FR18CR07

AS (2018) CR 07

SESSION ORDINAIRE DE 2018

________________

(Première partie)

COMPTE RENDU

de la septième séance

Jeudi 25 janvier 2018 à 10 heures

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 10 h 05 sous la présidence de M. Amon, Vice-Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT – La séance est ouverte.

1. Modifications dans la composition des commissions

LE PRÉSIDENT* – Des propositions de modifications dans la composition des commissions ont été publiées dans le document Commissions (2018) 01 Addendum 5.

Ces propositions sont adoptées.

2. Le processus de paix israélo-palestinien: le rôle du Conseil de l’Europe
(Débat selon la procédure d’urgence)

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion, selon la procédure d’urgence, du rapport de M. Corlăţean, au nom de la commission des questions politiques et de la démocratie, sur «Le processus de paix israélo-palestinien: le rôle du Conseil de l’Europe» (Doc. 14484).

Je vous rappelle que l’Assemblée a décidé, au cours de sa séance de lundi matin, de limiter le temps de parole des orateurs à 3 minutes.

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 12 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 11 h 40, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie), rapporteur de la commission des questions politiques et de la démocratie* – Qu’il me soit tout d’abord permis de saluer nos collègues des délégations israélienne et palestinienne, directement concernés par le sujet. Shalom, Salam aleikum!

Notre Assemblée a en effet décidé lundi d’organiser dans le cadre de la procédure d’urgence un débat sur les perspectives du processus de paix israélo-palestinien et les possibles contributions du Conseil de l’Europe et de son Assemblée parlementaire.

Cette décision fait suite à la déclaration du président des États-Unis d’Amérique, Donald Trump, déclaration bien connue qui tout à la fois rappelle la décision de l’administration américaine de déplacer son ambassade à Jérusalem et souligne que le statut définitif de la ville doit être déterminé par les parties directement concernées et qu’il sera avalisé par les États-Unis d’Amérique, seconde partie de la déclaration américaine qui n’est d’ailleurs souvent pas mentionnée. Nous sommes tout à fait conscients des conséquences et des réactions que cette déclaration a suscitées sur le plan international. Nous regrettons les affrontements qui ont eu lieu sur le terrain.

C’est dans ce contexte spécifique que la commission des questions politiques a décidé, lors de sa réunion de décembre à Paris, d’organiser une audition des délégations israélienne et palestinienne. Il s’agissait de réfléchir aux différentes possibilités de relancer le processus de paix et au rôle du Conseil de l’Europe dans la relance de ce processus. Cette réunion a été des plus fructueuses. Je me félicite de l’approche constructive des délégations israélienne et palestinienne ici à Strasbourg qui, avec tous les membres de la commission, ont manifesté la volonté de participer à un véritable débat, sans condamner, mais en tentant de trouver des lignes de discussion constructives, dans la perspective du processus de paix et d’une solution à deux États, sur la base de négociations directes entre Israël et la Palestine.

L’intérêt de cette réunion était également de voir s’il était possible, pour les deux parties, de continuer à siéger à la même table européenne, unique plateforme de contact qui subsiste aujourd’hui entre elles, à savoir, en particulier, la commission des questions politiques de l’Assemblée parlementaire et sa sous-commission sur le Proche-Orient. Un tel engagement a été pris, et nous devons nous en réjouir. Nous avons défini à Paris les grands principes de ce dialogue et cette semaine, au cours des réunions de la commission des questions politiques, nous avons poursuivi la réflexion sur le projet de résolution qui vous est présenté aujourd’hui.

Ce dernier arrive à un moment particulièrement difficile et je tiens à remercier tous les collègues qui ont contribué à la recherche du meilleur compromis possible. Ils ont confirmé l’engagement de notre Assemblée en faveur du processus de paix et de la solution à deux États, sur la base de négociations directes, avec une éventuelle contribution des Européens, y compris le Conseil de l’Europe et, bien entendu, l’Assemblée parlementaire.

Le projet de résolution mentionne le forum tripartite évoqué dans la Résolution 1420 (2005) permettant aux parlementaires des deux délégations de l’Assemblée parlementaire de se réunir sur un pied d’égalité et d’engager un dialogue constructif débouchant sur des propositions concrètes. J’invite tous nos collègues à soutenir ce projet de résolution, proposé et amendé par la commission des questions politiques, à un moment où l’Europe a la possibilité de contribuer de manière positive et importante à la relance du processus de paix. L’Europe peut et doit jouer un rôle essentiel dans le contexte actuel.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le rapporteur, il vous restera 7 minutes pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte. Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

M. HOWELL (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Le projet de résolution présenté par la commission des questions politiques nous incite à nous interroger sur ce que peut faire le Conseil de l’Europe pour relancer le processus de paix israélo-palestinien plutôt que de se contenter de formuler des commentaires sur le conflit lui-même. Nous souhaitons tous ici que la paix revienne enfin dans cette région du monde, mais il serait beaucoup plus simple, pour apaiser les tensions, que les Palestiniens commencent par accepter l’existence de l’État d’Israël. Les manuels scolaires des enfants palestiniens ne doivent pas être écrits comme si Israël n’existait pas. Les attentats terroristes doivent cesser. Le Hezbollah et le Hamas doivent être désarmés. Tout doit être fait pour mettre fin à la crise – je choisis mes mots – qui secoue actuellement le sud d’Israël.

Le Conseil de l’Europe peut faire beaucoup pour promouvoir les organisations qui encouragent d’ores et déjà la paix entre Israël et les territoires palestiniens. J’aimerais citer notamment l’organisation non gouvernementale (ONG) de Tel-Aviv, Save a Child’s Heart (SACH), grâce à laquelle des opérations de chirurgie cardiaque très poussées sont pratiquées, par des médecins israéliens, sur des enfants palestiniens. Voir cela de ses propres yeux, quelle expérience et quelle émotion, mes chers collègues! De nombreuses autres initiatives pour promouvoir la paix existent dans la région. Elles doivent être soutenues par le Conseil de l’Europe.

Que peut faire notre Organisation pour aider les autorités israéliennes à comprendre que la façon dont est gérée la question des colonies n’aboutit à rien? Ces dernières constituent sans doute un obstacle à la paix, mais ce n’est pas un obstacle insurmontable. Des négociations, encouragées par le Conseil de l’Europe, doivent être organisées. Dans le cadre d’une solution à deux États, Israël pourrait conserver certains territoires colonisés par le moyen d’échanges de terres, comme l’avait entériné un accord du temps de Yasser Arafat. Il est très important que les autorités israéliennes le comprennent.

Le Président du Comité des Ministres nous a dit en début de semaine qu’aucune ambassade de grand pays européen ne serait déplacée de Tel-Aviv à Jérusalem. Le Conseil de l’Europe doit rester ferme sur cette position. J’encourage, pour finir, la normalisation des relations d’Israël avec les pays voisins, cela dans une région confrontée à de grands troubles – je pense notamment au terrorisme et à la situation en Iran.

Mme MEHL (Norvège), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Le conflit israélo-palestinien a atteint un degré d’intensité renforcé après les déclarations du Président Trump, et le rapport montre une approche équilibrée quant à la contribution du Conseil de l’Europe aux négociations de paix.

Nous devons continuer d’appuyer la solution à deux États sur la base des frontières de 1967. Il est regrettable d’ailleurs que le processus de paix n’ait pas progressé depuis longtemps. Seule cette solution peut permettre une paix durable entre les deux parties et résoudre la question de Jérusalem.

Cette solution doit être le résultat de négociations directes et d’un accord entre les deux parties concernées, Israël et la Palestine; toute action qui va dans le sens de cette solution doit être la bienvenue. En revanche, des actions telles que celle du Président Trump n’aident pas la cause et doivent être dénoncées par le Conseil de l’Europe et tous ses États membres.

La déclaration du Président Trump de déménager l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem est un véritable sujet de préoccupation. Que les États-Unis n’apportent plus leur aide aux organisations humanitaires dans la région est également extrêmement préoccupant, car ils contribuaient à maintenir une certaine stabilité. Les défis humanitaires sont immenses et il faudra y trouver une solution le plus rapidement possible. Nous devons aider la communauté internationale, les Nations Unies, l’Union européenne et tous les gouvernements qui tentent de trouver une solution pacifique.

L’Assemblée parlementaire a un rôle très important à jouer, puisque la Palestine et Israël sont présents dans cet hémicycle et que nous avons des relations privilégiées avec plusieurs pays de la région. Nous devons en profiter pour promouvoir un dialogue, sur un pied d’égalité, entre les deux parties, relancer les négociations de paix et travailler ensemble à une solution à ce conflit qui dure depuis 50 ans.

Mme KAVVADIA (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Le processus de paix israélo-palestinien est l’une des initiatives emblématiques du Conseil de l’Europe, puisque c’est le paradigme des droits de l’homme qui est mis en cause depuis 50 ans, malgré les efforts du Conseil de l’Europe et de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Les troubles de l’année dernière dans l’ensemble de la région et la loi du plus fort qui règne ne permettent pas de trouver une solution positive dans un avenir proche. Le processus de paix est au point mort. Depuis ces dernières années, une véritable escalade a eu lieu. Le Conseil de l’Europe a dénoncé les exécutions de Palestiniens, à la fois par le Hamas et par le Gouvernement israélien. Des rapports démontrent que le nombre de colonies se multiplie dans la bande de Gaza. Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, Israël bénéficie d’un appui on ne peut plus conservateur. S’ajoutent à cela les arrêts de la Haute Cour de justice d’Israël et la reconnaissance de Jérusalem comme capitale par les États-Unis. Tout cela agite les esprits.

Dans ce contexte, les manifestants palestiniens sont emprisonnés et condamnés massivement, y compris les mineurs. Le dernier exemple est celui de la jeune Ahed Tamimi, 16 ans, arrêtée en décembre, emprisonnée et qui va être jugée par une cour militaire pour avoir donné une gifle à un soldat israélien au cours d’une manifestation.

L’Assemblée parlementaire et le Conseil de l’Europe doivent, d’urgence, prendre des initiatives, se rendre sur le terrain pour déterminer quels droits internationaux et droits de l’homme sont violés. Un échange honnête d’informations est nécessaire pour relancer le processus de paix. Personne ne doit rester silencieux face à la situation.

Nous devons par ailleurs reconnaître que la solution doit être fondée sur la reconnaissance de deux États, que la sécurité des Palestiniens et des Israéliens en dépend, comme elle dépend aussi de la liberté et du respect des droits de l’homme.

M. AMORUSO (Italie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Je remercie mon groupe de m’avoir permis d’intervenir dans ce débat essentiel au nom également de l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée (APM). Cette Organisation a été créée voilà douze ans et a pour vocation d’être une plateforme parlementaire internationale afin de garantir la coopération entre ses États membres, représentés de façon paritaire. Israël et l’Autorité palestinienne sont membres du bureau politique de l’APM, l’organe exécutif de l’Assemblée. Cette égalité permet d’établir un dialogue constructif entre les parlementaires des différents pays, y compris lorsque des tensions intergouvernementales entre États membres empêchent tout échange.

Mettre un terme au conflit israélo-palestinien a toujours été la priorité absolue. Nous le savons tous, la solution militaire à cette crise n’est pas la bonne solution. Récemment, l’APM a lancé une mission importante au Moyen-Orient, qui s’est rendue à Amman, Ramallah et Jérusalem. Au cours de nos rencontres, nous nous sommes rendu compte que le processus de paix n’est pas toujours perçu comme une priorité par la communauté internationale. La position de l’APM a toujours été en faveur d’une solution «deux peuples, deux États». C’est, selon nous, le seul scénario possible.

Nos délégués ont réaffirmé cette position, à chaque fois qu’ils en ont eu l’occasion. Nous avons proposé l’aide de l’APM qui pourrait mettre à disposition l’instrument diplomatique parlementaire, qui est notre système de fonctionnement privilégié avec celui des Nations Unies.

Les questions traitant de Jérusalem, des frontières, de la sécurité, de l’utilisation de l’eau doivent être traitées de façon urgente et clairvoyante. Les États-Unis, en décidant de transférer à Jérusalem leur ambassade, ont provoqué de nouvelles tensions et porté un coup au processus de paix. À cette occasion, l’APM s’est déclarée profondément préoccupée des répercussions de cette décision et a incité toutes les parties à continuer de négocier en vue d’une solution politique.

Nous connaissons tous les effets de la décision de M. Trump, et, malheureusement, les États-Unis ne sont aujourd’hui plus reconnus par certains pays comme un médiateur neutre et efficace. L’APM souhaite continuer à travailler afin de contribuer à cette solution à deux États. C’est la seule façon pour les deux peuples de voir leurs aspirations légitimes satisfaites et leurs frontières reconnues au niveau international, dans la paix et la sécurité, côte à côte.

Enfin, l’APM se prépare à toute une série de rencontres de haut niveau, cela bien sûr, dans le respect du rapport proposé aujourd’hui.

M. VAREIKIS (Lituanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Monsieur le rapporteur, vous avez tout à fait raison d’affirmer que le processus de paix est l’objectif principal de notre discussion d’aujourd’hui, qui n’est pas une discussion sur la géographie ou l’histoire.

Il y a vingt-cinq ans, j’ai étudié la diplomatie militaire à Genève, dans un environnement très pacifique, et l’on m’a appris qu’il existait une différence entre la guerre et la paix. Quand on entre en guerre, on pense «rejet», on pense à remplacer une chose par une autre. En revanche, quand on pense «paix», on cherche à réunir et on réfléchit sur le base de la réalité et non de la mythologie. On a en tête la réalité, la vie ensemble, le rapprochement; sinon, il n’y aura pas de paix.

Je me suis rendu dans la région et j’ai posé la question aux habitants: pourquoi ne pouvez-vous pas vivre ensemble? Toutes les réponses faisaient référence à la mythologie. Mais c’est d’aujourd’hui que l’on parle, c’est aujourd’hui qu’il vous faut vivre ensemble! Si vos réflexions se fondent sur ce qui s’est passé il y a cinq mille ans, vous ne ferez jamais la paix!

D’autres ont fait état de la géographie, de la situation de telle ou telle ville, etc. Cela aussi, c’est de la mythologie! La solution est de tenir compte de la réalité et de faire preuve d’inventivité.

Il ne faut pas être prisonniers des stéréotypes idéologiques. Le vivre ensemble est basé sur la compréhension et l’amour.

Le Conseil de l’Europe peut apporter son eau au moulin de la paix. Ici même, des représentants de la Palestine et d’Israël sont réunis dans un cadre pacifique et non sur un terrain de guerre. Nous savons comment aider d’autres pays à dialoguer. Je suis fier de l’action du Conseil de l’Europe pour la paix, et j’espère un avenir meilleur.

M. BYRNE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Ce rapport équilibré réitère notre engagement pour la sécurité et la prospérité de l’État d’Israël, qui doit faire face aux menaces expansionnistes de l’Iran, pays qui est résolu à construire un axe routier vers la Méditerranée, et à développer au Sud Liban ses usines d’armement, en particulier la fabrication de missiles.

