FR16CR07

AS (2016) CR 07

SESSION ORDINAIRE DE 2016

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la septième séance

Jeudi 28 janvier 2016 à 10 heures

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 10 sous la présidence de M. Agramunt, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT - La séance est ouverte.

1. Attaques récentes contre des femmes dans des villes européennes : nécessité d’une réponse globale (Débat selon la procédure d’urgence)

LE PRÉSIDENT* - L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Gunnarsson, au nom de la commission sur l’égalité et la non-discrimination, sur « Attaques récentes contre des femmes dans des villes européennes : nécessité d’une réponse globale » (Doc. 13961).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Je vous rappelle aussi que nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 12 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 11 h 35, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. GUNNARSSON (Suède), rapporteur de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Monsieur le Président, permettez-moi, car je n’en ai pas eu encore l’occasion, de vous féliciter pour votre élection.

Chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier le secrétariat pour son engagement et son professionnalisme : préparer un tel rapport dans un temps aussi réduit était un véritable défi. Je voudrais également remercier la commission pour son soutien et le débat constructif que nous avons eu.

Lundi dernier, l’Assemblée a décidé de consacrer un débat d’urgence aux attaques récentes qui ont eu lieu contre des femmes à Cologne et dans d’autres villes, le 31 décembre. Etre rapporteur sur ce sujet revêt, à mon sens, une responsabilité particulière : la responsabilité de demander aux autorités d’enquêter sur ces événements ; la responsabilité de sensibiliser au signalement tardif de la part des médias ; la responsabilité de condamner toutes les formes de violence à l’encontre des femmes, quels qu’en soient les auteurs et où que ces violences soient commises ; la responsabilité de dire que cette violence n’est pas une question culturelle.

Il est difficile de tirer des conclusions à ce stade, mais les autorités allemandes ont demandé qu’il n’y ait aucune impunité. Je les encourage donc à enquêter et à nous éclairer sur ce qui s‘est réellement produit au cours de cette nuit-là. Cependant, nous n’avons pas besoin d’attendre les résultats de cette instruction pour réagir à ces violences. Et par ce débat d’urgence, nous souhaitons montrer que nous ne sommes pas indifférents aux violences commises à l’encontre des femmes.

Je dirai d’abord quelques mots du rôle qui a été joué par les médias. Les médias allemands comme les médias internationaux n’ont parlé de ces incidents que 7 jours plus tard. Ont-ils essayé de les dissimuler ? Si oui, pourquoi ? La violence à l’encontre des femmes constitue un crime et ne doit pas être dissimulée au grand public. Des informations tardives, partielles sapent la confiance que le public a envers les médias. C’est la raison pour laquelle des mesures doivent être prises pour lutter contre la dissimulation d’informations. Les médias doivent nous informer de façon objective des faits, sans stigmatiser une partie de la population. Je voudrais donc encourager notre Organisation à mener une enquête sur la responsabilité des médias dans cette affaire.

Nous savons que ce qui s’est produit au cours de cette nuit du 31 décembre est une forme de violence à l’encontre des femmes, un des crimes les plus répandus. Le problème n’est pas nouveau : il a commencé l’année dernière avec l’arrivée des réfugiés. Ces violences sont commises partout, aucun pays n’est à l’abri.

Si la violence à l’encontre des femmes a généralement lieu dans l’intimité, elle peut être aussi commise sur la voie publique, sous forme de harcèlement sexuel. Selon les statistiques de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, une femme sur trois est victime de violence.

En ce qui concerne les faits que nous examinons, d’après les victimes, la majorité des auteurs étaient d’origine étrangère, ce qui a déclenché un débat sur la politique d’accueil et d’intégration des réfugiés. Et je regrette que les mouvements populistes se soient emparés de ces événements pour présenter les réfugiés comme dangereux pour les femmes.

Dans le cadre de ce rapport, je voudrais rappeler que la violence à l’encontre des femmes, quelle qu’elle soit – violence sexuelle, harcèlement, etc. –, n’est pas un problème culturel. Elle est due à des mentalités médiévales, patriarcales qui prédominent encore dans certains pays, y compris en Europe. La Convention d’Istanbul, dans son article 42, affirme très clairement que la tradition, les coutumes, la religion ou le sens de l’honneur ne peuvent en aucun cas justifier de telles violences.

Nous devons rappeler notre engagement de lutter contre toutes les formes de violence à l’encontre des femmes et nous devons réfléchir à leurs causes. Cette violence est due principalement à l’inégalité qui existe encore entre les hommes et les femmes. Nous ne pourrons donc y mettre un terme tant que nous n’aurons pas réussi à changer les mentalités. C’est pourquoi il est indispensable d’investir dans des programmes visant à développer l’égalité entre les hommes et les femmes.

Il est essentiel que les hommes participent à ces campagnes. Aussi, j’encourage tous les hommes de cette Assemblée et d’ailleurs à marquer leur soutien en participant aux différentes campagnes lancées, telle que la HeforShe Campaign.

En réaction aux attaques, l’Assemblée devrait demander que soit ratifiée la Convention d’Istanbul et qu’elle soit pleinement appliquée.

L’Assemblée doit également demander aux Etats membres du Conseil de l'Europe de renforcer leurs efforts pour prévenir cette violence faite aux femmes et pour protéger leur droit à l’intégrité physique, le droit de ne pas être harcelée, en privé comme sur la voie publique.

Les auteurs ne doivent pas rester impunis. A ce titre, il faut encourager les femmes à signaler ces attaques. Il convient également de demander que soient accordées des ressources financières suffisantes aux organisations qui s’occupent des victimes de cette violence.

Je propose par ailleurs qu’un rapport de suivi soit élaboré à propos du harcèlement des femmes sur la voie publique pour que le sujet soit débattu par l’Assemblée.

Le projet de résolution aborde le rôle des médias qui ont la responsabilité d’informer à temps, complètement et objectivement. Les membres de notre Assemblée doivent condamner toutes les formes de violence – le sexisme, les discours de haine – aujourd’hui dans cette enceinte, mais également une fois de retour dans leur parlement respectif. Nous avons la possibilité de montrer que l’Assemblée parlementaire n’est pas indifférente aux victimes, celles des événements de la nuit tragique du 31 décembre 2015 et de toutes celles qui en subissent d’une façon générale en Europe.

Affichons notre soutien et demandons à nos parlements de protéger davantage les femmes.

J’espère que vous soutiendrez le projet de résolution.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le rapporteur, il vous reste un temps de parole de cinq minutes pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

Mme KAVVADIA (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Nous sommes très satisfaits du rapport présenté, que nous soutenons.

Les événements de Cologne inquiètent tout le monde. Cela dit, nous ne disposons pas de l’ensemble des éléments du puzzle. Aussi, devons-nous laisser les autorités allemandes travailler sans les influencer, car il ne faudrait pas que ce sujet devienne une question politique.

Les auteurs de ces attaques doivent être sanctionnés, car nous ne pouvons tolérer de tels comportements. Mais il n’est pas prouvé que ces incidents aient un rapport avec les flux migratoires en cours ou avec l’arrivée des réfugiés syriens. Je le souligne, car des forces en Europe essayent de promouvoir la xénophobie contre les réfugiés et les migrants. C’est d’ailleurs une attitude à laquelle nous avons été confrontés dans le cadre de nos réunions et à laquelle nous devons nous opposer, non seulement pour des raisons idéologiques, mais parce qu’il ne faut pas accuser les réfugiés de tous les maux. On ne résoudra pas le problème de cette manière, cela ne participe pas à la protection des droits de l’homme ni des droits des femmes. Nous sommes tous déterminés à protéger les libertés fondamentales.

Faire face à de tels incidents nécessite d’adopter une approche objective. Il ne convient pas de favoriser une confrontation entre l’islam et la chrétienté. Nous parlons d’une violence sexuelle. C’est elle qui mène à de tels comportements. Nous ne changerons pas les mentalités si nous décidons que les crimes de Cologne sont uniquement le fait de l’islam. Ce scénario hypothétique n’est nullement avéré. Tenons-nous en donc à la réalité pour assurer l’égalité, car c’est l’égalité qui nous fournira la solution du point de vue culturel et politique. Peut-être faut-il inviter tous les Etats membres du Conseil de l'Europe à ratifier la Convention d’Istanbul.

M. FISCHER (Allemagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je suis ravi que nous puissions tenir ce débat aujourd’hui, car il y a des choses qu’il faut dire clairement. Premièrement, les droits de l’homme valent pour tous, hommes et femmes. Deuxièmement, nous refusons toute forme de violence contre les personnes. Un tel principe vaut à l’étranger, il vaut aussi chez nous.

Une femme parlementaire vient de s’étonner et me demande pourquoi tant de femmes et si peu d’hommes sont inscrits sur la liste des orateurs alors qu’il s’agit de violences faites aux femmes. Peut-être aurait-il été bon qu’ils fussent plus nombreux. Je vous soumets ce commentaire, vous en tirerez les conclusions que vous voudrez.

Les événements qui ont eu lieu ne sont pas limités à l’Allemagne. La Suède et d’autres pays ont été touchés. Il est par conséquent indispensable que des enquêtes poussées permettent d’établir les faits. Pour l’heure, on entend bien des choses, mais on ne sait pas très bien ce qui s’est passé. N’oublions pas que le principe de la présomption d’innocence s’applique dans nos pays. Tant qu’il n’y a pas de preuves, personne n’est coupable. Il convient donc que des enquêtes poussées établissent l’ensemble des faits.

Se pose également le problème de la presse qui n’a relaté les événements qu’avec retard. Pourquoi 48 heures, 72 heures après les faits, la presse a-t-elle fait un tel battage et publié autant d’articles ? Tous les événements décrits ont-ils eu lieu ? Et, si oui, pourquoi la presse a-t-elle réagi avec tant de retard ? Pourquoi, trois jours après la nuit du 31 décembre, tous ces articles de presse, ces reportages, tous ces commentaires dans les médias ?

Il convient d’enquêter. Au Conseil de l'Europe, nous nous faisons les défenseurs de la liberté de la presse. Au cours de nos voyages, nous veillons au respect de la liberté de la presse. Nous la prônons partout. Dans le cas qui nous occupe, visiblement, quelque chose n’a pas fonctionné. De quoi s’agit-il ? Je l’ignore. Je ne connais pas les résultats de l’enquête. Mais il faudra répondre aux questions posées.

Je suis très heureux que nous nous saisissions du sujet aujourd’hui et je souhaiterais que nous nous écoutions les uns et les autres avec respect au cours de ce débat et que nous suivions ces questions une fois le débat terminé, car le problème ne sera pas résolu aujourd’hui.

Mme De SUTTER (Belgique), porte-parole du Groupe socialiste* – Au nom de mon groupe et de toutes les femmes de mon groupe, je voudrais envoyer ce matin un message clair : jamais on ne saurait accepter les violences contre les femmes ; jamais les victimes de telles violences ne sauraient être rendues responsables des violences qui leur sont faites.

Cette question n’est ni politique, ni culturelle, ni religieuse ; elle ne doit pas être instrumentalisée à des fins idéologiques dans le cadre du débat sur les flux migratoires. Il s’agit d’une question morale. Aucun relativisme culturel ne saurait justifier la violence contre les femmes. Que l’on soit un homme ou une femme, blanc ou noir, migrant ou non, croyant ou pas, éduqué ou non, riche ou pauvre, on ne doit jamais porter atteinte à l’intégrité physique d’autrui. « Jamais », c’est là le mot essentiel. Les hommes et les femmes doivent disposer de leur corps comme ils l’entendent. La violence sexuelle est toujours et partout inacceptable, qui qu’en soit l’auteur, quelles qu’en soient les formes, verbales ou physiques. Cela semble évident, mais cela ne l’est pas dans les faits malheureusement. Nous ne devons jamais estimer que les droits des femmes sont acquis, mais au contraire les rappeler sans relâche.

Il y a eu Cologne et Munich récemment, mais aussi le Caire en 2011, sans parler des violences qui prennent place dans l’intimité du foyer. N’oublions pas, mes chers collègues, que 90 % des violences contre les femmes se produisent à l’abri des regards, au sein de la famille. Le rapport de M. Gunnarsson rappelle les résultats de l’enquête sur la violence à l’égard des femmes réalisée en 2012 par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne : un tiers des femmes indiquent avoir subi une forme d’agression sexuelle de la part de leur partenaire. C’est pourquoi je vous demande de réagir aux violences sexuelles dont sont victimes les femmes. Nous ne voulons pas entendre que les femmes ne doivent pas sortir la nuit, ni porter des jupes courtes ! Nous voulons que les hommes et les femmes condamnent toutes les violences quelles qu’elles soient.

Tous les Etats membres du Conseil de l’Europe se doivent de ratifier sans tarder la Convention d’Istanbul. Elle constitue l’unique moyen de s’attaquer aux violences sexuelles sans stigmatiser telle ou telle conviction religieuse. Rien ne justifie la violence sexuelle, ni la religion, ni la culture. Les hommes ne sont pas des prédateurs sexuels, ni les femmes des proies. L’humanité a évolué depuis Darwin et les êtres humains ne sont pas rivés à leur instinct de reproduction. Je le répète, il ne s’agit pas d’une question politique, mais d’une question morale.

Mme REPS (Estonie), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Permettez-moi de remercier, au nom de mon groupe, le rapporteur et le secrétariat de la commission sur l’égalité et la non-discrimination pour ce rapport qui donne une très bonne vue d’ensemble de la question des violences sexuelles à l’égard des femmes et qui a été préparé en très peu de temps. Un débat comme celui que nous tenons ce matin est toujours très intéressant. Une question sensible peut en effet donner lieu à des échanges de haute tenue.

Comme cela a été dit, il n’existe aucune excuse possible, quelles que soient les circonstances, aux violences sexuelles perpétrées contre les femmes, les enfants, les adolescents, les hommes, les minorités et les personnes LGBT. Les violences sexuelles sont utilisées comme une arme de guerre dans de nombreux conflits, parfois à des fins politiques, pour lutter contre certains adversaires. C’est tout à fait intolérable et cela viole les principes de la Convention européenne des droits de l’homme. Aucun motif religieux ou culturel ne peut excuser de tels comportements.

