FR16CR06

AS (2016) CR 06

SESSION ORDINAIRE DE 2016

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la sixième séance

Mercredi 27 janvier 2015 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 40 sous la présidence de M. Agramunt, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT* – La séance est ouverte.

M. SALMOND (Royaume-Uni)* – Rappel au Règlement! Je suis membre du bureau du Mémorial de l’Holocauste du Royaume-Uni. Ce lieu de mémoire assume une mission essentielle, celle d’éduquer les jeunes générations afin qu’elles ne répètent pas les tragiques erreurs du passé.

C’est pourquoi, lors de la cérémonie qui s’est tenue tout à l’heure au sein du Palais de l’Europe pour marquer la Journée internationale de commémoration des victimes de l’Holocauste, j’ai été particulièrement choqué par les attaques de l’ambassadeur d’Israël à l’égard de l’Iran. Les interventions de politique internationale n’ont pas leur place dans une commémoration de ce type. Je tenais à le rappeler.

LE PRÉSIDENT* – L’Assemblée a pris note de votre intervention, Monsieur Salmond, mais elle ne constituait pas un rappel au Règlement.

1. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT* - Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2016) 01 Addendum 5.

En l’absence d’opposition, elles sont adoptées.

2. Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes
et les valeurs du Conseil de l’Europe (Procédure d’urgence)
Les combattants étrangers en Syrie et en Irak
(Débat conjoint)

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle notre débat conjoint.

Le premier rapport, «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe» (Doc. 13958), qui est examiné dans le cadre de la procédure d’urgence, sera présenté par M. Kox au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie. M. Le Borgn’ présentera l’avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc. 13960), et Mme Bilgehan présentera l’avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination (Doc. 13966).

Le second rapport sur «Les combattants étrangers en Syrie et en Irak» (Doc. 13937) sera présenté par M. Van der Maelen, rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie. M. Omtzigt présentera l’avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme (Doc. 13959).

Enfin, nous aurons le plaisir d’entendre M. Harlem Désir, secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes de la France.

Je rappelle que les rapporteurs disposent d’un temps de parole total de 13 minutes, qu’ils peuvent répartir à leur convenance entre la présentation de leur rapport et la réponse aux orateurs.

M. KOX (Pays-Bas), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Je souhaite chaleureusement la bienvenue au ministre français dans ce débat.

Personne ici ne sait encore que mon troisième petit-fils est né il y a quelques heures. J’ai écrit à mon fils et à ma belle-fille, en citant une belle chanson des Jefferson Airplane que j’aime beaucoup, que j’espérais qu’il verrait des choses qui rendraient sa vie heureuse. Nous souhaitons tous, je crois, que nos petits-enfants aient une chance d’avoir une vie heureuse. Or on peut faire en sorte de mener une vie heureuse, mais ce n’est pas une garantie: il y faut aussi des circonstances extérieures.

Il y a soixante-quinze ans, le président des Etats-Unis de l’époque explicitant les conditions requises pour que tous aient une chance de vivre une vie heureuse, mentionnait ces quatre libertés fondamentales: la liberté d’expression, la liberté d’adorer Dieu comme on l’entend, le fait d’être libéré du besoin et le fait d’être libéré de la peur. Neuf ans plus tard, en 1950, le Conseil de l’Europe précisait ces libertés fondamentales dans la Convention européenne des droits de l’homme et, plus important encore, les garantissait: tous les Etats membres qui ont signé et ratifié la Convention se sont engagés à assurer et à défendre les droits fondamentaux qu’elle consacre.

Les attentats terroristes qui ont récemment frappé nos sociétés sont des attaques contre les libertés et les droits qui donnent à chaque citoyen de nos Etats la même chance d’avoir une vie heureuse. Voilà pourquoi nous devons fermement défendre les valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe et de cette Assemblée, telles qu’elles sont formulées dans la Convention européenne des droits de l’homme. Nous n’en avons pas seulement le droit, nous y sommes obligés. Car, si nous ne le faisons pas, nos petits-enfants qui naissent aujourd’hui n’auront pas une véritable chance de mener une vie heureuse. La réaction de nos Etats au déferlement d’horribles attentats terroristes que nous avons subis ces dernières années est donc tout à fait appropriée, et je la soutiens résolument.

Nous avons tous été témoins de ce qui s’est passé il y a peu en France. J’ai vu à la télévision des gens se faire massacrer par des terroristes qui veulent nous intimider, nous terroriser, créer un climat de peur – un climat où nos libertés fondamentales pourraient être sous pression.

Au cœur de notre débat se pose donc la question suivante: comment, en défendant nos libertés fondamentales comme c’est notre devoir, veiller à protéger les valeurs et les normes fondamentales du Conseil de l’Europe? En d’autres termes, comment ne pas tomber dans le piège qui consisterait, en voulant protéger nos libertés fondamentales, à les limiter, les violer, voire les supprimer? Car ce serait une ultime victoire pour ceux qui attaquent nos sociétés.

Dans mon rapport, je formule 13 propositions qui pourraient nous aider à concilier ces deux exigences: lutter contre le terrorisme et défendre les normes du Conseil de l’Europe. Vous les trouverez à la fin du projet de résolution; j’espère que vous les appuierez.

Mon rapport a reçu le soutien quasi unanime de la commission des questions politiques et a été étudié de très près par la commission des questions juridiques, ainsi que par la commission sur l’égalité et la non-discrimination. Il semble que le projet de résolution soit jugé pertinent.

Quelles conclusions pouvons-nous tirer ?

Nous devons réaffirmer que nous condamnons tout acte de terrorisme et dire clairement que rien ne peut justifier ces actes, où et à quelque moment que ce soit. Comme Assemblée, nous devons rejeter toute tentative d’excuser les attentats, car ceux-ci sont totalement contraires à l’esprit, aux normes et aux valeurs de notre Convention.

Ensuite, nous devons saluer tous les moyens utilisés par les individus, les groupes et les sociétés pour protester contre les actes terroristes au cours des dernières années. Nous nous rappelons tous la marche du 11 janvier 2015 à Paris, qui a réuni quelque 2 millions de personnes, dont 40 chefs d’Etat et de gouvernement. C’était une manifestation d’unité. Au même moment, un peu partout dans le monde, on manifestait en signe de solidarité avec cet événement. Cela montre que nous n’entendons pas renoncer à combattre le terrorisme, que nous voulons le vaincre.

Nous devons aussi rejeter tout amalgame entre le terrorisme et l’islam. Ni Daech ni aucun autre groupe terroriste ne peut prétendre agir au nom de l’islam ni représenter la communauté musulmane. Au contraire, la plupart de leurs victimes sont des musulmans, terrorisés, exploités, torturés, massacrés par ces groupes qui bafouent leur religion.

Notre Assemblée doit aussi reconnaître que ces attentats mettent les musulmans dans une situation inconfortable. Nous devons appeler les dirigeants politiques à être particulièrement attentifs, lorsqu’ils condamnent ces attentats, à éviter les généralisations stigmatisantes qui font peser sur des groupes entiers de populations la responsabilité d’actes commis par des individus.

Nous devons en appeler aux leaders musulmans pour qu’ils insistent sur le fait que les musulmans, comme tous les croyants de toutes les autres religions, bénéficient de la protection de leurs droits et de leurs libertés grâce à la Convention européenne des droits de l’homme. C’est aussi pour cette raison que leur communauté doit défendre avec vigueur les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe contre les attaques terroristes.

Par ailleurs, à la suite de cette vague d’attentats terroristes, plusieurs politiciens importants ont déclaré être en guerre contre Daech. On peut le comprendre, mais ceux qui commettent des attentats ne sont pas les soldats d’une armée régulière représentant un Etat ou une organisation internationale: ce sont des individus sans foi ni loi qui commettent des attentats contre des civils innocents pour déstabiliser nos sociétés. Je rappelle que, selon la Résolution 1840, le concept de guerre contre la terreur est une erreur: il faut se battre avec les armes de défense des droits de l’homme.

J’aimerais également appeler votre attention sur d’autres éléments. J’exprime dans mon rapport une préoccupation concernant des mesures prises par certains Etats membres, comme la France et la Turquie – je donne des exemples précis dans l’exposé des motifs –, mais également d’autres Etats membres. Je suis heureux qu’un ministre français soit présent car il pourra répondre sur ce point.

Dernière remarque: il est inacceptable que les sources de financement de Daech n’aient toujours pas été taries. J’en appelle à la résolution des Nations Unies sur le financement du terrorisme dans le monde entier. Il n’y a aucune raison de faire l’autruche face aux politiques honteuses de certains Etats. Il n’y a pas de place ici pour l’hypocrisie: si nous voulons nous battre contre Daech, il faut lui couper les vivres!

Monsieur le Président, j’espère que mon rapport et mon intervention montrent clairement que la lutte contre le terrorisme et la lutte pour le respect des libertés ne sont pas contradictoires, mais bien complémentaires. Si nous en sommes convaincus et si nous adoptons les propositions faites dans mon projet de résolution, je pense que nous contribuerons à préserver notre mode de vie, non seulement pour mon petit-fils, mais aussi pour tous les nouveau-nés et les nouvelles générations, afin qu’ils aient une chance d’être heureux.

LE PRÉSIDENT* – Merci, Monsieur Kox. Au nom de l’Assemblée, nous vous félicitons pour la naissance de votre troisième petit-fils – cela semble impossible, vous avez l’air tellement jeune!

M. LE BORGN’ (France), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme – Je souhaite avant toute chose saluer le travail conduit par Tiny Kox dans son rapport pour la commission des questions politiques et de la démocratie.

Je viens d’un pays, la France, qui a connu l’an passé deux épisodes terroristes dramatiques et meurtriers. Oui, il est du devoir et de la responsabilité d’un gouvernement soumis à de tels périls d’agir pour protéger son peuple. Le combat contre le terrorisme est une lutte sans merci.

C’est aussi une lutte qu’il s’agit de mener dans le respect de l’Etat de droit comme des libertés collectives et individuelles. Je veux citer ici un extrait de l’avis de la Commission de Venise du 4 avril 2006 sur la protection des droits de l’homme dans les situations d’urgence: «La sécurité publique et les droits fondamentaux ne sont (...) pas des valeurs concurrentes: chacune est la condition préalable de l’existence de l’autre».

Ainsi, si nous renoncions à une partie de nos valeurs démocratiques dans la lutte contre des personnes et des organisations dont l’objectif est précisément de détruire les sociétés de liberté dans lesquelles nous vivons, alors nous nous abaisserions à leur niveau et mettrions en danger les fondements mêmes de ces sociétés.

Dans le rapport pour avis que j’ai préparé, j’ai voulu insister sur l’impératif de respecter dans le combat contre le terrorisme l’ensemble des normes juridiques pertinentes, à commencer bien sûr par celles posées par la Convention européenne des droits de l’homme telle qu’interprétée par la Cour.

J’ai rappelé les conditions précises dans lesquelles l’article 15 de la Convention autorise les Etats parties à déroger à certains droits «en cas de guerre ou d’autre danger public menaçant la vie de la nation». Tout repose en effet sur l’équilibre à trouver entre la sécurité publique et le respect des droits fondamentaux, sur la proportionnalité des mesures prises au regard de l’objectif poursuivi, sur les garanties procédurales à accorder et sur l’accès nécessaire au juge des libertés.

Je suis revenu sur la situation en Ukraine, dans le Caucase et en Turquie. Je me suis penché sur la pratique des déchéances de nationalité dans le cadre du Nationality, Immigration and Asylum Act britannique, utile au regard du projet d’inscrire dans la Constitution française la déchéance de nationalité pour les personnes condamnées pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la nation.

De ce travail, je retire nombre d’enseignements et d’inquiétudes, partagés avec Tiny Kox, sur le développement d’opérations de perquisitions et de saisies menées sans mandat, sur le nombre d’assignations à résidence, sur les restrictions à la liberté d’aller et de venir, sur le risque de voir, en état d’urgence, les pouvoirs exceptionnels utilisés à des fins autres que celles pour lesquelles ils ont été sollicités.

Dès lors, et c’est le seul amendement au projet de résolution émanant de la commission des affaires juridiques et des droits de l’homme, dans le but de garantir les droits et libertés, dans le but également de permettre en France et, plus largement, en Europe des débats parlementaires justes et sereins sur cette question, je propose de soumettre le projet français de constitutionnalisation de l’état d’urgence et de déchéance de nationalité à l’avis de la Commission de Venise, organe reconnu du Conseil de l’Europe et dont les travaux font autorité. J’y reviendrai lors de l’examen des amendements.

Mme BİLGEHAN (Turquie), rapporteure pour avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination – Chers collègues, ce débat concerne un sujet d’une actualité malheureusement brûlante, en France, chez moi en Turquie, et dans tant d’autres pays. Le terrorisme est injustifiable. Les attaques répétées, perpétrées notamment au nom du soi-disant «Etat islamique» – Daech –, constituent un danger réel pour nos sociétés.

Mais nous savons tous que la manière dont nous luttons contre le terrorisme est également cruciale. Des réponses trop faibles exposent nos sociétés à des risques accrus et des réponses excessives sont tout aussi dangereuses. Le durcissement disproportionné des lois et des procédures d’exception met en danger les libertés fondamentales que nous devons précisément défendre. Les minorités, souvent perçues comme une menace, risquent d’être particulièrement touchées.

Je félicite Monsieur Kox pour son rapport – et pour cette formidable nouvelle de la naissance de son petit-fils! – et Monsieur Le Borgn’ pour son avis, qui font valoir ces préoccupations.

Il y a un an, à la suite des attaques contre Charlie Hebdo, l’Assemblée avait aussi insisté sur la nécessité d’éradiquer les causes de la radicalisation. Aujourd’hui, l’aspect préventif a quasiment disparu du présent projet.

Trois points me paraissent essentiels: premièrement, les discours politiques faisant suite aux attentats ne doivent jamais basculer dans la stigmatisation de minorités entières pour les actes de certains; deuxièmement, il est nécessaire de comprendre les facteurs qui poussent certains à céder à la tentation de la violence; troisièmement, il faut lutter contre la discrimination et œuvrer sans relâche à l’inclusion de tous les membres de nos sociétés.

Enfin, je tiens à souligner que, malheureusement, les femmes sont parfois directement ciblées par le terrorisme. J’espère que l’Assemblée accordera plus d’attention à cette question à l’avenir.

Pour conclure, je voudrais souligner que, dans la lutte contre le terrorisme, l’importance des mesures préventives ne doit pas être minimisée. Si nous cessons d’œuvrer au «vivre ensemble», si nous abandonnons la lutte contre la marginalisation, nous courons au désastre. Tel est le sens de l’amendement que j’ai proposé et qui a été approuvé par la commission sur l’égalité et la non-discrimination.

LE PRÉSIDENT * - Nous en venons à présent au second rapport, sur «Les Combattants étrangers en Syrie et en Irak».

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Lorsqu’en juin 2014 j’ai soumis ma proposition de résolution sur les combattants étrangers en Syrie, je voulais me pencher sur des menaces potentielles, supposées: aujourd’hui, nous sommes confrontés à des faits sanglants.

Les données recueillies ces quinze dernières années font état de plus de 61 000 incidents de terrorisme de par le monde, entraînant la mort de 140 000 personnes. Entre 2000 et 2014, le nombre de victimes du terrorisme a été multiplié par neuf, passant de 3 300 à plus de 32 600, et j’ai peur que le chiffre ne soit plus élevé encore en 2015.

Jusqu’à tout récemment, une écrasante majorité de ces statistiques tragiques concernait des pays du tiers-monde, avec bien sûr quelques exceptions bien connues: le 9 septembre aux Etats-Unis, l’attentat contre un train à Madrid, celui visant le métro de Londres, le massacre perpétré en Norvège, sans oublier les attentats en Turquie et en Russie. Cependant, au vu des données de ces derniers mois, les vagues de terrorisme ne cessent de se rapprocher de l’Europe. Elles frappent aujourd’hui au cœur même de notre continent. Nombre des attentats récents sont menés et revendiqués par des individus qui agissent au nom d’une entité qui se dénomme elle-même «Etat islamique» mais que nous appelons Daech. Voilà ce qu’est la toile de fond de la question des combattants étrangers.

Les combattants étrangers sont des individus poussés par une idéologie, une religion ou un lien de parenté à quitter leur pays d’origine ou de résidence habituelle pour rejoindre les rangs d’un camp engagé dans un conflit armé. Il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau, et vous trouverez dans mon rapport quelques renvois historiques, mais ce qui est nouveau, c’est aujourd’hui l’échelle sans précédent du phénomène, liée principalement aux conflits faisant rage en Syrie et en Irak.

Selon plusieurs estimations, près de 30 000 combattants étrangers – aux Etats-Unis on parle même de 35 000 – se sont rendus en Irak et Syrie, en provenance de plus de cent pays, depuis 2011. Autre élément nouveau: une proportion importante de ces combattants étrangers viennent de nos 47 Etats membres, et 20 % sont ressortissants de pays d’Europe de l’Ouest. Les plus grands pays, la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne, produisent aussi le nombre le plus élevé de combattants en chiffres absolus mais, relativement à la taille de la population, les pays les plus lourdement touchés en Europe de l’ouest sont la Belgique, le Danemark et la Suède. Le phénomène n’est toutefois pas limité à l’Europe de l’ouest. En octobre dernier, les autorités de la Fédération de Russie indiquaient qu’entre 5 000 et 7 000 terroristes étrangers en Syrie s’y étaient rendus depuis le territoire de la Fédération.

Autre nouvelle caractéristique des combattants étrangers: leur profil social. Ces combattants étrangers sont pour la plupart de jeunes et très jeunes gens, certains issus de milieux sociaux moins favorisés, d’autres de milieux aisés. Certains sont titulaires de diplômes universitaires. Ce qui est aussi très frappant, c’est le nombre croissant de femmes et de jeunes filles qui entreprennent ou comptent entreprendre le voyage qui leur permettra de rejoindre Daech.

Enfin, et c’est également tout à fait nouveau, ces combattants étrangers ont un impact direct sur nos sociétés européennes. Il faut évoquer en premier lieu la menace directe que ces personnes revenues sur le territoire européen font peser sur notre sécurité. Nous savons désormais que les attentats commis à Paris en novembre l’ont été par des personnes venant de Syrie et d’Irak. De surcroît, les combattants étrangers tentent de recueillir un plus large soutien à leur cause et d’étendre les réseaux terroristes radicaux, en recrutant de nouveaux partisans, en faisant l’apologie des actes terroristes, en partageant leur expérience avec de nouvelles recrues, en leur donnant une formation aux techniques terroristes.

Plus généralement, par une utilisation abusive des motivations religieuses en vue de justifier leurs actes, les combattants étrangers portent un réel préjudice aux communautés religieuses auxquelles ils prétendent appartenir et pour lesquelles ils prétendent combattre. De ce fait, il existe un risque réel qu’ils sapent la cohésion et l’intégrité de nos sociétés démocratiques, parce que les clivages peuvent aller s’exacerbant entre un certain nombre de groupes ethniques et religieux. Il est par conséquent très important de dire et de répéter que le terrorisme ne saurait être associé à quelque religion, nationalité ou groupe ethnique que ce soit.

Ce qui peut, dans un premier temps, nous aider à trouver une solution au problème, c’est d’en avoir pleinement connaissance, d’être bien conscient de ce qui se passe, et ensuite d’essayer d’en comprendre les causes profondes. Pourquoi tant de jeunes hommes et de jeunes femmes qui sont nés dans nos villes et ont grandi sur les bancs de nos écoles et de nos universités sont-ils radicalisés? Pourquoi sont-ils réceptifs à la propagande djihadiste? Qu’est-ce qui les pousse à quitter leur foyer pour se rendre en Syrie ou en Irak, où l’on parle des langues qu’ils ne comprennent parfois même pas?

Vous trouverez dans le rapport toute une série de raisons, personnelles, politiques, socioéconomiques, idéologiques, psychologiques, religieuses, qui peuvent contribuer à la radicalisation d’un individu.

Ce sont surtout des individus qui se sentent marginalisés, qui ont le sentiment que la société les traite mal, qu’ils en sont exclus; des individus qui cherchent désespérément un sens à leur vie et un sentiment d’appartenance. Ce sont surtout ces individus qui courent le risque d’être radicalisés, endoctrinés par la propagande extrémiste et recrutés par des groupes terroristes.

Pour autant, les titulaires de diplômes universitaires, les jeunes issus des classes moyennes ne sont pas protégés et risquent tout autant d’être radicalisés. Mon rapport renvoie à des études très sérieuses et j’invite tous mes collègues qui ont l’intention de travailler sur ces questions à en prendre connaissance.

Se pose ensuite une série de questions pratiques: que pouvons-nous faire pour prévenir la radicalisation? Comment pouvons-nous arrêter nos citoyens au moment où ils se proposent de rejoindre le djihad? Que faire face à ceux qui en reviennent?

Malheureusement, il n’existe pas de panacée ni de solution rapide à notre portée. Cependant, à chaque fois qu’un attentat terroriste est commis dans l’un de nos pays, les autorités publiques donnent la priorité à la répression et aux sanctions, engagent sur le court terme une action qu’elles jugent rapide et visible. Voilà comment elles réagissent à ces menaces immédiates. Mais je suis heureux de constater que l’on devient de plus en plus conscient du fait que cette approche strictement sécuritaire ne suffit pas.

Mes chers collègues, nous devons mettre l’accent sur le traitement des facteurs qui sous-tendent la radicalisation. Comment traiter de la prévention et des politiques de réintégration, toutes mesures qui pourraient porter leurs fruits sur le long terme et décourager ces jeunes de tomber dans les bras du djihad?

Dans mon projet de résolution, je m’efforce de faire la synthèse de ce qui peut être envisagé. Nous n’allons pas perdre de temps à le lire ici, je vous invite simplement à vous pencher sur mes propositions.

Me tournant, pour conclure, vers notre Secrétaire Général, je dirai que notre Assemblée parlementaire doit soutenir le Plan d’action sur la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation conduisant au terrorisme, adopté en mai dernier par le Comité des Ministres. Le projet de recommandation que je propose appelle à une contribution plus large du Conseil de l’Europe aux efforts déployés pour s’attaquer aux causes profondes du phénomène dit «des combattants terroristes étrangers» et, plus généralement, pour prévenir le terrorisme.

J’espère que mon rapport et que notre discussion de ce jour susciteront un large débat public sur ce phénomène des combattants terroristes étrangers. Je vous invite, mes chers collègues, à vous saisir de cette question au sein de vos parlements nationaux.

