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AS (2017) CR 14

SESSION ORDINAIRE DE 2017

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(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la quatorzième séance

Mercredi 26 avril 2017 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 5 sous la présidence de Mme Djurović, Vice-Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE* – La séance est ouverte.

1. Protéger les femmes refugiées de la violence fondée sur le genre

LA PRÉSIDENTE* – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport intitulé: «Protéger les femmes réfugiées de la violence fondée sur le genre», présenté par Mme Wurm au nom de la commission sur l’égalité (Doc. 14284), ainsi que de l’avis présenté par Mme De Sutter au nom de la commission des migrations (Doc. 14297).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 12 heures et interromprons donc la liste des orateurs quelques minutes auparavant.

Madame Wurm, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme WURM (Autriche), rapporteure de la commission sur l’égalité et la non-discrimination*– Nous discutons aujourd’hui de la protection des femmes réfugiées exposées à la violence fondée sur le genre. Derrière ce dossier, ce sont des milliers, voire des millions de destins de femmes qui sont en jeu. Lorsque j’ai commencé à travailler sur ce rapport, en 2015, un million de personnes étaient déjà en transit, fuyant des pays ou des régions secoués par la guerre. À l’époque, il s’agissait essentiellement de jeunes hommes se rendant vers l’Europe. La page s’est tournée, et en 2016, ce sont les femmes qui fuient leur pays, avec leurs enfants, souvent également leurs parents plus âgés, et pour seul bagage un petit sac en plastique. Elles fuient leur patrie pour sauver leur vie et celle de leurs proches.

Ces femmes ont été confrontées à toute sorte de dangers. D’abord, dans leur propre pays, elles ont dû préserver leur intégrité des viols, de la prostitution forcée, des abus sexuels, etc. Ces femmes se sont dirigées vers les centres d’accueil en Europe, et souvent, elles y ont trouvé des conditions qui ne prennent pas en compte leur vécu. Les femmes ont des besoins particuliers: par exemple avoir plus de lumière dans les couloirs, parce qu’elles sont traumatisées par la violence dont elles ont souffert. Elles doivent avoir des dortoirs et des salles de bain séparés. Il faut prendre ces besoins en compte, c’est l’un des objectifs de mon rapport. De même, lorsqu’il y a des interrogatoires, il faut tenir compte de la nécessité d’interprètes féminines pour traduire leurs propos, afin qu’elles disent vraiment ce qui leur est arrivé. Il faut aussi des femmes médecins dans les cas de viol. Il est beaucoup plus simple, pour une femme qui a vécu ces choses, de se confier et de parler ouvertement de ce qui est arrivé avec une autre femme. Il faut des personnes de confiance dans ces centres d’accueil.

Autre point très important: les femmes doivent avoir la possibilité de bâtir des relations de confiance avec le personnel et non pas simplement de faire des dépositions entourées de leurs parents. En Suède ou ailleurs, lorsqu’il s’agit de familles, automatiquement, c’est à l’homme que sont posées les questions et non indépendamment à la femme pour savoir comment elle est arrivée en situation d’urgence. C’est, je le répète, un point très important de ce rapport.

Nous avons également mené des missions d’enquête en Allemagne et en Suède. Pourquoi avoir choisi ces deux pays? Parce que c’est dans ces pays que sont arrivées la plupart des réfugiées. Nous voulions savoir comme elles allaient, comment l’intégration se passait et connaître les possibilités qui leur étaient offertes. Ces pays sont-ils prêts à accueillir ces femmes qui sont souvent très traumatisée? Des précautions sanitaires ou des modalités de prise en charge particulières sont-elles prévues afin de permettre à ces personnes de reprendre pied à leur arrivée?

Nous avons procédé ici même et à Bruxelles à des auditions qui nous ont permis d’entendre la relation de ces vies, le récit des expériences vécues par ces femmes. C’est la raison pour laquelle je suis convaincue que notre rapport est très important. Bien sûr, on parle en Europe de la crise des réfugiés, laquelle provoque des critiques. Or il ne faut jamais oublier que ce qui est en cause, c’est le sort d’êtres humains. C’est à nous de les aider et d’apporter la preuve que nous avons foi dans les droits de l’homme.

Je tiens à remercier Mme Élodie Fischer, qui n’est pas là aujourd’hui – elle est sur le point d’accoucher. Sans elle, la rédaction de ce rapport n’aurait pas été possible. Je remercie également le secrétariat qui m’a beaucoup soutenu dans mon travail de rapporteure et, évidemment, Mme De Sutter, rapporteure pour avis, qui m’a permis de rendre un rapport le plus complet possible.

Mme De SUTTER (Belgique), rapporteure pour avis de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées* – Je tiens tout d’abord à féliciter Mme Wurm de son excellent rapport sur lequel la commission des migrations n’a que quelques commentaires mineurs à faire. J’exprime mon plein appui à ce rapport et j’espère que vous le voterez tous.

La commission des migrations a proposé quelques amendements supplémentaires dans le projet d’avis de la commission avant tout pour rappeler les normes existantes et les engagements des États membres. Il était essentiel pour nous d’inclure les filles dans le titre, parce que les femmes réfugiées de moins de 18 ans sont souvent victimes d’agressions sexuelles, de traite et de mariage forcé, à la fois dans leur pays d’origine et au cours de leur migration. Comme Mme Wurm le souligne au paragraphe 2, les jeunes filles méritent une attention particulière et des normes de protection plus élevées.

La commission des migrations recommande également que toutes les femmes et toutes les filles bénéficient du même accès à des soins de santé abordables et appropriés et qu’il soit explicitement mentionné que les filles ont le droit de décider elles-mêmes des services dont elles ont besoin. Elles n’ont besoin d’aucune autorisation pour accéder aux services de santé sexuels ou génétiques. Lorsque nous protégeons les femmes de la violence sexiste, les filles ne doivent pas être négligées. Même si la Convention d’Istanbul inclut également les filles, nous souhaitions faire référence explicitement à la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.

Les femmes et les filles sont surtout vulnérables et souvent menacées de violences fondées sur le genre. Elles devraient donc bénéficier d’une protection entière, incluant le statut de réfugiées, et d’un transit sécurisé par la mise en œuvre de filières légales.

Lorsque Mme Wurm affirme que la protection des femmes réfugiées a été largement négligée jusqu’à aujourd’hui, elle a raison. C’est une honte absolue. En conséquence, nous recommandons vigoureusement la mise en place d’installations d’accueil sûres, notamment sur les navires de sauvetage, comme l’Aquarius en Méditerranée, surtout pour les femmes enceintes qui sont en transit. Nous encourageons énergiquement aussi la mise en place de procédures d’asile adaptées à l’égalité hommes-femmes pour les femmes et les filles qui craignent à juste titre d’être victimes de violence, comme Mme Wurm le demande dans son rapport.

N’oublions pas que la crise des migrants n’est pas terminée. Nous pouvons encore enjoindre aux États membres de déployer de nouveaux efforts, surtout à destination de ce groupe vulnérable.

N’oublions pas non plus que notre appui aux femmes et aux filles, s’agissant surtout de leurs droits sexuels et reproductifs, est aujourd’hui plus important que jamais. Des alternatives, consistant à prétendre, par exemple, que les femmes et les filles ne peuvent pas décider pour elles-mêmes ou que les hommes arrêteront de pratiquer le viol lorsque nous arrêterons de financer les soins de santé sexuels et génétiques, ne sont tout simplement pas vraies. Ces alternatives n’ont jamais été prouvées. En conséquence, refusons de les prendre en compte.

Montrons au monde que nous – les femmes et les filles du monde – ne pouvons pas tolérer que ces alternatives soient utilisées comme prétexte pour livrer ces femmes et ces filles vulnérables à elles-mêmes. Luttons pour l’autonomisation, des financements structurels et une confiance réelle. Cette confiance dans les femmes, notamment dans les femmes réfugiées, de la part des travailleurs sociaux, des interprètes, des responsables de la police et des conseillers, nous aidera tous.

Essayons de renforcer la transparence et cette confiance mutuelle afin de parvenir à une meilleure protection des femmes et des filles réfugiées.

LA PRÉSIDENTE* – La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

Mme BARTOS (Hongrie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – La crise des migrations, dont nous sommes les témoins ces dernières années, a appelé l’attention sur cette tragédie humaine. Les conflits et les tensions ont poussé les communautés à en prendre conscience. Je tiens à remercier la rapporteure d’avoir appelé l’attention sur le problème présenté dans le rapport, à savoir la violence fondée sur le genre à l’encontre des femmes et des filles.

Comme le souligne le rapport, derrière les chiffres, il y a des tragédies humaines. Il faut condamner toutes les agressions visant les femmes et les filles. Nous savons que la solution n’est pas simple puisque le problème est complexe. Il faut en distinguer les différentes dimensions: le lieu, le moment, le facteur humain.

La question du lieu concerne celui où les femmes peuvent être accueillies dans leur pays d’origine, durant leur voyage ou dans le pays d’accueil, lorsqu’elles ont été victimes de violences. En fonction du moment, la solution peut être différente. Il faut s’efforcer de diminuer les violences pour réduire l’effet du traumatisme, ce qui prend du temps.

Il ne faut pas non plus oublier le facteur humain: les aspects humains de la situation d’origine doivent être pris en considération. Les victimes elles-mêmes sont un élément de la solution. Le rapport décrit en détail le fait que les réfugiées et les demandeuses d’asile doivent pouvoir surmonter le traumatisme qu’elles ont subi mais, parfois, elles gardent le secret. Ce n’est que grâce à l’éducation et au soutien psychologique que nous pourrons les aider à ne pas devenir à nouveau victimes. Par ailleurs, les organisations qui les accueillent doivent avoir les compétences nécessaires et faire preuve de professionnalisme: c’est un élément essentiel de l’aide à apporter à ces femmes réfugiées. Les acteurs sont donc multiples et la question est complexe.

C’est pourquoi je tiens à évoquer la proposition du rapport qui prévoit des normes générales de protection dans tous les pays.

Il serait utile d’échanger nos expériences de meilleures pratiques.

Malheureusement, la violence fondée sur le genre à l’encontre des femmes et les filles n’est que l’un des aspects du phénomène. Le rapport précise, en effet, que des hommes et des garçons ont également fait l’objet de violences sexuelles. Nous ne sommes malheureusement qu’au début d’une série de tragédies humaines.

Nous devons condamner les passeurs qui essayent de profiter de la misère des autres, les trafiquants qui mettent en danger les réfugiés pour en tirer profit en les poussant à entreprendre des voyages inutiles et à mettre leur vie en danger. Il est, par conséquent, de la plus haute importance que la communauté internationale fasse entendre sa voix avec fermeté contre de tels actes.

Mme STRIK (Pays-Bas), porte-parole du Groupe socialiste* – J’adresse toutes mes félicitations à Mme Wurm pour la présentation de son rapport excellent et d’actualité ainsi que pour les amendements qui apportent des précisions utiles.

On parle souvent en termes neutres des réfugiés et des migrants. Or la situation des hommes et celle des femmes sont, à maints égards, très différentes. Les actions de persécution en temps de guerre, les excisions et les mutilations génitales féminines nécessitent une approche particulière. Les femmes sont souvent exposées à des régimes particulièrement répressifs. On ne peut pas, en ce qui les concerne, se limiter au terme de «réfugiées». Il faut être plus précis et plus au fait du contexte et des antécédents de ces femmes réfugiées afin de les protéger. Il ne convient pas de les traiter simplement en tant qu’épouses des réfugiés masculins.

Les femmes qui ont fui leur pays sont confrontées à des situations à risques, notamment dans les camps de réfugiés et de transit. Dans bien des pays, en l’absence de camps, ces femmes doivent trouver à manger, à boire et un lieu où dormir. Elles sont, en conséquence, exposées à des abus. Les protéger de façon convenable est indispensable. Cherchant souvent une destination sûre, recherchant leurs familles, elles sont plus vulnérables que les réfugiés hommes, ce que savent les trafiquants, qui parfois les soumettent à la traite des êtres humains. Aussi faut-il leur offrir les moyens de payer leur voyage.

Dans certains pays du Conseil de l’Europe, les femmes sont exposées à l’insécurité et à la violence, sont physiquement menacées. Privées d’intimité, on les oblige à dormir dans des lieux qui rassemblent des centaines d’hommes. Elles sont parfois maltraitées et battues par des fonctionnaires, sans avoir personne vers qui se tourner.

Personne ne souhaiterait entreprendre un tel périple. La première chose à faire est de trouver des itinéraires plus sûrs. Elles doivent pouvoir trouver des refuges et bénéficier de procédures rapides de réunification familiale au sein de l’Union européenne ou à l’extérieur.

Les procédures d’asile doivent, par ailleurs, prendre en compte le genre et faire bénéficier ces femmes de mesures favorables à leur intégration. Si cela s’avère nécessaire, elles doivent recevoir un statut indépendant car elles n’osent pas se séparer de leur mari, même en cas de violences domestiques.

Seuls 22 États membres du Conseil de l’Europe ont ratifié la Convention d’Istanbul, ce qui est une honte. Lançons un appel à tous les autres États afin qu’ils ratifient le plus rapidement possible ce texte qui constitue l’instrument le plus solide pour éradiquer la violence à l’encontre des femmes.

Pour conclure, nous soutiendrons le projet de résolution présenté par Mme Wurm.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Au nom du Groupe des conservateurs européens, je remercie Mme Wurm et la commission sur l’égalité et la non-discrimination.

Ce rapport est essentiel pour l’Europe. Son objectif est de sensibiliser à la situation vulnérable des femmes réfugiées et demandeuses d’asile. Il s’agit d’alerter les consciences sur les discriminations auxquelles elles sont confrontées.

Au cours des deux dernières années, plus d’un million de demandeurs d’asile ont migré dans des États membres du Conseil de l’Europe afin de trouver une protection pour eux-mêmes et leurs enfants, après avoir souffert de violences et connu des atrocités. Ces personnes ont pris des risques majeurs pour rejoindre l’Europe. Parfois, leur présence a été critiquée. Elles ont été victimes de discours de haine et constitué des boucs émissaires.

L’an dernier, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a souligné que les femmes et les enfants commençaient à représenter la majorité des primo-arrivants. De nombreuses femmes et filles réfugiées et demandeuses d’asile arrivées en Europe ces dernières années ont été confrontées à une violence fondées sur le genre qui prend différentes formes. C’est le cas aussi bien en transit qu’à l’arrivée. Elles sont confrontées à l’absence de sécurité, au manque d’informations sur les services d’assistance disponibles, à l’absence d’interprètes femmes et généralement à l’absence de prise en charge médicale ou post-traumatique.

Outre le fait qu’elles sont potentiellement victimes de violences en venant en Europe, ces femmes réfugiées, demandeuses d’asile, peuvent se sentir en insécurité dans les pays de destination. La réponse mondiale à la crise des réfugiés en Europe a négligé la protection contre la violence. Souvent, la majorité de la population ne tient pas compte de l’avantage de la diversité dans nos sociétés. Protéger ces femmes de la violence sexiste n’est qu’un premier pas. Combattre les discriminations multiples et les condamner constituent les aspects centraux de l’intégration future à tous les niveaux.

En tant que rapporteure générale sur les violences faites aux femmes, j’appelle votre attention sur l’un des principaux problèmes auxquels ces femmes et ces filles réfugiées et migrantes se heurtent. Elles n’ont que peu accès à l’instruction et c’est pourquoi elles sont fortement touchées par le chômage. Or nous savons que l’un des critères fondamentaux pour avoir accès à l’emploi passe par une instruction de qualité. Je crois sincèrement que ces problèmes doivent être considérés dans le cadre du débat économique, mais également sous l’angle des droits de l’homme, car une telle situation a de fortes incidences sur la situation des migrants et des réfugiés.