Il est très important de parler de manière objective des incidents constatés, en dehors de tout discours de haine, sans montrer du doigt certaines communautés ethniques. Nous sommes tous d’accord pour dire que tous les demandeurs d’asile ne sont pas des terroristes ou des violeurs. Eux aussi doivent être protégés, car les violences à l’intérieur des camps de réfugiés sont malheureusement bien plus répandues que nous ne voulons l’accepter. Des enfants disparaissent dans ces camps, d’autres sont vendus parce qu’ils n’ont pas de papiers d’identité. Cela aussi, nous devons en parler. Je suis très préoccupée de la tendance de quelques-uns à considérer les réfugiés comme des ennemis, qu’il faudrait mettre en prison. Luttons contre les violences faites aux femmes mais continuons de protéger les communautés minoritaires.

Sir Roger GALE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Le Groupe des conservateurs européens est à l’initiative de ce débat. Nous pensons en effet que lorsque certains tentent d’étouffer des crimes, il est de notre devoir d’en parler. Je remercie donc M. Gunnarsson d’avoir produit ce rapport si rapidement, ainsi que M. Fischer d’avoir souligné que les attaques récentes contre les femmes ne sont pas uniquement un problème allemand, ni même uniquement un problème de migrants.

Les crimes répugnants qui se sont produits en Allemagne, en Suède et dans d’autres villes européennes sont intolérables, quels que soient leurs auteurs, quels que soient les pays. J’ai longtemps siégé à la sous-commission des médias et de la société de l’information de l’Assemblée et j’ai toujours plaidé en faveur des droits de journalistes en Europe. Une chose me semble claire : après les attaques contre des femmes qui se sont produites dans des villes européennes récemment, il y a eu une véritable censure des journalistes, qui ont été empêchés de relater fidèlement les faits. Cela aussi, c’est intolérable.

J’aimerais attirer votre attention sur le cinquième paragraphe du projet de résolution : « Les médias ont une responsabilité importante pour couvrir de manière objective et honnêtement les faits, sans stigmatiser une partie de la population. Ils ne devraient pas, au nom du politiquement correct, cacher la vérité au grand public. Rendre compte de crimes de manière partielle, tardive ou biaisée peut alimenter les théories conspirationnistes, attiser la haine à l’égard d’une partie de la population et contribuer à la défiance envers les autorités et les médias. » Je crois que je n’aurais pas pu mieux dire les choses !

Il a fallu quatre jours pour que les médias britanniques fassent état de ces scènes répugnantes. Comme l’a dit M. Fischer, nous ne pouvons pas ne pas enquêter sur ces événements. Nous devons par ailleurs exiger que ceux qui contrôlent nos médias fassent preuve de transparence et d’honnêteté.

Mme HOFFMANN (Hongrie) – Avant tout, je souhaite remercier mes collègues d’avoir proposé de mettre en débat cette question importante, ainsi que M. le rapporteur Gunnarsson pour son travail.

Le problème inscrit à l’ordre du jour suscite une attention extraordinaire dans toute l’Europe. Les événements survenus à Cologne et dans d’autres lieux ont choqué, et provoqué, dans de nombreux cas, des réactions de colère ou même des agressions. La Hongrie condamne les violences de toutes sortes.

Nous, représentants des parlements nationaux, devons mener un débat honnête et responsable sur une question qui, vraisemblablement, ne constitue pas une manifestation isolée, et dont on peut craindre qu’elle ne se reproduise à l’avenir.

Il est clair, depuis que le problème a été révélé, qu’un épisode de violences faites aux femmes plus brutal que tous les précédents s’est produit en Europe, et que nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour y répondre.

J’ai évoqué un débat honnête et responsable. Celui qui s’y refuse favorise à la fois les réactions radicales simplificatrices et les auteurs des violences. C’est pourquoi il est aussi nécessaire de dire que les événements de Cologne dépassent la question de la violence faite aux femmes. À notre avis, qui reflète l’avis de nombreux hommes politiques responsables et qui est confirmé par les faits eux-mêmes – rien qu’à Cologne, nous avons connaissance de plus de 700 faits de violence –, le problème est l’une des conséquences de l’immigration massive, et constitue une nouvelle dimension de la criminalité en Europe. Il s’agit d’une violence organisée d’un nouveau type : jusqu’à présent, ce phénomène n’avait été observé sur notre continent que pendant les périodes de guerre.

Il nous faut examiner soigneusement les questions suivantes : la violence de masse, les mesures efficaces et légales prises à son encontre, le rôle et la responsabilité de la presse, mais, avant tout, l’immigration et l’intégration. Il est inévitable de traiter sur le long terme les différences entre les cultures. Il est nécessaire de déclarer que les migrants doivent accepter les valeurs européennes et s’y adapter.

L’opinion publique doit être informée sans délai et de manière honnête sur l’ensemble de ces questions. Il faudra y revenir après la fin des enquêtes, et non pas uniquement à partir des informations données par la presse, lorsque nous aurons pleinement connaissance des faits.

M. SCHWABE (Allemagne)* – Dans presque toutes les conventions, dans presque toutes nos législations, nous insistons beaucoup sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Cette égalité, nous tentons de la mettre en œuvre autant que possible, mais cela reste insuffisant : on déplore encore un déficit d’égalité, ainsi qu’un sexisme au quotidien – dans les publicités, les blagues, etc. – et, malheureusement, des crimes et délits sexuels, comme nous venons de le constater une fois de plus.

Trop souvent, on minimise la gravité de ces manifestations de sexisme. Or, les scènes qui ont marqué la Saint-Sylvestre en Allemagne et dont les femmes ont été victimes ne sont évidemment pas tolérables. Un tel sexisme doit être interdit partout. Mais il ne faudrait pas non plus que des hommes, qui ne se sont d’ailleurs jamais caractérisés par leur engagement pour l’égalité entre les hommes et les femmes, pervertissent ce discours en s’en prenant aux migrants.

En Allemagne, des enquêtes ont été ouvertes pour établir les faits et éviter que l’affaire ne soit étouffée. Ce qui m’inquiète, c’est l’ampleur du phénomène. On avait déjà assisté à des scènes comparables en Egypte, en Inde, mais jamais chez nous, semble-t-il.

La police a semblé dépassée cette nuit-là, à Cologne et ailleurs. L’étendue des exactions n’est apparue qu’au bout de plusieurs jours. Mais sans doute est-ce aussi parce que certaines femmes ont hésité à porter plainte. À mon avis, c’est pour cela que la presse n’a pas réagi immédiatement, et non du fait d’une censure : il a fallu quelques jours pour que l’on se rende compte de la gravité et de l’ampleur des faits.

Cela dit, on a depuis réagi. Hier, le Gouvernement allemand a décidé qu’il expulserait les auteurs de crimes et de délits. Mais si l’on durcit la loi et les pratiques, il faut aussi des forces de l’ordre en nombre suffisant et bien formées, y compris aux problèmes de harcèlement. Nous avons également besoin que la convention d’Istanbul soit bien appliquée, et qu’elle soit ratifiée par tous les pays, au lieu de 19 seulement à ce jour : nous disposerons ainsi d’un instrument encore plus efficace pour faire face à ce type d’événements.

Mme HETTO-GAASCH (Luxembourg) – La violence, quelle que soit sa forme, ne doit jamais être ni taboue ni banalisée. Permettez-moi de soulever à ce sujet quelques questions qui restent à éclaircir.

Ce qui s’est déroulé en Allemagne et dans d’autres villes européennes, en Autriche et en Suède, nous laisse perplexes, nous choque et, surtout, crée un grand malaise dans la société. Qu’est-il arrivé sinon de la violence à l’égard des femmes, sous toutes ses formes ?

Puisque l’on parle de simultanéité des actes, d’attaque organisée, il faut se demander comment cette simultanéité a pu être planifiée, quels messages ont été diffusés dans ces milieux et qui en a été l’instigateur.

Ensuite, quelle image de la femme ces agresseurs ont-ils ? La notion d’égalité entre hommes et femmes leur est-elle familière ? Sont-ce des normes de virilité, patriarcales, qui, dans leur esprit, les habilitent à être violents à l’égard des femmes ?

Enfin, quelle a été leur motivation ? Une agressivité débordante, une frustration excessive ? Ou bien voulaient-ils tout simplement semer angoisse et terreur ? En tout état de cause, il faudra trouver ce qui les a poussés à agir de cette façon.

Que faire ?

Tout d’abord, il convient de rappeler le rôle des médias. La couverture médiatique de tels faits doit être honnête et responsable, et la plus complète possible, pour ne pas laisser de place à la spéculation.

Ensuite, il est primordial que tous les auteurs de violence soient poursuivis en justice et tenus responsables de leurs actes.

Enfin, c’est aussi par le biais de l’éducation et de la prévention qu’il faut agir : tous les acteurs de terrain – police, éducateurs, enseignants – doivent avoir suivi une formation solide, de manière à diffuser les bons messages quant au comportement à adopter. Nous devons mieux faire connaître les règles appliquées par les Etats de droit, par exemple la liberté d’expression, la liberté de religion, l’égalité entre les femmes et les hommes.

Les personnes qui viennent dans nos pays respectifs pour y vivre et toutes les personnes qui vivent dans nos pays doivent respecter nos normes, nos valeurs et nos lois. Cela vaut pour tout le monde : si cela ne leur convient pas, si elles ne veulent pas s’adapter, elles ne pourront pas rester.

Pour aboutir à une cohabitation paisible et respectueuse, il nous faut un cadre commun de règles de coexistence, règles qui doivent être respectées sans faute. Faisons-les mieux connaître et défendons, tous ensemble, nos valeurs communes.

Mme KALMARI (Finlande)* – La question dont nous débattons aujourd'hui, d’une grande importance, est particulièrement d’actualité. Les récents entretiens, au-delà des migrants, avec des travailleurs sociaux et des psychologues qui se sont attachés aux personnes qui ont été traumatisées dans toute l’Allemagne, montrent que cette migration en masse s’est accompagnée d’une montée de la violence contre les femmes.

Nous avons assisté à un nombre accru de mariages forcés, de trafics sexuels, d’abus divers ; les femmes ont été soumises à la violence de la part d’autres migrants, de trafiquants d’êtres humains, de membres masculins de la famille et même de membres des forces de police européennes.

Malheureusement, il n’existe pas de statistiques fiables concernant ces différents cas. Le nombre accru d’attaques contre les femmes dans les villes européennes est néanmoins un fait sur lequel les médias ne sauraient rester silencieux. Il est très important de bien comprendre que ce n’est pas la couleur de peau ou la différence de religion qui rend les hommes dangereux ou qui les transforment en violeurs.

On ne peut pas non plus fermer les yeux s’agissant de violations des droits des personnes. Le fait de condamner le harcèlement sexuel n’est pas du racisme ; au contraire, faire respecter les règles communes permettra d’améliorer l’acceptation des réfugiés.

Il nous faut maintenant analyser ce qui sous-tend ces attaques contre les femmes dans ces grandes villes : pourquoi ont-elles été organisées ? Peut-on penser que ces crimes ont été commis parce que cela donnait une possibilité de rester dans le pays du fait des poursuites pénales ? Ces crimes ont-ils été commis pour perturber la paix sociale et la stabilité ?

Il faut dire très clairement que toutes les formes de violence à l’encontre des femmes sont des actes délictueux partout en Europe. À cet égard, l’éducation est l’une des mesures de prévention les plus efficaces. En permettant aux femmes et aux enfants d’avoir accès à l’éducation, nous pouvons les doter des outils nécessaires pour se défendre contre la violence, pour leur donner le pouvoir de devenir des personnes fortes et indépendantes. Mais il est tout aussi important de s’efforcer de changer l’attitude des jeunes et des hommes.

Il ne faut pas abaisser le niveau des droits atteint par les femmes. Dans mon propre pays, tout demandeur d’asile accueilli dans un centre de réfugiés doit signer une déclaration garantissant qu’il ou elle respectera la législation finnoise et les valeurs fondamentales. Un demandeur d’asile criminel, qui n’accepte pas ces conditions, peut selon moi être renvoyé dans ses foyers.

Mme HEINRICH (Allemagne)* – Je remercie M. Gunnarsson pour ce rapport très équilibré et pour avoir rappelé que nous avons besoin de plus d’informations avant de pouvoir nous faire une idée de ce qui s’est passé en Allemagne. Après la nuit de la Saint-Sylvestre, l’opinion publique a été consternée par les faits commis à Cologne, mais aussi dans d’autres grandes villes d’Allemagne.

Il est clair que nous condamnons toute forme de violence à l’encontre des femmes sur la voie publique. Il faut les protéger. L’Etat de droit a l’obligation de s’intéresser à ces incidents. Il ne doit pas y avoir d’impunité : il faut que la police et les autorités de répression soient formées et préparées pour l’éviter. Nous avons du pain sur la planche !

Pour ce qui est des médias, ceux-ci auraient signalé les faits très tardivement : cela concerne surtout les médias nationaux parce qu’au niveau local, par exemple à Cologne, nous avons été informés dès le lendemain. On ne peut donc pas faire cette critique à l’encontre des médias régionaux. Il est vrai aussi que les plaintes, qui se sont accumulées, ont été déposées plusieurs jours après : c’est la raison pour laquelle la presse nationale n’a pu en parler qu’à ce moment-là.

Il est tout aussi clair qu’il ne faut pas utiliser ces attaques pour stigmatiser les réfugiés, même si des migrants ou des réfugiés ont participé à ces attaques, et une condamnation globale serait contre-productive. D’ailleurs, la violence contre les femmes n’est pas un phénomène nouveau : le fait qu’elle ne soit pas toujours signalée à la police est également connu, sachant en outre qu’elle concerne des hommes venant de différents milieux culturels.

Ainsi que M. Gunnarsson l’a dit, la véritable raison tient à l’inégalité entre l’homme et la femme, et je suis ravie que l’on ait abordé la question de la religion. En l’occurrence, aucun principe religieux ni culturel ne tient : c’est la conséquence de structures patriarcales, mais aussi le fruit d’une éducation où l’on n’apprend pas aux jeunes garçons à respecter les femmes : ils ont donc l’impression qu’ils peuvent attoucher les femmes, cela pouvant aller jusqu’à l’agression sexuelle.