Enfin, j’exprime toute ma gratitude au secrétariat de la commission et au professeur néerlandais Christophe Paulussen qui a beaucoup contribué à l’élaboration de ce rapport.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – J’adresse toutes mes félicitations à M. Van der Maelen pour cet excellent rapport, ainsi qu’à M. Kox pour ce qui est du sien.

Malheureusement, nous sommes là à nous féliciter de sujets particulièrement tristes parce que, d’un point de vue juridique, nous parlons de Daech, une organisation qui a commis un génocide. Je ne suis pas le seul à le dire. Selon la commission des questions juridiques et des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le Commissaire des Nations Unies a apporté suffisamment de preuves pour qu’on puisse considérer qu’il s’agit d’un génocide.

Au vu de ce qui se passe au quotidien en Syrie, du nombre de fosses communes qui ont été découvertes, et de personnes qui ont été tuées, au vu de la façon dont cette organisation s’est auto-proclamée et a décidé que les non-sunnites n’avaient pas droit à la vie, il est clair que nous sommes là face à l’essence même d’un génocide. D’autres communautés minoritaires, chrétiennes et autres, souffrent également, mais des chiites souffrent aussi.

Pour la première fois depuis bien longtemps, nous allons devoir utiliser cette Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Cette convention a été élaborée, afin que nous, hommes et femmes politiques, n’ayons pas à attendre dix ans un jugement avant d’agir. La convention prescrit clairement pour les Etats membres l’obligation de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour prévenir les génocides.

Et nous, nous avons une obligation particulière: nous devons faire en sorte que les citoyens de nos pays ne participent pas à de tels actes. On parle beaucoup de prévention par rapport aux actes commis en Europe, mais nous devons également nous assurer que ces personnes ne se rendent pas en Syrie ou en Irak pour aller commettre des actes atroces là-bas, ou pour apprendre à en commettre dans nos pays. Nous ne voulons pas qu’ils agissent ici, mais ils ne doivent pas agir là-bas non plus. Cette convention fixe cette obligation aux Etats membres. C’était clair en Bosnie.

La sanction fait partie de cette convention. Les amendements traitent aussi de la sanction. En tant membres de cette Organisation, nous devons agir. Nous devons accueillir les réfugiés, nous devons veiller aussi à ce que les personnes qui ont commis ces actes soient punies et séparées des autres. Il en va de la protection de nos sociétés, comme de la protection des réfugiés qui ont déjà souffert dans leur pays.

LE PRÉSIDENT* – Je souhaite la bienvenue à M. Harlem Désir, secrétaire d’Etat du Gouvernement français, chargé des affaires européennes.

(Poursuivant en français) Au nom de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et en mon nom propre, je tiens à vous assurer que nous avons tous été profondément bouleversés et choqués par les attaques terroristes atrocement meurtrières dont a été victime la France. De nombreux Etats membres du Conseil de l’Europe et de son proche voisinage ont également été récemment attaqués brutalement par le terrorisme.

Comme vont en témoigner nos débats aujourd’hui, l’Europe et le monde entier sont extrêmement inquiets face au terrorisme. Nous devons trouver ensemble des réponses efficaces, sans faire le jeu des populistes et des extrémistes.

Monsieur le secrétaire d’Etat, votre intervention dans notre hémicycle aujourd’hui va réellement enrichir nos débats.

Monsieur le secrétaire d’Etat, vous avez la parole.

M. DÉSIR, secrétaire d’Etat du Gouvernement français, chargé des affaires européennes – Monsieur le Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, je tiens d’abord à vous féliciter pour votre élection à la tête d’une institution qui porte haut les valeurs de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit.

Je tiens également à remercier votre prédécesseur, Mme Brasseur, pour le précieux travail qu’elle a effectué au cours de son mandat.

Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, Mesdames, Messieurs les parlementaires, pays hôte de l’Organisation, patrie de la Déclaration des droits de l’homme, la France est profondément attachée au Conseil de l’Europe. C’est donc bien volontiers que j’ai accepté de participer aux débats de votre Assemblée sur la lutte contre le terrorisme international. Je vous remercie de votre invitation et veux également remercier les deux rapporteurs, M. Kox et M. Van der Maelen, ainsi que les rapporteurs pour avis, M. Le Borgn’, Mme Bilgehan et M. Omtzigt, pour la qualité de leurs travaux.

Il y a un peu plus de deux mois, quelques jours seulement après les attentats du 13 novembre à Paris et à Saint-Denis, j’étais présent ici même à l’ouverture du Forum mondial de la démocratie, à vos côtés Monsieur le Secrétaire Général, pour souligner la nécessité de maintenir un équilibre entre l’impératif de sécurité et la protection des libertés fondamentales.

Ces attaques contre une salle de concert, des terrasses de café, les abords d’un stade de football, contre notre jeunesse et des citoyens venus de nombreux pays, qui respiraient l’air libre d’une ville libre – Paris – et d’un pays démocratique – comme tous les pays représentés ici, au Conseil de l’Europe –, ont fait 130 morts et des centaines de blessés, certains encore hospitalisés. Planifiées depuis la Syrie par Daech – l’Etat islamique –, une organisation disposant d’un territoire et de ressources considérables, elles ont été commises par des individus fanatisés et déterminés à tuer jusqu’à leur propre mort au nom du djihad, qui revenaient de zones de guerre où ils avaient été entraînés au meurtre, avec des armes et des méthodes de guerre.

C’est ce même terrorisme qui a frappé l’Europe et le monde à plusieurs reprises l’année dernière: à Paris en janvier contre Charlie Hebdo, l’Hyper Cacher et des policiers, à Bruxelles contre le musée juif, à Copenhague lors d’un débat et contre une synagogue, mais aussi à Tunis, ainsi qu’en Egypte contre un avion russe, à Bamako, et cette année encore à Istanbul, Djakarta et Ouagadougou.

Les auteurs des rapports dont vous débattez ont malheureusement raison: la menace terroriste est toujours présente et élevée dans nos pays. Le Premier ministre Manuel Valls l’a répété après l’attentat d’Istanbul: cette menace «est constante et elle peut frapper à tout instant».

Le Président de la République a donc pris, en France, des décisions fortes et exceptionnelles pour y répondre, avec trois impératifs: l’efficacité, car c’est un devoir pour l’Etat de protéger les citoyens; le respect de l’Etat de droit et des libertés fondamentales; le respect de nos engagements internationaux.

Dès le 14 novembre 2015, l’état d’urgence a été instauré pour 12 jours sur l’ensemble du territoire national en raison de la gravité des attentats et de la permanence de la menace. Puis, conformément à la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, un projet de loi prorogeant l’état d’urgence pour trois mois a été soumis au Parlement et approuvé à une majorité large et dépassant les clivages politiques, le 20 novembre 2015.

En élargissant les pouvoirs de l’autorité administrative, pour une durée limitée et dans des circonstances clairement exceptionnelles, en autorisant notamment des perquisitions de jour et de nuit ou des assignations à résidence, l’état d’urgence est efficace. Entre le 14 novembre 2015 et le 26 janvier 2016, les forces de l’ordre ont ainsi procédé à 3 234 perquisitions administratives; 515 infractions ont été constatées; il a été procédé à 388 interpellations, 338 gardes à vue et 406 assignations à résidence, dont 17 ont été abrogées après une réévaluation de la situation et une dizaine modifiées pour permettre de concilier l’assignation à résidence avec la vie privée et familiale ou une activité professionnelle. En outre, 559 armes ont été trouvées, dont 42 armes de guerre, soit la moitié du volume d’armes de guerre saisi habituellement au cours d’une année pleine.

Ces mesures, qui sont un des éléments de la lutte contre le terrorisme, à côté du travail des services de renseignement, lui-même encadré par la loi relative au renseignement du 24 juillet 2015, de l’échange d’informations et de la coopération internationale, en particulier européenne, de la lutte contre Daech en Syrie et en Irak, de la lutte contre la radicalisation – en France même et en Europe –, sont pleinement respectueuses de l’Etat de droit.

Le Conseil d’Etat, dans son avis rendu public par le Gouvernement, a estimé que cette loi était justifiée et proportionnée aux circonstances. Le législateur, quant à lui, suivant le projet du Gouvernement, a écarté de la loi sur l’état d’urgence les dispositions relatives au contrôle de la presse. Il a toujours été clair pour la France que la liberté d’expression – qui englobe évidemment la liberté de la presse –, attaquée précisément par les terroristes, devait être totalement protégée, y compris en assurant la protection physique des rédactions et de journalistes ou de dessinateurs menacés, de la même manière que sont protégés de nombreux lieux de culte – synagogues, mosquées, églises – et un grand nombre de réunions ou de manifestations publiques.

Ces mesures exceptionnelles, répondant à une situation exceptionnelle, sont pleinement conformes à la Constitution. Saisi par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a notamment déclaré conformes les dispositions relatives aux assignations à résidence, dans une décision du 22 décembre dernier.

Mais ces mesures exceptionnelles font également l’objet d’un contrôle politique et juridictionnel lui aussi exceptionnel.

Contrôle politique, d’abord, par les assemblées parlementaires. Les commissions des lois des deux assemblées sont dotées des pouvoirs d’une commission d’enquête, et donc d’une large capacité d’investigation, pour le suivi des mesures prises par le Gouvernement dans le cadre de l’état d’urgence. Tous les moyens du contrôle parlementaire peuvent être utilisés: contrôles sur place, déplacements, questionnaires, auditions, ou encore demandes de transmission de pièces.

Contrôle juridictionnel, ensuite, qui se fait notamment par le juge administratif, lequel a été saisi de 140 recours sur les assignations à résidence, dont 80 en référé, la plupart jugés en 48 heures. Dans l’immense majorité des cas, les juridictions saisies ont validé les mesures prises par l’administration. Sur ces 140 recours, le juge a prononcé six suspensions, une suspension partielle et une annulation. Un Etat de droit, c’est une justice capable de se prononcer elle aussi dans l’urgence, pour faire valoir les droits de ceux qui s’estiment lésés, et qui ont donc les moyens de se défendre. Il n’y a, par conséquent, aucune suspension du contrôle des juges sur les décisions prises par l’administration pendant l’état d’urgence. L’état d’urgence permet d’agir fortement et rapidement, mais la justice a toujours le dernier mot.

Enfin, je voudrais insister sur le fait qu’avec ces mesures, la France reste totalement fidèle à ses engagements internationaux. Confrontée à une menace d’une gravité exceptionnelle, la France a tout d’abord informé le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et le Secrétaire général des Nations Unies qu’elle entendait recourir aux dérogations permises et encadrées par la Convention européenne des droits de l’homme, dans son article 15, et par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, dans son article 4. La France, profondément attachée à la Convention européenne des droits de l’homme, respecte – et continuera de respecter – ses obligations internationales en matière de droits de l’homme.

Ce serait une grave erreur de vouloir opposer la lutte contre le terrorisme, d’une part, et la défense des droits de l’homme, d’autre part; de laisser entendre qu’il faudrait choisir l’une aux dépens de l’autre; de laisser croire que, si l’on veut lutter contre le terrorisme, l’on devrait renoncer aux droits de l’homme, aux libertés fondamentales, ou à l’inverse que, pour défendre et préserver les droits de l’homme, il faudrait renoncer à lutter pleinement contre le terrorisme. Ce serait évidemment une aberration, car ce sont ces mêmes droits de l’homme que les terroristes veulent anéantir parce qu’ils sont au cœur même de nos démocraties.

Notre devoir est donc de faire les deux: lutter contre le terrorisme avec la plus grande détermination, avec tous les moyens nécessaires, mais toujours avec les armes du droit, dans le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales. C’est là le choix de la France.

C’est pourquoi les dispositions prises dans le cadre de l’état d’urgence adaptent notre droit pour garantir dans la durée la sécurité et les libertés des citoyens et résidents français, pour défendre nos valeurs, notre modèle de société et la démocratie.

Nous entendons désormais constitutionnaliser l’état d’urgence, pour préciser les moyens qui pourraient être utilisés dans ce cadre et définir les raisons qui pourraient justifier son déclenchement. C’est une garantie supplémentaire pour la défense de nos libertés. Le Conseil d’État, dans son avis préalable rendu public, a d’ailleurs estimé que la modification envisagée aurait un effet utile.

C’est aussi pourquoi le Gouvernement a enrichi le projet de loi réformant la procédure pénale et renforçant la lutte contre le crime organisé qui sera soumis au Parlement dans les prochains jours. Il donnera au parquet des moyens d’agir dans le cadre des enquêtes ouvertes sous leur responsabilité. L’enquête du procureur deviendra contradictoire, les écoutes téléphoniques seront mieux encadrées, et la spécialisation du juge des libertés et de la détention sera reconnue.

Ce texte permettra aussi, dans des cas précis, à l’autorité administrative, sous le contrôle du juge administratif, de contrôler des individus qui rentrent de Syrie ou d’Irak, et qui ne font pas l’objet de procédures judiciaires. Il contribuera à la protection de certains sites sensibles et permettra de réprimer les trafics d’armes et le blanchiment qui alimentent le terrorisme.

Le Président de la République l’a dit, l’état d’urgence n’a pas vocation à durer. Et le Premier ministre l’a rappelé ce matin même: il est nécessairement borné dans le temps. Mais la menace reste élevée, et tant que notre droit ne s’est pas adapté, nous devons être à même de satisfaire aux exigences de sécurité et de liberté.

C’est dans cette attente que le Gouvernement présentera le 3 février un projet de loi prolongeant l’état d’urgence pour une durée de trois mois.

La lutte contre le terrorisme se gagnera aussi sur le terrain des valeurs, dans une approche globale. C’est pourquoi la France a engagé un combat de long terme qui s’attaque aux racines profondes de ce mal. A l’échelle nationale d’abord, avec un grand plan de de lutte contre le racisme et les discriminations et en luttant contre les phénomènes de radicalisation et leur développement sur internet. Au niveau européen ensuite, en renforçant avec nos partenaires le contrôle de nos frontières extérieures communes, en échangeant mieux les informations, en mettant en place un PNR européen, en luttant contre le trafic d’armes et le financement du terrorisme. Au niveau international enfin, en participant à la coalition internationale contre Daech dans le cadre de la résolution 2249 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, tout en recherchant activement une solution politique durable aux crises qui sévissent depuis trop longtemps en Syrie, en Irak ou en Libye, et qui ont permis à Daech de renforcer ses positions.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, les terroristes ne veulent pas seulement tuer des femmes et des hommes; ils veulent tuer la liberté, nos sociétés ouvertes, tolérantes, démocratiques. Ils veulent nous intimider et nous diviser. Nous faire vivre dans la peur et la discorde. Nous devons faire l’inverse. Nous devons nous tenir debout et unis, comme l’ont fait les Français et tous ceux qui se sont joints à eux dans la grande manifestation du 11 janvier 2015. Nous devons combattre la terreur avec la plus grande détermination et défendre nos valeurs. Affirmer la fraternité et la liberté. Fortifier l’Etat de droit et la démocratie.

Dans cette mission, le Conseil de l’Europe a un rôle essentiel à jouer. C’est pourquoi la France a activement participé à l’élaboration du Protocole additionnel à la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme, qu’elle a signé le 22 octobre 2015.

Le respect des droits de l’Homme et de l’Etat de droit, l’éducation, l’inclusion et la cohésion sociale sont au cœur de l’action du Conseil de l’Europe, et sont des facteurs clés pour la réussite de toute stratégie de prévention et de lutte contre l’extrémisme violent et le terrorisme. C’est la conviction de la France.

Les terroristes qui ont attaqué la France ne la feront pas changer de visage. Elle est le pays de la liberté et de la Déclaration des droits de l’homme, et elle le restera avec vous, ses amis et partenaires au sein du Conseil de l’Europe. Et c’est ensemble que nous vaincrons le terrorisme.

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie, Monsieur le secrétaire d’Etat, pour votre intervention très intéressante et importante pour nos débats.

Le terrorisme nous attaque et nous meurtrit au cœur même de nos valeurs les plus précieuses. Il vise directement nos libertés et tue sans discernement. Malgré tout, face à la menace sécuritaire, il est de notre devoir d’être attentifs et de ne pas sacrifier les droits de l’homme. Renoncer à nos libertés fondamentales au nom de la lutte contre le terrorisme reviendrait à donner la victoire aux terroristes.

Monsieur le secrétaire d’Etat, c’est avec plaisir que je vous donnerai à nouveau la parole pour réagir au débat, après les interventions des représentants des groupes politiques.

La discussion générale est ouverte.

Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. NICOLETTI (Italie), porte-parole du Groupe socialiste* – Je remercie nos collègues Kox et Van der Maelen pour leurs rapports particulièrement détaillés et approfondis, qui nous permettent de mieux comprendre le phénomène auquel nous sommes confrontés, tout en nous indiquant très clairement des pistes de travail. Je pense en particulier à la condamnation de la violence terroriste.

Nous devons tous ensemble ici rappeler qu’aucun idéal, aussi beau soit-il, ne peut justifier que l’on tue des personnes et que l’on commette des actes aussi atroces que ceux auxquels nous avons assisté.

Notre route est toujours la même. C’est celle du dialogue, du consensus, de la démocratie, du respect et de la tolérance, et jamais la voie de la violence du terrorisme à l’encontre de personnes qui n’ont rien fait.

Il nous faut également faire une distinction entre les terroristes et les idéaux qu’ils prétendent défendre – je pense en particulier à l’islam, mais également à d’autres belles idées. Plus les actions sont violentes, plus il est nécessaire en effet de trouver des raisons plus ou moins nobles pour les justifier.

Nous ne devons pas accorder au terrorisme la reconnaissance qu’il souhaite. Daech prétend être un Etat, il contrôle des territoires, recueille des fonds et s’occupe d’une population; mais nous ne devons pas lui accorder cette reconnaissance politique. Voilà pourquoi il me semble essentiel d’utiliser à bon escient le mot «guerre» qui, en droit international, a une signification bien précise.

Par ailleurs, si le terrorisme touche des personnes innocentes, il touche également l’Etat de droit. On veut nous faire croire que notre Etat de droit est un Etat de violence cachée. Nous ne devons pas céder à un tel argument. Notre Etat se fonde sur la primauté du droit, sur le consensus des personnes.

Voilà pourquoi il me semble opportun de rappeler les conventions internationales, la jurisprudence européenne, mais également les travaux de la Commission de Venise lorsque nous parlons de ce sujet.

Enfin, il y a l’éducation et la prévention. Ce sont deux domaines essentiels pour une bataille que nous devons mener et qui est une bataille d’idées.

M. GARÐARSSON (Islande), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – «Le terrorisme international est un crime contre nos citoyens, contre notre façon de vivre, contre nos normes et nos valeurs». Nous devons faire nôtre cette citation d’un commissaire aux droits de l’homme. À cet égard, nous devons combattre le terrorisme sous toutes ses formes et utiliser tous les outils que nous avons à notre disposition.

Les attaques terroristes à Paris, en Turquie, en Tunisie et ailleurs nous rappellent qu’aucun pays n’est épargné. Et ce sont des personnes innocentes qui sont visées par les terroristes, sachant que c’est ce qui blesse le plus profondément nos sociétés.

Leur objectif n’est pas seulement de promouvoir une cause, mais aussi de semer la panique, la peur et la haine, et de déstabiliser nos sociétés. Si nous voulons défendre notre structure démocratique et nos valeurs démocratiques, alors nous devons combattre le terrorisme.

Que les choses soient claires: Daech n’est pas seulement l’organisation terroriste la plus puissante et la plus grande que nous n’ayons jamais connue, c’est également l’organisation terroriste la plus riche. Si nous voulons combattre Daech, il faut commencer par lui couper les vivres.

Parallèlement, il est essentiel de préserver l’Etat de droit, le respect des droits de l’homme qui sont des valeurs fondamentales du Conseil de l’Europe, des valeurs qui ne doivent jamais être oubliées quand les Etats mettent en place des mesures contre le terrorisme.

Le fait que tant de jeunes partent en Syrie et en Irak pour rejoindre les rangs de Daech est extrêmement dérangeant et nous indique qu’il existe une nouvelle menace: le risque de voir ces personnes revenir dans leur foyer pour commettre des attaques terroristes.

La possibilité existe également de voir ces personnes tenter de recruter d’autres jeunes. C’est ce à quoi nous avons assisté à Paris. Il est extrêmement dérangeant d’apprendre que de nombreux jeunes, des femmes comme des hommes, rejoignent Daech. On peut se demander pourquoi. Certains apprécient l’idéologie, d’autres, manquant d’activité, se voient marginaliser par la société. Peut-être est-ce également la conséquence du manque d’attrait de la politique nationale.

Les jeunes femmes sont souvent recrutés par internet avec une promesse de mariage à la clé, et nous risquons d’assister à la multiplication de combattants étrangers dans les années à venir.

Pour relever les défis qui se présentent à nous, il convient de nous attaquer à la source de la radicalisation en éduquant, en travaillant à des plans d’envergure sur les plans international et national, dans tous les pays au niveau tant gouvernemental que local. Mais cela ne suffira pas. Il faut aussi que les organisations privées et publiques travaillent à une seule et même table et que les informations soient partagées à tous les niveaux.

Il s’agira d’un combat permanent, sur la durée, sans victoire à la clé. Mais nous pouvons réduire le risque et rendre nos pays plus sûrs. Il en va de notre responsabilité.

M. İHSANOĞLU (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – L’émergence et la montée de Daech qui pratique de nouvelles formes de terrorisme, sa capacité à attirer de nombreux individus qui se radicalisent, provenant de sociétés appauvries mais également de sociétés développées, nous obligent à adopter de nouvelles approches.

Autrefois, le terrorisme était un acte de violence perpétré par des groupes violents et quelques acteurs voyous. Mais depuis quelques décennies, le djihadisme est devenu quasiment synonyme de terrorisme en raison de l’utilisation des armes par des groupes islamistes extrémistes, tels que les talibans ou Al-Qaida. D’ailleurs, de nouveaux concepts sont entrés dans notre vocabulaire. Les terroristes intérieurs, les personnes autoradicalisées, les djihadistes de l’internet: voilà des termes nouveaux pour décrire ces nouveaux acteurs.

La lutte contre le terrorisme est un immense défi qu’il convient de relever. La communauté internationale doit unir ses efforts pour le combattre, à l’échelle mondiale ou régionale.