Il appartient à l’Assemblée parlementaire d’étudier les meilleures pratiques des États membres pour ce qui est de l’accès à l’éducation et à l’emploi des femmes migrantes et réfugiées.

Mme RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Je remercie Mme Wurm d’avoir traité un sujet aussi essentiel. Les conflits dans certaines régions du monde ont amené à la violation des droits humains des femmes, mais pas uniquement dans le cadre de conflits armés, car des persécutions sont perpétrées à leur encontre dans différents pays. Le dernier rapport de la l’Acnur, l’agence de l’Onu pour les réfugiés, indiquait que 40 % des victimes de violences qui ont traversé la Méditerranée sont des femmes et des filles.

La traite des êtres humains n’a rien à voir avec l’âge ni avec les mutilations sexuelles ou avec d’autres agressions. Vingt mille filles viennent de pays où les mutilations sexuelles sont pratiquées. Les raisons sont multiples pour que ces femmes et ces filles quittent leur pays. Elles doivent être assurées de notre appui. L’Assemblée a beaucoup à faire car il nous faut garantir les droits de ces personnes, les protéger des chantages et de la traite des êtres humains.

Et parmi ces personnes vulnérables à protéger, j’inclurai les personnes handicapées.

S’agissant des interprètes, il serait bon qu’il y ait dans leurs rangs davantage de femmes pour aider ces filles et ces femmes migrantes dans leurs démarches. Nous devons dénoncer toutes les violations des droits de l’homme commises en dehors des frontières européennes.

Des registres devraient être tenus pour délivrer aux migrantes des papiers leur garantissant la liberté personnelle, la liberté de circulation et l’accès aux soins de première nécessité. C’est la raison pour laquelle tous les États membres du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne doivent ratifier la Convention d’Istanbul.

Par ailleurs, certaines mesures évidentes doivent être prises: en particulier, il faut des dortoirs séparés de ceux des hommes, de la lumière dans les toilettes, etc. C’est avec ce genre de petites mesures que nous pourrons aider et mieux protéger ces femmes qui n’ont pas choisi de migrer.

Mme SANDBÆK (Danemark), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je voudrais tout d’abord féliciter Mme Wurm pour cet excellent rapport et Mme De Sutter pour les amendements qu’elle a présentés.

La question de la protection des femmes et des filles réfugiées face à la violence n’a pas été considérée comme une priorité dans la gestion de la crise des réfugiés. Par conséquent, il était essentiel qu’un rapport soit établi sur ce sujet fondamental.

Les femmes et les filles réfugiées sont victimes de violences, le sexe pouvant malheureusement devenir un moyen de survie: prostitution forcée, esclavage sexuel, violence sexuelle, harcèlement et extorsion. Il est terrible de constater que l’ignorance quant à la nécessité de protéger les femmes et les jeunes filles de la violence sexiste est encore généralisée, comme le démontre ce rapport. Même l’Allemagne et la Suède, qui accueillent un très grand nombre de réfugiés, sont concernées par cette question, car elles n’ont pas, à l’instar des autres pays, anticipé et pris les mesures nécessaires pour la protection des femmes et des filles réfugiées.

J’ai été surprise d’apprendre, à la lecture de ce rapport, que les mesures de protection des femmes réfugiées et demandeuses d’asile en Suède ne sont pas au niveau de normes internationales. Par exemple, les infrastructures d’accueil suédoises ne disposent pas de sanitaires séparés. La rapporteure, faisant part de son étonnement, s’est entendu répondre que l’objectif était d’éviter la ségrégation entre les hommes et les femmes, une ségrégation qui prévaut en Suède. De sorte que la non-séparation des toilettes serait un moyen de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes. Incroyable! Des raisonnements de ce type exposent les femmes et les jeunes filles à des sévices sexuels, notamment au viol.

Par ailleurs, le mariage de «protection», comme il est appelé, n’a pas uniquement cours dans les camps, mais il est aussi l’œuvre de personnes de l’administration des centres d’accueil et du personnel humanitaire.

Il est nécessaire de proposer des mesures de protection pour les femmes et les filles qui ont quitté leur pays pour fuir la violence. Alors qu’elles pensent arriver dans un lieu sécurisé, elles doivent affronter une violence encore plus grande. La violence fondée sur le genre doit être une priorité conformément aux dispositions de la Convention d’Istanbul. Il serait temps que tous les États membres la ratifient et la mettent en œuvre dans les plus brefs délais. Le rapport expose les besoins de ces réfugiées. Il est donc impératif que les États qui accueillent ces femmes le lisent attentivement.

Mme de SANTA ANA (Espagne)* – Selon les données des Nations Unies la moitié des personnes déplacées dans le monde sont des femmes et des filles, des personnes qui ne bénéficient plus du refuge de leur foyer ni de structure familiale, des femmes et des filles qui ont dû abandonner leur domicile et leur mode de vie en raison de la violence de la guerre, des persécutions politiques, religieuses ou en raison de catastrophes naturelles.

Certaines d’entre elles deviennent des réfugiées, telles les milliers de Syriennes qui arrivent en Europe, en Turquie, au Liban ou en Jordanie. D’autres sont déplacées à l’intérieur de leur pays. Toutes sont en situation de vulnérabilité, non seulement parce qu’elles sont des réfugiées, mais aussi en raison de leur genre.

Les femmes et les filles migrantes et réfugiées sont confrontées à des violences tout au long de leur voyage, violences qui se poursuivent dans les lieux où elles sont accueillies. Les ONG qui travaillent sur le terrain nous alertent sur le danger qu’encourent ces femmes: violences, agressions physiques, harcèlement, exploitation sexuelle. Dans un de ses rapports, Amnesty International indique que les trafiquants d’êtres humains choisissent les femmes les plus vulnérables, celles qui voyagent seules et qui sont les plus démunies. Leur méconnaissance de la langue et du pays augmente leur insécurité.

Vingt-six millions de femmes et de filles sont concernées, soit, selon l’Onu, une personne demandeuse d’asile sur quatre. Et pourtant, rien n’est prévu pour ces femmes.

Mesdames et Messieurs, nous devons faire de la protection de ces femmes et de ces filles une priorité en leur fournissant une assistance pendant leur transit et en leur offrant des zones séparées des hommes pour dormir ou faire leur toilette dans les centres d’accueil. En outre, il convient de prendre des mesures pour que l’administration puisse rapidement repérer ces personnes vulnérables et leur offrir des services adaptés garantissant la protection de leurs droits et leur sécurité.

Mme HEINRICH (Allemagne)* – Je remercie Gisela Wurm pour ce rapport très engagé. Madame la rapporteure, vous avez vraiment mis le doigt sur la plaie: les terribles violences que subissent les réfugiées.

Le rapport expose clairement les modalités de base visant à protéger les femmes et les filles réfugiées des violences, notamment sexuelles. Nous apprenons, par exemple, que les toilettes et les douches ne comportent pas de verrous, que les lieux de vie ne sont pas séparés. Comment peut-on ne pas adopter des mesures aussi évidentes, des mesures que nous prendrions pour nous-mêmes?

Par ailleurs, le genre est rarement un critère dont les pays tiennent compte pour accorder l’asile. Nous devrions donner la possibilité aux femmes de s’exprimer et de relater leur parcours. Ces femmes ont connu la guerre et les persécutions. Elles sont toujours sur le qui-vive. Certaines d’entre elles ont été forcées de vendre leur corps pour survivre. Les familles procèdent à des mariages forcés pour protéger les jeunes filles dans les camps et à l’étranger.

Nous-mêmes, en Allemagne, devrions nous soumettre à l’autocritique. Fin mars, enfin, nous avons commencé la procédure de ratification de la Convention d’Istanbul. Fin 2017, nous disposerons d’une centaine de centres spécialisées pour l’accueil des femmes réfugiées. Les délais, en Allemagne, sont trop longs pour débloquer des moyens financiers, alors que les aidants sont nombreux.

Il est évident que les hommes partent en espérant pouvoir faire suivre femmes et enfants. Si nous faisons obstacle au regroupement familial, nous les poussons au désespoir. Les femmes restent seules avec leurs enfants dans les pays d’origine, ce qui les conduit à des actes désespérés pour tenter de rejoindre leurs maris. Qu’en serait-il s’il s’agissait de vos épouses, de vos sœurs ou de vos filles?

Mme KYRIAKIDES (Chypre)* – La lecture de ce rapport extrêmement circonstancié est bouleversante. Nous y découvrons la réalité, sur le terrain, de ces femmes et de ces filles. En raison des flux massifs de réfugiés dans de nombreux pays ces dernières années, la dimension de l’égalité a été négligée. Cette population, déjà menacée, a rencontré encore plus d’insécurité. Ces femmes ont fui leur pays pour éviter des mariages forcés, des mutilations génitales, des sévices sexuels, et se sont retrouvées dans des camps de réfugiés, incapables d’obtenir une véritable prise en charge, sans personnel formé pour les écouter.

Souvent, les jeunes filles sont mariées avant d’arriver dans les camps, ce qui est un moyen de les protéger. Pouvez-vous imaginer les facteurs de risques sous-jacents? Cette population de femmes et de filles réfugiées et demandeuses d’asile, dont certaines souffrent de handicaps, est confrontée dans les centres d’accueil à des risques de violences presque plus élevés encore que dans leur pays. Nous devons faire en sorte d’être à la hauteur des normes internationales.

Je ne sous-estime pas les efforts déjà déployés dans les pays qui accueillent énormément de réfugiés et de demandeurs d’asile. Mais il faut aider ces pays et tenir compte de l’égalité hommes-femmes dans toutes les politiques que nous envisageons. Les femmes doivent être protégées dans leur itinéraire difficile, dans cette période précaire de leur vie, dans des territoires inconnus et dans ces situations de complète incertitude. Veillons à ce qu’elles ne soient pas doublement victimes.

Nous devons faire en sorte que la Convention d’Istanbul soit signée et ratifiée au plus vite par tous les pays qui ne l’ont pas encore fait. Ce document essentiel protègera les femmes et les filles de toute forme de violence, et leur donnera la dignité qu’elles méritent.

Baroness MASSEY (Royaume-Uni)* – Ce rapport troublant retranscrit des entretiens qui montrent le courage des femmes réfugiées et les répercussions sur les enfants de pratiques dégradantes. La protection des femmes contre la violence n’a pas été une priorité dans la gestion de la crise des réfugiés. Elles ont fui les persécutions et des pays déchirés par la guerre. Elles cherchaient un lieu sûr. Mais pendant et après le voyage, elles ont subi abus, discriminations et autres formes de violences, y compris sexuelles.

La Convention d’Istanbul stipule qu’il faut fournir une protection contre la violence fondée sur le genre. Ce doit être notre priorité. Les déclarations officielles des Nations Unies et de l’Union européenne appuient cette idée. Le travail des organisations non gouvernementales a été essentiel pour lutter contre la violence fondée sur le genre et soutenir les femmes et les enfants.

En décembre 2016, le World Future Council, l’organisation allemande Filia et le Comité national Allemagne d’Onu Femmes, ont publié un rapport de bonnes pratiques afin de mieux protéger les femmes et les filles réfugiées dans l’Union européenne. Les recommandations du rapport sont essentielles en matière de gouvernance, de sensibilisation et de services. La gouvernance implique une responsabilité au niveau national, régional et local, afin d’encourager les systèmes de regroupement familial et de réinstallation, et fournir un soutien juridique et une bonne information sur les droits. Les services doivent être sensibles au genre et aider les femmes à s’autonomiser, à rompre les barrières linguistiques et culturelles, et à s’occuper des enfants.

Je soutiens le projet de résolution. Le Conseil de l’Europe doit appeler les États membres à combler leurs lacunes et à limiter les failles de protection. La rapporteure propose 17 mesures concrètes, dont l’impact pourrait être évalué.

Mme KALMARI (Finlande)* – Les questions soulevées aujourd’hui sont une réalité pour trop de filles et de femmes. J’ai souvent entendu la question: «Pourquoi est-ce que ce sont les hommes qui demandent l’asile?». En réalité, les femmes ont sûrement trop peur pour se lancer dans un périple dangereux, dont l’issue, avant même le pays de destination, sera peut-être horrible.

Nous devons protéger ces femmes durant leur voyage. Or cela est difficilement possible. Dans les centres d’accueil, les hommes et les femmes doivent pouvoir être séparés. Pourquoi n’est-ce pas déjà une exigence dans ces centres? Nous pouvons faire beaucoup plus en matière d’éducation des adultes une fois arrivés à destination: éducation sur les lois, sur les droits de toute personne vivant sur le territoire, etc. Les valeurs européennes de l’individu, l’intégrité de la personne, la condamnation sans équivoque de tout type de harcèlement ou d’abus, voilà des enseignements essentiels pour tous les nouveaux arrivants.

La séparation en groupes distincts des hommes et des femmes, suivie d’une éducation séparée aux valeurs et aux modes de vie européens, semblent nécessaires. Éduquer en petits groupes serait aussi plus sûr, pour permettre aux personnes d’exprimer leurs inquiétudes et de relater ce qu’il leur est arrivé, viols ou mutilations génitales. Ce serait aussi un moyen de protection pendant le voyage: les autorités publiques doivent aider les femmes seules à rejoindre des groupes de femmes et gagner ainsi en sécurité.

LA PRÉSIDENTE* – M. Stroe est le premier homme à intervenir au cours de ce débat. Félicitations, cher collègue!

M. STROE (Roumanie)* – Il est inquiétant de constater que femmes et enfants réfugiés sont de plus en plus nombreux. Les femmes et les filles sont forcées de quitter leur foyer du fait de conflits, de violence généralisée et de persécutions. Leur situation est particulière, à cause des différentes formes de violences dont elles sont victimes, dans leur pays d’origine, au cours de leur périple et aussi dans leur pays d’accueil, où un manque d’accompagnement les expose à des risques.

J’apporte mon soutien aux pays confrontés à ces vagues de réfugiés et aux propositions faites pour trouver des solutions durables à cette crise. Je me félicite par ailleurs de l’entrée en vigueur de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul; elle est un instrument essentiel de la protection des femmes réfugiées ou demandeuses d’asile.

Mon propre pays a fait des efforts et prend des mesures pour créer des centres d’accueil, d’hébergement et de protection des réfugiés, qui seront redirigés vers la Roumanie. Nous avons déjà signé et ratifié la Convention d’Istanbul. J’encourage tous les États qui ne l’ont pas encore fait à le faire sans plus attendre, car nous devons travailler ensemble et avoir une approche commune. Selon les chiffres du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), femmes et enfants représentent aujourd’hui plus de 60 % des réfugiés qui arrivent aujourd’hui sur les côtes grecques. Il est donc important que l’accueil et les centres d’accueil et d’hébergement soient conçus pour tenir compte du genre. Il faut donc une approche plus cohérente, plus globale de la part de tous nos États, pour assurer une réponse prenant en compte la question du genre dans l’accueil des réfugiés, y compris en ce qui concerne la protection contre les violences.

M. SCHENNACH (Autriche)* – Il est rare qu’un rapport nous ébranle autant, il est rare que l’on puisse souscrire à chaque ligne d’un rapport. Je remercie donc Mme Wurm pour celui-ci.