Les recommandations figurant dans le rapport sont très judicieuses, par exemple l’organisation de campagnes de sensibilisation, à condition évidemment que ces campagnes soient également organisées à l’adresse des réfugiés lorsqu’ils arrivent, pour qu’ils comprennent que la violence à l’encontre des femmes est condamnée.

Je tiens vraiment à souligner le rôle particulier que joue l’éducation des jeunes filles comme des jeunes hommes : les Etats doivent s’intéresser davantage aux inégalités existant dans nos différents pays.

J’espère que le rapport contribuera aussi à modifier nos lois nationales et à amender ce qui mérite de l’être pour protéger davantage les femmes. Et je me félicite que tant d’hommes participent à ce débat !

Mme ROBINSON (Royaume-Uni)* – Notre débat d’aujourd'hui n’est que l’un des nombreux débats que nous avons depuis quelque temps dont l’objectif est de braquer le projecteur sur les violences contre les femmes.

En abordant ce sujet, il est inévitable que les attitudes dans la société envers les femmes soient passées au crible. Le rapport indique que les violences à leur égard se produisent partout et que leurs auteurs ont des origines fort diverses : ce n’est guère rassurant, car cela agite le spectre d’une forme de banalisation de ces crimes.

La recommandation concernant les femmes dans l’espace public vient à point nommé.

Ces événements ont fait la une dans la presse des pays européens en raison non seulement de la nature très publique des attaques, mais aussi de leur coïncidence dans le temps et de leur ampleur. Le choc de ces attaques de masse a été un cri d’alarme pour la police, la presse et les politiciens, qui se penchent à présent sur les raisons sous-jacentes. On a beaucoup parlé de la nationalité étrangère des auteurs, ce qui a inévitablement conduit à des interrogations sur l’immigration et son influence sur nos communautés, mais, quel que soit le résultat d’un tel débat, il doit être replacé dans le contexte de l’Etat de droit.

Le rapport indique que les violences sexuelles ne sont pas suffisamment signalées, notamment en raison d’une méfiance à l’endroit du judiciaire et de la police. À certaines femmes on a indiqué qu’il n’y avait pas assez d’officiers de police. D’autres ont purement et simplement été découragées de porter plainte.

Un des aspects inquiétants de ces événements, c’est en effet l’apparente hésitation initiale de la police à conduire des enquêtes, mais aussi celle de la presse à faire état des faits. On a suggéré que c’était dû au fait que la nationalité étrangère des auteurs aurait créé des confusions dans l’esprit des gens, mais les médias ont la responsabilité de relater les événements de façon objective. L’accès aux médias est universel et instantané, mais cela peut servir aussi à manipuler l’opinion publique, à des fins de propagande. Nous devons veiller à l’objectivité et à l’impartialité des grands médias.

On peut lire au paragraphe 51 du rapport : « Ces attaques contribuent à un climat de peur qui peut mettre en danger les piliers démocratiques de notre société et encourager certains à chercher d’autres alternatives ». La peur est l’ennemie de la liberté. Elle empêche les gens de signaler des crimes et la presse d’en faire état. J’espère que ce rapport et ce débat permettront dans une certaine mesure de remplacer le climat de peur par un climat de débat franc et ouvert.

Mme RAWERT (Allemagne)* – Merci pour ce rapport et ce débat.

La violence contre les femmes est répréhensible, où que ce soit. La différence entre un Etat de droit et une société patriarcale, c’est la prévention, et cela dépend notamment de la possibilité de poursuivre les auteurs de crimes et donc du fait que les femmes puissent librement et sans contrainte les dénoncer.

Le 21 janvier, plus de 800 infractions ont été signalées, dont un grand nombre d’infractions sexuelles – dans les autres cas, il s’agit principalement de vols de téléphones portables. Les trente auteurs identifiés seraient d’origine étrangère, et sept sont en détention provisoire. Selon le rapport, il y a eu trois cas de viol – notamment par introduction du doigt. Il y a eu des attouchements des seins et sous la ceinture.

Il faut, dans un Etat de droit, que les femmes aient confiance dans les autorités de répression. Le faible taux de signalements est dû au fait qu’il n’existe pas réellement de législation permettant de poursuivre ce genre d’infractions, considérées comme banales. Il convient à cet égard que la Convention d’Istanbul soit ratifiée.

Plus d’une centaine d’organisations de réfugiés dans toute l’Europe ont condamné fermement les agressions sexuelles contre des femmes en Allemagne et exprimé leur sympathie aux victimes. Elles ont déclaré que les auteurs de ces agressions, qu’ils soient étrangers ou non, devaient être poursuivis et condamnés, qu’il était important de comprendre ce qui s’était passé pour que les femmes se sentent en sécurité, que la justice soit rendue et qu’une politique de prévention puisse être conduite. « Nous n’avons pas fui la violence ailleurs pour l’accepter ici », ajoutaient-elles. Ce message montre qu’il existe de nombreux points communs entre ces réfugiés et nous. Il ne faut pas créer de clivage artificiel. Le respect des droits de l’homme et de l’Etat de droit est une tâche commune.

M. Németh, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Agramunt au fauteuil présidentiel.

Mme LE DAIN (France) – Le rapport est important car il aborde la question de la responsabilité individuelle, alors que le débat public tend à consacrer le concept de responsabilité collective – de sinistre mémoire – et à chercher une communauté ou une religion qui serait à l’origine de ces comportements par effet de masse. C’est comme si l’on disait que les drames qui ont eu lieu dans des stades, lors de matches de football, il y a une quinzaine d’années, reposaient sur une responsabilité collective. Or il s’agit à chaque fois de faits individuels avec un effet de masse.

Comme l’a dit une collègue, l’homme ne peut adopter collectivement des comportements de prédation, et la femme être réduite à satisfaire ses pulsions sexuelles.

Nous devons assumer dans cette enceinte qu’il s’agit en l’occurrence d’individus, même s’il y a eu effet de masse, des effets d’entraînement. La responsabilité collective n’existe pas en Europe, et il est important de le rappeler. Quant à laisser entendre qu’il y aurait eu des manipulations, des manœuvres à l’origine de ces faits dramatiques, sur quels indices cela s’appuie-t-il ?

Il ne faut pas non plus parler des femmes en général. C’est chacune d’entre elles qui a été violentée ; pour certaines cela restera un souvenir très lourd toute leur vie, d’autres les évacueront plus vite.

La responsabilité individuelle est le principe fondamental sur lequel nous devons travailler, sans tomber dans le piège de ces idées fausses selon lesquelles il y aurait des cultures, des manières d’être, des traditions auxquelles on pourrait ou bien trouver des excuses ou bien au contraire ne jamais en trouver.

Au Conseil de l’Europe, nous tentons de trouver des voies communes et les mots pour le dire et, au bout du compte, faire en sorte que les choses changent. Voilà ce qu’est le projet de cette Institution.

Je souhaitais parler de cette question de responsabilité individuelle, mais je voulais également aborder celle de la responsabilité des médias. L’une de nos collègues en a parlé à propos de la presse locale à Cologne, constatant que l’ampleur de l’événement n’avait été comprise aux niveaux national et international que quelques jours plus tard. N’est-ce pas parce que, tout simplement, les violences faites aux femmes ne sont après tout pas si graves ? Elles sont pourtant très graves et chacune de ces femmes en gardera un traumatisme.

Nous avons donc un travail de fond à accomplir, et je remercie le rapporteur d’avoir élaboré ce texte très délicat dans ses formulations mais qui, en même temps, ne nie pas les responsabilités. Je dis bien « responsabilités », et non « culpabilités » : sortons en effet de ces discours accusateurs, qui cherchent à désigner des responsables ou des coupables. Nous avons à faire évoluer le monde, à changer les individus et les pratiques collectives.

Je salue l’idée que l’on pourrait très rapidement, dès cette année, ratifier enfin la Convention d’Istanbul. Je trouve d’ailleurs étrange, moi qui viens d’arriver dans cette Assemblée, qu’elle ne l’ait pas encore été.

Nous avons dans cette enceinte une forme de responsabilité collective à ne pas dire, à ne pas mettre des mots sur des faits, en l’occurrence des faits individuels pour ces femmes qui viennent de vivre cette aventure terrifiante. Et pour les hommes qui en sont à l’origine, il faut poursuivre ceux qui sont identifiés et aller chercher ceux que l’on n’a pas encore trouvés.

Mes chers collègues, je suis convaincue que c’est par l’éducation des jeunes que nous parviendrons à faire en sorte que les garçons entendent dès l’enfance que les filles sont leurs égales et qu’ils n’ont pas à avoir à leur égard des comportements de prédateurs. Parce que les garçons, les hommes, ne sont pas des prédateurs. Ils sont des êtres humains.

Mme QUINTANILLA (Espagne)* – Une fois encore, nous parlons de la violence faite aux femmes. En 1975, par exemple, lors de la première Conférence mondiale sur les femmes organisée par les Nations Unies, n’a-t-on pas déjà déclaré que le plus grand crime dissimulé dans le monde était la violence à l’encontre des femmes ?

M. Gunnarsson et la commission sur l’égalité mettent à nouveau à l’ordre du jour politique des faits qui se sont produits dans plusieurs cités d’Europe concernant des violences et des agressions sexuelles contre les femmes, dont l’interdiction est notamment posée par l’article 42  de la Convention d’Istanbul.

Cette convention constitue un mandat international pour notre Assemblée parlementaire. Elle nous rend plus forts les uns et les autres ainsi que nos gouvernements. Elle n’a cependant été ratifiée que par 19 Etats membres de l’Assemblée parlementaire. Cette convention souligne pourtant combien les femmes sont invisibles dans la violence liée au genre, et combien règne le silence des femmes victimes de ces violences.

M. Gunnarsson, comme beaucoup d’autres rapporteurs, remet à l’ordre du jour cette violence qui nous touche tous, femmes et hommes. Car ce problème ne concerne pas que les femmes. Il touche à la dignité, aux droits humains, à une prise de conscience sociale des femmes et des hommes.

C’est la raison pour laquelle il est si important que chacun de nos pays, s’il ne l’a déjà fait, ratifie cette Convention d’Istanbul. C’est un traité international contraignant, qui nous indique comment protéger, prévenir et aider les femmes qui ont été victimes de ces violences.

Mes chers collègues, une quarantaine d’années après cette première conférence, nous devons continuer à parler de la violence à l’encontre des femmes. M. Fischer a lancé un appel aux hommes pour qu’ils s’engagent dans cette lutte et j’aimerais à mon tour vous parler du débat très important qui s’est tenu, au sein des Nations Unies, qui a permis de lancer la campagne HeForShe pour promouvoir le rôle des hommes en faveur de l’égalité entre les hommes et femmes.

Nous voulons avancer vers l’égalité avec les hommes et pas sans eux. Ils doivent être nos alliés, nos complices dans cette voie qui mène vers une réelle égalité. Hommes et femmes, nous avons les mêmes sentiments. Nous voulons être libres. Nous ne sommes pas les uns contre les autres, mais nous voulons nous définir ensemble, afin de construire une société plus égalitaire et plus libre, mais surtout une société d’où la violence sera éradiquée de la vie des femmes.

Nous avons là une occasion historique de signer et ratifier la Convention d’Istanbul, pour aller vers l’égalité et une société libérée de la violence. Reprenons le slogan des Nations Unies : HeForShe.

Mme MIKKO (Estonie)* – Notre débat de ce jour revêt une importance toute particulière. Il est, bien sûr, lié aux événements de harcèlements collectifs massifs la nuit de la Saint-Sylvestre à Cologne, mais il est aussi l’occasion de reparler plus généralement de la violence envers les femmes.

Certains disent que c’est parce que les réfugiés ont des attitudes différentes vis-à-vis des femmes que les Européens, que ce sont de jeunes hommes qui voient les femmes d’une façon particulière. Nous devons surtout éviter de nous laisser emporter par nos passions dans nos réactions et réfléchir aux événements. La tête doit l’emporter sur le cœur.

Comme l’a dit très justement M. Jagland, dans un pays où le droit prime, personne n’est au-dessus des lois. Quelles que soient nos différences culturelles, religieuses ou autres, nous devons respecter les droits des personnes, de toutes les personnes. Tel est le principe, et si tous nos Etats y sont attachés, comment se fait-il que la Convention d’Istanbul n’ait pas été ratifiée par plus de pays ? Le Conseil de l’Europe compte 47 Etats membres : seulement 39 d’entre eux ont signé et 19 ratifié cette convention qui s’attache vraiment à faire cesser la violence envers les femmes. Les droits des femmes, ce sont les droits des personnes. Comment dire que nous sommes attachés à ces droits si nous retardons la ratification de cette convention déterminante ?

Ce débat s’inscrit dans le sillage des événements de Cologne, mais Cologne n’est que la partie émergée d’un iceberg. Pour une fois, on s’est rendu compte de la gravité du phénomène, mais ces événements de la Saint-Sylvestre ne sont que quelques exactions parmi beaucoup d’autres. Il importe maintenant qu’aucune institution n’étouffe l’affaire. Quelles que soient les conclusions, celles-ci doivent être publiées, même si c’est une vérité qui dérange.

De même qu’on ne peut pas traiter le cancer avec de l’aspirine, on ne saurait résoudre les problèmes en les niant. Les hommes, quelles que soient leur origine, leurs croyances ou leur culture, doivent comprendre que l’Europe est une femme, pas une prostituée ; il faut la respecter.

M. FRÉCON (France) – Les récentes agressions contre des femmes, notamment lors de la nuit de la Saint-Sylvestre, ont choqué, à juste titre, toute l’Europe. Des agressions verbales, physiques, mais aussi sexuelles ont en effet été commises dans plusieurs pays d’Europe – en Allemagne, en Suède, en Suisse, en Autriche, en Finlande, en France et probablement dans d’autres.

