FR18CR08

AS (2018) CR 08

SESSION ORDINAIRE DE 2018

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(Première partie)

COMPTE RENDU

de la huitième séance

Jeudi 25 janvier 2018 à 15 h 30

Dans ce compte rendu:

1.       Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.

2.       Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.

3.       Le texte des amendements est disponible au comptoir de la distribution et sur le site internet de l’Assemblée.
Seuls sont publiés dans le compte rendu les amendements et les sous-amendements oraux.

4.       Les interventions en allemand et en italien, in extenso dans ces langues, sont distribuées séparément.

5.       Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 h 35 sous la présidence de M. Nicoletti, Président de l’Assemblée.

LE PRÉSIDENT* – La séance est ouverte.

1. Rapport annuel d’activité 2017 du Commissaire aux droits de l’homme
du Conseil de l’Europe

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle le discours de M. Muižnieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, sur le rapport annuel d’activité 2017 (Comm DH(2018)1). Après son discours, M. le Commissaire répondra aux questions.

Comme vous le savez, mes chers collègues, le mandat de M. Muižnieks s’achève le 1er avril 2018. C’est donc la dernière fois qu’il présentera son rapport annuel d’activité devant notre Assemblée.

Cher Commissaire, c’est un plaisir de vous souhaiter la bienvenue dans cet hémicycle. Je saisis cette occasion pour vous remercier du travail accompli ces six dernières années. Vous avez été un âpre défenseur des droits de l’homme, de la démocratie et de la primauté du droit sur l’ensemble du continent européen. Vous avez toujours joué ce rôle avec beaucoup d’intégrité, de responsabilité et de sagesse. Votre travail a apporté beaucoup à notre Organisation, mais surtout a concrètement contribué à améliorer la vie de nos concitoyens.

Cher Commissaire, je souhaite aussi vous remercier pour la coopération constructive et étroite que vous avez entretenue avec l’Assemblée parlementaire tout au long de votre mandat. Je pense en particulier à votre contribution à nos débats, à votre énergie inépuisable, ainsi qu’à votre enthousiasme et à votre disponibilité pour participer aux réunions des commissions. Votre participation a été très appréciée par les membres de l’Assemblée.

Je sais que les parlementaires se réjouissent de vous entendre aujourd’hui et d’avoir la possibilité d’aborder certains des grands problèmes liés à la défense des droits de l’homme avec vous, pour la dernière fois, en votre qualité de Commissaire aux droits de l’homme.

M. MUIŽNIEKS, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe* – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, je ne m’en vais pas: je reste là, et je continuerai à travailler jusqu’à fin mars. Vous n’êtes pas encore débarrassés de moi!

C’est un grand plaisir de vous présenter mon sixième et dernier rapport annuel, qui aborde les évolutions des droits de l’homme au cours de l’année 2017 et, plus généralement, au cours de mon mandat.

En 2017, j’ai terminé mes visites: je me suis rendu au moins une fois dans chacun des 47 États membres. La conclusion du travail de suivi que j’ai mené est la suivante: dans chaque pays du Conseil de l’Europe, la situation peut être améliorée.

L’année 2017 a été marquée par diverses crises en matière de droits de l’homme. Certaines dataient déjà de quelques années: crise des migrations, conflit en Ukraine, situation en Crimée, impunité des crimes commis contre les journalistes en Tchétchénie et en Azerbaïdjan, détérioration des droits de l’homme en Turquie, crise de l’État de droit en Pologne. S’y sont ajoutées de nouvelles crises: la persécution des personnes LGBTI en Tchétchénie et en Azerbaïdjan, le harcèlement sexuel des femmes dans de nombreux pays.

Comme les années précédentes, les migrations ont dominé mon programme de travail. Dans de nombreuses déclarations et lettres aux autorités, je me suis concentré, au cours de mes visites, sur la situation des migrants, le traitement des populations vulnérables et déplacées et leur intégration. J’ai publié un document sur le droit des réfugiés à la réunification familiale et assuré une certaine publicité autour de cette question. C’est un problème critique, non seulement parce que l’Europe est censée être un lieu sûr pour les migrants, mais également parce que cette sécurité est essentielle à leur intégration. Comment s’intégrer si l’on est inquiet pour la sécurité de son épouse ou de ses enfants? L’intégration ne peut réellement commencer qu’une fois que la famille est là.

Deux évolutions négatives ont cependant appelé mon attention.

Tout d’abord, les organisations non gouvernementales qui travaillent sur les migrations sont la cible de poursuites judiciaires: dans le monde francophone, cela s’appelle le délit de solidarité. C’est très inquiétant, car cela empêche certains États membres de bien gérer l’accueil des migrants et leur intégration humaine et digne. Par ailleurs, il est clair que sous-traiter le contrôle des migrations à des pays non membres du Conseil de l’Europe, comme la Libye, constitue un énorme risque pour les droits de l’homme.

Ensuite, je me suis concentré sur deux volets des droits des femmes et de l’égalité entre les sexes. D’une part, j’ai essayé de promouvoir la ratification et la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul. Je me suis rendu dans de nombreux pays et adressé des lettres à plusieurs parlements; cette semaine, j’ai envoyé une lettre au président du Parlement de Bulgarie, qui mène un débat sur ce sujet. D’autre part, j’ai tenté de promouvoir les droits des femmes: leurs droits sexuels, leurs droits à la santé reproductive, leur droit à l’éducation sexuelle, l’accès à la contraception, l’accès à l’avortement dans des conditions sûres. Tous ces thèmes impactent les droits des femmes, leur droit à la santé, leur droit à la vie privée – en particulier à l’autonomie corporelle –, sans oublier l’interdiction de la torture, des mauvais traitements, et la non-discrimination.

J’ai examiné la question dans plusieurs pays, en particulier dans ceux ayant un cadre législatif très restreint. Dans de nombreux pays, la législation a marqué un recul et les progressistes ont été la cible d’attaques. Dans l’ensemble, au cours de ces six dernières années, les droits de l’homme se sont détériorés partout en Europe.

Par ailleurs, de nombreuses crises ont frappé l’Europe, qui ont eu un impact dévastateur sur les droits de l’homme: la crise économique, la crise de la politique migratoire, les réponses aux attaques terroristes dans de nombreux pays, et la pression de plus en plus forte qui pèse sur les défenseurs des droits de l’homme et sur les médias. Beaucoup de pays ont fait marche arrière.

On constate un affaiblissement général des pouvoirs et contre-pouvoirs, ainsi qu’une érosion de l’engagement en faveur des droits de l’homme. Cela se manifeste de différentes façons: une mise en œuvre sélective des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, une remise en question de l’autorité de la Cour, une absence de coopération avec les mécanismes de sauvegarde des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, une réduction de contributions budgétaires pourtant essentielles au bon fonctionnement des organes, des atteintes aux droits de l’homme de la part de populistes à travers les médias.

Malgré cet environnement extrêmement difficile, mon équipe et moi-même avons pu, dans un certain nombre de cas, faire avancer les choses: au début de mon mandat, nous avons aidé les autorités grecques lorsqu’elles étaient menacées par le parti politique d’extrême droite Aube dorée; en Ukraine, je suis fier que nous soyons rapidement arrivés sur le terrain pour assurer le suivi du respect des droits de l’homme lors de la révolution de Maïdan; nous avons pu améliorer la situation des droits de l’homme dans le Donbass, zone non contrôlée par les autorités ukrainiennes où je me suis rendu par deux fois, et en Crimée; en Turquie, notre travail s’est concentré sur les aspects de l’état d’urgence qui concernaient les droits de l’homme, ainsi que sur les mesures de lutte contre le terrorisme dans le sud-est du pays – ce travail est d’ailleurs devenu une référence pour beaucoup, au Conseil de l’Europe mais aussi dans l’Union européenne et ailleurs. En Fédération de Russie, nous avons réagi à l’adoption de la loi dite sur les agents étrangers en émettant un avis et en analysant sa mise en œuvre sur une période de deux ans. Enfin, j’ai proposé que soit possible dans de nombreux cas une intervention au nom de tiers auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.

Nous travaillons avec des défenseurs des droits de l’homme, ceux qui défendent les migrants, les femmes, les Roms, les personnes LGBTI. Nous essayons d’alléger la pression qui pèse sur eux: ainsi, nous avons pu donner à certains des moyens politiques. Nous leur avons également apporté un soutien moral.

Dans plusieurs pays européens, nous nous sommes faits les avocats de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, défendant en particulier ceux qui souffrent de troubles intellectuels et psychologiques. Nous avons également mis l’accent sur les droits des femmes, notamment le droit à la santé reproductive. Par ailleurs, nous nous sommes concentrés sur le contrôle démocratique des instances de sécurité nationales mises en place dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Quant aux migrations, nous les avons très tôt identifiées comme un véritable défi aux droits de l’homme, en un temps où très peu de gens s’intéressaient à ce sujet. Au cours de mon mandat, nous avons travaillé avec plus de 20 États membres du Conseil de l’Europe sur les migrations. J’ai tâché d’appeler l’attention sur leurs dimensions de long terme, notamment l’intégration des migrants, la réunification des familles et l’éducation inclusive.

J’ai également renforcé le mandat du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe sur plusieurs points, développant notamment de nouvelles formes de communication. Ainsi, nous disposons d’un compte Twitter suivi par plus de 21 000 personnes. Nous sommes présents sur Facebook, organisons des campagnes sur les réseaux sociaux et diffusons des films. Nous devons poursuivre notre effort de communication. Par ailleurs, j’ai développé le recours à la procédure de tierce intervention prévue par les statuts de la Cour européenne des droits de l’homme, ce qui a permis de compléter notre travail. Je suis intervenu dans 16 affaires ou groupe d’affaires impliquant des centaines de requérants.

Tandis que mon mandat touche à sa fin, je suis très préoccupé par la situation des droits de l’homme en Europe. Avec un peu d’avance sur le 27 janvier, le Conseil de l’Europe a commémoré aujourd’hui l’Holocauste, ce qui nous amène à méditer sur la raison d’être du système des droits de l’homme. Songeons à la déshumanisation de certaines catégories de population, non seulement les Juifs et les Tziganes mais aussi les migrants, les homosexuels, les défenseurs des droits de l’homme, les journalistes, les opposants politiques. Au cours des six dernières années, j’ai fait de mon mieux. J’ai tâché d’être juste et équitable, m’efforçant de traiter chaque pays avec impartialité afin d’y encourager une protection des droits de l’homme encore meilleure. J’ai tout donné à ce mandat, non seulement ma raison mais aussi mon cœur et mon âme. Servir cette Organisation dans ce cadre a été un privilège et un honneur.

J’aimerais enfin rendre hommage à mon équipe, dont la plupart des membres se trouvent dans les tribunes de l’hémicycle. Elle est composée de personnes aussi intelligentes qu’engagées. Les commissaires aux droits de l’homme vont et viennent, les équipes restent. Je leur dis donc à tous: «Continuez à défendre les droits de l’homme. Votre travail est important pour beaucoup de gens, qui placent en vous leurs espoirs. Continuez à défendre ces principes, même si la situation semble parfois désespérée. Il ne faut jamais perdre espoir et toujours l’inspirer aux autres, surtout à ceux qui sont victimes de violation des droits, afin qu’il en résulte d’authentiques changements concrets». Je tiens également à remercier les membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe de leur coopération au cours de ces années.

LE PRÉSIDENT* – Monsieur Muižnieks, je vous remercie de votre discours clair et passionné.

Un nombre important de collègues ont déjà exprimé le souhait de poser une question.

Je leur rappelle que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes et doivent avoir un caractère vraiment interrogatif.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Monsieur le Commissaire, je vous remercie, au nom de mon groupe, du bon travail que vous avez accompli en matière de promotion des droits de l’homme dans nos pays. Selon vous, quelle sera la principale priorité de votre successeur?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – Chaque Commissaire aux droits de l’homme est libre de définir ses priorités, avec lesquelles la réalité ne manque pas d’interférer ensuite, notamment celle des crises et des conflits. À mes yeux, la crise migratoire demeurera la principale priorité en matière de droits de l’homme. Il nous incombera de faire entendre une voix forte.

Par ailleurs, comme je l’ai rappelé à de nombreuses reprises, y compris dans cet hémicycle, il importe de veiller à la liberté des défenseurs des droits de l’homme. Il y a là une dimension essentielle du système des droits de l’homme. S’il existe des gens susceptibles d’appeler notre attention sur les problèmes et les difficultés qu’ils rencontrent en matière de droits de l’homme, notre tâche en devient plus facile à accomplir et notre action plus efficace.

L’existence de médias libres est également essentielle afin que des journalistes puissent faire connaître les violations des droits de l’homme commises par les gouvernements. Ainsi, mon successeur devra nécessairement veiller à la liberté des défenseurs des droits de l’homme et des médias, comme moi et mes prédécesseurs.

Telles sont les trois priorités qui me viennent spontanément à l’esprit. Au demeurant, j’espère que mon successeur aura moins de crises à résoudre que moi.

M. KILIÇ (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Monsieur le Commissaire, vous avez évoqué à plusieurs reprises les mesures antiterroristes prises en Turquie dans le cadre de l’état d’urgence après l’odieuse tentative de coup d’État du FETÖ. Avez-vous véritablement essayé de comprendre la situation dans laquelle se sont trouvés nos citoyens, parfois confrontés à des chars, ainsi que le sentiment du peuple turc à cette occasion?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – Je me suis rendu en Turquie très peu de temps après la tentative de coup d’État. J’ai constaté sur place les dommages terribles infligés au parlement par ses auteurs. J’ai eu à ce sujet de nombreuses conversations très instructives. Les autorités turques, comme celles de tous les États membres du Conseil de l’Europe, ont non seulement le droit mais le devoir de combattre le terrorisme.

Toutefois, les mesures prises en Turquie dans le cadre de l’état d’urgence excèdent de beaucoup les frontières de l’État de droit. J’ai rédigé un mémorandum sur l’état d’urgence et la liberté des médias, et un autre sur la liberté d’expression ainsi que le droit à la liberté et à la sécurité des parlementaires. La situation prévalant en Turquie est à nulle autre pareille. Nulle part des milliers de juges n’ont été relevés de leurs fonctions sans aucune procédure régulière, tandis que des journaux, des stations de radio et des chaînes de télévision étaient fermées sans procédure digne de ce nom et que des milliers de fonctionnaires étaient mis à pied par décision du pouvoir exécutif. Dans aucun autre pays du Conseil de l’Europe – ni du monde d’ailleurs – on ne compte autant de journalistes emprisonnés. Les chefs d’accusation qui les visent ne comportent rien d’autre que les activités propres au journalisme, tels que des articles de presse et des émissions audiovisuelles, et ne sont assortis d’aucun élément de preuve à leur encontre.

L’état d’urgence a donné lieu à l’adoption de 30 décrets, qui ont profondément modifié les institutions judiciaire et scolaire ainsi que le système de sécurité sociale, cela en contournant le parlement. Votre rôle et celui de vos collègues parlementaires, Monsieur Kılıç, a été court-circuité par le pouvoir exécutif. L’échelle de ces mesures, comme leurs conséquences sur la vie et les biens de dizaines de milliers de citoyens turcs, est gigantesque.

Dès lors, il me semble que nous sommes en droit de faire part de notre préoccupation. J’espère vivement que les autorités turques changeront de cap et mettront en œuvre des politiques garantissant aux citoyens le respect des droits de l’homme tout en luttant contre le terrorisme.

Mme BRASSEUR (Luxembourg), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Monsieur le Commissaire, cher Nils, permettez-moi de vous remercier, au nom de mon groupe politique, l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe, mais aussi en mon nom propre, pour la collaboration remarquable que nous avons eue avec vous. Je tiens à dire que vous avez fait un travail exemplaire.

Comme vous venez de le souligner, la situation des droits de l’homme empire dans un grand nombre de pays. Les difficultés ne cessent d’augmenter. Pensez-vous – et j’en profite pour remercier toute votre équipe – que le bureau du Commissaire aux droits de l’homme dispose de suffisamment de moyens et d’outils pour faire face à tous ses défis?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – Je tiens à vous remercier moi aussi de l’excellente coopération que nous avons eue au fil des ans.

Le mandat du Commissaire est suffisant pour faire ce travail. Je ne pense pas qu’il y ait lieu de le modifier en quoi que ce soit.

Quant aux ressources, toutes les composantes du Conseil de l’Europe vont devoir se serrer la ceinture dans les mois et les années à venir. Notre bureau est la plus petite entité administrative du Conseil de l’Europe. Nous avons fait un travail énorme pour assurer une plus grande visibilité au Conseil de l’Europe. Je pense que le rendement de notre petit service est supérieur à celui de toutes les autres unités du Conseil de l’Europe. J’espère qu’il en sera tenu compte lors de la discussion du budget, car le travail de cette équipe est essentiel pour le Conseil de l’Europe. J’espère que chacun comprendra à quel point ce travail est indispensable pour l’Organisation.

M. Petter EIDE (Norvège), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Monsieur le Commissaire, le Groupe pour la gauche unitaire européenne apprécie votre travail et vous souhaite plein succès pour l’avenir.

Beaucoup de responsables politiques en Europe disent que les droits de l’homme empêchent de lutter efficacement contre le terrorisme. Quelle est votre réponse? Quels conseils donnerez-vous à votre successeur afin que la lutte contre le terrorisme ne mette pas à mal la défense des droits de l’homme?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – L’Europe détient un triste record de violations de droits de l’homme et bon nombre de conflits armés donnent lieu à beaucoup de souffrances. Nous avons vu, au début du XXIe siècle, la complicité de certains pays européens avec les Etats-Unis s’agissant de la détention arbitraire, de la torture, du transfert de détenus hors du cadre judiciaire, ou rendition. On a donné des munitions aux terroristes qui ont pu ainsi dire: «Voyez comme l’Europe est hypocrite! Voyez ce que l’on y pense des musulmans! Regardez comment elle traite nos peuples!».

Le pouvoir illimité accordé à certains services de renseignement pour cibler tout le monde représente une voie dangereuse. Cela atteint non seulement le droit à la vie privée, mais aussi les journalistes quand leurs sources ne sont plus protégées ou les avocats si leurs entretiens ne sont plus confidentiels. Alors, tout le monde devient suspect, surtout les groupes minoritaires, – les musulmans ou d’autres – et la cohésion du tissu social est atteinte.

Oui, il faut lutter contre le terrorisme, mais nous y parviendrons à long terme, en agissant dans le cadre d’un dispositif juridique et en se gardant de stigmatiser certaines communautés. Vous devez compter sur la coopération de ces communautés pour lutter efficacement contre la radicalisation.