Depuis 1972, où la question de l’élimination du terrorisme a été inscrite à l’ordre du jour des Nations Unies, le débat entre les Etats membres a porté sur la définition du terrorisme. Les divergences de vues au sein de la communauté internationale ont persisté. La résistance à l’occupation étrangère est-elle une forme de terrorisme? Des circonstances peuvent-elles amener au terrorisme?

À cet égard, la marginalisation, l’exclusion de l’espace politique, économique et social, la restriction et la suppression des libertés fondamentales sont des facteurs de radicalisation précurseurs de l’extrémisme violent et du terrorisme.

Pour conclure, je réitère l’idée contenue dans le rapport, selon laquelle lutter contre le terrorisme et protéger les valeurs et les normes du Conseil de l’Europe ne sont pas deux choses contradictoires, mais au contraire complémentaires.

M. VILLUMSEN (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – La majorité des victimes du terrorisme vivent hors de l’Europe. Mais nous avons vécu de terribles expériences pour avoir été confrontés au terrorisme à Copenhague. J’en ai également fait la terrible expérience à titre personnel: j’étais à Paris au mois de novembre lorsque cet attentat terroriste atroce a été perpétré. Je n’oublie pas non plus que d’autres Etats membres ont été frappés.

Permettez-moi d’adresser mes condoléances aux proches de toutes les victimes de cet acte de terreur.

Au nom de la Gauche unitaire européenne, je le dis fermement: face au terrorisme, nous resterons debout, de la même façon que nous lutterons debout pour défendre la démocratie et les droits de l’homme ainsi que pour protéger la vie et les droits de nos concitoyens. La lutte contre le terrorisme est une lutte pour la démocratie. Elle est au cœur de notre action lorsque nous nous battons contre le terrorisme. N’accordons pas de victoire aux terroristes.

La guerre contre le terrorisme, comme on la nomme parfois, est un échec. Daech n’aurait pas la force qui est la sienne aujourd’hui sans l’invasion illégale de l’Irak. Les guerres en Irak et en Afghanistan, qui se sont soldées par un échec, sont bien la preuve que l’on ne peut semer la guerre par les armes en espérant qu’émergent la concorde et la démocratie. Non, il faut mettre en place des forces démocratiques, soutenir les populations locales qui se battent en faveur de la démocratie et des droits de l’homme.

Hier, nous avons fêté le premier anniversaire de la victoire des Kurdes à Kobané contre Daech. Aujourd’hui, notre Assemblée a l’honneur de compter en son sein deux des grands dirigeants de cette lutte menée contre Daech. Ils nous rendent visite, nous en sommes honorés.

Chers collègues, apportons notre soutien à ces personnes pour qu’elles soient en mesure de défendre les millions de chrétiens, d’Arabes, de Kurdes contre les forces du mal, les forces de Daech, pour empêcher que des hommes et des femmes fuient face à la menace qu’il représente.

Nous sommes tous d’accord pour dire que Daech doit être combattu. Il faut donc empêcher que des accords inacceptables soient passés avec Daech, qui ne survivrait pas si l’on n’achetait pas son pétrole, si des personnes ne leur vendaient pas des armes et si des possibilités n’étaient pas offertes aux combattants étrangers sur place. Personne ne peut s’engager dans de telles tractations. Toute personne s’y livrant doit faire l’objet de poursuites. Le moment est venu pour ceux qui se livrent à ce type d’actes. Même s’il s’agit d’un prince d’Arabie saoudite, d’un ministre turc ou d’un émir du Qatar, il faut qu’ils soient poursuivis. Les Nations Unies se sont dotées de décisions dépourvues de toute ambiguïté, elles doivent être mises en œuvre par nos Etats membres.

M. NÉMETH (Hongrie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je félicite les rapporteurs pour les excellents documents qu’ils nous ont présentés. Ce n’est pas si fréquent.

Laissez-moi dire tout d’abord combien je déplore les attaques terroristes qui ont eu lieu à Paris et le décès de citoyens européens. Au nom de mon groupe, je dis à la France que nous sommes proches des victimes, des familles, de l’Etat français.

Mes chers collègues, nous devons nous engager à lutter contre le terrorisme. Le 13 novembre à Paris est, en quelque sorte, le 11-Septembre américain.

Nous devons lutter contre la terreur et le débat est l’une des armes dont nous disposons.

On ne peut chercher à s’attaquer au terrorisme sans aborder à la fois les questions des flux migratoires, des guerres, de la radicalisation de l’islam et celle d’un débat interne à celui-ci. Si, ce matin, nous avons longuement débattu de la question des migrations en Europe, il est essentiel de faire la distinction entre la religion et sa mauvaise utilisation politique. À cet égard, le dialogue interreligieux est important, et les valeurs chrétiennes européennes et les traditions constitutionnelles doivent être respectées. Quant à l’importance d’un débat interne à l’islam, le rôle de la Ligue arabe est de ce point de vue essentiel. Nous avons besoin d’un islam modéré, pacifique et démocratique. Sans lui, nous ne pourrons pas relever les défis du siècle à venir.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le secrétaire d’Etat, vous pouvez, si vous le souhaitez, répondre maintenant aux porte-parole des groupes politiques.

M. LE SECRÉTAIRE D’ÉTAT – Je voudrais en effet, Monsieur le Président, les remercier d’avoir enrichi les analyses approfondies des rapporteurs.

M. Nicoletti a insisté à juste titre sur le rôle de l’éducation. Nous avons aussi une bataille à mener sur le front des valeurs, comme l’a souligné M. Van der Maelen. Nous devons nous interroger sur ce qui fait que des jeunes qui ont grandi dans nos écoles puissent basculer dans la radicalisation.

Les modes de radicalisation sont très divers. Certains jeunes sont fanatisés sur internet. D’autres le sont en prison ou au contact d’individus déjà radicalisés. En tout état de cause, nous devons mener la bataille sur le front de la transmission des valeurs et de l’éducation en construisant un contre-discours.

M. Garđarsson a insisté sur l’importance du nombre de combattants étrangers. Le groupe Etat islamique ne veut pas simplement semer la mort, mais aussi la haine, la peur et la dissension au sein de nos sociétés. Il faut donc commencer par couper les financements des organisations terroristes. La difficulté est que le groupe Etat islamique vit en partie des ressources du territoire qu’il contrôle. De ce point de vue, ce n’est pas un Etat classique. Il contrôle de fait un territoire, des villes et les activités économiques sur ce territoire. Il perçoit des taxes et il a mis la main sur les richesses des Etats dont il a conquis des territoires. Lorsqu’il a pris la ville de Mossoul, en Irak, il s’est ainsi emparé des fonds de la Banque centrale irakienne. Il possède également des moyens militaires et des armements de l’armée irakienne précédente. Il a profité de la crise politique en Irak et de la guerre civile en Syrie, des dissensions communautaires internes à l’islam. C’est ainsi qu’un certain nombre de cadres du précédent régime irakien, qui s’étaient trouvés exclus du fait de la guerre de 2003, ont basculé dans les rangs de l’Etat islamique.

La guerre à laquelle nous assistons n’est donc pas une guerre classique, comme celles que nous avons connues au XXe siècle ou même dans les siècles précédents. Les premières victimes de cette organisation sont d’autres musulmans et il faut évidemment refuser tout amalgame avec l’islam en tant que religion. Daech tue des musulmans parce qu’ils sont chiites et d’autres parce que, bien que sunnites, ils ne se soumettent pas à son interprétation des textes. En réalité, beaucoup de ceux qui dirigent cette organisation ou de ceux qui s’enrôlent en son sein n’ont pas de véritable culture religieuse. Ils utilisent le prétexte du djihadisme pour commettre des crimes, abominables, contre l’humanité.

Le terrorisme a donc changé de nature, M. Ihsanoğlu l’a souligné. Il a pris une dimension sans précédent sur le plan international. Une coordination est donc indispensable, ainsi qu’une lutte contre tous les moyens de financement qu’il utilise à l’échelle internationale, d’où les initiatives que nous défendons au niveau de l’Union européenne, mais aussi auprès des Nations Unies et du G20, pour mettre fin aux trous noirs dans le système financier international. Il ne doit plus être possible d’utiliser certains moyens de paiement anonymes, y compris des cartes de paiement apparemment anodines, qui ne permettent de transférer que des montants peu importants. En réalité, ces derniers sont suffisants pour être transférés depuis les territoires contrôlés par l’Etat islamique jusqu’à des groupes basés dans d’autres pays pour préparer des actes terroristes.

M. Villumsen a évoqué le combat mené sur place par les résistants kurdes. Nous avons l’obligation de trouver une solution politique en Syrie et d’organiser une transition inclusive. De même, au sein de l’Etat irakien, aucune des composantes de la population ne doit se trouver exclue, sous peine de devenir une proie facile pour la propagande de l’Etat islamique.

M. Németh a aussi insisté sur la distinction qui doit être faite entre l’islam et ceux qui s’en réclament. Je pense également que nous devons refuser tous les amalgames. Les événements qui viennent de se produire appellent à une très grande vigilance. Les migrants fuient dans leur immense majorité la guerre et le terrorisme, mais nous devons aussi être conscients que Daech peut vouloir utiliser le flux des réfugiés pour faire passer des combattants. Nous devons le dire, en refusant toute naïveté, mais en mettant en garde contre les amalgames.

Les réfugiés n’ont bien sûr rien à voir avec le terrorisme, mais les terroristes peuvent utiliser des faux papiers fabriqués à partir d’anciens documents officiels de l’Etat syrien et de l’Etat irakien. C’est pourquoi nous devons être extrêmement rigoureux dans le contrôle des identités et dans l’utilisation des bases de données d’Europol et du système d’information de Schengen. Nous devons aussi nous appuyer sur la coopération au sein d’Interpol.

C’est aussi comme cela que nous éviterons les amalgames et que nous ferons passer à nos populations ce message essentiel: il faut refuser de désigner des boucs émissaires, de mettre à l’index toute une population en raison de sa religion, défendre très fermement nos valeurs, nos engagements au sein du Conseil de l’Europe et la Convention européenne des droits de l’homme. Encore une fois, c’est notre meilleure arme pour préserver l’unité de nos sociétés, nos valeurs démocratiques, et pour lutter contre ceux qui veulent les détruire, contre les terroristes.

LE PRÉSIDENT – Merci beaucoup, Monsieur le secrétaire d’Etat.

(Poursuivant en anglais) Nous reprenons la liste des orateurs.

M. Nikoloski, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. HARANGOZÓ (Hongrie)* – Tirant les leçons des terribles expériences des dictatures du XXe siècle et de la Seconde Guerre mondiale, on a créé le Conseil de l’Europe pour défendre les droits et les libertés fondamentales ainsi que la démocratie. Ce n’est qu’en appliquant ces normes et en respectant la primauté du droit que nous nous prémunirons des populismes autocratiques et que nous conserverons notre démocratie.

Le renforcement et l’extension de la démocratie libérale ont été au cœur de la réussite de l’Europe au cours des dernières décennies. Nous étions le continent de la liberté et de la richesse aux yeux du monde. Mais aujourd’hui, de plus en plus de personnes, y compris des dirigeants politiques, considèrent que ce n’est pas dans le cadre de la démocratie, fondée sur l’Etat de droit et sur les droits et les libertés fondamentales, que nous pourrons relever les défis du XXIe siècle. Et ces arguments sont exprimés haut et fort lorsqu’il s’agit de lutter contre le terrorisme.

Sans aucun doute, le terrorisme est une menace grave et nous devons nous doter d’outils pour le combattre. Nous pourrions repenser le rôle de nos institutions, en créer de nouvelles, ou renforcer celles qui existent. Mais cela ne doit pas conduire à la démolition ni même à l’érosion de tout ce que nous avons réussi à construire au cours des dernières décennies. Nous ne devons pas abandonner les valeurs européennes, qui sont l’essence de la richesse de l’Europe.

L’objectif du terrorisme est d’abattre ou de transformer les sociétés et les systèmes politiques et de susciter la peur afin que la population soutienne ces transformations. Les terroristes veulent détruire la culture politique européenne, faite de tolérance et d’inclusion. Ils veulent attirer de plus en plus de personnes déçues ou frustrées.

Dès lors, il n’est pas dans l’intérêt de nos concitoyens de limiter les droits et les libertés fondamentales. Au contraire: si nous abandonnons notre liberté, si nous portons atteinte à l’Etat de droit et à la démocratie, les terroristes auront gagné. La xénophobie et l’exclusion les conduiront à la victoire.

Voilà pourquoi je suis d’accord avec le rapporteur Kox: la défense des normes du Conseil de l’Europe n’est pas contraire à la lutte contre le terrorisme, elle en est la précondition.

Mme Oomen-Ruijten, Vice-Présidente de l’Assemblée, remplace M. Agramunt au fauteuil présidentiel.

Mme ÅBERG (Suède)* – La radicalisation croissante menace la sécurité de nos sociétés. Les actes violents doivent évidemment être punis comme le prévoit la loi, mais c’est par un large éventail d’actions de prévention qu’il faut combattre la radicalisation.

Les adultes qui sont en contact fréquent avec des enfants, par exemple dans les secteurs de l’éducation, du travail social et au sein des organes religieux, ont un rôle décisif à jouer dans la détection et l’éradication du processus de radicalisation. La responsabilité qui leur incombe doit être plus clairement énoncée.

On dit que le chômage, les politiques du logement, la ségrégation scolaire sont la cause de la radicalisation islamiste. Mais les terroristes islamistes sont loin d’être tous des jeunes hommes marginalisés venus des banlieues. Et si la pauvreté et l’injustice sociale étaient les causes du radicalisme, d’autres pays d’Europe seraient bien plus touchés que la Suède, le Danemark ou la Belgique.

Appelons les choses par leur nom: c’est d’une idéologie qu’il s’agit. La haine envers la tolérance des sociétés ouvertes, envers la liberté individuelle et la recherche de l’égalité: voilà le principal moteur de l’islamisme militant.

Nous combattrons par tous les moyens le projet d’imposer au monde un califat médiéval où les femmes n’ont aucune valeur, où l’homosexualité ou les croyances divergentes sont passibles de mort.

Que faire de ceux qui reviennent après avoir combattu dans les rangs de l’Etat islamique? Ce défi est particulièrement difficile à relever. Certains politiques préconisent de leur appliquer un traitement préférentiel en matière d’accès au marché du travail et au logement: c’est totalement inacceptable. En revanche, il faut rapidement diffuser les récits de ceux qui ont quitté l’Etat islamique lorsqu’ils ont pris conscience de ce que signifiait vraiment l’extrémisme violent: le meurtre, la mutilation et le viol.

Le meilleur moyen de mettre en échec le terrorisme islamiste est assurément de stabiliser la situation au Moyen-Orient, particulièrement en Syrie: les démocraties ne se combattent pas entre elles. Mais, en attendant, nous devons redoubler d’efforts pour lutter contre le radicalisme et l’extrémisme en Europe, sans jamais transiger sur les principes fondateurs de la démocratie.

Mme De SUTTER (Belgique)* – Qu’ils surviennent à Paris, à Beyrouth, à Tunis, à Bagdad ou à Istanbul, les attentats terroristes sont horribles. Ils sont horribles pour n’importe quel être humain, n’importe quelle religion, n’importe quel pays. Ils sont inhumains et doivent être fermement condamnés.

Dans son excellent rapport, très complet, sur les combattants étrangers, M. Van der Maelen souligne combien il est urgent de sensibiliser l’opinion publique, de coopérer avec les membres de la communauté internationale pour combattre le terrorisme, de consolider la démocratie, de protéger les droits de l’homme, de renforcer l’Etat de droit et de veiller à la sécurité démocratique – le tout afin de prévenir le terrorisme.

J’insiste sur ce dernier verbe, car la prévention mérite plus d’attention qu’elle n’en a reçu jusqu’à présent. Les attentats ont suscité en Belgique et en France, au niveau local et national, des réactions politiques que je soutiens, mais qui sont essentiellement répressives. La société a été traumatisée et les autorités locales subissent une pression politique considérable. Voilà pourquoi la partie de l’exposé des motifs intitulée «Réponses au niveau national et local» mérite toute l’attention de notre Assemblée.

Pourquoi ces jeunes, qui ont souvent un niveau d’études élevé, ne se sentent-ils pas à leur place dans nos sociétés? Comment mieux les intégrer au système éducatif et au marché du travail? Comment faire en sorte que davantage de femmes et de jeunes filles ne rejoignent pas l’Etat islamique pour épouser des djihadistes ou combattre elles-mêmes? Pourquoi celles qui le font le font-elles? À quel moment avons-nous échoué? Pourquoi, dans nos sociétés, certains jeunes sombrent dans la dépression, se suicident, tandis que d’autres, musulmans, rejoignent les rangs de l’Etat islamique? Telles sont les questions importantes que nous devons nous poser; elles vont bien plus loin que les thèmes dont nous discutons ici aujourd’hui, mais elles sont essentielles si nous voulons vivre ensemble en société à l’avenir.

À court terme, nous voulons tous mettre un terme à ces menaces potentielles. Mais ce n’est pas la seule solution nous permettant d’éradiquer le problème des combattants étrangers: d’autres en effet sont prêts à se battre de façon encore plus agressive. Nous ne devons donc pas simplement traiter les symptômes: nous devons également nous atteler aux causes de cette maladie.

La seule stratégie qui pourra fonctionner à long terme, c’est la prévention: elle est essentielle. Il faut également travailler sur internet et sur les réseaux sociaux afin de voir comment ces personnes sont recrutées. Il faut lutter contre le discours de haine; les programmes de déradicalisation sont importants.

Le Comité des Ministres, l’Assemblée parlementaire, le Conseil de l’Europe peuvent faire la différence en termes de prévention: la priorité du Conseil de l’Europe devrait être de lutter contre le terrorisme au niveau paneuropéen. C’est ainsi que nous arriverons à protéger les normes et valeurs du Conseil de l’Europe.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Lors du déjeuner, l’ambassadeur d’Israël nous a rappelé à quel point il est important de faire preuve de tolérance et de compréhension; mais il nous a également rappelé à quel point il était nécessaire de tout faire pour empêcher un nouvel Holocauste. Or ce que souhaite Daech, c’est un autre Holocauste: nous devons tous bien le comprendre.

Le Groupe des conservateurs européens ainsi que le Gouvernement britannique pensent que le meilleur moyen de lutter contre cette menace, c’est de promouvoir la stabilité et les droits de l’homme dans les zones de conflit. Mais nous voilà confrontés à un paradoxe car, pour agir ainsi, nous devons pouvoir recourir à la force: c’est ce que nous faisons aux côtés de nos alliés par nos interventions aériennes en Irak et en Syrie.

La torture et les mauvais traitements sont inacceptables: il s’agit là d’un principe fondateur de tout gouvernement démocratique, un principe fondateur de notre Conseil de l’Europe. Des pouvoirs d’enquête spéciaux doivent pouvoir être entérinés par le législateur et par les juges. Les terroristes utilisent les médias sociaux et internet et, pour défendre nos libertés souveraines – celles que nous souhaitons à tout prix défendre –, nous devons parfois lutter contre le feu avec le feu: il ne faut pas craindre d’agir ainsi.

S’il est nécessaire de retirer leur passeport à certaines personnes – nous avons des raisons de penser que 800 personnes ont cherché à quitter le Royaume-Uni pour se rendre en Syrie afin d’y mener le djihad tout récemment –, alors nous le ferons. S’il est nécessaire de rendre impossible le retour de djihadistes potentiels qui reviennent de leur camp de formation, nous le ferons. Je crois en effet que ces droits que nous souhaitons protéger, et dont doivent pouvoir jouir les citoyens de nos sociétés, l’emportent sur tout le reste.

La France a déclaré l’état d’urgence et un amendement proposé dans le cadre de ce rapport soulève cette question: j’espère que l’Assemblée s’y opposera car la France a le droit absolu de décider ce qui est dans l’intérêt de la France et de la sécurité du peuple français.

Nous avons été les témoins de ces bains de sang qui ont frappé Paris, Londres et dans d’autres pays: ils ne sauraient se multiplier.

Tout récemment, après le vote de la Chambre des Communes approuvant les bombardements en Syrie, il y a eu une agression contre un passant dans le métro de Londres. Un homme a brandi un couteau en disant «C’est pour la Syrie!». Un autre jeune homme lui a répondu: «T’es pas un musulman, mon pote!» Cela a été diffusé sur la planète entière et c’est vrai: Daech n’a rien à voir avec l’islam! Souvenons-nous que l’islamisme prend de multiples formes, de multiples visages: connaissons-les tous!

Mme KRONLID (Suède)* – Permettez-moi de remercier les deux rapporteurs pour les rapports particulièrement importants qu’ils ont établis.

Le développement du terrorisme représente une menace sérieuse pour la paix internationale et pour la sécurité. Toute forme d’extrémisme violent, qu’il provienne de la droite, de la gauche ou de l’islam radical, doit être combattue. C’est pourquoi il faut lutter également contre cette organisation autoproclamée Etat islamique.

Nous exprimons toute notre sympathie à la France. Nous sommes proches de tous ceux qui ont perdu des êtres chers dans ces attaques meurtrières. Nous sommes également proches de tous ceux qui ont été victimes d’actes terroristes en Europe, au Liban, en Tunisie et dans d’autres parties du monde.

Le rapport qui traite des combattants étrangers en Syrie et en Irak est essentiel. Il souligne des points particuliers concernant la psychologie des candidats au djihad. Cependant, le rapport aurait dû être plus clair car il laisse entendre que, de retour en Europe, les combattants étrangers n’auraient qu’à suivre tout simplement un programme de déradicalisation ou de réintégration et qu’ensuite, tout rentrerait dans l’ordre.

Mais il n’en est rien. Nous devons être particulièrement clairs: si une personne décide d’adhérer à une organisation terroriste et participe à des meurtres, voire à des génocides – par exemple de chrétiens –, alors elle doit être consciente qu’il s’agit d’un acte criminel. En outre, davantage de pays doivent ériger en infraction pénale le simple fait de voyager à des fins de terrorisme. Les personnes doivent savoir que si elles décident de voyager dans ce but, il y aura des conséquences.

C’est ce que l’on retrouve, à mon sens, dans l’article 6 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention du terrorisme. Le Conseil de l’Europe ne peut pas laisser croire que la seule chose qui attend les personnes de retour dans leur pays d’origine est un programme de reconversion ou de réintégration. Ces programmes sont certes essentiels en termes de prévention pour les jeunes qui courent des risques, mais cela ne suffit pas pour les personnes qui ont en tête de commettre des actes de terrorisme, en particulier lorsqu’elles ont lutté pour Daech.