L’ampleur de ces agressions est inédite, notamment en Allemagne : on parle de 1 076 plaintes déposées, dont 384 pour délits sexuels, à Cologne et Düsseldorf.

Il n’est pas acceptable que de tels actes aient lieu, que ce soit en Europe ou ailleurs. Tout doit être fait pour que cela ne se reproduise plus. La sécurité des femmes est un droit fondamental garanti par la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes, dite Convention d’Istanbul.

Aucune exception ne peut être tolérée. Police et justice doivent veiller à ce que des sanctions exemplaires soient prises contre les coupables. Aucune excuse ne doit être recherchée, et surtout pas l’origine de ces personnes. Peu importe leur origine ou leur culture, il s’agit avant tout de délinquants et de criminels.

Pour autant, il faut éviter les amalgames. Les familles fuyant la guerre en Syrie, en Erythrée ou en Afghanistan ne doivent pas payer globalement pour les actes commis par une minorité d’hommes. Il ne faut pas se laisser gagner par la peur et l’idée de vengeance. Or les débats sur ces affaires très médiatiques ont parfois pris un tour excessivement passionnel, et évoquent des fantasmes propices à des manipulations à visée populiste.

Les violences contre les femmes en Europe remontent à la nuit des temps, et concernent tous les milieux et toutes les cultures. En France – je me permets de citer ce pays que je connais bien –, en moyenne 35 plaintes sont déposées chaque jour pour viol, sachant que seuls 10 % des viols font l’objet d’une plainte. Il ne faut pas oublier que le foyer est, pour les femmes, tout aussi dangereux que l’espace public. Je pense que nos concitoyens doivent pouvoir entendre ce discours, et ne pas passer sous silence des réalités dérangeantes – autres que celles de notre débat – que l’on retrouve d’abord dans nos pays européens.

J’appelle, enfin, comme l’a fait avant moi Mme Mikko, chaque pays du Conseil de l’Europe à ratifier la Convention d’Istanbul et à inscrire dans sa législation la pénalisation des attouchements sexuels. En effet, ces actes ne peuvent rester impunis. En tant que parlementaires, nous devons agir en sens dans nos pays respectifs.

Mme KATRIVANOU (Grèce)* – Nous sommes ici car nous entendons lutter contre l’essor du harcèlement et de ce type de violence qui mettent en péril la coexistence pacifique en Europe avec les migrants et les réfugiés. Mais nous ne devons pas seulement exprimer notre préoccupation : nous devons aussi tracer des perspectives pour l’avenir. C’est pourquoi je pense que ce débat devrait s’inscrire dans le cadre d’un rapport périodique, et non avoir lieu selon la procédure d’urgence.

En effet, les enquêtes ne sont pas encore arrivées à leur terme. Nous ne disposons pas ainsi d’informations précises. Il ne faut donc pas se précipiter et se contenter de suivre l’opinion publique, laquelle a été – à juste titre, évidemment – profondément bouleversée. Nous sommes ici pour réfléchir au futur de l’Europe. Laissons donc les autorités allemandes conduire les enquêtes nécessaires et rendre justice aux victimes, mais n’oublions pas non plus que, pendant la même période, 75 attaques contre des migrants et 15 tentatives d’incendies contre des centres accueillant des réfugiés et des migrants ont été enregistrées. Tout en nous efforçant de lutter contre la violence et le sexisme, il nous faut nous occuper des crimes de haine commis contre les migrants, afin d’empêcher que le racisme, la xénophobie et l’islamophobie ne se renforcent.

Nous devons réfléchir attentivement à la manière de faire face à ce problème, car nous sommes sur une pente dangereuse s’agissant du respect des droits de l’homme. Le Gouvernement allemand, par exemple, envisage de simplifier les procédures d’expulsion des personnes ayant commis des crimes sexuels. On parle aussi de confisquer les biens des migrants, d’introduire des signes distinctifs pour les demandeurs d’asile, ou encore d’interdire certains endroits – notamment les bars – aux migrants et aux réfugiés : ce sont là autant de signes inquiétants, car de telles mesures risquent de fournir des alibis au racisme. Des politiques mettant en péril les droits de l’homme pour tous n’ont rien à voir avec la protection des femmes et la lutte contre le sexisme, bien au contraire. À court terme, de telles politiques semblent utiles, mais à long terme elles vont causer d’importants dommages.

Pour lutter contre le sexisme, il faut avant tout ratifier la Convention d’Istanbul. Pour faire face au racisme, aux crimes de haine, à la violence fasciste contre les migrants, nous devons absolument renforcer l’accueil et l’intégration des nouveaux arrivants. En effet, il est tout à fait clair que l’on ne doit pas lutter contre une communauté en particulier : les droits de l’homme sont indivisibles. Il ne faut pas distinguer une communauté parmi d’autres. Il faut donc veiller à la façon dont nous abordons la question et aux politiques que nous mettons en place.

M. GOPP (Liechtenstein)* – Ce rapport est important et d’une grande qualité, et il énonce des recommandations sans ambiguïté. Mais sera-t-il suffisant de modifier la législation ? Bien entendu, les conventions et les différentes législations fournissent un cadre nécessaire, mais ce n’est qu’en sensibilisant et en éduquant les gens que l’on parviendra à une véritable égalité entre les hommes et les femmes. Sans cela, même les meilleures conventions seront sans effet : l’égalité existera dans les textes, mais pas dans les faits, et les discriminations perdureront.

Il est vrai que l’afflux de migrants a tendance à bouleverser et à ébranler les fondements – notamment culturels – de nos sociétés. Ces gens qui viennent chez nous n’ont pas la même conception des choses et il est vrai que nos efforts pour les intégrer ne sont pas toujours couronnés de succès. Il va falloir inculquer nos valeurs aux migrants, en particulier les jeunes.

Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin de dialogue, notamment sur les valeurs et les différents modes de vie, mais c’est un peu du donnant-donnant : chacun doit y mettre du sien si nous voulons une coexistence pacifique au sein de nos sociétés. Des exemples démontrent que cela est possible.

Par ailleurs, ces agressions ont montré qu’il conviendrait de mieux préparer les forces de l’ordre à ce genre de situation. Et lorsque de telles agressions sont commises, chacun de nous est concerné et doit réagir. Ce qui s’est passé dans la nuit de la Saint-Sylvestre doit donner lieu à des enquêtes approfondies, sans aucune dissimulation, et tous ceux qui ont la possibilité de contribuer à éclaircir les faits doivent se manifester. Surtout, les conclusions que nous pourrons tirer de ces événements doivent avoir une vertu éducative. Encore une fois, nous condamnons toutes les formes de violence à l’encontre des femmes. Ces crimes et ces délits sont des violations graves des droits des personnes, et ce n’est que par l’éducation que nous parviendrons vraiment à une égalité entre les hommes et les femmes dans les faits. Alors agissons.

M. WOOD (Royaume-Uni)* – Il va sans dire que la violence faite aux femmes – ou contre tout autre groupe – est condamnable, quels que soient les auteurs – leur nationalité, leur genre, leurs croyances, etc.

Le rapporteur l’a dit, il ne s’agit pas d’une question culturelle : les auteurs de ces agressions ne représentaient pas une communauté ou une religion en particulier. Et quoi qu’il en soit, les victimes méritent notre protection. Pour ce faire, il convient de commencer par reconnaître ces crimes et en faire état, notamment dans la presse – comme pour tout autre crime. Car quand la presse ne relate pas certains crimes qui ont été commis, elle alimente les théories conspirationnistes de ceux qui veulent diviser les communautés.

C’est la raison pour laquelle les médias doivent diffuser l’information de façon honnête et objective, même quand les faits nous déplaisent. La dissimulation des crimes est non seulement cruelle pour les victimes, mais déstabilise les communautés. Nous avons pu constater, en Grande-Bretagne, les conséquences de l’autocensure de peur d’être qualifiés de racistes. Même si les intentions étaient bonnes, le politiquement correct a empêché de mener une enquête efficace contre des violences faites aux enfants, les services sociaux n’ont pas agi comme ils auraient dû le faire et les gangs qui commettaient ces violences n’ont pas été arrêtés.

Notre Assemblée doit être un phare dans le monde et continuer à défendre nos valeurs. Le message doit être clair et sans ambiguïté : la violence sexuelle est un crime, quels qu’en soient les auteurs et quelles qu’en soient les victimes. Notre Assemblée sera toujours aux côtés des femmes violentées.

Mme Gambaro, Vice-Présidente de l’Assemblée, remplace M. Németh au fauteuil présidentiel.

Mme OHLSSON (Suède)* – La Suède est particulièrement sensible à l’égalité des genres. Des mouvements de femmes se sont battus pour cette égalité, et nous continuerons le combat.

Nous savons que le fait d’être un homme est le dénominateur commun des auteurs de violence sexuelle. Nous savons aussi que des hommes qui émigrent en Suède arrivent de pays qui n’ont pas cet idéal d’égalité des genres. Nous devons donc discuter avec eux de leurs attitudes, en fonction de leurs expériences, un dialogue qui est d’ailleurs nécessaire avec tous les hommes et non pas seulement avec les réfugiés. Il faut pouvoir discuter des normes sociales, de la masculinité ; une forme de prévention de la violence est nécessaire dans toutes les parties de la société pour mettre un terme à la violence commise à l’encontre des femmes. Et tous les hommes doivent s’engager à mettre un terme à cette violence.

Le débat sur l’égalité des genres commence à devenir d’actualité. Mais les agressions commises par les hommes n’ont rien de nouveau pour les femmes. Si la Suède a adopté une loi ferme à ce sujet et que la situation s’améliore chaque année, une culture parallèle s’installe selon laquelle les femmes doivent être humiliées par des hommes qui doivent se comporter comme des machos. Nous devons donc lutter pour prévenir partout ces violences, par exemple auprès des organisateurs d’événements importants – matches de football ou autres – qui devraient être formés pour savoir gérer ce type de violences. Le harcèlement sexuel, les crimes sexuels constituent un problème pour la démocratie et devraient toujours être pris au sérieux.

J’espère que ce débat encouragera les Etats membres à mettre en œuvre la Convention d’Istanbul ; cela est indispensable.

Mme KRONLID (Suède)* – Personne n’est resté insensible aux événements de la Saint-Sylvestre, à Cologne. La Suède a connu des événements similaires lors d’un festival, cet été, à Stockholm. Dans les deux cas, ces événements ont été dans un premier temps passés sous silence, ce qui est inacceptable.

Le harcèlement sexuel n’est pas nouveau en Europe, il a toujours existé. Et le Conseil de l'Europe, partisan de l’égalité entre les hommes et les femmes, peut se targuer d’avoir adopté des textes qui le dénoncent et l’interdisent. Mais ce qui est nouveau, c’est à la fois l’ampleur du phénomène – à Cologne, où près de 500 femmes ont été agressées, la police a eu du mal à reprendre le contrôle de la situation – et la réticence à rapporter les faits.

Il est très important que les auteurs de ces crimes et délits soient poursuivis, quelle que soit leur origine. Pour éviter que le problème s’aggrave et ne devienne ingérable, nous devons pouvoir appeler l’attention sur le fait qu’il existe des différences sur la manière dont les femmes sont perçues.

Les femmes sont perçues différemment dans les pays du Conseil de l'Europe que dans certains pays d’origine de nombreux migrants qui cherchent refuge en Europe. Certes, il ne convient pas de faire d’amalgame entre tous les migrants, mais si une personne originaire d’une société patriarcale considère que toute femme qui n’est pas couverte de la tête au pied est un objet sexuel, nous devons être préparés à défendre nos valeurs, sans stigmatiser ni tenir de discours xénophobes.

En accueillant de nouveaux membres dans nos sociétés, nous voulons leur faire partager nos valeurs. Pour autant, les anciennes valeurs ou croyances ne disparaissent pas chez les migrants au simple fait qu’ils s’installent, par exemple en Suède. C’est pourquoi nous devons nous mobiliser pour préserver nos droits fondamentaux, tels que l’égalité garantie par la Convention des droits de l’homme.

Notre Assemblée doit, à tout moment, défendre le droit des femmes à la sécurité, à la dignité, à l’intégrité. Ce point ne peut faire l’objet d’aucun compromis.

Mme LOUHELAINEN (Finlande)* – Nous abordons le thème essentiel de la violence faite aux femmes.

La progression très rapide du nombre de demandeurs d’asile en Finlande a engendré un sentiment d’insécurité, lié essentiellement aux différences culturelles. Les droits des femmes en Europe et en Finlande sont très différents de ceux qui prévalent dans les pays d’origine. Aussi, parmi les demandeurs d’asile, certaines personnes ne souscrivent pas aux mêmes valeurs. En Finlande, la protection individuelle ainsi que l’intégrité physique et psychologique des personnes sont des droits fondamentaux et nous n’avons pas pour habitude de les remettre en cause, nous les prenons pour acquis une fois pour toutes. Nous souhaitons donc protéger ces valeurs à l’avenir afin de travailler, nous distraire, faire des courses sans aucune crainte.

Le sentiment d’insécurité a surgi chez les Finlandais au fur et à mesure de la montée du nombre des agressions sexuelles, voire des viols, actes souvent commis par des demandeurs d’asile. Nous avons entendu parler de cas semblables dans l’ensemble de l’Europe. Ce ne saurait et ne doit pas être accepté.

Dès lors, les enfants craignent de se rendre à l’école, les parents interdisent aux jeunes de sortir le soir, les personnes âgées redoutent de faire leurs courses pendant la journée. Une telle situation a suscité un débat en Finlande sur la nécessité d’envisager des patrouilles qui garantiraient la sécurité des populations locales dans les rues.

Les médias jouent un rôle essentiel quant à la façon de couvrir ces questions et de ce qu’il en est dit dans le débat public. Tous, nous connaissons les conséquences et les « effets secondaires » des migrations et des demandes d’asile. Les points de vue critiques sont mal perçus et le racisme est invoqué immédiatement. Toutefois, nous devrions pouvoir traiter ces problèmes de façon globale en appelant les choses par leur nom, sans fanatisme, bien sûr. Malheureusement, le fait de parler de façon critique revient souvent à qualifier le propos de discours de haine.