Oui, il faut renforcer les ressources de vos services de sécurité, mais il faut aussi contrôler la démocratie. Il est conforme à l’intérêt même de ces services que tout le monde ait confiance en eux. Il faut se garder de leur politisation et faire en sorte qu’ils agissent dans le cadre de l’État de droit. Il faut donc lutter contre le terrorisme tout en veillant à avoir une vision à long terme, sans politisation.

Mme FILIPOVSKI (Serbie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Monsieur le Commissaire, que pensez-vous de l’avenir de la crise migratoire en Europe, et, surtout, qu’en est-il des victimes de la traite des êtres humains? Comment voyez-vous la situation des droits de l’homme au Kosovo? Les Albanais ne mettent pas en œuvre les Accords de Bruxelles et il n’a pas été possible de mettre en place la structure prévue pour la communauté des Serbes.

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – Concernant les migrations, les chiffres sont en forte diminution. Par rapport à 2015 et 2016, le nombre de nouveaux arrivants en Europe a massivement diminué, mais beaucoup de pays restent en mode urgence, comme si des centaines de milliers de personnes continuaient d’arriver chaque mois. Ce n’est pas le cas. Il faut donc revenir au niveau de protection précédent, reprendre les politiques de regroupement familial et investir davantage dans l’intégration pour obtenir un résultat à long terme.

La coopération avec les pays tiers est absolument nécessaire. Elle doit s’opérer de manière transparente et toujours en fonction du respect des droits de l’homme. Sinon, nous deviendrions les complices de violations des droits de l’homme en dehors de l’Europe, avec nos équipements, avec notre aide financière, par l’intermédiaire des services de sécurité, des unités militaires. Nous devons être très prudents lorsque nous signons des accords avec les pays tiers.

L’avenir passe par la réinstallation dans des lieux sûrs. L’opinion publique ne veut pas d’une situation chaotique. C’est pourquoi la réinstallation est nécessaire. Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) évalue les demandes dans les zones de conflit et peut ensuite conduire les personnes concernées dans différents pays européens. Quant au regroupement familial, il a subi des restrictions ces dernières années dans de nombreux pays. J’ai évoqué le sujet dans de nombreux pays. Si l’on veut que les arrivées aient lieu dans de bonnes conditions de sécurité juridique, il faut également prévoir le regroupement familial.

S’agissant du Kosovo, j’ai rédigé une note dans laquelle j’abordais les questions de la justice transitoire, de la communauté rom et de la liberté des médias. Il y a beaucoup de travail à faire au Kosovo et le Conseil de l’Europe peut exercer une influence importante en ce sens. Le Kosovo demandera peut-être à devenir membre du Conseil de l’Europe – ce n’est pas à moi que revient la décision, mais à vous et au Comité des Ministres. Le Conseil de l’Europe pourra alors jouer un rôle majeur, comme il l’a fait avec d’autres pays, sachant que l’adhésion d’un pays qui souhaite rejoindre notre Organisation peut être assortie de conditions. Je ne dois pas faire de commentaires sur les négociations politiques, mais il y a beaucoup à faire en matière de droits de l’homme, partout, au Kosovo, et le Conseil de l’Europe a un grand rôle à jouer. J’espère que mes collègues au sein d’autres instances du Conseil de l’Europe et que vous, membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, vous vous engagerez plus. Nous avons en effet la possibilité d’exercer un effet de levier pour faire évoluer positivement la situation.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant prendre les questions par séries de trois.

M. KERN (France) – Monsieur le Commissaire aux droits de l’homme, je poserai une question simple. Alors que s’achève prochainement votre mandat, commence le temps du bilan. À ce titre, pourriez-vous nous dire, au terme de ces six années, de quoi vous êtes le plus fier et quel est votre principal regret?

Mme KERESTECİOĞLU DEMİR (Turquie)* – Vous avez réalisé un travail très important sur les violations des droits de l’homme en Europe. Je tiens à vous remercier pour votre approche constructive et pour tout le travail que vous avez effectué à ce jour.

Quel est votre espoir pour l’avenir de la Turquie? Quelles améliorations attendez-vous en tant que Commissaire aux droits de l’homme?

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Aux responsabilités qui incombent directement aux personnes remplissant de hautes fonctions, s’ajoute un devoir de rendre compte, qui est invisible, et un engagement à avoir face à certaines forces et certains lobbies. Vos activités en tant que Commissaire aux droits de l’homme ont mis en évidence que vous ne faites pas exception à cette règle.

Dans l’exercice de cette haute fonction, vous avez été obligé de protéger les droits de l’homme d’un million de personnes déplacées et réfugiées en Azerbaïdjan. En tant que Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, avez-vous quelques craintes à l’égard de responsabilités que vous n’auriez pas remplies?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – J’ai déjà indiqué les éléments dont je suis le plus fier parmi les actions qui ont été conduites par mon équipe, à savoir celles où nous avons ajouté de la valeur, que ce soit auprès de pays tels que la Grèce, la Turquie, l’Ukraine, la Fédération de Russie, ou que ce soit sur des thématiques telles que la communication, les interventions au nom de tiers, etc. Je suis fier du travail accompli. C’étaient des actions nécessaires et utiles qui ont vraiment apporté une aide concrète à de nombreuses personnes.

Quels sont mes regrets?

Je regrette de n’avoir pas vraiment pu être actif en Fédération de Russie. Cela a été le cas depuis septembre 2014, lorsque je me suis rendu en Crimée et que les autorités russes n’ont pas été satisfaites de mes conclusions. Je le regrette énormément parce qu’il y a beaucoup de travail à réaliser en Fédération de Russie en matière de droits de l’homme. Nous y avons de nombreux amis: des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des personnes qui travaillent dans les structures nationales des droits de l’homme. Et par le passé, le Conseil de l’Europe a joué un rôle très important, très productif pour faire avancer le débat en Fédération de Russie. Certes, il m’a été possible de travailler en Fédération de Russie de loin, de l’étranger. Je l’ai fait, j’ai pris la parole régulièrement, nous avons notamment écrit un mémorandum sur la liberté de réunion, mais ce n’est pas la même chose que d’aller sur place, de pouvoir parler avec les autorités, de rencontrer des militants des droits de l’homme Je regrette que cela n’ait pas été possible. J’ai fait de mon mieux, j’ai essayé à maintes reprises de me rendre en Fédération de Russie, mais cela n’a pas été possible.

Je regrette également de n’avoir pas pu faire davantage pour aider les partenaires du Haut-Commissariat et de notre Organisation en Azerbaïdjan lorsqu’ils ont été menacés, arrêtés, détenus, accusés. Certains d’entre eux ont passé des années en prison. Ce ne sont pas seulement des partenaires de mon instance, mais aussi les partenaires du système de contrôle, de la Cour, et nous n’avons pas pu faire davantage pour les aider. Je le regrette. J’ai essayé de lancer l’alarme, d’en parler, mais je ne suis pas satisfait. J’aurais voulu faire plus.

Pour la Turquie, je regrette profondément le tour qu’ont pris les événements dans ce pays, d’autant que lorsque les autorités coopéraient avec le Conseil de l’Europe, nous avons fait des progrès remarquables pour combattre la torture et les mauvais traitements dans les lieux de détention, pour améliorer la liberté des médias, le fonctionnement du système judiciaire. C’est donc possible. Lorsqu’il y a une volonté politique, c’est possible.

Je regrette profondément que tant de nos partenaires – journalistes, responsables de l’opposition, des philanthropes et tant d’autres, notamment Osman Kavala – soient aujourd’hui détenus et accusés souvent sans le moindre élément de preuve.

Je regrette parfois – pas toujours – d’avoir sonné l’alarme sur des situations préoccupantes en matière de droits de l’homme dans cet hémicycle et au Comité des Ministres et qu’ensuite, l’on me félicite d’avoir fait mon travail, d’avoir défendu les principes de l’Organisation, mais que cela s’arrête là, qu’il n’y ait pas de suivi politique tant au niveau du Comité des Ministres qu’ici, dans cette Assemblée.

J’ai donc parfois un sentiment de frustration, comme si j’étais la bonne conscience de gens qui pourraient faire plus avec les pouvoirs dont ils disposent. Ce n’est pas toujours très agréable d’être la bonne conscience de quelqu’un d’autre.

Pour répondre à M. Huseynov, la situation des réfugiés et des personnes déplacées est une question tout à fait légitime en matière de protection des droits de l’homme. Cela n’a pas été l’objet de mon travail le plus récent en Azerbaïdjan où je me suis surtout occupé des pressions contre les organisations non gouvernementales (ONG), les blogueurs, les journalistes, les militants.

Les droits de l’homme sont interdépendants; ils dépendent les uns des autres. Plus il y a de défenseurs de droits de l’homme et des journalistes qui travaillent librement dans un pays et mieux tous les droits de l’homme sont protégés, y compris les droits des personnes déplacées à l’intérieur d’un pays. Je ne pense donc pas qu’il s’agisse de sujets qui s’excluent. Mais il faut commencer par le b-a-ba: il faut qu’il y ait une liberté d’expression, des défenseurs de droits de l’homme, un système qui fonctionne pour ensuite s’attaquer aux autres questions. Les questions que vous soulevez sont tout à fait légitimes, mais j’ai eu d’autres priorités à traiter.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – L’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme est obligatoire pour les États membres du Conseil de l’Europe. Or l’Azerbaïdjan refuse de libérer Ilgar Mammadov.

Votre mandat s’achève bientôt. À votre avis, que devra faire le nouveau Commissaire aux droits de l’homme face à un État aussi problématique que l’Azerbaïdjan?

M. SCHWABE (Allemagne)* – Je ne dispose pas d’autant de temps que nécessaire pour vous remercier du travail exemplaire que vous avez accompli. Vous vous êtes sans doute plus préoccupé de certains pays, c’est assez normal, même si tous les pays devraient effectivement s’intéresser à la défense des droits de l’homme.

Actuellement, dans mon pays, nous essayons de constituer un gouvernement et nous pourrons donc avoir encore une certaine influence. Et puisque vous avez parlé de la réunification familiale, il y a à l’heure actuelle en Allemagne, tout un débat pour savoir s’il est justifié de faire une différence entre les réfugiés au sens de la Convention de Genève et ceux qui n’auraient droit qu’à une protection subsidiaire – je pense tout particulièrement aux réfugiés syriens. Peut-être pourriez-vous nous donner votre position à ce sujet?

M. De BRUYN (Belgique)* – Comme vous l’avez dit dans votre discours, mais aussi dans votre rapport annuel, au cours des douze derniers mois, nous avons assisté à une évolution inquiétante concernant la situation des LGBTI – lesbiennes, gays, bisexuel, transgenres et intersexes. Je pense particulièrement à leur persécution en Tchétchénie, en Azerbaïdjan ou encore à la situation des organisations en Turquie qui défendent ces droits, qui ont été privées récemment du droit d’expression.

De nombreuses personnes ont exprimé leur inquiétude, mais il faut évidemment aller au-delà. Que peut-on faire pour aider le Conseil de l’Europe à répondre de manière plus efficace à ces problèmes?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – Tout d’abord, l’affaire Ilgar Mammadov est unique en son genre. C’est la première affaire à avoir provoqué l’invocation de l’article 46.4 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui n’avait jamais été appliqué jusque-là. En tout cas, l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) en la matière n’a pas été appliqué et l’Azerbaïdjan ne donne aucun signe de vouloir libérer M. Ilgar Mammadov, qui est d’ailleurs un ami du Conseil de l’Europe.

Que peut-on faire? Cela se joue maintenant au niveau interétatique. Cela ne dépend plus du Commissaire, de l’Assemblée parlementaire, du Comité des Ministres ni même de la Cour parce que nous sommes là face à un État qui refuse de libérer une personne qui aurait déjà dû l’être depuis trois ans. Cela soulève de graves questions quant à la place de cet État dans le système.

Lorsque je me suis rendu en Azerbaïdjan, je suis allé le rencontrer en prison. Je recommanderai à mon successeur d’aller le voir ainsi que les autres personnes qui sont injustement détenues en Azerbaïdjan, pour rappeler constamment au Comité des Ministres et à l’Assemblée parlementaire que cette affaire et d’autres méritent tout notre attention. Tel est le rôle du Commissaire aux droits de l’homme.

Nous avons rappelé dans notre mémoire que la différence de statut entre les réfugiés et ceux qui peuvent bénéficier de la protection subsidiaire ou d’autres formes de protection au regard du regroupement familial doit reposer sur des justifications juridiques.

Nous constatons dans de nombreux pays que la distinction entre le statut de réfugié et d’autres statuts est arbitraire. De nombreuses personnes bénéficient du statut de réfugié, tandis que l’on donne à d’autres la protection temporaire alors qu’il s’agit pourtant de personnes relevant du même conflit et des mêmes besoins. Les différences de statut reposent alors sur des raisons purement politiques. À l’inverse, certains pays n’accordent pas le statut de réfugié mais celui de réfugié temporaire à des personnes qui pourtant séjournent très longtemps. Ce distinguo peut être contesté devant les juridictions nationales comme auprès de la Cour de justice de l’Union européenne ou de la CEDH: nous essayons de donner des armes juridiques à ceux qui essayent de le faire.

En ce qui concerne les droits des LGBTI, j’ai été particulièrement préoccupé par leur persécution dans bon nombre de pays, notamment dans les années récentes en Fédération de Russie, Azerbaïdjan et Turquie où toutes les activités publiques leur ont été interdites.

Après avoir reçu un rapport alarmant sur la situation en Fédération de Russie, j’ai écrit pour avoir plus d’informations. Je n’ai pas obtenu de réponse. J’ai pris contact avec des structures de défense des droits de l’homme, avec l’Ombudsman, avec le bureau du président. Même chose en Azerbaïdjan: j’ai écrit pour obtenir des informations sur la détention arbitraire et les examens médicaux imposés aux femmes transsexuelles ou aux homosexuels. Quand vous lisez la réponse donnée qui se trouve publiée sur mon site, elle est inquiétante.

Je sais que le Secrétaire Général a fait une déclaration pour rappeler qu’il convient de travailler davantage sur ces questions au sein de l’Assemblée. Nous avons une obligation de vigilance. Nous devons rappeler aux États membres leurs obligations en la matière.

Les LGBTI ne demandent pas de droits spéciaux mais simplement de disposer des mêmes droits que les autres. Ils ont le droit de vivre libres de peur, de violence, de discrimination et sans être exposés à des discours de haine.

LE PRÉSIDENT* – Mme Bartos, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. CROWE (Irlande)* – L’an dernier, j’ai évoqué le cas d’un militant républicain, M. Taylor, dont la libération a été révoquée. Il est en prison à Maghaberry depuis mars 2016 sans avoir eu accès à un avocat; il est en danger. Tout droit lui a été refusé alors qu’aucune preuve ne justifie son arrestation ou sa détention. Je ne sais si vous connaissez cette affaire, mais je vous demanderais de veiller à ce que votre successeur se penche sur ce dossier.

LE PRÉSIDENT* – M. Abushahla, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. Vusal HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Si votre rapport annuel constitue un outil important pour rappeler leurs obligations aux États membres, la neutralité et l’objectivité de vos sources a pu être mise en question par plusieurs États membres, notamment en Azerbaïdjan. Une des critiques qui vous est faite est que vous vous concentrez davantage sur les droits politiques individuels que sur les droits des groupes, tel celui des personnes déplacées. Vous avez confirmé qu’il s’agit au contraire de votre approche. Que recommanderez-vous à votre successeur pour qu’à l’avenir ces critiques puissent être écartées?

LE PRÉSIDENT* – M. Hunko, inscrit dans le débat, n’est pas présent dans l’hémicycle.

M. RZAYEV (Azerbaïdjan)* – La Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt dans l’affaire Chiragov et autres – je pense que vous voyez de quoi il s’agit. Qu’avez-vous fait et que pourriez-vous conseiller à Mme Mijatović, votre successeur, pour tenir compte des droits des autres réfugiés ou personnes déplacées de l’intérieur en Azerbaïdjan?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – S’agissant de l’Irlande du Nord, malheureusement, je ne connais pas l’affaire évoquée. Je demanderais à mon équipe de se pencher sur ce cas. En Irlande du Nord, mon bureau et le Conseil de l’Europe peuvent certainement exercer une influence positive sur le respect des droits de l’homme.

Les préoccupations demeurent en tout cas nombreuses. Le Conseil de l’Europe a un rôle important à jouer, notamment au regard des conséquences du Brexit sur les droits de l’homme.

S’agissant des droits des personnes déplacées en Azerbaïdjan, je recommanderai à mon successeur de poursuivre les chantiers entamés et de se concentrer sur les droits des défenseurs des droits de l’homme, de la liberté d’expression et de l’indépendance du système judiciaire sans lesquels les droits des personnes déplacées ne peuvent être protégés.

J’aimerais me pencher sur la question des droits des personnes emprisonnées en violation de l’article 18 de la Convention. Ce sont des prisonniers politiques qu’on a jetés en prison pour les réduire au silence. Cependant, c’est une question très délicate.

Je pense cependant que mon successeur s’inscrira dans la continuité de mes travaux.

M. GHILETCHI (République de Moldova)* – Monsieur le Commissaire, je vous remercie pour votre excellent travail – car votre tâche est difficile.

Que pouvons-nous faire pour défendre les droits de l’homme dans les zones connaissant des conflits gelés? Ce qui est en jeu, dans ces territoires, c’est la vie même de milliers de personnes.

M. Jonas Gunnarsson, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Nicoletti au fauteuil présidentiel.

LE PRÉSIDENT* – Mme Yaşar, inscrite dans le débat, n’est pas présente dans l’hémicycle.

M. GONCHARENKO (Ukraine)* – Monsieur le Commissaire, je vous remercie pour votre action.

J’aimerais revenir une fois de plus sur les violations des droits de l’homme en Crimée. La situation y est terrible. Depuis l’annexion illégale de la Crimée, les autorités russes se livrent aux pires violations des droits de l’homme. Les communautés religieuses minoritaires font l’objet de multiples agressions. Quelles mesures ont-elles été prises pour mettre fin à cette situation? Qu’est-il possible de faire encore pour la Crimée?

Mme ŞUPAC (République de Moldova)* – Monsieur le Commissaire aux droits de l’homme, vous êtes venu l’année dernière en République de Moldova pour une visite de cinq jours, puis vous avez formulé un certain nombre de recommandations à l’intention du Gouvernement moldave. Depuis, malheureusement, la situation des droits de l’homme s’est encore détériorée dans le pays, au point que des élus de l’opposition ont demandé l’asile à d’autres pays de l’Union européenne. Que pouvez-vous faire pour mettre fin à cette situation?