Il y a quatre ans, participant à une inspection d’un centre d’accueil de réfugiés en Méditerranée, j’ai été choqué de la situation particulière des filles et des femmes. Partout où j’ai voyagé par la suite, j’ai constaté les mêmes situations. En fait, le traumatisme commence dans les zones de conflit; ensuite, cela continue et les poursuit tout au long de leur périple, et, lorsqu’elles arrivent en centre d’hébergement, elles ne sont toujours pas en lieu sûr. Ainsi, dans ce centre, les hommes ne permettaient pas que les toilettes soient éclairées – c’étaient des zones de viol. Des terrains de football ont été construits pour réduire le nombre de viols, mais cela ne saurait être l’unique réponse d’une organisation internationale comme l’Onu. La situation s’est aujourd’hui améliorée, mais n’oublions pas les centres et les camps de réfugiés attaqués, par exemple par Boko Haram. N’oublions pas non plus que des filles sont réduites en esclavage, notamment en Libye. Je me félicite donc de ce rapport, qui traite d’une question importante. Il ne faut pas que ces femmes et ces filles soient, à leur arrivée, confrontées à des policiers hommes, car elles sont très traumatisées. Il faut des centres d’hébergement sûrs, dédiés aux jeunes filles, aux filles, aux mères. Ma collègue Heinrich l’a déjà dit: il y a, c’est vrai, des mariages forcés d’enfants de douze ou treize ans, et ces filles sont déjà enceintes!

Au mois d’octobre, il faudra que tous les Etats membres puissent nous dire s’ils ont signé et ratifié la Convention d’Istanbul. Exerçons sur eux une pression maximale. La Commission permanente et le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe pourraient également envoyer aux Etats membres une lettre leur intimant de ratifier cette convention s’ils ne l’ont pas déjà fait.

Mme HETTO-GAASCH (Luxembourg) – Tout d’abord, je félicite la rapporteure Gisela Wurm pour son excellent travail, qui peut servir à toutes et à tous pour mieux prendre en compte la situation fragile des femmes réfugiées et demandeuses d’asile dans nos pays respectifs. La migration des femmes n’est pas un phénomène nouveau, mais il s’amplifie. Les femmes prennent des risques importants pour se mettre en sécurité avec leurs enfants et nombre d’entre elles risquent leur vie tout au long du trajet. Pendant leur voyage et dans les pays de transit, elles se trouvent exposées à de multiples violences. Malheureusement, les autorités et les acteurs humanitaires n’ont pas toujours connaissance de ces violences atroces, soit qu’ils manquent de données, soit que les victimes soient réticentes à parler de leur douloureuse expérience. Ce rapport qui insiste sur la nécessité d’une meilleure protection des femmes et filles réfugiées et qui met bien en exergue ce problème lié au genre n’en est que plus important.

Il semble primordial de reconnaître les risques encourus et de tout mettre en œuvre pour prévenir la violence sexuelle. Comme l’indique le rapport, il faut recruter davantage de personnel féminin pour conduire les entretiens, pour encadrer et aider les femmes réfugiées à se reconstituer, pour leur servir d’interprètes. Il faut que les femmes aient accès à la justice et qu’elles aient la possibilité de porter plainte. Il faut leur accorder des titres de séjour autonomes pour qu’elles puissent, le cas échéant, se séparer de leur mari violent.

Je ne peux que confirmer que de telles mesures sont bénéfiques. Dans mon pays, le Luxembourg, chaque bénéficiaire de la protection internationale se voit effectivement attribuer un titre de séjour individuel, qu’un éventuel divorce n’affecte pas: les personnes divorcées conservent la jouissance de leur titre. De même, en cas de regroupement familial, l’épouse qui rejoint son mari qui a déjà obtenu le statut de réfugié reçoit un titre de séjour autonome, indépendant de celui du regroupant, notamment lorsqu’une situation particulièrement difficile l’exige, c’est-à-dire lorsque la communauté de vie a été rompue en raison d’actes de violence domestique subie. Selon les informations de l’Office luxembourgeois d’accueil et d’intégration, les structures accueillant des réfugiés répondent aux recommandations émises dans ce rapport, à savoir des dortoirs séparés pour femmes et pour hommes, et des installations sanitaires compartimentées selon le sexe. Le Luxembourg compte également un foyer tout particulièrement dédié aux femmes réfugiées et aux jeunes mamans, encadré par un personnel exclusivement féminin.

Lors de ma visite d’information à Cologne, dans le cadre de la préparation de mon rapport sur les violences faites aux femmes, je me suis vu remettre le Handlungsleitfaden à l’intention du personnel des structures d’accueil de la ville de Cologne. Ce document reprend la législation allemande sur la violence domestique pour bien informer des moyens à disposition pour protéger les victimes.

Pour terminer sur le fait qu’il est primordial de bien mettre les choses au clair dès le début, et ce en faisant connaître les règles de bonne conduite du pays d’accueil, notamment en matière d’égalité de genre. Dans les structures d’accueil comme partout ailleurs, la violence à l’égard des femmes est inacceptable.

LA PRÉSIDENTE* – M. Blanchart et Mme Yaşar, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle.

Mme ANTTILA (Finlande)* – Je remercie la rapporteure, Mme Wurm pour son excellent rapport, et pour la présentation qu’elle a faite de ce sujet d’actualité, si important et dont il est si urgent de se saisir. Les violences exercées contre les filles et les femmes représentent l’une des violations des droits de l’homme les plus courantes. On estime qu’une femme sur trois sera victime d’abus sexuels au cours de sa vie. Pourtant la culture du silence perdure à ce sujet.

Les violences contre les femmes sont l’expression de l’inégalité de pouvoir entre hommes et femmes. Comme l’expose le rapport de Mme Wurm, ces violences peuvent prendre différentes formes. Qu’elles soient directes ou indirectes, elles visent toujours à garder les femmes sous contrôle, à limiter leur liberté. La violence fondée sur le genre sape la santé, la dignité, la sécurité et l’autonomie des personnes qui en sont victimes.

Il y a de plus en plus de preuves qui montrent que la violence fondée sur le genre est une question majeure pour les filles et les femmes migrantes, comme le fait remarquer Mme Wurm. La violence fondée sur le genre, la violence sexuelle, est l’une des raisons qui expliquent pourquoi les migrantes quittent leur pays d’origine, mais c’est une réalité qui les poursuit tout au long de leur périple. Malgré ces preuves, on n’en tient pas assez compte dans la gestion de la crise des réfugiés. Cela doit changer: il faut absolument prendre des mesures concrètes en matière d’éducation et de prévention, et apporter une aide médicale et psychologique post-traumatique aux victimes de ces violences.

Il faut absolument que chaque État membre ratifie et mette en œuvre les dispositions de la Convention d’Istanbul.

Mme CROZON (France) – En matière d’asile comme dans bien des domaines, le terme générique et asexué de «migrants» ou de «réfugiés» cache une réalité qui est, elle, très sexuée, celle de millions d’hommes et de femmes qui, sur les routes de l’exil et à la recherche de la protection internationale, ne sont pas exposés aux mêmes dangers.

Voici maintenant un quart de siècle que les femmes sont devenues majoritaires parmi la population déplacée et réfugiée placée sous la protection du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, et 15 ans, depuis 2002, que cette organisation édicte des recommandations pour que les besoins spécifiques des femmes réfugiées soient pris en considération. Pourtant, comme vous le soulignez, Madame la rapporteure, ces recommandations restent, dans les faits, très insuffisamment suivies dans les États signataires des Conventions de Genève.

Il s’agit, bien souvent, d’affirmer des principes, comme la reconnaissance explicite du sexe comme constitutif d’un groupe social exposé à des persécutions, ce qu’avaient oublié les rédacteurs de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés. Il s’agit aussi de reconnaître explicitement les violences de genre – notamment les violences sexuelles, le viol, la prostitution forcée et l’esclavage domestique – comme autant de persécutions et de moyens d’asservir les femmes.

Mais ce sont aussi des mesures extrêmement pratiques pour permettre la libération de la parole, l’expression de ces violences qui touchent à l’intimité et que bien des femmes, lorsqu’elles réclament la protection internationale, omettent de spécifier. J’ai l’honneur d’avoir introduit dans notre législation nationale un certain nombre de ces mesures, qui en étaient absentes, à l’occasion de la réforme de l’asile de 2015, dont j’étais responsable à l’Assemblée nationale. C’est le principe de l’entretien individuel de chaque adulte en l’absence de son conjoint, et le droit pour un mineur de demander une audition individuelle. C’est le droit de demander le huis clos lorsque, au cours de la procédure, les requérantes évoquent des violences sexuelles – c’était déjà le cas, en France, en matière judiciaire. C’est le droit de demander un officier de protection et un interprète de votre sexe. C’est la formation de l’ensemble des officiers de protection aux violences de genre, pour mieux leur permettre de les détecter et de conduire les entretiens sur ces questions sensibles.

Il faut donc poser des principes afin de permettre l’expression de ces violences. Mais, comme vous le soulignez à juste titre, c’est en amont que nous devons intervenir pour éviter que ces violences se produisent. Plus encore que dans le cas des hommes, ces persécutions n’ont pas uniquement lieu dans le pays d’origine, et ne sont pas toujours la cause de l’exil. Elles se produisent tout au long du parcours, du fait des passeurs, mais aussi d’autres réfugiés, ou encore, parfois, d’autorités corrompues. Elles constituent une économie parallèle, un marché des êtres humains qui prospère sur le désespoir.

Voilà pourquoi nous ne pouvons plus nous contenter de déterminer le droit d’asile à l’arrivée. Nous ne pouvons plus tolérer que, sur les chemins de l’exil, des femmes, des hommes, des enfants soient livrés à eux-mêmes, ou pire, à des marchands sans scrupules. Nous devons avancer vers un régime d’asile commun, qui détermine les droits de chacun au plus tôt, au plus près des zones de combat, pour organiser le voyage et l’accueil de celles et ceux qui relèvent de l’asile. Nous devons mieux prendre en compte les besoins spécifiques des victimes de violence sexuelle. Pour les femmes, ce régime d’asile commun est une nécessité vitale.

C’est bien ce que vous exposez, Madame la rapporteure, dans cet excellent rapport pour lequel je vous remercie encore une fois.

M. MULLEN (Irlande)* – À mon tour, je tiens à féliciter la rapporteure pour cet excellent travail. Il est à mes yeux essentiel que les femmes et les enfants ne soient pas victimes de la bureaucratie. Dans mon pays, l’Irlande, les demandeurs d’asile bénéficient d’un système dit de «prise en charge directe»: une somme d’argent minimum leur est donnée et des services élémentaires leur sont fournis, de façon assez paternaliste. On leur offre ainsi des repas, des provisions quotidiennes. Souvent, ces personnes sont hébergées dans des installations qui ne sont pas du tout appropriées, surtout pour les familles.

J’ai visité certains de ces centres de prise en charge directe, et j’ai vu des situations problématiques. Par exemple, dans certains lieux, des femmes devaient partager une chambre à coucher avec des inconnus; parfois les familles n’avaient pas la possibilité de faire des choses élémentaires, par exemple préparer un repas, parce qu’il n’était pas possible de cuisiner dans la chambre où ces personnes étaient hébergées. Nous discutons beaucoup de la manière d’améliorer ce processus: des protocoles sont mis en place et le gouvernement nous dit régulièrement que la situation s’améliore.

Néanmoins, la gestion bureaucratique de la situation des migrants et des réfugiés est problématique au regard de la dignité humaine. Cela a des conséquences – nous le voyons - en ce qui concerne les violences dont souffrent les femmes réfugiées. La violence peut prendre d’innombrables formes: cela peut être aussi, par exemple, une menace de la part d’un inconnu qui vit très près de vous, dans le même centre de prise en charge directe.

Permettez-moi également de dire qu’il y a eu un double discours, une politique à géométrie variable, ces derniers temps, en matière de lutte contre la prostitution. L’Irlande pénalise désormais le comportement des clients de la prostitution. Mais il y a encore beaucoup de clubs de strip-tease – ou d’autres établissements de ce genre – dans nos villes, qui sont considérés comme des lieux de divertissement particulièrement agréables. Or ce sujet est en réalité directement associé aux violences à l’égard des femmes: les femmes arrivent souvent dans nos pays victimes de la traite des êtres humains, sans connaître la langue qui y est parlée, ou encore sans y avoir aucun ami.

Même si nos lois s’améliorent dans ce domaine, les femmes continuent à souffrir de ce double discours, de cette double politique en ce qui concerne l’industrie liée au sexe, et la façon dont ce secteur traite les femmes. Nous devons aller plus loin dans ce domaine: voilà le sens de ces réflexions à partir de la situation en Irlande.

Mme BLONDIN (France) – Bravo et merci à Gisela Wurm et Petra De Sutter – dont nous connaissons tous ici l’engagement pour la cause des femmes et filles – pour la qualité de ce rapport.

Le projet de résolution qui nous est soumis permettra de mieux protéger les femmes réfugiées des multiples formes de violences qu’elles subissent trop souvent, que ce soit dans les centres de transit et d’accueil, au cours des procédures d’asile ou encore lors de la mise en place de programmes d’intégration économique et sociale.

Certains mouvements populistes, pour tenter de démontrer que les flux migratoires auxquels l’Europe a récemment été confrontée étaient essentiellement de nature économique, ont prétendu que les migrants étaient avant tout masculins. Ce n’est plus du tout vrai. D’ailleurs, cela ne l’a quasiment jamais été à l’échelle mondiale. Ainsi, selon l’Onu, entre 2000 et 2015, le nombre de migrants s’est établi à 244 millions, dont près de la moitié sont des femmes. Le phénomène est largement passé sous silence et peu de mesures spécifiques ont pu être mises en œuvre, faute de moyens. Mais l’Onu a bien souligné – tout comme vous, Madame Wurm – le danger que représentent pour les femmes les violences sexuelles, accentuées par ce contexte, à tout moment de leur périple migratoire.

Vous avez aussi rappelé la situation dans les camps de réfugiés de Calais et de Grande-Synthe, fermés aujourd’hui. La situation s’est légèrement améliorée aujourd’hui dans mon pays, mais les problèmes subsistent. C’est pourquoi le Gouvernement français a mis en place, pour les années 2017-2019, un plan spécifique sur la protection des femmes et des filles étrangères victimes de violences, qui prévoit des actions en matière d’accès aux soins et aux services, ainsi que des actions de formation des professionnels qui les prennent en charge. Cela rejoint vos préconisations.

Par ailleurs, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides – l’Ofpra –, chargé de reconnaître la qualité de réfugié, mène des actions spécifiques pour l’instruction des demandes de protection internationale déposées par les personnes présentant une vulnérabilité particulière. Un groupe thématique «violences faites aux femmes» s’est rendu dans les camps de réfugiés français.

Des violences spécifiques sont mentionnées dans les demandes d’asile, telles que l’excision, le mariage forcé, les violences conjugales et intrafamiliales ou les violences sexuelles subies au sein des camps de réfugiés. Au total, les femmes et les enfants représentent plus de 41 % des personnes placées sous la protection de l’Ofpra. À la fin 2016, cet organisme a protégé un peu plus de 5 000 petites filles contre les risques d’excision.

La perpétuation probable de la situation chaotique au Moyen-Orient nécessite que nous prenions mieux en compte les violences à l’égard des femmes réfugiées. Ce rapport ainsi que la ratification de la Convention d’Istanbul nous y aideront.

Mme BÎZGAN-GAYRAL (Roumanie)* – C’est un honneur pour moi d’être devant vous, à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. C’est la première fois, puisque je suis une députée roumaine nouvellement élue au parlement, en décembre 2016. Je représente un nouveau parti, l’Union Sauvez la Roumanie, qui a recueilli 9 % des sièges au parlement seulement six mois après sa création. L’USR est le fruit d’une initiative citoyenne, créée et financée par des citoyens et fondée sur deux piliers: la transparence et la reconstruction du pays. Nous représentons dans mon pays une nouvelle génération de citoyens européens; nous avons conscience de nos droits mais aussi de nos obligations, une forme nouvelle de citoyenneté active et engagée.

