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AS (2017) CR 18

SESSION ORDINAIRE DE 2017

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(Deuxième partie)

COMPTE RENDU

de la dix-huitième séance

Vendredi 28 avril 2017 à 10 heures

Dans ce compte rendu :

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 10 sous la présidence de Mme Gambaro, Vice-Présidente de l’Assemblée.

LA PRÉSIDENTE – La séance est ouverte.

1. La convergence technologique, l’intelligence artificielle et les droits de l’homme

LA PRÉSIDENTE – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport sur « La convergence technologique, l’intelligence artificielle et les droits de l’homme », présenté par M. Le Déaut au nom de la commission de la culture (Doc. 14288), ainsi que de l’avis présenté par M. Cilevičs au nom de la commission des questions juridiques (Doc. 14303).

Le temps de parole des orateurs sera de 4 minutes.

Monsieur Le Déaut, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. LE DÉAUT (France), rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias – Les sciences et les technologies ont un impact croissant sur la société. Les nouveaux défis de l’ère numérique, la biologie de synthèse, l’intelligence artificielle et les possibilités de modification du génome induisent des changements si rapides que les applications sont déjà sont sur le marché alors que les connaissances sont incomplètes.

L’homme augmente ses capacités en les dopant grâce à l’apport de machines, de robots, de logiciels. L’intelligence artificielle permet la création de machines intelligentes, capables d’un apprentissage automatique par l’expérience (deep learning), ce qui leur donne, d’une certaine manière, une aptitude à raisonner. Elles sont capables de résoudre des problèmes complexes.

Ces nouvelles machines sont utilisées dans les systèmes experts, les systèmes de commandement militaire, l’aide au diagnostic, la gestion financière, l’évaluation des risques, l’aide à la perception visuelle, à la reconnaissance des formes ou de la parole.

Ce rapport n’est pas exhaustif, il examine les conséquences sociales, éthiques et juridiques du développement de l’intelligence artificielle, de la robotique et des nouvelles possibilités ouvertes par la convergence de technologies. Il n’aborde pas les conséquences de la numérisation de la société sur l’emploi, ni les possibilités d’utilisation d’artefacts intelligents dans le domaine militaire. Ces points pourraient être étudiés dans de prochains rapports.

Je remercie particulièrement MM. Rinie Van Est et Joost Gerritsen, de l’Institut Rathenau des Pays-Bas, M. Raja Chatila, directeur de l’Institut des systèmes intelligents et de robotique de l’Université Pierre et Marie Curie, ainsi que les différents experts cités dans le rapport.

Ces technologies associent les nanotechnologies, les biotechnologies, les technologies de l’information et les sciences cognitives, qui se rejoignent et se complètent. Elles sont de plus en plus puissantes et revêtent un caractère à la fois irréversible et incertain. Elles s’immiscent en nous par les smartphones, les réseaux sociaux, les jeux en ligne, les lunettes qui augmentent la réalité et les robots.

La Convention d’Oviedo avait anticipé ces évolutions en annonçant des principes directeurs destinés à protéger la dignité de l’être humain dans le cadre des progrès de la biomédecine. Mais si nous voulons protéger la dignité humaine au xxie siècle, nous devons nous pencher sur l’ensemble de ces technologies qui envahissent notre intimité, modifient nos capacités et détiennent une foule d’informations nous concernant.

Le premier droit à défendre est celui de la protection des données à caractère personnel. Le traitement loyal et licite des données de masse, l’internet des objets, constitue un véritable défi pour le législateur, car la transparence des algorithmes de profilage n’existe pas réellement. Le modèle d’internet repose avant tout sur la surveillance de masse. Les données massives collectées permettent en un clic de révéler votre orientation sexuelle, votre groupe ethnique, vos opinions politiques ou religieuses, vos traits de caractère. Notre maison, c’est-à-dire notre intimité, qui était auparavant notre château fort, est devenu un endroit où nos mouvements et nos comportements sont constamment surveillés. Le recours au profilage algorithmique peut être discriminatoire. Il faut mettre en place une véritable transparence pour tout ce qui concerne les algorithmes et le profilage. De plus, chacun doit être informé de la valeur des données collectées.

Le droit au respect de la vie privée est un sujet de préoccupation, car des applications informatiques ont été créées dans le but de modifier l’attitude et les comportements des personnes. Des procédés informatiques interactifs tentent de modifier l’attitude et le comportement des gens sans qu’ils sachent qu’ils sont en permanence surveillés sur internet. Ces activités de persuasion portent atteinte à leur autonomie, à leur autodétermination, mais également à leur liberté de penser et de conscience.

Les « coachs électroniques » permettent une forme d’auto-surveillance volontaire, analysant par exemple votre comportement, vos habitudes de sommeil ou votre régime alimentaire. En réalité, les données enregistrées créent une sorte de double informatique de la personne et souvent de manière opaque.

Les robots de soins incarnent l’intelligence artificielle, mais ceux-ci peuvent influencer la qualité des relations humaines en maintenant l’utilisateur dans un monde virtuel, notamment lorsqu’ils prodiguent des soins à des groupes vulnérables comme les enfants, les personnes âgées ou les personnes handicapées. L’assistance mécanique au repas pourrait, par exemple, ne laisser aucun choix, ni aucune autonomie quant à la façon de se nourrir.

Ce rapport analyse la sécurité des robots et des produits de l’intelligence artificielle, les responsabilités respectives du concepteur, de l’opérateur ou de l’utilisateur, mais aussi les conséquences pour la dignité humaine, la liberté d’expression, le droit à la propriété, la sécurité des robots et des produits de l’intelligence artificielle, les discriminations, l’accès à la justice. Par exemple, beaucoup d’objets connectés enregistrent des données à des fins diverses sans la moindre transparence.

C’est à partir de cette analyse que je propose, en tant que rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe : de renforcer la réglementation et de doter les individus de moyens juridiques leur permettant de résister à des pressions ou à des contraintes qui les soumettraient à des technologies qui amélioreraient leurs performances, par exemple, dans les domaines du sport, des jeux ou même du travail ; de définir la responsabilité des acteurs sur les traitements automatiques visant à collecter, à utiliser, à manier des données à caractère personnel ; de définir un cadre commun de normes à respecter pour les produits de l’intelligence artificielle ; d’instituer la transparence et l’information du public, d’imposer la nécessité pour toutes machines, tous robots, tous produits de l’intelligence artificielle, de rester sous le contrôle constant de l’homme ; d’instaurer un droit à l’anonymat et à la tranquillité, c’est-à-dire le droit de refuser de faire l’objet de profils informatiques, d’être coaché, d’être géolocalisé, d’être manipulé et le droit de pouvoir privilégier la qualité des relations humaines par rapport à celles prodiguées par un robot ; d’instituer une coopération entre l’Union européenne et l’Unesco organisant un cadre juridique et des mécanismes de régulation au niveau international. Le réseau européen des Offices parlementaires d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (EPTA, European Parliamentary Technology Assessment), dont l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe est membre, pourrait être un des lieux d’organisation d’auditions publiques et contradictoires, réunissant experts, politiques et citoyens sur toutes ces questions.

Il ne s’agit pas de refuser le progrès technologique. J’ai, en effet, la conviction que le progrès est utile s’il est maîtrisé et partagé, et que l’innovation est souhaitable si elle apporte un service à la société.

Ces propositions de recommandation du Conseil de l’Europe tentent à rechercher un équilibre entre l’intelligence artificielle et les droits de l’homme.

LA PRÉSIDENTE – Merci, M. Le Déaut. Il vous reste 5 minutes pour répondre aux orateurs. J’invite M. Cilevičs à nous faire part de l’avis de la commission des questions juridiques.

M. CILEVIČS (Lettonie), rapporteur pour avis de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – Je félicite M. Le Déaut pour son rapport qui traite de questions qui, jusqu’il y a peu, relevaient encore de la science-fiction. Il est peu aisé de présenter un point de vue juridique sur les questions soulevées par le rapport tant il est vrai que notre savoir-faire en ce domaine est encore limité.

Les caractéristiques particulières des objets d’intelligence artificielle posent problème dans la mesure où ils peuvent parfois produire des résultats qui ne sont pas obligatoirement envisagés dans les instructions définies par les programmateurs. Les résultats procèdent d’une accumulation, d’un traitement et d’une prise en considération automatique de nouvelles données. Ces systèmes d’intelligence artificielle possèdent, d’une certaine façon, la faculté de prendre des décisions de leur propre chef.

D’un point de vue juridique, cela soulève la question de la subjectivité de ces systèmes d’intelligence artificielle. Il convient d’avoir deux critères à l’esprit. D’une part, ces objets peuvent-ils être titulaires de droits à part entière ? Pour l’heure, cette question reste du domaine exclusif de la science-fiction. D’autre part, se pose la question de la responsabilité, qui, de fait, est d’ores et déjà un sujet d’actualité dans notre vie de tous les jours. Qui assume la responsabilité, en cas de dommages infligés par des systèmes d’intelligence artificielle, notamment lorsqu’il s’agit de violations des droits de l’homme ? Selon moi, il convient d’affirmer explicitement que cette responsabilité incombe toujours à l’être humain, indépendamment des circonstances. Dans tous les cas de violations de droits de l’homme découlant de l’utilisation d’objets d’intelligence artificielle, y compris dans les cas où les actions qui ont engendré des torts n’ont pas été ordonnées directement par un décideur ou un opérateur humain, la référence aux prises de décision automatiques par des robots d’intelligence artificielle ne peut exonérer les gérants, les propriétaires ou les programmateurs de ces systèmes.

L’Assemblée a déjà exploré partiellement cette question voilà deux ans dans une résolution sur les drones et les exécutions ciblées. L’Assemblée avait appelé l’ensemble des États membres et les observateurs à s’abstenir de toute procédure automatique ou robotique pour cibler des individus sur la base de communications ou d’autres données collectées par la voie de techniques de surveillance de masse.

La commission des questions juridiques a déposé des amendements qui vont à nouveau dans ce sens. L’idée est d’élargir l’approche afin qu’elle soit applicable non seulement aux drones et aux exécutions ciblées, mais également à tout type de dommages ou de violations des droits de l'homme qui seraient perpétrés avec des systèmes d’intelligence artificielle.