Ce rapport permet aussi de reconnaître la crise toujours plus grave que connaît la Palestine. Des colonies sauvages couvrent désormais 45 % des territoires palestiniens dont les habitants n’ont pas accès à l’eau, ni à l’électricité, ni à la téléphonie mobile. Gaza est étranglée. Nos observateurs se sont d’ailleurs vu refuser l’accès à la zone. Nous avons dû évoquer la Résolution 2142 (2017) pour la levée de l’interdiction.

Ce rapport permet de reconnaître le scandale de ces enfants palestiniens qui sont arrêtés et traduits en justice devant des tribunaux militaires. Voyons aussi ce qui est arrivé cette semaine à Ahed Tamimi, et la folle décision, unilatérale, du Président Trump de transférer l’ambassade américaine à Jérusalem.

Quel est le grand risque auquel nous sommes confrontés? Qu’une nouvelle génération de Palestiniens renonce à l’espoir et à un réel avenir. Nous devons leur redonner espoir. Eux non plus ne veulent pas revenir en arrière, à une situation qui a permis l’émergence des horreurs nazies. Une nouvelle génération de dirigeants doit émerger des deux côtés. Impliquons la société civile, les syndicats et les cercles politiques et levons les obstacles qui empêchent que se développe la société civile palestinienne. Créons de nouvelles enceintes, où de nouvelles générations de dirigeants pourront voir le jour. Donnons aussi une place aux femmes au sein de la vie publique et associative.

À l’heure actuelle, rien ne se passe, qu’il s’agisse de la sécurité d’Israël ou de la justice pour la Palestine. Personne ne sort gagnant en opposant justice et sécurité. Nous avons besoin des deux. Un mur de sécurité traverse des terres que Marie et Joseph ont parcourues, il y a 2 000 ans, lorsqu’ils se sont rendus à Bethléem. Sur ce mur est peint à la bombe: «Tous les murs sont voués à s’écrouler». C’est la leçon de l’Histoire. Avec quelle rapidité pourrons-nous abattre ces murs, et à quel coût? Si nous voulons la paix et la justice, nous devons abattre ces murs et jeter des ponts. L’Amérique se retire, le devoir de notre Assemblée est d’aller de l’avant.

LE PRÉSIDENT – MM. Zingeris et Gutiérrez, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Je suis heureux de la tenue de ce débat qui me permet de mentionner deux points qui me semblent essentiels.

L’une des premières phrases du rapport condamne le Président des États-Unis pour avoir déclaré que le moment était venu de reconnaître officiellement Jérusalem comme la capitale d’Israël et que les États-Unis décidaient de transférer leur ambassade dans cette ville. Tous les présidents américains, depuis 1992, y compris Clinton et Obama, ont promis ce transfert. La seule surprise dans la décision du Président Trump est qu’un homme politique essaie de tenir la parole donnée. Nous, hommes politiques, pourrions peut-être y réfléchir! J’ai conscience des problèmes. Il en va des concessions que les deux parties sont prêtes à faire. Cependant, parfois, il faut agir pour que les choses évoluent. Le Président Trump peut arriver à renouveler l’intérêt pour la zone et à renforcer le dialogue et les discussions entre les parties qui, toutes, souhaitent une solution. Notre débat n’aurait peut-être pas eu lieu sans cette décision des États-Unis.

Les États-Unis participent au processus de paix. La déclaration du Président Trump a mis à mal ce processus, et l’Assemblée parlementaire regrette qu’il ne soit pas continu. Cependant, même avant la déclaration du Président Trump, le processus de paix était pratiquement gelé.

J’apprécie toutefois que le rapporteur demande à l’Europe de jouer un rôle plus important dans la reprise du processus de paix. L’Europe semble avoir perdu tout intérêt et abandonné tout effort pour trouver une solution. Je soutiens pour ma part le processus de paix entre Israël et l’Autorité palestinienne. Une paix durable est la seule solution.

M. ABUSHAHLA (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – La décision du Président Trump de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël, oubliant que la ville est occupée depuis 1967 et que les Palestiniens considèrent que Jérusalem est leur capitale depuis des milliers d’années, est un cadeau fait aux extrémistes. Cela prouve que le Gouvernement des États-Unis fait partie du problème, et non de la solution. Cela encourage les extrémistes à se tourner vers la violence et à violer les solutions proposées par le droit international.

C’est l’ensemble du processus de paix qui est en péril. Après 25 années de pourparlers et de négociations, après 25 années d’intervention des États-Unis comme médiateur et intermédiaire, quel est le résultat? Les colonies ne cessent de s’étendre sur nos terres au quotidien. Nos citoyens sont visés et abattus, sont les victimes de la violence, alors qu’ils sont parfois des manifestants pacifistes. Ahed Tamimi est derrière les barreaux car elle a refusé l’occupation et a défendu son toit. Le blocus de la bande de Gaza se poursuit, une pression constante est organisée sur le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, afin que cesse l’aide sanitaire et éducative aux réfugiés. La question de Jérusalem va sortir du processus des négociations. Telle est la situation que nous connaissons.

Le processus de paix a besoin de résolutions courageuses. Arrêtons ces tentatives vouées à l’échec! Il faut mettre en place un cadre dans lequel l’Union européenne doit prendre pleinement sa place, notamment avec ses contributions financières.

Il faut empêcher l’occupation israélienne pour sauver la paix. Il ne faut pas pousser notre peuple au désespoir. Il doit garder sa foi en le droit international: ne les poussons pas dans les bras de la violence et des extrémistes.

Chers collègues, chers amis, je vous en prie: ne laissez pas tomber cette branche d’olivier. Nous devons la garder entre nos mains.

Mme YAŞAR (Turquie) – La reconnaissance, par le Président américain Donald Trump, de la Jérusalem occupée comme capitale d’Israël est illégitime, tant au vu de la loi et de l’Histoire que selon les consciences.

Selon la Résolution 476 (1980) du Conseil de sécurité de l’Onu, sur laquelle les États-Unis avaient usé de leur droit de veto, aucun pays ne peut installer son ambassade à Jérusalem. La récente décision des États-Unis signifie donc, tout d’abord, la punition des Palestiniens, qui se sont pourtant révélés à maintes reprises être une partie en quête de paix.

Malheureusement, je note que de nombreux membres de notre Assemblée n’ont pas encore reconnu l’État palestinien. Je vous invite à reconnaître Jérusalem comme la capitale de l’État palestinien occupé.

Il est réjouissant que la décision de l’Assemblée générale des Nations Unies sur la question de Jérusalem ait été acceptée à une écrasante majorité: l’administration Trump doit revenir le plus tôt possible sur cette décision malheureuse.

Très récemment, le Parlement israélien a adopté un projet de loi sur le statut de Jérusalem visant à permettre le placement de certains quartiers palestiniens situés au-delà du mur d’être placés sous la souveraineté d’Israël. C’est une étape qui détruit le fondement du processus de paix et nuit à la paix et à la stabilité régionales.

Ces actions illégitimes de la part d’Israël sont contraires à la volonté de la communauté internationale: l’évolution du statut juridique de Jérusalem est inadmissible, et cela a d’ailleurs été inscrit à la fois dans la Déclaration finale du Sommet extraordinaire de l’Organisation de la Coopération islamique et dans la résolution de l’Assemblée générale de l’Onu.

Les démarches d’Israël sont extrêmement dangereuses et doivent être rejetées par la communauté internationale.

M. CILEVIČS (Lettonie)* – Je félicite M. Corlăţean pour son travail: je soutiens pleinement ses propositions. Comme sa tâche a été difficile!

L’occupation israélienne des territoires palestiniens continue d’être une source majeure d’instabilité, dans la région et au-delà. Les problèmes pressants s’y multiplient: la crise syrienne, qui a provoqué des milliers de victimes et la fuite de millions de réfugiés, la rivalité entre les grandes puissances du monde musulman – l’Iran, l’Arabie Saoudite, la Turquie, l’Egypte –, les suites des printemps arabes, la montée de l’État islamique. Israël a-t-elle quelque chose à voir avec tout cela? Il ne faut pas la prendre systématiquement comme bouc émissaire! Cette position nous induit en erreur.

Israël est peut-être la seule vraie démocratie du Moyen-Orient. Elle est, bien entendu, loin d’être parfaite: elle peut être critiquée, et elle doit l’être, car il n’y a pas de séparation entre la religion et l’État. Nous pouvons déplorer l’expansion continue des colonies dans les territoires occupés, mais, en ce qui concerne l’indépendance de la justice et des médias, l’égalité des sexes et la liberté de la société civile, Israël est en avance sur bien d’autres États. Pourtant, nous concentrons toujours nos critiques sur elle.

Une solution à deux États doit être mise en place. Cela suppose, dans un premier temps, que les deux États soient reconnus. Combien d’États voisins reconnaissent-ils aujourd’hui Israël, dont le droit d’exister est contesté, notamment par le Hamas – cette instance qui, de facto, dirige Gaza?

Qu’en est-il des exigences de sécurité pour le peuple israélien? Ces dernières années, l’Europe a été témoin d’un certain nombre d’agressions terroristes tragiques: nous pouvons donc comprendre ce que cela signifie, lorsque des attaques terroristes sont perpétrées au quotidien. L’État palestinien est-il désireux de lutter réellement et effectivement contre les activités terroristes? Regardez ce qu’il s’est passé en 2005 après le Plan de désengagement unilatéral de la bande de Gaza: c’est la preuve que les autorités palestiniennes ne sont pas prêtes à s’engager dans cette voie.

Monsieur le Président, je me félicite sincèrement de la présence, au sein de cette Assemblée, de nos amis palestiniens. Je pense que la participation à un dialogue ouvert est la clé pour trouver de réelles solutions. Cependant, le statut de partenaire pour la démocratie suppose que nous discutions d’abord, et avant tout, de la démocratie en Palestine. J’ai le sentiment que nos collègues palestiniens utilisent plutôt leur présence au sein de notre Assemblée à des fins d’attaques politiques visant Israël.

Pour qu’une solution à deux États viable voie le jour, des efforts doivent être consentis par les deux parties en présence: reconnaissance par tous du droit d’Israël à exister et lutte résolue de chacun contre toute organisation terroriste. C’est une condition sine qua non.

M. HEER (Suisse)* – Pourquoi le Conseil de l’Europe a-t-il besoin d’écrire un rapport sur son propre rôle? Si cette institution était si importante, les peuples viendraient eux-mêmes demander notre aide. Mais personne ne le fait. Pourquoi?

Est-il bien sage de critiquer la décision du président américain, qui souhaite déplacer l’ambassade des États-Unis à Jérusalem? Si le Conseil de l’Europe pense pouvoir remplacer, d’une manière ou d’une autre, les États-Unis, il surestime son pouvoir.

Au Conseil de l’Europe, nous avons suffisamment de problèmes avec des pays en guerre, des États membres qui ne respectent pas la primauté du droit, qui ne savent pas ce qu’est la liberté des médias et ne séparent pas les pouvoirs. Il est curieux de constater que le Conseil de l’Europe critique l’unique démocratie du Proche-Orient qui respecte la primauté du droit, la séparation des pouvoirs et les droits de l’homme.

Qu’en est-il de la Syrie? du Liban? de l’Arabie Saoudite? des Émirats? de l’Irak? de l’Égypte? Qu’en est-il des Palestiniens qui, divisés entre une direction terroriste à Gaza et une élite en Cisjordanie, se présentent comme de pauvres victimes alors même qu’ils se remplissent les poches avec des milliards de dollars d’aides étrangères?

Le 27 janvier est la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’holocauste. Notre institution devrait protéger Israël, qui partage nos valeurs communes de démocratie, de droits de l’homme et d’État de droit. Au lieu de rédiger un rapport inutile, nous devrions encourager la société civile arabe à partager nos valeurs. Alors que le Conseil de l’Europe ne fait rien pour contrer l’antisémitisme et la haine que l’on trouve dans les manuels scolaires en Palestine et dans la plupart des pays musulmans, je vous appelle à voter contre ce rapport.

Puis-je vous rappeler que la Résolution 181 (1947) des Nations Unies sur la création d’Israël a été acceptée par les juifs et refusée par les arabes? Ce sont eux qui ont commencé la guerre et nous ont plongés dans le chaos dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui. Ce n’est pas de la faute d’Israël. Je vous remercie de voter contre le rapport.

M. SCHWABE (Allemagne)* – Contrairement à M. Heer, j’estime que nous avons la responsabilité d’adopter ce rapport. Pour Israël – je parle ici en tant qu’élu allemand et au titre de la raison d’État –, il est indispensable d’évoquer ce sujet. C’est précisément au titre de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste qu’il est essentiel, si nous voulons assurer un avenir à Israël, d’affirmer la nécessité d’un développement équilibré de la région.

À cet égard, M. Corlățean mérite nos félicitations, car son rapport équilibré s’abstient de prendre parti et formule une réponse européenne au problème. En particulier, il invite les États-Unis à agir de façon responsable. Nulle part il n’affirme que le Conseil de l’Europe doit endosser leur rôle, ce pour quoi il est d’ailleurs mal placé. Pour autant, il ne faut pas jeter de l’huile sur le feu. Il importe que notre institution, ainsi que les autres, s’y attache. Lorsque certains exacerbent les tensions, il nous incombe de réagir.

Nous l’avons tous affirmé: la seule solution est à deux États, fût-elle difficile à admettre par Israël compte tenu de la complexité de la situation dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Une telle solution s’impose. Personne, me semble-t-il, ne souhaite une solution à un seul État conflictuel. Il est clair que la colonisation doit cesser. Il est nécessaire de mener des négociations en vue de parvenir à une solution à deux États. Chaque jour qui voit l’installation de nouveaux colons nous en éloigne et rend plus difficile son avènement.

Sur la base de cette évaluation de la situation politique, notre Organisation doit se pencher sur le respect des droits de l’homme dans la région. En la matière, on déplore les violations les plus graves: attentats et exécution côté palestinien, recours excessif à la force armée côté israélien. Ainsi, en décembre dernier, le Haut-Commissaire de l’Onu aux droits de l’homme s’est dit «choqué» par la mort d’un Palestinien amputé.

Il faut mettre un terme à l’absence de perspectives d’avenir et au désespoir. La commission des migrations aborde de nombreux sujets essentiels; Israéliens et Palestiniens ont sollicité son aide en matière de flux migratoires. La décision américaine de déplacer l’ambassade des États-Unis à Jérusalem n’est pas raisonnable, mais diminuer les moyens alloués l’est encore moins. En effet, 5 millions de Palestiniens en seront privés davantage encore de perspectives d’avenir. Sur ce point, nous devons émettre un signal fort. Nous devons nous assurer que les États-Unis honorent leurs engagements et réfléchir tous ensemble, à l’échelle européenne, aux moyens d’apporter notre aide.