M. LE COMMISSAIRE AUX DROITS DE L’HOMME* – En ce qui concerne les conflits gelés, je me suis en effet rendu récemment en Transnistrie à l’occasion d’un voyage en République de Moldova. À cette occasion, j’ai appelé les décideurs politiques à définir des mesures visant à renforcer la confiance et j’ai encouragé les associations de défense des droits de l’homme et l’Ombudsman à coopérer davantage avec leurs homologues de l’autre côté du fleuve. J’ai par ailleurs demandé aux autorités de changer d’attitude à l’égard du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants – le CPT – et de l’autoriser à se rendre dans des lieux de détention. Il est très important que des experts du Conseil de l’Europe puissent exercer un contrôle en Transnistrie.

Malgré tout, il me semble qu’il existe désormais une plus grande volonté d’aller au-delà des lignes de séparation. Nous devons donc continuer de travailler à l’amélioration de la situation des droits de l’homme dans cette région.

S’agissant de la Crimée, je n’ai pas eu la possibilité de m’y rendre depuis trois ans. Nous suivons la situation de loin et nous partageons vos préoccupations. La répression des Tatars, des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes est inquiétante. Je me suis exprimé à plusieurs reprises sur le sujet. Il est très difficile pour moi de nouer des contacts avec la Fédération de Russie et avec la Crimée. J’espère que mon successeur pourra engager le dialogue avec les autorités russes et que nous lui laissons, avec ce rapport, une bonne base pour avancer. À plusieurs reprises, j’ai demandé aux autorités russes de travailler avec mon bureau et de nous dire leur position et leurs désaccords. Je les ai invitées à regarder avec nous la situation en face pour que nous puissions ensuite mener des discussions constructives. En vain.

Quant à la République de Moldova, en effet, la pression exercée sur les défenseurs des droits de l’homme y est grande. Je l’ai rappelé lors de ma visite. Compte tenu de la tension croissante avant les élections, les pressions sur les partis d’opposition et leurs avocats augmentent également. Il est nécessaire de réformer la justice avec pour objectif de renforcer la transparence et l’efficacité du système judiciaire. Nous devons écouter les juristes, les avocats et les représentants de l’opposition pour savoir s’ils peuvent ou non agir librement. Le fait que certains d’entre eux aient décidé de partir à l’étranger pour être en sécurité est un mauvais signal sur l’état du pays.

Je suis ravi de savoir que le Conseil de l’Europe a un plan d’action général et complet sur la République de Moldova. Une fois mis en œuvre, il devra être évalué afin de vérifier s’il a véritablement aidé l’opposition, les avocats et les juristes. S’il n’entraîne aucun changement dans le pays, il faudra alors s’interroger sur sa valeur.

LE PRÉSIDENT* – Mes chers collègues, il nous faut maintenant interrompre les questions à M. Muižnieks, que je remercie vivement au nom de l’Assemblée.

Nous vous souhaitons bonne chance pour l’avenir, Monsieur le Commissaire, quelles que soient les activités que vous allez entreprendre.

2. L’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (janvier-décembre 2017)
et l’examen périodique du respect des obligations de l’Estonie, de la Grèce,
de la Hongrie et de l’Irlande

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de M. Preda, au nom de la commission de suivi, sur «L’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (janvier-décembre 2017) et l’examen périodique du respect des obligations de l’Estonie, de la Grèce, de la Hongrie et de l’Irlande» (Doc. 14450 Parties 1 à 5).

Mes chers collègues, je vous rappelle que, lors de sa séance de lundi matin, l’Assemblée a décidé de réduire le temps de parole des orateurs à 3 minutes. Ce temps de parole s’applique donc aux débats de cet après-midi.

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 18 h 15. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 17 h 40, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Monsieur le rapporteur, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir votre convenance entre la présentation du rapport et la réponse aux orateurs.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur de la commission pour le respect des obligations et engagements des États membres du Conseil de l’Europe (commission de suivi) – Chers collègues, comme dernier acte dans mes fonctions de président de la commission de suivi, j’ai le plaisir aujourd’hui de vous présenter le rapport d’activité annuel de la procédure de suivi de l’Assemblée.

C’est la 19e année que la commission de suivi présente ce rapport à l’Assemblée et, comme dans ses précédents rapports, elle souligne l’énorme travail que la commission et ses rapporteurs accomplissent en ce qui concerne le suivi des obligations d’adhésion et les engagements d’adhésion de tous les États membres du Conseil de l’Europe, et pas seulement de ceux qui sont soumis à une procédure de suivi stricto sensu ou engagés dans un dialogue postsuivi.

Il ressort clairement de mon rapport que la procédure de suivi s’est poursuivie sans relâche au cours de la période considérée. Tous les rapporteurs ont poursuivi leur extraordinaire travail et ont régulièrement visité les pays sous leur responsabilité. Sur la base de ces visites, ils ont produit de nombreuses notes d’information, qui ont été déclassifiées et qui peuvent être consultées sur le site web de l’Assemblée. Ces notes d’information, ainsi que les rapports présentés, ont mis en évidence le dialogue approfondi et les bonnes relations qui existent entre les rapporteurs, les délégations nationales et les autorités des pays sous leur responsabilité. Je voudrais donc saisir cette occasion pour remercier les délégations nationales et les autorités de tous les pays concernés pour leur coopération et l’assistance qu’elles ont apportée à la commission et à ses rapporteurs, sans lesquelles notre travail aurait été difficile à accomplir.

Les principales constatations et conclusions du suivi en cours concernant les dix pays soumis à une procédure de suivi stricto sensu et les trois pays engagés dans un dialogue postsuivi sont incluses dans le projet de résolution dont vous êtes saisis. Comme les années précédentes, pour chacun de ces pays, j’ai souligné les progrès réalisés, noté les défis existants et mis l’accent sur les recommandations formulées pour répondre aux préoccupations qui subsistent. Il ne s’agit en aucun cas d’une liste exhaustive des progrès réalisés ou des défis qui subsistent, mais cela reflète le large éventail de questions que traitent nos rapporteurs.

La commission de suivi est chargée de surveiller le respect des obligations d’adhésion de tous les États membres du Conseil de l’Europe. Depuis 2014, la commission a cherché à approfondir et à renforcer son contrôle du respect des obligations d’adhésion des pays qui ne sont pas soumis à une procédure de suivi stricto sensu ou engagés dans un dialogue postsuivi. Dans ce contexte, des rapports d’examen périodique détaillés pour ces pays sont chaque année préparés sur la base, entre autres, des rapports des organes de suivi du Conseil de l’Europe. Cette année, la commission de suivi a établi des rapports périodiques sur le respect des obligations d’adhésion par l’Estonie, la Grèce, la Hongrie et l’Irlande. Ces rapports sont joints à ce rapport d’avancement et leurs recommandations et conclusions sont reflétées dans le projet de résolution.

D’après les réactions des autorités des pays qui ont fait l’objet d’un examen périodique à ce jour, il est clair que cet exercice est apprécié par tous les intéressés. Je voudrais exprimer ma gratitude pour la coopération des autorités des pays examinés dans ce rapport d’avancement, y compris pour les commentaires détaillés et approfondis que j’ai reçus concernant les avant-projets de rapport. Ces commentaires ont été pris en compte dans la rédaction des rapports finaux et ont grandement contribué à leur haute qualité.

Chers collègues, je voudrais terminer ma courte introduction en remerciant tous les corapporteurs pour leur travail. Être corapporteur pour le suivi d’un pays prend beaucoup de temps et demande un engagement. Les corapporteurs sont la base du succès de la procédure de suivi et, sans eux, ce rapport n’aurait pu être rédigé. Je voudrais également remercier les membres du secrétariat de la commission de suivi, sans lesquels les rapporteurs seraient incapables de faire leur travail.

LE PRÉSIDENT* – Merci, Monsieur le rapporteur, il vous restera 8 minutes et 30 secondes pour répondre aux orateurs.

La discussion générale est ouverte.

Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

M. KERN (France), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Je salue la qualité du travail de M. Preda.

S’agissant de la Hongrie, son rapport est à l’image de la position des autorités de ce pays vis-à-vis de l’Europe: ambivalent. Alors que Viktor Orbán est pour le moins eurocritique, il n’est pas non plus décidé à couper les ponts avec Bruxelles et sait jusqu’où il peut ne pas aller, pour des raisons à la fois politiques – que ferait la Hongrie en dehors de l’Union européenne? – et pragmatiques – car il y a les fonds structurels européens.

Cette attitude est parfaitement retracée dans le rapport. La Hongrie est un pays confronté aux défis structurels de tout État en transition postsoviétique: difficultés économiques, population vieillissante, adaptation aux standards politiques et juridiques européens. C’est pourquoi il est important de ne pas adopter une attitude de donneurs de leçons, mais d’observer la tendance sur le moyen terme et le long terme.

Or le rapporteur nous dit que cette tendance a suscité des inquiétudes. Pour ma part – et je connais la Hongrie et les Hongrois –, je me félicite de certaines avancées, par exemple en matière de représentation des minorités ethniques et linguistiques et de lutte contre la surpopulation carcérale et les discriminations – même si le sort des Roms doit retenir notre attention.

Cela dit, j’invite les autorités hongroises à respecter les standards européens, ceux du Conseil de l’Europe comme ceux de l’Union européenne, en matière de démocratie, d’État de droit et de libertés fondamentales. Ces standards ne sont que la traduction juridique de nos valeurs communes. Or force est de constater que, sur de trop nombreux sujets – les plus récents concernent l’enseignement supérieur et la politique migratoire et d’asile, mais ce ne sont pas les seuls –, la Commission européenne a dû engager des recours devant la Cour de Luxembourg contre des mesures prises par les Hongrois. Cette absence de coopération de la part de Budapest est stérile.

Le plus préoccupant néanmoins reste la notion de «démocratie illibérale», dont le Premier ministre hongrois, à défaut d’être le théoricien, se veut le praticien. Dans un article publié en 1997, le politologue américain Fareed Zakaria explique qu’une démocratie illibérale désigne une situation dans laquelle les dirigeants sont élus mais n’ont pas face à eux des contre-pouvoirs suffisamment efficaces pour limiter leurs actions. Or, la démocratie, ce ne sont pas seulement des élections libres, c’est aussi un État de droit respectueux des libertés individuelles, en particulier celles des minorités, et d’un subtil équilibre de pouvoirs et de contre-pouvoirs, afin d’éviter une dictature de la majorité. Nous devons nous garder tant du libéralisme non démocratique que de la démocratie illibérale, qui évoque un néo-césarisme prétendant incarner le «vrai peuple».

Il est temps que la Hongrie renoue avec l’esprit de 1989, lorsque, en ouvrant sa frontière avec l’Autriche, elle précipitait l’effondrement du totalitarisme.

Mme KAVVADIA (Grèce), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Je remercie le rapporteur du travail complet et remarquable qu’il a fourni pour l’élaboration de son rapport. La procédure de suivi est sans doute l’une des fonctions les plus importantes et les plus utiles de l’Assemblée parlementaire. Elle offre un outil dont les répercussions sont considérables, car tous les États membres du Conseil de l’Europe, qu’ils fassent l’objet d’une procédure de suivi ou non, sont soumis à un examen périodique de leur bilan au regard du respect de leurs obligations dans les domaines de la démocratie, des droits de l’homme et de l’État de droit.

Il s’agit justement des domaines les plus menacés par la crise existentielle que traverse actuellement l’Europe. On ne peut le nier: l’Europe est une nouvelle fois fragmentée, sur les plans économique et politique, entre pays riches et pays pauvres, créanciers et débiteurs, entre les pays qui accueillent les réfugiés et les migrants et ceux qui refusent d’en partager la charge. Les valeurs même sur lesquelles repose cette Organisation connaissent un effritement. Le fascisme, l’extrême droite, le racisme, la xénophobie et le nationalisme montrent une fois encore leur horrible visage, non pas aux marges de la vie politique, mais au sein même des partis politiques traditionnels. Les Européens ont-ils oublié les douleurs et les souffrances causées par ces monstruosités au cours de notre histoire? J’espère sincèrement qu’il n’en est rien.

C’est la raison pour laquelle la procédure de suivi de l’Assemblée doit être, selon moi et selon le Groupe pour la gauche unitaire européenne, un élément crucial du processus engagé avec la constitution de la commission ad hoc sur l’avenir de l’Assemblée parlementaire et du Conseil de l’Europe. Nous sommes extrêmement favorables à ce processus et considérons qu’il peut offrir un précieux espace de dialogue, dans lequel peuvent se concrétiser des idées et des solutions permettant de renforcer notre Organisation.

Enfin, s’agissant de la partie du rapport qui traite de mon propre pays, la Grèce, permettez-moi de remercier le rapporteur d’avoir tenu compte des très nombreuses observations de la délégation grecque et de les avoir intégrées. Notre pays reste résolu à poursuivre les réformes qui renforceront les droits de ceux qui en ont le plus besoin, parmi lesquels les personnes défavorisées, les victimes des inégalités, de la pauvreté et de l’exclusion, les personnes LGBT, ainsi que les réfugiés et les migrants. Dans les initiatives que nous prendrons en ce sens, nous continuerons à compter sur le soutien, l’assistance et la contribution constructive du Conseil de l’Europe et de l’Assemblée.

Mme FILIPOVSKI (Serbie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Le rapport de la commission de suivi est réaliste et a fait l’objet d’un bon travail de préparation. Il démontre que l’Estonie, la Grèce, la Hongrie et l’Irlande disposent d’institutions démocratiques qui respectent les normes du Conseil de l’Europe. Je voterai le projet de résolution qui nous est proposé.

J’estime que ces pays doivent suivre les recommandations du GRECO pour lutter de manière transparente et ouverte contre toutes les formes de corruption. Je suis sincèrement convaincu que le Parlement grec adoptera la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes et les violences domestiques, laquelle invite à adopter des règles juridiques strictes et des mesures préventives contre les violences à l’égard des femmes et des enfants.

Il est tout aussi important que les minorités nationales en Estonie aient le droit d’utiliser leur langue, au niveau local ou national. Je suis convaincue que la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires et régionales et la pleine application de la Convention européenne des droits de l’homme permettra de réduire les tensions en Estonie, et qu’elle constituera un pas important vers le respect des droits de l’homme et de l’État de droit. Je suis convaincue que le dialogue entre les minorités ethniques et l’ethnie majoritaire, dans ces quatre pays, est essentiel pour développer l’État de droit, la protection des droits de l’homme et la démocratie.

M. ARIEV (Ukraine), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen* – Je félicite M. le rapporteur pour son excellent travail. J’apprécie qu’il souligne le fait que l’Ukraine a réussi à mener en 2017 les réformes attendues, et cela dans des circonstances difficiles.

Les progrès sont immenses dans notre coopération avec le Conseil de l’Europe. L’Ukraine a ratifié les protocoles nos 15 et 16 à la Convention européenne des droits de l’homme. Nous avons respecté nos engagements dans la mise en œuvre du plan d’action du Conseil de l’Europe, et nous continuerons à le faire lors de l’adoption du nouveau plan. Quant aux réformes judiciaires – le Conseil de l’Europe joue un rôle significatif dans ce domaine –, l’Ukraine a mis en œuvre un nombre important d’arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. En mars 2017, l’Ukraine a adopté une loi sur la cybersécurité et la transparence dans les médias – je pourrais continuer l’énumération.

Malgré l’agression de la Fédération de Russie, qui se poursuit, et la situation en Crimée, nous avons poursuivi les réformes. L’Ukraine est un partenaire fiable et souhaite le rester. Concernant la situation dans le Donbass, on ne compte aucun progrès de la part de la Fédération de Russie. M. Poutine a dit, aujourd’hui, que la situation en Crimée n’avait rien de dramatique, et que la situation allait se stabiliser. À la lumière de ces événements, n’envoyons pas de signaux erronés à la Fédération de Russie, ne leur laissons pas croire que nous resterons tranquilles et que nous ne réagirons pas à leur agression contre l’Ukraine et à l’annexion de la Crimée.

La Fédération de Russie a tout fait pour saper notre Organisation, en ne respectant pas ses obligations: elle ne paie pas sa contribution, elle a gelé sa coopération avec le Commissaire aux droits de l’homme et n’a pas mis en œuvre les décisions prises à la suite de son agression contre l’Ukraine. La Fédération de Russie ne satisfait pas aux exigences du Conseil de l’Europe. Elle voudrait également mettre un terme à la procédure de suivi. Soyons très prudents, n’envoyons pas les mauvais signaux, ne cédons pas aux exigences de la Fédération de Russie.

M. SCHENNACH (Autriche), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Ce sujet, qui est régulièrement soumis à notre examen, montre combien la commission de suivi est importante au sein du Conseil de l’Europe. En tant qu’ancien président de la commission, j’affirme que l’on ne saurait, pour des raisons budgétaires, restreindre ses activités. Sinon, elle n’aurait plus de sens.

Le rapport reflète nos préoccupations, mais aussi des points positifs: les nouvelles réformes en Arménie, les dernières élections en Albanie, la libération de prisonniers politiques, l’année dernière, en Azerbaïdjan, et la réforme de la justice au Monténégro. Mais les inquiétudes restent nombreuses: la situation en Bosnie-Herzégovine, dont nous avons discuté hier – elle est dramatique, car elle n’évolue pas du tout –; l’atmosphère extrêmement polarisée en Albanie; les attaques physiques contre le parlement à Skopje; le manque d’indépendance et l’ensemble des atteintes à l’État de droit en Azerbaïdjan. Au nombre des inquiétudes, il convient de mentionner également la situation des médias et de la liberté d’expression, sujet qui nous préoccupe toujours. En effet, dans certains pays – comme la République de Moldova ou la Géorgie –, il est très difficile d’obtenir un véritable pluralisme dans les médias.

Aucun des pays qui, actuellement, font l’objet d’une procédure de suivi n’est prêt à entrer dans une phase de postsuivi; mais des candidats existent, et peut-être, dans deux ans, l’un de ces pays basculera-t-il dans le dialogue postsuivi.

La situation en Turquie reste effrayante. La situation de l’Ukraine a déjà été abordée.

Il est également positif que des pays qui ne font pas l’objet d’une procédure de suivi soient aussi abordés dans ce rapport – cette année, l’Estonie, la Grèce, la Hongrie et l’Irlande. Nous avons beaucoup débattu; les réactions furent vives concernant les problèmes liés à l’État de droit en Hongrie.