J’invite l’Assemblée à soutenir le projet de recommandation, ainsi que nos amendements, et j’ajouterai, pour conclure, que nous n’en sommes qu’au début du chemin dans l’examen de cette question particulièrement délicate, sur laquelle nous accusons un retard certain mais compréhensible, le développement technologique devançant toujours les réglementations juridiques. Toutefois, notre Assemblée me semble être le lieu de prédilection pour traiter de ce sujet, pour traiter des sujets d’hier et d’aujourd’hui mais également de ceux qui deviendront des sujets d’une actualité brûlante demain.

LA PRÉSIDENTE – La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Je souhaite tout d’abord remercier le rapporteur pour son excellent rapport, qui aborde des questions fondamentales, qui concernent tous les pays du monde.

Le rapport Global Risks 2017 du Forum économique mondial souligne que l’intelligence artificielle représente l’un des plus grands dangers du monde cette année. Les experts ont examiné les évolutions de la technologie et considéré qu’elle exacerbait la menace d’instabilité géopolitique et pouvait porter atteinte à la sécurité de l’emploi et aux relations sociales.

S’agissant justement des relations sociales, il est vrai que nous utilisons aujourd’hui les technologies modernes pour communiquer dans le monde entier. Elles facilitent nos vies et nous rendent plus dynamiques. Nous sommes toujours branchés, prêts à communiquer. Malheureusement, ces relations sont superficielles, dépourvues de sentiments et d’émotion. L’utilisation des technologies modernes par les jeunes générations crée chez elles une incapacité à interagir dans la vie réelle avec les vrais individus.

La vie privée n’existe pas, que nous le voulions ou non. Tout le monde partage sa vie et ses habitudes avec le monde entier, notamment, en postant des photos. Personnellement, je suis très mal à l’aise quand Facebook me propose de nouveaux « amis », qui ne sont que les parents des camarades de classe de mes enfants.

Aujourd’hui, votre téléphone portable sait mieux que vous combien de temps vous devez dormir, marcher et ce que vous devez manger. Les personnes perdent le contrôle de leur vie et de leurs activités, et parfois même de leurs sentiments. Il est en effet bien plus facile d’envoyer un smiley que de dire « je t’aime » à quelqu’un.

Par ailleurs, certains experts craignent que les progrès dans le domaine de l’intelligence artificielle entraînent des pertes d’emplois massives, les postes de travail étant remplacés par des machines. Aux États-Unis, plus de 250 000 robots effectuent déjà des activités prévues initialement pour l’être humain. Combien d’emplois seront attribués à des robots dans les pays de l’Est, où 90 % des technologies mondiales sont produites ?

Si, en temps de guerre, l’utilisation de l’intelligence artificielle peut sauver des milliers de vies, les armes intelligentes et autonomes sont une menace, même pour leur créateur, puisqu’elles peuvent détruire aussi bien des ennemis que des innocents. Et cela sans états d’âme.

On peut craindre, en outre, que l’on dote un jour les robots doués d’intelligence artificielle des pires aspects de l’intelligence humaine. Depuis la nuit des temps, les hommes, et pas uniquement les tyrans qui ont marqué l’Histoire, ont toujours eu la capacité de créer des maux indescriptibles. Que se passera-t-il si les êtres humains deviennent un jour capables de créer, ex nihilo, ces mêmes maux ou ces mêmes dictateurs ?

Il est impérieux de prendre des mesures pour contrôler et maîtriser les incidences négatives de l’intelligence artificielle.

M. COMTE (Suisse), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – En 1816, sur les bords du lac Léman, était écrit un roman qui a connu un immense succès : Frankenstein ou le Prométhée moderne, de Mary Shelley. Ce roman a deux siècles, mais son message, lui, n’a pas pris une seule ride. II met en lumière le risque que la technologie échappe au contrôle de l’être humain, le risque que l’humain soit dépassé par sa propre créature. Ce risque est réel aujourd’hui, il est d’une brûlante actualité.

La technologie évolue très rapidement et il va de soi que l’arsenal législatif doit être modernisé pour tenir compte de cette évolution. La Convention n° 108, citée dans le rapport, date de 1981. Dans ce domaine, c’est la préhistoire ; c’est le temps des dinosaures. Il est indispensable de moderniser ce texte.

Je me permets toutefois une mise en garde, mes chers collègues : ne tombons pas dans le travers des parlementaires. Ils aiment parler et surtout légiférer, parfois un peu trop. Nous voulons régler tous les détails, alors que parfois la meilleure loi, c’est celle à laquelle nous renonçons. Et dans les domaines technologiques, la situation évolue si rapidement que toute loi devient très vite obsolète. Il faut donc avoir la sagesse de légiférer peu mais bien, de légiférer sur les principes, de légiférer par lois-cadres et non de manière trop détaillée.

L’être humain doit toujours rester au cœur de préoccupations lorsque nous parlons de technologie. L’homme doit être en mesure de contrôler la machine. Frankenstein doit rester un roman et non devenir une réalité. Et derrière chaque machine, il doit y avoir un être humain, qui assume la responsabilité des actes effectués par la machine.

Ensuite, chaque être humain doit être en mesure de définir la part de technologie qu’il veut laisser entrer dans sa vie, et notamment dans sa vie privée. La technologie peut constituer un risque considérable pour la sphère privée de chaque individu, et chacun a le droit de vouloir se prémunir contre ce risque. Il faut donc donner à chacun de nouveaux droits, tel que le droit à la tranquillité ou à l’anonymat, comme le souligne le rapport.

Enfin, chacun doit avoir le droit de préférer le contact humain à celui d’un robot. Je pense en particulier au domaine médical et aux soins, notamment pour les personnes âgées. Face au vieillissement de la population et aux coûts qu’il peut engendrer, la tentation est grande de multiplier la présence des machines et de limiter la présence humaine. Cette évolution ne pourra pas être totalement empêchée et elle est en partie justifiée, mais dans un domaine où la relation humaine est fondamentale, il convient de préserver le plus possible le contact humain et de limiter le rôle de la machine au strict nécessaire.

En résumé, il s’agit d’affirmer un principe clair : c’est bien la machine qui doit être au service de l’homme, et non l’inverse.

M. VALEN (Norvège), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Au nom de mon groupe, je tiens à féliciter M. Le Déaut pour son excellent travail sur un sujet passionnant.

Le rapporteur a raison de préciser que les politiques n’ont pas suffisamment conscience de l’impact croissant des sciences et des nouvelles technologies sur nos sociétés et sur chacun d’entre nous dans la vie de tous les jours. C’est la raison pour laquelle nous devons mieux utiliser les instruments du Conseil de l'Europe afin de sensibiliser les responsables et d’agir efficacement. Nous devrions même en faire une priorité politique.

Le rapport souligne à juste titre le rôle important que peuvent jouer les conventions du Conseil de l'Europe pour protéger les individus face à ces technologies.

Les nouvelles technologies sont des instruments potentiels d’oppression comme de libération : il faut rester vigilant dans les deux cas. La Convention d’Oviedo sur les biomédecines est un texte précurseur, de même que la Convention pour la protection des données personnelles, en cours de mise à jour. M. Kox, président de notre groupe, s’intéresse au système conventionnel de l’organisation et de la coopération, et considère que les conventions offrent de bonnes garanties aux personnes individuelles. Nous devons donc les promouvoir. Les liens entre les sciences et les technologies et le processus démocratique me semblent évidents. Nous devons étudier comment ils peuvent interagir pour plus de progrès. Le rapporteur pourra compter sur le soutien de mon groupe. Nous souhaitons plus de coopération entre l’Union européenne, l’Unesco et notre Organisation, pour développer de meilleurs mécanismes de supervision au niveau international.

Le retard pris par le législateur dans le domaine du progrès technologique aurait des conséquences fatales sur les sociétés et les nouvelles démocraties, et tous les pays qui ont encore un déficit de réglementation. Éviter que ces technologies ne soient utilisées à des fins abusives est également une urgence. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe pourrait établir une plateforme d’échanges de vues entre États membres qui ont déjà avancé dans les domaines de la technologie et de l’éthique, tels que mon pays ou les pays scandinaves. Tous les pays qui souhaitent réduire les risques liés aux nouvelles technologies doivent travailler main dans la main.

M. ROCA (Espagne), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Ce débat est peut-être le plus nécessaire de l’époque contemporaine. Fort peu d’espèces sont capables de modifier leur environnement afin de servir leurs propres intérêts. Les êtres humains sont faibles et lents, nos sens sont limités, mais nous avons la capacité de modifier notre environnement, de forger des outils, d’où le développement de la technologie, qui nous permet de devenir les plus rapides et les plus forts. Nous sommes l’espèce la mieux informée.

Mais nous ne sommes pas seulement humains, car nous sommes désormais plus forts ou capables d’aller plus vite. Nous sommes des êtres humains car nous savons ce que la technologie peut nous apporter et ce qu’elle peut nous prendre. L’invention du feu, de la roue, du moteur, notre capacité à tirer profit du vent, ne nous donnent pas des pouvoirs extraordinaires. Nous devons encore apprendre à ne pas mettre la vie de nos congénères en danger. L’effet de spirale déclenché par la technologie et le progrès ne doit pas nous autoriser à régner sur le monde sans limites. Définissons ces limites en respectant les règles de l’éthique. Les plus grands défis déontologiques s’imposent à nous. Internet, les mégadonnées, la bioéthique – je vous renvoie à la Convention d’Oviedo –, voilà les sujets sur lesquels nous devons trouver un consensus.

Et surtout, nous devons nous demander quelles sont nos limites. Voulons-nous accepter tous les progrès réalisés ? Ce débat est essentiel, car nous devons assurer le bien-être de nos concitoyens et compatriotes.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe socialiste* – Je constate la présence d’un grand nombre de jeunes dans nos tribunes, ici, à l’Assemblée. Contrairement à nous, parlementaires, ils sont à l’aise dans le monde numérique. Ils y sont nés, à l’ère des smartphones et d’internet. Ils sont attentifs à ces technologies qui évoluent rapidement et nous dépassent.