Le rapporteur évoque au paragraphe 5 la responsabilité pour les médias d’établir des rapports impartiaux et honnêtes sur la question. Le Conseil de l'Europe se doit, en effet, de protéger, mais également de parler haut et fort pour soutenir la majorité et souligner l’importance du droit des femmes et des enfants en Europe. Le Conseil de l'Europe doit également souligner la responsabilité qui incombe aux médias dans cette situation si difficile.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – Je remercie le rapporteur de son excellent travail.

Ce rapport arrive à point nommé. Il était nécessaire. En tant que rapporteure générale de notre Assemblée sur la violence à l’égard des femmes, je ne puis que condamner les agressions qui se sont produites le 31 décembre en Allemagne, en Autriche et en Suisse.

L’Assemblée condamne toutes les formes de violence contre les femmes. Dès l’origine, nous avons soutenu la rédaction de ce qui devait devenir la convention du Conseil de l'Europe, dite « Convention d’Istanbul », pour lutter contre la violence à l’encontre des femmes et la violence domestique. Nous avons joué un rôle central grâce à notre réseau de parlementaires.

La Convention d’Istanbul est le traité international le plus avancé sur ce sujet. Il reconnaît la violence faite aux femmes comme une violation des droits de l’homme et place la victime au centre même de toutes les politiques nationales.

Une fois de retour chez elles, j’encourage mes collègues à sensibiliser leurs parlements respectifs à cette question de la violence à l’encontre des femmes, qui ne doit pas être tolérée ni rester impunie. Toutes les femmes devraient être protégées et les auteurs traduits en justice. La violence faite aux femmes ne doit faire l’objet d’aucune tolérance.

M. KIRAL (Ukraine)* – J’aimerais remercier Sir Roger Gale et le Groupe des conservateurs européens qui sont à l’origine du débat d’aujourd’hui, qui est, à mes yeux, très important.

Le rapport précise que la Convention d’Istanbul constitue une approche globale fondée sur quatre piliers : la prévention, la protection, le soutien aux victimes, la poursuite des auteurs et la politique intégrée.

Aucun de ces éléments n’a réellement été utilisé jusqu’à présent. On parle souvent de théorie conspirationniste. Les articles des médias ont un lien direct avec l’information à laquelle nous pouvons avoir accès. Quant aux responsables des forces de l’ordre, ils n’ont pas bien réagi, sans doute parce qu’ils étaient mal formés ou qu’ils craignaient d’être accusés de racisme. Si bien que cela a eu des conséquences négatives.

Le rapport observe que les forces de police n’ont pas été à la hauteur, mais cela n’est pas clairement formulé dans la résolution. Or, il convient que les procédures soient améliorées, que des instructions permettent de réagir dans l’urgence et de mettre en place des mesures de prévention à la veille d’événements rassemblant des foules nombreuses. Les caméras de surveillance doivent être coordonnées. Le cas échéant, des patrouilles de police être présentes sur les lieux. Il s’agit là de mesures relativement simples tout en mettant à profit les progrès technologiques.

Je souscris entièrement aux propos de mon collègue Axel Fischer car, un mois après les événements, nous n’avons pas encore d’idées très claires sur la nature et les auteurs des événements et l’on peut s’interroger sur le fonctionnement des systèmes de sécurité. Demandons aux responsables de se mettre au travail sans tarder et de protéger les fondements même de l’Europe, c’est-à-dire l’égalité des droits entre femmes et hommes.

Les questions relatives aux forces de police et au judiciaire exigent que les responsables soient à la hauteur, agissent rapidement, et rassemblent les preuves nécessaires afin de traduire les auteurs en justice. Faute de quoi des spéculations continueront à être propagées par les extrémistes de droite, à savoir que des motifs religieux sous-tendent les actes commis. Nous avons fait pression sur le gouvernement allemand qui s’efforce de trouver des solutions à la crise des migrations. Son rôle sera critique dans la façon dont il fera face à cette question. Il en va de même de l’importance des sanctions contre la Fédération contre la Russie, essentielles pour l’Ukraine.

Nous avons beaucoup évoqué de la Convention d’Istanbul. J’appelle votre attention sur le faible nombre de ratifications, par opposition à la Convention Médicrime, par exemple. La création d’une équipe spéciale pour faire progresser le nombre de ratifications me paraît indispensable.

M. HOWELL (Royaume-Uni)* – J’ai travaillé pendant plusieurs années pour la chaîne de télévision BBC World. Mon intervention s’attachera donc principalement à la question des médias plutôt qu’à celle des femmes ou des migrants. Comme le rappelle le rapport, ces derniers ont une responsabilité importante pour couvrir de manière objective les faits. La résolution sur l’éthique et l’autoréglementation de la presse adoptée par le Comité des Ministres prend aujourd’hui une nouvelle actualité. Les médias doivent s’affranchir du politiquement correct, mais ils ont aussi l’obligation de relater les faits en temps et en heure.

S’agissant des événements récemment survenus dans des villes européennes, une enquête paraît aujourd’hui indispensable pour comprendre pourquoi les médias de certains pays, notamment l’Allemagne, la Suède et le Royaume-Uni, en ont reporté la relation. De nombreux rapports ont été présentés au sein de cette Assemblée sur la question des médias mais ils réduisent la gravité des évènements qui se sont produits la nuit de la Saint-Sylvestre. Il paraît plus que nécessaire aujourd’hui encore de faire la lumière sur le fonctionnement des médias dans certains pays. L’Assemblée devrait demander une enquête. Ne pas le faire irait à l’encontre de tout ce que nous avons dit à propos des médias.

LA PRÉSIDENTE – La liste des orateurs est épuisée. J’appelle la réplique de la commission.

Monsieur le rapporteur, il vous reste 4 minutes pour répondre aux orateurs.

M. GUNNARSSON (Suède), rapporteur* – M. Fischer a regretté qu’il n’y ait pas davantage d’orateurs hommes inscrits dans ce débat. Je vous invite tous, mes chers collègues, à rejoindre la campagne HeForShe lancée par Emma Watson pour soutenir la lutte contre les violences faites aux femmes.

Mme Quintanilla a eu raison de souligner que nous parlons de la violence contre les femmes depuis bientôt 38 ans et que nous prenons conscience seulement maintenant que les hommes doivent aussi s’impliquer. Je suis personnellement très impressionné par le soutien qu’a recueilli le rapport au sein de cet hémicycle. Je voudrais toutefois exprimer quelques réserves sur certains propos qui ont été tenus.

Ainsi, Mme Hoffmann a déclaré qu’il convenait de réfléchir aux conséquences de l’afflux d’immigrés en Europe, en particulier depuis les attaques contre des femmes dans des villes européennes. Je voudrais répéter que les inégalités entre les hommes et les femmes, tout comme les violences faites aux femmes, existent malheureusement depuis longtemps. Sur notre continent, une femme sur trois a souffert d’une agression sexuelle. Ce phénomène n’est pas nouveau. Il n’a pas été introduit en Europe avec la venue d’étrangers.

Mme Le Dain a souligné avec raison que tout un chacun a droit à un procès équitable et à être jugé sur les faits. On ne peut condamner tout un groupe parce que l’un de ses membres a commis un acte répréhensible. De nombreux orateurs ont mentionné les passages du rapport qui portent sur les médias. Il est vrai qu’ils jouent un rôle essentiel dans le bon fonctionnement d’une démocratie. En tant que législateurs, nous devons être extrêmement vigilants et ne pas empiéter sur leur liberté. Nous devons nouer un dialogue avec eux et les inciter à débattre entre eux de l’éthique qui doit s’imposer à leur profession. Je défends personnellement le principe de l’autoréglementation des médias, mais l’on peut en débattre.

Mme Katrivanou a déclaré que les événements de Cologne ne doivent pas servir de prétexte pour limiter les droits de l’homme de tel ou tel groupe. La pente est dangereuse, selon elle, et je souscris entièrement à ses propos. La sécurité des femmes dans l’espace public mériterait d’ailleurs de faire l’objet d’un nouveau rapport ou de rapports réguliers.

Mme CENTEMERO (Italie), présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Je tiens à remercier le rapporteur ainsi que les différents membres de la commission pour leur excellent travail. La violence à l’égard des femmes est l’une des violations des droits de l’homme les plus répandues. Notre Assemblée condamne toute forme de violence à l’encontre des femmes. Les attaques récentes de Cologne ont choqué l’opinion publique et rappelé l’urgence de lutter contre les violences faites aux femmes. Personne n’aurait pu croire que de tels événements puissent survenir au cœur même de notre continent. Il ne faut en aucun cas les sous-estimer. Nous devons par ailleurs être pleinement informés par les médias.

L’Assemblée a décidé de tenir ce débat selon la procédure d’urgence et je la remercie d’avoir confié la préparation du rapport à la commission sur l’égalité et la non-discrimination.

Les attaques de la nuit de la Saint-Sylvestre sont un cas grave de violence collective.

Mes chers collègues, je vous demande d’apporter tout votre soutien au projet de résolution, car nous avons la possibilité de transformer ce problème en opportunité pour l’avenir.

LA PRÉSIDENTE – La discussion générale est close.

La commission sur l’égalité et la non-discrimination a présenté un projet de résolution sur lequel sept amendements ont été déposés, dont deux qui ne concernent que la version française du projet de résolution.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 2, 4, 5, 6, 7 et 1, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente ?

Mme CENTEMERO (Italie), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

Nous en arrivons à l’amendement 3.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention sur cet amendement est limité à 30 secondes.

Avant de donner la parole à Mme Le Dain pour le soutenir, je rappelle que cet amendement a exclusivement trait à la version française du projet de résolution. Il est donc sans objet dans la version anglaise du texte.

Mme LE DAIN (France) – Cet amendement apporte une légère modification à la traduction française afin de la clarifier et de la rapprocher du texte anglais.

Mme CENTEMERO (Italie), président de la commission* – La commission a adopté cet amendement.

L’amendement 3 est adopté.

LA PRÉSIDENTE- Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le document 13961, tel qu'il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (115 voix pour, 1 voix contre et 1 abstention).

LA PRÉSIDENTE – Félicitations au rapporteur !

M. Agramunt, Président de l’Assemblée, reprend place au fauteuil présidentiel.

2. Discours de Mme Stefanelli et de M. Renzi, Capitaines Régents de Saint-Marin

LE PRÉSIDENT* - L’ordre du jour appelle maintenant le discours de leurs Excellences Lorella Stefanelli et Nicola Renzi, Capitaines Régents de Saint-Marin.

Excellences, c’est un très grand plaisir et un honneur de vous accueillir dans notre hémicycle. Permettez-moi d’ajouter à l’intention de Mme Stefanelli que c’est toujours une joie toute particulière et un motif de fierté que d’accueillir un membre de notre Assemblée en tant que chef d’Etat.

La dernière fois que les Capitaines Régents de Saint-Marin se sont adressés à notre Assemblée, c’était il y a quatorze ans. Nous sommes donc très impatients de vous écouter et de connaître votre point de vue sur les défis que doivent relever les petits Etats d’Europe. Vous pourrez certainement nous faire part également de votre grande expérience en matière de bonnes relations de voisinage. Nous souhaitons aussi tout particulièrement connaître votre sentiment sur la meilleure façon de défendre les particularismes culturels et l’identité de votre pays.

Excellences, vous avez la parole.

Mme STEFANELLI, Capitaine Régent de Saint-Marin – Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames et Messieurs les parlementaires, permettez-nous avant toute chose de féliciter le nouveau Président de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, élu il y a de cela quelques jours, et de lui souhaiter de réaliser un excellent travail.

La Régence est particulièrement heureuse et honorée de venir, aujourd'hui, en visite officielle au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, organisme qui incarne l’institution parlementaire européenne la plus ancienne. Nous sommes heureux de pouvoir nous adresser à cette assemblée. En effet, c’est quasiment toute l’Europe qui est réunie ici, avec ses représentants, ses différentes expressions culturelles et linguistiques. Cela témoigne de la vivacité de notre continent.

Nous souhaitons rendre hommage à cette institution européenne essentielle, à laquelle nous adhérons depuis plus de vingt-cinq ans. Nous souhaitons réaffirmer le partage total et la participation active de la République de Saint-Marin aux différentes décisions prises en faveur de la démocratisation des Etats européens. La tradition démocratique millénaire, fleuron de notre République, qui plonge ses racines dans l’histoire et la civilisation romaine, ainsi que dans l’histoire des autonomies de l’époque des communes, est aujourd'hui encore incarnée par les institutions que nous représentons.

Cette tradition nous permet de faire partie de cette grande famille européenne fondée sur les principes de la légalité, de la primauté du droit, de la défense des droits de l'homme et des libertés fondamentales, représentant ainsi une véritable contribution à ce consensus.

La Régence souhaite également rappeler la grande valeur de la Cour européenne des droits de l'homme, organe qui œuvre le plus pour la promotion des droits et des libertés fondamentales. La Cour ainsi que la Convention européenne des droits de l'homme constituent un système de protection des droits et des libertés fondamentales qui est unique de par son efficacité et de par sa force morale.

Il est essentiel de souligner que l’ordre juridique de Saint-Marin a transposé cette convention tout à fait unique, faisant d’elle une source supérieure. Ainsi, toutes les lois, tous les actes à caractère normatif ayant force de loi ainsi que les normes coutumières ayant force de loi doivent respecter les principes contenus dans la Convention européenne des droits de l'homme : il en va de leur caractère constitutionnel.

Permettez-nous également de souligner l’énorme valeur des différents organes qui constituent le Conseil de l’Europe, dont les représentants se rendent régulièrement dans notre République. Grâce à leurs recommandations et à leurs suggestions, ils permettent d’améliorer et d’adapter notre réglementation.

Nous souhaitons en particulier souligner l’importance du Groupe d’Etats contre la corruption, le Greco. Son président, Marin Mrčela, est intervenu, le 1er octobre dernier, lors de notre nomination aux postes de chefs de l’Etat, soulignant les énormes progrès effectués par notre République dans sa lutte toujours plus efficace contre la corruption. Cette haute reconnaissance constitue une stimulation supplémentaire, une incitation à poursuivre notre engagement dans ce domaine et à rester vigilants.