Il faut absolument introduire des modifications conséquentes dans nos politiques afin que personne n’ait envie de participer à des activités terroristes et que personne n’envisage de quitter l’Europe à cette fin.

Mme DALLOZ (France) – L’un des droits les plus fondamentaux est celui de vivre en sécurité: en son absence, les autres libertés deviennent rapidement formelles. C’est si vrai que la Convention européenne des droits de l’homme, en son article 15, a prévu la possibilité d’y déroger en cas de guerre ou de danger public menaçant la vie de la nation.

La Cour européenne des droits de l’homme a eu l’occasion de préciser que, par danger public, il faut comprendre «une situation de crise ou de danger exceptionnel et imminent qui affecte l’ensemble de la nation et constitue une menace pour la vie organisée de la communauté», ajoutant que l’exigence d’imminence n’oblige pas un Etat «à attendre qu’un désastre survienne pour prendre des mesures propres à le conjurer». La France vient ainsi d’avoir légitimement recours à cette disposition, comme d’autres pays avant elle, et notamment le Royaume-Uni.

J’avoue avoir été surprise d’entendre certaines voix qui en appelaient à la démocratie. Le caractère temporaire des mesures, le fait que cette décision soit prise à la quasi-unanimité du Parlement français, sous le contrôle des juridictions françaises et, le cas échéant, de la Cour européenne des droits de l’homme, garantit le respect des valeurs du Conseil de l’Europe.

J’ai également été attristée par l’étrange guerre picrocholine, pour reprendre l’expression du journal Le Monde, engagée par les juridictions françaises de l’ordre judiciaire à l’encontre du Conseil d’Etat, dont chacun s’accorde à reconnaître l’indépendance, à commencer par le Président de la Cour européenne des droits de l’homme.

En cette période de crise grave, il n’y a de place ni pour l’angélisme, ni pour les querelles corporatistes. Au-delà du cas de la France, au-delà des mesures temporaires, se pose la question des mesures pérennes. C’est à cela que nous devons réfléchir.

Il est urgent de renforcer nos instruments de lutte contre le terrorisme. A cet égard, je me réjouis que le Conseil de l’Europe ait rapidement adopté une convention sur la lutte contre le terrorisme. De manière générale, essayons d’uniformiser la réponse aux terroristes, au sein de l’Union européenne comme du Conseil de l’Europe. La réforme du contrôle des frontières extérieures de l’Union en cours est aussi indispensable que de bons sens.

Il nous faut poursuivre et sanctionner impitoyablement les terroristes, dans le respect, naturellement, du droit à un procès équitable, mais sans aucune faiblesse. Un terroriste a clairement rompu tout lien avec la communauté nationale qu’il s’efforce de détruire. Pour autant, prenons naturellement garde d’éviter les généralisations abusives et de stigmatiser telle ou telle partie de la nation.

Le Conseil de l’Europe doit enfin constituer une excellente plateforme d’échanges de bonnes pratiques de lutte contre le terrorisme entre les Etats membres.

M. ROUQUET (France) – Vivre en sécurité est un droit de l’homme fondamental. Il est donc légitime que les Etats attaqués par le terrorisme prennent les mesures qui s’imposent pour protéger leurs citoyens.

La Convention européenne des droits de l’homme a d’ailleurs expressément prévu des dérogations partielles en cas de guerre ou de menace grave. Comme le soulignait récemment le Président de la Cour européenne des droits de l’homme, il s’agit de «restrictions temporaires, limitées et contrôlées». Il faisait aussi valoir qu’il nous fallait être réaliste. C’est à la difficulté de trouver un délicat équilibre entre ces exigences différentes que sont aujourd’hui confrontés la plupart des Etats démocratiques dans le monde.

C’est notamment le cas de la France, et je me réjouis de la présence en notre sein du secrétaire d’Etat Harlem Désir, qui nous a éclairé sur les décisions prises par la France. Mon pays a en effet pris un certain nombre de mesures d’exception, dont la proclamation de l’état d’urgence, qui a pour effet de suspendre certaines libertés. L’état d’urgence lui-même est d’une durée limitée et ne pourrait être prorogé que par une nouvelle loi. Cela s’est fait en proportionnant la riposte à la menace et en respectant justement nos valeurs. Ainsi, l’état d’urgence a été approuvé par le Parlement français à la quasi-unanimité.

Les mesures prises dans ce cadre sont également soumises au contrôle du juge, en particulier du Conseil d’Etat et du Conseil constitutionnel. La Cour européenne des droits de l’homme sera de même amenée, le cas échéant, à contrôler les mesures prises. La commission des lois de l’Assemblée nationale a pour sa part mis en place un mécanisme de suivi des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence.

Je voudrais aussi souligner que la situation est moins simple que ne se l’imaginent certains critiques. La frontière entre la criminalité et le terrorisme est poreuse et évolutive, comme l’ont hélas démontré diverses attaques terroristes récentes, ne serait-ce que pour la recherche d’armes. Il est donc légitime de s’attaquer, dans le cadre de l’état d’urgence, à des criminels non directement engagés dans la mouvance terroriste.

Des erreurs individuelles sont bien sûr toujours possibles, et il appartiendra aux juridictions compétentes de les redresser, mais, globalement, toutes les mesures prises s’inscrivent dans une logique de respect des valeurs du Conseil de l’Europe.

LA PRÉSIDENTE - M. Zech, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie)* – Permettez-moi tout d’abord de féliciter les deux rapporteurs pour la qualité de leur travail et d’exprimer mon soutien aux deux projets de résolution tels qu’amendés par les commissions compétentes.

Le point les plus important du premier rapport est la nécessité de trouver le juste équilibre entre, d’un côté, le devoir des Etats de combattre fermement le terrorisme et, de l’autre, leur devoir de garantir les droits et libertés fondamentales. C’est le principe de proportionnalité qui est pertinent en la matière. Il faut éviter toute mesure qui outrepasse ce principe.

En commission, j’ai rappelé un moment extrêmement important pour les Etats membres des Nations Unies, moment auquel j’ai assisté: la fameuse résolution adoptée par le Conseil de sécurité en 2014 sur les combattants étrangers, qui, pour lutter contre les combattants étrangers, limite l’exercice de certains droits et libertés, comme la liberté de circulation. Le présent rapport doit être lu à l’aune de cette résolution dotée d’une force juridique contraignante pour les Etats membres, qui ont été obligés d’adapter leurs législations nationales.

En ce qui concerne le second rapport, je soutiens les amendements employant le terme de «génocide», car c’est bien ce qui se passe en Syrie et en Irak: un crime contre l’humanité visant les communautés établies là-bas, dont la communauté chrétienne.

M. LOUKAIDES (Chypre)* – Mes félicitations aux rapporteurs.

La communauté internationale doit unir ses forces pour lutter contre le terrorisme, mettre en échec l’Etat islamique (EI) et punir les attaques perpétrées au Liban, en Egypte, à Jakarta, à Paris, en Turquie, malheureusement partout dans le monde.

Dans le même temps, la guerre civile qui ensanglante la Syrie doit absolument être interrompue. Il faut mettre un terme à toute activité commerciale avec l’EI et cesser de contrecarrer les forces qui le combattent sur le terrain.

La communauté internationale doit également réfléchir à ce qu’elle peut faire pour remédier aux difficultés socioéconomiques qui poussent tant de jeunes à rejoindre les organisations terroristes. Quel avenir pour la jeune génération, alors que le Moyen-Orient connaît le taux de chômage le plus élevé au monde, en gardant à l’esprit que 20 millions d’enfants ne vont pas à l’école du fait de la guerre et de la pauvreté? L’indignation du monde arabe est à son comble face aux crimes des autres pays dans la région. Pensons à ces jeunes qui ont été témoins des atrocités contre le peuple palestinien, des meurtres d’enfants en Afghanistan et au Pakistan, sans parler de la vente d’armes à des dictateurs sanguinaires. Pensons au danger que cela peut représenter, si l’on y ajoute encore la distorsion des dogmes religieux.

Enfin, qui a financé ces groupes en vue de les retourner contre des gouvernements hostiles, ce qui a permis la naissance du pire monstre qu’ait connu l’humanité depuis le nazisme? Certains pays de l’OTAN feraient bien de se regarder dans la glace, s’ils souhaitent apporter des réponses au terrorisme.

Par ailleurs, cher collègues, comme le suggère à juste titre l’intitulé de ce rapport, non seulement nous devons tout mettre en œuvre pour lutter contre le terrorisme, mais nous devons lutter contre le terrorisme sans aller à l’encontre des valeurs et des normes du Conseil de l’Europe.

Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a fait une brève déclaration à ce sujet, mettant en exergue le fait que la lutte contre la terreur menée par les Etats-Unis et nombre de pays européens s’est fait en violation d’un grand nombre de principes fondamentaux du droit international, ce qui a mené à la perte de dizaines de milliers de vies civiles innocentes.

Il s’est agi d’une stratégie inefficace, vouée à l’échec, même si les intentions qui animaient cette stratégie étaient peut-être sincères. En tout état de cause, l’humanité ne saurait accepter un nouvel Abou Ghraib, un nouveau Guantanamo, l’émergence d’un nouveau réseau secret de prisons de la CIA, un nouvel Afghanistan, un nouvel Irak ou de nouvelles techniques de renseignement de la NSA et du réseau Five Eyes!

M. AMEUR (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Les tragiques événements que notre monde a connus dernièrement mettent à rude épreuve notre humanité. Et il faut bien avouer qu’en tant que musulmans, nous le sommes doublement. Il est en effet très difficile pour les musulmans de foi ou de culture, de ne pas se sentir concernés et consternés plus que quiconque par les actes odieux qui ont été commis. Certes, ils sont perpétrés au nom d’une idéologie qui est aux antipodes de l’éthique de l’islam, mais la revendication religieuse explicite de leurs auteurs reste très éprouvante pour la conscience de la majorité des musulmans.

Cependant, quand on tente d’analyser globalement ces événements à l’aune des profondes mutations géopolitiques en cours, on s’aperçoit que le phénomène de radicalisation est le produit, entre autres, de quatre grandes impasses contemporaines: impasse du droit international et ses conséquences funestes, dont le perpétuel échec de la question palestinienne, le chaos de la guerre en Irak et son corollaire syrien, devenu aujourd’hui un important bourbier du radicalisme international et véritable trou noir de la géopolitique mondiale au Moyen-Orient; impasse de l’ordre économique néolibéral, source de de précarité socio-économique et d’exclusion aussi bien au Nord qu’au Sud; impasse du processus démocratique de la majorité des régimes arabes face à la recrudescence des tensions sectaires et de l’autoritarisme post-révolution arabe; impasse liée à l’insuffisance, voire à l’absence d’un contre-discours religieux capable de contrecarrer les incohérences du discours radical qui a la capacité d’embrigader des jeunes désenchantés et avides de discours enflammés que seule la nébuleuse des prêcheurs radicaux d’internet est en mesure de leur offrir.

C’est pour cela qu’il faudrait s’atteler à déconstruire le discours radical par l’alternative d’un discours réformiste, contextualisé et éthique de l’islam – autrement dit, celui d’un islam résolument progressiste qui mette en avant les valeurs socles du message spirituel.

Madame la Présidente, devant l’absence de projets qui font sens, beaucoup de jeunes au Nord comme au Sud, se retrouvent attirés par un projet absurde, mais avec un idéal. Le projet Daech fait sens dans sa radicalité. Il est la seule offre dont disposent actuellement les générations désœuvrées. Daech est un produit qui convient le plus aux jeunes en rupture de ban.

Pour conclure, je dirais que la lutte contre la radicalisation passe nécessairement par une politique internationale de lutte contre le terrorisme cohérente et solidaire, qui fait cruellement défaut aujourd’hui; par des solutions justes et durables aux conflits qui rongent le Moyen-Orient et la rive sud de la Méditerranée: Irak, Syrie, Libye, sans oublier le conflit israélo-palestinien; par la lutte contre les inégalités entre des territoires et des pays; par le renforcement de la démocratie, la consolidation de l’Etat de droit; et par une coopération internationale plus consistante et plus efficace pour soutenir les nouvelles démocraties.

Mme SOTNYK (Ukraine)* – Mes chers collègues, si vous me le permettez, je vais partager avec vous un ressenti personnel. Il y a de cela à peu près un mois, je me trouvais à cinquante mètres d’un lieu où s’est produite une attaque terroriste. J’étais à Jérusalem, près du Saint-Sépulcre.

J’ai assisté à cette attaque et, par la suite, j’ai essayé de me rappeler quels étaient mes sentiments à ce moment-là. Je me suis alors rendu compte qu’avant l’attaque, je me sentais totalement en sécurité. Tout semblait normal. J’étais dans un lieu qui me semblait sûr. Il y avait un grand nombre de soldats sur place. Je me sentais vraiment à l’abri et je ne pensais pas que quoi que ce soit puisse se produire. Ce n’est qu’après l’attaque terroriste qui a éclaté tout près de moi que je me suis sentie dans un autre état d’esprit. J’avais peur et me sentais impuissante.

C’est ce sentiment qui prévaut dans un grand nombre de pays. La population n’est plus sûre que son pays arrive à la protéger. C’est peut-être là l’aspect essentiel: lorsque l’on essaie de trouver des solutions à ce problème, nous devons tenir compte des sentiments des personnes.

Pour moi, la solution est double: il faut des leaders forts et il faut avoir une perception des raisons objectives du terrorisme.

Alors que nous cherchons encore des solutions, la menace du terrorisme grandit de jour en jour. Nous vivons dans un monde où des Etats soutiennent les organisations terroristes. Nous avons bien vu la Fédération de Russie soutenir les organisations terroristes sur place. Et nous avons vu aussi combien la situation peut être dangereuse et difficile en Syrie. Les terroristes s’y trouvent en position de force. Ils seraient même capables d’entrer en possession d’armes létales ou d’avoir accès au fameux «bouton rouge». Nous devons prendre conscience de tout cela et de ses conséquences. Mais chaque jour, dans le monde, les citoyens se sentent de moins en moins rassurés, de plus en plus impuissants, et ont peur.

Il faut le dire, car c’est aussi essentiel, pour les terroristes, les normes de la loi internationale ne signifient rien. Les terroristes ne s’assiéront pas autour d’une table pour négocier avec nous. Voilà pourquoi il nous faut vraiment réfléchir aux véritables raisons de ces attaques.

M. FOURNIER (France) – L’’excellent rapport de notre collègue, M. Van der Maelen, insiste à juste titre sur l’ampleur que le phénomène des combattants étrangers a atteint depuis que le conflit en Syrie a pris un tour confessionnel.

On le sait, l’organisation Etat islamique exerce un grand pouvoir d’attraction, voire de fascination sur des milliers de jeunes musulmans vivant en Europe, et aussi sur des convertis de fraîche date. Je crains malheureusement que ce flux ne soit pas près de se tarir, pour des raisons liées à la fois à l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations sur la Syrie et à la nature même de Daech.

Les structures et le mode de gouvernance de l’Etat islamique illustrent sa double origine salafiste et baasiste. On retrouve la référence à la «pureté» de l’islam des origines, avec le califat, la charia ou les décapitations au sabre, qui rencontre d’autant plus d’écho auprès de l’opinion publique que les «printemps arabes» ont engendré une grande désillusion, par exemple avec le renversement des Frères musulmans en Egypte, pourtant démocratiquement élus.

Mais la conquête et la gestion d’un territoire avaient aussi besoin du savoir-faire des anciens officiers de Saddam Hussein, dont beaucoup ont rallié l’EI. L’effacement de la frontière syro-irakienne n’est pas sans rappeler le panarabisme du parti Baas.

Certes, la coalition anti-djihadiste a entamé une reconquête du territoire de l’EI, qui aurait perdu 14 % de sa superficie au cours de l’année 2015, et il est raisonnable de penser que ce mouvement se poursuivra en 2016 en raison de l’intensification des frappes aériennes et de l’optimisme qui prévaut en Irak après la victoire militaire à Ramadi, la première de l’armée irakienne sans le concours de milices chiites.

Pour autant, gardons-nous de tout triomphalisme et souvenons-nous du précédent de l’Afghanistan, où les talibans regagnent chaque jour du terrain. Le califat autoproclamé pourrait opérer une mue dangereuse. La contraction territoriale pourrait se traduire par un accroissement du terrorisme djihadiste au-delà de ce territoire. À mesure que son ancrage en Syrie et en Irak se dilue, Daech pourrait chercher à activer ses cellules à l’étranger par une stratégie d’exportation du conflit – on l’a vu avec la multiplication des attentats dans le monde. Il pourrait aussi se replier en Libye, notamment à Syrte, où l’effondrement de l’Etat facilite son implantation. L’EI pourrait alors se transformer en une nébuleuse, un peu comme Al-Qaida, et devenir une organisation terroriste dotée de multiples ramifications reliées entre elles non par un pouvoir central, mais par une idéologie.

Tant qu’aucune solution politique n’aura été trouvée aux nombreux problèmes de la région, Daech aura malheureusement de beaux jours devant lui, et continuera d’attirer des combattants étrangers.

M. LIDDELL-GRAINGER (Royaume-Uni)* – L’idée qui a présidé à la création de cette Assemblée, en 1949, était la défense de la démocratie. En effet, notre Organisation a été créée dans le sillage de la guerre, pour montrer clairement que la démocratie valait la peine d’être défendue. À cette fin, chaque parlementaire, aussi bien chez lui qu’ici, et quelle que soit l’assemblée dans laquelle il siège – chambre haute ou chambre basse – a la responsabilité de protéger ses citoyens.

Chacun d’entre nous aura remarqué la présence de soldats et de policiers français patrouillant autour de notre bâtiment pour assurer la sécurité. La France, à juste titre, a pris en main les choses, en décidant d’assurer sa sécurité comme elle doit l’être compte tenu des événements de Paris. Personne ne remet en cause ce choix. Mais nous avons tendance à oublier que nos aspirations sont contradictoires: d’un côté, nous souhaitons – par exemple – pouvoir organiser des manifestations, mais de l’autre, quand des individus ont décidé d’ouvrir le feu ou de poser des bombes pour assassiner les gens et déstabiliser nos pays, il est de notre responsabilité de protéger les citoyens – M. Hollande doit le faire en France tout comme M. Cameron doit le faire chez moi.

En outre, il faut bien faire la différence entre le passé et la situation actuelle. En 1949, c’était la guerre froide, avec deux grandes nations se faisant face. Mais aucune d’entre elles n’était assez folle pour déclencher une troisième guerre mondiale. Je le sais bien pour avoir passé beaucoup de temps devant un mur en Allemagne, en tant que soldat, quand j’étais jeune – et, d’ailleurs, je ne voudrais pas recommencer. Aujourd’hui, les individus dont nous parlons ne respectent ni les frontières, ni la démocratie, ni le droit – toutes les valeurs dans lesquelles nous croyons –, pas davantage que les femmes, les enfants et les hommes. Ce que veulent ces personnes, c’est déstabiliser notre mode de vie. À cette heure, partout en Europe, nos services de renseignement essaient de les trouver avant qu’ils ne commettent de nouveaux crimes.

N’oublions pas que le rôle du Conseil de l’Europe est de protéger ses citoyens, où qu’ils se trouvent, de combattre le terrorisme international tout en protégeant les valeurs et les normes du Conseil de l’Europe. Pour ce faire, il convient de dire clairement aux gens qui ne les respectent pas que ce n’est pas tolérable – ça ne l’était pas en 1949, ça ne l’est pas davantage aujourd’hui.

N’oublions pas que l’histoire ne cesse de se répéter. Je vous le dis: n’oubliez pas tout ce que nous avons donné.

M. SCHENNACH (Autriche)* – J’aimerais insister particulièrement sur le rapport de M. Van der Maelen, parce qu’il donne matière à réfléchir.

Il y a quelques instants, M. Ameur a dit que les combattants étrangers étaient le fruit notre époque. Que s’est-il donc passé? Que s’est-il passé – en matière d’éducation et de valeurs, mais aussi sur le marché du travail – qui explique que quelqu’un adhère à cette forme moderne de la barbarie terroriste? Partout en Europe on voit se dessiner ce schéma: des jeunes partent à l’étranger, qui ne partagent visiblement pas du tout nos valeurs. Pour eux, la religion ne joue d’ailleurs strictement aucun rôle: quand une jeune femme catholique vivant en Croatie part rejoindre une bande de criminels et épouser l’un d’entre eux, où est le rapport avec la moindre valeur? Quand on fait de telles choses pour de l’argent, il y a clairement un décalage avec les générations précédentes, mais cela n’a rien à voir avec la religion.

Ces jeunes, quand ils reviennent, sont devenus eux-mêmes des criminels ou sont traumatisés, parfois même gravement blessés – on l’a vu en Autriche. Nous devons les accepter à leur retour et les condamner, mais ensuite les réintégrer dans notre société.

Comme le disait M. Loukaides, il faut, en outre, poser un certain nombre de questions. Qui finance? Qui achète le pétrole et les antiquités? Qui paie pour la libération des personnes kidnappées? Une population pauvre qui se voit ainsi taxée outre mesure. Qui gère tout ce système financier capable de s’approvisionner en armes et de les revendre et qui déploie toute une logistique coûtant une fortune? Il est clair que des flux financiers existent, ce qui veut dire que ces organisations sont financées par des flux de capitaux internationaux, contre lesquels il convient de lutter, au même titre qu’il faut agir sur le plan de la sécurité.

On parle d’un «Etat islamique», mais ce n’est pas un Etat: il s’agit d’un groupe terroriste. Les terroristes n’ont pas d’Etat. De plus, seul un Etat peut mener une guerre. Il n’y a donc, en l’espèce, ni Etat ni guerre.

LA PRÉSIDENTE* – M. Rochebloine, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. DI STEFANO (Italie)* – Je voudrais que l’on en revienne au véritable thème de notre débat, à savoir les combattants étrangers et la manière de lutter contre le terrorisme tout en respectant les normes et valeurs du Conseil de l’Europe.

Or, en l’espèce, nous avons d’ores et déjà dépassé les limites. Par exemple, en ce qui me concerne, pour arriver à Strasbourg, j’ai dû me soumettre à un certain nombre de contrôles à l’aéroport, comme si j’arrivais d’un autre continent. Avant les attentats de Paris, cela ne se passait évidemment pas ainsi.