J’oserai une comparaison. Les nouvelles technologies sont assises au volant d’une Ferrari, et nous, législateurs, sur un tracteur, entretenant le fol espoir de les rattraper. Je ne suis pas Don Quichotte – Monsieur Roca, cette référence est un hommage à votre pays ! – mais je vois surgir des développements préoccupants et inquiétants, notamment dans la collecte de données. Un grand nombre de profils existent pour chacun d’entre nous. Il suffit d’avoir acheté des produits dans un supermarché pour que des algorithmes se servent de ces achats pour établir un profil potentiellement inquiétant. S’ajoutent les dangers sur le plan social. Jusqu’à 49 % des emplois pourraient être remplacés par le numérique et la robotisation.

Je soulignerai un autre danger. Depuis un siècle, nous vivons selon le contrat social suivant : ceux qui travaillent paient des impôts, tout comme l’entreprise. Mais si de moins en moins de gens travaillent, tous remplacés par des robots, il en découlera un manque à gagner fiscal considérable. Si, par ailleurs, ces technologies permettent aux entreprises de devenir de plus en plus transnationales, et d’éviter de plus en plus la fiscalité nationale, comment ferons-nous pour faire face à nos obligations sociales dans la santé, l’éducation et dans bien d’autres domaines ?

M. Comte a déclaré que c’est toujours à l’être humain que doivent incomber les responsabilités en dernière instance. En Australie, un robot vit dans l’eau depuis six mois, sans lien avec aucune station. Son seul objectif est de tuer des étoiles de mer. La société créatrice du robot a déjà promis que cette technologie ne serait jamais vendue à aucune armée du monde. Nous pouvons décider de la croire. L’entreprise va récupérer au bout des six mois ce robot et tirera les enseignements de cette expérience. Soit.

Mais la vie humaine exige le contact humain, surtout pour ceux qui, au terme d’une vie souvent difficile, ont besoin d’aide. Va-t-on proposer un robot aux personnes en fin de vie pour les aider ? Non.

Nous avons besoin de réglementations, et pas seulement d’une convention. Des dispositions nationales, un train de mesures et de conventions nous sont nécessaires, qui traitent l’ensemble du problème.

Sur le plan politique, il faut que nous déterminions si cette forme de technologie est de nature à remédier à la pénibilité du travail ou s’il ne s’agit que de réduire le nombre d’emplois et d’augmenter les profits des entreprises. La question est fondamentale. C’est en nous en saisissant que nous éviterons les effets néfastes que la technologie pourrait avoir sur nos sociétés.

M. CEPEDA (Espagne)* – Je veux à mon tour féliciter le rapporteur : son remarquable rapport est d’une très grande importance. J’ignore si nous aborderons les problèmes exactement sous le même angle que lui, mais il est bien certain que nous devons, au Conseil de l’Europe, consentir de réels efforts pour analyser la réalité technologique qui est aujourd’hui la nôtre. Il faut parler des robots.

Hier, nous avons appris qu’un être humain avait été arrêté pour avoir agressé un robot agent de police aux États-Unis. Où sont donc les limites ? Il faut tracer une frontière claire entre les robots et l’être humain. Tous ces dispositifs intelligents doivent toujours être au service des êtres humains. Je suis préoccupé non seulement par la question du traitement des données mais aussi par l’évolution de notre espèce. Si, comme je le disais, les dispositifs intelligents doivent toujours être au service des êtres humains, dans bien des occasions, la technologie va au-delà de ce qui relève habituellement de notre responsabilité. Il faut y réfléchir, les grandes institutions et les pouvoirs publics doivent intervenir.

Tous les parlements européens devraient fixer des règles de nature à permettre une réflexion en amont, notamment sur l’influence de ces phénomènes sur les nouvelles générations. Il faut former les jeunes, mais aussi nos institutions. Chacun doit comprendre qu’une information publiée sur les réseaux sociaux peut avoir toute une série de conséquences. Dans bien des sphères, dans bien des domaines, en bien des occasions, ce sont les plus jeunes qui sont affectés – comme ces jeunes invités aujourd’hui présents dans les tribunes pour assister à nos débats. Ils ne sont pas toujours conscients des risques.

Le rapport souligne donc à juste titre la nécessité d’une analyse et d’une réflexion sur le cadre normatif qu’il importera de définir. Ce corpus de normes à venir devrait permettre une convergence – il est question de convergence technologique, mais il faudrait aussi une convergence normative à l’échelon européen. Très souvent, en matière de lois, chacun suit sa route comme bon lui semble. Il faut cependant bien comprendre que les grandes entreprises conçoivent, elles, des algorithmes commerciaux, des stratégies et des plateformes à l’échelle mondiale. Malheureusement, les instances politiques n’en débattent qu’à l’échelon local ou régional.

Le rapport ouvre donc des perspectives. Prenons conscience de ce qui se passe et posons des limites. M. Schennach évoquait la possibilité que les robots puissent, dans un avenir très proche, jouer un rôle en matière des fonds publics. Oui, il faut y réfléchir : la technologie permet de remplacer la main d’œuvre humaine par des robots. Ce que réalisaient les êtres humains pour les systèmes d’administration publique et pour les systèmes financiers publics sera bientôt fait par des robots. Il faut donc bien poser des cadres normatifs dans nos pays. Travaillons-y.

Encore merci, Monsieur le rapporteur.

M. GRIN (Suisse) – Les nouvelles technologies et leurs applications ne seront pas sans conséquences sociales, éthiques, voire juridiques. La préservation de la dignité humaine doit à cet égard être une préoccupation importante pour notre Conseil. Le progrès technologique doit, selon l’adage, être au service de l’homme et non le contraire. La technologie moderne, et singulièrement la robotique, devrait faciliter les contacts humains, non les remplacer.

L’omniprésence des nouvelles technologies et leurs applications estompent souvent la distinction entre l’homme et la machine, entre le monde physique et le monde virtuel. Cela rend les rapports humains plus distants, mais aussi plus rapides. Les opérations de traitement automatisé visant à collecter, manier et utiliser les données à caractère personnel doivent être protégées par le renforcement de la transparence et de la réglementation : c’est le rôle des pouvoirs publics, qui doivent mettre les opérateurs en face de leurs responsabilités. Tout robot, toute voiture connectée, toute machine dotée d’intelligence artificielle doit rester sous le contrôle humain. Le respect de la vie privée doit être garanti en évitant que des appareils ne permettent, à l’insu des utilisateurs, la géolocalisation et l’intrusion dans la vie privée.

Sur le plan politique, nous devons prendre conscience de l’incidence croissante de la science et de la technologie sur notre société en développant le caractère démocratique de nos divers échanges. C’est par l’éducation de notre jeunesse et l’intégration dans les programmes scolaires de la promotion de débats éclairés sur les avancées scientifiques et technologiques – en y incluant les questions éthiques – que cette prise de conscience aura lieu.

Dans un monde en mouvement rapide, l’évaluation scientifique est une condition essentielle pour que la démocratie représentative continue de jouer tout son rôle dans le fonctionnement de nos institutions. Nos parlements respectifs doivent favoriser et mettre en place des programmes éducatifs et des échanges réguliers entre les sciences humaines, sociales et technologiques, en abordant dans ces échanges la liaison entre la recherche fondamentale et ses implications pour l’économie et la société.

L’évolution de la biomédecine, avec l’ouverture de possibles manipulations génétiques, la procréation médicalement assistée, la fécondation in vitro avec transplantation d’embryons nécessitent de nouvelles réglementations éthiques et juridiques. Leur élaboration est en cours, non sans des débats importants entre les chercheurs et la société. Il sera important pour l’avenir de garantir un cadre juridique cohérent et des mécanismes de supervision efficaces au niveau international.

L’excellent rapport de M. Le Déaut évoque tous les problèmes liés à la convergence technologique, à l’intelligence artificielle et aux droits de l’homme. Notre liberté individuelle dépendra de la manière dont ces problèmes seront évalués et encadrés. Le principal objectif doit être la préservation de la dignité humaine.

M. SCHNEIDER (France) – En un peu plus de 70 ans, nous sommes passés du premier ordinateur, l’ENIAC – Electronic Numerical Integrator and Computer –, à plus de 10 milliards d’appareils connectés à internet dans le monde. C’est une réalité : les appareils connectés sont dorénavant plus nombreux que les êtres humains. Il y a plus de 1,7 million de robots à travers le globe – et leur nombre ne cesse d’augmenter. Oui, la science a dépassé la fiction. Ces données doivent nous conduire à nous interroger ; elles nous obligent à réfléchir à l’avenir de l’humanité, au monde que nous voulons léguer à nos enfants et à nos petits-enfants.

Le philosophe allemand Hans Jonas estimait que l’homme, après avoir conquis progressivement la nature grâce à son savoir scientifique, risquait de voir la technique lui échapper. Il appelait ainsi les scientifiques et les politiques à réfléchir aux conséquences des applications techniques. C’est l’objectif de ce rapport. Je remercie notre rapporteur, Jean-Yves Le Déaut, de nous avoir soumis ces précieuses recommandations.

Oui, il devient urgent de nous préoccuper des conséquences de l’utilisation de nos données personnelles, des améliorations constantes du machine learning, du développement croissant des intelligences artificielles, de l’utilisation accrue des robots dans notre société. C’est pourquoi j’appelle cette Assemblée à se prononcer sur la création d’un comité d’experts regroupant des scientifiques, des élus, des représentants syndicaux, des philosophes, afin qu’ils nous fournissent une expertise technique, éthique, voire normative, sur cet important sujet. Bien entendu, Monsieur le rapporteur, ce comité devra travailler main dans la main avec le Parlement européen et les Nations Unies.

Les Gafa – Google, Apple, Facebook et Amazon – ont créé l’an dernier une fondation chargée de promouvoir une pratique responsable et sans danger de l’intelligence artificielle. Les géants du web sont dorénavant juges et parties. Il est du devoir de cette grande Assemblée de faire entendre sa voix et de participer ainsi à la construction du monde de demain.

Je ne puis m’empêcher de vous faire part de ma surprise, en me remémorant une caricature que j’ai vue il y a 50 ans de cela. Ce dessin représentait un atelier de mécanique où des humains travaillaient sous l’autorité d’un contremaître, lequel était un robot à forme humaine. Il montrait aussi deux visiteurs, qui, dans l’atelier, se faisaient part de leur perplexité : « Where will it end ? » – « Où cela s’arrêtera-t-il ? ». C’est cette question que je vous pose à nouveau ce matin.