Nous sommes particulièrement fiers d’assister aujourd’hui à cette première partie de session de l’année 2016, car cela coïncide avec le dépôt par notre Etat de l’instrument de ratification de la Convention d’Istanbul. Ainsi, Saint-Marin démontre qu’elle a décidé de considérer la violence faite aux femmes comme une violation inhumaine et odieuse de l’intégrité personnelle, ainsi qu’une véritable blessure pour l’humanité tout entière. Nous entendons lutter contre cette violence avec toutes les armes du droit dont nous disposons.

Le récent et triste épisode de Cologne prouve qu’il faut rester particulièrement vigilant à l’égard de cette plaie sociale aberrante. Il faut dénoncer ces faits sans réserve, même lorsqu’ils sont perpétrés dans des Etats qui se veulent les défenseurs de l’intégration de cultures différentes.

Mesdames et messieurs les parlementaires, de nos jours, les droits de l'homme sont mis à rude épreuve. Les sociétés démocratiques doivent faire face à de véritables défis. Il est important de réaffirmer le rejet de la guerre en tant que moyen de résolution des conflits entre les Etats, en faveur de l’arme que représente le dialogue.

Il faut pouvoir répondre au phénomène des migrations de masse ; il faut également savoir répondre, par le biais de politiques adaptées, au défi de la méfiance envers les institutions démocratiques découlant de l’incapacité partielle des gouvernements nationaux et supranationaux à répondre immédiatement et efficacement à la pauvreté, qu’elle soit récente ou plus ancienne, au chômage, en particulier au fléau du chômage des jeunes. La crise économique peut en effet mener à une crise des démocraties.

La situation actuelle qui, directement ou indirectement, touche le vieux continent tout entier, est caractérisée par des troubles et par l’émergence de critiques dont nous devons tenir compte. Elles doivent en effet nous inciter à une réflexion profonde au niveau politique, sous peine de saper les valeurs de nos sociétés, que nous pensions pourtant acquises.

Face aux importants défis auxquels est confrontée l’Europe, dans cette institution qui représente le foyer de la démocratie paneuropéenne, la Régence fait siennes les racines identitaires communes et a le sentiment d’appartenir fortement à cette institution. Ces racines représentent une source de débat, de réflexion et de partage grâce au dialogue démocratique permanent de l’Assemblée.

Nous assistons à une escalade des attaques contre les libertés. Il est donc nécessaire de lutter comme jamais contre l’extrémisme, contre la radicalisation qui mène au terrorisme : cela doit être la priorité de cette Organisation. En effet, ces phénomènes nient les valeurs fondamentales sur lesquelles se fondent les sociétés européennes, à savoir les droits de l'homme, la démocratie et la primauté du droit.

Dans chaque démocratie, certains se cachent derrière la religion pour mener des luttes insensées, pour atteindre des objectifs purement politiques. Les attentats terroristes qui ont sapé récemment les règles de cohabitation entre les peuples, tout en alimentant une haine sans égale, ne sont qu’une insulte à toute forme de spiritualité et d’humanité. Ils ne sont justifiés dans aucune des différentes religions, idéologies ou philosophies de vie.

Nous tenons à rappeler les attentats qui ont frappé l’année dernière les villes de Paris et de Tunis, et récemment encore au Pakistan. Nous présentons à nouveau nos condoléances aux familles des nombreuses victimes innocentes ainsi qu’aux Etats si cruellement touchés.

Nous nous trouvons face à un scénario effrayant et controversé, qui impose aujourd'hui au Conseil de l’Europe de relancer sans hésitation et de façon ferme l’adoption de mesures efficaces de nature à développer une conscience collective, à réactiver les valeurs du droit et du respect de la personne humaine ainsi que de nos valeurs collectives.

Ici, à Strasbourg, nous voulons adresser un véritable avertissement : nous sommes face à une urgence sans précédent qui touche tous les Etats, petits ou grands, et qui nécessite une intervention unie et concertée ainsi qu’une action coordonnée.

Nous devons utiliser les armes qui sont à notre disposition : la force du droit, l’éducation et la culture des peuples, seules et légitimes armes des pays qui se reconnaissent dans les valeurs du Conseil de l’Europe, afin de lutter contre l’extrémisme et la radicalisation.

Nous sommes en outre convaincus que ce n’est que par la promotion d’une véritable culture de paix et de respect de l’autre que nous pourrons faire face efficacement à cette funeste culture de mort et de violence construite sur la haine et l’intolérance. Ce respect de l’autre doit trouver ses racines dans la connaissance totale de soi-même et des valeurs, ainsi que de la tradition et de la culture.

En mai 2015, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a adopté à Bruxelles, à l’unanimité, un Plan d’action sur la lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation conduisant au terrorisme. Ont ainsi été couronnés de succès les efforts de l’Assemblée parlementaire et du Secrétaire Général. Suite à la décision adoptée après les attentats de janvier 2015 à Paris, des propositions concrètes ont été présentées, en particulier l’organisation de rencontres annuelles du Conseil de l’Europe sur la dimension religieuse du dialogue interculturel.

Depuis 2008, ces rencontres représentent un forum privilégié d’échanges et de dialogue sur les questions liées à la foi en Europe. Sarajevo, ville symbole du dialogue interreligieux et interethnique, a accueilli la huitième rencontre. Il y a entre autres été question de la recommandation 2080 adoptée le 30 septembre 2015 par votre Assemblée parlementaire dont le thème était : « Liberté de religion et vivre ensemble dans une société démocratique ». C’est un des exemples qui prouve combien cette assemblée s’engage de façon concrète en faveur du dialogue et d’une paix durable.

Rappelons également l’intervention du Saint-Père dans cet hémicycle, le 25 novembre 2014. Le pape François a évoqué une Europe qui dialogue, qui fait en sorte que les différentes réflexions soient au service du peuple, harmonieusement uni.

Votre Assemblée parlementaire a condamné fermement le terrorisme à différentes reprises et souligné la nécessité de s’y opposer tout en respectant les droits de l’homme et les valeurs démocratiques. Il ne fait aucun doute que le Conseil de l’Europe doit poursuivre dans cette voie, car le problème du terrorisme est bien loin d’être réglé, tout comme il ne fait aucun doute que l’ensemble des forces démocratiques ont le devoir de s’opposer à la radicalisation et à la haine qui alimentent le terrorisme et l’extrémisme.

Nous sommes convaincus de la nécessité de renforcer les engagements en ce sens, entre autres par le biais d’initiatives de sensibilisation contre le racisme, la haine, l’intolérance. La Régence n’a pas hésité à promouvoir au sein de la République, au début de l’année dernière, la campagne contre les discours de haine, campagne née d’une alliance des parlementaires de tous les Etats représentés au sein du Conseil de l’Europe, car il est nécessaire de construire des sociétés inclusives qui fassent la part belle au dialogue interculturel et interreligieux.

M. RENZI, Capitaine Régent de Saint-Marin* – Le Saint-Père a fait allusion aux peuples qui se présentent aux portes de notre continent, ce qui doit nous inciter à réfléchir à la complexité des phénomènes migratoires ainsi qu’aux nécessaires considérations d’ordre humanitaire. Cette crise des réfugiés prouve combien notre continent est lié aux réalités des pays et continents voisins, en particulier d’Afrique du Nord et d’Orient. L’Europe doit aujourd’hui gérer des phénomènes d’immigration incontrôlés, un exode massif résultant de bouleversements dans des zones déjà marquées par des déséquilibres politiques et sociaux importants et qui doivent à présent subir les luttes armées menées par un « Etat » autoproclamé, véritable régime de terreur.

La République de Saint-Marin ne souhaite pas rester passive face à cette tragédie humanitaire qui ne cesse de s’aggraver. Par la force de son droit et par son adhésion aux normes du droit international et humanitaire, elle souhaite jouer un rôle de dénonciation et de médiation, comme le prouvent les déclarations du Parlement national rappelant la nécessité de fournir une réponse globale et coordonnée afin de soutenir les pays accueillant en première ligne ceux qui fuient le désespoir et la guerre.

C’est avec orgueil et fierté que nous rappelons l’hospitalité dont nous avons fait preuve au cours de la Seconde Guerre mondiale, lorsque notre Etat, malgré les difficultés et ses dimensions modestes, a su offrir un refuge à plus de 100 000 personnes qui fuyaient les territoires voisins en guerre et a permis de sauver un grand nombre de juifs qui étaient venus s’y réfugier.

En outre, la République de Saint-Marin a rapidement accepté de contribuer au fonds en faveur des réfugiés créé au sein de la Banque du Conseil de l’Europe, afin de financer de nombreux projets d’aide aux victimes. Nous avons également lancé des initiatives de solidarité en faveur des mineurs syriens.

La Régence, dans cette enceinte et en cette occasion solennelle, est fière de rappeler le récent parcours qui a permis à la République de Saint-Marin d’être partie à la Convention d’Istanbul, en vue d’adopter les mesures nécessaires pour lutter contre ce triste phénomène que sont les violences faites aux femmes. Nous nous plaisons à rappeler que la campagne européenne contre ce fléau social, y compris la violence domestique, lancée à Madrid le 27 novembre 2006, sous la présidence de Saint-Marin du Comité des Ministres, a permis l’application concrète d’une des parties fondamentales du plan d’action adopté par le troisième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe à Varsovie, en mai 2005. Le lancement de la campagne européenne a permis un engagement important de la part des Etats membres, par le biais d’initiatives de sensibilisation au niveau national.

Saint-Marin a lancé sa campagne le 29 novembre 2006 afin de donner une nouvelle impulsion à la promotion et à la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Convention sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, ouverte à la signature à Istanbul le 11 mai 2011 et entrée en vigueur le 1er août 2014, a permis de combler les vides juridiques et d’harmoniser les mesures existantes en Europe dans ce domaine, afin d’éliminer les reliquats de discriminations de genre qui, aujourd’hui encore, ne permettent pas de développer une culture attribuant à chaque être humain le plein exercice de ses droits fondamentaux.

La valeur de la Convention d’Istanbul est évidente pour Saint-Marin. C’est pourquoi nous sommes particulièrement heureux de confirmer officiellement ici la ratification récente de la Convention par la République, au cours de la session parlementaire de ce mois. Nous nous sommes impliqués dans cette bataille de civilisation qui ne doit pas avoir de frontières.

De même, nous nous sommes impliqués en faveur des mesures pour la défense des droits des enfants, afin que Saint-Marin se dote des instruments juridiques les plus efficaces pour renforcer les droits et défendre les intérêts de cette catégorie vulnérable. Notre pays a été l’un des premiers à signer et à permettre l’entrée en vigueur de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.

Il s’agit d’un document international ayant pour objectif de lutter contre l’un des phénomènes les plus aberrants de notre société, contre lequel nous devons continuer à nous engager à tous les niveaux, afin de mettre un terme à une violation inhumaine des droits fondamentaux.

Nous sommes convaincus que les gouvernements, les institutions sociales, les familles et, d’une façon générale, les pays tout entier doivent s’engager en faveur d’une mobilisation globale. C’est la raison pour laquelle nous pensons qu’il nous faut, aujourd’hui plus que jamais, défendre les enfants, protéger leur identité et leur intégrité qui peuvent être bafouées par les formes de migrations que nous connaissons, en violation totale de leurs droits. Pour ne citer qu’un exemple récent, je pense à la mort de 20 enfants en mer Egée.

Au cours de notre intervention, nous souhaitons également mentionner l’importance et la grande valeur de la culture, laquelle, comme l’avait déclaré Jean-Paul II, rend l’homme plus humain, cette et est la clé essentielle pour favoriser le dialogue interculturel et renforcer les rapports au sein des peuples et entre les peuples.

Dans ce cadre, l’éducation et les établissements scolaires de tous niveaux méritent pleinement notre attention. C’est dans ces établissements que sont formées les nouvelles générations à la culture et au respect de la démocratie, à la participation à la vie des institutions et à la vie politique et sociale du pays. L’école peut et doit être le lieu privilégié de formation à la connaissance et au respect des traditions, des institutions démocratiques, de la discussion avec l’autre, de la dignité de l’homme. Bref, elle doit être le moteur d’une milice civile qui sache former au vrai, au bien et au beau. Nous tenons donc à rappeler ici l’importance de reconnaître à tous les enfants le droit à l’éducation comme un droit inhérent à la personne humaine.

Monsieur le Président, permettez-nous encore une fois de vous féliciter pour votre élection récente à la tête de l’Assemblée parlementaire. Nous vous souhaitons grand succès dans vos fonctions.

La Régence est particulièrement heureuse d’avoir pu venir ici aujourd’hui. Nous en profitons pour souhaiter de grands succès à cette prestigieuse institution parlementaire. Des succès qui viendront couronner les fonctions stratégiques que cette Assemblée assume au nom des 800 millions de citoyens des 47 Etats membres qui sont, ici, dignement et parfaitement représentés, car votre Assemblée fait montre d’un véritable engagement politique.

Pour conclure notre intervention, nous voudrions nous unir à la peine des familles des victimes de l’Holocauste ainsi qu’à celle des familles des victimes d’un autre massacre, plus récent, celui de Srebrenica, qui est l’une des pages les plus sombres de l’histoire européenne des vingt dernières années. La mémoire de ces tragédies doit nous aider à ne pas oublier et nous inciter à nous engager pour défendre et œuvrer en faveur de la paix, des peuples et des nations.

Enfin, permettez-moi de saluer et de remercier Mme Anne Brasseur, présidente de l’Assemblée parlementaire il y a encore quelques jours, et dire combien, nous aussi, nous souhaitons que 2016 soit véritablement l’année de l’espoir et la solidarité, puisque nous avons vécu une année 2015 marquée par l’indifférence et la crise.

LE PRÉSIDENT* - Nous vous remercions, Excellences, de vos très intéressantes allocutions.

Plusieurs collègues ont déjà exprimé le souhait de poser une question. Je leur rappelle que leurs questions doivent avoir un caractère vraiment interrogatif et ne pas dépasser 30 secondes.