Je suis désolé que M. Désir nous ait quittés, car j’aurais aimé l’interroger. En effet, la France a déjà annoncé qu’elle allait déroger à un certain nombre de normes du droit international afin de se débarrasser des terroristes. C’est donc à vous, chers collègues, que je poserai les questions suivantes. Savez-vous quel est le volume des échanges économiques entre la France et l’Arabie saoudite? Le dernier accord faisait état de 10 milliards d’euros. Savez-vous quel est le volume des échanges entre l’Italie et l’Arabie saoudite? Au cours des cinq dernières années, il était de 9 milliards d’euros. Et le montant des échanges économiques militaires entre l’Europe et Israël? Il est au plus haut niveau qu’on ait enregistré dans l’histoire.

Pour changer, nous devrions aller un peu plus loin que le simple aspect politique.

Il ne faut pas se voiler la face: le terrorisme est également le résultat de nos politiques économiques et de nos politiques étrangères. Je vais vous citer des exemples concrets, car il va falloir commencer à envisager des solutions.

Dans notre pays, par exemple, nous avons présenté une motion contre les combattants étrangers. Mais pour cela, il faut un certain nombre d’éléments, dont une véritable politique européenne qui, aujourd’hui, fait défaut. Il faut un fichier des passagers qui transitent sur le territoire européen; un fichier que nous n’arrivons pas à mettre en place, pour un motif que j’ignore. Il faut également travailler avec Interpol et les services de renseignements. Or aujourd’hui les services de renseignements des pays européens n’arrivent pas à communiquer entre eux, pour des raisons de sécurité nationale qui sont probablement encore liées à la guerre froide; mais qu’on en finisse avec cela! Car nous devons, aujourd’hui, faire face à une autre guerre.

Il faut également travailler sur les fonds qui alimentent l’Etat islamique. Nous pourrions essayer de créer un bloc pour éviter que les Etats ou que les individus qui financent, de façon directe ou indirecte, l’Etat islamique ne puissent plus le faire. Et surtout nous devons arriver à savoir d’où proviennent ces fonds: du Koweït? Du Qatar? Ou d’autres pays?

Enfin, nous devons penser à l’intégration. Cela signifie qu’un citoyen qui se trouve sur notre territoire – dans le cas des combattants étrangers – doit vraiment se sentir citoyen européen. Pour cela, nous devons supprimer les ghettos dans lesquels nous les parquons.

Mme DURANTON (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, la question des combattants étrangers dont notre Assemblée débat aujourd’hui est particulièrement sensible.

Les attentats de Paris en novembre dernier, dont l’organisateur présumé et plusieurs des auteurs avaient transité par la Syrie, ont naturellement suscité de nombreuses questions. Parmi celles-ci, l’une n’a toujours pas trouvé de réponse satisfaisante: qu’est-ce qui a bien pu pousser des jeunes d’une vingtaine d’années, non seulement à commettre des crimes de masse visant des inconnus, mais en plus à se faire sauter avec leurs victimes en actionnant une ceinture d’explosifs? Que se passe-t-il dans la tête de ceux que l’on appelle des djihadistes?

Selon une formule du politologue et spécialiste français de l’islam, Olivier Roy, nous ne sommes pas confrontés à une radicalisation de l’islam, mais à une islamisation de la radicalité. Daech enrégimente des jeunes qui sont déjà radicalisés, qui sont déjà entrés en dissidence et qui, quelle que soit la situation au Moyen-Orient, qu’ils ne connaissent de toute façon pas vraiment, cherchent une cause que leur révolte personnelle pourrait servir.

Deux catégories de jeunes sont particulièrement concernées: les musulmans dits de deuxième génération et les convertis, qui, pour des raisons différentes, sont en révolte contre leurs parents et nourrissent une haine d’eux-mêmes. Les musulmans de deuxième génération sont occidentalisés, mais ne perçoivent pas leur religion comme insérée culturellement. Quant aux convertis, ils adhèrent à un islam prétendument «pur». L’islam «modéré» ne les intéresse pas, car ces jeunes-là sont attirés par la radicalité. Ils sont en rupture avec leurs familles – qui ne les comprennent pas, comme le montrent les reportages dans lesquels sont interrogés les proches des terroristes –, mais aussi avec les communautés musulmanes. Le salafisme et le djihadisme sont des produits qui, sur le marché des idéologies contemporaines, leur conviennent parfaitement, comme on rejoignait l’ultragauche dans les années 70.

La violence de ces terroristes est une violence moderne, à la façon des tueurs de masse américains, qui met en évidence un nihilisme et un individualisme forcenés. Ce n’est ni la charia ni l’utopie qui les mobilisent, mais la mythologie du héros et la fascination de la mort. D’autant plus que, à notre époque, leurs crimes leur assurent une notoriété médiatique immédiate.

Ne négligeons pas non plus la dimension proprement religieuse, celle du martyr, qui pousse à commettre des attentats-suicides, et qui connaît un succès certain depuis la guerre d’Afghanistan, aujourd’hui démultiplié par les réseaux sociaux. La propagande de la «djihadosphère» fait des adeptes nombreux auprès de ces jeunes en rupture, y compris en Europe.

Il est crucial de combattre cette nouvelle forme d’endoctrinement religieux aux méthodes de nature sectaire si l’on veut tarir le flux des combattants étrangers en Syrie et en Irak.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Malgré l’étendue des paradoxes auxquels nous sommes confrontés, il faut se souvenir du deuil, cette force qui peut réunir les êtres humains. Parmi les maux du monde, le terrorisme est le pire de tous. Ce n’est pas une lutte dans le cadre de laquelle des arguments peuvent être avancés contre d’autres. C’est une marche pour la mort, la mort de l’humanité. C’est la raison pour laquelle nous pouvons accepter l’approche qui nous est proposée, qui vise à priver les terroristes d’affiliation nationale. Mais attention, des Etats associent le terrorisme à leur politique.

Aujourd’hui, nous échangeons nos avis sur ces combattants étrangers en Syrie, en Irak et dans ces groupes terroristes qui existent au-delà de ces pays, en Europe. Mais il y a parmi nous des pays qui soutiennent ouvertement le terrorisme et qui ont recourt aux politiques d’Etat pour pouvoir propager ce réseau international de la terreur. Nous discutons du terrorisme, mais nous devrions commencer par traiter du cas de l’Arménie, si nous ne voulons pas être hypocrites.

J’ai lancé un avertissement il y a 14 ans de cela, dans le cadre d’une proposition de résolution, en date du 14 juillet 2002. J’invoquais ces réseaux terroristes soutenus par l’Arménie, et qui sont notamment présents sur les territoires occupés de l’Azerbaïdjan, indiquant un par un les noms des groupes terroristes internationaux.

Or aucun compte n’a été tenu de ce que je disais. Aucune mesure n’a été prise pour empêcher la libre circulation des membres de Daech qui ont pu se rendre dans des camps de formation, notamment en Arménie et dans les territoires occupés qui restent hors contrôle international. Dans très peu de temps, des groupes terroristes, tels que ASALA, Union chrétienne des jeunes Arméniens, le Mouvement de libération de l’Arménie, le groupe Swedish, l’Union arménienne, le groupe Orly, les Chevaliers de Vartan, et d’autres encore, vont se livrer à une multiplication des attentats terroristes en Europe, au Proche-Orient, au Moyen-Orient et en Amérique du Nord.

J’attire votre attention sur un fait. En 1983, 60 personnes ont été blessées au cours d’un attentat commis par un Américain d’origine arménienne. Cet homme a été condamné à six ans d’emprisonnement. Mais quelques années plus tard, il est réapparu hors de France et a reçu en Arménie le titre de héros national, la reconnaissance suprême dans ce pays.

Etes-vous convaincus par ces propos?

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur Huseynov, êtes-vous dans le bon sujet? Nous débattons ici des rapports!

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Je parle du terrorisme. Un temps de parole m’est accordé, et je veux aller au bout de mon intervention. Merci de ne pas m’interrompre.

Pourquoi sommes-nous toujours en retard? Nous agissons toujours lorsque les drames sont intervenus. Pourquoi le Conseil de l’Europe n’a-t-il pas défini une position ferme?

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Omtzigt pour un rappel au Règlement.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Nous traitons des combattants terroristes étrangers en Syrie et en Irak, or je n’ai entendu aucun mot prononcé par M. Huseynov qui porterait sur le rapport présenté par M. Kox ou sur celui de M. Van der Maelen.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – J’ai droit à la parole et je vous demande, Madame la Présidente, de le confirmer.

LA PRÉSIDENTE* – Votre temps de parole a expiré, Monsieur Huseynov. Mais je vous rappelle que l’on vous demande d’intervenir sur les rapports présentés pour ce débat.

Mme Finckh-Krämer, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. STROE (Roumanie)* – Chers collègues, je voudrais pour ma part insister sur l’importance d’une coopération efficace avec l’Otan, les Nations Unies, l’Union européenne, l’OSCE et l’Union africaine. Un dialogue renforcé avec ces grands acteurs internationaux est très important.

Il est également important de travailler à l’amélioration de la coopération entre le Conseil de l’Europe et les parlements nationaux.

Afin de lutter efficacement contre le terrorisme, la coopération dans le domaine de la prévention, de la protection des infrastructures essentielles et des échanges de renseignements doit être renforcée.

J’appelle votre attention sur l’initiative roumano-espagnole lancée l’an dernier visant à la création d’une cour internationale contre le terrorisme. Une telle initiative représenterait une valeur ajoutée, pour au moins deux raisons. D’une part, pour envoyer un message cohérent et montrer que la lutte contre le terrorisme, qui est un phénomène très étendu, exige une réponse internationale utilisant les instruments juridiques internationaux. D’autre part, pour mettre l’accent sur la nécessité de faire progresser des solutions diplomatiques.

Parallèlement, une volonté politique de la communauté internationale doit prévaloir pour combattre le terrorisme par le droit. Il est indispensable d’utiliser des instruments juridiques puissants dans la lutte contre le terrorisme.

Enfin, l’ampleur du phénomène des combattants étrangers exige de nous une coopération accrue en matière de sécurité. Nous devons faire face non seulement aux conséquences, mais aussi aux causes du terrorisme.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan)* – Madame la Présidente, je parlerai de la lutte contre le terrorisme.

Les attentats qui ont eu lieu en Turquie, en France, en Indonésie et dans bien d’autres pays prouvent que le terrorisme est une menace sérieuse pour tous les pays, et qu’aucun ne saurait y échapper.

Nous devons combattre le terrorisme qui nuit à la stabilité et à la paix de différentes régions. Pour ce faire, il convient absolument de travailler avec les organisations internationales, dans le respect de la législation. Dans la lutte contre le terrorisme, il faut accorder la priorité à la résolution de la situation afin de limiter la diffusion de la menace. Un dialogue interculturel doit s’ouvrir.

Je viens d’Azerbaïdjan, un pays qui participe à la lutte contre le terrorisme à l’échelon international et qui souffre de ce phénomène. Le terrorisme fait partie intégrante de la politique d’occupation de l’Arménie, qui a commis de multiples attentats terroristes impliquant directement les forces de l’ordre. Elle procède à un nettoyage, à une purification ethnique, au détriment de la population civile. C’est ainsi que 20 % de l’Azerbaïdjan sont occupés et qu’un million de personnes sont des réfugiées ou des personnes déplacées de l’intérieur. Nous travaillons avec la population civile qui souffre. En outre, les infrastructures sont touchées.

Je tiens à appeler l’attention de mes collègues sur le rapport présenté hier, que l’Assemblée a rejeté, qui faisait référence à l’escalade dans le Haut-Karabakh. Il s’agit d’une véritable erreur car nous ne pourrons pas réagir comme il se doit et nous continuerons à assister à la terreur dans notre région. Et rien n’est fait pour lutter contre cela. J’ajouterai qu’il existe des liens entre le terrorisme, le séparatisme, l’extrémisme et la criminalité organisée. Je pense au blanchiment d’argent, fléau qui sévit sur le territoire de l’Azerbaïdjan.

Outre la menace terroriste par l’Arménie, l’Azerbaïdjan est également occupée par d’autres groupes terroristes. Notre pays est proche de régions sensibles qui représentent également une menace. Voilà pourquoi il faut contribuer aux efforts internationaux de lutte contre le terrorisme.

En outre, une certaine ignorance religieuse vient nourrir ces phénomènes, dans le monde, de nos jours. C’est ainsi que l’extrémisme et la terreur se diffusent.

LA PRÉSIDENTE* – Ce ne sont pas les thèmes des rapports dont nous débattons.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan)* – Nous discutons bien de la lutte contre le terrorisme?

LA PRÉSIDENTE* – Votre propos porte sur le thème dont l’Assemblée a traité hier. Nous passons à l’orateur suivant.

Mme ALLAIN (France) – La plupart des Etats occidentaux adoptent des lois dérogeant plus ou moins gravement aux principes démocratiques et aux libertés publiques. Le point commun entre tous ces textes réside dans l’absence de définition réelle de ce qu’est un acte terroriste.

La lutte contre le terrorisme légitime un renforcement considérable des pouvoirs des services de police, sans réelles garanties quant à leur usage.

Prenons le cas de la France. L’état d’urgence a donné le pouvoir à la police d’assigner à résidence et de perquisitionner sur simple décision administrative. L’application de cette mesure a pour le moins été problématique. Des agents de l’Etat ont ainsi conduit des perquisitions chez des écologistes dépourvus de tout lien avec le terrorisme. Des milliers de perquisitions ont eu lieu, terrorisant familles et enfants, sans, dans la quasi-totalité des cas, aucune suite judiciaire.

Pour justifier de tels actes, on avance parfois l’argument du contrôle juridictionnel. Je dois vous avouer éprouver quelques doutes. Lorsqu’on a envahi votre domicile en pleine nuit, avec force brutalités, le contrôle du juge a posteriori ne peut être qu’une maigre consolation, avec, au mieux, le versement d’une indemnité.

Si l’assignation à résidence est justifiée, si les soupçons sont avérés criminels et que les la vie de personnes est danger, son usage doit être strictement encadré.

Autre problème des législations d’exception: elles perdurent. Face aux attentats meurtriers, pour intervenir, les services de police, en France comme ailleurs, revendiquent toujours plus de pouvoirs en s’appuyant sur la peur, compréhensible, de nos concitoyens, et sur la volonté des gouvernants de sembler faire quelque chose, faute de produire des résultats visibles et rapides sur un phénomène aussi complexe que le terrorisme, lié aux dictatures de tous ordres et aux intégrismes.

Mais, maintenant, le Gouvernement français annonce vouloir intégrer l’état d’urgence dans la Constitution! L’exception devient la norme, la démocratie s’affaiblit, les libertés publiques se réduisent pour une très hypothétique sécurité des personnes.

Je tiens à cet égard à saluer l’intervention courageuse du Commissaire aux droits de l’homme et du Défenseur des droits, en France, Jacques Toubon, voix bien isolée, hélas!

Je ne peux aussi que me réjouir de la proposition de recommandation de M. Van der Maelen qui invite le Comité des Ministres à étudier la possibilité d’une définition juridique globale du terrorisme.

Je remercie les rapporteurs pour leur travail, mais nous devrions plutôt nous attacher à favoriser la lutte contre le racisme et les discriminations, au moyen d’une meilleure inclusion interculturelle de tous, une meilleure justice sociale, en tous lieux sur la terre pour élever les jeunes en citoyens du monde.

M. JENSSEN (Norvège)* – Nous ne devons pas, nous ne pouvons renoncer à nos libertés personnelles, à nos sociétés ouvertes, à notre Etat de droit en vue de mener la lutte contre le terrorisme. Nous avons besoin de ces libertés, de ces sociétés ouvertes, de notre Etat de droit pour combattre le terrorisme.

Le premier rempart réside dans la réponse des hommes et des femmes de nos pays qui insistent pour continuer leur vie quotidienne alors même que leur propre quartier a été ciblé par un attentat. Notre mode de vie est précisément ce à quoi les terroristes souhaitent porter atteinte. Nos libertés, notre Etat de droit, nos démocraties: voilà leurs cibles.

Cette semaine, nous avons entendu des représentants d’Europol exprimer leurs préoccupations. Daech prépare de nouvelles attaques contre des objectifs civils en Europe, la France étant particulièrement visée. Europol a des raisons de penser que Daech a constitué un groupe capable de mener des opérations comparables à celles des forces militaires spéciales. Europol évoque également la possibilité de cyberattentats, une autre façon de déstabiliser les sociétés modernes. C’est là un rappel.

Le terrorisme revêt de multiples formes et la lutte contre ce fléau requiert une grande variété de mesures. C’est précisément ce que proposent à la fois le plan d’action contre l’extrémisme violent menant à la radicalisation et le plan d’action qui a été adopté par le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. C’est également ce qui est indiqué dans les conclusions rendues par les ministres de la Justice de l’Union en novembre.

Un certain nombre des propositions de l’Union européenne pourraient inclure des contrôles accrus imposés aux citoyens au sein de la zone de Schengen, notamment un ajustement des lois, l’utilisation de certains moyens technologiques et la mise en place d’un système de partage d’informations.

Ce sont des mesures importantes qui, une fois mises en œuvre, ne porteront pas atteinte aux droits fondamentaux des citoyens.

Je voudrais souligner également l’importance d’aider les pays du Moyen-Orient à sortir eux-mêmes de la pauvreté et de l’instabilité. Il faut donner à nos jeunes des perspectives d’avenir. C’est aussi très important si nous voulons lutter contre les phénomènes de radicalisation. La croissance économique et le soutien au système éducatif, des institutions stables et non corrompues, tels sont les objectifs à atteindre pour la communauté internationale. Le Gouvernement norvégien a récemment lancé un Livre blanc pour une approche complète sur les menaces mondiales, les attaques terroristes, le cyberterrorisme et les réseaux criminels de financement. La lutte contre le terrorisme est complexe et doit être menée à l’échelon mondial. L’individu ressent la peur et l’anxiété. Tous les parlementaires du Conseil de l’Europe doivent s’efforcer, ici et à l’étranger, de construire des sociétés à la fois libres et sûres.

Mme QUÉRÉ (France) – Le Président Hollande s’adressant aux parlementaires français après les attentats du 13 novembre a rappelé que «la République française avait surmonté bien d’autres épreuves, qu’elle était toujours là, bien vivante. Ceux qui ont entendu la défier ont toujours été les perdants de l’histoire. Il en sera de même cette fois encore.»

Ceci me renforce dans la conviction que contre le terrorisme, la meilleure défense est de ne pas se laisser terroriser et de mener une vie aussi normale que possible. «Même pas peur!», comme ont dit beaucoup de nos concitoyens après les attentats du 13 novembre. Nous devons combattre sans faiblesse ces terrorismes qui sont l’antithèse absolue de nos valeurs, valeurs de liberté et de démocratie.

C’est pourquoi j’approuve la proclamation de l’état d’urgence en France, qui a été décidée de manière démocratique, sous le contrôle du Conseil constitutionnel et des juridictions compétentes, conformément à l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme. Je voterai la prolongation de cet état d’urgence. La vidéo mise en ligne hier par Daech nous rappelle que la menace est là et qu’à chaque instant elle peut surgir!

Face à ce danger, la véritable négation de nos valeurs serait de ne pas défendre nos sociétés car ce ne sont pas seulement des hommes et des femmes qui étaient visés par les attentats : c’est notre mode de vie, notre modèle démocratique, notre art de vivre! Pour autant, ne laissons pas la haine, le repli sur soi et surtout les nationalismes nous dicter nos choix politiques.

Ne laissons pas non plus nos jeunes tomber dans le piège de la rhétorique de Daech: non, il n’y a pas un monde meilleur après la mort «en martyr»; non, la vie de femme de «combattant» de l’Etat islamique n’est pas enviable, cette vie entre «sœurs» est proche de l’horreur, elle est la négation la plus élémentaire des droits des femmes pour lesquels de nombreuses femmes du monde arabe se battent chaque jour!

Je me réjouis à cet égard de l’adoption par le Comité des Ministres d’un protocole additionnel à la Convention pour la prévention du terrorisme, dont l’objectif est de répondre au problème des combattants terroristes étrangers. La France a commencé le processus de ratification au Parlement et j’espère que malgré un ordre du jour très chargé, nous réussirons à voter cette ratification très vite.

Je regrette en revanche la position du Secrétaire Général sur la prolongation de l’état d’urgence dans mon pays. L’état d’urgence ne nous empêche pas de respecter nos valeurs et notamment de condamner avec fermeté tous les actes de haine et d’antisémitisme. L’état d’urgence ne nous empêchera pas d’accueillir des réfugiés syriens et de faire notre devoir de solidarité. L’état d’urgence ne nous empêchera pas de continuer à défendre les droits de l’homme et l’Etat de droit partout où ils sont menacés!

Mme KAVVADIA (Grèce)* – Le 25 novembre 2015, sur le site web du Conseil de l’Europe, un communiqué du Secrétaire Général indiquait que le Gouvernement français l’avait informé que certaines dispositions de l’état d’urgence en France pourraient déroger à l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme. Nous sommes très inquiets du non-respect de ce texte et nous pensons que de nombreux dangers sont à craindre dans un climat de crise. La reconduction de l’état d’urgence fait craindre le risque de vivre en permanence selon une législation qui limite les droits de l’homme les plus élémentaires. Un état d’urgence ne peut avoir une durée indéfinie. Le danger est grand que les mesures prises dans ce cadre soient utilisées à d’autres fins, notamment pour poursuivre des individus qui n’ont aucun rapport avec le terrorisme.

La Convention européenne des droits de l’homme est la base du système supranational de protection des droits de l’homme et des libertés démocratiques en Europe. Nous devons protéger ces valeurs, même si chaque Etat membre a le droit d’examiner les mesures nécessaires à la sécurité de ses citoyens. Il faut bien sûr se défendre, mais il faut aussi défendre la culture juridique de l’Europe. Le rôle du Conseil de l’Europe est très important à cet égard. Les terroristes ne pourront jamais changer notre façon de vivre et de penser. Ils le veulent, mais ils n’y arriveront pas.

Nous devons trouver une solution pacifique à la guerre en Syrie, première cause du terrorisme en Europe. La Syrie est le champ de confrontation de toutes les grandes puissances de notre époque. Nous devons absolument trouver une réponse au niveau européen au conflit dans ce pays.