Être ici, à Strasbourg, ces derniers jours m’a énormément appris. Je suis heureuse de pouvoir devenir membre du Réseau parlementaire pour le droit des femmes de vivre sans violence. Mais quand on parle des femmes migrantes et réfugiées, nous devons convenir que l’on ne peut pas contrôler les migrations. Nous pouvons également convenir qu’une fois que nous sommes confrontés à ces mouvements migratoires, la meilleure façon de protéger les femmes de la violence est de faire en sorte que, dans nos pays respectifs, tout soit fait en matière administrative et d’hébergement conformément aux dispositions de la Convention d’Istanbul – qu’il convient, bien évidemment, de ratifier.

Toutefois, les résistances sont fortes. Face aux mentalités, aux traditions et aux coutumes, un travail considérable reste à faire pour convaincre.

Les évolutions récentes constatées dans de nombreux pays, y compris en Roumanie, montrent que les sociétés régressent en matière d’égalité entre les genres. Les violences à l’encontre des femmes vont croissant. Partout le populisme gagne du terrain et les modèles patriarcaux réapparaissent au sein des familles. Tout y contribue: les médias, par des encouragements explicites, ou encore par le langage employé; mais aussi certaines initiatives législatives – que je qualifierais de médiévales –, bénéficiant parfois du soutien d’organisation internationales, et qui visent à réduire la femme à l’état de servante au foyer ou de femelle reproductrice.

Il faut absolument chercher à prévenir ces modèles de relations fondées sur le genre. Ce doit être une priorité. Bien évidemment, pour d’innombrables femmes, cela reste un idéal bien lointain. Ces normes et valeurs doivent se traduire par des actions vigoureuses. Un nombre toujours important d’ONG et d’autres organisations doivent poursuivre la lutte contre la violence à l’encontre des femmes. Nous avons également besoin de plus de justice et de travail social.

Je me sens inspirée et encouragée par les voix positives que j’ai entendues aujourd’hui. Je suis prête à contribuer moi aussi à cette lutte. L’une des belles découvertes que j’ai faites dans ce palais du Conseil de l’Europe a été l’exposition «Femmes inspirantes». Je conclurai mon propos par une citation qui m’a beaucoup touchée dans cette exposition: «Mieux vaut allumer une bougie que d’être la cause de l’obscurité». Je ne sais qui a dit cela mais, que ce soit Eleanor Roosevelt, Confucius ou toute autre personne, ce qui m’importe est que cette phrase met l’accent sur la nécessité d’agir de façon constructive. Il est temps de cesser la destruction et de commencer à construire. Quand on allume une bougie, c’est vraiment là que les choses commencent.

Mme O’CONNELL (Canada, observateur)* – Je tiens tout d’abord à remercier la rapporteure pour son rapport complet et détaillé sur cet important sujet, et me féliciter de l’engagement du Canada vis-à-vis des femmes et des filles yézidies.

Le Canada s’est engagé à tenir compte du genre dans nos politiques d’accueil et d’intégration des réfugiés. Nous encourageons les autres pays à faire de même.

C’est ainsi que notre gouvernement a sponsorisé 1 200 femmes et filles réfugiées yézidies ayant survécu au passage de Daech et vivant encore en Irak. Le Canada a, en effet, établi un programme unique pour accueillir les personnes déplacées de l’intérieur particulièrement vulnérables, dont les femmes et les enfants, qui se trouvent confrontés à des atrocités inimaginables – entre autres la violence fondée sur le genre –, quand ils sont entre les mains de Daech. Réintégrer leur communauté peut être difficile, et elles peinent, en Irak, à trouver aide et appui. Le Canada et des pays comme l’Allemagne offrent un nouveau départ à ces femmes, ces filles et leur famille.

Notre action ne se limite pas aux femmes et aux filles yézidies. Le Canada a un programme de protection d’urgence pour aider les femmes réfugiées qui, sinon, ne pourraient pas être éligibles au titre de la réinstallation. Des facteurs tels que le manque de compétences linguistiques, le manque de contact avec leur communauté ou encore l’absence de perspective d’emploi pourraient entraver leur réinstallation au Canada. Notre programme de protection d’urgence les aide, en particulier celles qui se trouvent confrontées à des risques de violence sexuelle.

Ces femmes et ces filles qui demandent l’asile au Canada bénéficient d’orientations qui ont été mises en place il y a déjà 20 ans. Ces orientations leur garantissent de pouvoir bénéficier d’un entretien spécifique, comme le recommande le rapport.

Nous, Canadiens, estimons que la société doit aider les femmes réfugiées à s’intégrer et leur fournir l’assistance dont elles ont besoin. Notre société ne peut que bénéficier de tels efforts, comme le démontrent les nombreuses contributions que les réfugiés ont apportées au Canada. Il suffit de constater que deux de nos récents Gouverneurs généraux, Adrienne Clarkson et Michaëlle Jean, sont arrivées au Canada en tant que réfugiés. De la même façon, le ministre de l’Immigration et la ministre de la Condition féminine sont des réfugiés.

Je suis impatiente d’entendre les initiatives d’autres pays, et j’applaudis encore la rapporteure pour son travail.

M. THIÉRY (Belgique) – Je voudrais remercier Mme Wurm pour l’excellent rapport qu’elle est parvenue à finaliser à la suite d’un travail très fourni et très constructif qui nous a permis d’entretenir un débat riche au sein de notre commission sur l’égalité et la non- discrimination.

Le sujet est en effet sous-estimé, sous-évalué et peu connu. Je voudrais commencer par rendre hommage à l’immense courage manifesté par les réfugiées, demandeuses d’asile et déplacées à l’intérieur de leur propre pays – la communauté yézidie, par exemple, est venue témoigner de la manière dont les femmes ont pu échapper à la violence et relater leur histoire, afin de sensibiliser le monde à la situation des femmes victimes de violence fondée sur le genre et à la nécessité d’assurer leur protection.

J’avais également signalé, lors de notre réunion du mois de mars à Paris, que, vu l’évolution de la situation en Syrie, il y avait peu de chances que les réfugiés que nous accueillons aient l’envie de rentrer bientôt dans leur pays ou région d’origine. Or, à l’heure actuelle, seuls certains pays disposent de réelles structures d’accueil. Il faudrait que chaque État membre s’organise pour satisfaire aux besoins élémentaires des réfugiés.

Je voudrais rappeler que la responsabilité d’aider et de protéger les femmes demandeuses d’asile et réfugiées ne se limite pas aux cas de violences perpétrées dans les pays de destination: elles doivent recevoir une assistance adéquate pour surmonter le traumatisme qu’elles ont subi dans leurs pays d’origine ou de transit.

C’est donc à la lumière de ces considérations que nous demandons à tous les États membres de prendre des mesures qui faciliteront l’intégration des femmes réfugiées dans des conditions humaines, telles que reprises en détail dans cette résolution.

L’apprentissage d’une des langues du pays d’accueil et l’accès au regroupement familial – en ce qui concerne ce dernier, le cadre m’a été confirmé à la suite d’une question que j’ai posée en commission – sont deux considérations capitales pour faire aboutir ce projet de résolution et permettre sa mise en œuvre. Le texte énumère des mesures concrètes qui permettront de s’attaquer aux problèmes spécifiques rencontrés par les femmes réfugiées.

Je remercie donc sincèrement Mme Wurm pour son travail qui permet d’envoyer un message fort aux États membres et de rappeler l’importance, pour ceux qui ne l’auraient pas encore fait, de ratifier et de mettre en œuvre la Convention d’Istanbul.

M. FRIDEZ (Suisse) – Je m’associe aux félicitations à la rapporteure, Mme Wurm, ainsi qu’à la rapporteure pour avis, Mme De Sutter.

Le sujet dont nous débattons est important, et le rapport cite tous les éléments essentiels. Il faut accepter et mettre en application les propositions qu’il contient. On a coutume de dire que les personnes réfugiées sont victimes de la double peine. Je pense que, pour les femmes migrantes, il faut même parler de triple peine.

La première peine, c’est ce qu’elles ont vécu dans leur pays, les drames qu’elles y ont connus. En Syrie ou d’autres pays, toute la population est soumise à des atrocités qu’il faut dénoncer.

La deuxième peine est celle du voyage – un voyage plein de risques, avec des contraintes, des difficultés et des souffrances. Imaginez la situation d’une mère qui se déplace avec ses enfants, et tous les soucis que cela représente.

La troisième peine est celle qui est liée au genre: ce sont toutes les atrocités que peuvent subir des femmes victimes de sexisme, de pressions, d’abus, ou obligées de se prostituer.

Tout cela est inacceptable: trois peines, c’est beaucoup trop. On a coutume de dire, dans nos pays démocratiques, que l’on juge un pays à la façon dont il s’occupe des plus faibles d’entre les siens. Nous tenons là un exemple concret: il faut répondre à cette situation, aider les femmes qui arrivent chez nous à s’intégrer, devenir indépendantes, et commencer une nouvelle vie dans les meilleures conditions.

Il s’agit d’un excellent rapport, que je soutiens pleinement.

Mme HUOVINEN (Finlande)* – Je félicite la rapporteure pour ce rapport essentiel, qui arrive à point nommé. Même si nous parlons beaucoup de la crise des réfugiés depuis quelques années, il n’est jamais superflu de parler des groupes particulièrement vulnérables comme les enfants, les personnes handicapées et les femmes.

Nous savons tous que les femmes et les filles réfugiées font l’objet de diverses formes de pression, d’harcèlement, d’exploitation, et même de violences. Le rapport indique justement qu’en dépit de cette situation, le sort des femmes et des filles ne se trouve toujours pas au centre de la crise des réfugiés. Il est donc excellent que nous disposions d’un rapport circonstancié sur ce sujet.

Je souhaite souligner deux éléments. En premier lieu, il est d’une importance capitale que les personnes qui ont été victimes d’exploitation et de violences soient identifiées et aidées le plus rapidement possible. Le projet de résolution présente différentes façons de le faire, par exemple en fournissant les services de travailleurs sociaux, de policiers et d’interprètes de sexe féminin dans les États membres, ou en préparant des documents d’information à l’intention des personnes victimes de violence, afin que ces dernières comprennent qu’une aide est disponible. Il serait particulièrement important d’identifier les victimes de violences sexistes et de les aider. Trop souvent, leur expérience est à ce point tragique qu’il leur est difficile d’en parler ouvertement.

En second lieu, je voudrais souligner le lien entre l’objet de ce rapport et des mesures d’intégration efficaces. Pas plus tard qu’hier, la commission des migrations a approuvé mon rapport sur le partage des meilleures pratiques en matière d’intégration des réfugiés au sein de nos États membres. Ce rapport, qui sera débattu à l’Assemblée en juin, souligne qu’il est nécessaire de prendre en considération les groupes particulièrement vulnérables. Des services sociaux et des services de santé suffisants sont indispensables. Même ceux qui ont eu des problèmes terribles peuvent, avec une prise en charge appropriée et suffisamment rapide, aller de l’avant dans leur vie et retrouver leur place dans une nouvelle société. Ces personnes peuvent devenir des soutiens essentiels pour d’autres personnes dans une situation similaire.

Il est essentiel d’avoir un débat ouvert sur cette question difficile. Le harcèlement, l’exploitation et la violence dont souffrent ces femmes sont trop souvent un sujet tabou – surtout lorsqu’il s’agit de violences sexuelles. Notre Assemblée, nos décideurs politiques ont une responsabilité. Il faut prendre en charge ceux qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent pas défendre eux-mêmes leurs droits.

M. KRONBICHLER (Italie)* – Au risque de paraître répéter ce qu’ont dit les précédents intervenants, j’exprime toute ma reconnaissance à Mme Wurm et je veux la féliciter, non seulement pour son travail de rapporteure, mais aussi pour la présentation qu’elle en a fait ce matin. Ceux d’entre nous qui l’ont entendue ont bien compris à quel point est grave, et même épouvantable, la situation des femmes et des filles qui vivent le drame de la fuite, de l’émigration et de la survie dans des lieux d’accueil mis en place dans l’urgence. Pour tout cela, je félicite Mme Wurm, ainsi que Mme De Sutter.

J’aimerais également vous remercier, Mesdames, non seulement parce que votre travail nous a ouvert les yeux sur ce problème dramatique, mais également parce qu’il ouvre une nouvelle approche pour résoudre cet aspect particulier du problème des réfugiés. Pour la plupart d’entre nous, le problème des réfugiés n’avait pas de sexe ou de genre. Pour nous, les réfugiés, c’étaient des êtres humains sans sexe particulier. Or vous nous avez ouvert les yeux sur un nouvel aspect du phénomène des migrations. C’est pourquoi je suis reconnaissant aux rapporteures, en tant que député italien, d’avoir ouvert ce chapitre particulier qui permet d’appeler l’attention sur les femmes réfugiées.

La situation n’est pas la même en Italie que dans les autres pays. Ce qui saute aux yeux, c’est que la distinction en fonction du genre n’est prise en considération que par les ONG et les volontaires qui se mettent au service des plus vulnérables, en l’occurrence les femmes. Il existe donc une spécificité liée au genre. Généralement, nous laissons les questions épineuses aux ONG et aux bénévoles. Souvent, les pouvoirs publics n’ont pas le courage de prendre en charge les personnes les plus vulnérables, si bien que les aides publiques font défaut et que les problèmes ne font que se perpétuer.

Ce rapport permettra, je l’espère du moins, d’ouvrir les yeux de tous et de prendre les mesures nécessaires.

Mme OHLSSON (Suède)* – Il s’agit de parler de la violence sexuelle liée aux conflits en Syrie, au Sud-Soudan, en Somalie, en Afghanistan, en Irak, ou encore en République démocratique du Congo – mais cette liste n’est pas exhaustive. La «violence sexuelle» recouvre les viols, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, les grossesses forcées, les avortements forcés, les stérilisations forcées, les mariages forcés et toutes les autres violences et exactions sexuelles de gravité comparable, perpétrées à l’encontre de femmes et de filles et directement ou indirectement liées à des conflits.

De nombreuses femmes et filles réfugiées et demandeuses d’asile arrivées en Europe ces dernières années ont été exposées à cette violence fondée sur le genre dans leur pays ou au cours de leur voyage. La protection de ces réfugiées contre la violence doit donc devenir notre priorité. Or ce n’est toujours pas le cas, bien que cela devrait l’être conformément aux dispositions de la Convention d’Istanbul – qu’il faut ratifier et mettre en œuvre immédiatement.

Le Conseil de l’Europe et ses États membres doivent prendre des mesures concrètes visant à protéger de manière effective les filles et les femmes de cette violence. Alors qu’elles sont venues chercher protection dans nos pays contre la violence fondée sur le genre, dans bien des cas, elles ont été exposées à cette même violence au cours de leur voyage, dans les centres de transit et d’hébergement.

Je remercie la rapporteure, Mme Wurm, de son excellent travail: il faut tout faire pour protéger les filles et les femmes de cette violence. Il convient d’appliquer la politique de la tolérance zéro en matière de violences fondées sur le genre et combattre le mal partout où il surgit. Je suis en contact avec le refuge Somaya, géré par une ONG: il abrite tous les jours des femmes et des filles qui relatent leurs terribles expériences. Il faut donc tout faire pour protéger les réfugiées de cette violence incessante.

Nous n’avons plus aucune excuse pour rester les bras croisés. Nous devons ensemble lutter contre cette violence.

Mme CHRISTODOULOPOULOU (Grèce)* – Je tiens à féliciter Mme la rapporteure et Mme la rapporteure pour avis de leur travail. Cette discussion est très intéressante et importante.