M. ALLAVENA (Monaco), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen – Excellences, en tant que représentant du seul pays plus petit que le vôtre au sein de cette Assemblée, je voulais vous remercier de cette double allocution pleine de sagesse et de hauteur.

Je souhaiterais obtenir un complément sur votre vision de notre rôle à nous, petits pays, dans des assemblées de ce type. Pensez-vous que nous ne sommes là que pour regarder, apprendre et ramener chez nous les bonnes pratiques des autres, ou imaginez-vous que nous ayons à jouer un autre rôle ?

J’étendrai volontiers ma question à un autre sujet, plus grave, c’est-à-dire les négociations que vous, nos amis d’Andorre et nous-mêmes sommes en train d’ouvrir avec l’Union européenne. Pensez-vous que nous allons être broyés par le poids de nos grands voisins ou bien que nous aurons vraiment un poids dans ces négociations ?

Mme LA CAPITAINE RÉGENT* – Je vous remercie de votre question qui nous permet de rappeler la valeur de petits Etats au sein d’assemblées telles que celle-ci et d’institutions telles que le Conseil de l’Europe. Dans notre famille démocratique, peu importe le nombre d’habitants ou la taille du territoire. Ce qui compte, c’est l’investissement de chaque Etat en faveur des principes et de leur défense, et en faveur de l’application des droits de l’homme.

Pour ma part, je suis convaincue que les petits Etats peuvent apporter d’éminentes contributions. Après tout, ils sont peut-être moins guidés par des intérêts économiques ! À mon avis, ils peuvent être de parfaits médiateurs et faciliter les choses plus que certains grands pays. Nous appartenons à la grande famille européenne, ici, au Conseil de l’Europe. Je crois vraiment que cette famille est renforcée par notre présence.

M. LE CAPITAINE RÉGENT* – Je vous remercie aussi de votre question d’intérêt prioritaire et tout à fait stratégique pour nos petits Etats.

Depuis qu’ils ont décidé de se rapprocher encore davantage de l’Europe, les habitants de Saint-Marin ont franchi plusieurs étapes. Il y a eu d’abord une prise en compte majeure de ce qui nous unissait sur le plan culturel. Cette sensibilisation a donné lieu à un mûrissement progressif et chacun s’est rendu compte que ce rapprochement serait dans l’intérêt des deux parties.

Actuellement, loin d’être craintifs, nous sommes convaincus de pouvoir jouer pleinement notre rôle et d’apporter une contribution utile et reconnue comme fondamentale pour l’Europe. Quant à nous, nous sommes tout à fait disposés à remettre en cause certains de nos particularismes pour trouver des solutions mutuellement bénéfiques, quelles que soient les caractéristiques de nos différents pays.

Mme BONET (Andorre), porte-parole du Groupe socialiste* – Bienvenue à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ! Ma question sera très proche, mais orientée différemment.

Comme cela a été dit, Andorre, Saint-Marin et Monaco sont en train de négocier un accord d’association avec l’Union européenne. Pensez-vous que cet accord permettra aux petits pays qui n’ont pas maintenu de rapports avec l’Union européenne d’agir plus activement dans le domaine de l’immigration irrégulière comme dans d’autres ? Pensez-vous que nous pourrons montrer quels sont nos particularismes en tant qu’Etat et que nous pourrons, éventuellement, aider à trouver des solutions ?

M. LE CAPITAINE RÉGENT* – Votre question rejoint, en effet, la précédente. Pour nous, petits pays, la période actuelle est fondamentale. Saint-Marin a traversé, ces dernières années, deux crises qui sont d’ailleurs liées.

Nous avons été affectés par la crise internationale, qui a eu des répercussions sur l’économie de tous les pays, mais en même temps nous avons traversé une crise plus structurelle, car notre économie a dû évoluer : ses bases n’étaient plus adaptées. Il nous a fallu privilégier d’autres orientations économiques ; nous l’avons fait avec courage et détermination.

Comme je le disais, nous prônons plus d’intégration. Avec les choix courageux que nous avons faits, nous pensons pouvoir être un exemple pour les pays se trouvant dans la même situation que nous, et les négociations en cours pourront s’avérer propices. Nos interlocuteurs sont pleinement conscients du fait que les petits Etats peuvent apporter des contributions utiles. Il ne s’agit pas, évidemment, de renoncer à nos caractéristiques propres. Quoi qu’il en soit, nous sommes déterminés et avons bon espoir que les négociations puissent aboutir et donner des résultats positifs pour les deux parties.

Mme LA CAPITAINE RÉGENT* – Je répondrai à la seconde partie de la question, qui concerne le rôle des petits pays dans la tragédie humanitaire que nous vivons. Que peuvent faire les petits pays ? Beaucoup de choses – peut-être pas en termes d’accueil des réfugiés, vu l’exiguïté de nos territoires, mais nous pouvons sensibiliser les populations aux enjeux, pour faire comprendre aux citoyens qu’il faut développer toutes les formes d’accueil, être hospitalier, tendre la main. Nous pouvons également apporter une aide économique. Certes, nous sommes tout petits, territorialement parlant – 60 kilomètres carrés –, et nous n’avons pas de centres d’accueil, mais l’organisation humanitaire de Saint-Marin agit sur l’ensemble de notre territoire et aide le plus grand nombre possible de réfugiés.

Nous-mêmes, nous avons lancé des appels à nos concitoyens. Nous voulons que, pendant notre mandat, Saint-Marin fasse preuve de générosité et de solidarité. Nous espérons que ce message aura été bien compris. L’Etat mettra en œuvre un certain nombre de mesures de soutien aux familles en mesure d’accueillir des réfugiés – surtout des enfants, et en particulier des enfants syriens qui fuient la guerre.

Un dernier mot pour expliquer la façon dont nous envisageons le rôle des petits pays. Il y a deux ans, ce sont eux – notamment Saint-Marin – qui ont pris l’initiative, et de nombreuses convergences ont été identifiées. Nous avons fait des recommandations, y compris au sein de votre Assemblée, en matière de politique de migration. En effet, c’est là un problème qu’aucun Etat ou presque ne pourra résoudre seul – on voit bien, par exemple, quelle est la situation de l’Italie, de la Grèce ou encore de Chypre. Un petit Etat peut jouer un très grand rôle dans la prise de conscience de l’ampleur de la tragédie humanitaire que nous vivons.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Je vous remercie beaucoup pour les compliments que vous m’avez adressés.

(Poursuivant en français) Saint-Marin est une antique terre d’accueil ; vous êtes, dites-vous, la terre de la libertà. Alors qu’ici, en Europe, les libertés fondamentales et les droits de l’homme sont mis en danger, que nous recommandez-vous de faire pour lutter ensemble contre cette tendance ?

Je viens d’être nommée ambassadrice de notre campagne contre le discours de haine. À vous écouter, je suppose que vous pouvez tous les deux la soutenir.

Mme LA CAPITAINE RÉGENT* – Toutes les initiatives prises par Saint-Marin prouvent que nous avons adhéré à cette campagne contre le discours de haine.

La République de Saint-Marin a entrepris de sensibiliser sa population à cette question. Effectivement, nous sommes une antique terre de liberté. Or nous voyons bien que les libertés et les droits sont mis en danger par un certain nombre de phénomènes, notamment celui dont vous parlez. Il faut rappeler qu’il est essentiel de travailler en utilisant les armes que nous offre le droit, mais en insistant sur l’importance du dialogue. Il faut continuer à sensibiliser les gens et à résoudre les problèmes sans utiliser les armes. Notre République est la terre de la liberté. D’ailleurs, dans notre charte des droits, nous refusons la guerre. Nous devons utiliser le droit, en particulier le droit international, pour résoudre les différends entre Etats. Tels sont les conseils que notre République donne – mais c’est aussi le sens des actions qu’elle mène – chaque fois qu’elle intervient dans une institution : maintenir le dialogue – y compris le dialogue religieux et interculturel – et surtout, je le répète, rejeter la guerre en tant qu’instrument de résolution des conflits.

M. PRITCHARD (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – On le voit dans le cas d’Andorre, de Monaco, du Luxembourg et même du Royaume-Uni : il y a une différence importante entre l’évasion fiscale et le fait de contourner légalement les mécanismes d’imposition. Que pensez-vous que les différents pays du Conseil de l’Europe devraient faire pour accroître la transparence en matière bancaire et comment faire en sorte que grandes entreprises et les personnes très riches paient leurs impôts, de manière à ce que les Etats puissent fonctionner ?

M. LE CAPITAINE RÉGENT* – Votre question me permet de rappeler les progrès que notre République a accomplis dans ce domaine. Bien entendu, le sujet est délicat mais, depuis 2008 – et même avant –, nous avons décidé de nous engager sur le chemin de la transparence.

Nous voulons que toutes les organisations internationales nous considèrent comme un pays qui respecte totalement les normes internationales dans ce domaine. Vous avez fait allusion à un certain nombre de réalités. Nous sommes convaincus que ces sujets, qui ouvrent d’ailleurs sur d’autres questions, par exemple la lutte contre la corruption – que certains considèrent comme secondaire par rapport à des problèmes financiers plus importants –, restent pour nous prioritaires, comme nous avons eu l’occasion de le prouver.

Mais je tiens à rappeler que le fait de s’engager sur ce chemin entraîne, pour les pays qui ont décidé de le faire, un certain nombre de coûts, même si cela ne doit jamais décourager les classes dirigeantes et les populations.

Les gouvernements et les populations ne doivent pas faire marche arrière ; il s’agit là de thèmes essentiels. Ensuite, effectivement, il est important de leur donner un cadre de référence qui soit plus complet.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Après le sommet de 2005 à Varsovie, il y a eu un début de négociation entre le Conseil de l'Europe et l’Union européenne. Et c’est la présidence de Saint-Marin, et je l’en remercie, qui est parvenue à boucler les négociations relatives au protocole d’accord entre les deux organisations.

Dix ans plus tard, comment évaluez-vous la coopération entre le Conseil de l'Europe et l’Union européenne ? Par ailleurs, le Gouvernement de Saint-Marin est-il partisan de la tenue prochaine d’un quatrième sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres du Conseil de l'Europe, comme l’a préconisé la Commission permanente de l’Assemblée à Sofia, voilà quelques semaines ?

Mme LA CAPITAINE RÉGENT – Pourquoi pas ? Il s’agit là d’une suggestion à retenir avec enthousiasme. Un quatrième sommet me paraît être une bonne idée et nous plaiderons en sa faveur auprès du Gouvernement de la République – qui est bien représenté dans cet hémicycle, aujourd’hui.

Votre question me permet de revenir sur le rôle des petits Etats. Il y a quelques années, nous n’avons pas ménagé nos efforts pour parvenir à un résultat et ces efforts ont été couronnés de succès. Bien entendu, il faut encore resserrer nos liens avec l’Union européenne. Le Conseil de l’Europe et l’Union européenne sont deux entités incontournables qui font avancer l’Europe, sur le plan économique mais aussi sur celui des droits de l'homme. Deux domaines qui, d’ailleurs, ne peuvent être dissociés ; l’un dépend de l’autre. Les droits de l'homme doivent être respectés dans tous les pays, même dans les pays riches ; or ils sont aujourd’hui menacés. Car pour faire des économies, certains sont prêts, sinon à les rogner, du moins à ne pas les appliquer intégralement.

M. VAREIKIS (Lituanie)* – Mes collègues vous ont demandé ce que les petits pays pouvaient faire pour les organisations internationales et pour résoudre des problèmes que les grands pays sont incapables de résoudre. Je vous retourne la question : qu’attendez-vous des grands pays pour que nos sociétés fonctionnent mieux ?

M. LE CAPITAINE RÉGENT – Vous me demandez, en fait, quels devraient, selon nous, être les éléments du consensus international ?

D’abord, nous sommes fiers de notre pays et nous voulons défendre notre souveraineté au quotidien. Ensuite, les différentes interventions montrent bien que, dans le cadre de l’architecture internationale telle qu’elle existe aujourd’hui, les petits pays occupent une place croissante.

Je rappellerai que l’histoire de notre République est marquée par les migrations : l’émigration et l’immigration. Pendant la guerre, de nombreux immigrants, fuyant les ravages des affrontements, se sont réfugiés chez nous. Après-guerre, les habitants de Saint-Marin ont souvent dû s’expatrier. D’ailleurs, aujourd’hui, une moitié des habitants de Saint-Marin est résidente et l’autre pas. Il existe en outre un musée de l’émigration qui rappelle cet aspect de notre histoire. Et nous estimons que ces phénomènes migratoires contribuent à l’évolution de nos pays.

Enfin, nous espérons être connus et reconnus. Nous souhaitons que notre rapport à la civilisation soit dûment pris en compte. Et peut-être que notre histoire peut offrir un certain nombre de motifs d’inspiration pour résoudre les problèmes du jour. Je souhaite en tout cas que nos relations se poursuivent sur ces bases.

LE PRÉSIDENT - M. Ghiletchi, inscrit dans le débat, n'est pas présent dans l'hémicycle.

M. GOPP (Liechtenstein)* – Vous l’avez rappelé, Saint-Marin, place financière, est en pleine mutation. Or j’imagine que toutes ces mutations ont un impact sur le budget de l’Etat.

Quelle est votre situation ? Quelles sont les mesures que vous prenez en vue de votre rapprochement avec l’Europe ? Cette intégration dans l’espace économique est-elle une question importante pour vous ?

M. LE CAPITAINE RÉGENT – Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous avons, avec beaucoup de détermination et de courage, entrepris une réforme qui ne sera pas réversible.

Nous ne sommes pas préoccupés. Nous avons fait un choix, il est irréversible et ne peut donc, à ce titre, être remis en cause. Nous devons toutefois faire preuve de conviction, de persuasion à l’égard de nos concitoyens et expliquer les raisons qui motivent ces changements et leur caractère impératif. Nous devons expliquer les nouvelles opportunités, y compris économiques, qui s’offrent à nous.

Bien sûr, nous espérons que notre voix sera entendue. Une ouverture internationale, dans la transparence, peut offrir de nouvelles opportunités, donner un coup de fouet à notre économie. Nous espérons ainsi pouvoir attirer des investisseurs étrangers de poids, mais, encore une fois, nous voulons fonctionner dans la transparence et dans le respect intégral des normes qui régissent les grands organismes internationaux et supranationaux.