Mme LAVIE (Israël, observateur)* – Que l’Assemblée parlementaire manifeste un intérêt pour la situation prévalant en Israël et dans les territoires palestiniens est une bonne chose. Qu’elle affirme espérer que des progrès seront accomplis est bienvenu. Toutefois, le projet de résolution, ainsi que les débats des deux derniers jours, témoignent d’une forme d’obsession pour ce sujet qui l’empêche d’être un véritable partenaire en matière de promotion du dialogue.

Ainsi, je suis profondément préoccupée de constater que certains membres de cette Assemblée tentent d’instrumentaliser ce débat afin d’éviter que l’on aborde les sujets essentiels. D’abord, il n’y a pas d’alternatives à des négociations directes entre les deux parties. Ensuite, les décisions unilatérales ne font pas progresser la paix; au contraire elles en sapent les fondements et encouragent les Palestiniens à dénigrer Israël au sein des enceintes internationales. Enfin, l’incitation permanente au terrorisme et le financement des familles des terroristes auxquels se livrent les dirigeants palestiniens constituent un encouragement au terrorisme.

Si cette Assemblée a véritablement pour ambition de proposer une solution au conflit israélo-palestinien, j’espère qu’elle procédera de façon bien plus constructive et réfléchie qu’en débattant dans le cadre de la procédure d’urgence. Peut-être pourrait-elle commencer par admettre des faits élémentaires, tels que les liens anciens unissant le peuple juif à Israël, sa terre d’origine, et à sa capitale Jérusalem. Dans ce contexte, je note que les récentes déclarations des dirigeants palestiniens ne vont pas dans le bon sens, au contraire: ils semblent décidés à souffler sur les braises et incitent l’opinion publique à saboter tout dialogue futur. Ainsi, les dirigeants de l’Autorité palestinienne refusent de revenir à la table des négociations et ont annoncé à plusieurs reprises qu’ils repousseraient tout plan de paix proposé par le gouvernement du Président Trump. Nous espérons fortement que les pays européens n’encourageront pas cette attitude de rejet.

Enfin, je ne comprends pas que ce débat s’inscrive dans le cadre d’une procédure d’urgence alors qu’il a été annoncé il y a deux mois: où est l’urgence? Si vous voulez vraiment nous aider et ne pas perdre votre temps, soyez créatifs. Ce rapport ne l’est pas.

M. THÓRARINSSON (Islande)* – Ayant travaillé jadis pour les Nations Unies, j’ai eu l’occasion de travailler et de vivre avec le peuple palestinien. Je compte également des Israéliens parmi mes bons amis. J’ai vécu à Jérusalem-Est et j’ai été amené à me rendre en Cisjordanie et à Gaza pour des raisons professionnelles.

Les Palestiniens souffrent chaque jour de conditions de vie très dures en raison de l’occupation israélienne. Je dois dire que j’admire la détermination dont fait preuve le peuple palestinien, qui croit véritablement qu’un jour il sera libre et traité avec dignité. À ce propos, j’aimerais citer Ephraïm Halévy, ancien chef du Mossad, qui a affirmé en 2014 qu’aucune paix n’est possible au Proche-Orient si les Israéliens ne traitent pas les Palestiniens comme leurs égaux.

Sur place, j’ai souvent demandé à des jeunes Palestiniens leur opinion sur le conflit et leur vision de l’avenir. En particulier, je les ai interrogés sur une solution à deux États, mais celle-ci ne fait pas partie de leurs priorités. Après vingt ans de négociations de paix intermittentes sans résultat, ils n’y croient plus. La plupart des jeunes Palestiniens nourrissent les mêmes aspirations que tout un chacun: ils veulent obtenir un emploi, fonder une famille et devenir propriétaire; ils veulent vivre en sécurité et se déplacer librement. Leurs espoirs et leurs rêves sont ceux de tous les autres jeunes de la planète.

Tandis que nous discutons d’un épineux conflit, il importe de sortir des sentiers battus. J’ai ainsi demandé aux jeunes Palestiniens leur avis sur une solution à un État. À ma grande surprise, beaucoup d’entre eux y étaient favorables, dès lors que chacun y voit garantis la liberté et les droits de l’homme, notamment la liberté de circuler et de travailler ainsi que l’égalité des droits entre Palestiniens et Israéliens et la sécurité de tous. Une solution à un État sort des sentiers battus au nom de la paix. La volonté de la population doit prévaloir sur celle des responsables politiques, qui n’ont rien fait au cours des vingt dernières années. Nous devons prêter attention aux espoirs et aux rêves des jeunes.

Mme DURANTON (France) – Monsieur le Président, mes chers collègues, alors que le processus de paix israélo-palestinien était au point mort depuis 2014, il a récemment connu de nouveaux développements, mais ils sont négatifs et inquiétants, avec une dégradation régulière de la situation, à la fois sur le terrain et dans les esprits.

Le processus avait bénéficié, depuis la fin de l’année 2016, d’une réelle mobilisation de la communauté internationale, de la part du Quartet et du Conseil de sécurité de l’Onu, lequel avait adopté une résolution condamnant la colonisation israélienne. La conférence internationale réunie le 15 janvier 2017 sur l’initiative de la France avait quant à elle montré une certaine unité pour préserver la solution à deux États.

La reconnaissance par l’administration Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël – et l’annonce de son intention d’y installer l’ambassade des États-Unis – est contraire au droit international et paraît en contradiction avec sa volonté affichée de s’engager en faveur de la résolution du conflit. Elle complique considérablement la mise en place de la solution à deux États, la seule susceptible de garantir une paix durable. À ce titre, elle a été légitimement condamnée par l’Assemblée générale de l’Onu, où l’isolement diplomatique des États-Unis a été manifeste. Toutefois, au-delà des incertitudes engendrées par la décision américaine, il ne faut pas surestimer la portée de cette dernière. L’éloignement de la paix durable tient avant tout aux choix politiques des deux parties.

Le Gouvernement israélien, sous la pression de formations extrémistes, ne cesse de durcir sa position. La colonisation s’étend chaque année un peu plus et, en février 2016, la Knesset a adopté une loi visant à régulariser les colonies sauvages, celles qui sont illégales même du point de vue du droit israélien. Parallèlement, les destructions d’habitations et d’infrastructures se poursuivent dans les territoires palestiniens occupés, en particulier à Jérusalem-Est. La Knesset a également voté récemment un amendement à la Loi fondamentale qui permet de modifier les limites de la municipalité de Jérusalem, au détriment de sa partie orientale. Enfin, la situation humanitaire s’aggrave dans la bande de Gaza, et la sécurité y reste très fragile.

Du côté palestinien, le Fatah et le Hamas ont certes conclu au Caire, en octobre dernier, un accord de réconciliation, négocié sous l’égide des autorités égyptiennes, mais dans quelle mesure sera-t-il appliqué? Pour l’instant, la décision américaine relative à Jérusalem n’a pas provoqué l’embrasement redouté, mais les dirigeants palestiniens ont remis en question le rôle de médiateur impartial de Washington. Le Conseil central de l’OLP s’est récemment prononcé en faveur de la suspension de la reconnaissance d’Israël.

Le conflit israélo-palestinien connaît une mutation dangereuse. La société israélienne ne semble pas considérer que le conflit a un coût trop élevé. Plus que jamais la perspective d’un État palestinien viable s’éloigne, et avec elle l’espoir des Palestiniens. À l’inverse, comme l’avait montré l’épisode de l’esplanade des Mosquées en juillet dernier, la question palestinienne devient excessivement confessionnelle. Tout cela ne présage rien de bon.

M. KILIÇ (Turquie)* – L’occupation par Israël des Territoires palestiniens continue à être une source majeure d’instabilité dans la région et au-delà, car elle est exploitée par les groupes extrémistes. Une Palestine indépendante avec Jérusalem-Est comme capitale dans les frontières de 1967 est la seule solution possible. La déclaration du Président Trump reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël, suivie de l’annonce du déménagement de l’ambassade américaine, représente une violation des résolutions des Nations Unies. Le 21 décembre, une nouvelle résolution des Nations Unies a confirmé que cette décision américaine n’était pas valable.

La Turquie a organisé un sommet à Istanbul et a demandé que Jérusalem-Est soit reconnue comme la capitale de la Palestine. Il faut renforcer le soutien international à l’État palestinien pour contrecarrer les déclarations américaines. Le nombre de pays qui ont reconnu l’État palestinien s’accroît. Il est important que les États membres du Conseil de l’Europe le reconnaissent eux aussi. Nous voyons que certains dirigeants israéliens se sentent encouragés à violer davantage encore les droits fondamentaux des Palestiniens. Il faut mettre un terme à la politique israélienne de construction de colonies, laquelle ne peut qu’entraver le processus de paix.

Nous devons continuer à n’épargner aucun effort pour améliorer la situation des Palestiniens du point de vue du respect des droits de l’homme. Nous avons vu que l’armée israélienne a essayé d’arrêter les jeunes Palestiniens. Nous savons que le statu quo actuel ne peut perdurer. Nous devons prendre toutes les mesures nécessaires pour réactiver le processus de paix.

Mme McCARTHY (Royaume-Uni)* – Je commencerai par féliciter mon collègue du Parlement britannique, M. Byrne, dont l’intervention au nom du Groupe des socialistes, démocrates et verts était, comme toujours, pleine de sagesse.

Ma dernière visite en Israël et en Palestine remonte à 2005. J’y suis retournée début 2006 en tant qu’observateur des élections de l’Autorité palestinienne. J’aurais aimé m’exprimer aujourd’hui avec plus d’optimisme et souligner les progrès accomplis depuis lors. Malheureusement, je ne le peux: nous sommes plus éloignés que jamais de la solution dite à deux États, plus éloignés que jamais de ce qui est décrit dans le rapport, à savoir «deux aspirations aussi légitimes l’une que l’autre: le droit d’Israël d’être reconnu et d’exister en toute sécurité et le droit des Palestiniens d’avoir un État, viable et contigu».

L’expansion illégale des colonies israéliennes, la fragmentation qui s’ensuit de la Cisjordanie, ont conduit beaucoup à se demander si la solution à deux États restait la solution viable. En 2005, je me suis rendue dans une colonie à l’extérieur de Jérusalem, Ma’ale Adumim, qui accueille aujourd’hui plus de 40 000 personnes et qui tout récemment, juste avant Noël, est devenue la première colonie sauvage à être officiellement annexée et reconnue par la Knesset.

Oui, Israël a le droit de se protéger, mais la destruction des habitats palestiniens et la construction des colonies illégales ne font pas partie de ce droit.

Israël se décrit fièrement comme la seule démocratie du Moyen-Orient, mais nous voyons constamment qu’il viole le droit international. Lorsque Obama a refusé d’exercer son veto contre une résolution visant les colonies, en 2016, nous nous en sommes félicités, mais aujourd’hui le Gouvernement américain nous donne moins de raisons d’être optimistes. La décision provocante, irréfléchie et dangereuse du Président Trump de transférer l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem relève d’une politique de la gesticulation dans ce qu’elle a de pire. Cela met en péril la perspective de la solution à deux États avec Jérusalem comme capitale partagée.

Des générations de jeunes ont grandi en ne connaissant que la scission, la division et le conflit. Un trop grand d’enfants palestiniens ont été arrêtés, interrogés et détenus. En 2012, le rapport consacré au fait que des enfants soient jugés par des tribunaux militaires a été mis en avant. Des suggestions y étaient faites en vue d’une amélioration de la façon dont les autorités israéliennes gèrent le dépôt des plaintes.

Je dois évoquer, à cet égard, le cas de cette jeune fille palestinienne, âgée de 16 ans, qui est devenue le symbole de cette situation. Le quotidien britannique The Guardian a récemment publié un article de la journaliste Harriet Sherwood, qui s’est entretenue avec elle. On y apprend comment Ahed Tamimi et son père, né en 1967, n’ont connu, leur vie durant, que les points de contrôle, les intimidations, la destruction de leur habitat, l’humiliation et la violence. La jeune fille fait part de son ambition de devenir avocate pour défendre les droits de l’homme. Or que lui arrive-t-il? Elle croupit dans une prison israélienne. Soucieuse de l’intérêt des enfants palestiniens, je soutiens le projet de résolution.

M. BILDARRATZ (Espagne)* – Si quelqu’un remet en cause la compétence de notre Assemblée pour débattre du sujet, nous pouvons lui apporter bien de réponses, mais j’ai surtout pour ma part à l’esprit les images de l’été 2014, au cours duquel plus de 2 300 personnes sont mortes et plus de 100 000 déplacées. Si ces chiffres ne sont pas une raison suffisante pour justifier ce rapport, je me demande bien quelle est la fonction du Conseil de l’Europe. Monsieur le rapporteur, je vous remercie et je vous félicite pour l’élaboration de ce rapport.

Nous devons aussi nous interroger sur le rôle que joue l’Europe dans ce conflit. Comment répondons-nous, par exemple, aux initiatives de Trump? Tant qu’il n’y aura pas de véritable volonté de la communauté internationale de résoudre ce conflit, on ne trouvera pas de solution. Israël et la Palestine n’y arriveront pas seuls.

Il est donc indispensable que la communauté internationale engage des mesures et une action fortes. Je suis totalement favorable à une solution à deux États mais, pendant ce temps, les États-Unis reconnaissent Jérusalem comme capitale d’Israël, fixent la date du déménagement de leur ambassade et le Président Trump vient devant la Knesset recevoir des applaudissements.

Des murs sont construits, et il y a de plus en plus de colonies en Cisjordanie, en totale violation du droit international. Nous ne pouvons pas traiter les deux parties sur un pied d’égalité. Alors que, dans les rues d’Israël, il n’y a aucun problème – ce sont des rues comme celles de nos villes –, à Gaza ou en Cisjordanie, les Palestiniens n’ont pas de trottoirs, connaissent des coupures d’électricité et n’ont pas l’eau courante. À Gaza, la situation ressemble à celle qui existait en Espagne durant la Guerre civile, avec des tickets de rationnement pour acheter à manger. Nous avons récemment adopté une résolution visant à faire lever le blocus de Gaza: regardons quelle y est la situation.

Le dialogue est essentiel, la négociation l’est tout autant, mais la communauté internationale doit faire plus. Le Conseil de l’Europe doit reconnaître l’État de Palestine et encourager tous ses États membres à le faire. Le dialogue et la négociation, c’est très bien, mais la communauté internationale doit faire bien plus pour résoudre ce conflit.

M. CROWE (Irlande)* – Je commencerai par dire combien je me sens solidaire du peuple palestinien, qui vit sous l’occupation israélienne et le régime de ségrégation mis en place par Israël.

Je suis en total désaccord avec la décision du Président des États-Unis de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et de déplacer l’ambassade américaine dans cette ville. Il s’agit là d’une action dangereuse et irresponsable. Il ne faut pas normaliser l’occupation illégale de la Palestine par Israël, sans oublier celle de Jérusalem-Est. La décision unilatérale des États-Unis aura de grandes conséquences sur le processus de paix, alors que celui-ci est déjà en danger du fait de l’occupation continue du territoire palestinien, de l’implantation de colonies et du régime de ségrégation mis en œuvre par Israël.