La crise des réfugiés, qui domine aujourd’hui la scène internationale, a placé la question de la violence faite aux femmes et aux jeunes filles au cœur de l’actualité internationale. Il s’agit non pas d’une exagération féministe mais de la réalité tragique, une réalité que nous devons regarder en face et affronter.

Nous devons parler des femmes réfugiées qui n’ont pas de voix, de ces jeunes filles qui n’ont pas la force et la possibilité de mettre ce sujet sur la table. Plusieurs catégories de personnes exercent des violences à l’encontre des femmes. Souvent, dans les pays où transitent les femmes ou les jeunes filles, les passeurs leur infligent des violences et toutes sortes de mauvais traitements. Mais les violences peuvent aussi être le fait de personnes prétendument civilisées, d’officiels, ou encore, parfois, de membres de leur famille; d’autres réfugiés peuvent également se montrer violents et leur imposer de mauvais traitement.

Il nous faut agir. En effet, nous ne sommes pas ici des journalistes se contentant de décrire un phénomène: nous sommes des politiques et, à ce titre, nous avons pour obligation d’agir, notamment pour changer les conditions de vie de ces femmes.

Nous devons donc faire des propositions – je suis tout à fait d’accord avec les recommandations de ce rapport – et parler au nom de toutes ces femmes et jeunes filles qui n’osent pas aujourd’hui évoquer ce qu’elles subissent, pour montrer combien elles sont vulnérables. Il nous faut prévoir des corridors de passage sûrs et protégés, ainsi que des visas spéciaux pour les jeunes filles et les femmes, afin de leur éviter de subir de mauvais traitements. Nous devons également accélérer les procédures de réunification des familles et aider à la relocalisation de toutes les femmes vulnérables. Cessons d’être hypocrites, de nous lamenter et d’exprimer notre tristesse: nous devons éradiquer ces phénomènes. Or, pour cela, il n’est pas suffisant d’accueillir les femmes ou de prévoir des femmes policières ou interprètes: nous devons vraiment changer les conditions qui conduisent à la violence et nous pouvons le faire. Nous devons, je le répète, parler au nom de toutes ces femmes qui sont privées de voix. Tel est le devoir du Conseil de l’Europe.

Mme GASTÉLUM BAJO (Mexique, observateur)* – Le Mexique est très heureux de pouvoir participer à ce débat qui porte sur les femmes réfugiées et la violence fondée sur le genre. Le rapport de Mme Wurm est magnifique, car il fait une priorité de la question des femmes réfugiées et de la violence fondée sur le genre. Il faut protéger ces femmes, ces filles et ces adolescentes, car ce sont elles qui souffrent le plus des conflits.

Il faut aussi évoquer la crise des réfugiés dont souffre l’Europe. Selon les chiffres du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, 49 % des réfugiés dans le monde sont des femmes et des filles. Ce rapport est une occasion qui s’offre à nous d’évoquer ce problème, non seulement en Europe mais également en Amérique latine, notamment au Mexique. Il faut trouver des solutions aux conflits qui sont à l’origine de ces déplacements massifs.

Par ailleurs, nous devons combattre les narcotrafiquants et tracer des routes de migration sûres, poser un cadre juridique fiable. À cet égard, la Convention d’Istanbul est une occasion à saisir car c’est ainsi que nous pourrons protéger les femmes réfugiées et victimes de violences.

La portée de ce rapport est essentielle et toutes nos actions à l’échelon local doivent en être le reflet. Il nous appartient de faire notre possible pour lutter contre les discriminations et les différentes formes de violence dont les femmes et les filles sont les cibles. Il n’est pas concevable que leur situation soit rendue plus pénible encore sur le chemin de l’exil alors qu’elles fuient des difficultés innommables, passant de difficultés en difficultés, les unes pires que les autres – je pense aux mariages forcés et aux violences sexuelles.

Le rapport met en avant des données extrêmement intéressantes. On évoque ces femmes victimes de toutes formes d’exactions, de trafics, dont le corps est exploité. À tous ces titres, ce rapport est précieux.

Je relèverai les propos prononcés par le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, qui a déclaré que sans les femmes, la démocratie et le développement sont impossibles. Il convient d’agir pour assurer la sécurité de ces femmes et pour qu’elles jouissent d’une réelle protection, afin que leur vie et leur développement soient garantis. Le Mexique et l’Amérique latine sont également engagés sur cette voie.

Mme ALQAWASMI (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Je remercie Mme la rapporteure de son excellent rapport. La Palestine est une société composée pour moitié de réfugiés. C’est ainsi que 3 millions de femmes palestiniennes sont réfugiées et vivent dans des camps. Dans 50 à 70 mètres carrés, des familles entières sont obligées de vivre sans intimité, sans installations sanitaires de qualité. En outre, l’absence de revenus les rend vulnérables. Elles vivent ainsi dans des conditions précaires pendant plusieurs dizaines d’années.

Ces personnes ont dû parfois se déplacer à plusieurs reprises, réfugiées d’un pays à l’autre, la précarité rendant leur situation encore plus pénible. Nous connaissons, par ailleurs, la situation qui prévaut au Moyen-Orient ces dernières années.

Parties de la bande de Gaza pour se rendre en Irak, ces familles sont devenues réfugiées en 1948. Après la guerre en Irak, elles ont tout quitté pour la Syrie, où elles souffrent aujourd’hui des atrocités commises par Daech.

Je voudrais maintenant vous parler des femmes palestiniennes qui vivent dans le camp de réfugiés de Yarmouk, en Syrie, où elles ont été victimes de Daech et de ses lois. Plusieurs générations de femmes souffrent d’expériences tragiques, terrifiantes et espèrent un avenir meilleur. Elles souhaitent vivre dans la paix, être aimées, travailler, voir leurs enfants s’épanouir et pouvoir les éduquer dans la paix et la tranquillité.

Mesdames, vos commissions respectives pourraient-elles se pencher également sur les femmes et les filles réfugiées palestiniennes et leurs souffrances? Le rapport devrait être plus complet et s’attacher notamment aux souffrances des femmes palestiniennes.

LA PRÉSIDENTE* – La liste des orateurs est épuisée, mais nous avons le temps d’entendre une ou plusieurs contributions supplémentaires.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Au début des années 1990, une journaliste américaine qui souhaitait préparer un article sur la vie dans les camps de réfugiés en Azerbaïdjan avait distribué des appareils photos jetables aux enfants réfugiés et déplacés internes. Elle leur avait demandé de prendre des photos des scènes les plus impressionnantes de leur vie précaire.

L’une de ces photos m’a véritablement marqué. Un enfant avait pris un gros plan des mains calleuses de sa mère. Cette photo m’a à ce point touché que je me suis rendu dans ce camp de réfugiés. J’ai retrouvé cette femme et sa famille qui vivait dans des conditions inacceptables, sous une tente, sous la chaleur de l’été et dans le froid de l’hiver, dans les plaines de la région.

Avec plus d’un million de réfugiés et déplacés internes, l’Azerbaïdjan entrait, au début des années 1990, dans une période problématique liée à la déclaration de son indépendance et était confronté à des difficultés économiques majeures. À l’heure actuelle, grâce à une politique cohérente et de grande ampleur de prise en charge des réfugiés et des déplacés internes mise en œuvre par l’État, il n’existe plus le moindre camp de réfugiés.

La femme dont les mains avaient été photographiées travaillait sur le terrain. Lorsque je suis venu la trouver, elle a interrompu sa tâche afin de venir à ma rencontre et me serrer la main. C’était comme serrer la main robuste d’un homme effectuant un travail manuel très dur. Ses doigts rugueux ne ressemblaient en rien à ceux d’une main féminine élégante.

Elle avait dû quitter sa maison et son foyer. Elle avait été conçue pour être aimée, prise en charge, appréciée, mais elle était condamnée à passer sa vie dans des conditions inhumaines.

La plupart de ces femmes ayant des mains calleuses et un cœur brisé n’ont pu supporter ces conditions très dures. Nombreuses sont celles qui sont décédées ou ont vieilli prématurément. Plus de 500 000 femmes azerbaïdjanaises ont souffert des conditions faites aux réfugiés et aux déplacés internes, ce qui est le cas depuis plus de 25 ans.

Heureusement, l’État azerbaïdjanais a offert des conditions de vie normale à ces personnes. Cependant, nous n’avons pu les empêcher d’être réfugiées et déplacées internes. La plaie reste béante dans leur cœur. Elles restent des réfugiées et déplacées internes et sont confrontées à un sort peu enviable. Imaginons ne serait-ce qu’un instant que nos mères, nos sœurs, nos épouses et nos filles se retrouvent dans la situation de la femme que j’évoquais. Une telle chose est pour nous inconcevable; nous ne souhaitons même pas y réfléchir. C’est précisément pour cette raison que les femmes réfugiées sont encore nombreuses en Azerbaïdjan, en Europe et dans d’autres régions du monde et que leur sort reste aussi précaire.

Avant même de débattre du texte inscrit à notre ordre du jour, avant de protéger les femmes réfugiées des violences fondées sur le genre, élevons notre voix contre ce phénomène qui est une honte pour notre humanité, contre le fait qu’il y ait autant de femmes réfugiées.

LA PRÉSIDENTE* – J’appelle maintenant la réplique de la commission.

Madame la rapporteure, il vous reste 6 minutes pour répondre aux orateurs.

Mme WURM (Autriche), rapporteure* – Mes chers collègues, je vous remercie du fond du cœur de toutes les paroles de félicitation que vous avez exprimées à mon endroit. Le chancelier Bruno Kreisky a déclaré qu’il ne recevait jamais trop de félicitations: je fais miens ces mots. Je remercie également toutes celles et tous ceux qui ont participé au débat.

Monsieur Schennach, vous avez proposé de lancer un appel pour que la Convention d’Istanbul soit rappelée aux États membres qui ne l’ont pas encore ratifiée, puisque seuls 22 États membres sur les 47 que compte l’Organisation l’ont fait. Voyons s’il est possible de parvenir à une ratification totale d’ici au mois d’octobre. Comme je l’indique dans le rapport, il est essentiel de faire de la protection une obligation étatique, car c’est aux États membres que revient la charge de mettre en œuvre la Convention d’Istanbul.

Madame Crozon, vous avez indiqué que la France est parvenue à organiser des entretiens séparés pour les femmes. C’est essentiel. De nombreux collègues, dont Mme Ohlsson, ont souligné l’importance de cette procédure afin que les personnes puissent être entendues en toute dignité.

La création d’un refuge pour femmes somaliennes a permis à celles-ci de se construire une nouvelle vie, dont elles sont fières, et nous avons été heureuses de constater cette réussite. Cela donne du courage – à elles, aux autres femmes et à nous. Or l’espoir et le courage sont importants. Vous avez raison, Madame Massey: il nous appartient en effet de donner du courage et de l’espoir à toutes ces femmes.

Une Irakienne qui vit à Berlin dans un centre d’hébergement nous a expliqué pourquoi elle s’était enfuie de son pays. Elle nous a raconté que son partenaire avait été abattu sous ses yeux et qu’elle avait été menacée de voir sa fille de 12 ou 13 ans mariée de force. Elle a donc quitté son pays et a pu trouver un lieu d’accueil sécurisé à Berlin.

Lorsque nous écoutions ces femmes et que nous leur demandions ce qu’elles souhaitaient réellement, elles évoquaient toutes la paix – rien d’autre que la paix. Elles souhaitent toutes enfin vivre.

Madame Gafarova, vous l’avez dit, en tant que rapporteure générale de l’Assemblée parlementaire sur la violence à l’égard des femmes, les jeunes femmes doivent pouvoir accéder à l’éducation. Il est fondamental que les filles et les jeunes femmes puissent avoir une place en crèche, aller à l’école, être formées, de façon à être mieux intégrées – elles et leurs enfants.

Différentes idées ont été lancées. Mme Heinrich, par exemple, souhaite qu’un rapport de suivi soit élaboré. Cela me paraît impératif, afin de ne pas oublier ces femmes en recherche de protection dans nos pays.

Dans quelques minutes, le Président de la République hellénique, un pays qui accueille énormément de primo-arrivants, va s’adresser à notre Assemblée. M. Pavlopoulos a déclaré, il y a peu, que les personnes qui ne sont pas en sécurité dans leur pays sont les bienvenues en Grèce. Je pense également à l’Italie, qui accueille elle aussi de nombreux réfugiés. Les populations de ces pays sont confrontées à l’arrivée de tous ces migrants; la solidarité est donc primordiale, tout à fait indispensable. Il est en effet de notre devoir d’aider tous ces pays, même si notre propre pays n’a pas de frontières extérieures; nous sommes tous concernés. Nous devons tous être solidaires et ne pas laisser ces personnes mourir dans leur pays.

Mme CENTEMERO (Italie), présidente de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – Je voudrais tout d’abord remercier, au nom de toute la commission, Mme Wurm pour son rapport et Mme De Sutter pour son avis.

Il s’agit d’un rapport extrêmement important et je suis ravie qu’un grand nombre de parlementaires, de différents pays, aient pris la parole dans ce débat. Je fais miennes les paroles qui viennent d’être prononcées par Mme Wurm. Face à la crise migratoire, la seule réponse que nous devons donner doit s’appuyer sur les valeurs du Conseil de l’Europe: le respect des droits humains, le respect des droits des femmes. Il convient par ailleurs d’insister sur la ratification de la Convention d’Istanbul et sa mise en œuvre.

Les femmes jouent un rôle fondamental en faveur de l’intégration, dans les camps de réfugiés et les centres d’accueil comme, plus généralement, dans nos sociétés. Il convient donc de leur porter une attention particulière en garantissant leur sécurité et en mettant en œuvre toutes les mesures proposées dans le rapport. Ces dispositions leur permettront de vivre en sécurité, de trouver asile et refuge dans nos pays.

À l’instar de la commission, je demande à l’Assemblée de soutenir sans réserve le projet de résolution.

LA PRÉSIDENTE* – La discussion générale est close.

La commission sur l’égalité et la non-discrimination a présenté un projet de résolution sur lequel 8 amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission proposait de considérer les amendements 1 à 7, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Madame la présidente?

Mme CENTEMERO (Italie), présidente de la commission* – Oui, Madame la Présidente.

LA PRÉSIDENTE* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

Par ailleurs, l’amendement 8 n’est pas soutenu.

Nous allons donc procéder directement au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14284, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (95 voix pour, 3 voix contre et 1 abstention).

Sir Roger Gale, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Djurović au fauteuil présidentiel.

2. Discours du Président de la République hellénique

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle maintenant le discours de M. Pavlopoulos, Président de la République hellénique.

M. le Président répondra aux questions à l’issue de son allocution.

Monsieur le Président, c’est un grand honneur pour moi que de vous accueillir dans cette maison des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit, où les représentants élus de 47 États membres se réunissent. Nous sommes particulièrement honorés de vous accueillir à Strasbourg, alors que notre continent traverse une période décisive. Le défi de la division croissante entre nos États membres se pose aujourd’hui de façon aigüe, dans cette maison construite en 1949. Face à d’immenses défis d’ordre humanitaire, social et économique, les autorités et la population grecques sont restées unies et ont fait preuve d’une solidarité exemplaire, qui fait partie intégrante de votre identité.

Monsieur le Président, en disant aux enfants réfugiés, en février dernier: «Vous faites partie de notre pays», vous avez montré par ces mots votre immense et constante générosité, et celle de votre pays. En ces temps difficiles, l’Europe a besoin de dirigeants qui travaillent activement en faveur de la solidarité, de la reconnaissance mutuelle, du dialogue et du respect interculturel. Ce sont précisément ces valeurs qu’il nous faut défendre ensemble, afin de construire une Europe élargie, plus inclusive, plus accueillante, plus tolérante. Votre visite aujourd’hui à Strasbourg a donc une grande signification symbolique.