Mme EL OUAFI (Maroc, partenaire pour la démocratie) – Mes chers collègues, nous condamnons fermement les actes terroristes, qui ne peuvent être justifiés par aucune raison religieuse ou politique. L’idéologie extrémiste et les organisations qui la véhiculent sont dangereuses à de multiples égards. Leur condamnation doit s’accompagner d’une analyse rigoureuse des causes et des zones d’ombre. Les sociétés européennes ne doivent pas prendre le risque de casser la confiance: elles doivent refuser les amalgames et lutter contre les discours islamophobes.

Dans une démocratie européenne digne de ce nom, il faut refuser l’amalgame entre les terroristes et les musulmans. Pour combattre Daech, la stratégie doit être d’apporter des réponses politiques aux conflits en Syrie et en Libye. L’Union européenne doit renforcer son soutien aux pays qui connaissent une transition économique et démocratique après le «printemps arabe». Il faut agir sur les problèmes de société qui ont produit les monstres terroristes. La politique peut apporter des réponses en protégeant les jeunes musulmans issus de l’immigration. La marginalité socio-économique s’accompagne malheureusement souvent d’une ségrégation sociale, qui conduit de jeunes musulmans européens vers le terrorisme.

La politique doit agir pour les protéger d’une idéologie meurtrière, mortifère, qui n’a rien à voir avec les valeurs essentielles de l’islam: la tolérance, la paix, le dialogue, l’amour, la liberté.

Combattre Daech, c’est aussi protéger ces jeunes de la manipulation culturelle et religieuse de cette organisation en Europe, les éduquer en matière religieuse par le biais d’interlocuteurs rodés et respectés sur le terrain, prendre plus au sérieux les réalités sociales pour éviter la marginalisation des cibles potentielles. C’est protéger les normes et valeurs des droits de l’homme défendues par le Conseil de l’Europe.

Les musulmans sont les premières victimes du terrorisme islamiste. Ce n’est pas l’islam qui produit les terroristes. Ces derniers se revendiquent de l’islam mais n’ont rien à voir avec l’islam. En revanche, ils sont le produit de toutes les fractures et les déchirures de la société, d’un parcours compliqué, de l’immigration et de la complexité internationale.

Nous sommes convaincus que la réponse au terrorisme, c’est l’éducation citoyenne grâce à des politiques publiques d’insertion sociale et à l’éducation à une citoyenneté pluraliste, fondée sur les valeurs européennes. L’histoire européenne nous enseigne l’importance des migrations, de l’islam, des musulmans, de la citoyenneté multiculturelle, de l’ouverture et de la communication entre les cultures et les religions.

LA PRÉSIDENTE* – Mme Lībiņa-Egnere, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

Mme MATEU (Andorre) – Nous examinons deux excellents rapports dont nous avons peu évoqué le contenu. Ils abordent deux phénomènes: l’un, déjà bien connu, est le terrorisme international, dans ses liens avec les normes du Conseil de l’Europe, elles aussi connues et bien établies; l’autre, apparu plus récemment, concerne les combattants étrangers partis en Syrie et en Irak et dont certains sont revenus ici pour commettre des actes terroristes.

Il faut le souligner, les rapporteurs ne se contentent pas de faire un état des lieux et de tenter de comprendre les raisons pour lesquelles on en est arrivé là: ils proposent aussi des pistes pour éviter ou prévenir ces phénomènes.

J’ai entendu beaucoup d’appels à une approche plus sécuritaire: il faudrait dresser des barrières, des murs, etc. J’aimerais vous parler d’une expérience personnelle. Juillet 1995: un attentat frappe le RER B à Paris. J’étais dans le wagon d’à côté. Je fais partie des survivants – sans grand dommage, à part des tympans explosés. Mais voici ce qui m’en est resté. Des innocents ont été touchés; c’était il y a vingt ans. À l’époque, on a instauré le plan Vigipirate. Pourtant, le phénomène s’est amplifié, au point qu’aujourd’hui, nous en sommes à l’état d’urgence. Entre-temps, il y a eu de très gros attentats – à New York, à Madrid et ailleurs. La réponse sécuritaire, les plans comme Vigipirate ont le mérite de rassurer un peu la population; mais, au moins au cours de ces vingt ans, ils n’ont pas permis d’endiguer le phénomène, au contraire. Cela devrait nous inciter à nous poser des questions.

Nous devons donc explorer les pistes que nous suggèrent les rapports. Evidemment, parmi ces pistes, il y a l’éducation: certains jeunes n’ont plus de repères; or, pour se former, ils en auraient besoin.

Je vous recommande vivement d’adopter ces deux rapports et d’aller de l’avant au lieu de regarder en arrière.

Mme AHMED-SHEIKH (Royaume-Uni)* – Je suis heureuse de prendre pour la première fois la parole dans cette enceinte, sur un sujet aussi important – surtout aujourd’hui, alors que nous célébrons la mémoire de l’Holocauste et nous efforçons de tirer les leçons du passé.

Le mois dernier, j’ai eu l’honneur de présider à la Chambre des Communes une réunion organisée par Syria Solidarity Movement au cours de laquelle a été abordé le conflit syrien vu par les femmes. Une participante a déclaré que l’opposition au terrorisme devait venir de la société civile. La promotion et la protection d’une société civile libre et ouverte sont en effet essentielles à la défense des valeurs qui nous sont chères.

Le conflit auquel nous assistons n’oppose pas l’Occident au monde musulman, il oppose la justice et la liberté au meurtre et à l’oppression. Les musulmans, le monde musulman ne sont pas nos ennemis. Ils sont eux aussi victimes de la tyrannie, victimes de Daech.

J’ai rencontré récemment des femmes syriennes qui m’ont parlé des initiatives de paix et de la manière dont les femmes aident concrètement leurs propres communautés sur le terrain. En Syrie, les femmes ont été en première ligne pour combattre le recrutement des enfants dans les groupes armés, conduire et coordonner le désarmement des hommes dans les lieux publics et dans certains camps de réfugiés, pour que les enfants ne voient pas des armes dès qu’ils se déplacent. Il me semble que c’est en soutenant ce type d’action que nous pourrons contribuer à préparer la société de demain, au-delà du conflit actuel, et dans toute la région.

Lorsque j’ai visité le camp de réfugiés de Nizip, en Turquie, à l’automne dernier, j’ai constaté que ces gens qui avaient fui pour leur propre sécurité ne désiraient rien davantage que de rentrer chez eux.

Voilà pourquoi il faut agir maintenant, au-delà de la campagne militaire en cours, en posant les fondations d’un avenir de paix dans la région.

Il faut aussi tendre la main à d’autres pays de la région et leur faire part de nos valeurs et de nos pratiques en matière de droits de l’homme. Ainsi, je me suis récemment rendue en Iran, où je me suis entretenue avec différents ministres à propos des droits de l’homme. Nous devrions profiter du retour de ce pays au sein de la communauté internationale pour expliquer la manière dont nos valeurs de justice et de liberté permettent de créer une société plus sûre et plus juste.

À mes yeux, toute mesure qui marginaliserait le rôle des femmes dans ce conflit ou qui porterait atteinte aux droits des femmes en Europe serait une dangereuse régression.

Ce sont nos valeurs qui nous sauveront de l’extrémisme. La promotion de l’égalité et des droits de l’homme en Europe et ailleurs est essentielle si nous voulons triompher de nos ennemis. Car ce sont ces valeurs que les terroristes craignent le plus.

M. ARIEV (Ukraine)* – Le terrorisme et les réfugiés: voilà les priorités politiques de l’Occident dans l’avenir proche. Mais qu’en est-il des terroristes dans le sud de l’Ukraine? Qu’est-ce donc que le comportement de la Russie vis-à-vis de l’Ukraine, sinon une terreur organisée? Tout le montre, c’est du terrorisme international, et rien d’autre. Qui sont les mercenaires dans le Donbass? Des Russes, des Serbes: des citoyens d’autres pays qui ont pris part aux combats dans l’est de l’Ukraine.

Le mois dernier, la Russie et ses terroristes ont changé de tactique. Ils ont lancé l’artillerie lourde et des roquettes pour mener des opérations de sabotage et de reconnaissance contre l’Ukraine.

Un livre sur les crimes de la Russie a été présenté aujourd’hui lors d’une table ronde à propos du terrorisme en Ukraine, et encore n’évoque-t-il que les affaires principales.

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur Ariev, je vous rappelle que nous sommes en train de parler de la lutte contre le terrorisme international et des combattants étrangers en Syrie et en Irak.

M. ARIEV (Ukraine)* - Je suis désolé, mais vous interprétez mal mes propos. Je parle du terrorisme international.

LA PRÉSIDENTE* – Je dois appliquer le Règlement. Tout orateur ne doit traiter que du thème en discussion. Puisque tel n’est pas le cas, je vous retire la parole.

La parole est à Mme Pashayeva, que j’avertis pareillement. Si elle ne s’en tient pas strictement au sujet, je lui couperai le micro.

Mme PASHAYEVA (Azerbaïdjan)* – J’interviens en tant que ressortissante d’un pays qui a subi le terrorisme. Moi-même, j’ai perdu un ami très cher dans un attentat.

Que devons-nous faire pour lutter contre le terrorisme? Je partage les avis du rapporteur, mais comment être efficaces quand le terrorisme devient de plus en plus fréquent? Pour commencer, il ne faut pas faire de distinction entre les terroristes car il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures en cette matière.

Je suis musulmane, mais, tout comme vous je suis pour la lutte contre Daech. L’islam est une religion qui prône la paix et qui refuse l’assassinat d’innocents. Daech ne représente pas les musulmans. Ce sont les musulmans qui sont les principales victimes de Daech – les musulmans et l’islam en tant que religion.

J’ai rencontré de nombreux Syriens et Irakiens qui ont témoigné des horreurs de Daech. Comprenez-bien que Daech frappe aussi, et peut-être principalement, des musulmans. Il faut le comprendre, chers amis Européens! Daech lance des appels pour terroriser les musulmans. Ils ont une vue dévoyée de l’islam. Nous devrions tous être préoccupés par ces phénomènes, tout en nous inquiétant de la résurgence et de la montée de l’islamophobie.

Pour être efficaces dans la lutte contre le terrorisme, nous devons coopérer davantage. Plus que jamais, l’Europe a besoin de plus de coopération. Le terrorisme est l’ennemi de l’humanité tout entière. Tous ensemble, nous devons nous unir dans cette lutte, sans appliquer de «deux poids, deux mesures».

J’ai un enfant qui réside à Istanbul. Lorsqu’un attentat a frappé Istanbul, il y a quelques jours, j’ai mis quelque temps avant de pouvoir le joindre: imaginez ma crainte! La Turquie, qui a une très longue frontière avec la Syrie, est en première ligne dans la lutte contre le terrorisme. Elle mérite certainement plus de soutien dans ses efforts de lutte contre le terrorisme.

Ne laissons jamais dévoyer la religion!

LA PRÉSIDENTE* – Merci, vous avez parfaitement compris quel était le sujet!

Mme Guzenina, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Oomen-Ruijten au fauteuil présidentiel.

M. STOILOV (Bulgarie)* – Le conflit au Moyen-Orient remonte à bien longtemps, mais on ne saurait le comprendre sans tenir compte des influences extérieures, notamment celles du monde occidental. L’idée que le «printemps arabe» permettrait de démocratiser la région s’est malheureusement évanouie très rapidement.

Dans certains pays, on s’est contenté de détruire l’Etat. Dans d’autres, des groupes islamistes radicaux sont au pouvoir et la situation est rendue encore plus complexe par l’implication de combattants étrangers dans des actions armées. Certains d’entre eux proviennent de pays de la région du conflit et les motifs de leur participation à ces actions militaires ne sont pas toujours de nature purement financière.

Nous devons absolument rejeter et condamner fortement ces actes, mais ce n’est pas cela qui, en tant que tel, rendra le monde plus sûr. Les citoyens, notamment européens, ont le sentiment extrêmement inquiétant que tout dépend d’un certain nombre de facteurs financiers et qu’ils ont du mal à influer sur les grandes décisions politiques.

La polarisation sociale, l’individualisme forcené et le manque de perspectives attrayantes pour l’avenir provoquent une remise en question des identités. Cela aboutit au fanatisme et à l’agressivité. Il faut donc œuvrer pour l’inclusion sociale, une éducation plus accessible, l’emploi, la lutte contre les inégalités et contre l’érosion de l’Etat-providence.

Nous devons remettre en place la substance même de la démocratie et veiller à prendre en compte les problèmes, sur lesquels il convient de mettre un nom. Ne parlons pas d’opposition modérée en Syrie: il s’agit d’une résistance politique et militaire au gouvernement. Ne disons pas que le radicalisme est l’équivalent du fanatisme. Il ne faut pas vider les mots de leur sens. Tout ce qui est radical n’est pas nécessairement mauvais. Des changements radicaux dans les institutions et la politique sont peut-être les meilleurs moyens de juguler l’extrémisme.

La lutte contre Daech ne doit pas devenir l’otage de controverses entre certains pays et certains intérêts particuliers. Cette lutte doit être au même niveau que la sauvegarde de nos valeurs fondamentales: la paix, la sécurité, ainsi que la liberté, l’égalité et la fraternité.

Cette concurrence des idées peut certes aboutir à un renouveau de la politique. Il faut lutter non seulement avec des moyens militaires, mais également avec des politiques intérieures cohérentes et prenant en compte les problèmes économiques et sociaux.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Je souhaite rappeler le titre du rapport de M Kox : «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe».

Je remercie M. Kox de nous avoir donné la possibilité d’aborder cette question, mais le principal problème du rapport, c’est qu’on n’y parle pas du tout du terrorisme d’Etat. On parle abondamment de telle ou telle organisation, l’EI ou d’autres, qui organisent le terrorisme, mais on n’évoque absolument pas le terrorisme d’Etat.

Quelle est la différence entre des dizaines d’actes terroristes, à Kiev et ailleurs, qui ont détruit des milliers de vie, et les attentats de Paris qui ont également tué des dizaines de personnes? Il n’y a pas différents types de terrorisme: c’est du terrorisme!

Qu’est-ce que la terreur?

Il ne faut pas parler de terrorisme islamiste ou orthodoxe, mais «du terrorisme» qui est une méthode employée pour régler des problèmes politiques non par les élections ou le dialogue, mais par les armes. C’est bien de cela qu’il faut parler dans nos rapports, et non de terrorisme islamiste, chrétien ou orthodoxe.

Toute la politique de l’Etat islamique doit être combattue, ce qui implique d’organiser des actions un peu partout dans le monde, y compris ici et aux Nations Unies, afin d’en finir avec la terreur.

En outre, quand une attaque est menée, la question est d’abord de savoir qui dispose de tels instruments terroristes. C’est un aspect qui aurait dû également être abordé dans le rapport.

LA PRÉSIDENTE* – Il nous faut maintenant interrompre l’audition des orateurs.

Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent transmettre, dans les quatre heures, leur intervention dactylographiée au service de la Séance, pour publication au compte rendu. Cette transmission doit être effectuée, dans la mesure du possible, par voie électronique.

J’appelle la réplique des commissions.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je donnerai deux conseils à nos collègues qui, de retour dans leurs parlements nationaux, parleront des combattants étrangers.

Tout d’abord, il est très important de développer un contre-discours efficace. La méthode de Daech pour influencer les jeunes est très professionnelle. Je conseille donc à nos collègues de mettre à profit l’expérience des meilleurs experts en relations publiques de leurs pays pour mettre au point ce contre-discours, et de faire également appel aux gens qui sont revenus de Syrie et d’Irak, car ce sont les mieux placés pour dissuader des jeunes qui pourraient être attirés par cette idéologie.

En outre, nous avons également besoin d’une approche centrée sur les femmes, car beaucoup de jeunes femmes partent après avoir été sensibles à d’autres arguments. Or, je ne connais à ce jour qu’un ou deux pays qui ont développé un contre-discours ciblé sur les femmes.

M. KOX (Pays-Bas), rapporteur* – Nos conclusions et propositions ont été largement soutenues et j’en remercie les groupes politiques et la plupart des orateurs.

Monsieur Sobolev, ce rapport se concentre sur le terrorisme islamiste, et je n’ai pas reçu d’objection à ce sujet en commission. Ses conclusions ne sont nullement contradictoires, mais complémentaires, et c’est pourquoi il faut continuer de faire le nécessaire dans les 47 Etats membres. Le projet de résolution demande ainsi à l’Organisation de continuer à évaluer la proportionnalité des mesures prises, conformément à l’article 52 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le Secrétaire Général devra bien sûr nous informer régulièrement.

Par ailleurs, je constate un soutien concernant mes propos sur Daech et la nécessité de couper les flux financiers vitaux du terrorisme. Il faut encourager la convention visant à lutter contre ce genre de trafics. Il faut aussi que les pays voisins ratifient la Convention de lutte contre le terrorisme et ses protocoles. J’espère que le projet de résolution encouragera les gouvernements à éradiquer le terrorisme, notamment par le biais de l’éducation et d’une société inclusive.

Ce rapport a reçu un très large soutien, et c’est dû en grande partie au soutien que j’ai moi-même reçu de la part de notre secrétariat. Je savais déjà que celui-ci était très coopératif, mais je voudrais le remercier tout particulièrement, compte tenu du peu de temps dont je disposais.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission des questions politiques de de la démocratie* – En tant que président, je tiens à remercier pour leur travail remarquable nos rapporteurs et rapporteurs pour avis. Nous avons travaillé en bonne intelligence avec les commissions pour avis, et pratiquement tous les amendements ont pu être repris. Nous avons également eu des échanges de vues en commission avec le coordinateur de l’Union européenne pour l’action antiterroriste, M. de Kerchove; il est important de travailler avec l’Union européenne sur un tel sujet.

Le rapport de M. Kox a été élaboré en un temps record, en partie en présence de M. Jagland, avec qui nous avons eu grand plaisir à discuter; cela a enrichi nos travaux.

Nous soutenons le plan d’action et insistons sur la nécessité de tarir les sources de financement du terrorisme.

Le principal message de ce débat, qui a été aussi celui du ministre français Harlem Désir, est que le combat contre le terrorisme et le respect des normes du Conseil de l’Europe ne sont pas antagonistes mais complémentaires. Agir autrement ne ferait que renforcer le terrorisme. Les terroristes ne souhaitent qu’une chose: modifier notre mode de vie en nous faisant peur.

LA PRÉSIDENTE – Nous en venons au premier rapport sur «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe» (Doc. 13958).

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel deux amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer l’amendement 1, qui a été adopté à l’unanimité par la commission, comme adopté par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président?

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – En effet.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence cet amendement est déclaré adopté définitivement.

Nous en venons à la discussion de l’amendement 2.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention sur les amendements est limité à trente secondes.

M. LE BORGN’ (France), rapporteur pour avis – Au nom de la commission des questions juridiques, je souhaite proposer l’amendement 2, qui vise à donner l’opportunité à la Commission de Venise d’analyser le projet de révision constitutionnelle français portant sur la constitutionnalisation de l’état d’urgence et la déchéance de nationalité.

Je précise qu’il ne s’agit pas de juger le projet, mais d’apporter un éclairage supplémentaire et utile d’une organisation à l’autorité reconnue, afin d’irriguer de manière positive notre débat public comme notre débat parlementaire.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Je pense que cette question relève entièrement au Gouvernement de la France – je regrette que le secrétaire d’Etat français ne soit plus là pour entendre cela. Je pense que cet amendement soit approprié.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L’amendement 2 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13958, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (100 voix pour, 11 voix contre et 5 abstentions.)

LA PRÉSIDENTE* – Nous en venons au second rapport sur «Les combattants étrangers en Syrie et en Irak» (Doc. 13937).

La commission des questions politiques et de la démocratie a présenté un projet de résolution sur lequel 17 amendements ont été déposés, et un projet de recommandation sur lequel 5 amendements ont été déposés.

Nous commençons par le projet de résolution.

J’ai cru comprendre que le président de la commission des questions politiques et de la démocratie souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 6 et 12, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président?

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – En effet.

LA PRÉSIDENTE* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence les amendements 6 et 12 sur le projet de résolution sont déclarés adoptés définitivement.

Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements révisé.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Je suis saisie de l’amendement 4.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Je soutiens cet amendement ainsi qu’un sous-amendement oral, qui vise à affirmer que l’entité terroriste qui s’appelle Daech et non EI, a perpétré des actes de génocide. La commission compétente des Nations Unies en a été convaincue. Nous pouvons donc dire qu’ils «ont» commis et non qu’ils «peuvent avoir» commis.

LA PRÉSIDENTE* – La présidence a, en effet, été saisie par M. Omtzigt du sous-amendement oral suivant:

À l’alinéa 2 de l’amendement 4, substituer aux mots «peuvent avoir» le mot «ont».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants dûment désignés au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Il est défendu.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à ce sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous en revenons à l’amendement ainsi sous-amendé.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission y est favorable.

L’amendement 4, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 5.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Je présente un sous-amendement oral, car il serait surprenant que l’on parle de «valeurs européennes» alors que l’on évoque la Syrie et l’Irak. Mieux vaut parler de valeurs universelles.

LA PRÉSIDENTE* - La présidence a, en effet, été saisie par la commission des questions politiques du sous-amendement oral suivant:

À l’alinéa 2 de l’amendement 5, substituer au mot «européennes» le mot «universelles».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants dûment désignés au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Van der MAELEN (Danemark), rapporteur* – Nous le soutenons.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Nous en revenons à l’amendement ainsi sous-amendé.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Avis favorable de la commission.

L’amendement 5, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 7.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Madame la Présidente, nous devons faire face à un grand nombre de réfugiés et de nombreux pays éprouvent de grandes difficultés à maintenir la volonté politique de les accueillir. Or, bien souvent, ces personnes et leur famille ont souffert du fait des combattants de Daech. Il est donc essentiel de ne pas accorder le statut de réfugiés à ceux-là même qui ont menacé leur vie.

Mme LUNDGREN (Suède)* – Cet amendement pose problème parce que l’on parle de combattants qui «peuvent» avoir perpétré des actes de génocide. Je me dois donc de m’opposer à cet amendement en l’état.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à l’amendement.

L’amendement 7 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 8.

J’ai cru comprendre que M. Omtzigt souhaitait le retirer.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – En effet, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* - L’amendement 8 est retiré.