Je demande à tous les membres de cette Assemblée d’exercer des pressions dans leur pays afin qu’il y ait une reconnaissance officielle de l’État de Palestine et que Jérusalem-Est soit sa capitale. Le régime de ségrégation qu’Israël a mis en place en Palestine est à nouveau porté sur le devant de la scène à cause de l’arrestation d’Ahed Tamimi. Cette jeune fille d’à peine 16 ans est détenue dans une prison militaire israélienne depuis le 19 décembre, dans l’attente de son procès. Qu’a-t-elle fait? Elle a eu le culot de gifler un soldat israélien dans le village cisjordanien de Nabi Saleh, occupé illégalement par Israël.

Ahed dit qu’elle était inquiète parce que son cousin de 15 ans venait d’être touché au visage par une balle en caoutchouc tirée par des soldats israéliens. Elle était inquiète. Elle a été arrêtée trois jours plus tard, tirée de son lit à 4 heures du matin. Sa mère, venue la voir au commissariat pour avoir de ses nouvelles, a également été placée en détention. L’arrestation et la comparution d’Ahed devant un tribunal militaire soulignent bien qu’il existe deux systèmes juridiques séparés selon que vous êtes un Palestinien ou un colon israélien. Cela tient au régime ségrégationniste dont je parlais.

Ahed Tamimi est un cas parmi les 1 400 enfants palestiniens qui ont été traduits devant les tribunaux militaires israéliens au cours des trois dernières années. Les colons israéliens, quant à eux, ont accès à des tribunaux civils quand ils sont soupçonnés d’avoir commis des délits. Les organisations de défense des droits de l’homme sont très critiques à l’égard de ce double système israélien, qui méconnaît les droits fondamentaux et n’accorde aucune garantie de procès équitable aux Palestiniens.

Ahed Tamimi devrait être libérée. Je demande aux membres de cette Assemblée de s’unir pour demander sa libération ainsi que celle des 313 autres enfants palestiniens actuellement emprisonnés par Israël.

M. KHADER (Palestine, partenaire pour la démocratie)* – Il faut des compromis pour parvenir à instaurer la paix mais, pour que la paix soit juste, elle doit se faire dans le respect du droit international et des résolutions prises par la communauté internationale.

Quels sont aujourd’hui les faits? Israël occupe certains territoires de l’État de Palestine de façon illégale et y implante des colonies, en violation complète du droit international. Les Israéliens violent les droits fondamentaux du peuple palestinien, le soumettant à des actes de répression et à des humiliations de toutes sortes.

Nous sommes entièrement d’accord avec ceux qui disent qu’il faut parvenir à la paix grâce à la négociation et au dialogue. Nous sommes aussi tout à fait d’accord pour dire que nos deux peuples, israélien et palestinien, doivent trouver un moyen de vivre ensemble. Mais comment y parvenir? Vivre ensemble signifie se reconnaître mutuellement. Pourquoi demander aux Palestiniens de reconnaître l’État d’Israël de façon inconditionnelle alors que l’État d’Israël ne reconnaît pas l’existence du peuple palestinien et bafoue ses droits? Ce n’est pas équitable.

Il importe que le Conseil de l’Europe en appelle au compromis et au dialogue entre les deux parties, mais il est tout aussi important qu’il respecte et promeuve les principes du droit international. La principale valeur ajoutée du Conseil de l’Europe, celle en laquelle nous croyons, est la défense des droits de l’homme et de l’État de droit. Respecter le droit international doit donc être l’un des devoirs du Conseil; c’est la voie qui doit être empruntée par cette Assemblée.

J’approuve ce qui a été dit par notre collègue britannique et les paroles par lesquelles il a conclu son intervention: le statut des États-Unis en tant que médiateur dans ce processus est terminé; il est temps pour l’Europe de faire avancer les choses.

Mme ÆVARSDÓTTIR (Islande)* – Israël est le seul État qui traduit des enfants devant des tribunaux militaires. Ceux-ci sont systématiquement emprisonnés pour de prétendus jets de pierres contre des soldats israéliens. Très souvent, ces enfants sont soumis à la torture et aux mauvais traitements. Ils sont condamnés sur la base de décrets militaires qui vont bien au-delà de ce qui est prévu par les Conventions de Genève et ne respectent en rien l’État de droit. Plus précisément, ces décrets militaires ne sont pas portés à la connaissance du peuple palestinien et ne s’appliquent pas de la même façon à toute personne vivant sur le territoire – en l’espèce, ils ne s’appliquent pas aux colons israéliens.

Ces décrets n’accordent aucune garantie procédurale aux palestiniens jugés pour leur violation. Les Palestiniens ne peuvent obtenir la modification de ces textes alors qu’ils façonnent leur vie quotidienne. Leur application constitue une violation des principes démocratiques.

Les attaques continues, les emprisonnements arbitraires, les colonies illégales, les violences réitérées à l’encontre du peuple palestinien constituent des violations continues et répétées des droits de l’homme perpétrées par l’État israélien à l’encontre des Palestiniens.

L’État d’Israël ne respecte pas l’État de droit. Sa conception de la démocratie est fondée, au mieux, sur la discrimination. Il ne montre aucun respect pour les droits fondamentaux du peuple palestinien dont les terres sont occupées depuis des décennies.

Quel rôle le Conseil de l’Europe peut-il jouer dans ce conflit? Nous devons exiger qu’Israël, État observateur auprès de l’Organisation, respecte nos principes, qu’il honore enfin nos valeurs fondamentales, à savoir le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit.

M. PISCO (Portugal)* – La déclaration par laquelle Donald Trump a reconnu Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël constitue un signal alarmant qui pourrait signer l’arrêt de mort du prétendu «processus de paix» et de la création d’un État de Palestine. À la suite de cette annonce, au moins 17 personnes ont été tuées – mais cela ne semble plus avoir beaucoup d’importance –, les tensions se sont accrues et le monde est encore plus divisé.

Tous les rapports, déclarations et initiatives visant à résoudre ce problème ancien sont les bienvenus, mais il nous faut maintenant aller plus loin. Le Conseil de l’Europe ne doit pas avoir peur de défendre les droits de l’homme et de lutter contre l’arbitraire. Nous tous, individus et institutions – je pense notamment à l’Union européenne –, nous ne pouvons continuer à ignorer la violation continue des droits les plus fondamentaux des Palestiniens.

La reconnaissance de la Palestine comme membre de l’Unesco et le statut d’observateur qui lui a été accordé par l’Assemblée générale de l’Onu sont autant de signes de la lassitude de la communauté internationale face aux faux espoirs. Certes, Israël a le droit d’avoir sa terre, mais nous avons le devoir moral d’aider les Palestiniens à disposer d’un État viable. Il serait honteux que nous nous fassions complices de la volonté israélienne, à l’œuvre depuis une centaine d’années, de priver le peuple palestinien de sa terre.

La taille des Territoires palestiniens est inférieure de 20 % à celle de la Palestine historique de 1948. En Cisjordanie et à Jérusalem, les colonies juives s’étendent continuellement. La Knesset a approuvé à titre rétroactif la confiscation des terres. En réalité, Israël méprise les Nations Unies et le droit international et nous l’acceptons.

Chers collègues, nous devons regarder la réalité cachée derrière les mots: il y a non pas un processus de paix mais un conflit sans fin; il n’y a pas de dialogue et de confiance, car il y a trop de sang et de ressentiment. Les négociations sont vouées à l’échec et la solution à deux États vivant en paix et en sécurité ressemble de plus en plus à une illusion destinée à gagner du temps pour rendre la création d’un État palestinien impossible.

Dès lors, afin d’être cohérent avec sa mission et ses valeurs, le Conseil de l’Europe doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour protéger les droits fondamentaux des Palestiniens et contribuer à la reconnaissance d’un État palestinien souverain tant qu’il est encore temps. Demain, sans doute, il sera trop tard.

Mme TRISSE (France) – La paix entre Israéliens et Palestiniens figure parmi ces enjeux déterminants dont les organisations internationales ne cessent de se préoccuper depuis des décennies. Si l’on ne peut que se réjouir de la constance de l’attention portée par la communauté internationale à cet objectif, il est néanmoins regrettable que le but d’une résolution durable des différends n’ait toujours pas été atteint, après tant d’années.

Bien que l’Organisation des Nations Unies soit le cadre dans lequel ont été prises la plupart des décisions touchant à la résolution des aspirations légitimes de ces deux peuples à la sécurité, à l’indépendance, à la reconnaissance et à la dignité, le Conseil de l’Europe et notre Assemblée parlementaire se sont eux aussi penchés sur bien des aspects de la question.

Je me bornerai à évoquer, à cet égard, la Résolution 1940 (2013) sur la situation au Proche-Orient, adoptée le 25 juin 2013, qui rappelait l’attachement de notre Assemblée à une solution à deux États et incitait chaque partie à observer un certain nombre de principes élémentaires en matière de droits de l’homme. Plus récemment, le 24 janvier 2017, notre Assemblée a également adopté la Résolution 2142 (2017) sur la crise humanitaire à Gaza, dans laquelle elle appelait plus particulièrement l’attention sur la situation très difficile des Palestiniens de la région, tout en condamnant les attaques visant Israël.

Dans le contexte de blocage actuel, les pays et les instances internationales qui ont toujours défendu une position équilibrée fondée sur une solution à deux États, parce qu’ils demeurent acceptés et reconnus par les deux parties, conservent un rôle de médiation.

La France, qui a été l’un des premiers pays à reconnaître l’État d’Israël et a établi avec lui des relations diplomatiques dès 1949, mais qui a aussi été la première, par la voix de François Mitterrand, en 1982, à exprimer devant la Knesset l’objectif de la création d’un État palestinien, porte des propositions largement partagées dans cette enceinte. Je les rappelle pour mémoire: des frontières basées sur les lignes de 1967, avec des échanges agréés de territoires équivalents; des arrangements de sécurité préservant la souveraineté d’un État palestinien et garantissant la sécurité d’Israël; une solution juste, équitable et agréée au problème des réfugiés; un arrangement faisant de Jérusalem la capitale des deux États.

Plus que jamais, à mon sens, notre Assemblée parlementaire, l’Europe en général et l’Onu doivent rappeler leur attachement à ces principes pour permettre de progresser sur le chemin d’une solution. Nos échanges de ce matin peuvent adresser un signal en ce sens et, personnellement, je m’en réjouis car les peuples israélien et palestinien méritent tous les deux de vivre en paix.

M. ALBAKKAR (Jordanie, partenaire pour la démocratie)* – Je voudrais réaffirmer ici que la Jordanie appuie la solution à deux États.

Le Moyen-Orient ne peut connaître la paix et la sécurité si l’on ne trouve pas une solution juste à la question palestinienne. Israël n’est pas au-dessus du droit international. La violation du droit que constitue l’occupation israélienne entraîne la région vers plus de violence et d’extrémisme.

Notre partenariat avec le Conseil de l’Europe montre que nous croyons aux valeurs universelles que sont le respect des droits de l’homme, la liberté et l’État de droit. Or ce qui se passe en Palestine est contraire à toutes ces normes. Nous ne pouvons rester silencieux face à l’arrestation et à la torture d’enfants, à l’emprisonnement de femmes sans procès, aux violations de la liberté, ou encore aux 150 lois racistes approuvées par la Knesset en 2015 et 2016. La législation qui soutient l’occupation israélienne est discriminatoire en son essence. De la même façon, Israël emprisonne de manière arbitraire les Palestiniens et cible les militants des droits de l’homme venant d’autres pays. En d’autres termes, Israël viole les principes et les valeurs du Conseil de l’Europe. Des innocents, en particulier des femmes et des enfants, en Palestine comme dans le reste du Moyen-Orient, continuent à aspirer à ce qu’Israël respecte le droit international.

Dans ce contexte, au nom des Jordaniens, je voudrais remercier l’Union européenne, qui s’est opposée à la décision des États-Unis de déplacer son ambassade à Jérusalem. Cette décision ne provoquera que plus d’extrémisme, de terrorisme et de pratiques racistes de la part d’Israël.

Nous sommes les gardiens des lieux saints de Jérusalem et nous vous demandons votre soutien, Mesdames et Messieurs. Face aux décisions américaines, l’Europe continue de soutenir la liberté, les droits de l’homme et le droit international, mais elle doit se montrer plus efficace dans son action en faveur du processus de paix et d’une solution à deux États, conformément aux résolutions des Nations Unies.

Mes chers collègues, savez-vous que la Knesset en est désormais réduite à expulser les parlementaires qui condamnent les colonisations au nom du droit international?

M. BLAHA (République slovaque)* – Je félicite le rapporteur pour son travail équilibré, que je soutiens. Sur le conflit israélo-palestinien, il ne saurait être question de nos sentiments. J’aime autant les Juifs que les Arabes. Il s’agit ici de justice, et non d’antisémitisme à l’égard des uns ou des autres – puisque ces deux peuples sont sémites. Je ressens une profonde tristesse lorsque je pense aux victimes de ce conflit, et je condamne les violences, la guerre, les violations du droit international et la construction de colonies israéliennes sur les terres palestiniennes. Le peuple palestinien a droit à son territoire et à l’émancipation nationale.

La République slovaque a reconnu l’État palestinien et je m’en félicite. Elle soutient la solution à deux États et condamne la décision unilatérale et irresponsable des États-Unis sur le statut de Jérusalem. La délégation slovaque des Nations Unies a voté la condamnation de cette décision. Je m’oppose résolument à l’utilisation du chantage dans les relations internationales. Je m’oppose à ce qu’une superpuissance joue de son poids financier pour obtenir le soutien de pays en voie de développement lors de votes. C’est un véritable scandale.

La décision du Président Trump à l’égard de Jérusalem est une violation des traités internationaux. Elle constitue un nouvel obstacle sur la voie de la paix. Je pense, comme le rapporteur, que les États-Unis ont perdu leur place de médiateur digne de confiance au niveau international. L’occasion est venue pour l’Europe de prendre la tête dans le processus de paix israélo-palestinien. Remplaçons le feu et la fureur par la paix et la justice.

La sécurité du peuple israélien est bien entendu extrêmement importante, mais elle ne peut être invoquée pour justifier les assassinats, les injustices, les guerres et le blocus économique. Comme d’autres collègues l’ont souligné, nous devons être conscients de la montée de l’antisémitisme en Europe. Je fais de mon mieux, dans mon pays, pour lutter contre les nouvelles formes du fascisme et de l’extrémisme. Heureusement, l’antisémitisme n’augmente pas en République slovaque. Je suis heureux de pouvoir dire que l’immense majorité des Slovaques respectent et admirent la merveilleuse culture juive. Il y a toutefois une grande différence entre la protection des juifs en tant que minorité en Europe et la défense inconditionnelle d’Israël et de sa politique. Se monter critique à l’encontre d’Israël, ce n’est pas être antisémite. Cet argument mis en avant par certains représentants israéliens est parfaitement puéril.