Monsieur le Président, vous avez la parole. Nous attendons avec impatience votre message.

M. PAVLOPOULOS, Président de la République hellénique* – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les parlementaires, c’est un grand honneur pour moi de m’adresser à vous en tant que Président de la République hellénique. Mon émotion est grande. Je fus membre du Parlement grec pendant vingt ans. Je connais la signification de votre mandat, ici, dans cette salle, et la contribution très importante de l’Assemblée parlementaire à l’œuvre du Conseil de l’Europe. Je n’oublierai jamais, en m’adressant à vous, que vous êtes ceux qui donnent sa légitimité démocratique au Conseil de l’Europe. C’est vous, représentants de la souveraineté populaire, qui permettez au Conseil de l’Europe d’avoir un poids si important. Votre mission inspire un grand respect.

Je m’adresse aujourd’hui à vous, mais je n’ai pas choisi comme sujet de mon intervention un point particulier à mon pays, ni une question d’actualité politique. Je connais bien votre mission: le sujet de mon intervention sera donc plus général, et relatif à la mission du Conseil de l’Europe.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, nous vivons une époque perturbée, troublée. L’Europe est dans la tourmente, mais pas seulement. Ces troubles ont une autre victime, et cette victime c’est l’homme, et les droits de l’homme. Quel est le rôle de l’Europe? Elle doit défendre l’homme et les droits de l’homme en ces moments difficiles et cruciaux. Si nous ne défendons pas l’homme et les droits humains, notre civilisation, la civilisation occidentale et européenne, perdra sa force. Elle ne pourra plus être un interlocuteur crédible des autres civilisations, et ne pourra plus contribuer à la marche du monde.

J’ai donc choisi de vous parler du Conseil de l’Europe et de la protection des droits fondamentaux. Nous devons tous prendre part à cette mission, et comprendre les facteurs qui minent les droits humains.

Les droits de l’homme fonctionnent à l’intérieur de certains cadres. C’est pour cela que je voudrais commencer mon propos en constatant que la démocratie représentative, comme système de gouvernance, est née de la notion des droits de l’homme. Et c’est elle, la démocratie représentative, qui garantit leur exercice. Les dangers qui guettent les droits de l’homme guettent également la démocratie représentative. C’est pourquoi le sujet de mon intervention, aujourd’hui, porte sur la démocratie représentative, sur les dangers qu’elle court et les moyens de les neutraliser. Je voudrais également vous parler du rôle du Conseil de l’Europe face à ces constatations.

Je considère aujourd’hui que tout le monde peut souscrire à cette définition de la démocratie représentative : c’est un système de gouvernement dans lequel le pouvoir est exercé par des organes élus – il ne s’agit pas d’une démocratie directe – et légitimes. Le pouvoir doit vraiment y être exercé dans le respect des droits de l’homme. Il faut évoquer, dans le cadre de cette démocratie représentative, le rôle très important de la liberté politique: c’est la matrice de tous les droits humains fondamentaux. La liberté politique, à travers l’élection des organes d’État, permet d’avoir des organes élus qui exercent le pouvoir dans le respect des valeurs et des droits humains, la valeur fondamentale de la démocratie représentative étant l’État de droit.

La démocratie représentative est vraiment le régime le plus apte à garantir les droits de l’homme, c’est le système qui fonde les droits de l’homme, il est le plus apte à permettre leur exercice et leur application. Nous pouvons y jouir des droits de l’homme et les protéger de ceux qui voudraient exercer un pouvoir absolu. Bien évidemment, la démocratie représentative n’est pas sans défauts, mais nous pouvons la qualifier de supérieure à tout autre régime de gouvernement. En évitant les abus de pouvoir et les restrictions des droits humains, la démocratie représentative protège les droits de l’homme face à toutes les menaces, lesquelles émanent non seulement du pouvoir de l’État mais aussi, à l’heure de la mondialisation, d’organes du privé. À l’heure actuelle, ces derniers peuvent même être beaucoup plus menaçants pour les droits humains que le pouvoir gouvernemental et l’État.

Pourquoi affirmé-je que la démocratie représentative est le régime le plus apte à la protection de l’homme et des droits de l’homme? L’organisation de la démocratie représentative est liée à qu’on appelle les contrepoids institutionnels, les checks and balances. Personne n’y exerce le pouvoir hors de tout contrôle, et le fonctionnement de ces contrepoids institutionnels – lorsqu’ils fonctionnent bien, et ils le doivent – est régi tant par le droit international que par la Constitution nationale. Ils constituent autant d’obstacles au non-respect ou à la violation des droits de l’homme.

En ce qui concerne le pouvoir de l’Etat ou celui des gouvernements, probablement la plus grande menace, c’est par exemple la règle de la majorité et de la minorité qui joue ce rôle de contrepoids institutionnel, et c’est en cela que la démocratie représentative est différente de la démocratie directe: dans un système de démocratie directe, la minorité ne peut contrôler la majorité. Au contraire, dans une démocratie représentative, la minorité peut exercer de différentes manières un contrôle sur la majorité. Ces contrepoids institutionnels, ces checks and balances garantissent l’État de droit. État de droit et démocratie représentative sont liés de façon indissoluble. Je n’entends pas seulement par État de droit, des règles relatives à l’exercice du pouvoir: dans tout système, des règles existent, qui concernent le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. Dans un État de droit, nous avons également des mécanismes pour sanctionner la violation de ces règles préétablies. Nous avons, d’un côté, une organisation, fondée sur des règles et des lois, et, de l’autre, des mécanismes de sanction pour le cas où ces règles seraient violées ou transgressées.

Je ne m’attarderai pas davantage sur l’existence des lois, je parlerai beaucoup plus des mécanismes de sanction. Par exemple, l’administration se contrôle elle-même – c’est l’autocontrôle de l’administration. De même le parlement contrôle le pouvoir exécutif – c’est le contrôle parlementaire. Cependant, nous savons que ces manières de contrôler le pouvoir exécutif ne sont pas très efficaces. Mon opinion personnelle, c’est que le meilleur mécanisme de sanction pour protéger les droits humains, c’est un pouvoir judiciaire organisé. Seul, le mécanisme de sanction d’une justice indépendante peut vraiment garantir le fonctionnement d’un État de droit et un vrai contrôle.

L’État ne peut pas être hors contrôle, son respect de la légalité est contrôlé, notamment par les organes responsables de la protection des droits humains. Le mécanisme de sanction le plus important est celui du pouvoir judiciaire.

Je parlerai donc également du renforcement des droits humains. Il s’agit là de la supériorité de la démocratie représentative face à d’autres systèmes: le contrôle du pouvoir est très important en matière de violation des droits de l’homme. Mais, aujourd’hui, à l’heure de la mondialisation, les droits de l’homme, nous le savons tous, sont menacés non pas seulement par le pouvoir gouvernemental ou celui des États mais aussi par d’autres intérêts privés, par des individus, qui violent donc les droits de l’homme d’autres individus. Je pense que la démocratie représentative est précisément en mesure d’organiser une armure, une protection face à ces menaces émanant d’autres individus. Cette protection est déjà garantie, soit par les constitutions nationales, soit par le droit international, mais des droits de cette nature pourraient avoir pour effet une restriction des droits humains. Nous devons donc protéger l’homme, protéger les droits humains, face à ces menaces, face à ces nuisances qui proviennent d’autres individus. Aussi, selon toutes les constitutions, une limitation de droits ne peut contrevenir à aucune norme juridique européenne ou internationale, et elle doit se fonder sur un texte normatif lui-même conforme aux normes de rang supérieur.

Il ne s’agit pas seulement de droits sociaux, ni de droits individuels: les droits dont je parle sont essentiellement humains. Certes, ils ont une composante sociale, mais pour que chaque droit humain puisse être exercé selon sa finalité propre, il ne doit pas nuire aux autres droits. Il y a une sorte de solidarité nationale en faveur de toute personne qui veut exercer ses droits: bien sûr, je peux exercer mes droits, mais sans nuire aux droits des autres, sans limiter l’exercice, par les autres, de leurs droits. C’est bien évidemment ce que prévoit la loi.

Tel est le problème posé par les droits sociaux: comment prévenir les abus – ou, plus exactement, les usages abusifs des droits? Les abus sont interdits: c’est une protection importante contre ceux qui menacent les droits humains, les droits individuels, par l’usage abusif qu’ils en font.

Mais il ne s’agit pas seulement de déclarer des droits; pour qu’ils soient effectifs, applicables, dans une véritable démocratie représentative, l’État doit garantir aux citoyens les moyens de les exercer. S’il n’y a pas d’égalité dès le départ, alors l’exercice de ces droits peut devenir purement théorique, virtuel. Pour que la démocratie représentative soit effective, l’État de droit doit être aussi un État social: il doit permettre aux plus faibles sur le plan économique et social de se placer au même point de départ que les autres. En effet nous ne pouvons pas parler de droits humains si tout le monde ne part pas du même point de départ.

Il y a de grandes inégalités économiques, dont les effets sont particulièrement sensibles au moment où les jeunes commencent leurs études, et entrent à l’université. Il est évident, dans ce cas, que tout le monde ne part pas du même point de départ. Comment pouvons-nous parler, dès lors, d’exercice égal des droits de l’homme? C’est sur ce point que la démocratie représentative doit intervenir.

Il ne s’agit pas seulement de protéger les hommes du pouvoir arbitraire des organes d’État, mais aussi des atteintes exercées par ceux qui sont plus puissants économiquement ou socialement. Les limites des droits de l’homme doivent être prévues par les lois, les abus doivent être interdits, afin de faire exister les droits sociaux. L’État social doit organiser ces derniers de telle sorte que chacun parte du même point de départ. C’est le but de la démocratie représentative: or nous assistons aujourd’hui à des changements qui minent les bases de la démocratie représentative et rendent l’exercice des droits fondamentaux beaucoup moins efficace. J’y insiste: de graves dangers nous font face, qui ébranlent les fondements politiques et institutionnels de la démocratie représentative, laquelle est le cadre d’exercice de tout droit humain.

Quels sont ces dangers? Nous devons les identifier, les dénoncer: cela fait partie de la mission propre du Conseil de l’Europe. Quels sont les périls qui ébranlent, aujourd’hui, les fondements de la démocratie représentative, et nuisent à son essence même? Je voudrais décrire certains d’entre eux.

Face à la crise que nous affrontons, un véritable despotisme gouvernemental est apparu, de sorte qu’il n’y a plus, de nos jours, d’équilibre entre les pouvoirs. Or – vous le savez – l’équilibre des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire est nécessaire à une démocratie représentative. Aujourd’hui, le pouvoir exécutif, le gouvernement, a une nette supériorité sur les autres pouvoirs. Cette supériorité est clairement visible dans la manière dont fonctionnent les parlements. Que le texte en discussion soit issu d’une initiative gouvernementale ou parlementaire, dans bien des États – dont la Grèce –, le texte de loi finalement adopté est presque exclusivement l’œuvre du gouvernement.

Le pouvoir exécutif utilise la crise, et tire prétexte de l’urgence dans laquelle nous sommes d’y répondre, pour asseoir sa supériorité. Tant et si bien que désormais, cette supériorité gouvernementale a pour nous un caractère d’évidence. Elle est acceptée par tout le monde. Le parlement, le législateur, est démis de sa fonction propre, de son pouvoir, qui est de faire la loi: il est placé en dehors du processus de production des lois.

Nous devons donc rétablir l’équilibre entre les pouvoirs. C’est d’autant plus crucial que, comme je l’ai dit, le contexte de crise économique a tendance à renforcer le pouvoir exécutif, à lui donner la supériorité. Cette supériorité donnée à l’arbitraire de l’exécutif est dangereuse, car il n’est pas légitime comme le législatif, ni indépendant comme le judiciaire. C’est pourquoi j’ai parlé de despotisme gouvernemental.

Un autre élément caractérise surtout les pays en crise, comme la Grèce, et montre bien comment les fondements de la démocratie représentative sont ébranlés: l’inefficacité du pouvoir judiciaire. Comme je vous l’ai dit tout à l’heure, dans un véritable État de droit, des mécanismes de sanction des violations des droits de l’homme sont prévus. Le pouvoir le plus important, de ce point de vue, est le pouvoir judiciaire. En temps de crise, celui-ci ne peut jouer son rôle: dès lors, il est clair que la démocratie représentative et les droits de l’homme en sont diminués. De tels phénomènes sont multiples: la justice ne peut jouer le rôle qu’elle devrait jouer dans une vraie démocratie représentative, dans un véritable État de droit.

En raison de la crise, de très nombreuses affaires restent en suspens devant les tribunaux sans pouvoir être jugées. Je sais que vous connaissez bien ce phénomène, ici au Conseil de l’Europe! À cause de cela, les contentieux liés à la violation de la Convention européenne des droits de l’homme, surtout sur le fondement du droit à un procès équitable, ne sont jamais tranchés par la justice. C’est un des ennemis de la protection des droits de l’homme. Nous sommes tous résignés. Chacun d’entre nous se dit que, de toute façon, il ne peut rien faire, que personne n’y peut rien, même pas le pouvoir judiciaire.

Mais il est un deuxième danger. Ce danger est que justement, en temps de crise, la justice ne fonctionne pas avec la notion de protection judiciaire. Vous savez très bien que nous ne devons pas attendre la fin d’une procédure judiciaire et la décision d’un juge pour qu’une vraie justice soit rendue. Souvent, dès le début de l’affaire judiciaire, nous avons besoin de mesures de protection, avant même que la décision du juge soit annoncée. Aujourd’hui, cette protection judiciaire est très difficile à mettre en œuvre et, souvent, complètement négligée. Dans la mesure où la justice n’est pas rendue en temps et en heure, à la fin de la procédure, la justice rendue est vraiment théorique, pour ne pas dire virtuelle. Voilà exactement ce qui mine la justice et sa crédibilité.

Le troisième danger est que la justice ne soit pas rendue parce que, bien que le verdict ait été prononcé, il n’est pas appliqué. Nous connaissons beaucoup de situations de ce type, au nom de la crise, liées à la notion de salus populi suprema lex est – le salut du peuple est la loi suprême. Le danger est alors que la justice soit rendue mais de façon inefficace en raison de délais ou de problèmes administratifs divers. Le verdict n’est alors pas appliqué, parfois même au nom de l’intérêt public.

Troisièmement – et là, je vais me tourner vers le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire –, nous avons des organismes internationaux qui n’ont pas d’assise démocratique mais qui interviennent au plan international et n’obéissent qu’à leurs propres mécanismes. Dans le cadre de la mondialisation, de nouvelles formes d’intervention sont apparues, ayant des incidences non seulement sur les hommes, mais sur les États, voire sur plusieurs États. Aucune démocratie ne s’exerce dans ces organismes, mais nous n’avons plus les moyens d’empêcher leurs interventions, leurs prises de pouvoir.

Pour en donner un exemple, j’évoquerai ce que nous appelons «les marchés».