Je suis saisie de l’amendement 9, qui fait l’objet d’un sous-amendement oral.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Un certain nombre de pays ont privé les combattants étrangers de leur nationalité. Toutefois, la convention sur l’apatridie doit être respectée – il convient, notamment, de tenir compte de la double nationalité. Si un Etat peut effectivement déchoir de sa nationalité quelqu’un qui agit contre les intérêts dudit Etat, un certain nombre de garanties doivent être apportées. Tel est l’objet de cet amendement.

LA PRÉSIDENTE* – La Présidence a été saisie par la commission des questions politiques du sous-amendement oral suivant:

«À la seconde phrase de l’alinéa 2 de l’amendement 9, substituer aux mots: “est admissible, pour autant” les mots: “n’est admissible que pour autant”.»

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Le sous-amendement est défendu.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – J’accepte ce sous-amendement.

Le sous-amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous en revenons à l’amendement ainsi modifié.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement 9, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Je suis saisie de l’amendement 10.

J’ai cru comprendre que M. Omtzigt souhaitait le retirer.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – En effet, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 10 est retiré.

 La Présidence a été saisie par la commission des questions politiques de l’amendement oral suivant:

«Dans le projet de résolution, rédiger ainsi le paragraphe 20.1: “à trouver une réponse globale au problème des combattants étrangers en établissant un bon équilibre entre la répression des comportements criminels, la protection des populations et des droits de l’homme, la prévention de la radicalisation, la déradicalisation et la réinsertion des combattants de retour dans leur communauté d’origine après, le cas échéant, avoir purgé une peine adaptée et à s’attaquer aux causes profondes de la radicalisation;”»

En vertu de l’article 34.7.a du Règlement, la Présidence peut, à titre exceptionnel, déclarer recevable un amendement oral ou un sous-amendement oral si elle estime qu’il est destiné à apporter une clarification, à tenir compte de faits nouveaux ou à permettre une conciliation.

Je précise également que, si cet amendement était adopté, l’amendement 11 deviendrait sans objet.

Je considère cet amendement oral comme recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – L’amendement est défendu.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Je suis défavorable à cet amendement car, selon moi, la rédaction actuelle dit exactement la même chose: il n’est pas nécessaire de la remplacer.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement.

L’amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - En conséquence, l’amendement 11 devient sans objet.

Je suis saisie de l’amendement 22.

Mme KRONLID (Suède)* – Il s’agit d’ajouter un paragraphe disant clairement que «le seul fait de voyager pour rejoindre un groupe» – Daech, par exemple – «constitue déjà une infraction», notamment du fait de l’article 6 de la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme. Le simple fait de rejoindre un tel groupe en vue de contribuer à la commission d’un ou plusieurs actes terroristes est effectivement une infraction. Je demande donc à l’Assemblée d’adopter cet amendement.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je m’oppose à cet amendement, pour deux raisons.

Tout d’abord, il n’est pas juste de dire que, dans la plupart des Etats membres, le simple fait de se rendre dans un pays constitue un acte punissable. Ensuite, la référence proposée n’est pas la bonne: l’article 6 de la Convention parle du recrutement et non pas du fait de se rendre dans un pays.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 22 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 19, qui fait l’objet d’un sous-amendement oral.

Si l’amendement 19 était adopté, l’amendement 13 deviendrait sans objet.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Nous proposons de procéder à deux changements par rapport au texte d’origine qui a été adopté en commission à Bruxelles.

Nous aimerions que l’on tire parti de l’expertise des meilleurs spécialistes pour diffuser des contre-discours. Par ailleurs, il serait bon d’utiliser les anciennes recrues pour convaincre les jeunes de ne pas se rendre dans ces pays.

LA PRÉSIDENTE* – La Présidence a été saisie par la commission des questions politiques du sous-amendement oral suivant: à l’alinéa 2 de l’amendement 19, après le mot: «diffuser», insérer les mots: «des informations sur les crimes odieux perpétrés par Daesh et».

Je considère que ce sous-amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je suis favorable à ce sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je suis favorable à l’amendement ainsi modifié.

L’amendement 19, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 13 devient sans objet.

Je suis saisie de l’amendement 14.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Nous avons entendu des prétendus dirigeants religieux tenir des discours de haine, totalement contraires aux valeurs consacrées par la Convention européenne des droits de l’homme. Il convient de prendre des mesures à l’encontre de telles personnes.

LA PRÉSIDENTE* – La Présidence a été saisie par M. Omtzigt du sous-amendement oral suivant: à la fin de l’alinéa 2 de l’amendement 14, substituer au mot: «européennes» les mots: «consacrées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales».

Je considère que ce sous-amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Il se justifie par son texte même.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je suis favorable à ce sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je suis favorable à l’amendement, ainsi modifié.

L’amendement 14, sous-amendé, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous en venons à l’amendement 15.

J’ai cru comprendre que M. Omtzigt souhaite le retirer.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – En effet, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 15 est retiré.

Je suis saisie de l’amendement 16.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Cet amendement est dans le droit fil du précédent: ne pas accepter des personnes dont nous pensons qu’elles ont perpétré des actes de génocide. L’article 1 F de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés permet de ne pas accorder le statut de réfugiés à ces personnes, donc de demander une enquête supplémentaire.

Mme LUNDGREN (Suède)* – Je suis contre cet amendement, au motif que ce statut des réfugiés ne peut être refusé que si la justice le décide, et cela d’autant plus qu’il s’agirait, selon le conditionnel employé dans l’amendement, de personnes: «qui pourraient avoir perpétré» certains actes interdits. Je ne crois donc pas qu’il faille s’engager sur cette voie. Par ailleurs, le mot «génocide» est un mot extrêmement fort.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission a été favorable à cet amendement, à l’unanimité.

L’amendement 16 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – La Présidence a été saisie par la commission des questions politiques de l’amendement oral suivant: «Dans le projet de résolution, compléter le paragraphe 20.12 par les mots suivants: “le cas échéant, après qu’une peine ait été purgée”.»

Je considère que cet amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je le soutiens au nom de la commission.

L’amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – J’ai cru comprendre que M. Omtzigt souhaitait retirer l’amendement 17 du fait de l’adoption de l’amendement oral précédent.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – En effet, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 17 est retiré.

La Présidence a été saisie par la commission des questions politiques de l’amendement oral suivant: «Dans le projet de résolution, remplacer toutes les occurrences des mots: «EI» et «Etat islamique» par le mot: «Daesh».

Je considère que cet amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en considération si dix représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Je le soutiens au nom de la commission.

M. BAPT (France) – Je suis contre cet amendement oral, car Daech est l’acronyme, dans notre langage occidental, des mots Etat islamique, en langue arabe. Il s’agit donc d’un subterfuge afin d’éviter de nommer le groupe Etat islamique, alors que dans les faits, cela revient au même.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est favorable à cet amendement oral.

L’amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13937, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (117 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions).

LA PRÉSIDENTE* – Nous en venons au projet de recommandation sur lequel 5 amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission des questions politiques souhaite proposer à l’Assemblée de considérer l’amendement 20, qui a été adopté à l’unanimité par la commission, comme adopté par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président?

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, cet amendement est déclaré adopté définitivement.

LA PRÉSIDENTE* – Nous en venons à la discussion des autres amendements. Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié.

Je suis saisie de l’amendement 1.

M. KÜÇÜKCAN (Turquie)* – Une transition politique est nécessaire, faute de quoi le problème des combattants étrangers en Irak demeurera.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Le projet de recommandation a pour objectif d’inviter le Comité des ministres du Conseil de l’Europe à mettre en œuvre rapidement les propositions figurant dans le plan d’action. Nous voudrions que le Comité des Ministres agisse rapidement. Le contenu de l’amendement n’est pas faux, mais n’a pas sa place ici.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est contre l’amendement.

L’amendement 1 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Je suis saisie de l’amendement 2.

M. KÜÇÜKCAN (Turquie)* – Il est retiré.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 2 est retiré.

Je suis saisie de l’amendement 3.

M. KÜÇÜKCAN (Turquie)* – Le rapport contient beaucoup de recommandations importantes. Lorsque nous parlons des combattants étrangers, nous omettons la responsabilité du régime, ce que nous voudrions souligner. On évoque des génocides et de massacres, mais Daech n’est pas seul à en commettre: le régime aussi.

M. Van der MAELEN (Belgique), rapporteur* – Encore une fois, le contenu ne pose pas de difficultés, mais le projet de recommandation ne porte que sur le plan d’action du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe. Dans ce contexte, cet amendement n’a pas sa place. Je vous propose de voter contre.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – La commission est contre.

L’amendement 3 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* – J’ai cru comprendre que M. Omtzigt souhaitait retirer l’amendement 18.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Effectivement.

LA PRÉSIDENTE* – L’amendement 18 est retiré.

Je suis saisie de l’amendement 21.

Mme KRONLID (Suède)* – Cet amendement vise à inciter les Etats membres à explorer toutes les possibilités de renvoyer les demandeurs d’asile accusés de crimes graves dans leur pays. Le mécanisme utilisé pour ce faire doit être crédible et vérifier que les personnes en question ne seront pas, en vertu de la loi de leur pays, soumises à la torture ou à la peine capitale.

LA PRÉSIDENTE* – La présidence a été saisie par la commission des questions politiques du sous-amendement oral suivant:

À l’alinéa 2 de l’amendement 21, substituer aux mots: «le Comité des Ministres», les mots: «les Etats membres».

Je considère que ce sous-amendement oral est recevable au regard des critères du Règlement. Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je le soutiens.

Mme KRONLID (Suède)* – J’accepte le sous-amendement.

Le sous-amendement oral est adopté.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je suis favorable à l’amendement 21, ainsi sous-amendé.

L’amendement 21, ainsi modifié, est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – La présidence a été saisie par la commission des questions politiques de l’amendement oral suivant:

«Dans le projet de recommandation, remplacer toutes les occurrences des mots: “EI” et “Etat islamique” par le mot: “Daesh”».

En vertu de l’article 34.7.a du Règlement, le Président peut, à titre exceptionnel, déclarer recevable un amendement oral ou un sous-amendement oral s’il estime qu’il est destiné à apporter une clarification, à tenir compte de faits nouveaux ou à permettre une conciliation.

Il ne peut toutefois être pris en compte si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Tel n’est pas le cas.

M. OMTZIGT (Pays-Bas), rapporteur pour avis* – Si le sigle «EI» ou les termes « Etat islamique » figurent dans la résolution, il ne figure nulle part dans la recommandation.

M. Mogens JENSEN (Danemark), président de la commission* – Je suis favorable à l’amendement oral.

L’amendement oral est adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons procéder au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 13937, tel qu’il a été amendé.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté (116 voix pour, 1 voix contre et 2 abstentions.)

LA PRÉSIDENTE* – La parole est à M. Schnabel.

M. SCHNABEL (Pays-Bas)* – Hier après-midi, la résolution sur la demande de statut de partenaire pour la démocratie présentée par le Parlement de Jordanie a été adoptée par 114 voix pour et 1 abstention. Je suis à l’origine de ce vote d’abstention, en raison d’une erreur de bouton, alors que j’étais favorable à la résolution. Je souhaitais officiellement corriger mon erreur, et ce d’autant plus qu’il s’agissait d’un vote hautement symbolique.

LA PRÉSIDENTE* – L’Assemblée a pris note de votre intervention, Monsieur Schnabel.

3. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés
de la délégation parlementaire de la République de Moldova

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport présenté par M. Vareikis, au nom de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles, sur la contestation, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de la République de Moldova (Doc. 13962).

Mes chers collègues, je vous rappelle que les membres de la délégation parlementaire de la République de Moldova, dont les pouvoirs sont contestés, ne peuvent pas participer aux votes.

Je vous rappelle aussi que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. VAREIKIS (Lituanie), rapporteur de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles* – Lors de l’ouverture de la présente partie de session, les pouvoirs non encore ratifiés de la délégation de la Moldova ont été contestés. Pour la deuxième année consécutive, le Parlement moldove a en effet fourni un liste incomplète de parlementaires, qui ne représente pas de manière équitable l’équilibre politique en son sein. L’article 6.2 du Règlement prévoit que les délégations nationales doivent être composées de façon à assurer une représentation équitable des partis ou des groupes politiques existants dans leurs parlements. Or il n’y a que sept membres sur la liste de la délégation moldove et non dix. En outre, toutes les tendances politiques du Parlement moldove n’y sont pas représentées. Le parti libéral, en particulier, ne compte aucun représentant au sein de la délégation.

La commission du Règlement a été saisie en vertu de l’article 7 du Règlement afin de vérifier si les pouvoirs de la délégation sont conformes aux exigences dudit Règlement et si la composition de la délégation conduit à une représentation équitable des différentes forces politiques nationales. Ce n’est pas la première fois qu’une contestation de ce type est soulevée. Il existe plusieurs précédents, qui ont tous été examinés par la commission du Règlement. Je rappelle que lors de l’examen des pouvoirs, l’Assemblée doit éviter de s’immiscer dans les affaires politiques internes d’un Etat membre. Il s’agit simplement de veiller à ce qu’au sein de la délégation, une représentation équitable des différents partis politiques, majoritaires et minoritaires, soit respectée. Cette position a été reprise dans la Résolution 1798 de 2011, qui définit les principes qui nous permettent de juger si une liste nationale reflète de manière équitable la composition d’un parlement national.

La commission du Règlement a un mandat clair. Elle n’est pas la commission de suivi et n’a pas à se prononcer sur la situation politique ou parlementaire actuelle de la Moldova. Elle veille à ne pas outrepasser ses compétences et ne s’est donc pas livrée à une analyse en profondeur de la situation politique complexe qui prévaut actuellement dans ce pays. Elle a simplement noté que le Parlement moldove a fourni à l’Assemblée une liste qui ne reflète pas de manière exhaustive les derniers bouleversements politiques en Moldova, bouleversements liés notamment à la prise de fonctions de Pavel Filip.

Nous demandons, dans le projet de résolution, à la Commission de suivi et à ses corapporteurs de signaler au Parlement moldove qu’il doit respecter les différents critères fixés par le Règlement de l’Assemblée lorsqu’il désigne une délégation. Mme Palihovici, la présidente de la délégation moldove, nous a expliqué que le Parlement de la Moldova n’a pas pu respecter le calendrier officiel de désignation des membres de la délégation, mais nous a donné l’assurance que la liste serait complétée avant la partie de session du mois d’avril 2016.

La commission du Règlement propose à l’Assemblée d’entériner les pouvoirs de la délégation moldove et, conformément à l’article 10.1 du Règlement, au cas où les engagements ne seraient pas tenus, de suspendre automatiquement les droits de vote de la délégation moldove à partir de la prochaine partie de session. Enfin, la commission du Règlement souhaite saisir l’opportunité de ce débat pour rappeler la procédure de vérification des pouvoirs lors de chaque session annuelle. Les parlements nationaux doivent faire preuve de diligence et adapter la composition de leur délégation en temps et en heure, celle-ci devant rester à tout moment politiquement représentative. Ceci vaut en particulier pour les parlements dans lesquels les majorités alternent fréquemment en période d’instabilité gouvernementale.

LA PRÉSIDENTE* – Monsieur le rapporteur, il vous restera 7 minutes pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

M. DONALDSON (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Le Groupe des conservateurs européens soutiendra la ratification des pouvoirs de la délégation de Moldova, qui n’est pas la seule à compter des sièges vacants. Je me suis rendu moi-même en Moldova et j’ai rencontré un certain nombre de parlementaires. Le pays traverse des difficultés politiques certaines et il ne nous appartient pas de nous ingérer dans ce processus interne. La question qui se pose est plutôt de savoir si la composition de la délégation est conforme au Règlement. C’est apparemment le cas et le problème doit être réglé rapidement. La délégation moldove nous a assuré qu’elle y remédierait d’ici la prochaine partie de session. Nous ne devons pas sanctionner les autres membres de la délégation uniquement parce qu’un parti n’a pas nommé de représentants. Si certains ont pris du retard, ce n’est pas une raison pour sanctionner les autres ou le pays. J’espère que ces personnes seront bientôt nommées.

Quant à la représentation équitable, le fait qu’il y ait des sièges vacants ne rend pas injuste la répartition actuelle. Je rappelle que, dans la délégation du Royaume-Uni, certains partis qui ont pourtant obtenu des millions de voix aux élections n’ont pas de représentants, par exemple le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP); pourtant, personne ne dirait que la composition de notre délégation n’est pas équitable.

Je suis sûr que le problème dont nous parlons sera résolu d’ici peu.

Je vous propose donc de ratifier aujourd’hui les pouvoirs.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je regrette de devoir dire à M. Donaldson qu’il s’agit d’appliquer les règles. Si nous faisons ce que vous proposez, la délégation moldove n’aura que sept membres pour tout le reste de l’année. Voilà pourquoi nous avons voulu contester ses pouvoirs: c’est la seule chance pour la Moldova de constituer une délégation complète d’ici au mois d’avril. La présidente de la délégation moldove l’a très bien compris et a accepté le rapport tel qu’il est proposé par la commission du Règlement. Pour ces raisons, j’invite instamment l’Assemblée à adopter ce rapport.

Cela n’a rien à voir avec la politique. Mme Palihovici a dit à la commission du Règlement qu’elle pourrait composer une délégation complète sans difficulté. Dès lors, cette délégation pourrait travailler comme toutes les autres.

N’essayez pas d’inventer d’autres règles, appliquons celles qui sont en vigueur. Je rappelle qu’il s’agit d’un rapport de la commission du Règlement, et non d’un rapport politique.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni)* – Rappel au Règlement. La commission du Règlement s’est réunie cet après-midi et le rapport a été amendé. M. Kox n’était pas présent; il n’est sans doute pas au courant.

M. KOX (Pays-Bas)* – J’ai dit que la commission du Règlement avait décidé de soumettre le présent rapport. C’est ici que l’on amende véritablement les textes, et non en commission. La délégation moldove a accepté le rapport parce que c’est notre seul moyen d’aider nos collègues à constituer une délégation complète. Ceux qui se prononcent contre pourraient empêcher la République de Moldova d’avoir une délégation de dix membres; ce serait regrettable.

M. BADEA (Roumanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – La République de Moldova est une jeune démocratie, mais elle a beaucoup progressé au cours des dernières années, se rapprochant des normes européennes malgré une série d’événements complexes.

La contestation des pouvoirs pourrait, si elle était entérinée, créer un précédent dangereux pour les pays qui ne seraient pas en mesure de présenter une délégation complète. Je demande à ceux des membres de l’Assemblée qui envisagent de contester ces pouvoirs de se montrer responsables. Nous voulons que les membres de la délégation moldove puissent participer sans restriction à nos débats et à nos votes.

La composition actuelle de la délégation s’explique par des motifs purement techniques. Elle n’est le résultat d’aucun conflit politique.

Je demande donc à mes collègues présents dans l’hémicycle de voter pour la confirmation des pouvoirs de nos collègues moldoves.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Il s’agit ici d’un avertissement. Ce n’est pas la première fois que nous sommes confrontés à ce type de problèmes. Lorsque j’étais président de la commission de suivi, j’ai envoyé plusieurs lettres au président du Parlement moldove invitant à respecter certains critères.

Nous avons essayé, ensemble, de trouver une solution à la situation actuelle, qui est très tendue. La proposition ici formulée est destinée à aider nos collègues. Tel est le sens des deux amendements que nous avons proposés, que j’appuie et auxquels la commission de suivi a apporté son soutien il y a quelques heures. Je me suis rendu dans les prisons de la République de Moldova, j’ai y pu discuter des difficultés qui se posent. Ces amendements représentent pour nos collègues une chance de résoudre le problème d’ici au mois d’avril.

Je remercie Mme Palihovici d’avoir retiré son amendement 3, ce qui nous évite d’avoir à nous y opposer dans cette enceinte.

Je vous invite donc à soutenir le rapport.

M. XUCLÀ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Le mot clé, dans ce débat, est celui de perfectionnement. L’initiative dont nous débattons est empreinte de bonnes intentions: c’est un message adressé au Parlement moldove pour qu’il perfectionne, qu’il améliore sa délégation afin que celle-ci comporte tous les titulaires prévus et tous leurs suppléants. Cette initiative n’est dirigée contre personne et en aucun cas contre la délégation. Il n’y a là aucun programme politique caché.

Il s’agit simplement de défendre le respect des normes. Nous sommes ici dans la maison qui, par définition, promeut la prééminence du droit.

Nous invitons un parlement qui, pour la deuxième année consécutive, nous envoie une délégation incomplète, à procéder selon les normes de notre Assemblée pour compléter cette délégation dans le sens du pluralisme. Si un parti politique représenté au Parlement moldove a décidé de ne pas prendre part à cette délégation, que le président du Parlement nous adresse une lettre contenant des arguments qui le justifient. Mais ce sont trois sièges qui sont vacants dans la délégation: il nous faut donc contribuer à améliorer la situation.

Comme l’a très bien dit M. Kox, il s’agit de savoir si nous voulons que, pendant une année entière, cette délégation ne comporte que sept membres ou si nous adressons par notre vote un message ferme, constructif et démocratique, entre parlementaires, au Parlement moldove afin qu’il complète sa délégation en respectant les règles en vigueur.

La solution qui a été présentée par la commission est tout à fait satisfaisante puisque l’on accepte les pouvoirs, mais à la condition qu’avant la deuxième partie de session, en avril, les noms manquants nous soient transmis. C’est une excellente formule. La commission du Règlement a d’ailleurs entendu la présidente de la délégation moldove qui a fait état de sa bonne volonté et de son souhait d’aller en ce sens.

C’est moi qui, à l’origine, me suis levé au début de cette session pour contester les pouvoirs de la République de Moldova. Je vous prie d’interpréter cela dans le meilleur sens: il s’agissait de défendre le parlementarisme, de préserver nos droits et de nous protéger mutuellement face à certains parlements qui, pour des raisons de tensions politiques, ont tendance à envoyer des délégations incomplètes et ce, pendant deux années consécutives.

Je vous prie donc de voter pour ce rapport afin de nous protéger et de rendre toute leur dignité aux parlementaires.

Mme PALIHOVICI (République de Moldova)* – Je remercie M. Vareikis d’avoir présenté ce rapport, ainsi que tout le secrétariat de la commission du Règlement.

Au sein de cet hémicycle, nous discutons des principaux sujets concernant les démocraties européennes; c’est encore le cas cette semaine. Aujourd’hui, nous examinons les pouvoirs de la République de Moldova. Nous voulons vous dire que la République de Moldova continuera à se montrer exigeante, à demander toujours plus de démocratie et à jouer pleinement son rôle dans cette enceinte.