En tant que rapporteur sur l’Azerbaïdjan, je dois dire que les trois derniers arrêts de la Cour concernant ce pays – dans les affaires concernant Afgan Mukhtarli, Gezal Bayramli et Aziz Orujov – nous inquiètent beaucoup, car ils témoignent de l’absence d’un véritable État de droit.

M. SEYIDOV (Azerbaïdjan), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – Ce rapport est un excellent exemple de la façon dont la commission de suivi peut couvrir non seulement des pays faisant l’objet d’une procédure de suivi, mais aussi l’ensemble des États membres – c’est là la nouvelle démarche que nous devons adopter. On constate parfois une approche sélective au sein du Conseil de l’Europe. Une partie des États membres est soumise à la procédure de suivi, quand la situation des autres n’est pas examinée.

Le monde se réduit, l’Europe devient de plus en plus petite, si bien que les problèmes qui existent en Grande-Bretagne, en France ou en Allemagne ont immédiatement des conséquences dans des pays comme l’Azerbaïdjan et la Turquie, lesquels font l’objet de la procédure de suivi.

Soyons sérieux dans notre travail. Pour cela, nous devons modifier cette procédure. Le rapport nous permet de comparer les situations. Or on constate que les problèmes en France, en Allemagne ou au Royaume-Uni sont peut-être beaucoup plus dangereux que les problèmes rencontrés dans les démocraties dites «nouvelles», qui font l’objet de la procédure de suivi.

C’est pourquoi il faut non seulement songer au rapport annuel, qui présente les problèmes dans ceux que nous appelons les «anciens» États membres, mais également réfléchir à une modification de la procédure de suivi, afin d’être plus précis, plus objectifs en matière de droits de l’homme, et de s’attaquer à des questions plus problématiques.

C’est un problème tout à fait actuel, car nous constatons aujourd’hui une nette augmentation de la xénophobie, du populisme et de l’islamophobie au sein de divers pays, en particulier dans les démocraties les plus anciennes. C’est pourquoi cette nouvelle démarche visant à couvrir tous les pays – pour laquelle je remercie à nouveau le rapporteur – doit être, à l’avenir, une priorité pour la commission de suivi.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – J’indiquerai tout d’abord que le bilan des obligations et engagements internationaux et le suivi régulier des principaux instruments juridiques en place sont de la plus haute importance pour l’ensemble des États membres du Conseil de l’Europe.

Les autorités hongroises apprécient beaucoup l’aide fournie par les différentes structures du Conseil, lesquelles ont soutenu les réformes démocratiques qui ont eu lieu ces dernières années. Au cours de ce processus législatif, toutes les recommandations qui ont été faites – en particulier celles de la Commission de Venise – concernant la liberté des médias, l’indépendance de la justice, ou encore la liberté des organisations non-gouvernementales ont été prises en compte.

Le Gouvernement hongrois a abordé ces sujets de préoccupation avec les experts dès qu’ils en ont fait la demande. Je tiens à souligner à quel point ces consultations ont été importantes: même si nous n’étions pas toujours d’accord, ces échanges ont constitué un cadre important, qui montre que nous sommes ouverts et disposés à vous écouter.

Je souhaite en profiter pour appeler à utiliser davantage les différents mécanismes de contrôle du Conseil de l’Europe, en particulier ceux de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe – spécialement en cette période de crise et de moyens budgétaires limités. Cela appelle donc un travail complémentaire, et non parallèle. Nous devons nous concentrer sur la conformité avec les normes du Conseil de l’Europe et éviter de reproduire les débats qui se sont déjà tenus dans d’autres organisations.

En ce qui concerne les pays qui ne font pas l’objet d’une procédure de suivi, le rapport suit la démarche habituelle et s’attache à donner une vue d’ensemble objective de la situation, tout en insistant sur certaines questions qui, de notre point de vue, ont pu trouver une réponse grâce au dialogue fructueux entre les différents acteurs du Conseil de l’Europe.

J’espère que vous partagez tous nos préoccupations. Nous sommes disposés à coopérer davantage encore avec le Conseil de l’Europe sur un certain nombre de sujets, mais nous pensons que d’autres membres doivent faire preuve d’un esprit constructif, utiliser les mécanismes existants et suivre les recommandations émises par notre Organisation pour ce qui est du respect de leurs obligations.

LE PRÉSIDENT *– MM. Corlăţean et Bereza, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle.

Mme MIKKO (Estonie)* – Je vous remercie, Monsieur Preda, pour votre excellent rapport. Je représente avec fierté la «e-Estonie», l’Estonie numérique. Notre société est l’une des plus avancées du monde sur le plan numérique et je suis heureuse que le rapport évoque les politiques que nous avons menées en matière de cyber-gouvernement.

Elles ont permis de renforcer considérablement la transparence et l’accessibilité du gouvernement. C’est le résultat d’une décision politique: investir dans les nouvelles technologies de l’information pour encourager l’efficacité et l’innovation. Aujourd’hui, les Estoniens n’imaginent plus leur existence sans le vote électronique ou la possibilité de remplir leur déclaration d’impôts en 5 minutes sur un téléphone mobile.

Être une nation numérique nous a également permis de faire de la cybersécurité une priorité et d’aborder la question de la sécurité numérique internationale. En effet, nous avons fait l’objet d’attaques informatiques, et nous avons mis en place un système de défense élaboré.

Environ 25 % de la population estonienne est d’origine russe: c’est l’un des héritages de notre histoire. Le rapport reconnaît que l’Estonie a pris des mesures importantes pour réduire le nombre de personnes apatrides – même si nous lui préférons l’expression «personnes sans citoyenneté déterminée» car, en Estonie, ces personnes ont plus de droits que les apatrides, tels qu’ils sont définis par la Convention relative au statut des apatrides de 1954.

Les personnes sans citoyenneté déterminée ont les mêmes droits que les citoyens estoniens, que ce soit en matière économique, sociale ou culturelle. Contrairement aux apatrides, ils ont des documents de voyage, des permis de séjour et bénéficient d’un accès égal aux services sociaux. Les personnes de nationalité non déterminée peuvent voyager au sein de l’Union européenne et même se rendre en Fédération de Russie sans visa. C’est important et il faut le souligner. L’Estonie est l’un des rares pays au monde dans lequel les personnes qui vivent sur son territoire depuis longtemps, et ce quelle que soit leur nationalité – y compris si celle-ci n’est pas déterminée – peuvent voter aux élections locales.

Malgré les progrès réalisés au cours des vingt dernières années, l’Estonie est consciente du travail qu’il lui reste à accomplir. Depuis 1991, le nombre de personnes dont la citoyenneté n’est pas déterminée a été divisé par cinq; le gouvernement continue ses efforts pour encourager ceux qui sont dans cette situation à demander la citoyenneté estonienne, en particulier en offrant des cours de langue gratuits et en continuant à mener des campagnes d’information.

La société estonienne a encore besoin de temps pour se remettre de 50 ans d’occupation soviétique. Mais, en tant qu’État honorant ses obligations à l’égard du Conseil de l’Europe et dont le fonctionnement des institutions démocratiques est conforme aux normes de l’Organisation, elle appartient pleinement à la famille européenne.

M. XUCLÀ (Espagne)* – Je tiens à remercier et féliciter notre rapporteur pour son travail. M. Preda a présidé la commission de suivi ces deux dernières années et, à ce titre, il a eu énormément de travail. En effet, conformément à la réforme de la commission de suivi, le président de la commission est chargé de l’examen périodique de l’ensemble des pays qui ne sont pas sous procédure de suivi. Cela représente un travail considérable.

Je pense qu’il serait bon, à l’avenir, de mieux répartir le travail au sein de la commission et d’alléger le travail du président. Pour ma part, j’ai été rapporteur pour le dialogue postsuivi avec Monaco, avant de m’occuper de l’Ukraine; dans le même temps, certains membres de la commission ne s’occupent d’aucun pays, et ont de fait un rôle plus passif. Il faudrait peut-être envisager un changement des règles, afin de mieux distribuer les tâches entre les différents membres de la commission, et que les rapporteurs chargés de l’examen périodique soient plus nombreux.

Monsieur Preda, vous avez accompli un excellent travail. Néanmoins, il conviendra de mieux répartir les tâches à l’avenir.

Veuillez excuser ces considérations de méthodologie un peu longues, chers collègues. J’ajoute encore que deux membres de la commission de suivi, Mme Maury Pasquier et Mme Bakoyannis, ont été nommées corapporteures pour la Fédération de Russie et ne peuvent pas mener à bien leur mission. Même si cela n’entre pas dans le champ de ce débat, il importe de le rappeler.

La sous-commission chargée du suivi des conflits entre États membres présente un bilan très positif. Cette initiative a été lancée sous la présidence de M. Schennach. Il est fondamental que les États membres du Conseil de l’Europe en conflit disposent d’une enceinte de dialogue au sein de cette Assemblée. Nous avons d’ailleurs eu un débat de fond à ce sujet.

Les deux rapports comportent des bonnes nouvelles, mais aussi de moins bonnes, notamment certaines évolutions négatives en Albanie et la liberté des médias en Ukraine. En ce qui concerne les pays qui font l’objet, dans ce rapport, d’un examen périodique et non d’une procédure de suivi, nous aimerions que l’Estonie et la Grèce signent la Charte européenne sur les langues minoritaires ou régionales.

M. MULLEN (Irlande)* – L’Irlande se classe parmi les pays du Conseil de l’Europe respectant le mieux leurs obligations découlant de la Convention européenne des droits de l’homme, ce qui m’amène à soulever certaines questions essentielles.

Existe-t-il des passages du rapport relatif à l’Irlande démontrant que les membres de la commission de suivi ont tendance à s’affranchir du cadre de leur mandat pour des raisons que l’on pourrait considérer comme négatives ou purement idéologiques? Par ailleurs, ont-ils toujours pris soin de bien s’informer des réalités de terrain avant de formuler des commentaires, des critiques et des recommandations?

S’agissant de la première question, les militants des droits de l’homme et les membres des organismes de contrôle peuvent très facilement être aveuglés par l’idéologie, ce qui leur fait perdre de vue l’objet précis de leur mandat. Nous avons constaté une telle dérive à propos de l’avortement. Dans l’arrêt A.B.C c. Irlande, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que son interdiction par l’État irlandais, sur la base de convictions morales et d’une certaine conception de la vie prévalant parmi les Irlandais, n’excédait pas la marge d’appréciation accordée à celui-ci. Or les membres de la commission de suivi appellent à la libéralisation de l’avortement en Irlande. Le Commissaire Muižnieks s’est lui aussi exprimé tout à l’heure sur ce point. Tous excèdent le cadre de leur mandat, au mépris de la marge d’appréciation laissée aux États membres, ce qui n’augure rien de bon pour l’avenir des droits de l’homme.

D’autres passages du rapport démontrent une tendance à s’affranchir du cadre du mandat, tels que l’injonction faite au Parlement irlandais visant à lui faire adopter le projet de loi relatif à l’admission dans les établissements scolaires. Le droit des parents d’assurer à leurs enfants une éducation conforme à leurs valeurs figure dans la Constitution irlandaise ainsi que dans la Convention européenne des droits de l’homme. Si les écoles manquent de places et affectent les élèves selon leur religion, elles ne commettent aucune violation des droits de l’homme. Pourtant, la commission de suivi aborde ce sujet.

L’Irlande n’est pas seule concernée. Le rapport sur la Hongrie exhorte ce pays à modifier sa législation relative aux versements étrangers perçus par les organisations non gouvernementales qui ont des activités dans le pays. N’est-il pas davantage question ici de M. Soros que des droits de l’homme? N’est-il pas normal de garantir la transparence en la matière, afin de savoir qui finance quoi? N’aimerions-nous pas tous savoir à quel prix certains États membres de cette organisation ont amené les autres à une meilleure compréhension de leur point de vue sur tel ou tel sujet?

La relativité des normes et l’existence de deux poids, deux mesures dans les évaluations de la commission en matière de liberté d’expression sont préoccupantes. S’agissant de la Hongrie, on déplore la mise à l’index de certaines organisations non gouvernementales tout en encourageant la dépénalisation de la diffamation afin de permettre l’expression de positions satiriques: il y a véritablement là deux poids, deux mesures. Certes, les organisations non gouvernementales réalisent un travail important; pour autant, elles ne sauraient jouir de droits excédant ceux des responsables de l’État. Afin de préserver la crédibilité de la défense des droits de l’homme, il importe à l’avenir que la commission de suivi se garde de toute dérive hors du cadre de son mandat, ce à quoi elle n’est pas parvenue.

Mme KOVÁCS (Serbie)* – Même s’il n’existe aucune définition universellement acceptée de la démocratie, de l’égalité, de la liberté, de la légitimité, de la représentativité et de la transparence, ces principes, auxquels nous nous référons, signifient que tous les citoyens sont égaux devant la loi et disposent tous d’un même accès au pouvoir. De nombreux pays ont dû se reconstruire sur les ruines du système socialiste. Le pluralisme politique et les élections libres y ont été rapidement introduits à partir de 1989. La démocratie suppose la coexistence des opinions et le dialogue dans la dignité, qui sont nécessaires à tous.

En tant que représentante de la minorité hongroise de Serbie, je souhaite rappeler les tâches qui incombent aux partis minoritaires, notamment développer la communauté qu’ils représentent, protéger ses droits, représenter ses intérêts, développer des relations avec la majorité ainsi qu’avec le pays d’origine, nourrir des aspirations régionales et développer des institutions communautaires dans de nombreux domaines, y compris les infrastructures, l’agriculture, la justice et l’intégration européenne.

Notre Assemblée a décidé de suivre de très près la situation prévalant en Hongrie dans certains domaines afin d’y dresser le bilan de la situation politique, des mesures prises et des progrès obtenus. La Commission de Venise a d’ailleurs récemment analysé certains textes de loi. Au cours de ce processus, les responsables hongrois se sont montrés très constructifs et ouverts aux propositions avancées.

Les mesures prises par les autorités hongroises, en coopération avec le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et des représentants de la Commission de Venise, sont bienvenues. La Hongrie est un membre engagé du Conseil de l’Europe. Le dialogue est essentiel pour promouvoir l’État de droit, la protection des droits de l’homme et la démocratie.

Le rapport et le projet de résolution dont nous débattons, ainsi que certains acteurs internationaux, affirment clairement que les progrès les plus remarquables ont été accomplis en matière d’indépendance de la justice. Ainsi, l’État de droit et la démocratie prévalent pleinement en Hongrie. Concernant la législation relative aux médias, on note aussi une volonté d’amélioration. La Hongrie s’engage bel et bien à respecter les droits de l’homme. Le rapport note que, dans le domaine judiciaire, de nombreux progrès ont été accomplis. Je le soutiens donc, ainsi que le projet de résolution.

Enfin, je rappelle que de nombreux États membres du Conseil de l’Europe demeurent sur les écrans radar en dépit de la conclusion de la procédure de suivi. Le Secrétaire général, de même que les membres de la Commission de Venise et le Commissaire aux droits de l’homme, ont rappelé qu’il faut suivre de très près l’évolution de ces États.

M. SHEHU (Albanie)* – C’est pour moi un grand plaisir d’évoquer ici la procédure de suivi dont l’Albanie fait l’objet; elle constitue une contribution inestimable au processus démocratique qui est en cours dans mon pays ainsi qu’à son parcours d’intégration européenne. Nous y avons toujours été favorables et nous le resterons: elle est indispensable pour l’Albanie comme pour la stabilité de notre région.

Je ne dresserai pas la liste des problèmes auxquels l’Albanie et sa région sont confrontés. Je mettrai l’accent sur quelques faits importants afin que chacun comprenne à quel point il est nécessaire de poursuivre la procédure de suivi de l’Albanie.

L’un des phénomènes les plus dangereux est le développement constant de l’activité de groupes criminels qui se sont infiltrés et propagés comme des métastases cancéreuses dans nos principales institutions et qui les contrôlent en partie. Nous, représentants de l’opposition, avons pu faire adopter une loi pour lutter contre ce phénomène dans les institutions, à commencer par le parlement, mais sa mise en œuvre est lente et très partielle. Nous avons réussi à expulser du parlement quelques députés aux antécédents criminels et avons pu éloigner les maires de certaines communes pour des raisons similaires, mais je peux vous assurer que nous n’en sommes qu’aux balbutiements de cette bataille rude mais essentielle pour la survie de la démocratie et pour la poursuite de notre parcours vers l’intégration européenne.

En outre, la culture du cannabis partout dans le pays a beaucoup contribué au renforcement de la criminalité. Par les recettes qu’elle procure, elle a permis aux groupes criminels de renforcer leur activité. Ils ont des liens étroits avec la police. C’est ainsi qu’ils ont pu fausser le résultat des dernières élections en achetant des votes au profit de la majorité actuellement au pouvoir.

Malheureusement, les institutions ne font rien. Alors qu’elles auraient dû combattre ces phénomènes, elles collaborent avec les groupes criminels. La défense des valeurs européennes, des droits de l’homme, l’intégration du pays en Europe et la victoire de la démocratie sont de durs combats. C’est pourquoi nous continuons à avoir besoin de votre aide précieuse et de votre présence par le biais de la procédure de suivi.

M. KANDELAKI (Géorgie)* – Nul n’ignore que l’efficacité avec laquelle notre Organisation peut examiner la situation dans les États membres n’a cessé de se réduire depuis plusieurs années. La cause de cette érosion qui se poursuit et qui est déjà considérable, c’est l’acceptation par des personnes importantes de notre Organisation du fait que certains pays puissent faire exception au respect des règles. Nous l’avons constaté après l’invasion de la Géorgie par la Fédération de Russie, en 2008. Certains d’entre vous se rappellent sans doute les débats qui avaient eu lieu à l’époque. Bien entendu, le chantage exercé par la Fédération de Russie par l’intermédiaire de sa contribution financière au Conseil de l’Europe est maintenant évident.

Je représente l’opposition en Géorgie, où le gouvernement consacre des ressources financières à bon nombre d’actions inutiles. Si nous répartissions le montant qui manque au budget du Conseil de l’Europe entre tous les États membres, la somme à rajouter ne serait pas gigantesque. Pour ma part, je serais favorable à ce que mon gouvernement attribue 1 ou 2 millions d’euros supplémentaires au Conseil de l’Europe afin d’enrayer le processus que nous observons.