L’humanité vivra, dans les prochaines décennies, une véritable révolution. Il nous incombe de bâtir un monde où chacun aura sa place. L’humanité n’a pas le droit au suicide, c’est à l’homme de rester maître de la technique en construisant une éthique de responsabilité. Pour toutes ces raisons – vous l’aurez compris, mes chers collègues –, j’approuve sans réserve l’excellent rapport de Jean-Yves Le Déaut.

M. REISS (France) – Le 22 avril dernier, des marches pour la science ont eu lieu dans plus de 500 villes dans le monde. Au-delà de la défense de la recherche scientifique aux États-Unis, ces marches avaient aussi pour objectif de faire prendre conscience de l’importance de la culture scientifique, afin que chaque citoyen puisse fonder ses choix sur des idées construites plutôt que des idées reçues.

Dans ce contexte, l’excellent rapport de Jean-Yves Le Déaut nous conduit à réfléchir aux conséquences des progrès scientifiques sur nos sociétés. Il pose aussi la question de la responsabilité des usagers et des décideurs face aux questions éthiques posées par l’intelligence artificielle.

La transition numérique a placé les algorithmes au cœur de nos vies, qu’il s’agisse des moteurs de recherche ou de l’affectation des étudiants à l’université, voire de certains diagnostics médicaux. Cela pose la question du processus de décision : quelle est la responsabilité des acteurs publics ou privés qui utilisent ces nouveaux outils ? Par exemple, dans le cas d’un accident lié à l’utilisation d’un robot en chirurgie, qui doit être tenu responsable, la société qui produit le robot ou l’hôpital qui l’a acheté ? Autre exemple : en cas d’erreur dans l’affectation d’un étudiant, qui doit être tenu pour responsable, l’éducation nationale ou la machine qui traite les données ? On voit bien que la défense des droits des usagers devra évoluer pour s’adapter à la présence accrue de l’intelligence artificielle.

Monsieur le rapporteur, vous avez raison d’insister sur la nécessité de renforcer la protection des données à caractère personnel. À l’heure du big data, ce contrôle revêt un double enjeu pour la personne : savoir quand les données sont traitées et surtout pouvoir reprendre la main sur les données collectées.

C’est d’autant plus important que ces données peuvent être utilisées pour le profilage des citoyens, non seulement en fonction de leurs habitudes de consommation, mais aussi de leur origine ethnique, de leurs convictions religieuses ou politiques, voire de leur orientation sexuelle. Cela représente à mes yeux un danger réel pour la démocratie, alors que les partis extrêmes se renforcent et que de plus en plus d’États, sur notre continent, adoptent des lois liberticides. De plus, les mégadonnées sont la plupart du temps traitées hors d’Europe : il est indispensable de retrouver notre souveraineté sur les données produites dans nos États, pour assurer le respect de la vie familiale et personnelle, qui est un pilier de la Convention européenne des droits de l’homme.

Je voudrais revenir sur un autre point : les tâches que nous confions à l’intelligence artificielle. La présence de plus en plus courante de robots humanoïdes dans les maisons de retraite m’inquiète. Je m’interroge sur l’avenir d’une société humaine où les plus vulnérables – c’est-à-dire nos anciens, les handicapés et peut-être bientôt nos enfants – seraient confiés à des machines, fussent-elles aussi sympathiques que le robot Nao. Mais il y a pire : certains envisageraient d’utiliser l’intelligence artificielle dans le domaine militaire au nom du droit humanitaire, au prétexte que les armées de robots permettraient d’alléger les souffrances humaines. Pensez-vous réellement, mes chers collègues, que cela favoriserait la paix ?

Nous devons prendre nos responsabilités et, comme le demandent plusieurs scientifiques, mieux nous former pour mieux décider dans ces domaines si particuliers. L’ère numérique peut être compatible avec la démocratie. Pour cela, nous devons voter et mettre en œuvre les propositions de cet excellent rapport.

Mme LE DAIN (France) – Ce texte est important, et même essentiel : il fallait que le Conseil de l’Europe le soumît à notre vote.

On dit que notre monde change, mais il a déjà changé : le big data est bien présent, de même que les objets connectés, que l’on retrouve dans toutes les mains. Dans nos voitures, le moindre élément du moteur est connecté à l’entreprise qui a fabriqué le véhicule, laquelle enregistre toutes les données et sait exactement à quelle vitesse nous roulons, à combien de tours par minute nous faisons marcher le moteur et où nous allons. Cela permet aux constructeurs de corriger leurs produits, de proposer des solutions techniques plus performantes.

Ce nouveau monde est donc déjà le nôtre. Je ne pense pas que ce soit un monde orwellien, parce qu’au bout du compte, dans nos démocraties, nous vivons tout de même plutôt mieux qu’avant. Nous vivons plus longtemps, en meilleure santé ; nous sommes mieux soignés, mieux nourris, et cela même si, en tant qu’individus, nous nous laissons parfois aller à trop manger, à mal nous comporter, à mal nous soigner, à prendre des drogues – car il y a dans nos pays beaucoup de consommateurs de drogue.

Je le répète, ce nouveau monde est déjà le nôtre. Il était donc temps que le Conseil de l’Europe se saisisse de cette question, et l’aborde avec sang-froid, en faisant la part de l’inquiétude et de l’espoir que suscitent ces nouvelles technologies. C’est précisément l’esprit du rapport que nous présente M. Le Déaut : faisons attention, mais ne nous bridons pas trop, car le reste du monde continue à avancer. Or le monde est vaste, et notre Organisation, le Conseil de l’Europe, a beau représenter 850 millions de personnes, le monde, lui, en compte 7 milliards. Et la technologie est partout : en Afrique, par exemple, il y a une quinzaine d’années, il n’y avait pas de téléphone, fixe ou mobile. Aujourd’hui, sur ce continent, beaucoup de personnes ont des téléphones portables et sont connectées non seulement à leur famille, mais aussi au reste du monde. De plus, le PIB de ces pays augmente.

Le monde change, et la science a toujours représenté un outil, un moyen d’améliorer la vie humaine dans nos démocraties. On ne peut pas arrêter la science, mais on doit la contrôler : c’est le rôle du législateur. Il y a deux ans, un peu tardivement à mon sens, l’Union européenne a adopté une directive sur la protection des données personnelles. C’est une initiative forte qui fixe un certain nombre de règles, mais qui laisse aux États le soin de définir d’abord leur propre réglementation en la matière. L’Union européenne ne prend ses responsabilités que dans un second temps, si les États n’y arrivent pas. Nous sommes donc en train de construire, au niveau de l’Union européenne, un droit à la fois national et européen, en mettant la responsabilité au niveau de l’homme.

Certes, il faut éduquer les jeunes et les rendre conscients dès le début, mais cela ne suffit pas. Il faut apprendre à coder, à comprendre comment ce monde fonctionne, apprendre à s’en servir et à s’en méfier, s’en défier. Mais se méfier n’est pas avoir peur ; se méfier, c’est construire des outils pour agir, interagir dans un monde qui a changé.

Aux époques antérieures, il y avait la puissance publique – l’État –, la puissance économique et, éventuellement, la puissance religieuse – dont j’espère bien qu’elle est en passe d’être cantonnée à la sphère privée, même si j’ai parfois quelque inquiétude à ce sujet. Mais aujourd’hui, on ne peut plus se contenter de la puissance publique étatique et de la puissance économique : les ONG sont là. La société s’est organisée, ménageant des espaces intermédiaires. Plus encore, aujourd’hui, les citoyens eux-mêmes veulent intervenir de manière encore plus directe.

Telles sont les idées exposées dans ce rapport, et j’en remercie M. Le Déaut, qui pose les fondamentaux. Il explique tout simplement que, dans un monde dont il faut bien se saisir car on ne peut en changer, les robots et les biotechnologies sont là. Quand cela nous arrange, nous nous en servons ; quand ils nous dérangent, nous en avons peur. Changeons ce mode de raisonnement et soyons conscients, habiles et, ici au Conseil de l’Europe, humanistes.

LA PRÉSIDENTE – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Monsieur le rapporteur, il vous reste 6 minutes pour répondre aux orateurs.

M. LE DÉAUT (France), rapporteur – Je voudrais me féliciter de la qualité de ce débat.

Je disais, en introduction, que le monde politique n’avait peut-être pas suffisamment pris conscience de l’importance de ces sujets. Je le redis à nouveau et félicite mes collègues du Conseil de l’Europe qui ont bien voulu aborder ce débat. Je regrette néanmoins qu’il ait été relégué ainsi en fin de session, ce qui montre qu’il n’est pas considéré comme l’un des débats les plus importants de notre Assemblée. Il en va de même dans tous les parlements car, face à une science et à une technologie qui prennent plus de poids dans la politique, nous ne savons comment aborder la question. Elle est donc traitée de manière subsidiaire. Or il convient de la traiter de manière primordiale. Je remercie donc M. Cilevičs d’avoir apporté un complément juridique fort à ce rapport, car les sujets abordés aujourd’hui seront les sujets politiques de demain.

L’un de nos collègues vient de faire une allusion à la Marche pour les sciences qui s’est déroulée dans le monde entier samedi dernier. Le principal objectif de cette marche était de lutter contre le fait que, pour certains, les croyances ou les opinions valent autant que le fondement scientifique. Certains, s’appuyant sur le créationnisme, remettent en cause le darwinisme et l’évolution des espèces ; d’autres rejettent le Big Bang et la création de la terre ; d’autres encore sont climato-sceptiques. Quelles que soient nos opinions, nous devons nous appuyer sur les fondements de la science. Le monde scientifique et technologique ne saurait s’approprier seul les connaissances : celles-ci doivent être en permanence discutées avec la société.

Je voudrais maintenant revenir sur quelques-uns des éléments que vous avez abordés au cours de ce débat très riche.

Tout d’abord, aujourd’hui, tout se fonde sur les mégadonnées et sur la puissance de calcul des ordinateurs, laquelle, d’ailleurs, va continuer de croître. Nous aurons la possibilité, en quelques clics, de connaître les réponses à toutes les questions que nous pouvons nous poser, mais aussi à celles dont on préférerait qu’elles ne le soient pas. Quand Mme Fataliyeva dit qu’il n’y a rien de privé dans notre vie, c’est effectivement l’évolution qui se profile.