Nous avons fait un choix qui a supposé des sacrifices et des difficultés pour nos concitoyens, mais nous voulons absolument sortir de la crise structurelle, d’une part, de la crise plus conjoncturelle, cette crise internationale qui nous affecte tous, cette difficulté plus conjoncturelle liée au changement de piliers économiques, d’autre part. Nous sommes convaincus qu’il était indispensable d’agir ainsi – et notre pays est d’ailleurs assisté par un certain nombre d’Etats et d’organismes internationaux. Nous espérons donc aller au terme du processus.

S’agissant de notre intégration à l’espace économique européen, nous avons connu différentes phases dans le parcours de négociation. Au cours des dernières années, les rapports étroits que nous avons noués ont permis de prendre en compte un certain nombre de réformes pour une meilleure intégration à cet espace économique. Le gouvernement approfondit les différentes possibilités, d’autres pas en avant ont également été réalisés. Bien entendu, il faudra coordonner nos propositions de réforme avec celles de l'Association européenne de libre-échange et d’autres organisations européennes.

LE PRÉSIDENT* – Ce dernier propos clôture la phase des questions aux Capitaines Régents.

Madame Stefanelli, Monsieur Renzi, au nom de l’Assemblée, je vous remercie de vos interventions et des réponses fournies aux questions.

3. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance aura lieu cet après-midi, à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 5.

SOMMAIRE

1. Attaques récentes contre des femmes dans des villes européennes : nécessité d’une réponse globale

(Débat selon la procédure d’urgence)

Présentation par M. Gunnarsson du rapport de la commission sur l’égalité (Doc. 13961)

Orateurs : Mme Kavvadia, M. Fischer, Mmes De Sutter, Reps, Sir Roger Gale, Mme Hoffmann, M. Schwabe, Mmes Hetto-Gaasch, Kalmari, Heinrich, Robinson, Rawert, Le Dain, Quintanilla, Mikko, M. Frécon, Mme Katrivanou, MM. Gopp, Wood, Mmes Ohlsson, Kronlid, Louhelainen, Gafarova, MM. Kiral, Howell.

Réponse de M. le rapporteur et de Mme la présidente de la commission sur l’égalité

Vote sur un projet de résolution amendé

2. Discours de Mme Stefanelli et de M. Renzi, Capitaines Régents de Saint-Marin

Questions : M. Allavena, Mmes Bonet, Brasseur, MM. Pritchard, Kox, Vareikis, Gopp.

3. Prochaine séance publique

Annexe I

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 12.2 du Règlement. Sont indiqués en minuscules les noms des suppléants ayant remplacé les représentants absents. Les noms de ceux qui étaient absents ou excusés sont suivis d'un astérisque

Pedro AGRAMUNT

Tasmina AHMED-SHEIKH*

Brigitte ALLAIN/Anne-Yvonne Le Dain

Jean-Charles ALLAVENA

Werner AMON*

Luise AMTSBERG/Mechthild Rawert

Lord Donald ANDERSON

Paride ANDREOLI

Sirkka-Liisa ANTTILA*

Ben-Oni ARDELEAN*

Iwona ARENT*

Khadija ARIB*

Volodymyr ARIEV

Anna ASCANI/Tamara Blazina

Mehmet BABAOĞLU

Theodora BAKOYANNIS*

David BAKRADZE*

Gérard BAPT/Pascale Crozon

Doris BARNETT

José Manuel BARREIRO*

Deniz BAYKAL

Guto BEBB*

Marieluise BECK*

Ondřej BENEŠIK/Jana Fischerová

Levan BERDZENISHVILI*

Deborah BERGAMINI*

Sali BERISHA/Oerd Bylykbashi

Włodzimierz BERNACKI/Jarosław Obremski

Anna Maria BERNINI/ Claudio Fazzone

Maria Teresa BERTUZZI*

Andris BĒRZINŠ*

Gülsün BİLGEHAN

Tobias BILLSTRÖM

Oleksandr BILOVOL/Serhii Kiral

Ľuboš BLAHA/Darina Gabániová

Philippe BLANCHART*

Maryvonne BLONDIN/Catherine Quéré

Tilde BORK*

Mladen BOSIĆ

Anne BRASSEUR

Piet De BRUYN

Margareta BUDNER*

Utku ÇAKIRÖZER

Nunzia CATALFO*

Elena CENTEMERO

Irakli CHIKOVANI*

Vannino CHITI*

Anastasia CHRISTODOULOPOULOU*

Lise CHRISTOFFERSEN

Paolo CORSINI*

David CRAUSBY*

Yves CRUCHTEN

Zsolt CSENGER-ZALÁN/Jenő Manninger

Katalin CSÖBÖR*

Geraint DAVIES*

Joseph DEBONO GRECH*

Renata DESKOSKA

Alain DESTEXHE

Manlio DI STEFANO

Şaban DİŞLİ

Sergio DIVINA*

Aleksandra DJUROVIĆ

Namik DOKLE

Jeffrey DONALDSON*

Elvira DROBINSKI-WEIß*

Daphné DUMERY/Andries Gryffroy

Alexander [The Earl of] DUNDEE*

Nicole DURANTON*

Josette DURRIEU/Jean-Claude Frécon

Mustafa DZHEMILIEV*

Mikuláš DZURINDA*

Lady Diana ECCLES/Mary Robinson

Markar ESEYAN

Franz Leonhard EẞL*

Nigel EVANS

Samvel FARMANYAN*

Joseph FENECH ADAMI*

Cătălin Daniel FENECHIU*

Doris FIALA/Elisabeth Schneider-Schneiter

Daniela FILIPIOVÁ/Ivana Dobešová

Ute FINCKH-KRÄMER*

Axel E. FISCHER

Bernard FOURNIER

Béatrice FRESKO-ROLFO/Christian Barilaro

Pierre-Alain FRIDEZ/Manuel Tornare

Martin FRONC

Sahiba GAFAROVA

Sir Roger GALE

Adele GAMBARO*

Karl GARÐARSSON

Iryna GERASHCHENKO/Sergiy Vlasenko

Tina GHASEMI/Boriana Åberg

Valeriu GHILETCHI

Francesco Maria GIRO

Pavol GOGA

Carlos Alberto GONÇALVES

Oleksii GONCHARENKO/Vladyslav Golub

Rainer GOPP

Alina Ștefania GORGHIU*

Sylvie GOY-CHAVENT*

François GROSDIDIER

Dzhema GROZDANOVA

Gergely GULYÁS*

Emine Nur GÜNAY

Jonas GUNNARSSON

Antonio GUTIÉRREZ

Maria GUZENINA

Márton GYÖNGYÖSI*

Sabir HAJIYEV

Andrzej HALICKI*

Alfred HEER/Roland Rino Büchel

Gabriela HEINRICH

Michael HENNRICH*

Martin HENRIKSEN/Rasmus Nordqvist

Françoise HETTO-GAASCH

John HOWELL

Anette HÜBINGER

Johannes HÜBNER*

Andrej HUNKO*

Rafael HUSEYNOV*

Ekmeleddin Mehmet İHSANOĞLU

Florin IORDACHE*

Denis JACQUAT/André Schneider

Gediminas JAKAVONIS/Dalia Kuodytė

Gordan JANDROKOVIĆ*

Tedo JAPARIDZE/Guguli Magradze

Andrzej JAWORSKI*

Michael Aastrup JENSEN*

Mogens JENSEN*

Frank J. JENSSEN

Florina-Ruxandra JIPA/Viorel Riceard Badea

Ögmundur JÓNASSON

Aleksandar JOVIČIĆ*

Anne KALMARI

Erkan KANDEMIR

Mustafa KARADAYI*

Marietta KARAMANLI*

Niklas KARLSSON

Nina KASIMATI/Evangelos Venizelos

Vasiliki KATRIVANOU

Ioanneta KAVVADIA

Filiz KERESTECİOĞLU DEMİR*

İlhan KESİCİ

Danail KIRILOV

Bogdan KLICH*

Manana KOBAKHIDZE*

Haluk KOÇ/Metin Lütfi Baydar

Željko KOMŠIĆ/Saša Magazinović

Unnur Brá KONRÁÐSDÓTTIR/Brynjar Níelsson

Ksenija KORENJAK KRAMAR/Anže Logar

Attila KORODI

Alev KORUN*

Rom KOSTŘICA/Gabriela Pecková

Elvira KOVÁCS

Tiny KOX

Borjana KRIŠTO*

Florian KRONBICHLER*

Julia KRONLID

Eerik-Niiles KROSS*

Talip KÜÇÜKCAN

Ertuğrul KÜRKÇÜ

Athina KYRIAKIDOU

Inese LAIZĀNE*

Pierre-Yves LE BORGN'

Jean-Yves LE DÉAUT

Luís LEITE RAMOS

Valentina LESKAJ

Terry LEYDEN

Inese LĪBIŅA-EGNERE/Boriss Cilevičs

Ian LIDDELL-GRAINGER/Mike Wood

Georgii LOGVYNSKYI

Filippo LOMBARDI

François LONCLE*

George LOUKAIDES

Yuliya L'OVOCHKINA*

Philippe MAHOUX/Petra De Sutter

Muslum MAMMADOV

Thierry MARIANI*

Soňa MARKOVÁ/Pavel Holík

Milica MARKOVIĆ*

Duarte MARQUES

Alberto MARTINS*

Meritxell MATEU

Liliane MAURY PASQUIER

Michael McNAMARA*

Sir Alan MEALE/Virendra Sharma

Ermira MEHMETI DEVAJA*

Evangelos MEIMARAKIS

Ana Catarina MENDES*

Attila MESTERHÁZY*

Jean-Claude MIGNON*

Marianne MIKKO

Olivia MITCHELL

Arkadiusz MULARCZYK*

Thomas MÜLLER/Jean-Pierre Grin

Oľga NACHTMANNOVÁ

Hermine NAGHDALYAN

Marian NEACȘU*

Andrei NEGUTA

Zsolt NÉMETH

Miroslav NENUTIL

Michele NICOLETTI

Aleksandar NIKOLOSKI

Julia OBERMEIER*

Marija OBRADOVIĆ*

Žarko OBRADOVIĆ

Judith OEHRI

Carina OHLSSON

Suat ÖNAL

Ria OOMEN-RUIJTEN

Joseph O'REILLY/Rónán Mullen

Kate OSAMOR/Liam Byrne

Tom PACKALÉN*

Liliana PALIHOVICI

Judith PALLARÉS

Ganira PASHAYEVA

Florin Costin PÂSLARU*

Jaana PELKONEN/Anne Louhelainen

Agnieszka POMASKA*

Cezar Florin PREDA

John PRESCOTT*

Mark PRITCHARD

Gabino PUCHE

Lia QUARTAPELLE PROCOPIO*

Carmen QUINTANILLA

Kerstin RADOMSKI

Christina REES*

Mailis REPS

Andrea RIGONI

François ROCHEBLOINE*

Soraya RODRÍGUEZ

Helena ROSETA*

René ROUQUET*

Alex SALMOND*

Vincenzo SANTANGELO/Maria Edera Spadoni

Milena SANTERINI*

Nadiia SAVCHENKO/Boryslav Bereza

Deborah SCHEMBRI*

Stefan SCHENNACH

Paul SCHNABEL*

Ingjerd SCHOU

Koos SCHOUWENAAR*

Nico SCHRIJVER*

Frank SCHWABE

Predrag SEKULIĆ*

Aleksandar SENIĆ

Senad ŠEPIĆ

Samad SEYIDOV/Vusal Huseynov

Bernd SIEBERT*

Adão SILVA

Valeri SIMEONOV*

Andrej ŠIRCELJ

Arturas SKARDŽIUS/Egidijus Vareikis

Jan ŠKOBERNE/Matjaž Hanžek

Serhiy SOBOLEV

Olena SOTNYK*

Lorella STEFANELLI/Gerardo Giovagnoli

Yanaki STOILOV

Karin STRENZ*

Ionuț-Marian STROE

Dominik TARCZYŃSKI*

Damien THIÉRY

Antoni TRENCHEV*

Krzysztof TRUSKOLASKI*

Goran TUPONJA/Snežana Jonica

İbrahim Mustafa TURHAN/Burhanettin Uysal

Konstantinos TZAVARAS/Georgios Mavrotas

Leyla Şahin USTA

Dana VÁHALOVÁ

Snorre Serigstad VALEN/Tore Hagebakken

Petrit VASILI

Imre VEJKEY/ Rózsa Hoffmann

Stefaan VERCAMER*

Birutė VĖSAITĖ

Nikolaj VILLUMSEN*

Vladimir VORONIN*

Viktor VOVK*

Nataša VUČKOVIĆ

Draginja VUKSANOVIĆ*

Karl-Georg WELLMANN*

Katrin WERNER*

Jacek WILK

Andrzej WOJTYŁA*

Morten WOLD/Ingebjørg Godskesen

Bas van 't WOUT*

Gisela WURM*

Serap YAŞAR

Leonid YEMETS

Tobias ZECH*

Kristýna ZELIENKOVÁ

Marie-Jo ZIMMERMANN/Marie-Christine Dalloz

Emanuelis ZINGERIS

Naira ZOHRABYAN

Levon ZOURABIAN

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Croatie*

Siège vacant, Chypre*

Siège vacant, Espagne/Pedro Azpiazu

Siège vacant, Espagne /José María Chiquillo

Siège vacant, Espagne*

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, Espagne *

Siège vacant, République de Moldova / Valentina Buliga

EGALEMENT PRÉSENTS

Représentants et Suppléants non autorisés à voter

Sílvia Eloïsa BONET

Azadeh Rojhan GUSTAFSSON

Kerstin LUNDGREN

Représentants de la communauté chypriote turque (Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Observateurs

Armando LUNA CANALES

Ulises RAMÍREZ NÚÑEZ

Partenaires pour la démocratie

Hanane ABOULFATH

Najat AL-ASTAL

Omar HEJIRA