Dans la lutte qui oppose David à Goliath, je serai toujours aux côtés du premier, parce qu’il est le plus faible. Le peuple palestinien a beaucoup souffert. Il mérite la liberté et la justice sociale. Tant les Israéliens que les Palestiniens ont le droit de vivre en paix. On ne peut pas en dire autant de M. Trump.

M. SHEPPARD (Royaume-Uni)* – J’aimerais souligner trois points au sujet du projet de résolution, que je soutiens. Le premier concerne la politique de l’administration américaine actuelle. Lorsque le Président Trump a prononcé sa déclaration sur Jérusalem, avant Noël, le monde a été stupéfait, mais nous devons comprendre qu’elle s’inscrivait dans la stratégie actuelle de l’administration américaine. À la fin de l’année dernière, Israël est entré dans une phase agressive de construction de nouvelles colonies dans les territoires occupés, à l’est de Jérusalem. La Cisjordanie s’est trouvée coupée en deux et il est devenu impossible de mener une politique continue dans cette zone. M. Trump a – c’était son cadeau pour la nouvelle année – coupé les fonds destinés à l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient.

Pendant 50 ans, le monde s’est tourné vers les États-Unis pour qu’ils apaisent les conflits de manière impartiale, mais ils prennent désormais parti, ce qui leur interdit d’occuper la place de médiateur au niveau international. Les États-Unis se sont volontairement privés de jouer le rôle de leader mondial, qui revient aujourd’hui aux États européens. J’espère que ces derniers exerceront ce rôle, avec le Conseil de l’Europe, afin de relancer le processus de paix israélo-palestinien.

Le deuxième point que je veux souligner concerne la solution à deux États. Tout le monde semble penser qu’il s’agit là d’une bonne solution, mais je crois personnellement qu’elle est très difficile. En effet, on ne peut pas ne pas tenir compte de la réalité politique sur place. L’occupation du territoire palestinien est ancienne. On ne pourra pas avoir une solution à deux États si l’un de ces deux États est occupé par l’autre de manière illégale. Il faut donc demander à Israël de reprendre les négociations sur la base des frontières de 1967.

Troisième point, il est impératif de tenir compte de l’opinion publique. Un grand nombre de citoyens israéliens agissent courageusement dans les domaines du journalisme et des droits de l’homme. Ils défendent le respect des droits de l’homme dans leur pays et un accord avec les Palestiniens. Ils pensent que seules la fin de l’occupation et la création d’un État palestinien permettront d’assurer la sécurité des citoyens israéliens. Ils ont raison et notre Assemblée doit relayer leur message. Au cours des dernières années, nous nous sommes rendu compte du désespoir qu’entraîne le conflit israélo-palestinien au sein des populations. Le processus de paix doit absolument reprendre grâce à la relance des négociations.

M. WIECHEL (Suède)* – Je me félicite que notre Assemblée débatte ce matin du processus de paix israélo-palestinien et que le Conseil de l’Europe entende prendre toute sa part à la relance des négociations. Israël a le statut d’État observateur au sein de notre Assemblée depuis de longues années. Les délégués israéliens contribuent d’ailleurs à nos débats. La Palestine a quant à elle le statut de partenaire pour la démocratie. Elle participe également à nos débats.

Le processus de paix en tant que tel ne me semble pas être en danger. Il reprendra naturellement une fois que le principal obstacle qui s’y oppose sera levé. La paix, en effet, est dans l’intérêt des deux parties.

J’appuie, tout comme mon parti, la solution à deux États. Un grand nombre de Palestiniens travaillent et vivent en Israël; d’autres habitent dans les Territoires palestiniens mais traversent la frontière tous les jours. Nous devons utiliser davantage les occasions que nous offre la présence des délégations israélienne et palestinienne au sein de l’Assemblée et évoquer, chaque fois que nous le pouvons, des questions qui peuvent sembler mineures, telles que les procédures à la frontière, les eaux territoriales ou les droits de pêche. Nous passerons ensuite à d’autres sujets.

Notre Assemblée est la championne de la diplomatie parlementaire. Quel objectif plus noble pourrions-nous avoir que de tenter sérieusement de contribuer à des relations pacifiques entre Israël et la Palestine?

Enfin, je souhaite évoquer le soutien financier que les membres du Conseil de l’Europe apportent à l’Autorité palestinienne chaque année. Il ne devrait en aucun cas pouvoir être utilisé pour financer des attaques terroristes en Israël ou la propagande antisémite. Au contraire, pour favoriser le processus de paix entre Israël et la Palestine, nous devons lutter contre l’antisémitisme, un phénomène qui va malheureusement en s’aggravant dans mon pays, la Suède.

LE PRÉSIDENT* – Il nous faut maintenant interrompre la liste des orateurs.

Les orateurs inscrits qui, présents pendant le débat, n’ont pu s’exprimer, peuvent transmettre, dans les quatre heures, leur intervention dactylographiée au service de la séance, pour publication au compte rendu. Cette transmission doit être effectuée, dans la mesure du possible, par voie électronique.

J’appelle la réplique de la commission.

M. CORLĂŢEAN (Roumanie), rapporteur* – Je remercie très sincèrement tous les collègues qui ont participé au débat. Certains d’entre eux ont choisi d’adopter une position équilibrée, beaucoup ont choisi d’être constructifs, d’autres d’être critiques et d’autres encore ont condamné ce rapport. Quoi qu’il en soit, toutes les interventions ont démontré que ce débat était nécessaire, que la commission a fait collectivement preuve de sagesse et que les propositions du rapport sont justes.

Monsieur Ghiletchi, vous n’étiez pas présent à Paris, pour la bonne raison que vous n’êtes pas membre la commission des questions politiques. Sachez cependant que l’un de nos collègues, un sage – qui n’est pas Européen et qui est présent aujourd’hui dans cet hémicycle –, nous a conseillé, plutôt que de critiquer ou condamner, de trouver une approche constructive et positive. Nous avons décidé de suivre son conseil: nous nous sommes efforcés de ne pas endommager, détruire ou saper mais, au contraire, de construire. Tel est l’élément clé de ce projet de résolution: apporter une contribution positive.

J’ai bien entendu, par ailleurs, toutes les interventions des membres des délégations palestinienne et israélienne. Je comprends parfaitement ce qui a été dit, je sais qu’il existe des nuances et que chacune des positions a ses raisons.

Sachez, chers collègues palestiniens, que lorsque vous nous avez demandé, voilà plusieurs années, de vous aider à récupérer les corps des Palestiniens décédés dans les prisons israéliennes, afin qu’ils soient rendus à leurs familles, ou encore de faciliter l’accès à l’eau: nous avons pu le faire parce qu’Israël est notre partenaire.

Sachez également, chers collègues israéliens, que si nous avons pu vous aider pour négocier la libération de Gilad Shalit ou pour intervenir sur la question de la radicalisation de jeunes Palestiniens, c’est parce que la Palestine est notre partenaire.

Je vous dis cela pour vous faire comprendre qu’il est possible de travailler ensemble; réussir à vous réunir pour débattre serait la plus importante contribution que pourrait apporter l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. La sagesse qui a conduit à l’élaboration de ce rapport, le respect des sentiments, des émotions et des intérêts des deux parties au conflit, ainsi que des avis qui ont été exprimés, sont la meilleure façon d’apporter une contribution positive au processus de paix.

Il est facile, dans la vie politique, de faire passer la passion avant tout et d’être du côté de ceux qui détruisent. Le projet de résolution que nous vous soumettons aujourd’hui vise non pas à détruire mais à construire. Nous le disons à nos amis israéliens et palestiniens: restons unis et utilisons cette plateforme qu’est le Conseil de l’Europe pour continuer à débattre lorsque les difficultés s’accumulent. Le processus de paix n’avancera que s’il est négocié par des gens courageux, des sages, comme nous l’avons vu dans le passé. Sachez que nous sommes vos amis, que nous sommes à vos côtés.

M. Byrne a fait référence à un fait historique qui s’est déroulé il y a 2 000 ans, lorsque Marie, accompagnée de Joseph, a traversé la Terre sainte jusqu’à Bethléem pour donner naissance à Jésus-Christ – que nous considérons, en tant que chrétiens, comme le Messie. Inspiré par cette référence, je conclurai en disant que Dieu nous a bénis en mettant en nous ce qu’il y a de meilleur, en particulier la sagesse et le courage qui sont nécessaires pour faire la paix.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission des questions politiques a présenté un projet de résolution sur lequel 6 amendements ont été déposés. Les amendements seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte tel que publié dans le recueil des amendements.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

Je suis saisi de l’amendement 1.

M. ÖNAL (Turquie)* – Après avoir abordé ce matin en commission les sujets dont ils traitent, nous retirons les amendements 1, 2, 3 et 4.

LE PRÉSIDENT* – Personne ne souhaite les reprendre.

Les amendements 1, 2, 3 et 4 sont donc retirés.

LE PRÉSIDENT* – Je suis saisi de l’amendement 5.

M. CILEVIČS (Lettonie)* – Par souci de compromis, je vais retirer cet amendement.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 5 est retiré.

Je suis saisi de l’amendement 6.

M. CILEVIČS (Lettonie)* – Comme nous en avons déjà informé le Secrétariat général, nous voudrions proposer un sous-amendement oral, dans un souci de compromis. Je pense sincèrement que nos amis palestiniens peuvent en faire davantage et mettre un terme à toute activité qui pourrait être considérée comme encourageant le terrorisme. Tel est le sens de cet amendement.

LE PRÉSIDENT* - La présidence a été saisie de l’amendement oral suivant:

«I – À l’alinéa 1 de l’amendement 6, substituer aux mots: “après le paragraphe 9.2., insérer le paragraphe suivant”, les mots: “compléter le paragraphe 9.2. par les mots ”.

«II – En conséquence, rédiger ainsi l’alinéa 2 du même amendement: “et à cesser de soutenir ceux qui sont emprisonnés à la suite de condamnations pour des actes de terrorisme ainsi que leurs proches”.»

Je considère que cet amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

M. CILEVIČS (Lettonie)* – Je pense avoir déjà défendu mon sous-amendement oral. Il faut arrêter de soutenir les terroristes qui sont condamnés par des tribunaux. Cela est interprété comme un encouragement au terrorisme. Toutes les parties impliquées, en particulier les autorités palestiniennes, devraient éviter ce genre d’actions.

M. KOX (Pays-Bas)* – Le sujet est particulièrement délicat. Cette proposition serait acceptable si l’on disait «condamnés par des tribunaux civils». Sans cette référence, cela inclut également les plus de 200 000 sanctions prononcées par les tribunaux militaires israéliens. Or ces tribunaux ne respectent pas les critères juridiques de l’article 64 de la IVe Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre et le droit à un procès équitable. Tel est du moins l’avis des Nations Unies, des ONG internationales comme la Croix–Rouge et du président de la cour militaire israélienne lui-même.

Cette référence valide donc les 200 000 condamnations de la part de tribunaux qui ne respectent pas la IVe Convention de Genève. Notre Assemblée doit être particulièrement attentive, et éviter d’adopter un amendement qui aille à l’encontre de la Convention européenne des droits de l’homme, en particulier concernant le droit à un procès équitable. J’ai proposé à M. Cilevičs cette modification. Il ne l’a pas prise en compte. C’est pourquoi je suis contraint de demander à l’Assemblée de voter contre ce sous-amendement oral.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur Kox, j’en suis désolé, mais, d’après le Règlement, il n’est pas possible d’examiner un autre sous-amendement oral.

Dame Cheryl GILLAN (Royaume-Uni), vice-présidente de la commission des questions juridiques et des droits de l’homme* – La commission a accepté à une large majorité ce sous-amendement oral.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en revenons à l’amendement 6, ainsi sous-amendé.

Dame Cheryl GILLAN (Royaume-Uni), vice-présidente de la commission* – Avis favorable.

L’amendement 6 est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14484, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (95 voix pour, 15 voix contre et 10 abstentions).

M. Nicoletti, Président de l’Assemblée, remplace M. Amon au fauteuil présidentiel.

3. Discours de M. Van der Bellen, Président de l’Autriche

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant entendre une allocution de M. Alexandre Van der Bellen, Président de l’Autriche. Il répondra aux questions à l’issue de son discours.

Monsieur le Président, c’est un grand honneur pour moi de vous accueillir aujourd’hui au sein de cet hémicycle. Je devrais d’ailleurs dire « bienvenue pour votre retour », puisque vous avez été membre de notre Assemblée de 2009 à 2012. J’espère que vous vous sentez encore ici chez vous.

L’Europe traverse actuellement une période de transition pendant laquelle elle est particulièrement exposée aux dangers que sont le nationalisme, l’intolérance et le mépris pour les valeurs de compréhension mutuelle et de respect. En ces temps difficiles, votre élection en décembre 2016 a envoyé un réel message d’espoir à tous ceux qui croient en l’Europe, et qui sont fermement attachés à nos valeurs de démocratie, de protection des droits de l’homme et de l’État de droit.

Monsieur le Président, dans votre discours d’investiture, vous avez souligné à quel point il était important de continuer à croire en l’Autriche, cœur de l’Europe non seulement d’un point de vue géographique, mais également politique. Votre ferme attachement à une Europe libre de toute barrière, à une Europe forte, tolérante, unie dans sa diversité, nous montre bien la voie que vous voulez voir votre pays emprunter.

L’Autriche est une petite composante de l’Europe, mais elle lui est essentielle: comme nous l’enseigne votre expérience d’enfant réfugié, c’est une terre de promesses illimitées. Je suis convaincu que l’Autriche, sous votre direction, pourra continuer à jouer son rôle traditionnel de bâtisseur de ponts entre les peuples, les cultures et les nations.

Monsieur le Président, nous nous réjouissons d’écouter votre allocution, et c’est avec une grande joie que je vous donne la parole.

M. VAN DER BELLEN, Président de l’Autriche* – Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général, Madame la Présidente du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée parlementaire, je commencerai par vous remercier de votre invitation à m’adresser à vous ici aujourd’hui.

Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter, Monsieur le Président, pour votre élection. Les membres de l’Assemblée vous connaissent; ils savent que, au cours des deux prochaines années, vous saurez habilement les guider dans leurs travaux pour obtenir les résultats nécessaires. Nous avons déjà eu un excellent échange de vues ce matin.

Chers membres de l’Assemblée, vous avez élu cette semaine votre nouvelle Commissaire aux droits de l’homme, Mme Dunja Mijatovic, qui prendra ses fonctions en avril prochain. Je saisis cette occasion pour la féliciter et l’assurer du plein soutien de l’Autriche dans ses nouvelles fonctions. Nous avions une excellente relation de travail avec l’actuel commissaire, M. Nils Muižnieks, qui a porté une attention toute particulière aux préoccupations et aux besoins de la société civile partout en Europe. Nous serons heureux de partager d’aussi bonnes relations avec Mme Mijatovic, dont j’espère qu’elle pourra exercer sa fonction dans tous les États membres du Conseil de l’Europe.