Bien entendu, mon pays est mentionné dans le rapport, aux côtés d’autres États confrontés à de graves problèmes: réforme de la Constitution, adoption d’un système électoral à la proportionnelle, demandée depuis plusieurs années par l’Assemblée et d’autres partenaires. Je m’arrêterai plus particulièrement sur une question récente de la plus haute importance, à savoir l’arrêt récent rendu par la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’ancien Premier ministre emprisonné, Vano Merabishvili.

C’est le premier arrêt rendu au titre de l’article 18 de la Convention par la Cour européenne, la Grande Chambre ayant établi qu’il y avait eu violation de cet article. La réaction du Gouvernement géorgien a été extrêmement décevante. Il a dit qu’il paierait 4 000 euros et que ce serait tout pour l’exécution de l’arrêt. Or celui-ci fait de M. Merabishvili un prisonnier politique – la Cour n’emploie pas ce terme mais c’est bien de cela qu’il s’agit. Il est écrit dans l’arrêt que les autorités avaient d’autres objectifs en vue en poursuivant cette personne. Le choix est désormais clair: soit les autorités géorgiennes ignorent totalement cette décision très claire, auquel cas notre réputation serait entachée, soit elles respectent cette décision et libèrent immédiatement M. Merabishvili.

M. VLASENKO (Ukraine)* – Je voudrais d’abord remercier le rapporteur pour son excellent travail. J’appuie l’idée de prévoir des rapports annuels, car cette démarche nous permet de constater rapidement les progrès ou les régressions dans l’exécution des obligations des pays qui font l’objet d’une procédure de suivi et de postsuivi, mais aussi de ceux qui ne font l’objet d’aucun suivi.

Les élections libres et équitables sont l’un des éléments importants à examiner dans cette procédure. De fait, elles sont la pierre angulaire de la démocratie. En Ukraine, les prochaines élections, à la fois législatives et présidentielle, auront lieu en 2019. L’absence d’élections libres était d’ailleurs à l’origine des deux révolutions ukrainiennes. Il faut en avoir pleinement conscience.

Je rappellerai aussi que, pendant trois ans, les membres de la commission électorale centrale ont exercé leurs fonctions sans avoir de mandat. Qui plus est, le Président a proposé des candidats il y a deux jours, mais en établissant une liste qui n’est pas du tout équilibrée: seuls son parti et ses alliés sont représentés. Cette institution devait certes être renouvelée, mais de manière équilibrée. Du reste, cette position est également celle de la plupart des ONG qui suivent les élections. La plus importante d’entre elles a déjà dit clairement que les propositions qui avaient été faites pourraient aboutir à une composition déséquilibrée de la Commission électorale et pourraient, de ce fait, devenir un instrument de manipulation des élections.

À cela s’ajoute une mentalité datant de la période stalinienne, selon laquelle les élections sont faites non par ceux qui votent mais par ceux qui dépouillent le scrutin. La commission de suivi devrait regarder de très près ce qui se passe en Ukraine pour éviter la composition déséquilibrée du comité électoral central. C’est le dernier garde-fou, l’ultime moyen de garantir des élections libres et équitables, qui sont la pierre angulaire de la démocratie.

M. NÉMETH (Hongrie)* – Je tiens à remercier M. Preda pour le travail qu’il a effectué ces deux dernières années en qualité de président de la commission de suivi. Toutes mes félicitations. J’espère que Sir Roger Gale, le futur président, réussira aussi bien que vous. Je vous souhaite beaucoup de succès à la présidence du groupe PPE.

Mes chers collègues, nous parlons de l’évolution périodique de la procédure de suivi. C’est une bonne chose; nous devons continuer dans cette voie. Nous essayons de mettre en place de nouveaux systèmes et de les tester. Comme M. Xuclà l’a suggéré, il faut envisager constamment des réformes de notre activité de suivi.

Nous savons que des coupes budgétaires sont envisagées au Conseil de l’Europe et les secrétariats sont assez inquiets. Dans ce contexte, nous devons espérer que les activités de la commission de suivi ne seront pas affectées.

Beaucoup de clichés idéologiques continuent d’orienter nos activités.

L’activisme en matière de droits de l’homme a parfois tendance à oublier des principes fondamentaux de la démocratie. Cela se manifeste dans le travail de suivi. Il faut donc, dans le cadre de nos activités de suivi, s’efforcer de comprendre ce qu’est l’identité constitutionnelle. Comme le disait notre collègue irlandais, l’identité constitutionnelle doit être respectée dans les démocraties. Mais certains pays appliquent des règles qui n’existent pas dans d’autres pays. Pour autant, cela ne signifie pas que ces pays ne soient pas des démocraties.

Dans la version originale du rapport, le concept de démocratie «non libérale» n’était pas employé, mais l’un de nos collègues a tenu à revenir dessus. La Hongrie n’est pas pour une démocratie non libérale, et ne l’a jamais été. Ce serait donc mal interpréter l’approche hongroise que de le penser. Nous, nous parlons plus volontiers de démocratie «post-libérale». Comme l’a d’ailleurs dit M. Trump à Varsovie, le renouveau de l’Occident doit se fonder sur la famille et sur les libertés. Voilà ce qu’est une société post-libérale.

Je vous remercie à nouveau, Monsieur le président, et je remercie également le secrétariat de la commission pour tout le travail fourni.

M. CROWE (Irlande)* – Permettez-moi tout d’abord de remercier le rapporteur, M. Preda. Je le félicite de son rapport et de ses conclusions et l’invite à venir au Parlement irlandais pour nous présenter ses recommandations.

Le rapport rappelle effectivement qu’en Irlande, on s’inquiète du Brexit. Mon parti, le Sinn Féin, est implanté sur toute l’île et nous sommes très attachés à l’indépendance. L’Irlande du Nord a voté à la majorité en faveur du maintien dans l’Union européenne, et ce vote doit être respecté. Le retour à une frontière étanche serait une catastrophe pour notre peuple. L’Irlande et ses amis veulent rester dans l’union douanière, le marché unique et le cadre juridique européen. Il faut protéger les accords de paix du Good Friday ainsi que les droits des citoyens.

Ce rapport rappelle une page sombre de notre histoire: les blanchisseries Magdalene et les unités femmes-enfants. Malheureusement, beaucoup de victimes survivantes ont été ignorées, oubliées quand il s’est agi d’indemnisations ou de réparations. Il n’y a eu que des excuses partielles. Je me félicite de constater que des enquêtes sont prévues sur le sujet ainsi que des projets de réparation.

Je soutiens également la suppression de l’article 41.2.1 de la Constitution irlandaise relative à la vie des femmes dans leur foyer ainsi que le nouveau projet de loi visant à lutter contre la violence domestique, dans le respect des conventions internationales existantes.

Je demande aussi que l’on revienne sur l’interdiction de l’avortement. L’opposition demande l’interdiction. J’espère que la campagne sera digne, que l’on respectera le résultat de la consultation et que les Irlandais abrogeront cet amendement.

Enfin, se pose la question de la reconnaissance des Gens du voyage comme minorité ethnique. Nous le demandons depuis très longtemps, même si cela ne suffira pas à alléger les difficultés qu’ils rencontrent. Moins de 1 % des Gens du voyage arrivent en troisième classe (à un niveau scolaire élémentaire). Ils connaissent un taux de suicide six fois plus élevé. Le taux de mortalité des enfants est trois fois plus élevé et le risque de mourir jeune bien supérieur.

Quant aux demandeurs d’asile, ils se trouvent dans des situations précaires. Nombre d’entre eux se plaignent du long temps d’attente qu’ils doivent passer dans les centres de détention. Ceux-ci me semblent être en violation des droits de l’homme et de la dignité des demandeurs d’asile et il est urgent de renoncer à ce système. Entre 20 000 à 26 000 citoyens sont sans papiers en Irlande. Il faut effectivement essayer de trouver une solution juridique.

M. KILIÇ (Turquie)* – Malheureusement, ce rapport reprend certaines opinions préconçues. Il est notamment indiqué que certains changements intervenus récemment enfreignent la séparation des pouvoirs. Mais notre gouvernement a pris de nouvelles mesures visant à la renforcer.

Dans le nouveau système, la séparation des pouvoirs est garantie et le pouvoir législatif revient exclusivement au parlement. Les membres du parlement sont élus de manière indépendante. S’agissant du nombre de parlementaires, il y a des différences, mais la séparation des pouvoirs sera entièrement assurée. La formation de gouvernements de coalition sera favorisée. Nous allons également adopter un mode de scrutin proportionnel. Enfin, des mesures ont été prises pour assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire.

Nous avons, par ailleurs, adopté des mesures concernant les partisans de l’organisation FETÖ: 14 800 personnes ont déjà été libérées et ont retrouvé leur poste.

Par ailleurs, dans la partie du rapport concernant la Grèce, sont évoqués les droits des personnes qui vivent en Thrace occidentale. Conformément aux lois et aux accords en vigueur, nous estimons que les personnes d’origine turque vivant en Thrace occidentale doivent, elles aussi, bénéficier de ces droits. Les principes et les instruments internationaux doivent être pleinement respectés dans cette région.

Nous considérons également, s’agissant de la partie du rapport consacré à la Hongrie, qu’il faut garantir le respect et l’indépendance des États.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Je tiens à remercier M. Preda ainsi que le secrétariat de la commission de suivi, car il est bien d’avoir ainsi la possibilité de comparer différents pays dans leur parcours vers la démocratie.

Nous l’avons dit, la démocratie ne se borne pas à des élections libres. Mais, sans élections libres, il n’existe pas de démocratie. Je poursuivrai le propos de mon collègue ukrainien en disant que c’est terrible parce que tous les partis ne sont pas représentés au sein de la commission électorale centrale. Pour nous, c’est un aspect essentiel, car c’est ainsi que nous garantirons des élections libres.

La question de l’agression de la Fédération de Russie et du respect des droits de l’homme est également très importante.

Puis, le rapport s’intéresse aussi à la question de la lutte contre la corruption en Ukraine, comme dans d’autres pays de notre Organisation. À cet égard, nous avons pris des mesures concrètes et mis en place de nouvelles instances pour lutter contre la corruption, dont un tribunal anti-corruption. L’idée même de ce tribunal a été appuyée par la Commission de Venise, qui nous a encouragés en ce sens.

Tous les projets présentés au parlement ont pour objectif de reprendre les recommandations de la Commission de Venise. C’est fondamental pour l’Ukraine. Toutes les organisations internationales et des forums comme celui de Davos ont encouragé l’Ukraine à aller en ce sens. L’élection des membres du tribunal chargé de la lutte contre la corruption doit être parfaitement transparente.

LE PRÉSIDENT* – La liste des orateurs est épuisée. J’appelle la réplique de la commission.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Je serai bref. J’ai apprécié toutes les interventions et remercie les orateurs. Les problèmes évoqués dans le rapport témoignent de l’importance de l’activité de la commission de suivi.

Tout le monde s’accorde sur la nécessité de contacts réguliers avec les pays qui font l’objet de la procédure de suivi.

Permettez-moi de m’adresser à tous les membres de cette Assemblée, anciens et nouveaux. Il est difficile de rédiger un rapport sur un pays. De nombreux acteurs participent au processus.

Les problèmes financiers doivent être surmontés. J’ai apprécié les interventions de MM. Xuclà et Schennach qui ont rappelé que l’activité de la commission constitue le cœur de l’activité de notre Organisation et sa valeur ajoutée. Un pays doit suivre un certain nombre d’étapes et remplir des conditions pour entrer dans le club des pays 100 % démocratisés. Il n’y a pas d’alternative à la procédure de suivi et de postsuivi.

Tous les pays membres doivent apporter leur contribution financière. Le chantage au financement est inacceptable. Sans moyens, nous ne pouvons mener efficacement notre travail de suivi des pays candidats à l’entrée dans l’Organisation.

Dans cet hémicycle nous entendons des milliers de rapports, par exemple sur la pêche aux phoques au Canada. On étudie des questions peut-être plus importantes pour le monde. Mais les pays qui veulent se démocratiser, qui veulent être aidés dans le cadre de la procédure de suivi ou de postsuivi, ont besoin de nous, de notre expérience.

Je fais appel à tous. L’activité de la commission de suivi est primordiale.

Je remercie les membres de la commission et mon secrétariat pour le travail accompli pendant deux ans.

En réponse à mon collègue irlandais, M. Mullen, je précise que, lorsque nous pratiquons l’examen périodique du respect des engagements pris, nos rapports ne reflètent pas des options politiques. Nous traitons de questions techniques sur la base des procédures en vigueur.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission de suivi* – Ce rapport est le dernier rapport de M. Preda en qualité de président. Je souhaite le remercier pour ce travail et pour tout ce qu’il a fait pour notre commission.

Ce rapport donne une bonne vue d’ensemble de la procédure de suivi. Il a été fait avec honnêteté et impartialité. Nous saluons les efforts accomplis mais il faut aussi dire les choses comme elles sont et nous concentrer sur les pays dont nous regrettons qu’ils aient méconnu leurs engagements. Ces examens périodiques démontrent que nous souhaitons suivre de très près la situation pour tous les États membres. Nous avons évoqué ce monitoring ce matin.

Je vous invite à soutenir le projet de résolution et la position de la commission sur les différents amendements, notamment ceux qui ont été adoptés à l’unanimité. Ce sera une preuve supplémentaire de la qualité du rapport et de son impartialité.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission de suivi a présenté un projet de résolution sur lequel 18 amendements et 3 sous-amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que la présidence de la commission de suivi souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 13, 14, 2, 11 et 12, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

C’est bien cela, Monsieur le vice-président de la commission?

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, ces amendements sont déclarés définitivement adoptés.

Nous en venons à la discussion des autres amendements.

Ils seront appelés dans l’ordre dans lequel ils s’appliquent au texte, tel que publié dans le recueil des amendements révisé.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps d’intervention pour chaque amendement est limité à 30 secondes.

L’amendement 1 fait l’objet d’un sous-amendement de la commission.

M. ARIEV (Ukraine)* – Cet amendement vise à apporter une précision sur le manque de coopération de la Fédération de Russie avec la commission de suivi, malgré les obligations qu’elle a contractées et acceptées en devenant membre du Conseil de l’Europe.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Au paragraphe 2, la commission souhaite, par un sous-amendement, remplacer le verbe «regretter» par «déplorer».

M. ARIEV (Ukraine)* – Avis favorable.

Le sous-amendement est adopté.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – Avis favorable à une large majorité de la commission sur l’amendement sous-amendé.

L’amendement 1, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Je suis saisi de l’amendement 16.

M. KILIÇ (Turquie)* – Monsieur le Président, je retire les amendements 16, 17 et 18.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 16 est retiré.

J’ai cru comprendre que M. Ariev souhaitait retirer l’amendement 3.

M. ARIEV (Ukraine)* – Oui, Monsieur le Président. Par mesure de compromis, je retire également les amendements 4, 6 et 7.

LE PRÉSIDENT* –

Les amendements 3, 4, 6 et 7 sont retirés.

L’amendement 17 a été retiré.

Je suis saisi de l’amendement 15.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Après discussion avec nos collègues, nous proposons de recourir à un système de représentation à la proportionnelle pour la commission électorale centrale.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement fait l’objet d’un sous-amendement.

M. SOBOLEV (Ukraine)* – Ce sous-amendement vise à simplifier l’amendement avec les mots: «grâce à une représentation proportionnelle de tous les groupes politiques parlementaires au sein de la commission électorale centrale.»

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – La commission n’a pas émis d’avis sur ce sous-amendement puisqu’elle ne l’a pas examiné.

Le sous-amendement est adopté.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – Avis favorable sur l’amendement ainsi modifié.

L’amendement 15, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Je suis saisi de l’amendement 5.

M. ARIEV (Ukraine)* – Cet amendement souligne que toutes les résolutions de l’Assemblée relatives à l’agression militaire contre l’Ukraine doivent être mises en œuvre. Il renvoie également aux Accords de Minsk.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement fait l’objet d’un sous-amendement de la commission.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Le sous-amendement vise à améliorer le texte.

M. ARIEV (Ukraine)* – Je suis favorable à ce sous-amendement.

Le sous-amendement est adopté.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – Avis favorable sur l’amendement ainsi modifié.

L’amendement 5, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – L’amendement 18 a été retiré.

Je suis saisi de l’amendement 8.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – L’évaluation menée par l’Assemblée parlementaire est source d’erreurs. Le Gouvernement hongrois a toujours coopéré de manière constructive avec la Commission de Venise. Il a mené les réformes nécessaires pour tenir compte de ses recommandations.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Les rapports de la Commission de Venise et de l’Assemblée ont mis en évidence les problèmes de contrôle politique et d’affaiblissement de l’équilibre des pouvoirs en Hongrie. Je suis donc contre cet amendement.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – La commission a rejeté l’amendement à une large majorité.

L’amendement 8 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – Je suis saisi de l’amendement 9.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – Le paragraphe 10.3.3 présente une interprétation très subjective. Dans son avis, la Commission de Venise a noté que les autorités hongroises étaient tout à fait disposées à poursuivre le dialogue.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Il n’est question ici ni de subjectivité, ni d’interprétation. La forte intervention des milieux politiques sur le marché hongrois des médias est reconnue dans de nombreux rapports de l’Union européenne. Je suis contre cet amendement.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – Avis défavorable.

L’amendement 9 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT* – Je suis saisi de l’amendement 10.

M. CSENGER-ZALÁN (Hongrie)* – Par cet amendement, nous nous opposons à l’analyse proposée.

La Cour européenne des droits de l’homme, dans l’affaire Ilias et Ahmed c. Hongrie a considéré que les conditions de séjour en zone de transit étaient acceptables et n’avaient pas atteint un niveau d’usage de la force qui constituerait une violation de l’article 3.

M. PREDA (Roumanie), rapporteur – Je suis contre cet amendement dont l’argumentation, me semble-t-il, est incorrecte. Le respect des normes européennes doit pouvoir être vérifié.

M. VAREIKIS (Lituanie), vice-président de la commission* – L’avis de la commission a été défavorable à une large majorité.

L’amendement 10 n’est pas adopté.

LE PRÉSIDENT – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14450, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (52 voix pour, 3 voix contre et 6 abstentions).

M. Ariev, Vice-Président de l’Assemblée, remplace M. Jonas Gunnarsson au fauteuil présidentiel.

3. Protéger les enfants touchés par des conflits armés

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la présentation et la discussion du rapport de Mme Fataliyeva, au nom de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable, sur «Protéger les enfants touchés par des conflits armés» (Doc. 14461).

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 19h30. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 20, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et de procéder aux votes nécessaires.