Certes, il existe des marchés de toute sorte. Je ne parle pas là de tous ces marchés, mais des marchés puissants, ceux qui prennent une forme extrême et sont capables d’influer sur l’action des États, voire de l’entraver en les empêchant de prendre les orientations qu’ils souhaiteraient. Ce phénomène global inclut les agences de notation. Sans citer de nom, il est arrivé qu’une de ces agences commette une erreur énorme à propos des États-Unis, qui a coûté plusieurs milliards de dollars. Certes, elle s’est excusée par la suite, mais nous ne pouvons pas céder à ce genre d’intervention. Au nom de la mondialisation, nous sommes parfois entraînés malgré nous, car c’est un système qui peut servir le développement mondial. Mais il faudrait créer un contrepoids car, souvent, nous manquons d’un contrepoids institutionnel équivalent à ces tendances qui nous mènent à une mondialisation sauvage. Il faut absolument créer des contrepoids. Parfois, même le pouvoir légitime d’un État démocratiquement élu est impuissant face à ces phénomènes. Sans aucun contrôle, ces agences peuvent conduire au désastre des sociétés, des États, des nations.

Enfin, j’évoquerai un quatrième danger, celui de la dissolution de l’État social.

S’il est un pilier dans la civilisation européenne, c’est bien l’État social. Celui-ci a été créé après le cauchemar de la Première Guerre mondiale. C’est un bien précieux. Nos pères fondateurs, après la fin de la Grande Guerre, se sont appuyés sur ce premier pilier. Par la suite, après la Seconde Guerre mondiale, la première annonce de Schuman constituant le marché commun, comme l’on appelait l’Union européenne à l’époque, était fondée sur cet État social.

Il n’existe pas de notion d’Europe unie sans État social. Je le redis ici: certes, les droits de l’homme sont importants, mais sans État social pour appuyer ces droits, de quels droits, de l’exercice de quels droits parlons-nous?

Il ne s’agit donc pas seulement d’une question de justice sociale ou de cohésion sociale, mais de démocratie réelle. Car si la démocratie représentative, qui est la seule réelle, ne peut servir les droits de l’homme et l’État social, elle n’existe plus. En raison même de la non-existence de cet État social, il ne peut y avoir d’égalité. Anatole France disait que l’égalité signifie que chacun peut dormir tranquillement sous les ponts de la Seine, mais cela n’est pas la véritable égalité. Cela ne correspond absolument pas aux droits de l’homme. Au sein de l’Europe dans laquelle nous vivons, nous devons comprendre qu’il ne peut exister de progrès social, d’union monétaire ou de règles comme celles que nous avons érigées sans État social pour assurer non seulement la cohésion sociale mais pour permettre à tous d’être sur un pied d’égalité.

J’ai parlé du despotisme gouvernemental, de la protection des individus, de la globalisation et de l’inexistence du droit social. Tout cela peut miner la démocratie représentative. C’est alors qu’intervient le Conseil de l’Europe. Permettez-moi donc de conclure par cette déclaration. Nous sommes tous face au même problème. Le Conseil de l’Europe est l’organisation européenne la plus ancienne, celle qui compte le plus grand nombre d’États. D’une certaine façon, ce vaste espace, ouvert et initiateur, offre la possibilité de pouvoir, un jour, adhérer à l’Union européenne.

Il est très important de connaître les activités ainsi que le cadre du Conseil de l’Europe, et d’écarter les dangers qui pèsent sur la démocratie, la subversion de ses valeurs ainsi que celles de l’Union européenne. L’Union européenne est appelée à jouer un rôle planétaire en ce moment. L’Europe a un rôle très important, il ne s’agit pas seulement de protéger ses sujets. Je ne sous-estime pas le pouvoir économique d’autres puissances, mais l’Europe est celle qui peut le mieux défendre des principes fondamentaux de l’homme, comme ceux de la paix, de la démocratie et de la justice. Si l’Europe s’effondre, qui viendra défendre ces principes?

Le rôle de l’Europe est donc historique, nous ne pouvons pas l’abandonner sous l’influence d’un populisme grandissant qui nous pousse à l’isolement. Je me félicite que le quatrième rapport du Secrétaire Général mette le doigt sur les dangers qui pèsent sur la démocratie et l’Europe. Nous vivons des temps difficiles, et ce rapport nous permet de percevoir et de comprendre ces dangers, et les moyens de les contrecarrer. Il est très important de promouvoir l’idéal européen et notre civilisation commune. Le Conseil de l’Europe doit comprendre qu’il a un rôle mondial, planétaire, pour défendre les députés qui siègent dans cette salle, mais aussi les droits de l’homme dans chacun de nos pays, et dans le monde entier.

L’Union européenne doit adhérer au Conseil de l’Europe le plus tôt possible. Je connais le problème de près, je sais que la Commission européenne a fait un grand effort de rapprochement concernant le droit primaire européen. Mais la conformité du droit primaire européen n’est pas suffisante. La route est pavée pour que l’Union européenne adhère au Conseil de l’Europe. Les droits de l’homme sont une source d’inspiration et fixent des principes généraux pour le présent et l’avenir de l’Union européenne. Ces deux institutions doivent se rapprocher, il ne faut pas que des problèmes formels nous arrêtent.

Il n’existe pas de charte des droits sociaux. Nous pouvons dire Lex minus quam perfecta, quelque chose existe, même s’il n’est pas parfait. Je respecte les efforts de la Commission européenne concernant les droits sociaux, mais nous n’avons qu’une seule partie des droits de l’homme, il en manque une part importante, et c’est un problème. Nous devons combler ce manque et aboutir à une charte sociale puissante, réelle, capable de défendre l’État social, pilier de l’Europe et de sa civilisation.

Concernant la démocratie et les droits de l’homme, nous devons nous souvenir qu’il faut essayer de les promouvoir au-delà des frontières de l’Europe. Ce sont des idées qui appartiennent à l’humanité tout entière. L’expérience du Conseil de l’Europe nous apprend beaucoup. La démocratie représentative ne peut pas être transplantée simplement parce que nous le souhaitons. Nous devons comprendre les autres peuples, les autres civilisations. Si nous essayons de réaliser une transplantation de manière despotique, elle échouera, nous ne servirons pas l’harmonie et la démocratie mondiales. Nous devons propager nos idéaux, mais aussi comprendre que cela ne peut s’effectuer que par l’intermédiaire d’un dialogue efficace, et pas au moyen d’une décision unilatérale. Voilà comment nous allons accéder à la paix internationale. Je pense que le forum du Conseil de l’Europe est celui qui convient le mieux pour promouvoir la démocratie dans le monde entier. La cible est de défendre l’homme, c’est le principe de base. Nous existons en tant que planète parce que nous défendons les droits de l’homme.

Je vous remercie de m’avoir écouté, je vous souhaite bonne continuation et vous félicite de l’œuvre immense que vous êtes en train d’accomplir.

LE PRÉSIDENT* – Merci beaucoup, Monsieur le Président, de votre allocution riche d’enseignements. Les représentants des groupes politiques souhaiteraient vous poser des questions.

Je vous rappelle, chers collègues, que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes. Vous devez poser une question et non faire un discours.

M. FEIST (Allemagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Merci, Monsieur le Président, de nous avoir rappelé les principes élémentaires et fondamentaux de la démocratie.

La démocratie vit de la participation, et c’est pourquoi je vous suis reconnaissant d’avoir mentionné la participation sociale et économique. D’après nos acceptions, il ne suffit pas d’avoir des diplômes en poche, il faut vraiment une participation réelle. Êtes-vous d’avis que dans cette enceinte, nous devons faire plus pour la formation professionnelle et l’éducation?

M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE* – Il est évident que nous devons faire beaucoup pour l’éducation. Tout commence à l’école, surtout au plus jeune âge. C’est à partir de là que l’égalité doit commencer, car l’éducation commence à cet âge. L’égalité du point de départ, dont j’ai parlé précédemment, commence à ce moment, avec la démocratie dès le plus jeune âge.

Si nous voulons combattre le populisme, nous devons le combattre à sa base. Aujourd’hui, avec tous les moyens de communication que nous avons, avec internet, le populisme commence à pervertir l’esprit des jeunes dès leur plus jeune âge.

Vous avez raison d’insister sur l’éducation. Ce que nous devons comprendre et analyser, c’est la notion d’excellence. En Grèce, nous connaissons la notion d’excellence depuis Homère, il est le premier à en avoir parlé. L’excellence, ce n’est pas l’élitisme, mais la justice. C’est la possibilité que nous donnons à chacun de proposer, d’avancer et de se développer.

Nous devons mettre l’accent sur l’école, une école qui donne le même point de départ à tous pour comprendre les notions de démocratie, de droits de l’homme, et aussi pour permettre à chacun de se développer. Je vous remercie de cette question, car vous me permettez de dire quelque chose que je n’ai pas pu dire pendant ma présentation.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Monsieur le Président, je vous remercie de votre impressionnante intervention. Je remercie également la Grèce qui prend à sa charge des milliers et des milliers de réfugiés.

M’appuyant sur les propos du pape François et les rapports d’ONG, j’aimerais vous demander quelles régions d’Europe doivent, selon vous, aider la Grèce pour garantir les droits de tous les réfugiés, surtout, à la lumière du débat précédent, les droits des filles et des femmes afin de les prémunir de la violence fondée sur le genre.

M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE* – La première chose dont nous ayons besoin, quant à la répartition des réfugiés, est la solidarité entre les peuples européens. La Grèce peut faire un grand nombre de sacrifices. Elle ne peut pas, en revanche, avoir des partenaires qui lui explique qu’elle ne garde pas ses frontières, d’autant qu’il s’agit de frontières maritimes. Nous demandons non pas un soutien économique mais la solidarité, afin de pouvoir répartir le nombre des réfugiés, auquel, souvent, nous ne pouvons pas faire face, d’autant que, vous le savez bien, parmi ces réfugiés se glissent de nombreux immigrés clandestins qui arrivent de cette façon chez nous. L’image triste de corps flottant sur la mer Égée, nous ne pouvons plus la supporter. La Grèce a surtout besoin, à l’heure actuelle, d’une meilleure répartition des réfugiés afin de mieux s’occuper d’eux, ainsi que de soutiens spécifiques dans des domaines spécifiques. Nous avons également besoin de reconnaissance. La critique est facile. Je connais très bien l’action des insulaires, je sais ce qu’ils font quotidiennement pour faire face à ces vagues de réfugiés qui déferlent. Nous avons donc besoin de reconnaissance, nous avons besoin de nous sentir soutenus et de sentir que l’Europe, notre famille, est à nos côtés.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni)* – Monsieur le Président, à la suite de vos remarques, nous sommes tous ici conscients de la charge que la Grèce a assumée depuis 2015, depuis le début de la crise des réfugiés. Vous avez dû faire face à l’arrivée de tous ces migrants qui mettent pied sur le continent européen. Toutes les îles grecques ont vu arriver chaque jour parfois jusqu’à plusieurs centaines de migrants. Aujourd’hui, 60 000 migrants sont présents sur votre territoire. Ils sont parfois entre les mains de passeurs, de criminels et de trafiquants. Comme il est encourageant de savoir que le mois dernier, grâce à la collaboration de la Grèce et du Royaume-Uni, 130 migrants ont pu échapper à ces entreprises criminelles. Quels autres projets a votre pays? Quelles mesures de coopération peuvent être lancées avec des agences pour continuer la lutte contre la criminalité et améliorer le système d’accueil des migrants qui arrivent chez vous ainsi que dans d’autres pays membres du Conseil de l’Europe?

M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE* – Je vous remercie beaucoup de votre question. La Grèce, en effet, n’est pas hostile aux réfugiés. S’il y avait seulement les réfugiés syriens, nous serions capables de régler ce problème, parce qu’il est facile d’intégrer des réfugiés dans la population. Mais la majeure partie de ceux qui sont arrivés dans notre pays est constituée de migrants illégaux qui souvent ne rêvent pas d’un futur meilleur. Il y a parmi eux des éléments criminels. La Grèce a fait la distinction et a agi comme il convenait de le faire.

Un élément fait défaut dans la réponse de l’Union européenne et de l’Otan, puisque l’Otan a également participé à l’accord avec la Turquie. Nous devons avoir la possibilité de mieux contrôler nos ports afin de maîtriser le trafic. Comme vous le savez, il est très difficile d’assurer efficacement le contrôle des ports maritimes. Bien sûr, la Turquie fait partie de cet accord. Je ne dis pas qu’elle n’a pas joué son rôle après l’accord. La Turquie a joué son rôle. Nous vivons côte à côte. Nous savons que la Turquie héberge à l’heure actuelle des millions de réfugiés. Nous devons en être conscients et exprimer avec générosité notre reconnaissance à la Turquie. Toutefois, pour appréhender les trafiquants et les criminels, nous avons besoin d’une véritable coopération et de l’aide de l’Europe sur ce point.

L’Europe oublie souvent que l’Union européenne a prévu une politique spécifique en matière d’immigration irrégulière. Nous l’oublions souvent, notamment ici, mais cette politique, qui existe depuis 2008, n’a jamais été véritablement appliquée depuis cette date. Savez-vous que les textes donnent à l’Union européenne la possibilité de mettre en place des accords de réadmission avec les pays qui sont à la source des migrations irrégulières? Et cela, afin que les personnes en situation irrégulière puissent être renvoyées puisqu’elles doivent l’être en tant que telles?

Nous devons vraiment essayer d’éliminer tous les éléments criminels tout en secourant et sauvant, évidemment, toutes les personnes qui se noient, qu’il s’agisse de réfugiés ou d’immigrés clandestins. S’agissant des migrants en provenance de la région subsaharienne, je rappelle qu’à l’époque où j’ai été ministre de l’Intérieur, nous avons commencé à appliquer un accord de développement et de coopération avec les pays de cette région. Mais qu’avons-nous fait depuis 2008, année où a été adopté le Pacte européen sur l’immigration et l’asile? Nous ne faisons aujourd’hui aucune proposition en matière d’aide technique ou économique, alors même que l’article 5 de ce pacte le prévoit. Tout un travail doit être réalisé pour arrêter ces flux et prévoir la suite.

M. COMTE (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Monsieur le Président, la question de Chypre est d’une grande actualité puisque des négociations sont en cours entre Chypriotes grecs et Chypriotes turcs sur la réunification de l’île. Nous connaissons le rôle important que joue la Grèce dans la question chypriote.

Quel regard, quelle appréciation la Grèce porte-t-elle sur ce processus de négociation? Quelle contribution compte-t-elle apporter à la résolution de la question chypriote?

M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE* – Je dois vous assurer que la Grèce et Chypre sont vraiment disposées à contribuer à la solution du problème chypriote. Depuis 1974 cette plaie reste ouverte. Chypre subit la présence d’une armée d’occupation. Il ne s’agit pas d’un problème grec, chypriote, voire européen. Il s’agit d’un problème international.

Je voudrais évoquer ce problème deux minutes devant vous. Dites-moi ensuite si vous êtes d’accord ou pas. Chypre est un État membre de l’Union européenne. L’île appartient à la zone euro. Donc, toute solution doit être conforme au droit de l’Union européenne, puisque, vous le savez bien, toute solution doit respecter le droit primaire européen, et y être conforme, notamment le droit régissant la souveraineté nationale.

Quelle est la souveraineté nationale d’un État membre de l’Union européenne? Une armée d’occupation ne saurait en aucun cas s’y maintenir. Nous avons le précédent de la réunification de l’Allemagne de l’Ouest et de l’Allemagne de l’Est. Vous vous rappelez très bien qu’en 1990 la réunification a été actée. Mais plusieurs années ont passé avant que l’acquis communautaire n’ait pu s’appliquer dans toute l’Allemagne. La réunification allemande n’a été effective qu’en 1993, le jour où le dernier soldat de l’armée russe a quitté le territoire allemand.

Le ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne, M. Steinmeier, a évoqué cette situation en parlant du problème chypriote. Vous comprenez bien que nous ne pouvons accepter que la solution du problème chypriote passe par la présence d’une armée d’un État tiers, au surplus non membre de l’Union européenne. Cela pourrait constituer un préalable et légaliser l’invasion d’un pays européen par une armée d’un pays tiers.