Comme l’a déjà indiqué le Président, c’est un vrai plaisir pour moi de revenir dans cette Assemblée. Vous le savez peut-être, cela fera un an demain que j’assure la fonction de Président fédéral de la République d’Autriche. C’est une véritable satisfaction personnelle d’avoir pu venir m’adresser à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe au cours de cette première année de mandat.

Je vais maintenant m’exprimer en allemand.

Comme vous le savez, le Conseil de l’Europe est la plus ancienne organisation politique des États européens, et c’est grâce à lui que le processus d’unification politique du continent a pu être concrètement mis en place à l’issue de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste. Depuis, presque tous les États européens sont devenus membres de cette grande instance. Auparavant, l’histoire du continent européen avait été marquée par des siècles de conflits et guerres récurrents. Engagement en faveur des droits de l’homme – on ne le rappellera jamais assez –, garantie des droits fondamentaux, respect des principes de base, lutte contre le terrorisme, soutien au progrès social et économique, ainsi qu’à la coopération culturelle, défense de l’environnement et de la nature en Europe: autant de missions qui sont celles du Conseil de l’Europe.

Ce matin, à mon arrivée au Conseil de l’Europe, j’ai été invité à rédiger quelques lignes dans le Livre d’or. Voici ce que j’y ai écrit: «L’Autriche est très attachée au Conseil de l’Europe, qui est la plateforme de dialogue la plus ancienne du continent, véritablement paneuropéenne de surcroît. En Autriche, la Convention européenne des droits de l’homme a valeur constitutionnelle. La démocratie, les droits de l’homme et la prééminence du droit ressortissent à l’essence même de l’Europe. Ils constituent les ingrédients indispensables de l’Europe à laquelle nous aspirons. Il faut protéger et garantir cet acquis jour après jour».

Près de 70 ans après sa fondation, le Conseil de l’Europe est l’une des grandes constantes du continent. La permanence d’un socle de valeurs fondamentales, voilà ce dont l’Europe a besoin, aujourd’hui plus que jamais! Les trois grands piliers du Conseil de l’Europe que sont la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit présentent malheureusement des fissures inquiétantes. La démocratie, qui suppose un véritable pluralisme politique et d’authentiques élections dont le résultat permette un changement de gouvernement, ne semble pas assurée partout en Europe. La pleine jouissance des droits de l’homme y est localement menacée. En matière d’indépendance de la justice, l’évolution de plusieurs États suscite l’inquiétude.

Il importe particulièrement que nous nous souvenions du consensus dont nous sommes les héritiers, notamment depuis la chute du Rideau de fer, et que nous en retrouvions l’esprit. Il en va de la capacité de l’Europe à assumer des responsabilités mondiales et à exercer une influence dans des régions proches ou lointaines, par exemple en ouvrant l’adhésion aux Conventions élaborées par le Conseil de l’Europe à des pays qui n’en sont pas membres. Nous sommes fiers de l’exemple que constitue l’Europe, dont les États se montrent capables de concilier des intérêts divergents, voire opposés. Il est indispensable de préserver une telle faculté.

Néanmoins, nous savons tous qu’il existe en Europe des tensions et des foyers de conflits. Les travaux des organisations internationales leur sont largement consacrés, notamment ceux du Conseil de l’Europe. L’Autriche en a fait l’expérience l’an dernier, tandis qu’elle assumait la présidence de l’OSCE: de nombreux projets ont abouti, sauf ceux portant sur les foyers de conflit, dont les conditions ont empêché la réalisation de véritables progrès. Le Conseil de l’Europe n’est ni le Conseil de sécurité de l’Onu, ni l’OSCE; il dispose néanmoins d’instruments qui, bien utilisés, peuvent apporter une véritable contribution à la stabilisation des conflits et à leur résolution.

Par exemple, nous disposons de conventions et de procédures de suivi sur des thèmes aussi différents entre eux que la torture, la lutte contre la discrimination des minorités, la corruption ou le trafic d’êtres humains. Il est également essentiel de rappeler que le Conseil de l’Europe exerce son mandat dans une complète indépendance vis-à-vis des autres organisations internationales, ce qui lui confère un potentiel d’action sans équivalent, que nous devons exploiter. Tous les États membres doivent y participer et y travailler, de façon renforcée et ciblée.

Un foyer de crise, apparu au printemps 2014, concerne tout particulièrement l’Europe. Une solution véritablement durable du conflit opposant l’Ukraine à ses voisins suppose une véritable volonté de paix ainsi que des efforts de toutes les parties. À cette fin, il faut renforcer le dialogue et la confiance entre elles. L’éventuel retour de la délégation russe à l’Assemblée parlementaire est l’un des sujets les plus complexes sur lesquels le Conseil de l’Europe doit se pencher. J’espère sincèrement que celle-ci parviendra, dans un avenir proche, à élaborer un consensus permettant d’aboutir à une solution ne faisant ni gagnants ni perdants. La recherche d’une telle solution nous préoccupe tous, car il est urgent d’aboutir.

Je suis conscient des graves problèmes budgétaires auxquels le Conseil de l’Europe est confronté. Ils découlent en premier lieu de l’interruption au mois de juin dernier, par la Fédération de Russie, du versement de sa contribution au budget, et en second lieu du souhait de la Turquie de cesser d’en être l’un des grands contributeurs à partir de 2018. Je nourris l’espoir que la Fédération de Russie réexaminera sa décision avec la célérité qui s’impose et que nous parviendrons à un compromis acceptable avec la Turquie. Seul le dialogue permettra de parvenir à une solution.

En matière constitutionnelle, la Commission de Venise joue un rôle essentiel. Elle est sollicitée par des instances du Conseil de l’Europe comme par les États membres. Ses avis sont respectés, en Europe et hors d’Europe, en raison de la compétence et de l’objectivité dont ils procèdent. Ils sont très estimés, à leur juste valeur. Les membres de la Commission de Venise sont indépendants, y compris vis-à-vis des gouvernements qui les ont nommés.

C’est donc avec inquiétude que j’assiste aux attaques visant ses avis. Dès lors qu’ils divergent des choix politiques de tel ou tel gouvernement, ils sont remis en cause, alors même qu’ils sont systématiquement motivés. Grâce à des arguments, la Commission de Venise a souvent permis d’aboutir à une véritable stabilisation des crises et des conflits. Nous devons renforcer ce rôle.

La Convention européenne des droits de l’homme et la Cour européenne des droits de l’homme sont depuis longtemps des marqueurs de l’Europe. Elles ont pour premier objectif la protection des citoyens, y compris contre leurs propres gouvernements. C’est donc avec inquiétude que j’assiste aux tentatives répétées de ne pas se conformer aux arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l’homme ou d’en faire une interprétation restrictive. Il est indispensable de lutter contre cette tendance. Nous avons tous intérêt à son fonctionnement durable et harmonieux. Nous devons tout faire pour qu’elle demeure en mesure d’examiner de nouvelles affaires et de les traiter dans des délais raisonnables. À cet égard, je me réjouis de rencontrer cet après-midi son président, Guido Raimondi.

Mesdames, Messieurs, permettez-moi, en guise de conclusion, d’évoquer ma patrie. Comme vous le savez, des élections législatives y ont eu lieu en octobre dernier et un nouveau gouvernement a été formé en décembre. En Autriche comme à l’étranger, la coalition gouvernementale a fait l’objet de commentaires, dont certains étaient positifs et d’autres critiques.

En tant que Président de la République, j’ai à cœur de rappeler qu’une vaste majorité d’Autrichiens – comme l’indiquent tous les sondages – sont attachés à l’Union européenne, se félicitent que leur pays en soit membre et sont clairement pro-européens. Ce n’est pas un hasard si j’ai choisi d’effectuer l’an dernier ma première visite officielle à Bruxelles, au Conseil européen et à la Commission européenne, puis à Strasbourg, au Parlement européen.

Peut-être est-il bon de rappeler ce que j’ai dit devant le Parlement européen, le 14 février dernier: l’Europe est un continent de la diversité et non du manichéisme. C’est ce qui en fait un continent unique en son genre. C’est ainsi que, depuis bien longtemps déjà, je me définis comme tyrolien, autrichien et européen. Ma patrie, c’est le Tyrol, Vienne, l’Autriche et l’Europe.

De plus, sur le plan politique, je suis profondément convaincu que ce n’est que dans une Europe unie que l’Autriche, pays relativement petit, pourra satisfaire ses intérêts. Au moment de la constitution du gouvernement, j’ai tenu à souligner clairement la volonté de l’Autriche d’être européenne. Nous voulons assurer la continuité de notre politique étrangère. Nous entendons continuer de souligner l’importance de ces droits fondamentaux. Le respect des droits et libertés sont des principes fondamentaux non négociables.

Vous le savez, au second semestre 2018, l’Autriche exercera la présidence du Conseil de l’Union européenne. Nous sommes en discussion avec nos partenaires de la «troïka», l’Estonie et la Bulgarie, et les préparatifs sont bien avancés. Dans ce cadre, l’Autriche tiendra pleinement compte dans son agenda et son calendrier des points clés du Conseil de l’Europe, qu’il s’agisse des droits de l’homme ou des questions fondamentales de la justice et de la démocratie.

Mesdames, Messieurs, l’Autriche a adhéré au Conseil de l’Europe en 1956. Comme je l’ai indiqué, la Convention européenne des droits de l’homme jouit en Autriche d’un rang juridique constitutionnel. De nombreux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme ont fortement contribué au peaufinage de l’État de droit en Autriche. Notre adhésion à l’Union européenne, en 1995, n’a diminué en rien notre soutien au Conseil de l’Europe. Au contraire, l’Autriche souhaite approfondir cet engagement positif.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée parlementaire, je vous remercie de votre attention et je reste à votre disposition pour répondre à vos questions.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur le Président, je vous remercie de votre discours qui a vivement intéressé les membres de notre Assemblée.

Un nombre important de collègues ont exprimé le souhait de poser une question. Je vous rappelle que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes et doivent avoir un caractère strictement interrogatif.

Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

M. ARIEV (Ukraine), porte-parole du Groupe du parti populaire européen* – Je vous remercie, Monsieur le Président, de votre discours à l’Assemblée.

Quelle est votre position au sujet de la poursuite des sanctions de l’Union européenne contre la Fédération de Russie pour son agression à l’encontre de l’Ukraine? Par ailleurs, un professeur russe, Alexander Dugin, a déclaré ouvertement à Vienne que les Ukrainiens étaient une race de dégénérés qui méritent le génocide. Un tel discours est inacceptable.

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – Votre première question porte sur les sanctions à l’encontre de la Fédération de Russie. L’Autriche défend pleinement la position européenne. En décembre dernier, j’ai participé à la décision sur la poursuite des sanctions, car la mise en œuvre des Accords de Minsk n’avait pas montré de véritable avancée. Il n’est pas encore possible de considérer ces sanctions comme superflues.

Sur le plan économique, cela ne va pas dans le sens de l’intérêt de l’Autriche. Nous entretenons d’étroites relations avec la Fédération de Russie en particulier via des investissements directs. Mais nous acceptons la décision de l’Union européenne tout en essayant, je n’ose pas dire sur tous les fronts mais par tout moyen, de maintenir le dialogue ouvert.

Votre seconde question porte sur M. Dugin. Je vous prie de m’excuser, je n’ai pas été informé de ce qui s’est passé à Vienne. Si ce que vous dites est exact, il est clair que c’est totalement inacceptable. Je ne saurais en aucune façon défendre un tel individu. J’ignore qui l’avait invité et dans quel contexte il s’est exprimé, mais si ce que vous dites est exact, c’est inacceptable.

Mme De SUTTER (Belgique), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Monsieur le Président, au nom du Groupe des socialistes, démocrates et verts, je vous remercie de la fermeté de votre engagement en faveur de l’Europe, mais je suis préoccupée par les plans xénophobes du nouveau Gouvernement autrichien. C’est actuellement la seule démocratie européenne où l’extrême droite est au pouvoir, et cela préoccupe toute l’Europe. En tant que Président progressiste, vous avez la responsabilité historique de faire en sorte que votre pays respecte les droits de l’homme et ne normalise pas la rhétorique de l’extrême droite. Comment entendez-vous le faire?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – J’ai entendu exprimer ce point de vue assez commun hors des frontières mais aussi en Autriche. Il est vrai que l’un des partenaires de la coalition a connu par le passé des tendances xénophobes et est très critique à l’égard de l’Union européenne et plus généralement de l’unité européenne. Néanmoins, c’est la rhétorique d’un parti d’opposition et nous verrons comment agit concrètement le gouvernement.

Dans le passé, la situation était peut-être différente. En 2000, notre gouvernement de coalition avec le parti conservateur et le Parti de la liberté d’Autriche, le FPÖ, suscitait de vives préoccupations. À l’époque, les 15 membres de l’Union européenne ont voulu introduire des sanctions contre l’Autriche, mais au bout d’environ six mois, les choses se sont calmées. En effet, il convient de distinguer la rhétorique et l’action concrète, à savoir les nouvelles lois soumises au Parlement. Ce gouvernement de centre droit n’a commis aucune violation des droits de l’homme. Je ne m’étendrai pas sur l’action d’un ancien gouvernement, mais s’il s’en est pris au parti social-démocrate, il n’a pas attaqué les droits de l’homme.

Par conséquent, personnellement, je dirai: attendons, voyons, et j’userai de tous mes pouvoirs de Président de la République d’Autriche. Pour illustrer l’influence, en Autriche et hors de l’Autriche, de la société civile, je rappellerai qu’en 2015, 100 000 personnes avaient déposé des demandes d’asile en Autriche. La situation était critique mais, grâce à l’aide de la société civile, elle a pu être correctement gérée, notamment par des organisations de l’Église catholique et d’autres Églises, la Croix-Rouge et de nombreuses organisations non gouvernementales. En outre, des citoyennes et des citoyens ont ouvert leurs portes, participé à la couverture des frais de déplacement et nourri des demandeurs d’asile.

Voilà ce qu’est l’Autriche! Ne l’oubliez pas lorsque vous parlez du nouveau gouvernement autrichien. Je comprends votre préoccupation, mais ce dont vous parlez n’est pas l’Autriche. L’évolution politique doit donc être prise au sérieux, mais ne doit pas susciter la panique.

Earl of DUNDEE (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le Président, concernant la politique d’immigration, le bon exemple donné par votre pays est apprécié et respecté par nous tous. En 2015, comme vous l’avez dit, vous avez accueilli près de 90 000 demandeurs d’asile, ce qui est plus que l’Allemagne.