Madame la rapporteure, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan), rapporteure de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Une enfance sûre et heureuse n’est malheureusement pas une réalité pour nombre d’enfants de par le monde. Et lorsque nous évoquons les conflits, nous traitons des aspects militaires, politiques mais rarement du cas des enfants touchés par ces conflits.

Un grand nombre d’enfants dans le monde vivent dans des zones de conflits, actifs ou gelés, ou dans des situations de post-conflit. Chaque État européen est concerné d’une manière ou d’une autre: partie au conflit, partenaire commercial ou fournisseur d’aide humanitaire. Les conséquences, à court et long terme, sont extrêmement préoccupantes pour ces enfants et affectent des sociétés entières.

Ce rapport a donc vocation d’attirer l’attention sur les enfants qui se trouvent dans une telle situation. Nous couvrons les situations des enfants en Syrie, au Soudan, au Yémen, mais nous recevons également des nouvelles très alarmantes du Nyanmar ou d’autres conflits qui se déroulent dans les régions du Conseil de l’Europe, telles que le Haut-Karabakh, la Transnistrie ou l’Ukraine.

Les enfants sont affectés à bien des égards par ces conflits. Leur vie même est menacée; ils ont perdu un, voire leurs deux parents, ou d’autres membres de leur famille; ils manquent de soins élémentaires, de soins de santé, d’éducation, de bonnes conditions de vie, d’’eau et de nourriture. Ils sont les témoins de la mort et de la violence, d’événements profondément traumatisants qui leur laisseront un sentiment de peur toute leur vie; parfois, ils sont même recrutés comme combattants, comme enfants soldats.

Je vous donnerai un certain nombre de chiffres.

Plus de 250 000 personnes sont mortes depuis le début de la guerre en Syrie, dont des milliers d’enfants. Au Yémen, ce sont près de 4 000 civils qui sont morts du fait du conflit, dont 1 332 enfants. 460 000 enfants sont confrontés à une malnutrition sévère, tandis que 3,3 millions d’enfants et de femmes enceintes, ou allaitantes, souffrent de malnutrition.

Jusqu’à 80 % des victimes de violences sexuelles au cours des conflits sont des enfants, et surtout des filles. Deux millions d’enfants ne sont pas scolarisés. Au Soudan du Sud, plus de 20 000 enfants ont été recrutés par les forces armées et plus de 10 000 sont « non accompagnés ».

En 2017, plus de 600 000 familles rohingyas, comprenant de nombreux enfants, ont dû s’enfuir vers le Bengladesh. Dans l’est de l’Ukraine, plus de 1,5 million de personnes ont été déplacés dont un tiers d’enfants. La vie de plus de 580 000 enfants est directement affectée et plus de 200 000 enfants vivent seuls le long de la ligne de contact et ont besoin d’un soutien psychologique.

Ces chiffres sont effroyables. Un grand nombre de femmes et d’enfants arrivent en Europe et nous devons veiller à distinguer leurs besoins. Certains enfants souffrent de la perte des membres de leur famille ou ont peur de les perdre. Cet état psychologique est souvent négligé face à des défis plus immédiats.

De nouveaux défis se posent en termes de protection de l’enfance, les stratégies de guerre modernes ayant changé. Dans les conflits récents, les infrastructures éducatives et hospitalières sont directement ciblées, ce qui sape le fondement de la société. Les enfants sont contraints de prendre part au conflit, de tuer, d’agir comme des kamikazes ou de commettre d’autres violences. Ils sont contraints d’agir comme des soldats, motivés par la peur et le désespoir. Des abus sexuels sont commis ainsi que d’autres types d’exploitation par les forces armées.

Ces conflits ont d’autres conséquences: ils mettent en danger la possibilité d’une société stable, et mettent en péril les chances pour les enfants de se développer normalement. Ils sont enfermés dans un paradigme de violence, de peur, de colère et ne peuvent plus vivre une vie normale. Ils deviennent agressifs et dangereux pour eux-mêmes et la société.

Les conflits armés ont de graves conséquences, notamment parce qu’une grande partie des budgets publics sont consacrés aux armements. Dans les conflits armés, les enfants devraient jouir d’une protection spéciale, selon la Convention de Genève. Mais les violations de ce droit, en dépit des mandats de protection et des cadres juridiques protégeant les enfants, sont nombreuses. Les enfants sont aujourd’hui plus vulnérables qu’il y a dix ans, en proie à la violence extrême et aux violations du droit international.

Notre objectif est de soutenir ces enfants par tous les moyens possibles, d’améliorer leurs conditions de vie et leur protection, de les aider à se réinsérer dans la société, qu’il s’agisse d’enfants soldats ou de réfugiés arrivant sur le territoire européen. Nous suggérons d’investir dans la prévention des conflits, de favoriser l’intégration des enfants et d’intervenir activement pour mettre fin aux conflits en cours. Les pays non directement affectés en viennent aussi à négliger leurs obligations.

Les enfants qui ont subi des conflits armés traumatisants doivent bénéficier d’une éducation spécialisée, pour éviter la transmission transgénérationnelle de la violence. Les procédures de soutien psychologique des enfants doivent être renforcées, dans les zones de conflits et les pays d’accueil. Les enfants soldats doivent être réinsérés, grâce à des programmes particuliers. Les enfants et les familles qui quittent les zones de conflit doivent être accueillis. Les enfants sont les plus vulnérables.

Si nous ne souhaitons pas créer une génération perdue, nous devons, en tant que parlementaires, non pas seulement exprimer notre compassion, mais aussi nous pencher sur leur sort. Même si ces faits semblent se dérouler dans des pays lointains, nous sommes tous responsables de l’avenir de tous ces enfants.

LE PRÉSIDENT* – Madame la rapporteure, il vous restera 5 minutes 30 pour répondre tout à l’heure aux orateurs.

Nous commençons la discussion générale par les porte-paroles des groupes.

M. KÜRKÇÜ (Turquie), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne* – Ce rapport aborde un des défis des plus importants de notre époque. La situation des enfants dans les zones de conflit en 2016 s’est avérée catastrophique. D’après le rapport du Secrétaire Général des Nations Unies, en 2016, plus de 8 000 enfants ont été tués ou blessés à travers le monde, dont 3 512 en Afghanistan. Le nombre d’enfants recrutés a doublé en Somalie, passant à 1 915, et à 1 012 au Sud Soudan. Plus de 1 340 enfants ont été tués ou blessés au Yémen, la moitié par des attaques aériennes, et plus de 2 000 sont morts en Syrie et en Irak. Depuis, la situation ne s’est pas améliorée, aucun de ces conflits ne s’est arrêté. Tous ces chiffres n’incluent pas les blessés dans les États membres du Conseil de l’Europe.

Sachez que, selon la Résolution 2121 (2016) de l’Assemblée parlementaire, en Turquie, entre août 2015 et juin 2016, 1,6 million de personnes ont été affectées par les opérations de sécurité, d’une manière ou d’une autre. 355 000 personnes ont été déplacées et n’ont pas accès à l’eau, ni à l’électricité ni aux soins de santé. 70 % d’entre eux étaient des mineurs. Nous comprenons donc l’ampleur des problèmes mentionnés dans le rapport. Des millions d’enfants syriens ont terminé dans les rues des villes de Turquie, des enfants que l’on fait travailler douze heures par jour dans des ateliers de textile, des jeunes filles exposées au harcèlement et à l’exploitation sexuelle, des milliers d’enfants qui ne sont pas scolarisés, qui n’ont pas accès aux soins, qui sont sans abri, qui grandissent sans aucun espoir, dans un environnement qui leur est hostile. Voilà autant de préoccupations pour le Conseil de l’Europe. J’espère que ce rapport ouvrira les yeux des dirigeants des États membres. À moins que des efforts considérables ne soient déployés immédiatement, l’Europe et l’hémisphère Nord se transformeront en objets de haine pour ces générations probablement perdues.

M. AKTAY (Turquie), porte-parole du Groupe des démocrates libres* – Ce rapport est excellent. Mais en écoutant l’orateur précédent, j’avais l’impression de vivre dans une Turquie différente. Tant de contre vérités! La Turquie n’est pas ainsi! La Turquie offre de nombreux services, notamment aux enfants victimes de guerre.

Les enfants sont les principales victimes des guerres. Hélas, en cas de conflit, il est difficile de mettre les enfants à l’abri du danger. Beaucoup d’enfants sont victimes, ou simplement souffrent, car leurs besoins essentiels ne sont pas couverts dans les zones de combat. Malgré tout, je rappelle que la Turquie accueille plus de 3,5 millions de réfugiés, dont la moitié sont des enfants.

En deux ans, en 2014 et 2015, le PKK a recruté et armé plus de 2 000 enfants, utilisés comme chair à canon ou bouclier humain dans ses activités terroristes sur le territoire turc. Une partie a ensuite été transférée en Syrie, pour combattre dans les milices kurdes du pays. Les enfants sont exploités par le PKK et les milices kurdes en Syrie. C’est prouvé! Le PKK fait ici beaucoup de propagande, et se présente comme une victime innocente, représentant la voix des Kurdes. Cela est faux, les crimes contre les enfants sont nombreux, violant toutes les normes internationales. Malgré cela, sous prétexte qu’en Syrie, il a pris le nom de PYD ou de YPG, on dit que le PKK est un combattant contre l’État islamique ou d’autres organisations terroristes. Ce n’est pas exact.

M. REISS (France), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen – En décembre dernier, dans le cadre de l’exposition «Déflagration», la médiathèque André Malraux de Strasbourg présentait 150 dessins d’enfants sur la guerre de 1914 à nos jours. Ces dessins bouleversants montraient à eux seuls combien la résolution que nous discutons est essentielle pour l’avenir de nos sociétés et de nos démocraties. En tant qu’Alsacien, je me souviens des récits de mes parents, enfants pendant la Seconde Guerre mondiale, sur leur quotidien. Une enfance marquée par les bombardements et la peur; une enfance où l’on jouait dans des caves et des abris en attendant la fin de l’alerte.

Aujourd’hui encore, dans bien des pays, des enfants sont victimes et parfois directement impliqués dans des conflits décidés par les adultes. Dans le conflit syrien, notamment, les enfants ont été particulièrement touchés. Face à l’horreur et à un avenir incertain, des parents choisissent d’envoyer leurs enfants, seuls, vers un monde qu’ils supposent meilleur, ou du moins en paix.

Nous avons beaucoup évoqué dans cet hémicycle la difficile question des enfants migrants isolés, parcourant les routes des Balkans dans le flux des réfugiés. Nous savons que des milliers d’entre eux ont malheureusement disparu, morts dans les bateaux cercueils ou proies faciles pour des trafics humains. Nos pays sont de plus en plus confrontés à ce phénomène de mineurs isolés, conséquence des conflits armés aux portes de l’Europe. Madame la rapporteure, vous soulignez à juste titre la nécessité d’une prise en charge spécifique, y compris psychologique, de ces enfants qui ont vécu des traumatismes violents – en particulier ceux qui viennent des zones contrôlées par l’État islamique. Ce sont de nouveaux défis pour nos démocraties de pouvoir gérer le plus humainement possible ce flux d’enfants et d’adolescents isolés.

La question des enfants déplacés est aussi fondamentale. Le conflit du Donbass a déjà déplacé beaucoup de personnes et nous savons combien ces exodes peuvent être douloureux à vivre pour les enfants. Mais dans notre grande Europe, il y a encore trop de personnes déplacées à la suite d’anciens conflits, ces conflits dits gelés. Certains enfants naissent dans un climat de haine lié à ces situations insupportables qui perdurent. Bien entendu, il faut éduquer au vivre-ensemble: en tant qu’Alsacien, je sais que la réconciliation est toujours possible.

Notre Assemblée, en attribuant le prix du Musée de l’Europe au musée de Sarajevo sur l’enfance dans la guerre, a fait un choix extrêmement symbolique quand on connaît l’histoire tragique de cette ville assiégée pendant la guerre de Yougoslavie. Ce petit musée, par les témoignages d’enfants et des objets personnels, entend nous faire réfléchir sur les conséquences des conflits armés pour les enfants. Car ce sont nous, les adultes, qui déclenchons les guerres, oubliant parfois qu’à chaque conflit, c’est l’insouciance d’un enfant qu’on assassine.

Le Groupe du Parti populaire européen soutient sans réserve ce rapport.

Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Au nom de mon groupe, je tiens à remercier Mme Fataliyeva pour ce rapport très équilibré.

Comme le rapport l’indique très clairement, dans tout conflit armé, ce sont toujours les enfants qui paient le plus lourd tribut pour les actions des adultes – et pas seulement dans des lieux éloignés, car cette vérité s’observe aussi sur notre continent.

La question qui se pose est la suivante: respectons-nous nos obligations internationales envers les enfants traumatisés par la guerre? Non, bien au contraire! Mme Fataliyeva a bien souligné le fossé immense entre les obligations et leur mise en œuvre effective. Pour tenter de combler ce fossé, elle a proposé un certain nombre de mesures visant à prévenir ou mettre un terme aux conflits, à soutenir les organisations qui œuvrent sur le terrain, à donner aux enfants traumatisés et aux enfants soldats un abri, une éducation, des soins de santé et la possibilité d’une réinsertion. Tous les États membres doivent prendre ces mesures et, en tant que parlementaires, nous sommes tous responsables du suivi de ces mesures dans nos pays respectifs.

Je voudrais appeler votre attention sur les enfants les plus vulnérables de tous: les enfants handicapés, que leur handicap soit congénital ou qu’il résulte des conflits armés. Certains de ces enfants fuient la guerre avec leur famille, mais beaucoup sont entièrement livrés à eux-mêmes. Dans le cadre de la présidence danoise, un de nos objectifs essentiels est de sensibiliser à la situation des handicapés. Tous les États membres du Conseil de l’Europe devraient mettre en place ou renforcer les mesures de réinstallation déployées dans le cadre du programme du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, en se penchant tout particulièrement sur les besoins des enfants handicapés.

Aujourd’hui, ces enfants sont pratiquement invisibles, négligés; on considère qu’ils coûtent trop cher. C’est une honte pour nous tous. Imaginez ce que c’est que de fuir des bombes dans un fauteuil roulant! de marcher avec des béquilles dans la jungle! d’être aveugle au milieu de la Méditerranée! Imaginez ce que c’est d’être une jeune fille de 16 ans, aveugle et seule dans un camp de réfugiés, d’être violée et, à seulement 17 ans, d’être devenue une mère célibataire… Ce sont là des histoires réelles.

Les chiffres du Haut-Commissariat indiquent qu’il y a 9 millions de réfugiés handicapés de par le monde; parmi eux, beaucoup sont des enfants. Des soins de santé adéquats auraient pu réduire ces chiffres de moitié, mais les enfants réfugiés handicapés sont les derniers sur la liste des bénéficiaires d’aide, de soins de santé, d’éducation, de protection. Ils ne figurent même pas sur la liste des réfugiés autorisés à se réinstaller dans un pays tiers!

Tous nos pays membres ont ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, qui instaure l’obligation de protéger les personnes handicapées dans les conflits armés. Nous disposons de notre propre stratégie pour les droits de l’enfant, elle nous appelle à protéger les enfants dans les conflits armés. Alors, mes chers collègues, je vous le demande: pourquoi n’agissons nous pas?

Mme TOPCU (Turquie), porte-parole du Groupe des conservateurs européens* – J’aimerais tout d’abord remercier Mme Fataliyeva d’avoir travaillé sur un sujet aussi important. Ce siècle nous fait les témoins de guerres, de violences, d’actes de terreur qui se multiplient partout dans le monde. Les enfants se retrouvent en plein cœur des conflits et deviennent les victimes de guerres menées pour des raisons politiques ou poursuivant des visées hégémoniques. Depuis 25 ans, dans une trentaine de zones de conflits en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie et en Extrême-Orient, près de 10 millions d’enfants ont été tués, et 300 000 autres forcés de porter les armes. Nous sommes les témoins de cette honteuse situation.

La guerre en Syrie dure depuis 2011: malgré des ressources limitées, la Turquie a essayé de faire face à l’un des afflux de réfugiés les plus importants de son histoire. D’après l’Unicef, plus de 3,5 millions de réfugiés ont été accueillis sur le territoire turc; la moitié sont mineurs. Mais, pour la première fois en Turquie depuis le début de la crise syrienne, il y a plus d’enfants scolarisés que d’enfants non scolarisés. C’est une réussite majeure pour mon pays.

Cependant, nos ressources sont limitées, et cette génération d’enfants, qui sera amenée à reconstruire son pays un jour, risque fort de faire les frais de cette crise. En Syrie, 7,5 millions d’enfants n’ont jamais connu que la guerre; près de 2,4 millions de mineurs syriens répartis dans le monde ont dû, bien avant l’âge, faire face aux difficultés de la vie.

Ce rapport est un bon moyen d’appeler l’attention sur une situation plus qu’alarmante et, en tant que membres de l’Assemblée parlementaire, nous devrions tous faire l’impossible pour répondre à cette tragédie humanitaire.

M. WASERMAN (France), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Au nom du Groupe ADLE, je salue le rapport de notre collègue Fataliyeva, que nous soutiendrons sans réserve. Il traite avec justesse du sujet très sensible des victimes civiles lors des conflits armés, en particulier des enfants. Je dis bien «avec justesse», car il démontre que ce sujet est d’une triste actualité. Les manquements envers les enfants, plus fréquents qu’il y a dix ans, sont en partie dus à la complexification des conflits, notamment à la mise en œuvre de tactiques qui gomment la distinction entre combattants et non-combattants en dissimulant des combattants au sein des populations civiles, en violation complète des conventions de Genève.

En dépit de cette complexité – qu’il faut conserver à l’esprit –, il nous incombe à nous, parlementaires issus des États membres du Conseil de l’Europe, d’appeler l’attention de nos gouvernements, et plus généralement de la communauté internationale, sur ce sujet. Comme le rappelle à plusieurs reprises notre collègue dans son excellent rapport, nous sommes tous concernés, à des degrés divers, par un conflit en cours dans le monde. Il nous incombe donc d’agir afin que la communauté internationale assume pleinement son devoir de protection des enfants.

Cette responsabilité est d’autant plus importante qu’il existe, par-delà les traumatismes multiples qui touchent les enfants, un risque majeur: celui d’en faire une génération perdue ayant grandi dans l’idée que la violence est un moyen acceptable de régler les conflits et portant en elle les germes des guerres de demain. Plus encore que tout autre victime, ces enfants ont besoin de nous.