Le Conseil de l’Europe doit réfléchir et même être en avance sur la réflexion, mais il doit aussi inciter à la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle. Autrement dit, il faut veiller à ce qu’il y ait un partage de toutes ces questions avec la société. Sans cela, les incompréhensions se creuseront et les opinions ou les croyances finiront par dépasser le savoir et la réflexion scientifiques. Il faut réfléchir, comme certains d’entre vous l’ont dit, à la révolution que constitue l’évolution du destin de l’humanité : c’est un élément très important.

Vous avez également rappelé – je cite là tous mes collègues, les cinq porte-parole des groupes et les cinq qui sont intervenus par la suite – que l’homme doit toujours contrôler la machine, que celle-ci doit toujours rester au service de l’homme.

M. Comte a relevé le retard pris par la législation – et il n’a pas été le seul d’ailleurs à le faire –, tout en précisant qu’il fallait se garder de trop légiférer. Il a raison, mais nous ne devons pas non plus nous abstenir de légiférer, car il importe de donner un cadre aux évolutions technologiques que nous voyons se profiler et aux conséquences qu’elles pourraient avoir.

Il n’y a plus rien de privé dans notre vie ; M. Comte le disait aussi. Dès lors, nous devons, comme je vous y invite dans le rapport, promouvoir le droit à l’anonymat et à la tranquillité et offrir la possibilité – cette idée a été exposée par M. Grin – de privilégier le contact humain à celui d’un robot.

Enfin, M. Valen, me semble-t-il, souhaitait qu’une plateforme soit créée. Il existe déjà un réseau parlementaire européen d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, dont la Norvège fait partie, et nous pouvons inciter nos collègues à travailler avec les organismes d’évaluation, de technology assessment qui existent au sein de nos parlements nationaux.

Voilà les quelques réponses que je souhaitais apporter, en me félicitant de la qualité de ce débat. Nous n’avons pas tout traité. Comme le disait M. Schennach, nous n’avons pas abordé le lien entre l’intelligence artificielle et le travail. Nous n’avons pas non plus traité des applications militaires ; comme le rappelait M. Cilevičs, cela a fait l’objet d’un texte précédent. Mais ce travail ouvre une porte qu’il faudra veiller à ne pas refermer pour poursuivre la réflexion du Conseil de l’Europe sur ces sujets.

M. Rouquet, Vice-Président de l’Assemblée, remplace Mme Gambaro au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le président de la commission, vous disposez de 2 minutes pour répondre à votre tour aux orateurs.

M. ARIEV (Ukraine), président de la commission de la culture* – Permettez-moi d’adresser mes remerciements à M. Le Déaut, qui était notre rapporteur général sur l’évaluation de l’impact de la science et des technologies. Il fut l’initiateur du travail réalisé par notre commission sur ce rapport ô combien opportun et important.

Je sais que l’établissement de l’ordre du jour des sessions plénières de l’Assemblée parlementaire est un véritable casse-tête, mais j’estime qu’il est regrettable que ce débat n’ait pas pu être programmé à un moment qui aurait permis la participation du plus grand nombre de nos membres. C’est toujours la situation du vendredi dans cette enceinte. Mais c’est aussi un peu ce que nous connaissons dans nos parlements nationaux, n’est-ce pas ? Ce n’est guère une surprise. Il s’agit d’une question à laquelle nos parlements nationaux devraient accorder une plus grande attention. J’espère que le travail que nous avons mené à bien aura cet effet.

C’est vrai, le développement de l’intelligence artificielle a déjà de nombreuses incidences sur nos vies. Les robots ne sont pas seulement utilisés dans des domaines tels que la médecine, l’agriculture, l’industrie : ils conduisent les voitures et pilotent les drones. Des dispositifs intelligents changent aujourd’hui la nature d’internet, lequel revêt désormais les caractéristiques d’un système robotique gigantesque, puisqu’il a acquis la capacité d’apprendre par le moyen du traitement de volumes de données massifs.

Jusqu’à présent, la majeure partie des débats sur la bioéthique et les pans pertinents des traités relatifs à la protection des droits de l’homme avaient mis l’accent sur la nature invasive des technologies biomédicales installées au sein même de nos organismes. La Convention d’Oviedo du Conseil de l’Europe a établi un certain nombre de principes directeurs au moment d’assurer la préservation de la dignité humaine dans l’application des progrès en biomédecine. Mais, depuis lors, toute une gamme de techniques fondées sur les technologies de l’information et de la communication a vu le jour. Même si elles opèrent hors de nos corps, elles affectent le comportement physique, mental et social des êtres humains. Ces technologies naissantes posent de nombreuses questions éthiques et sociales ; elles ont des incidences en matière de protection des droits de l’homme. Notre commission a eu le grand privilège de mener des débats absolument passionnants sur les évolutions qui sont apparues. Il faut absolument que nous discutions de ces graves questions qui prennent une part croissante dans notre vie quotidienne.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission de la culture a présenté un projet de recommandation sur lequel 4 amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission proposait de considérer les amendements, qui ont tous les quatre été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président ?

M. ARIEV, président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

Nous allons donc procéder directement au vote sur le projet de recommandation contenu dans le Doc. 14288, tel qu'il a été amendé.

Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet de recommandation, amendé, est adopté à l’unanimité des 43 votants.

LE PRÉSIDENT – Je félicite le rapporteur et la commission pour leur excellent travail et regrette moi aussi que nos collègues ne soient pas venus en plus grand nombre pour écouter ce qui s’est dit ce matin.

2. Projet de convention du Conseil de l’Europe
sur les infractions visant des biens culturels

LE PRÉSIDENT – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Schennach, au nom de la commission de la culture, sur le projet de convention du Conseil d’Europe sur les infractions visant des biens culturels (Doc. 14300 et 14290).

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. SCHENNACH (Autriche), rapporteur de la commission de la culture, de la science, de l’éducation et des médias* – Monsieur le Président, chers collègues, j’aimerais prendre deux minutes sur mon temps de parole pour soulever un point qui me tient à cœur.

Ce qui s’est passé cette nuit en Macédoine est un véritable scandale. Qu’un parlement soit ainsi pris d’assaut et que des gens y soient agressés ; que des casseurs se coalisent avec un gouvernement élu ; que des femmes soient traînées par les cheveux et jetées à terre ; que l’on mette le feu aux poudres de cette manière, alors que la situation est déjà suffisamment explosive, tout cela dépasse l’entendement. Hier matin, lors de la réunion de la commission de suivi, j’ai dit qu’il fallait mettre fin au postsuivi et replacer la Macédoine sous le régime du suivi. Ce qui s’est passé hier devrait tous nous alerter. Pour avoir présidé cinq commissions ad hoc sur ce pays, je sais ce qui s’y passe et cela me touche personnellement.

Nous sommes aujourd’hui appelés à débattre, selon la procédure d’urgence, d’un projet de convention élaboré par le Comité des Ministres. J’ai eu le plaisir de parler avec des procureurs et des juges, mais aussi avec le secrétariat compétent du Conseil de l’Europe sur cette question. Une première conférence s’est tenue à Lucques, et une seconde ici, à Strasbourg, durant une semaine, afin d’insister sur l’urgence de cette question.

Le trafic et le vol de biens culturels – d’objets qui appartiennent à notre histoire et à notre identité – fait partie des modes de financement privilégiés des groupes terroristes. C’est pourquoi il est important que cette convention voie le jour. Elle vient s’ajouter à la Convention de l’Unesco pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel et aux conventions visant à lutter contre le terrorisme. Il faut prendre une mesure supplémentaire : la protection des biens culturels doit être ancrée dans le droit pénal de tous nos États membres. Tel est l’objet de ce projet de convention. J’invite au passage les quatre États membres du Conseil qui n’ont pas encore ratifié la Convention de l’Unesco de 1970 à le faire : nous sommes tout de même en 2017 ! La nouvelle convention constitue un progrès qualitatif qui permettra d’agir plus efficacement contre le vol et le trafic de biens culturels.

J’aimerais féliciter la brigade spéciale des carabiniers italiens : les 300 hommes et femmes qui la composent connaissent mieux les catalogues des grandes ventes organisées dans le monde entier que n’importe quel collectionneur, voire n’importe quelle université.

L’efficacité d’une brigade spéciale n’est plus à démontrer. Si vous comptez vous rendre en Italie cet été, allez donc à Florence, au musée des Offices : les carabiniers y ont organisé une exposition de tous les biens culturels qu’ils ont saisis, sortis du marché noir, retirés des griffes des criminels. Ils ont pu également prouver que des héritiers avaient fait de fausses déclarations de vols de bijoux pour les vendre ensuite sur les marchés parallèles. Il faut intervenir à tous les niveaux pour lutter contre ce phénomène.

Cette exposition présente également des objets en provenance de Palmyre, en Syrie : si le site a été détruit, il n’en a pas été de même de ses biens culturels. Les carabiniers ont ainsi saisi des statues appartenant à ce site, qui étaient en route pour la Suisse, pays qui devrait réfléchir d’urgence à renforcer son cadre législatif. Un grand nombre de ces biens transitent en effet par la Suisse avant d’atterrir aux États-Unis.

Je souhaite, dans le cadre de l’élaboration de ce projet de convention, féliciter quatre pays, qui sont la source fréquente de tels trafics : la Grèce, l’Italie, l’Espagne et Chypre. Ils sont les quatre moteurs de ce projet de convention. Si ce projet a pu avancer aussi vite, c’est parce que le financement du terrorisme est un problème grave. J’en appelle à vous tous : évoquez ce sujet avec vos gouvernements et vos parlements respectifs. Dès le mois de mai, des ministres apposeront leur signature au bas du texte de cette convention. Fixons-nous pour objectif l’entrée en vigueur, grâce à de nombreuses ratifications, de la convention d’ici à la fin de l’année.

J’espère également que vous adopterez un amendement que j’ai déposé et qui invite le Comité des Ministres à ouvrir la signature de cette convention à tous les pays tiers qui le souhaiteraient.

Il faut mettre un terme à ces trafics qui puisent dans notre patrimoine et notre identité culturelle, afin que tous ces biens précieux de notre histoire n’atterrissent pas dans les mains de particuliers ou ne servent pas à une optimisation de leur valeur sur des marchés parallèles, en vue de financer, le plus souvent, des groupes terroristes.