La délégation moldove ici présente mérite votre soutien et la confirmation de ses pouvoirs. En tant que présidente de la délégation moldove – délégation dont les pouvoirs sont contestés pour des raisons de procédure, parce qu’elle est incomplète –, je souhaite vous donner quelques explications pour que vous compreniez bien la situation.

Normalement, nous devrions être dix: cinq titulaires et cinq suppléants. Après les dernières élections législatives de novembre 2014, tous les partis ayant obtenu des élus ont été invités à désigner leurs représentants au sein de la nouvelle délégation. En avril 2015, le Parlement a donc voté une nouvelle composition avec huit députés et deux postes vacants, parce qu’un parti refusait de nommer des délégués.

Pour la partie de session actuelle, nous avons soumis une liste de quatre titulaires et de trois suppléants. En effet, l’un des partis – le parti démocratique – a fait une demande de modification qui a été approuvée par le Bureau du Parlement en décembre 2015. Mais un vote en plénière est nécessaire; or la session de printemps du Parlement ne commencera que le 1er février 2016.

En outre, le parti libéral a changé sa position et a transmis des noms au Bureau du Parlement; mais là encore, il faudra attendre la session qui s’ouvrira en février. De plus, le parti communiste a demandé le remplacement de son membre suppléant: cela sera également entériné d’ici quelques semaines.

Je suis convaincue que d’ici à la partie de session d’avril de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, la délégation moldove sera au complet. Nous allons très rapidement, dès l’ouverture de la session de printemps de notre parlement, faire le nécessaire dans le respect des critères de représentativité.

Enfin, un petit nota bene pour M. Schennach: toutes les lettres de la commission de suivi envoyée au président du Parlement ont fait l’objet d’une réponse, et toutes les actions demandées ont été entreprises. Nous avons simplement un problème technique.

Je vous remercie de voter positivement sur nos pouvoirs.

M. NEGUTA (République de Moldova)* – Tout d’abord, concernant le rapport de M. Vareikis, nous pensons qu’il faut continuer à surveiller la situation en Moldavie. Le rapport proposé par M. Vareikis est correct, et je l’en remercie.

J’ai déjà évoqué la question des pouvoirs de notre délégation dans cet hémicycle lors du débat libre. Permettez-moi d’apporter quelques précisions à ce sujet: le Parlement de Moldova a déjà prévu, dans les premiers jours de février, quand débutera la session ordinaire, d’examiner cette question. Le parti démocrate a déjà présenté sa demande de changer un suppléant en représentant et de nommer un nouveau représentant. Le parti communiste a également nommé un nouveau suppléant.

Concernant l’article 6.2 du Règlement portant sur la représentation équitable, il est vrai que, quand nous avons formé la délégation de Moldova, le parti libéral a contesté les candidatures. Mais depuis septembre 2015, ce parti est devenu l’une des composantes de la majorité parlementaire: il n’y a donc pas de problème avec le parti libéral, qui ne conteste pas cette situation. Former une délégation équitable et complète ne nous pose donc pas de problème.

Cela étant, l’insistance de la commission du Règlement à examiner la question des pouvoirs de la délégation de la Moldavie uniquement en session plénière nous a un peu étonnés. Cela a été interprété par notre délégation comme un signal adressé à d’autres pays.

Actuellement, les délégations de cinq ou six pays, pourtant plus nombreuses que la délégation de Moldova, travaillent aussi avec une composition incomplète. Nous pensons que la commission du Règlement, tout en s’adressant à la délégation de Moldova, veut en même temps appeler l’attention d’autres pays.

LA PRÉSIDENTE *- Je dois maintenant interrompre la liste des orateurs.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie)* – Rappel au Règlement! La liste des orateurs comprend encore trois membres de l’Assemblée. Nous ne sommes pas responsables du retard, ni de l’horaire! Si nous sommes en retard, c’est parce que le débat précédent s’est prolongé. Je souhaite que les trois orateurs encore inscrits puissent s’exprimer.

LA PRÉSIDENTE* - Je n’ai rien contre, si les orateurs raccourcissent un peu leurs interventions. Je comprends que le sujet soit important pour eux.

Je ne vois pas d’opposition. Nous poursuivons donc la discussion générale.

Mme BULIGA (République de Moldova) – Chers collègues, je voudrais vous remercier pour le débat technique de ce jour dédié à la délégation parlementaire de la République de Moldova, débat qui, je l’espère, sera rapidement aplani.

Je représente la majorité parlementaire qui, par l’investiture du Gouvernement Filip, a assumé un rôle et une responsabilité encore plus grands dans la continuation du parcours européen du pays. Nous avons réussi à créer une majorité consolidée autour d’un programme de gouvernement ayant pour base l’accord d’association entre la République de Moldova et l’Union européenne.

Le Gouvernement de Chişinau se rend bien compte de la complexité de la situation dans le pays et va persévérer dans sa lutte légale contre la corruption et pour le renforcement de notre Etat. Il est à présent très important de regagner la confiance du peuple en mettant l’accent sur l’inclusion et l’unité sociale de toutes les couches de la population moldove.

La situation interne est loin d’être simple, mais il existe une volonté claire et unanime de prendre des mesures immédiates et de conduire des réformes répondant aux attentes de la population.

Nous remercions le Conseil de l’Europe et l’Assemblée parlementaire pour l’assistance permanente accordée à la République de Moldova, et nous vous invitons à poursuivre cette coopération constructive tellement nécessaire avec mon pays.

M. KIRAL (Ukraine)* – Je soutiens la délégation moldove et, comme M. Donaldson, je vous encourage à examiner les causes profondes de la situation. Ce n’est pas un accident et je ne suis pas non plus d’accord avec M. Kox ou M. Xuclà, pour qui ce serait un simple problème de Règlement. La presse et les médias russes, ukrainiens ou moldoves, montrent bien que la question est instrumentalisée au plan politique.

La Géorgie et l’Ukraine essayent de s’émanciper de la domination russe, et les forces prorusses feront bien sûr tout ce qui est en leur pouvoir pour les empêcher. Ces pays tentent de rejoindre la communauté européenne et ont signé l’accord d’association. La République de Moldova a besoin de notre soutien. J’encourage l’Assemblée à soutenir sa délégation, qui a beaucoup contribué aux travaux de notre Assemblée. Un point du Règlement est certes soulevé, mais il faut écouter les souhaits de cette délégation.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie) – Je vous remercie, Madame la Présidente, de la décision que vous avez prise.

Si j’appuie la proposition du rapporteur de ratifier pleinement les pouvoirs de la délégation moldove, je suis en revanche en désaccord avec les deux autres propositions.

Je suis tout d’abord opposé à la décision de suspendre le droit de vote des membres de la délégation au mois d’avril si les choses ne vont pas dans la bonne direction. La dirigeante de la délégation a présenté des raisons objectives: tensions politiques, absence de gouvernement, manifestations parfois violentes qui ont empêché le Parlement de procéder aux nominations. Nous avons un Règlement qui prévoit les conséquences à tirer si les choses ne vont pas dans la bonne direction. Il y a en outre ce projet de résolution et l’engagement des autorités moldoves de compléter la liste après le 1er février, quand aura commencé la nouvelle session du Parlement moldove. Il n’est nul besoin d’ajouter cette menace.

Je ne suis pas non favorable à une saisine de la commission de suivi. La présente résolution sera le document le plus officiel pour demander au Parlement moldove de remplir ses engagements. C’est d’ailleurs la commission du Règlement qui a la compétence pour juger cette question des pleins pouvoirs.

LA PRÉSIDENTE* - J’appelle la réplique de la commission.

M. VAREIKIS (Lituanie), rapporteur* – Je remercie le secrétariat de la commission, très expérimenté, qui nous a beaucoup aidé pour ce rapport.

Encore une fois, c’est un rapport de la commission du Règlement sur le Règlement. Quel que soit mon avis sur la situation du pays, je dois juger en fonction du Règlement. Je ne suis pas toujours d’accord avec M. Kox mais je le suis ici. C’est un point du Règlement: nous devons insister pour que le Parlement moldove complète sa délégation. Soutenez ce rapport, car c’est, je crois, le seul moyen qu’il y ait une délégation complète la fois prochaine.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission du Règlement – Notre Règlement est là pour nous protéger, pour nous permettre d’accomplir notre travail dans les meilleures conditions, et il ne s’agit nullement, ni cette fois-ci ni en d’autres occasions, de punir telle ou telle délégation.

Je souhaite préciser un point. Le texte de la résolution que la commission a adopté hier propose de ratifier les pouvoirs de la délégation moldove tout en suspendant le droit de vote si, au début de la partie de session d’avril, la liste déposée n’est pas conforme au Règlement. Après examen des amendements, la commission a décidé autre chose, mais elle était alors en formation très restreinte, et je dois le signaler. Cela concerne particulièrement l’amendement 2, qui modifie le texte initial en proposant de ratifier les pouvoirs en demandant simplement à la délégation moldove de présenter la liste avant le début de la partie de session d’avril. Les deux décisions sont contradictoires et je laisserai comme il se doit l’Assemblée trancher.

LA PRÉSIDENTE* – La discussion générale est close.

La commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles a présenté un projet de résolution sur lequel 3 amendements ont été déposés.

Mes chers collègues, je vous rappelle qu’en vertu de l’article 10.3 du Règlement, les membres de la délégation parlementaire de la République de Moldova, dont les pouvoirs sont contestés, ne peuvent pas participer aux votes.

Les amendements seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Nous commençons par l’amendement 1.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Je propose de supprimer une partie du paragraphe 2, parce que si notre délégation n’est pas au complet, ce n’est pas que nous n’avons pas voulu avoir une représentation équitable, mais parce qu’un parti n’a pas voulu nommer de candidats. La représentation n’est donc pas inéquitable.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission – Avis favorable de la commission.

L’amendement 1 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 2.

Mme PALIHOVICI (République de Moldova)* – Nous proposons de remplacer le paragraphe 3 du projet de résolution par le paragraphe suivant: «L’Assemblée décide de ratifier les pouvoirs de la délégation parlementaire moldove et demande au Parlement de la République de Moldova de présenter la liste mise à jour de la composition de la délégation, conformément à l’article 6.2a du Règlement, avant le début de la partie de session d’avril 2016 de l’Assemblée.»

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission – Avis favorable de la commission.

L’amendement 2 est adopté.

LA PRÉSIDENTE* - Je suis saisie de l’amendement 3.

Mme PALIHOVICI (République de Moldova)* – Je le retire.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie)* – Je souhaiterais reprendre cet amendement, car je suis tout à fait opposé à ce paragraphe selon lequel la commission de suivi serait, si je puis dire, responsable de l’information du Parlement moldove.

Je pense que le Parlement moldove peut être informé par toutes sortes de canaux. Le projet de résolution qui est examiné ici à l’instant même est probablement le meilleur document pour l’informer. Je ne vois pas pourquoi la commission du Règlement confèrerait à la commission de suivi des compétences jusqu’ici inexistantes en la matière.

M. SCHENNACH (Autriche)* – De toute façon, les corapporteurs de la commission de suivi se rendront bientôt dans le pays où ils rencontreront, entre autres, le président du Parlement moldove.

Nous avions trouvé un compromis et étions d’accord avec la délégation moldove pour que cet amendement soit retiré. Suivons donc cet avis, et nous discuterons avec les autorités moldoves de ce problème, entre autres.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse), présidente de la commission – La commission est défavorable à cet amendement.

L’amendement 3 n’est pas adopté.

LA PRÉSIDENTE* – Nous allons procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 13962, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (77 voix pour, 0 voix contre et 4 abstentions.)

4. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 20 h 15.

SOMMAIRE

1. Modifications dans la composition des commissions

2. Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe (Procédure d’urgence)

Les combattants étrangers en Syrie et en Irak

(Débat conjoint)

Présentation par M. Kox du rapport de la commission des questions politiques sur «Combattre le terrorisme international tout en protégeant les normes et les valeurs du Conseil de l’Europe» (Doc. 13958)

Présentation par M. Le Borgn’ du rapport de la commission des questions juridiques, saisie pour avis (Doc. 13960)

Présentation par Mme Bilgehan du rapport de la commission sur l’égalité, saisie pour avis (Doc.13966)

Présentation par M. Van der Maelen du rapport de la commission des questions politiques (Doc. 13937)

Présentation par M. Omtzigt du rapport de la commission des questions juridiques, saisie pour avis (Doc. 13959)

Intervention de M. Désir, secrétaire d’Etat du Gouvernement français, chargé des Affaires européennes

Orateurs: Mme Nicoletti, MM Garđarsson, Ihsanoğlu, Villumsen, Németh

Réponse de M. le secrétaire d’Etat

Orateurs: MM. Harangozó, Mmes Åberg, De Sutter, Sir Roger Gale, Mmes Kronlid, Dalloz, MM. Rouquet, Corlăţean, Loukaides, Ameur, Mme Sotnyk, MM. Fournier, Liddell-Grainger, Schennach, Di Stefano, Mme Duranton, MM. Rafael Huseynov, Stroe, Mmes Fataliyeva, Allain, M. Jenssen; Mmes Quéré, Kavvadia, El Ouafi, Mateu, Ahmed-Sheikh, M. Ariev, Mme Pashayeva, MM. Stoilov, Sobolev

Réponses de MM. les rapporteurs et de M. le président de la commission des questions politiques.

Vote sur un projet de résolution amendé

Vote sur un projet de recommandation amendé

Vote sur un projet de résolution amendé

3. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de la République de Moldova

Présentation par M. Vareikis, du rapport de la commission du Règlement (Doc. 13962)

Orateurs: MM. Donaldson, Kox, Badea, Schennach, Xuclà, Mme Palihovici, M. Neguta, Mme Buliga, MM. Kiral, Corlăţean

Réponses du rapporteur et de Mme la présidente de la commission du Règlement

Vote sur un projet de résolution amendé

4. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d’un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Tasmina AHMED-SHEIKH

Brigitte ALLAIN

Jean-Charles ALLAVENA/Christian Barilaro

Werner AMON/Eduard Köck

Luise AMTSBERG*

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Sirkka-Liisa ANTTILA

Ben-Oni ARDELEAN

Iwona ARENT*

Khadija ARIB/Tineke Strik

Volodymyr ARIEV

Anna ASCANI/Tamara Blazina

Mehmet BABAOĞLU

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE*

Gérard BAPT

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Guto BEBB*

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Jana Fischerová

Levan BERDZENISHVILI/Guguli Magradze

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Włodzimierz BERNACKI/Jarosław Obremski

Anna Maria BERNINI/ Claudio Fazzone

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ

Gülsün BİLGEHAN

Tobias BILLSTRÖM/Kerstin Lundgren

Oleksandr BILOVOL/Serhii Kiral

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN

Tilde BORK*

Mladen BOSIĆ*

Anne BRASSEUR

Piet De BRUYN

Margareta BUDNER

Utku ÇAKIRÖZER

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI*

Anastasia CHRISTODOULOPOULOU

Lise CHRISTOFFERSEN

Paolo CORSINI*

David CRAUSBY*

Yves CRUCHTEN/Martine Mergen

Zsolt CSENGER-ZALÁN

Katalin CSÖBÖR

Geraint DAVIES/Khalid Mahmood

Joseph DEBONO GRECH*

Renata DESKOSKA

Alain DESTEXHE

Manlio DI STEFANO

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ

Namik DOKLE*

Jeffrey DONALDSON

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON

Josette DURRIEU

Mustafa DZHEMILIEV*

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES*

Markar ESEYAN

Franz Leonhard EẞL*

Nigel EVANS

Samvel FARMANYAN*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU

Doris FIALA/Raphaël Comte

Daniela FILIPIOVÁ*

Ute FINCKH-KRÄMER*

Axel E. FISCHER

Bernard FOURNIER

Béatrice FRESKO-ROLFO*

Pierre-Alain FRIDEZ

Martin FRONC

Sahiba GAFAROVA

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO

Karl GARÐARSSON

Iryna GERASHCHENKO/Sergiy Vlasenko

Tina GHASEMI/Boriana Åberg

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Carlos Alberto GONÇALVES

Oleksii GONCHARENKO/Vladyslav Golub

Rainer GOPP

Alina Ștefania GORGHIU*

Sylvie GOY-CHAVENT*

François GROSDIDIER*

Dzhema GROZDANOVA

Gergely GULYÁS/István Hollik

Emine Nur GÜNAY*

Jonas GUNNARSSON

Antonio GUTIÉRREZ

Maria GUZENINA

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV/ Sevinj Fataliyeva

Andrzej HALICKI*

Alfred HEER/Jean-Pierre Grin

Gabriela HEINRICH*

Michael HENNRICH/Bernd Fabritius

Martin HENRIKSEN/Rasmus Nordqvist

Françoise HETTO-GAASCH

John HOWELL*

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO*

Rafael HUSEYNOV*

Ekmeleddin Mehmet İHSANOĞLU

Florin IORDACHE*

Denis JACQUAT/André Schneider

Gediminas JAKAVONIS

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE*

Andrzej JAWORSKI*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN

Frank J. JENSSEN

Florina-Ruxandra JIPA/Viorel Riceard Badea

Ögmundur JÓNASSON*

Aleksandar JOVIČIĆ/Dejan Kovačević

Anne KALMARI

Erkan KANDEMIR

Mustafa KARADAYI*

Marietta KARAMANLI/Pascale Crozon

Niklas KARLSSON

Nina KASIMATI/Evangelos Venizelos

Vasiliki KATRIVANOU

Ioanneta KAVVADIA

Filiz KERESTECİOĞLU DEMİR*

İlhan KESİCİ

Danail KIRILOV*

Bogdan KLICH/Aleksander Pociej

Manana KOBAKHIDZE*

Haluk KOÇ/Metin Lütfi Baydar

Željko KOMŠIĆ*

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR*

Ksenija KORENJAK KRAMAR*

Attila KORODI

Alev KORUN*

Rom KOSTŘICA*

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Florian KRONBICHLER*

Julia KRONLID

Eerik-Niiles KROSS*

Talip KÜÇÜKCAN

Ertuğrul KÜRKÇÜ*

Athina KYRIAKIDOU

Inese LAIZĀNE*

Pierre-Yves LE BORGN’

Jean-Yves LE DÉAUT

Luís LEITE RAMOS

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE

Ian LIDDELL-GRAINGER

Georgii LOGVYNSKYI

Filippo LOMBARDI/Roland Rino Büchel

François LONCLE/Catherine Quéré

George LOUKAIDES

Yuliya L’OVOCHKINA*

Philippe MAHOUX/Petra De Sutter

Muslum MAMMADOV*

Thierry MARIANI/Marie-Christine Dalloz

Soňa MARKOVÁ/Pavel Holík

Milica MARKOVIĆ*

Duarte MARQUES*

Alberto MARTINS*

Meritxell MATEU

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Virendra Sharma

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Evangelos MEIMARAKIS*

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY/Gábor Harangozó

Jean-Claude MIGNON/Jean-Claude Frécon

Marianne MIKKO*

Olivia MITCHELL

Arkadiusz MULARCZYK*

Thomas MÜLLER/Hannes Germann

Oľga NACHTMANNOVÁ

Hermine NAGHDALYAN*

Marian NEACȘU/Titus Corlăţean

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH

Miroslav NENUTIL

Michele NICOLETTI

Aleksandar NIKOLOSKI

Julia OBERMEIER*

Marija OBRADOVIĆ

Žarko OBRADOVIĆ

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Suat ÖNAL

Ria OOMEN-RUIJTEN

Joseph O’REILLY/Rónán Mullen

Kate OSAMOR*

Tom PACKALÉN

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS/Sílvia Eloïsa Bonet

Ganira PASHAYEVA

Florin Costin PÂSLARU*

Jaana PELKONEN*

Agnieszka POMASKA/Killion Munyama

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT/Phil Wilson

Mark PRITCHARD/Liam Byrne

Gabino PUCHE

Lia QUARTAPELLE PROCOPIO*

Carmen QUINTANILLA

Kerstin RADOMSKI

Christina REES*

Mailis REPS

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE

Soraya RODRÍGUEZ

Helena ROSETA*

René ROUQUET

Alex SALMOND

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Milena SANTERINI*

Nadiia SAVCHENKO/Boryslav Bereza

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Paul SCHNABEL

Ingjerd SCHOU

Koos SCHOUWENAAR*

Nico SCHRIJVER

Frank SCHWABE*

Predrag SEKULIĆ*

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ*

Samad SEYIDOV/Vusal Huseynov

Bernd SIEBERT*

Adão SILVA

Valeri SIMEONOV*

Andrej ŠIRCELJ

Arturas SKARDŽIUS*

Jan ŠKOBERNE/Matjaž Hanžek

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK

Lorella STEFANELLI/Gerardo Giovagnoli

Yanaki STOILOV

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE

Dominik TARCZYŃSKI*

Damien THIÉRY

Antoni TRENCHEV*

Krzysztof TRUSKOLASKI*

Goran TUPONJA/Snežana Jonica

İbrahim Mustafa TURHAN/Burhanettin Uysal

Konstantinos TZAVARAS*

Leyla Şahin USTA

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN/Tore Hagebakken

Petrit VASILI*

Imre VEJKEY

Stefaan VERCAMER*

Birutė VĖSAITĖ/Egidijus Vareikis

Nikolaj VILLUMSEN

Vladimir VORONIN*

Viktor VOVK

Nataša VUČKOVIĆ*

Draginja VUKSANOVIĆ*

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER/Annette Groth

Jacek WILK*

Andrzej WOJTYŁA

Morten WOLD/Ingebjørg Godskesen

Bas van ‘t WOUT*

Gisela WURM*

Serap YAŞAR

Leonid YEMETS

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ*

Marie-Jo ZIMMERMANN/Anne-Yvonne Le Dain

Emanuelis ZINGERIS

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Espagne/Pedro Azpiazu

Siège vacant, Espagne /José María Chiquillo

Siège vacant, Espagne /Jordi Xuclà

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, République de Moldova / Valentina Buliga

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

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Observers

Héctor LARIOS CÓRDOVA

Armando LUNA CANALES

Ulises RAMÍREZ NÚÑEZ

Partenaires pour la démocratie

Hamidine ABDELALI

Benazzouz ABDELAZIZ

M. Lebbar ABDESSELAM

Najat AL-ASTAL

Mohammed AMEUR

M. Hassan ARIF

Nezha EL OUAFI

Omar HEJIRA

Bernard SABELLA

Mohamed YATIM