Pendant la prochaine présidence de l’Union européenne que vous assurerez à la fin de l’année, que ferez-vous pour améliorer le traitement des futures demandes d’asile, pour qu’ils fassent l’objet d’un traitement juste après leur arrivée?

Par ailleurs, vous avez appuyé l’élargissement de l’Union européenne aux Balkans occidentaux. Quelles mesures comptez-vous prendre pour faire avancer les réformes constitutionnelles et législatives dans cette région, au sujet notamment du contrôle de la criminalité organisée et de la corruption?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – Il va de soi que cette présidence ne sera pas simple: il y a les négociations en vue du Brexit qui peut-être aboutiront, mais peut-être pas; des questions financières se posent également dans le budget de l’Union européenne, entre autres à cause des négociations du Brexit; et la coordination des questions en matière d’asile ne sera pas des plus aisées.

Néanmoins, la situation semble gérable, ce qui n’était pas le cas en 2015. Elle ne se posait pas à l’époque dans les mêmes termes. La population autrichienne a réagi immédiatement au fait que la situation échappait à tout contrôle: 1 million de personnes ont traversé la frontière autrichienne et quelque 100 000 d’entre elles sont restées. Mais toutes ces personnes ont traversé la frontière sans que nous n’ayons aucune information sur les allers et venues de part et d’autre. C’était pour le moins difficile.

Dans une certaine mesure, je comprends la position des pays voisins qui n’ont aucune tradition d’accueil d’un si grand nombre de réfugiés. L’Autriche a connu cette expérience après la Seconde Guerre mondiale, en 1956 avec la Hongrie, en 1968 avec la République tchèque, puis avec la crise en Pologne dans les années 80 et la Bosnie-Herzégovine à la fin des années 90. Chaque fois, ce sont des nombres élevés de personnes – 80 000, 100 000, 200 000 – qui ont fui vers l’Autriche. Nous savons donc comment accueillir, car nous bénéficions d’une expérience dont ne jouit pas la Hongrie, la Pologne ou la République slovaque. Je peux donc le comprendre.

Toutefois, à long terme, si ce phénomène se poursuit, il ne sera pas acceptable que des États membres n’appliquent pas les décisions qui ont été prises conformément aux règles du Conseil européen, par un vote à la majorité. Agir de la sorte serait aller vers la fin de l’Union européenne. Ce n’est pas la voie à suivre pour l’avenir. Il faut prendre cela au sérieux. La répartition des réfugiés et des demandeurs d’asile entre les différents pays de l’Union européenne est certes extrêmement difficile, mais il est plus grave encore de ne pas respecter les règles.

S’agissant des Balkans occidentaux, je suis convaincu, le gouvernement est convaincu, le commissaire Hahn est convaincu du fait que les Balkans occidentaux doivent être une priorité de la politique de l’Union européenne. Tous les pays des Balkans occidentaux doivent avoir la perspective d’une adhésion à l’Union européenne. En ne prenant pas cette volonté au sérieux, nous créerons un vide politique. Comme on a pu le voir en Bosnie-Herzégovine, certains pays vont s’engouffrer dans ce vide, et ce n’est pas dans l’intérêt de l’Union européenne.

Il ne faut pas non plus être naïf. De quoi parle-t-on? De cinq ou sept pays. Un pronostic optimiste du commissaire Hahn porterait sur un accord d’ici 2023, soit une adhésion en vue de 2024 ou 2025. La question n’est pas seulement celle des devoirs à faire par les pays qui demandent l’adhésion ; l’Union européenne elle-même doit faire ses devoirs. Ses membres actuels, les institutions actuelles, le cadre institutionnel actuel de l’Union européenne ne seront pas à même de relever le défi d’intégrer six nouveaux membres, même si le Royaume-Uni quitte l’Union européenne – ce que je regrette véritablement. Nous sommes très nombreux. Le droit de vote, la composition de la Commission, la désignation de juges sont autant d’éléments à prendre en compte. Toutes ces questions devront être clarifiées parallèlement aux négociations en vue de l’adhésion de ces pays. Nous devrions véritablement prendre cette question au sérieux car, au sein de l’Union européenne actuelle, on a pu parler de «fatigue», de manque de dynamisme, de lassitude, laissant entendre que plus personne ne serait motivé.

M. DAEMS (Belgique), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe* – Monsieur le Président, tout récemment un membre du Gouvernement autrichien a dit que les demandeurs d’asile devaient être cantonnés de façon concentrée dans des centres dédiés afin que leurs demandes puissent être promptement traitées. Combien certains termes sont désagréables! Les mots peuvent tuer, nous le savons tous.

Les Autrichiens méritent-ils qu’un tel langage soit utilisé? Vous êtes-vous élevé contre cela? Êtes-vous investi de pouvoirs vous permettant de vous opposer à de telles déclarations? Des décisions prises par le Gouvernement autrichien pourraient-elles aller à l’encontre des droits fondamentaux qui prévalent dans votre pays?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* - Certes, les mots sont importants, je l’ai dit publiquement. Cependant, en l’espèce, l’interprétation de la déclaration de notre nouveau ministre de l’Intérieur est sans doute un peu exagérée.

Mes pouvoirs en tant que président fédéral sont comparables à ceux de la plupart des présidents qui ne disposent pas d’un réel pouvoir exécutif. Je peux exercer une certaine influence par la façon dont je me comporte, par l’intermédiaire de mes déclarations et du lieu où je choisis de les prononcer. Je m’entretiens avec les journalistes.

Il m’incombe de signer les textes de loi mais je ne dispose pas d’un droit de veto. Je vérifie simplement que les textes ont été adoptés dans le respect des règles procédurales. Il est très rare qu’un président fédéral refuse d’apposer sa signature au bas d’un texte de loi. Cela est arrivé une fois en 50 ans, je crois, du temps de Heinz Fischer. Il pensait qu’une disposition contenue dans un texte de loi était inconstitutionnelle et a refusé de signer la loi. Le Parlement a dû être ressaisi. Je pourrai développer ce sujet pendant des heures, mais soyons synthétique: vous pouvez avoir toute confiance en notre Cour constitutionnelle!

Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai été la victime d’une de ses décisions puisqu’elle avait invalidé ma première élection en mai 2016 en raison du faible écart de voix – 50 000 – m’ayant séparé de mon rival. Ce fut une bonne chose puisque, lors de la seconde élection en décembre, j’ai remporté l’élection avec 350 000 voix d’avance. Une fois de plus la Cour constitutionnelle a eu raison, mais c’est une autre histoire.

Toutes les lois peuvent être déférées à la Cour constitutionnelle. Tout le monde ne peut faire cette démarche, une procédure est prévue. Mais si j’ai personnellement des doutes sur la constitutionnalité d’un texte, une autre personne peut décider de saisir la Cour.

C’est une question difficile que celle de l’influence politique qui peut être exercée au sein de la Cour car elle est composée de 15 juges. Dans les mois à venir, plusieurs de ses membres seront atteints par la limite d’âge et je devrais signer les nominations de leurs successeurs.

Selon les usages en vigueur en Autriche, je vais avoir des entretiens avec le Parlement au sujet des possibles candidats, de leurs profils, des raisons pour lesquelles leurs noms ont été mis en avant. Nous discuterons de manière non publique avant que des divergences de vues puissent être éventuellement rendues publiques.

C’est ainsi que je peux exercer une certaine influence. Une proposition m’est faite. Je peux ne pas la suivre. La rédaction des textes a son importance, le président n’a pas l’initiative, il attend des propositions du gouvernement, qui ne sont que des propositions. Je peux dire «Non cette proposition ne me convient pas, faites m’en une autre». Je ne peux le faire très souvent, mais je peux le faire.

Mme KAVVADIA (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je voudrais insister sur la montée des partis d’extrême droite dans de nombreux pays, dont le vôtre. On demande plus de contrôle aux frontières, leur fermeture, la lutte contre les migrants et les réfugiés. Nous connaissons les programmes mis en avant par ces partis, y compris en Autriche. N’est-ce pas le plus grand de tous les dangers? Que pensez-vous de la décision prise par certains Autrichiens de boycotter les célébrations en mémoire de l’Holocauste?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – Vous pouvez être certaine, Madame, que j’ai mon propre avis sur les politiques menées à l’endroit des étrangers et réfugiés.

Toutes les personnes qui traversent les frontières et demandent l’asile ne peuvent l’obtenir, c’est certain. Mais que devons-nous faire? La question -difficile - n’est pas nouvelle. C’est un problème connu depuis des décennies, pas seulement en Autriche mais dans tous les pays européens où arrivent en nombre des demandeurs d’asile.

Personnellement, je n’ai pas envie de prendre de telles décisions. Des familles arrivent et sont séparées. Des personnes doivent repartir après être restées des années durant. En Autriche, ces questions se posent et elles sont difficiles. À l’échelle de l’Europe, nous devons admettre que nous avons laissé la Grèce et l’Italie se débrouiller seules trop longtemps.

L’Autriche ne devrait d’ailleurs pas se plaindre. Nous nous posons des questions seulement depuis le moment où ces personnes sont arrivées chez nous.

Aujourd’hui, la situation en Autriche est sous contrôle. Les réfugiés ont un toit au-dessus de leurs têtes, ils peuvent s’installer, leurs besoins quotidiens sont satisfaits. Il n’y a presque pas de faits de violence. Certes les réseaux sociaux véhiculent des messages désagréables mais nous ne connaissons pas de montée préoccupante de la criminalité sur le plan statistique visant les étrangers ou du fait des étrangers sur notre territoire. Nous avons des personnes intégrées dont les enfants sont scolarisés. Nous avons aussi des arrivées d’adultes, ce n’est pas facile pour eux de s’intégrer sur le marché du travail. Ce n’est pas facile de toute façon d’arriver dans un nouveau pays.

Nous devons être prudents, car nous ne voulons pas que les migrants originaires du Proche-Orient que nous accueillons en tant que réfugiés nous apportent en même temps l’antisémitisme. Je ne veux pas me montrer naïf. Lorsque l’on grandit dans un contexte où prévalent les idées anti-israéliennes, ce qui est souvent le cas, et que l’on peut comprendre, il y a fort à parier que l’on véhicule ensuite des idées antisémites. Or elles sont la dernière chose dont nous avons besoin en Autriche comme ailleurs. C’est pourquoi nous portons une attention particulière aux manifestations organisées par l’IKG, la communauté israélite, à Vienne, aux commémorations de la libération d’Auschwitz, de la fin de la Seconde Guerre mondiale ou de la fin de l’occupation de l’Autriche par les troupes d’Hitler.

Mme FILIPOVSKI (Serbie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Un dialogue constant est nécessaire avec les pays des Balkans occidentaux pour favoriser la stabilité, la paix et le développement économique de la région.

Dans le cadre de sa présidence du Conseil de l’Union européenne, l’Autriche pourrait-elle jouer un rôle pour favoriser l’accélération du processus d’élargissement de l’Union?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – Historiquement, l’Autriche a toujours soutenu une position claire à l’égard des pays des Balkans occidentaux, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine et la Serbie. Les sociétés autrichiennes qui souhaitent créer des liens commerciaux avec ces pays sont toujours bien accueillies. Le Président Vučić est d’ailleurs attendu la semaine prochaine à Vienne et je m’en félicite. L’Union européenne a tout intérêt à s’élargir vers les pays des Balkans occidentaux. Cet élargissement est dans l’intérêt de ces pays comme des pays membres de l’Union européenne, parmi lesquels l’Autriche. Nous avons des relations fortes, pour des raisons à la fois historiques et économiques, avec tous les pays de cette région. Certes, la question du Kosovo demeure. Or après Chypre et les problèmes survenus entre la Slovénie et la Croatie, les leaders européens ne veulent plus accepter l’adhésion de pays qui ont des problèmes de frontières avec leurs voisins. Pour que leur intégration soit possible, ces problèmes doivent être entièrement résolus. J’espère donc que la question du Kosovo sera rapidement réglée, d’ici deux ans. Y compris pour la Serbie, je suis particulièrement optimiste.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons regrouper les trois questions suivantes.

M. WASERMAN (France) – Monsieur le Président, ma question concerne le rôle de l’Autriche au sein de l’Europe. Nous jugerons la coalition gouvernementale sur les faits et nous faisons confiance aux institutions démocratiques autrichiennes. Néanmoins, la politique est aussi une affaire de valeurs et de convictions. Or le Parti de la liberté d’Autriche a des valeurs et des convictions qui sont parfois frontalement opposées à celles que nous défendons ici.

Pensez-vous que l’Autriche pourra pleinement jouer son rôle dans la refondation européenne? Pourrez-vous en être le garant?

M. BILDARRATZ (Espagne)* – Dans votre allocution, vous avez affirmé, Monsieur le Président, que l’Europe doit être le continent de l’inclusion et non de l’exclusion. Je partage bien entendu cette affirmation. Pourtant, des milliers de personnes continuent de mourir en Méditerranée. L’Union européenne n’a pas tenu les engagements qu’elle avait pris dans le cadre de l’accord avec la Turquie.

Quelle est, Monsieur le Président, votre position sur le sujet?

M. CROWE (Irlande)* – Comme beaucoup d’autres, j’ai été choqué et déçu par l’entrée du parti d’extrême droite au Gouvernement autrichien. Fort heureusement, vous avez gagné l’élection présidentielle, mais je suis très préoccupé par la présence de ce parti au gouvernement. Le ministre de l’Intérieur, membre de ce parti, a affirmé son intention de faire enfermer les demandeurs d’asile. En tant que démocrate, quelle est votre réaction?

M. LE PRÉSIDENT DE L’AUTRICHE* – La première question concernait les partis d’extrême droite et l’avenir de l’Union européenne. Lorsque je m’inquiète de l’avenir de l’Union européenne, c’est en raison des évolutions que je constate dans tous les pays de l’Union européenne, et pas seulement en Autriche.

La campagne électorale qui a eu lieu tout au long de l’année 2016 dans mon pays pour l’élection du Président fédéral de la République d’Autriche, a été à la fois intéressante et tragique. Au cours des six premiers mois, j’ai abordé les questions européennes dans toutes les interviews que j’ai données et dans tous les discours que j’ai prononcés. Je n’ai eu absolument aucun succès. Personne n’était intéressé! La situation a basculé après l’erreur commise par la majorité du peuple britannique de voter le Brexit. Soudainement, les gens se sont rendu compte que l’Union européenne était une magnifique institution et qu’elle pouvait être menacée. Cela a complètement changé l’atmosphère de la campagne. Le Parti de la liberté d’Autriche s’est débord félicité du Brexit, mais il a fait marche arrière au bout de quinze jours, constatant que le Brexit n’était pas du tout populaire en Autriche. Vous direz sans doute qu’il s’est montré opportuniste. Pour ma part, je pense au contraire qu’il a été très raisonnable de changer de position et je l’en félicite.