Cet appel, je l’adresse à vous tous. J’ai rarement vu d’aussi près l’élaboration d’un projet de convention, qui a mis à contribution des procureurs, des juges et des magistrats venus de tous les États membres. J’ai compris combien chaque mot pèse. Le paragraphe 10 en est l’illustration. Sa rédaction n’est pas encore définitive : il appartiendra au Comité des Ministres d’en décider. Toutefois, nous voyons bien déjà à quel point le sujet est sensible.

Ce projet de convention, loin d’ouvrir un débat historique, concerne un problème actuel. Il ne s’agit pas de savoir si Nefertiti doit rentrer chez elle ou non. Ce n’est pas cela, notre sujet. C’est d’aujourd’hui que nous parlons, de marchés noirs, de marchés illégaux et de transactions qui se déroulent à l’heure où je vous parle. C’est la raison pour laquelle je vous invite à sensibiliser vos parlements et gouvernements afin que chacun adhère à cette convention. Le terrorisme ne doit plus pouvoir compter sur l’argent de ce trafic.

LE PRÉSIDENT – Monsieur Schennach, je vous remercie à la fois pour votre excellent rapport et pour la passion que vous avez mise à le présenter. Je vous remercie également pour l’information que vous nous avez transmise : nous partageons évidemment vos inquiétudes sur la Macédoine.

Il vous restera 4 minutes pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-parole des groupes.

M. van de VEN (Pays-Bas), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Au nom de l’ADLE, c’est avec plaisir que j’ai examiné ce projet de convention du Conseil de l’Europe sur les infractions visant des biens culturels, préparé sous la responsabilité du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et envoyé à l’Assemblée parlementaire par une lettre datée du 19 avril 2017. J’ai également étudié le rapport préparé par la commission de la culture, daté du 26 avril 2017 et préparé par M. Schennach.

L’ADLE se félicite de ce projet de convention, ainsi que de ce rapport. Elle félicite également tous ceux qui ont contribué à la préparation du projet de convention ainsi que M. Schennach pour son rapport. En fait, pour l’ADLE, les deux documents sont connectés. Le rapport de M. Schennach complète le projet de convention sur plusieurs points fondamentaux.

L’objet de ce projet de convention vise essentiellement à considérer comme des infractions pénales la destruction, la dégradation et le trafic intentionnel de biens culturels à des fins lucratives. Les biens culturels sont essentiels à la préservation de notre patrimoine culturel et des richesses de l’humanité. Les biens culturels mis à la disposition du grand public donnent, à chacun, la possibilité d’enrichir son existence. Je crois sincèrement que, sans histoire, nous n’avons pas d’avenir.

Ce projet de convention remplace manifestement la Convention de Delphes de 1985, dont l’objectif était également de combattre le trafic des biens culturels au moyen de la législation pénale et de promouvoir la coopération entre les États. Malheureusement, la Convention de Delphes n’est jamais entrée en vigueur. Après 32 ans, ce projet de convention est opportun, comme le montrent clairement les exemples choquants, pour ne pas dire bouleversants, de la destruction de Palmyre ou, auparavant, de sites archéologiques irakiens – cette liste n’étant pas exhaustive.

Ces voleurs, trafiquants, commerçants, criminels ou instigateurs peu scrupuleux, qu’il s’agisse d’individus ou de personnes morales, devraient être traduits devant la justice sur la base de nos valeurs en matière de droits de l'homme, de démocratie et de prééminence du droit. L’ADLE appuie en conséquence le projet de convention.

Notre groupe soutient également avec fermeté les propositions qui figurent dans le rapport de M. Schennach. Les recommandations du rapport, sur lesquelles nous sommes appelés à voter, sont essentielles pour renforcer l’effet du projet de convention. L’article 5.2 du projet de convention devrait être supprimé. Cet article donne en effet aux États la possibilité de se réserver le droit de prévoir des sanctions non pénales au lieu de sanctions pénales. L’ADLE est favorable à ce que les activités illégales visant des biens culturels commises intentionnellement dans le dessein d’obtenir des profits illicites constituent par définition des infractions pénales.

L’article 15.c sur les circonstances aggravantes devrait être amendé afin de mentionner explicitement les groupes terroristes comme délinquants potentiels. L’ADLE est favorable à la proposition visant à amender l’article 22.5 pour conserver un registre des infractions comprenant des informations détaillées sur les personnes reconnues coupables de ces infractions et sur les peines prononcées à leur encontre.

Par ailleurs, notre groupe souhaite qu’on puisse ouvrir la signature de cette convention à tout État sur invitation du Comité des Ministres.

L’ADLE est donc favorable à ce projet de convention et appuie l’adoption des recommandations figurant dans le rapport de la commission de la culture.

M. KOX (Pays-Bas), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Si l’on se sert d’un large prisme, on peut affirmer que les parlements ne sont pas seulement ces institutions politiques pour lesquelles nous travaillons : ils font également partie du patrimoine culturel de l’Europe.

En cela, je soutiens totalement les propos de M. Schennach sur l’agression terrible dont a fait l’objet le Parlement de Macédoine hier soir.

Au nom de la commission du Règlement, je prépare une résolution sur l’efficacité de la coopération intergouvernementale européenne. Une grande partie de cette coopération fait l’objet de nos conventions. J’espère que mes recherches mettront en lumière que nombre d’entre elles ont fait la preuve de leur efficacité. La Convention européenne des droits de l’homme fait partie de ce corpus de 200 conventions qui, dans leur ensemble, sont efficaces ; pour autant, elles ne peuvent jamais garantir le succès de l’entreprise à laquelle elles s’attachent.

Le rapport de M. Schennach l’évoque et à cet égard je fais suite aux propos de M. van de Ven : la Convention de 1985, qui était une bonne convention, a été ouverte à signature et à ratification. Pourtant elle a connu l’échec car peu de pays l’ont signée et ratifiée, ce qui montre bien que si une convention est un outil pour atteindre le succès, elle ne le garantit pas. Partant, il est essentiel que nous parvenions à nos fins et que nous n’en restions pas aux mots en produisant une convention qui n’aurait aucun effet.

Ainsi que l’a souligné le rapporteur, les infractions criminelles qui ont visé tout récemment des biens culturels montrent que nos États membres ont besoin d’un instrument efficace, qui serait également ouvert à des États non membres, afin de mieux protéger nos biens culturels, faute de quoi nous perdrons des éléments constitutifs de notre culture et de notre histoire, ce que nous ne pouvons nous permettre.

Cette nouvelle convention se fonde sur la précédente et apporte des améliorations. Cependant, son libellé a quelque peu été dilué. J’espère toutefois quelle sera signée puis ratifiée sans subir les retards que nous avons connus en 1985. J’espère que nos gouvernements, ayant constaté à quel point il était préjudiciable de ne pas apposer leur signature et de ne pas ratifier une convention sauront adopter une approche inverse.

Le Groupe pour la gauche unitaire européenne soutient cette convention ainsi que les amendements proposés par le rapporteur. Diluer son libellé n’est pas le meilleur moyen pour qu’elle soit largement adoptée, tant il est vrai qu’un libellé faible se traduit par un instrument faible. La convention nécessite d’être couchée en des termes précis, sévères afin de convaincre nos parlements nationaux de l’importance à adopter un tel instrument.

Mon groupe soutient le Comité des Ministres qui souhaite que cette nouvelle convention soit mise en œuvre dans les meilleurs délais. Il conviendrait qu’elle soit signée et ratifiée par le plus grand nombre d’États membres. Nous appelons instamment le Comité des Ministres à prendre dûment note des amendements proposés par le rapport qui, je l’espère, seront adoptés par notre Assemblée. Ne pas la suivre ne serait pas une marque de sagesse, parce que notre Assemblée reflète les aspirations de nos parlements nationaux.

M. CRUCHTEN (Luxembourg), porte-parole du Groupe socialiste* – À la fin d’une semaine très longue et ô combien difficile, je ferai simple et serai donc bref.

Je remercie M. Schennach de son rapport important et intéressant. Il n’y a pas grand-chose à ajouter à ses explications. Le Groupe socialiste de l’Assemblée parlementaire soutient ce rapport et pense que la protection des biens culturels devrait être inscrite dans tous les droits internes et le trafic illégal être puni.

J’irai donc dans le sens de M. Schennach en disant que cette convention doit être ratifiée d’urgence cette année.

Mme MAURY PASQUIER (Suisse) – La Convention européenne sur les infractions visant les biens culturels, également connue sous le nom de Convention de Delphes, ouverte à la signature des États membres du Conseil de l’Europe en 1985, n’est malheureusement jamais entrée en vigueur, faute de ratifications suffisantes.

Depuis quelques années, la problématique de la protection du patrimoine culturel et de la lutte contre son trafic illicite est à nouveau sur le devant de la scène internationale et mérite une réponse et une action rapides et ciblées des États. Dans ce contexte, le Comité sur les infractions visant les biens culturels sous l’autorité du Comité européen pour les problèmes criminels du Conseil de l’Europe a proposé la révision totale de la Convention de 1985 afin de simplifier et de rationaliser sa formulation et sa structure en vue d’harmoniser les principes pertinents du droit pénal, de renforcer son efficacité et de rendre sa ratification, puis son entrée en vigueur possibles dans le plus grand nombre d’États.

La future Convention européenne sur les infractions visant les biens culturels deviendra ainsi un instrument important de coopération interétatique pour la mise en œuvre du volet pénal des infractions qui touchent les biens culturels.

Bien que mon pays ait été mis en cause – le rapporteur l’a rappelé –, j’aimerais affirmer ici, ainsi que le fait le Comité européen pour les problèmes criminels dans son préambule, que nous sommes convaincus que les divers biens culturels appartenant aux peuples représentent un témoignage important et irremplaçable de leur culture et de leur identité et qu’ils constituent leur patrimoine culturel. Dans le contexte actuel, il est nécessaire de disposer d’une nouvelle convention du Conseil de l'Europe sur les infractions visant des biens culturels afin qu’il prévoie des sanctions pénales en la matière.

Avec l’entrée en vigueur de la loi fédérale sur la transfert international des biens culturels en juin 2005, la Suisse a mis en œuvre la Convention de l’Unesco de 1970 relative aux mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicite des biens culturels. Cette loi introduit d’ores et déjà une pénalisation spéciale en matière de biens culturels qui complète les infractions générales du code pénal suisse. Il est ainsi interdit en Suisse d’importer, de vendre, de distribuer, de procurer, d’acquérir ou d’exporter des biens culturels volés ou dont le propriétaire s’est trouvé dessaisi sans sa volonté, provenant soit de pillages, soit de fouilles illicites. Mais il est certain que notre législation peut et doit être améliorée.

