej JAWORSKI/Jacek Osuch

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN*

Frank J. JENSSEN

Florina-Ruxandra JIPA/Viorel Riceard Badea

Ögmundur JÓNASSON

Aleksandar JOVIČIĆ*

Anne KALMARI

Erkan KANDEMIR

Mustafa KARADAYI*

Marietta KARAMANLI/Jean-Claude Frécon

Niklas KARLSSON/Azadeh Rojhan Gustafsson

Nina KASIMATI/Evangelos Venizelos

Vasiliki KATRIVANOU*

Ioanneta KAVVADIA

Filiz KERESTECİOĞLU DEMİR*

İlhan KESİCİ*

Danail KIRILOV

Bogdan KLICH*

Manana KOBAKHIDZE

Haluk KOÇ/Metin Lütfi Baydar

Željko KOMŠIĆ*

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR/Brynjar Níelsson

Ksenija KORENJAK KRAMAR

Attila KORODI

Alev KORUN*

Rom KOSTŘICA*

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Florian KRONBICHLER*

Julia KRONLID/Johan Nissinen

Eerik-Niiles KROSS*

Talip KÜÇÜKCAN

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Inese LAIZĀNE

Pierre-Yves LE BORGN’*

Jean-Yves LE DÉAUT

Luís LEITE RAMOS

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE*

Ian LIDDELL-GRAINGER*

Georgii LOGVYNSKYI*

Filippo LOMBARDI

François LONCLE*

George LOUKAIDES

Yuliya L’OVOCHKINA

Philippe MAHOUX

Muslum MAMMADOV/Rovshan Rzayev

Thierry MARIANI

Soňa MARKOVÁ/Pavel Holík

Milica MARKOVIĆ*

Duarte MARQUES*

Alberto MARTINS*

Meritxell MATEU

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE

Ermira MEHMETI DEVAJA

Evangelos MEIMARAKIS*

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY*

Jean-Claude MIGNON/André Schneider

Marianne MIKKO*

Olivia MITCHELL*

Arkadiusz MULARCZYK/Daniel Milewski

Thomas MÜLLER*

Oľga NACHTMANNOVÁ*

Hermine NAGHDALYAN

Marian NEACȘU/Titus Corlăţean

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH*

Miroslav NENUTIL

Michele NICOLETTI

Aleksandar NIKOLOSKI

Julia OBERMEIER/Volkmar Vogel

Marija OBRADOVIĆ

Žarko OBRADOVIĆ

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Suat ÖNAL

Ria OOMEN-RUIJTEN*

Joseph O’REILLY*

Kate OSAMOR*

Tom PACKALÉN*

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS

Ganira PASHAYEVA

Florin Costin PÂSLARU*

Jaana PELKONEN

Agnieszka POMASKA

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT

Mark PRITCHARD*

Gabino PUCHE*

Lia QUARTAPELLE PROCOPIO*

Carmen QUINTANILLA

Kerstin RADOMSKI*

Christina REES/Baroness Doreen Massey

Mailis REPS*

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE

Soraya RODRÍGUEZ

Helena ROSETA*

René ROUQUET

Alex SALMOND*

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Milena SANTERINI*

Nadiia SAVCHENKO/Boryslav Bereza

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Paul SCHNABEL

Ingjerd SCHOU

Koos SCHOUWENAAR*

Nico SCHRIJVER

Frank SCHWABE

Predrag SEKULIĆ*

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV*

Bernd SIEBERT

Adão SILVA*

Valeri SIMEONOV*

Andrej ŠIRCELJ

Arturas SKARDŽIUS

Jan ŠKOBERNE/Anže Logar

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK

Lorella STEFANELLI/Gerardo Giovagnoli

Yanaki STOILOV

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE

Dominik TARCZYŃSKI

Damien THIÉRY

Antoni TRENCHEV*

Krzysztof TRUSKOLASKI

Goran TUPONJA/Snežana Jonica

İbrahim Mustafa TURHAN*

Konstantinos TZAVARAS*

Leyla Şahin USTA*

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN/Ingebjørg Godskesen

Petrit VASILI*

Imre VEJKEY/Rózsa Hoffmann

Stefaan VERCAMER

Birutė VĖSAITĖ

Nikolaj VILLUMSEN

Vladimir VORONIN*

Viktor VOVK

Nataša VUČKOVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ*

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER*

Jacek WILK

Andrzej WOJTYŁA

Morten WOLD

Bas van ‘t WOUT/Pieter Omtzigt

Gisela WURM

Serap YAŞAR

Leonid YEMETS*

Tobias ZECH

Kristýna ZELIENKOVÁ*

Marie-Jo ZIMMERMANN*

Emanuelis ZINGERIS

Naira ZOHRABYAN*

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Espagne*

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, République de Moldova / Valentina Buliga

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Pavlo UNGURYAN

Observateurs

Héctor LARIOS CÓRDOVA

Armando LUNA CANALES

Ulises RAMÍREZ NÚÑEZ

Partenaires pour la démocratie

Najan AL-ALSTAL

Hamidine ABDELALI

Hassan ARIF

Mohamed YATIM