La présence de l’armée turque constitue une violation. Aucun de nous ne pourrait accepter cette présence ni le Traité de garantie. Le problème persiste depuis 1974, c’est une plaie béante. Nous voulons une solution, mais non une solution qui aille à l’encontre de la souveraineté nationale d’un pays membre de l’Union européenne. Nous ne défendons pas ici uniquement nos pays, nous devons être capables de défendre les valeurs européennes, le droit primaire européen et l’acquis communautaire. Je tiens des propos qui sont respectueux de la Turquie.

Vous connaissez notre position face à la Turquie. Elle peut être gagnante si nous parvenons à une solution qui respecte les principes du droit européen. Les communautés chypriotes grecque et turque pourront alors coexister dans une fédération – et non une confédération –, fondée sur les valeurs d’une fédération, d’un État qui fonctionne avec des citoyens européens. Tous seront des citoyens européens et auront les mêmes droits. Telle est la seule solution susceptible d’être acceptée car personne n’a intérêt à ce que la situation actuelle persiste. Les premières victimes en sont les Chypriotes.

M. NICOLINI (Saint-Marin), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Président, votre pays est magnifique, c’est un paradis pour les touristes, mais, à l’instar de nombreux pays européens, c’est aussi un enfer pour les animaux.

Je suis un défenseur du droit des animaux et en tant que tel je suis en contact avec nombre de bénévoles grecs, obligés de fouiller dans les ordures pour retrouver les chiots. Les chiens et les chats sont systématiquement exterminés et souffrent au seul motif qu’ils existent.

Votre pays a enseigné la civilisation au monde entier. Je vous prie, agissez pour changer l’état d’esprit des nouvelles générations et pour former les forces de police afin qu’elles mettent un terme à ces cruautés. Faites en sorte que les fonds européens destinés aux animaux soient utilisés comme ils le doivent.

M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE* – Je suis profondément attristé par ce phénomène que je vous remercie d’avoir mis en avant. Je puis vous affirmer que ces dernières années, nous avons produit un effort considérable: le Code pénal a été modifié, les interventions des forces de l’ordre sont fréquentes et nous avons lancé dans les écoles une campagne de sensibilisation, essentiellement auprès des jeunes et très jeunes enfants.

Certes, tous les problèmes ne sont pas résolus. Cela dit, je puis vous assurer que, malgré la crise, nous nous attachons à intensifier notre politique en faveur de la protection des animaux car la protection des animaux est un signe de civilisation. Sachez donc que nous allons poursuivre et intensifier nos efforts. C’est très important, pas uniquement pour l’image de notre pays à l’extérieur, mais pour nous-mêmes. Je vous remercie de votre question.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Président, vous qui venez du berceau de la démocratie, vous nous avez rappelé fort opportunément que la démocratie représentative était la pierre angulaire de notre existence alors même qu’en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, sa résistance va de nouveau être testée.

Monsieur le Président, merci de votre venue, merci de votre allocution devant notre Assemblée parlementaire et de la manière dont vous avez répondu aux questions.

3. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 5.

SOMMAIRE

1. Protéger les femmes réfugiées de la violence fondée sur le genre

Présentation par Mme Wurm du rapport de la commission sur l’égalité (Doc.14284)

Présentation par Mme De Sutter du rapport de la commission des migrations, saisie pour avis (Doc.14297)

Orateurs: Mmes Bartos, Strik, Gafarova, Rodríguez Hernández, Sandbæk, de Santa Ana, Heinrich, Kyriakides, Baroness Massey, Kalmari, MM. Stroe, Schennach, Mmes Hetto-Gaasch Anttila, Crozon, M. Mullen, Mmes Blondin, Bîzgan Gayral, O’Connell, MM. Thiéry, Fridez, Mme Huovinen, M. Kronbichler, Mmes Ohlsson, Christodoulopoulou, Gastélum Bajo, Alqawasmi, M. Rafael Huseynov

Réponses de la rapporteure et de la présidente de la commission

Vote sur un projet de résolution amendé

2. Discours du Président de la République hellénique

Questions: MM. Feist, Schennach, Earl of Dundee, MM. Comte, Nicolini

3. Prochaine séance publique

Appendix / Annexe

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure.The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement.Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ÅBERG, Boriana [Ms]

ÆVARSDÓTTIR, Thorhildur Sunna [Ms]

ALLAVENA, Jean-Charles [M.]

ANDERSON, Donald [Lord]

ANTTILA, Sirkka-Liisa [Ms]

ARENT, Iwona [Ms]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

ÁRNASON, Vilhjálmur [Mr]

ARNAUT, Damir [Mr]

BALIĆ, Marijana [Ms]

BARTOS, Mónika [Ms] (CSÖBÖR, Katalin [Mme])

BAYKAL, Deniz [Mr]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr]

BĒRZINŠ, Andris [M.]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BILLSTRÖM, Tobias [Mr]

BÎZGAN-GAYRAL, Oana-Mioara [Ms] (BRĂILOIU, Tit-Liviu [Mr])

BLANCHART, Philippe [M.]

BLAZINA, Tamara [Ms] (ASCANI, Anna [Ms])

BLONDIN, Maryvonne [Mme]

BONNICI, Charlò [Mr] (FENECH ADAMI, Joseph [Mr])

BOSIĆ, Mladen [Mr]

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUYN, Piet De [Mr]

BÜCHEL, Roland Rino [Mr] (MÜLLER, Thomas [Mr])

BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr]

CENTEMERO, Elena [Ms]

CEPEDA, José [Mr]

CHRISTODOULOPOULOU, Anastasia [Ms]

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms])

COMTE, Raphaël [M.] (FIALA, Doris [Mme])

CORLĂŢEAN, Titus [Mr]

CORSINI, Paolo [Mr]

CROWE, Seán [Mr]

CROZON, Pascale [Mme] (ALLAIN, Brigitte [Mme])

CRUCHTEN, Yves [M.]

CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr]

DALLOZ, Marie-Christine [Mme] (MARIANI, Thierry [M.])

DEBONO GRECH, Joseph [Mr]

DIVINA, Sergio [Mr]

DJUROVIĆ, Aleksandra [Ms]

DUNDEE, Alexander [The Earl of] [ ]

EBERLE-STRUB, Susanne [Ms]

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

EVANS, Nigel [Mr]

FABRITIUS, Bernd [Mr] (HENNRICH, Michael [Mr])

FARMANYAN, Samvel [Mr]

FAZZONE, Claudio [Mr] (BERNINI, Anna Maria [Ms])

FEIST, Thomas [Mr] (OBERMEIER, Julia [Ms])

FOURNIER, Bernard [M.]

FRANKOVIĆ, Mato [Mr]

FRESKO-ROLFO, Béatrice [Mme]

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GAFAROVA, Sahiba [Ms]

GALE, Roger [Sir]

GAMBARO, Adele [Ms]

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GIRO, Francesco Maria [Mr]

GODSKESEN, Ingebjørg [Ms] (WOLD, Morten [Mr])

GOGA, Pavol [M.] (MADEJ, Róbert [Mr])

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GONCHARENKO, Oleksii [Mr]

GORGHIU, Alina Ștefania [Ms]

GORROTXATEGUI, Miren Edurne [Mme] (BALLESTER, Ángela [Ms])

GOSSELIN-FLEURY, Geneviève [Mme] (KARAMANLI, Marietta [Mme])

GOY-CHAVENT, Sylvie [Mme]

GUTIÉRREZ, Antonio [Mr]

GUZENINA, Maria [Ms]

HARANGOZÓ, Gábor [Mr] (MESTERHÁZY, Attila [Mr])

HEER, Alfred [Mr]

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HERKEL, Andres [Mr] (MIKKO, Marianne [Ms])

HETTO-GAASCH, Françoise [Mme]

HOFFMANN, Rózsa [Mme] (VEJKEY, Imre [Mr])

HOLÍK, Pavel [Mr] (MARKOVÁ, Soňa [Ms])

HOPKINS, Maura [Ms]

HOWELL, John [Mr]

HUOVINEN, Susanna [Ms] (VIROLAINEN, Anne-Mari [Ms])

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

JENIŠTA, Luděk [Mr]

JENSEN, Michael Aastrup [Mr]

JENSEN, Mogens [Mr]

JENSSEN, Frank J. [Mr]

JORDANA, Carles [M.]

JOVANOVIĆ, Jovan [Mr]

KALMARI, Anne [Ms]

KARAPETYAN, Naira [Ms] (ZOHRABYAN, Naira [Mme])

KARLSSON, Niklas [Mr]

KAVVADIA, Ioanneta [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KESİCİ, İlhan [Mr]

KIRAL, Serhii [Mr] (LABAZIUK, Serhiy [Mr])

KLEINBERGA, Nellija [Ms] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

KOÇ, Haluk [M.]

KORUN, Alev [Ms]

KOX, Tiny [Mr]

KRIŠTO, Borjana [Ms]

KRONBICHLER, Florian [Mr]

KÜRKÇÜ, Ertuğrul [Mr]

KYRIAKIDES, Stella [Ms]

LE BORGN’, Pierre-Yves [M.]

LE DÉAUT, Jean-Yves [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

LOUCAIDES, George [Mr]

MAHOUX, Philippe [M.]

MAMMADOV, Muslum [M.]

MARAS, Gordan [Mr] (BEUS RICHEMBERGH, Goran [Mr])

MARKOVIĆ, Milica [Mme]

MAROSZ, Ján [Mr]

MARQUES, Duarte [Mr]

MASIULIS, Kęstutis [Mr] (ŠAKALIENĖ, Dovilė [Ms])

MASSEY, Doreen [Baroness] (CRAUSBY, David [Mr])

MAURY PASQUIER, Liliane [Mme]

MAVROTAS, Georgios [Mr] (KASIMATI, Nina [Ms])

MEIMARAKIS, Evangelos [Mr]

MESIĆ, Jasen [Mr]

MULARCZYK, Arkadiusz [Mr]

MULLEN, Rónán [Mr] (COWEN, Barry [Mr])

MUNYAMA, Killion [Mr] (HALICKI, Andrzej [Mr])

NÉMETH, Zsolt [Mr]

NENUTIL, Miroslav [Mr]

NICOLETTI, Michele [Mr]

NICOLINI, Marco [Mr] (GATTI, Marco [M.])

NISSINEN, Johan [Mr]

OBRADOVIĆ, Marija [Ms]

OBRADOVIĆ, Žarko [Mr]

OHLSSON, Carina [Ms]

OMTZIGT, Pieter [Mr] (MILTENBURG, Anouchka van [Ms])

OOMEN-RUIJTEN, Ria [Ms]

PACKALÉN, Tom [Mr]

PALIHOVICI, Liliana [Ms] (BULIGA, Valentina [Mme])

PALLARÉS, Judith [Ms]

PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms]

PAŠKA, Jaroslav [M.]

PECKOVÁ, Gabriela [Ms] (KOSTŘICA, Rom [Mr])

POCIEJ, Aleksander [M.] (KLICH, Bogdan [Mr])

PODOLNJAK, Robert [Mr] (HAJDUKOVIĆ, Domagoj [Mr])

POLIAČIK, Martin [Mr] (KAŠČÁKOVÁ, Renáta [Ms])

POMASKA, Agnieszka [Ms]

POSTOICO, Maria [Mme] (VORONIN, Vladimir [M.])

PREDA, Cezar Florin [M.]

PRITCHARD, Mark [Mr]

PRUNĂ, Cristina-Mădălina [Ms]

PSYCHOGIOS, Georgios [Mr] (ANAGNOSTOPOULOU, Athanasia [Ms])

QUÉRÉ, Catherine [Mme] (BAPT, Gérard [M.])

REISS, Frédéric [M.] (ZIMMERMANN, Marie-Jo [Mme])

RIGONI, Andrea [Mr]

ROCA, Jordi [Mr] (BARREIRO, José Manuel [Mr])

RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ, Melisa [Ms]

ROJHAN GUSTAFSSON, Azadeh [Ms] (GUNNARSSON, Jonas [Mr])

ROUQUET, René [M.]

RUSTAMYAN, Armen [M.] (ZOURABIAN, Levon [Mr])

SANDBÆK, Ulla [Ms] (BORK, Tilde [Ms])

SANTA ANA, María Concepción de [Ms]

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHNABEL, Paul [Mr]

SCHNEIDER, André [M.] (ROCHEBLOINE, François [M.])

SCHNEIDER-SCHNEITER, Elisabeth [Mme] (LOMBARDI, Filippo [M.])

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHRIJVER, Nico [Mr]

SCHWABE, Frank [Mr]

ŠEPIĆ, Senad [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SILVA, Adão [M.]

ŠIRCELJ, Andrej [Mr]

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

SOTNYK, Olena [Ms]

SPADONI, Maria Edera [Ms] (CATALFO, Nunzia [Ms])

ȘTEFAN, Corneliu [Mr] (CIOLACU, Ion-Marcel [Mr])

STRIK, Tineke [Ms] (MAIJ, Marit [Ms])

STROE, Ionuț-Marian [Mr]

SUTTER, Petra De [Ms] (DESTEXHE, Alain [M.])

THIÉRY, Damien [M.]

TILKI, Attila [Mr] (GULYÁS, Gergely [Mr])

TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr]

VÁHALOVÁ, Dana [Ms]

VALEN, Snorre Serigstad [Mr]

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr] (TZAVARAS, Konstantinos [M.])

VEN, Mart van de [Mr]

VENIZELOS, Evangelos [M.] (BAKOYANNIS, Theodora [Ms])

VERCAMER, Stefaan [M.]

VOGEL, Volkmar [Mr] (WELLMANN, Karl-Georg [Mr])

VOVK, Viktor [Mr] (LIASHKO, Oleh [Mr])

WENAWESER, Christoph [Mr]

WERNER, Katrin [Ms]

WOJTYŁA, Andrzej [Mr]

WURM, Gisela [Ms]

XUCLÀ, Jordi [Mr] (BILDARRATZ, Jokin [Mr])

YAŞAR, Serap [Mme]

YEMETS, Leonid [Mr]

ZAVOLI, Roger [Mr] (D’AMBROSIO, Vanessa [Ms])

ZELIENKOVÁ, Kristýna [Ms]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

Also signed the register / Ont également signé le register

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

AST, Marek [Mr]

BRUIJN-WEZEMAN, Reina de [Ms]

CORREIA, Telmo [M.]

HIGGINS, Alice-Mary [Ms]

JANIK, Grzegorz [Mr]

LEŚNIAK, Józef [M.]

LOMBARDI, Filippo [M.]

MULDER, Anne [Mr]

OSUCH, Jacek [Mr]

OVERBEEK, Henk [Mr]

RIBERAYGUA, Patrícia [Mme]

Observers / Observateurs

DAVIES, Don [Mr]

DOWNE, Percy [Mr]

GASTÉLUM BAJO, Diva Hadamira [Ms]

LARIOS CÓRDOVA, Héctor [Mr]

MALTAIS, Ghislain [M.]

O’CONNELL, Jennifer [Ms]

OLIVER, John [Mr]

ROMO MEDINA, Miguel [Mr]

TILSON, David [Mr]

Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

ALBAKKAR, Khaled [Mr]

ALQAWASMI, Sahar [Ms]

AMRAOUI, Allal [M.]

IUSUROV, Abdumazhit [Mr]

KHADER, Qais [Mr]

SABELLA, Bernard [Mr]

Representatives of the Turkish Cypriot Community (In accordance to Resolution 1376 (2004) of

the Parliamentary Assembly)/ Représentants de la communauté chypriote turque

(Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Erdal ÖZCENK