La Suisse a ainsi participé activement à l’élaboration du projet de texte lors des quatre sessions du Comité sur les infractions visant les biens culturels. Ainsi qu’elle le fait à chaque fois, elle étudiera dès que possible la possibilité d’une ratification de cette nouvelle convention.

La Convention européenne sur les infractions visant les biens culturels permettra de renforcer les règles pénales suisses déjà en vigueur et de réitérer la manifestation d’une volonté et d’un engagement marqués pour la protection du patrimoine culturel.

M. SCHNEIDER (France) – Le 24 mars dernier, la résolution 2347 en faveur de la protection du patrimoine a été adoptée à l’unanimité à l’Onu. À l’initiative de la France et de l’Italie, ce texte affirme avec force que la destruction des biens culturels est un crime de guerre. Elle est devenue « une tactique de guerre pour mettre à mal les sociétés sur le long terme, dans une stratégie de nettoyage culturel ».

La destruction délibérée mais aussi le saccage et les vols perpétrés par l’organisation État islamique en Irak et en Syrie sont autant d’atteintes aux droits de l’homme et à la mémoire de l’humanité. Nous savons que ces vols alimentent un trafic de biens culturels, un commerce des « antiquités de sang » qui finance le terrorisme. Ne nous leurrons pas : ce trafic n’est possible que parce que des « passeurs » permettent la sortie de ces richesses archéologiques d’Irak ou de Syrie, ce trafic n’existe que parce que des acheteurs sont prêts à payer pour s’offrir une pièce archéologique exceptionnelle.

Ils oublient qu’il ne s’agit pas uniquement de statues, mais de la mémoire des descendants de l’ancienne Mésopotamie, que l’EI veut faire disparaître !

Je suis Alsacien et je sais combien la transmission de la culture, de la mémoire reste le meilleur rempart contre les totalitarismes. La France, par son rôle dans la recherche archéologique moyen-orientale, a été pionnière sur ces sujets et je m’en réjouis.

Pour toutes ces raisons, le projet de convention qui nous est présenté est fondamental. En temps de paix ou de guerre, ils sont nombreux ceux qui cherchent à revendre sur un marché plus ou moins légal des biens excavés sans autorisation, voire volés sur les sites de fouilles ou pire les sites protégés par l’Unesco comme Palmyre. La convention, en s’attaquant à l’ensemble des infractions liées aux biens culturels des trafiquants aux acheteurs en passant par les passeurs, « les importateurs », devrait permettre une pénalisation accrue à chaque étape et donc, espérons-le, une certaine dissuasion, au moins pour la partie « demande » de ce trafic.

Un autre élément sera de mieux coordonner les actions de communication sur les objets volés. Le programme « Cent objets disparus » de l’Icom, le Conseil international des musées, est un bon exemple, car seuls des experts formés et avertis pourront permettre de déceler les trésors disparus.

Cette convention sera ouverte aux États non membres du Conseil de l’Europe. Cela est indispensable à la réussite du but visé : la protection effective de la mémoire. Je pense notamment à nos amis partenaires pour la démocratie, qui sont concernés et parfois menacés directement par ces assassins de la culture et qui, j’en suis persuadé se joindront à nous pour les combattre. Je pense aussi à nos amis chrétiens d’Orient, dont le courage nous rappelle à nos responsabilités dans cette région pour préserver autant la mémoire préislamique que celle des premiers chrétiens.

Pour toutes ces raisons, j’approuve l’excellent rapport qui vous a été présenté et je soutiendrai le projet de convention qui nous est présenté.

LE PRÉSIDENT – M. Farmanyan, inscrit dans le débat, n'est pas présent dans l'hémicycle.

Mme KYRIAKIDES (Chypre)* – Je voudrais tout d’abord remercier M. Schennach, pour son excellent travail. J’ai écouté avec la plus grande attention les propos de tous les orateurs. Nous avons effectivement déjà essayé d’emprunter cette voie, sans succès, la précédente convention n’étant jamais entrée en vigueur. Le moment est donc venu de donner une existence tangible à cette convention, étant donné la cruelle réalité que nous connaissons aujourd’hui.

Une telle convention est indispensable au vu des tentatives répétées de détruire le patrimoine culturel, l’identité, la résilience même des peuples. Nous devons porter cette nouvelle tentative de protection de notre identité culturelle et de notre histoire.

Ce texte n’est pas uniquement un instrument juridique contraignant, donnant un cadre aux États pour lutter contre tous ceux qui sont impliqués dans le trafic de biens culturels. Il est également la reconnaissance du caractère universel de notre patrimoine culturel, qui nous unit. Nous parlons sans cesse de ce qui nous sépare, alors aujourd’hui agissons pour ce qui nous unit.

Ce projet de convention renforce les outils nécessaires aux forces de l’ordre, comble les lacunes relevées et met de la lumière sur les zones d’ombre qui permettent aujourd’hui encore aux voleurs et aux trafiquants d’échapper au maillage de la justice et des forces de l’ordre.

Nous avons également besoin, à Chypre, de lutter contre de telles activités, de protéger le patrimoine culturel. La protection de ce patrimoine culturel a été identifiée comme une priorité par la présidence chypriote du Comité des Ministres. Je remercie et félicite tous ceux qui ont participé à ce travail ô combien précieux.

Je suis emplie d’espoir et je pense qu’aujourd’hui, avec le vote favorable de l’Assemblée, j’aurai le grand privilège d’être le témoin, le mois prochain à Chypre, lors de la session ministérielle à Nicosie, de l’ouverture à la signature et à la ratification de cette convention extrêmement importante. Nous pourrons à partir de là aller de l’avant.

Ce projet de convention, qui consacre la protection de notre patrimoine culturel dans le monde entier, traite également de la protection du pluralisme culturel, de l’identité culturelle. La convention nous permettra d’aller vers l’avènement de sociétés pleines d’enthousiasme et de diversité.

LE PRÉSIDENT – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission. Monsieur Schennach, il vous reste 4 minutes de temps de parole.

M. SCHENNACH (Autriche), rapporteur* – Je remercie tous les collègues qui ont participé à ce dernier débat de la session.

M. Schneider et d’autres collègues ont rappelé la destruction et le pillage des biens culturels lors de conflits armés ou de conflits gelés. Pour l’élaboration de ce projet de convention, j’ai rencontré une brigade de carabiniers italiens dont la mission est de sauvegarder les biens culturels, d’assurer la sécurité des lieux historiques, notamment des églises qui sont régulièrement pillées. Mais ils m’ont rappelé que si l’être humain est une menace pour ces biens culturels, les catastrophes naturelles en sont une également.

L’Azerbaïdjan et l’Arménie m’ont fait parvenir une documentation détaillée sur leurs biens culturels. Je demande donc à la commission la permission de les étudier de près. Je souhaiterais également inviter ces carabiniers italiens pour que certains d’entre vous puissent échanger avec eux.

J’aimerais par ailleurs remercier Mme Ismeta Dervoz, une personnalité remarquable, qui a travaillé pour le Conseil de l'Europe. Musicienne, elle a vécu la guerre en ex-Yougoslavie. Je remercie également Dana Karanjac et Roberto Fasino pour leur soutien si précieux.

Je vous rappelle que les musées de Bagdad, d’Alexandrie et du Caire attendent toujours que leur soient restitués les biens qui leur ont été volés.

Ce qui se passe au Yémen, à savoir le pillage du berceau de l’humanité, est une véritable tragédie humaine. Des biens culturels d’une valeur inestimable ont été détruits, et notamment des manuscrits sur l’origine de l’algèbre. Selon les rapports d’Interpol, plus de 50 % du patrimoine ont disparu. Et chaque jour ce chiffre augmente. C’est la raison pour laquelle, j’espère de tout cœur que les ministères des Affaires étrangères apposeront, à Chypre, leur signature sur ce projet de convention.

Je vous promets que nous poursuivrons ce débat.

Enfin, s’agissant de la Macédoine, nous devons agir et ouvrir une nouvelle procédure de suivi. Hier, le parlement a été attaqué, des femmes ont été agressées, maltraitées. Nous ne pouvons rester sans rien faire.

LE PRÉSIDENT – Monsieur le rapporteur, nous partageons votre inquiétude et nous soutenons votre démarche.

M. ARIEV (Ukraine), président de la commission de la culture* – Le trafic d’objets d’art et d’antiquités volées prive les populations de leur patrimoine culturel unique et de leur identité culturelle. Toutefois, ce trafic peut également faciliter le financement de la criminalité organisée et des groupes terroristes. Il est devenu très rentable. Des objets, des antiquités et des œuvres d’art précieux sont excavés, pillés, et volés, afin d’être vendus à des collectionneurs privés. Dans de nombreux pays, le cadre juridique ne permet pas de combattre efficacement ce phénomène. Il est également regrettable que, dans certains cas, le poids de l’intérêt personnel semble l’emporter sur l’intérêt collectif et sur la protection de notre patrimoine.

Notre rapporteur, M. Schennach, connaît, grâce à son expérience personnelle, les difficultés que rencontrent les pays privés de leur patrimoine. Je tiens à saluer son travail et je le remercie une nouvelle fois du rôle qu’il a joué pour la restitution par l’Allemagne d’une collection d’art issue de l’Ukraine, il y a quelques années. Cette collection avait été emmenée en Allemagne en tant que butin de guerre, à la suite de la Seconde Guerre mondiale.

Cette nouvelle convention est opportune et pertinente. Son objectif est de veiller à ce qu’il n’y ait pas, dans le dispositif de lutte contre le trafic, des lacunes évidentes que les criminels pourraient exploiter. Il s’agit de faire en sorte que nous ayons un ensemble juridique cohérent et exhaustif, des règlementations solides pour mener des actions répressives.

La commission de la culture salue ce projet de convention et propose quelques amendements pour renforcer les dispositions actuelles du projet, afin que ce nouvel instrument tienne ses promesses. Nous invitons également le Comité des Ministres à allouer des ressources suffisantes au mécanisme de suivi, pour que cet instrument juridique soit efficace et dynamique dans son application.

Au nom de la commission de la culture, je vous invite à appuyer sans réserve ces propositions.