Les membres du groupe ADLE soutiennent pleinement le rapport. Nous appelons également à la mise en œuvre de mesures concrètes centrées sur la prévention des conflits ainsi que sur la protection et la reconstruction de l’enfant tenant compte des échelles d’action possibles. À ce titre, je salue tout particulièrement l’action des organisations internationales et des organisations non gouvernementales sur le terrain, qui contribuent pour une bonne part, dans des conditions souvent très difficiles, à relever ce défi. Nous pouvons les en remercier au nom de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

M. Vusal HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Je remercie Mme la rapporteure de la qualité de son travail. Lors d’un conflit armé, les enfants sont en effet les plus vulnérables. Pour autant, ils ne sont pas épargnés; au contraire, ils sont tués et abusés sexuellement. Je souscris aux propositions de notre rapporteur visant à éviter que les enfants ne soient recrutés par les belligérants. Plusieurs dispositions internationales sont déjà applicables. Il faut les renforcer. Surtout, il faut éviter que ne persistent des zones de non-droit. Je me félicite de la démarche de Mme la rapporteure, selon laquelle il faut absolument faire taire les armes afin que la situation s’améliore.

Il convient néanmoins de distinguer combattants et civils. Que les combattants fassent la guerre est une chose. De plus en plus, cependant, les civils sont directement visés. Si le rapport mentionne cet état de fait, il n’insiste pas assez dessus. L’été dernier, des civils azéris ont été tués, notamment une enfant de moins de deux ans et sa grand-mère, en dépit de tous les engagements internationaux souscrits par l’Arménie. Aucune enquête n’a été menée. Les auteurs de ce crime n’ont pas été poursuivis. Pourtant, nos dirigeants devraient faire le nécessaire compte tenu des engagements pris. Nous devrions joindre le geste à la parole – à nos écrits, en l’espèce.

Le Président arménien lui-même, M. Sargsyan, que nous avons reçu hier, a affirmé avoir pris part au meurtre de civils à Khojaly, ville occupée d’Azerbaïdjan. Les massacres qui y ont été perpétrés sont de plus en plus considérés comme de véritables génocides dans les enceintes internationales. Nous débattons aujourd’hui des moyens d’améliorer la situation dans les zones de conflit. Soyons sérieux: si nous ne réagissons pas à des faits tels que les massacres de Khojaly, nous perdons toute crédibilité et toute objectivité. Il faut désigner les criminels et les citer nommément, qui qu’ils soient. Ne l’oubliez pas lorsque vous voterez, chers collègues!

M. COAKER (Royaume-Uni)* – Je tiens d’abord à féliciter Mme la rapporteure de son remarquable rapport. Je prends la parole pour la première fois au sein de cette Assemblée, non seulement en tant que parlementaire mais aussi en tant que père et grand-père. La plupart d’entre vous sont ou seront père ou mère ainsi que grand-père ou grand-mère. Tâchons d’imaginer notre réaction si notre fils ou notre fille était entraîné dans les horreurs de la guerre, comme le sont des millions d’enfants mutilés ou tués lors de conflits. C’est pourquoi ce débat est si important. Il fait office de cri de ralliement destiné à nous inciter tous à agir davantage.

Les photos et les reportages montrant des enfants mutilés ou tués dans des conflits, quels que soient les torts des uns et des autres, nous émeuvent aux larmes, comme l’a montré la photo déchirante d’Aylan Kurdi, enfant d’à peine trois ans, gisant dans les bras d’un secouriste turc après s’être échoué, mort, sur une plage. Des millions d’enfants innocents, comme l’était le petit Aylan, sont pris au piège des conflits armés.

Cet important projet de résolution doit donc véritablement nous inciter à ne pas nous contenter d’être horrifiés, bouleversés, tristes ou en colère, mais à agir en soutenant les droits des enfants, en exigeant que les règles et les obligations internationales soient dûment respectées et en aidant les enfants qui fuient la guerre. J’ai lu dans le rapport que les enfants ayant eux-mêmes vécu la guerre et les conflits armés devraient, dans la mesure du possible, être impliqués à toute action permettant d’édifier la paix. Cette proposition m’a inspiré. De fait, ces enfants, compte tenu des histoires terribles qu’ils peuvent raconter, pourraient aider à mettre un terme aux conflits en faisant honte aux belligérants et en les incitant à agir, dussent-ils consentir à des compromis, afin de rétablir la paix et de restaurer l’espoir.

Néophyte ici, je me suis entendu dire à mon arrivée qu’il ne s’agit que d’un énième lieu de palabres. Je ne souscris pas à ce jugement. Des gens de nationalités et de convictions différentes s’y réunissent pour relever de redoutables défis. Cette Assemblée doit être le porte-parole de ceux qui n’ont pas voix au chapitre, en particulier les enfants prisonniers des conflits armés, qui ne peuvent s’exprimer par eux-mêmes. Cette Assemblée doit être la conscience de l’Europe et nous exhorter tous à agir davantage afin de protéger les enfants de notre continent, quelles que soient les éventuelles difficultés.

LE PRÉSIDENT* – M. Farmanyan et M. Adam, inscrits dans le débat, sont absents de l’hémicycle.

M. BILDARRATZ (Espagne)* – Madame Fataliyeva, au cours de cette partie de session, nous nous sommes demandé à maintes reprises quelle était la raison d’être du Conseil de l’Europe. À l’instant, notre nouveau collègue a indiqué que, dans certains lieux, on le considère comme une sorte de club ou de lieu de palabres. Mais s’il est un thème susceptible de donner du sens au Conseil de l’Europe, c’est bien celui que vous nous présentez aujourd’hui, qui a à voir avec le non-respect de la loi. Nous voulons faire en sorte que l’opinion publique prenne conscience de la situation. Les guerres sont faites par les adultes et, dans une très large mesure, ce sont les enfants qui en souffrent.

S’agissant du conflit israélo-palestinien, que nous évoquions ce matin, à l’été 2014, sur les quelque 2 300 morts, 550 étaient des enfants. Au cours de la Première Guerre mondiale, 5 % des victimes étaient de civils; pendant la Seconde Guerre mondiale, ils en représentaient 48 %. Aujourd’hui, 90 % des victimes de guerre sont des civils, dont un grand nombre d’enfants.

Au moment où nous essayons de façonner notre avenir, des centaines de milliers d’enfants de par le monde meurent, sont blessés et se préparent un avenir de haine. Au lieu d’utiliser des livres et de manipuler des outils scolaires, ils portent des mitraillettes, comme en Syrie, en Irak et au Yémen. Quel avenir se préparent ces pays avec des enfants vivant dans cet état? Au-delà des atteintes physiques, ils sont victimes de blessures internes. En plus de côtoyer la mort, ils connaissent la disparition de leurs pères et de leurs mères, l’anéantissement de tout espoir, la perte de tout avenir et de toute structure. Ajoutons que 80 % des victimes de violences sexuelles dans les conflits sont des enfants, en particulier des filles. Destruction d’infrastructures, d’écoles, d’hôpitaux: il n’y a plus que de la douleur.

Dans ces conditions, l’action du Conseil de l’Europe prend tout son sens, car il lui revient de faire comprendre ce qui se passe à la société. Tant qu’il y aura un seul cas de cette nature, nous devrons continuer à œuvrer pour le respect du droit et, le cas échéant, pour faire adopter de nouvelles lois.

Mme LOUHELAINEN (Finlande)* – Nous célébrons cette année le centenaire de la guerre civile finlandaise. Il est toujours terrifiant de voir les habitants d’un pays se battre les uns contre les autres. Le souvenir de la guerre reste un vif sujet d’émotion dans mon pays. Des milliers d’enfants étaient des soldats et nombre d’entre eux ont perdu leurs parents. Par ailleurs, la guerre de Continuation entre la Finlande et l’Union soviétique ne s’est terminée qu’en 1944.

Dans ma famille, nous avons le triste exemple d’une jeune fille qui, violée par un soldat, avait donné naissance à une petite fille dont la vie s’est terminée à l’adolescence après qu’elle a appris ce qui s’était passé. Je raconte cette histoire car si beaucoup d’entre nous vivent aujourd’hui dans des pays sûrs, ceux-ci ont néanmoins une mémoire douloureuse. Il ne faut pas oublier si nous voulons construire un monde meilleur pour nos enfants.

Le rapport invite les États à faire en sorte que les enfants vivant au milieu des conflits ne soient pas, de surcroît, victimes de trafiquants. La Finlande a déjà pris des mesures de prévention en ce sens. La traite d’êtres humains est lourdement sanctionnée par le droit pénal finlandais. Les autorités publiques ont créé des outils d’identification et d’assistance aux victimes. Cette semaine, le ministère des Affaires sociales a publié à l’attention des professionnels de santé des lignes directrices pour les aider à reconnaître plus facilement les victimes de traite et à leur trouver des solutions. En Finlande, en effet, nous avons vu apparaître des cas de traite d’êtres humains, d’exploitation sexuelle et de mariages forcés. Nous avons également mis en place un service d’aide aux victimes, à leurs familles et aux témoins de ces crimes, service qui vient aussi en aide aux enfants de migrants issus de zones de conflit.

Le respect du droit des enfants et des filles est une des priorités du gouvernement. Nous adhérons aux objectifs de l’agenda 2030 des Nations Unies visant à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes partout dans le monde, à permettre un développement durable et à lutter contre les discriminations, les mariages forcés et les mutilations génitales. Comme il est indiqué dans le rapport, les enfants sont diversement affectés par les conflits, chacun a vécu une expérience différente, mais aucun ne devrait connaître les horreurs de la guerre ou des attentats terroristes.

M. GRIN (Suisse) – Tout conflit armé est un conflit de trop et ce sont les populations civiles, en particulier les enfants qui en subissent les plus graves conséquences.

En Europe et dans le monde des enfants sont victimes des guerres et des conflits armés. Ils subissent directement des violences qui mettent leur vie en danger ou sont les témoins de telles violences. Ils perdent leurs parents et sont livrés à eux-mêmes dans un environnement hostile et dangereux.

Dans certains pays, comme le relève l’excellent rapport de Mme Fataliyeva, que je remercie et félicite pour son travail, ils sont recrutés comme enfants soldats et contraints de prendre part aux hostilités. Cela est inadmissible.

Le droit international est très clair, en particulier les engagements de Paris adoptés en février 2007 en matière de protection des enfants. De ce fait, les États parties doivent prendre toutes les mesures pratiques possibles afin que les enfants touchés par un conflit armé bénéficient d’une protection et de soins.

Il est de notre devoir de rappeler à tous les États que le respect de ces règles est impératif pour protéger les enfants qui sont les plus vulnérables aux conflits armés.

Compte tenu de tous les traumatismes endurés, nous devons aussi leur offrir un soutien pour leur réadaptation et leur réinsertion dans la société civile de leur pays ou de celui qui les a accueillis.

Notre Assemblée parlementaire est très préoccupée par les conséquences à court et à long terme de ces conflits armés qui touchent les enfants.

Les conclusions du rapport et le projet de résolution vont dans le sens de mes propos.

Mais il ne faut pas oublier qu’un autre moyen est l’investissement dans la prévention des conflits, afin d’éviter de devoir réparer tous ces traumatismes subis par les enfants durant les guerres. Car tous ces traumatismes seront pour certains enfants à jamais irréparables.

Nous devons donc aussi soutenir, voire favoriser, une volonté politique recherchant par la conciliation, le règlement de tout différend entre des pays belligérants avant qu’il ne débouche sur un conflit armé.

La diplomatie internationale entre pays et au sein d’organisations comme le Conseil de l’Europe et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe doit jouer un rôle décisif dans cette prévention.

L’adage selon lequel «mieux vaut prévenir que guérir» se doit d’être la meilleure protection pour les enfants. Cela afin que l’on puisse très souvent dire, comme le fait si bien dans sa chanson Yves Duteil: «Prendre un enfant par la main pour le conduire vers demain». Car c’est son avenir qui est en jeu. Je vous demande de soutenir le rapport et ses amendements.

LE PRÉSIDENT* – Mme Alqawasmi et M. Khader, inscrits dans le débat, ne sont pas présents dans l’hémicycle.

Nous avançons plus vite que prévu!

M. RZAYEV (Azerbaïdjan)* – Permettez-moi avant tout de féliciter Mme la rapporteure pour le travail extrêmement approfondi qu’elle a réalisé. L’élaboration d’un tel rapport a dû demander beaucoup d’efforts. Je le soutiens entièrement et invite mes collègues à faire de même, car ce rapport concerne l’avenir de notre planète, l’avenir de nos enfants qui devront conduire les affaires de la planète pour que, espérons-le, nous n’ayons plus jamais à faire face aux guerres ou aux conflits que nous connaissons aujourd’hui.

On ne saurait ignorer les guerres, les violences et les problèmes qui persistent en Syrie, en Irak ou en Afghanistan. Mais il s’agit avant tout de protéger les enfants, car ceux-ci ne peuvent se protéger eux-mêmes, ils sont bien trop faibles pour cela. Il convient donc d’accorder toute l’attention nécessaire à cette question, car ces enfants sont notre avenir et, de l’attitude que nous aurons à leur égard dépend notre avenir à tous. Dans ce rapport, il est exposé que nous consacrons fort peu d’attention aux enfants pris dans des conflits et que si nous continuons de la sorte, les problèmes ne feront que se perpétuer.

C’est la raison pour laquelle nous devons dès à présent leur accorder, au contraire, toute l’attention nécessaire. J’aimerais à ce propos m’adresser à la rapporteure pour lui demander d’ajouter quelque chose dans ce rapport. En effet, sur la ligne de contact entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, des enfants meurent en raison de l’occupation qui se poursuit. Plus de 700 civils ont disparu, dont 92 enfants mineurs. Si je demande cela à la rapporteure, c’est que le pays occupant, l’Arménie, est membre de l’Assemblée parlementaire et le pays occupé, l’Azerbaïdjan, l’est également. Il convient, par conséquent, de résoudre ce problème en notre sein, afin que nous puissions montrer que, dans cette maison, nous pouvons surmonter les problèmes et les conflits pour l’avenir de nos enfants, pour que plus personne n’ait à en souffrir, et surtout pas les femmes et les enfants. Il est donc indispensable d’inclure la question qui touche nos deux États dans le rapport qui nous est présenté aujourd’hui.

Baroness MASSEY (Royaume-Uni)* – Je remercie notre rapporteure pour son rapport passionnant et incisif. J’ai suivi sa genèse en tant membre de la commission des questions sociales, dont je préside à présent la sous-commission sur l’enfance.

Les enfants mineurs ont des droits, notamment celui d’être protégé en vertu de la Convention de l’Onu relative aux droits de l’enfant. Ils ont, par exemple, droit à la sécurité, à une vie de famille et à l’éducation. Les enfants qui sont pris dans des conflits ou qui les fuient ne peuvent jouir de ces droits. Nous avons tous vu ces images horribles d’enfants miséreux, mal vêtus, affamés, terrifiés et seuls. Dans les conflits armés, les enfants n’ont ni sécurité physique ni sécurité psychologique et beaucoup d’entre deviendront des réfugiés. C’est un problème très grave.

En novembre dernier, nous avons fêté le 28e anniversaire de la Convention de l’Onu sur les droits de l’enfant. Ce fut l’occasion de rappeler le sort pitoyable de trop nombreux enfants. Toutes les 20 minutes, des personnes sont contraintes de quitter leur foyer en raison de violences, de persécutions ou de conflits. Les enfants représentent 31 % de la population mondiale mais, en 2016, plus de la moitié des réfugiés étaient des enfants. Ces enfants réfugiés, nous le savons, risquent d’être les victimes de passeurs, de pédophiles et risquent, en tout cas, de se retrouver seuls.

Nous investissons beaucoup dans la prévention des conflits et la prévention de la participation des enfants aux conflits. Partout, nous devons parvenir à la résolution pacifique des conflits, aider la réhabilitation des enfants et des jeunes traumatisés par les violences et favoriser leur éducation. Il faut protéger davantage ces enfants qui ont été entraînés dans les guerres, car ils sont aussi privés de modèle pour leur vie future. Ils connaîtront durant longtemps des troubles psychologiques et physiques. Ils doivent être pris en charge avec respect. Hélas, trop peu d’entre eux jouiront de services de réhabilitation! Aujourd’hui, on essaie de faire participer les enfants à la résolution des conflits, mais c’est encore souvent insuffisant. Il faut leur donner la possibilité d’exprimer ce qu’ils ont vécu dans le cadre de programmes de réhabilitation mais, trop souvent, ils se retrouvent livrés à eux-mêmes.

C’est un crime contre l’humanité dont nous paierons le prix encore longtemps au sein de nos sociétés. Je remercie, en tout cas, la rapporteure d’avoir su si bien exprimer ce qu’il fallait dire.

Mme GAFAROVA (Azerbaïdjan)* – J’aimerais tout d’abord féliciter Mme Fataliyeva de cet excellent rapport qui tombe à point nommé. Nous savons que, ces dernières années, les conflits armés ont coûté de nombreuses vies et l’impact négatif qu’ils ont sur les enfants n’est pas assez souvent mis en exergue.

Les enfants souffrent des conséquences directes et indirectes des conflits. Ils subissent des préjudices économiques et sociaux ainsi que des violences sous différentes formes, dont le déplacement. Ces dernières années, nous avons débattu dans cet hémicycle sur les questions des migrants, des réfugiés, des enfants non accompagnés. Aujourd’hui, alors que nous abordons ce nouveau thème, je pense à mon pays qui est touché par un conflit armé depuis 1992. Du fait de l’agression de l’Arménie, 20 % de notre territoire ont été occupés, une véritable guerre s’est déroulée, un grand nombre de personnes ont été déplacées et des milliers de personnes ont été tuées.

Le nombre des réfugiés et des personnes déplacées en Azerbaïdjan s’élève à 1 million, dont de nombreux enfants. Dans la discussion sur cette question, j’aimerais dire que, s’agissant de ces enfants du Haut-Karabakh, nous sommes face à des défis à long terme pour ce qui est de leur réhabilitation, de leur réintégration dans la société et de leur protection. Après autant d’années, tous ne se sont pas réintégrés dans la société. Ils vivent toujours des vies de réfugiés dans leur propre pays et cela se poursuivra tant que leur droit de rentrer chez eux pour mener une vie dans la dignité n’aura pas été garanti.