Toutefois, quand je suis de mauvaise humeur, je pense à ce journaliste allemand qui a déclaré, à la fin de l’année 1933: «Nous avions une démocratie en Allemagne, mais nous n’avions pas suffisamment de démocrates.» Parfois, j’ai peur de me réveiller un jour et de m’apercevoir que nous avions une Europe unie mais pas suffisamment d’Européens convaincus. D’où cette lassitude, dont je parlais, et la nécessité de rester unis. Les partis d’extrême droite n’ont qu’un poids relatif, la réussite de l’Europe nous concerne tous.

En ce qui concerne la crise migratoire, il me semble que la situation en mer entre la Grèce et la Turquie est à peu près sous contrôle et que le nombre de victimes a véritablement chuté depuis un an. De même, entre l’Italie et la Libye, la situation s’est améliorée. J’admire les autorités italiennes qui ont réalisé un excellent travail et qui ont réussi à négocier avec la Libye, alors même que les institutions étatiques de ce pays ne fonctionnent pas bien. Une négociation qui a permis de réduire le nombre de personnes qui traversent la Méditerranée au risque de se noyer.

Reste la question des Libyens qui vivent dans des conditions terribles, et des migrants qui traversent la frontière du sud de la Libye pour entrer dans le pays. Il est donc nécessaire de contrôler également la situation en Afrique du Nord, même si cela coûte cher.

Enfin, un parlementaire m’a posé une énième question sur la Parti de la liberté. Sincèrement, je me commence à me lasser de toutes ces questions sur ce parti. Bien sûr, nous devons le prendre au sérieux, mais nous devons également prendre du recul. En Autriche, le risque qu’un parti d’extrême droite arrive au pouvoir existe depuis cent ans. C’était le cas pendant la monarchie, comme en 1918 après sa chute. Le risque a toujours existé, même si le parti a porté des noms différents.

Il ne m’appartient pas de m’occuper de la politique française, mais je dois vous avouer que j’ai été extrêmement heureux de l’élection de M. Macron; j’ai poussé un soupir de soulagement. Car si M. Le Pen a obtenu environ 20 % des voix au second tour de l’élection présidentielle contre Jacques Chirac, Mme Le Pen, elle, en a totalisé environ 40 %. Et pourtant, personne ne se demande ce qui se passe en France! Alors, je vous remercie de vous occuper de ce qui se passe en Autriche, mais nous ne sommes pas dans une situation exceptionnelle.

J’ai été élu, en décembre 2016, par des électeurs de centre gauche qui, un an seulement après, ont mis au pouvoir une coalition de centre droit. Certes, certaines personnes qui ont voté pour moi n’étaient ni verts, ni sociaux-démocrates ni libéraux, mais elles ne souhaitaient pas voter pour l’autre candidat. Elles sont donc allées voter en serrant les dents et en croisant les doigts. Et l’année suivante, elles ont rendu possible une coalition du centre droit. Tout cela est normal en démocratie, «c’est la vie».

Alors je fais de mon mieux, je tiens mes promesses – j’en ai fait beaucoup – et surtout je veux être le Président de tous les Autrichiens. Car je me dois de servir les intérêts de tout mon peuple et non pas seulement de mes électeurs – même s’ils sont plus proches de mon cœur, les autres étant dans ma tête.

LE PRÉSIDENT* – Nous arrêtons là les questions à M. Van der Bellen.

Monsieur le Président, je vous remercie infiniment pour le message que vous avez envoyé à l’Assemblée, un message fort d’unité et de confiance.

En conclusion je voudrais évoquer un homme connu, un natif du Haut-Adige qui a consacré toute sa vie à la cohabitation et au dialogue: Alexander Langer. Il a su jeter des ponts entre les êtres humains, les cultures et les idées. Pour Alexander Langer, il n’y avait pas d’alternative à une culture du vivre-ensemble. Il appelait de tous ses vœux une communauté unie où cohabiteraient pacifiquement toutes les nationalités.

Dans un article, il a lancé l’appel suivant: «Non à l’exclusion, non aux intégrations forcées, oui à la coexistence humaine qui accepte les difficultés, qui respecte les différences, qui tolère l’imperfection».

Monsieur le Président, je vous remercie.

Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’une cérémonie du souvenir de l’Holocauste va se tenir devant le Palais de l’Europe. Vous êtes tous invités à y participer.

4. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT – La prochaine séance publique aura lieu cet après-midi à 15 h 30, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 13 h 10.

SOMMAIRE

1. Modifications dans la composition des commissions

2. Le processus de paix israélo-palestinien: le rôle du Conseil de l’Europe (Débat selon la procédure d’urgence)

Présentation par M. Corlățean du rapport de la commission des questions politiques (Doc. 14484)

Orateurs: M. Howell, Mmes Mehl, Kavvadia, MM. Amoruso, Vareikis, Byrne, Ghiletchi, Abushahla, Mme Yaşar, MM. Cilevičs, Heer, Schwabe, Mme Lavie, M. Thórarinsson, Mme Duranton, M. Kiliç, Mme McCarthy, MM. Bildarratz, Crowe, Khader, Mme Ævarsdóttir, M. Pisco, Mme Trisse, MM. Albakkar, Blaha, Sheppard, Wiechel

Réponse de M. le rapporteur

Vote sur un projet de résolution amendé

3. Discours de M. Van der Bellen, Président de l’Autriche

Questions: M. Ariev, Mme De Sutter, Earl of Dundee, M. Daems, Mmes Kavvadia, Filipovski, MM. Waserman, Bildarratz, Crowe

4. Prochaine séance publique

Appendix / Annexe

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure.The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement.Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ÅBERG, Boriana [Ms]

ÆVARSDÓTTIR, Thorhildur Sunna [Ms]

AKTAY, Yasin [Mr]

AMON, Werner [Mr]

AMORUSO, Francesco Maria [Mr] (CENTEMERO, Elena [Ms])

ARIEV, Volodymyr [Mr]

BADEA, Viorel Riceard [M.] (BRĂILOIU, Tit-Liviu [Mr])

BALÁŽ, Radovan [Mr] (PAŠKA, Jaroslav [M.])

BALFE, Richard [Lord] (ECCLES, Diana [Lady])

BARNETT, Doris [Ms]

BATRINCEA, Vlad [Mr]

BECHT, Olivier [M.]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BERNHARD, Marc [Mr]

BEUS RICHEMBERGH, Goran [Mr]

BILDARRATZ, Jokin [Mr]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BLAHA, Ľuboš [Mr]

BLONDIN, Maryvonne [Mme]

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUIJN-WEZEMAN, Reina de [Ms] (MULDER, Anne [Mr])

BRUYN, Piet De [Mr]

BRYNJÓLFSDÓTTIR, Rósa Björk [Ms]

BYRNE, Liam [Mr]

ĆATOVIĆ, Marija Maja [Ms]

CERİTOĞLU KURT, Lütfiye İlksen [Ms] (ŞAHİN USTA, Leyla [Ms])

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

COMTE, Raphaël [M.] (FIALA, Doris [Mme])

CORLĂŢEAN, Titus [Mr]

COURSON, Yolaine de [Mme] (GAILLOT, Albane [Mme])

CROWE, Seán [Mr]

CRUCHTEN, Yves [M.]

DAEMS, Hendrik [Mr] (DUMERY, Daphné [Ms])

DALLOZ, Marie-Christine [Mme]

DAVIES, David [Mr] (GALE, Roger [Sir])

DE TEMMERMAN, Jennifer [Mme]

DESTREBECQ, Olivier [M.]

DIVINA, Sergio [Mr]

DUNDEE, Alexander [The Earl of] [ ]

DURANTON, Nicole [Mme]

EIDE, Petter [Mr] (EIDE, Espen Barth [Mr])

ENGIN, Didem [Ms] (BAYKAL, Deniz [Mr])

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

FILIPOVSKI, Dubravka [Ms] (PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms])

FOULKES, George [Lord] (PRESCOTT, John [Mr])

FOURNIER, Bernard [M.]

FRIDEZ, Pierre-Alain [M.]

GARCÍA ALBIOL, Xavier [Mr]

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GILLAN, Cheryl [Dame]

GOGA, Pavol [M.] (KRESÁK, Peter [Mr])

GOLUB, Vladyslav [Mr] (GERASHCHENKO, Iryna [Mme])

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GRAF, Martin [Mr]

GRIN, Jean-Pierre [M.] (LOMBARDI, Filippo [M.])

GUNNARSSON, Jonas [Mr]

HAIDER, Roman [Mr]

HAJDUKOVIĆ, Domagoj [Mr]

HEBNER, Martin [Mr] (KLEINWAECHTER, Norbert [Mr])

HEER, Alfred [Mr]

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HOWELL, John [Mr]

HUNKO, Andrej [Mr]

HUSEYNOV, Vusal [Mr] (HAJIYEV, Sabir [Mr])

JENIŠTA, Luděk [Mr]

JENSEN, Gyde [Ms]

JONES, Susan Elan [Ms]

JORDANA, Carles [Mr]

JURATOVIC, Josip [Mr] (SCHÄFER, Axel [Mr])

KALMARI, Anne [Ms]

KAMMENOS, Dimitrios [Mr] (TZAVARAS, Konstantinos [M.])

KAPUR, Mudassar [Mr] (WOLD, Morten [Mr])

KARLSSON, Niklas [Mr]

KASSEGGER, Axel [Mr] (BURES, Doris [Ms])

KATSARAVA, Sofio [Ms]

KAVVADIA, Ioanneta [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KERN, Claude [M.] (SORRE, Bertrand [M.])

KESİCİ, İlhan [Mr]

KILIÇ, Akif Çağatay [Mr]

KIRAL, Serhii [Mr] (SOTNYK, Olena [Ms])

KITEV, Betian [Mr]

KLICH, Bogdan [Mr]

KOBZA, Jiři [Mr] (BENEŠIK, Ondřej [Mr])

KOÇ, Haluk [M.]

KOPŘIVA, František [Mr]

KOX, Tiny [Mr]

KRIŠTO, Borjana [Ms]

KRONBICHLER, Florian [Mr]

KUHLE, Konstantin [Mr]

KYTÝR, Jaroslav [Mr]

LACROIX, Christophe [M.]

LAMBERT, Jérôme [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

LOPUSHANSKYI, Andrii [Mr] (DZHEMILIEV, Mustafa [Mr])

LOUHELAINEN, Anne [Ms] (PACKALÉN, Tom [Mr])

LUNDGREN, Kerstin [Ms] (SVENSSON, Michael [Mr])

MARKOVIĆ, Milica [Mme]

MAROSZ, Ján [Mr]

MARQUES, Duarte [Mr]

MASIULIS, Kęstutis [Mr] (BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr])

MASSEY, Doreen [Baroness]

MAVROTAS, Georgios [Mr] (KASIMATI, Nina [Ms])

McCARTHY, Kerry [Ms]

MEHL, Emilie Enger [Ms]

MEIMARAKIS, Evangelos [Mr]

MENDES, Ana Catarina [Mme]

MERGEN, Martine [Mme] (HETTO-GAASCH, Françoise [Mme])

MIKKO, Marianne [Ms]

MÜHLWERTH, Monika [Ms] (ESSL, Franz Leonhard [Mr])

MULLEN, Rónán [Mr] (COWEN, Barry [Mr])

MÜLLER, Thomas [Mr]

MUNYAMA, Killion [Mr] (TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr])

NENUTIL, Miroslav [Mr]

NICK, Andreas [Mr]

NORDQVIST, Rasmus [Mr] (JENSEN, Mogens [Mr])

OBREMSKI, Jarosław [Mr] (ARENT, Iwona [Ms])

OHLSSON, Carina [Ms]

ÖNAL, Suat [Mr]

O’REILLY, Joseph [Mr]

PALLARÉS, Judith [Ms] (NAUDI ZAMORA, Víctor [M.])

PISCO, Paulo [M.]

POLIAČIK, Martin [Mr] (KAŠČÁKOVÁ, Renáta [Ms])

PREDA, Cezar Florin [M.]

PRUNĂ, Cristina-Mădălina [Ms]

PSYCHOGIOS, Georgios [Mr] (ANAGNOSTOPOULOU, Athanasia [Ms])

RIGONI, Andrea [Mr]

RUSTAMYAN, Armen [M.]

SANTA ANA, María Concepción de [Ms]

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHWABE, Frank [Mr]

SEKULIĆ, Predrag [Mr]

ŠEPIĆ, Senad [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SHARMA, Virendra [Mr]

SHEPPARD, Tommy [Mr] (BARDELL, Hannah [Ms])

SILVA, Adão [M.]

ŠIRCELJ, Andrej [Mr]

SMITH, Angela [Ms]

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

STANĚK, Pavel [Mr]

STIER, Davor Ivo [Mr]

ŞUPAC, Inna [Ms]

SUTTER, Petra De [Ms] (VERCAMER, Stefaan [M.])

TAMAŠUNIENĖ, Rita [Ms]

THIÉRY, Damien [M.]

THÓRARINSSON, Birgir [Mr] (ÓLASON, Bergþór [Mr])

TOPCU, Zühal [Ms]

TORNARE, Manuel [M.] (MAURY PASQUIER, Liliane [Mme])

TRISSE, Nicole [Mme]

TÜRKEŞ, Yıldırım Tuğrul [Mr]

ULLRICH, Volker [Mr]

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VARVITSIOTIS, Miltiadis [Mr] (BAKOYANNIS, Theodora [Ms])

VEJKEY, Imre [Mr]

VEN, Mart van de [Mr]

VLASENKO, Sergiy [Mr] (BILOVOL, Oleksandr [Mr])

VOVK, Viktor [Mr] (LIASHKO, Oleh [Mr])

WASERMAN, Sylvain [M.]

WIECHEL, Markus [Mr] (NISSINEN, Johan [Mr])

WILSON, Phil [Mr]

WOJTYŁA, Andrzej [Mr]

YAŞAR, Serap [Mme]

YEMETS, Leonid [Mr]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

Also signed the register / Ont également signé le registre

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

BESELIA, Eka [Ms]

CORREIA, Telmo [M.]

GERMANN, Hannes [Mr]

GOGUADZE, Nino [Ms]

KANDELAKI, Giorgi [Mr]

MAKHMUDYAN, Rustam [Mr]

REISS, Frédéric [M.]

RIBERAYGUA, Patrícia [Mme]

RUSSELL, Simon [Lord]

TOUHIG, Don [Lord]

UCA, Feleknas [Ms]

WHITFIELD, Martin [Mr]

Observers / Observateurs

GÁNDARA CAMOU, Ernesto [Mr]

LAVIE, Aliza [Ms]

Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

ABUSHAHLA, Mohammedfaisal [Mr]

ALAZZAM, Riad [Mr]

ALBAKKAR, Khaled [Mr]

ALQAWASMI, Sahar [Ms]

AMRAOUI, Allal [M.]

CHAGAF, Aziza [Mme]

KHADER, Qais [Mr]

LABLAK, Aicha [Mme]

MUFLIH, Haya [Ms]

SABELLA, Bernard [Mr]

ZAYADIN, Kais [Mr]