LE PRÉSIDENT – La discussion générale est close.

La commission de la culture a présenté un projet d’avis sur lequel aucun amendement écrit n’a été déposé.

La présidence a été saisie de l’amendement oral suivant :

« Au paragraphe 10.4, après les mots ‟engager une expertise pertinente”, ajouter les mots ‟, comme un observatoire,”. »

Je considère que cet amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. NICOLETTI (Italie)* – Cet amendement très bref vise à éclaircir une formulation, et à renforcer l’idée d’une expertise pertinente, afin d’assurer une mise en œuvre efficace de la convention. Nous souhaitons disposer d’une institution plus solide pour superviser la situation et assurer la mise en œuvre de la convention.

M. ARIEV (Ukraine), président de la commission* – La commission n’a pas d’avis.

M. SCHENNACH (Autriche), rapporteur* – En tant que rapporteur, je suis favorable à cet amendement. La question est sensible, mais cet amendement vient renforcer le texte.

L'amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet d’avis contenu dans le Doc. 14300, tel qu'il a été amendé.

Je vous rappelle que la majorité requise est celle des deux tiers des suffrages exprimés.

Le projet d’avis, amendé, est adopté à l’unanimité des 43 votants.

3. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

LE PRÉSIDENT – Nous en venons maintenant au rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente. L’Assemblée doit encore se prononcer sur des saisines de commissions. Un document récapitulant ces saisines a été mis en distribution (Doc. 14289, Addendum 4).

Aux termes de l’article 26.3 du Règlement, ces saisines doivent être soumises à la ratification de l’Assemblée.

Les saisines sont ratifiées.

4. Décision du Bureau de l’Assemblée parlementaire

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je vous communique une décision du Bureau de l’Assemblée parlementaire, qui exprime sa défiance envers le Président, M. Agramunt :

« Le Bureau de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, réuni ce jour à Strasbourg, a décidé de refuser sa confiance à M. Pedro Agramunt en sa qualité de Président de l’Assemblée. Il a par ailleurs décidé que M. Agramunt n’est autorisé à entreprendre aucune visite officielle, à participer à aucune réunion, ni à prononcer aucune déclaration publique au nom de l’Assemblée, en sa qualité de Président.

Le Président a choisi de ne pas participer à la réunion du Bureau aujourd’hui et n’a pas présenté sa lettre de démission. Le Bureau a donc jugé nécessaire de prendre des mesures car, “en vertu du Règlement actuel, le Président ne peut être contraint de démissionner”, a déclaré Sir Roger Gale, plus ancien Vice-Président de l’Assemblée, qui a assuré la présidence de la réunion du Bureau. “Les normes et les principes de l’Assemblée parlementaire sont plus importants que n’importe quel membre individuel et l’intégrité de notre Assemblée doit être garantie”, a-t-il ajouté. »

5. Palmarès des meilleurs votants

LE PRÉSIDENT – Mes chers collègues, je suis maintenant heureux de vous communiquer le palmarès des meilleurs votants de la présente partie de session. Il s’agit de deux collègues femmes. Les parlementaires ayant le plus participé aux votes cette semaine sont : Mme Christoffersen de la Norvège et Mme Maury Pasquier de la Suisse.

Chères collègues, je vous félicite. Comme le veut la tradition, nous allons vous remettre un petit présent.

6. Clôture de la deuxième partie de la Session ordinaire de 2017

LE PRÉSIDENT* – Mes chers collègues, nous sommes arrivés au terme de nos travaux.

Je remercie tous les membres de l’Assemblée, en particulier les présidents de commission et tous les rapporteurs qui ont accompli un travail considérable. Je tiens également à remercier tous les Vice-Présidents qui ont contribué au bon déroulement de nos séances. Il s’agit de M. Corlăţean, Mme Djurović, Sir Roger Gale, Mme Gambaro, M. Gutierréz, M. Jordana, M. Küçükcan, Mme Oomen-Ruijten et Mme Schou.

Mes remerciements vont également à l’ensemble du personnel et aux interprètes qui rendent fidèlement compte de nos travaux.

Je souhaite aussi remercier la Présidence et ses services, et tout particulièrement M. le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire.

J’informe l’Assemblée que la troisième partie de la Session ordinaire de 2017 se tiendra du 26 au 30 juin.

Je déclare close la deuxième partie de la Session ordinaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour 2017.

La séance est levée.

La séance est levée à 12 heures.

SOMMAIRE

1. La convergence technologique, l’intelligence artificielle et les droits de l’homme

Présentation par M. Le Déaut du rapport de la commission de la culture (Doc. 14288)

Présentation par M. Cilevičs du rapport de la commission des questions juridiques saisie pour avis (Doc. 14303)

Orateurs : Mme Fataliyeva, MM. Comte, Valen, Roca, Schennach, Cepeda, Grin, Schneider, Reiss, Mme Le Dain, M. Ariev

Réponses du rapporteur et du président de la commission de la culture

Vote sur un projet de recommandation amendé (Doc. 14288)

2. Projet de convention du Conseil d’Europe sur les infractions visant des biens culturels

Présentation par M. Schennach du rapport de la commission de la culture (Doc. 14300 et 14290)

Orateurs : MM. van de Ven, Kox, Cruchten, Mme Maury Pasquier, M. Schneider, Mme Kyriakides

Réponses du rapporteur et du président de la commission de la culture

Vote sur un projet d’avis amendé (Doc. 14300)

3. Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (suite)

4. Décision du Bureau de l’Assemblée parlementaire

5. Palmarès des meilleurs votants

6. Clôture de la deuxième partie de la Session ordinaire de 2017

Appendix / Annexe

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure.The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l'article 12.2 du Règlement.Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ANDERSON, Donald [Lord]

ARENT, Iwona [Ms]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

AST, Marek [Mr] (TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr])

BAYKAL, Deniz [Mr]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BERNACKI, Włodzimierz [Mr]

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUIJN-WEZEMAN, Reina de [Ms] (MILTENBURG, Anouchka van [Ms])

BRUYN, Piet De [Mr]

BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr]

CEPEDA, José [Mr]

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LĪBIŅA-EGNERE, Inese [Ms])

COMTE, Raphaël [M.] (FIALA, Doris [Mme])

CRUCHTEN, Yves [M.]

DAEMS, Hendrik [Mr] (DUMERY, Daphné [Ms])

EBERLE-STRUB, Susanne [Ms]

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

FARMANYAN, Samvel [Mr]

FATALIYEVA, Sevinj [Ms] (HAJIYEV, Sabir [Mr])

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GAFAROVA, Sahiba [Ms]

GAMBARO, Adele [Ms]

GERMANN, Hannes [Mr] (HEER, Alfred [Mr])

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GIRO, Francesco Maria [Mr]

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GORROTXATEGUI, Miren Edurne [Mme] (BALLESTER, Ángela [Ms])

GRIN, Jean-Pierre [M.] (MÜLLER, Thomas [Mr])

GUTIÉRREZ, Antonio [Mr]

HAGEBAKKEN, Tore [Mr] (SCHOU, Ingjerd [Ms])

HOLÍK, Pavel [Mr] (MARKOVÁ, Soňa [Ms])

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

JANIK, Grzegorz [Mr] (TARCZYŃSKI, Dominik [Mr])

JENIŠTA, Luděk [Mr]

KOX, Tiny [Mr]

KYRIAKIDES, Stella [Ms]

LE DAIN, Anne-Yvonne [Mme] (ALLAIN, Brigitte [Mme])

LE DÉAUT, Jean-Yves [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LEŚNIAK, Józef [M.] (POMASKA, Agnieszka [Ms])

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

MAMMADOV, Muslum [M.]

MARTINS, Alberto [M.]

MASIULIS, Kęstutis [Mr] (ŠAKALIENĖ, Dovilė [Ms])

MAURY PASQUIER, Liliane [Mme]

MOŻDŹANOWSKA, Andżelika [Ms] (HALICKI, Andrzej [Mr])

NENUTIL, Miroslav [Mr]

NICOLETTI, Michele [Mr]

OHLSSON, Carina [Ms]

OVERBEEK, Henk [Mr] (MAIJ, Marit [Ms])

PALLARÉS, Judith [Ms]

POCIEJ, Aleksander [M.] (KLICH, Bogdan [Mr])

POZZO DI BORGO, Yves [M.] (GROSDIDIER, François [M.])

REISS, Frédéric [M.] (ZIMMERMANN, Marie-Jo [Mme])

ROCA, Jordi [Mr] (BARREIRO, José Manuel [Mr])

ROUQUET, René [M.]

RUSTAMYAN, Armen [M.] (NAGHDALYAN, Hermine [Ms])

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHNEIDER, André [M.] (ROCHEBLOINE, François [M.])

SCHNEIDER-SCHNEITER, Elisabeth [Mme] (LOMBARDI, Filippo [M.])

SEYIDOV, Samad [Mr]

SIEBERT, Bernd [Mr]

SILVA, Adão [M.]

SPADONI, Maria Edera [Ms] (CATALFO, Nunzia [Ms])

THIÉRY, Damien [M.]

VÁHALOVÁ, Dana [Ms]

VALEN, Snorre Serigstad [Mr]

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VEN, Mart van de [Mr]

VOVK, Viktor [Mr] (LIASHKO, Oleh [Mr])

WENAWESER, Christoph [Mr]

WIECHEL, Markus [Mr] (NISSINEN, Johan [Mr])

WURM, Gisela [Ms]

XUCLÀ, Jordi [Mr] (BILDARRATZ, Jokin [Mr])

YEMETS, Leonid [Mr]

ZELIENKOVÁ, Kristýna [Ms]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

Also signed the register / Ont également signé le registre

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

BÜCHEL, Roland Rino [Mr]

OSUCH, Jacek [Mr]

Observers / Observateurs

DOWNE, Percy [Mr]

MALTAIS, Ghislain [M.]

O'CONNELL, Jennifer [Ms]

OLIVER, John [Mr]

TILSON, David [Mr]

Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

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Representatives of the Turkish Cypriot Community (In accordance to Resolution 1376 (2004) of

the Parliamentary Assembly)/ Représentants de la communauté chypriote turque

(Conformément à la Résolution 1376 (2004) de l’Assemblée parlementaire)

Mehmet ÇAĞLAR

Erdal ÖZCENK