Garantir la protection des enfants en période de guerre est difficile. De nombreux enfants en milieu rural vivent en zone de conflit en Azerbaïdjan, et continuent donc d’être les victimes d’agressions. Ces enfants risquent leur vie chaque fois qu’ils se rendent à l’école ou qu’ils sortent jouer. Du fait du conflit dans le Haut-Karabakh, 193 enfants azéris ont été tués par les Arméniens, 61 enfants sont portés disparus et 27 sont en captivité. En dépit du cessez-le-feu annoncé en 1994, 32 enfants ont été les victimes de la terreur arménienne, 13 ont été tués et 19 blessés. Fariz Badalov a été tué alors qu’il jouait avec ses amis dans sa cour. En juillet 2011, Aygun Shahmaliyeva a été tuée et Elshan, 5 ans, a été blessé. L’an dernier, une petite fille de deux ans, Zahra Guliyeva, a été tuée par un tueur embusqué arménien; elle est devenue le symbole de tous les enfants victimes de ce conflit. Tous ces exemples démontrent que l’Arménie fait fi des décisions de la communauté internationale et continue à tuer et à blesser les enfants de manière brutale.

M. Rafael HUSEYNOV (Azerbaïdjan)* – Notre génération pendant sa jeunesse n’a connu la guerre qu’au cinéma. La Seconde Guerre mondiale était lointaine, nous avions oublié les souffrances endurées. La guerre était devenue un jeu d’enfant.

Malheureusement, pour certains jeunes enfants en Europe et dans le monde, la guerre a une autre signification. Dans les zones de conflit, les enfants ont vécu les horreurs de ces confrontations sanglantes. Ils ont entendu le son du canon. Ils ont vu les ruines. Leur vie a été détruite. Personne ne pourra les débarrasser des traumatismes subis.

La guerre ôte aux enfants leur innocence, leur joie, leur confiance et leur vole leur enfance. Or, de nombreux enfants sont victimes de guerres et de conflits armés. Nous devrions non seulement tenter d’atténuer les effets de la guerre mais surtout d’éliminer la guerre.

Au moment où nous parlons, des missiles arméniens s’abattent sur l’Azerbaïdjan, effrayant et blessant de jeunes enfants azéris en plein sommeil. Je voudrais évoquer le cas de cette petite fille, Zahra, née comme tout un chacun pour le bonheur. En juillet 2017, cette enfant de 14 mois et sa grand-mère ont été tuées par des soldats arméniens dans la région de Fuzuli. Voici l’image de cette enfant. Si chacun gardait à l’esprit une image de ce type, celle d’un ange assassiné, il n’y aurait plus de guerre. Pourquoi ne le faisons-nous pas?

LE PRÉSIDENT* – Je rappelle que le Règlement interdit de montrer des photographies dans l’hémicycle pendant un débat.

Mme ZOHRABYAN (Arménie) – Chers collègues, le problème de la protection des enfants des conflits armés est vraiment un problème sensible.

Aujourd’hui, nous disposons de statistiques effrayantes concernant le nombre des enfants tués, torturés, victimes de toutes sortes de violences en Syrie, au Yémen, au Myanmar. Les chiffres concernant le nombre des enfants victimes de Daech sont aussi atroces.

Les enfants sont victimes de violences non seulement dans les points chauds du monde, mais aussi dans le territoire des États qui sont en guerre froide. Le rapport évoque le conflit du Haut-Karabakh: oui, des enfants, des femmes, des personnes âgées continuent d’être victimes de ce conflit.

Aucune personne sensée ne ferait de distinction entre la nationalité des enfants victimes de conflit, qu’ils soient syriens, yéménites, arméniens ou azéris. Mais quand l’Azerbaïdjan a déclenché la guerre de quatre jours d’avril 2016 en ciblant l’école secondaire du village Nerqin Tchartar et en tirant des roquettes de type Grad, en choisissant l’heure spécifique à laquelle les enfants sont réunis dans la cour de l’école, tuant ainsi un enfant de 12 ans, Vaghinak Grigoryan, et blessant deux autres enfants, je demande à la rapporteure: la politique d’État de l’Azerbaïdjan n’est-elle pas de viser les civils et les régions habitées par des civils? Quand, le même jour, le 2 avril, les forces militaires azéries ont attaqué le village de Thalich et ont cruellement assassiné les membres de la famille Khalapyan, coupé les oreilles des personnes âgées, tué et déshonoré les soldats arméniens, n’est-ce pas là encore la politique d’État de ce pays?

Il est des villages frontaliers arméniens où, depuis des années, l’on ne célèbre pas d’enterrements pendant la journée parce que les cimetières se trouvent sous l’observation d’un poste azéri. Et presque chaque jour, les enfants doivent se réfugier dans des abris pendant les tirs où l’on essaie de couvrir le bruit des bombardements par la musique afin d’éviter qu’ils ne soient traumatisés.

Je me doute bien que la rapporteure n’aura pas le courage d’admettre que l’arménophobie est la politique d’État de son pays: sinon elle se retrouvera à côté d’Ilgar Mammadov! Cependant une autre Azerbaïdjanaise, la journaliste Ulker Ismayilgzi parle avec horreur d’un manuel méthodologique que voici, intitulé «Éducation patriotique des enfants d’âge préscolaire», approuvé par le ministère de l’Éducation de l’Azerbaïdjan, et où, par exemple, l’on pose cette question aux enfants de 5 ou 6 ans: «Qui sont les Arméniens et que doit être notre devoir civique à leur encontre?».

Néanmoins, je suis optimiste et je crois que le Nuremberg de Bakou est encore à venir.

LE PRÉSIDENT* – Je rappelle de nouveau que le Règlement interdit de montrer des photographies.

M. MELKUMYAN (Arménie)* – Le sujet de notre discussion est très actuel mais trouver les bonnes solutions est très difficile. Dans les zones de conflits armés, la vie de chaque humain est précieuse, cependant ce sont les enfants qui ont le plus besoin d’aide et de soutien. À la suite des opérations militaires, ils deviennent handicapés ou orphelins. Certains deviennent des sans-abri et subissent de ce fait un stress psychologique très grave.

La nécessité du règlement pacifique des conflits reste toujours très actuelle, mais il n’y a pas d’alternative.

Ces dernières années, ce problème s’est manifesté plus nettement en Syrie. La République d’Arménie a accueilli et assuré un emploi à près de 21 000 réfugiés.

Nous ne devons pas non plus oublier les enfants qui sont restés sans abri et sans parents à la suite de la guerre de quatre jours d’avril 2016 de Thalich, de Mataghis et d’autres encore de la République d’Artsakh, ainsi que Vagharchak Grigoryan, ce petit garçon de 12 ans qui a succombé à la suite d’un bombardement dans la cour de son école. Comment est-il possible d’oublier cela et de voir des parents inconsolables qui ne se résignent pas à cette perte irréversible?

La vie humaine ne doit pas devenir un jeu sportif pour les responsables politiques aux dépens de la population pacifique. Ils doivent porter la responsabilité des conséquences de leurs actions.

La logique de règlement pacifique est toujours en vigueur, mais des mécanismes de surveillance et de vérification du cessez-le-feu doivent être mis en place tout le long de la ligne de contact entre la République d’Artsakh et l’Azerbaïdjan. Et si ce dernier ne donne pas son consentement, il faut l’y contraindre. Il n’a pas le choix, sinon Aliev assumera la responsabilité de pertes humaines dans la région. C’est une responsabilité non seulement politique, mais aussi juridique et pénale.

Mes chers collègues, notre tâche commune n’est pas seulement de donner des estimations. Nous avons l’obligation d’appliquer des sanctions réelles contre les coupables. Les délais sont dépassés. Un homme, tout particulièrement un chef d’État, est fort quand il assume et répare ses fautes sans permettre à l’Histoire, aux institutions internationales ou aux États voisins de le faire à sa place. Autrement, il est discrédité aux yeux de son peuple et devient un cadavre politique. Je m’adresse donc à M. Aliev pour lui dire: vous avez la chance historique de réparer vos fautes et vous devez prendre en compte les faits réels et la vérité historique!

LE PRÉSIDENT* – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Mme FATALIYEVA (Azerbaïdjan), rapporteure* – Je vous remercie, mes chers collègues, pour votre soutien. Il a été très difficile de préparer ce rapport. Comme vous le savez, je représente l’Azerbaïdjan, un pays qui a une expérience très douloureuse en matière de protection des enfants victimes de la guerre, mais j’ai souhaité établir un rapport équilibré, permettant de refléter la situation des enfants de par le monde, quel que soit le pays concerné.

Depuis le début de l’humanité, des enfants souffrent et meurent, mais on ne peut pas admettre qu’ils soient tués de façon délibérée, avec des armes sophistiquées, en raison de leur appartenance religieuse et ethnique, au nom des ambitions politiques de certains. Je le regrette, Monsieur le Président, mais je dois répondre aux remarques de nos collègues arméniens, remarques qu’ils devraient s’appliquer à eux-mêmes. Certes, le droit international existe, mais Mme Christoffersen a dit très justement qu’il n’est pas suffisamment respecté. C’est bien là l’essentiel du problème. Si le droit international, les résolutions et les décisions des organisations internationales, étaient respectés, nous ne tiendrions pas ce débat aujourd’hui.

Les droits des enfants sont bafoués dans une totale impunité. C’est aussi ce qu’il convient de souligner. Pour soutenir les efforts menés au plan international, il faut mettre un terme à l’impunité dont jouissent les auteurs de crimes à l’encontre des enfants. La justice doit s’appliquer pour les enfants tués, pour les enfants victimes de la guerre et pour ceux qui vont le devenir. Il faut mettre un terme à tous les types d’agression contre les enfants. Il ne faut pas, comme l’a dit M. Reiss, que les enfants dessinent la guerre, qu’ils entendent jour après jour le sifflement des balles au lieu d’écouter des contes de fée.

J’approuve les propos de M. Bildarratz: nous devons essayer de prouver que le Conseil de l’Europe n’est pas seulement un club d’orateurs ou un lieu de palabres, mais une enceinte où l’on aborde de front les véritables problèmes. On croit toujours que l’on n’a pas le pouvoir de changer les choses mais ici, au contraire, nous avons ce pouvoir.

Ce rapport est sans doute l’un des plus délicats qui soient, car il touche à de nombreuses émotions. Il doit avoir un poids politique et être immédiatement suivi d’effet. Je vous demande donc, mes chers collègues, de le soutenir, de dire la vérité, de voir ce qui est bien et ce qui est mal dans ce monde. Notre objectif est de sauver les enfants et de les protéger, sans quoi ce n’est pas une seule génération qui sera perdue, mais plusieurs, qui vivront dans la peur et dans la cruauté.

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable* – Depuis que je connais Mme Fataliyeva, elle travaille sans relâche à défendre le droit des enfants, que ce soit dans le cadre de la campagne Un sur Cinq du Conseil de l’Europe ou de la préparation de ce rapport. Ce texte rappelle des atrocités et invite à mettre au plus vite un terme à la souffrance des enfants pris dans des situations de crise ou de conflit.

Aux parlementaires azéris et arméniens qui sont intervenus dans ce débat, j’aimerais rappeler que j’ai proposé un compromis sur le conflit du Haut-Karabakh et que, pour la première fois, les deux parties l’ont accepté. Pourquoi alors, au cours de ce débat, faire ainsi marche arrière? J’espère que ce rapport sera accepté à une très forte majorité ce soir. Ce faisant, mes chers collègues, vous accepteriez du même coup une mesure de compromis sur le Haut-Karabakh acceptée par les deux parties.

Si les enfants sont privés de leurs rêves, s’ils ne peuvent plus que faire des cauchemars, s’ils sont utilisés comme soldats, par des réseaux de prostitution ou de pornographie, si tout ce qu’on leur réserve au sein de la société est la peur et la souffrance, alors on leur vole leur vie, même s’ils survivent physiquement.

Mes chers collègues, je vous invite à adopter ce rapport, sans amendement, à une belle unanimité!

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission des questions sociales a présenté un projet de résolution sur lequel 3 amendements ont été déposés.

J’ai cru comprendre que le président de la commission souhaite proposer à l’Assemblée de considérer les amendements 1, 2 et 3, qui ont été adoptés à l’unanimité par la commission, comme adoptés par l’Assemblée.

Est-ce bien le cas, Monsieur le président?

M. SCHENNACH (Autriche), président de la commission* – Oui, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Il n’y a pas d’objection. En conséquence, ces amendements sont déclarés adoptés définitivement.

Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14461, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (39 voix pour, 0 voix contre et 2 abstentions).

4. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs
non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre

LE PRÉSIDENT* – L’ordre du jour appelle la discussion du rapport présenté par Mme De Sutter, au nom de la commission du Règlement, sur la contestation, pour des raisons formelles, des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre (Doc. 14475).

Nous entendrons également l’avis de la commission sur l’égalité, présenté par Mme Kovács (Doc. 14481).

Nous devrons en avoir terminé avec l’examen de ce texte, votes inclus, à 20 heures. Nous devrons donc interrompre la liste des orateurs vers 19 h 50, afin de pouvoir entendre la réplique de la commission et procéder aux votes nécessaires.

Madame De Sutter, vous disposez d’un temps de parole total de 13 minutes, que vous pouvez répartir à votre convenance entre la présentation de votre rapport et la réponse aux orateurs.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles * – Monsieur le Président, chers collègues, à l’ouverture de la session de l’Assemblée parlementaire, lundi matin, les pouvoirs non ratifiés de la délégation d’Andorre ont été contestés au motif que la délégation ne comptait pas de représentant féminin, ce qui constitue une violation de l’article 6.2.a du Règlement de l’Assemblée.

L’article dispose que «Les délégations nationales doivent comprendre un pourcentage de membres du sexe sous-représenté au moins égal à celui que comptent actuellement leurs parlements et, au minimum, un membre du sexe sous-représenté désigné en qualité de représentant.». La commission a été saisie afin de vérifier si les pouvoirs soumis par la délégation sont conformes aux exigences de cet article.

La délégation parlementaire d’Andorre a droit à deux représentants titulaires et deux suppléants. Il est intéressant de constater que la délégation présente une parfaite parité: deux hommes et deux femmes, mais ces dernières sont suppléantes. La délégation ne satisfait donc pas aux conditions établies à l’article 6.2 du Règlement, à savoir présenter au moins une femme comme représentante.

Avant de compléter ses conclusions, la commission a entendu M. Jordana, président de la délégation andorrane, que j’aimerais remercier de sa disponibilité et de son sens de la coopération. Il a donné des assurances à la commission que la composition de la délégation serait modifiée pour la partie de session d’avril. Il a par ailleurs souligné l’engagement pris par le Parlement andorran de promouvoir une représentation équilibrée, homme-femme, comme l’illustre la composition de sa délégation. Il a souligné les difficultés qui se posent aux petites délégations de satisfaire aux différents critères fixés par le Règlement de l’Assemblée d’une représentation équitable des partis politiques, des groupes, mais aussi de la représentation équilibrée femme-homme. Le Parlement andorran a d’ailleurs dû procéder à un réajustement, la semaine dernière, afin de tenir compte de la réorganisation de deux groupes parlementaires.

La commission du Règlement a également examiné les précédents avant de prendre sa décision. Différentes délégations dans le passé ont vu leurs pouvoirs contestés du fait de l’absence d’au moins un membre du sexe sous-représenté: le Monténégro, Saint-Marin et la Serbie, en janvier 2011, l’Islande en juin 2013 et la République slovaque en janvier 2017.

Dans tous ces cas, l’Assemblée a décidé de ratifier les pouvoirs des délégations, mais a suspendu les droits de vote de leurs membres à l’Assemblée et dans ses instances, à partir de la session suivante, si la composition de la délégation n’avait pas été mise en conformité avec le Règlement de l’Assemblée entre-temps.

La commission du Règlement a décidé d’adopter la même approche concernant la délégation andorrane. Elle propose donc que l’Assemblée ratifie les pouvoirs de la délégation parlementaire d’Andorre, mais prévoit une suspension automatique des droits de vote de ses membres, à l’Assemblée et dans ses commissions, qui prendrait effet au début de la session d’avril 2018, si la composition de la délégation n’a pas été mise en conformité avec le Règlement d’ici là, et jusqu’à la mise en conformité.

Contester les pouvoirs des délégations qui ne satisfont pas aux exigences posées par l’Assemblée en matière de représentation des femmes, à savoir la présence d’au moins une femme représentante dans une délégation, peut être perçu par certaines délégations comme une mesure disproportionnée. À ceux-là, je dirais que, au contraire, il est malencontreux de devoir contester des pouvoirs pour rappeler aux parlements nationaux ce qui est, finalement, une exigence minimale. C’est une question de principe.

L’Assemblée devrait saisir toute occasion qui lui est donnée pour réitérer son engagement ferme de promouvoir la représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les procédures de prises de décision dans les instances et appliquer ces principes à ses propres structures, notamment en encourageant une représentation équilibrée dans les délégations nationales.

Les délégations nationales et leurs parlements devraient avoir à l’esprit, à tout moment, la position de l’Assemblée en la matière. Bien que les parlements nationaux devraient veiller à ce que leur délégation nationale à l’Assemblée comprenne un pourcentage de femmes au moins égal à celui de leur parlement national, l’objectif à atteindre est un minimum de 30 %, sachant qu’un seuil devrait être fixé à 40 %.

J’aimerais rendre hommage au travail réalisé par la commission sur l’égalité et la non-discrimination qui nous propose un rapport d’information annuel très intéressant en matière d’évolution de la représentation et de l’égalité. On y trouve les statistiques détaillées sur la ventilation homme-femme au sein des assemblées. En 2016, les femmes représentaient 39 % des membres de l’Assemblée parlementaire, et 22 délégations avaient atteint le seuil de 40 % que je mentionnais. Cela constitue une augmentation par rapport aux années précédentes. Nous sommes donc satisfaits de constater qu’un progrès a été réalisé, même s’il est lent. De la même façon, nous constatons une évolution dans les mentalités.

LE PRÉSIDENT* – Madame la présidente, il vous restera un peu moins de 7 minutes pour répondre aux orateurs.

Mme KOVÁCS (Serbie), rapporteure pour avis de la commission sur l’égalité et la non-discrimination* – L’égalité de genre dans la vie publique est un des objectifs du Conseil. Au cours des 20 dernières années, l’Assemblée parlementaire a adopté plusieurs résolutions pour assurer l’équilibre des sexes dans les postes à responsabilité. Une des mesures principales est la mise en place d’une règle qui exige, dans les délégations, la présence d’au moins un membre du sexe sous-représenté en tant que représentant, – le plus souvent, il s’agit d’une femme. La proportion de femmes à l’Assemblée a augmenté progressivement, pour atteindre 39 % en 2016. C’est un accomplissement remarquable – la Résolution 1585 (2007) sur la représentation des sexes au sein de l’Assemblée parlementaire fixait l’objectif de 40 %. Cependant, le pourcentage est retombé à 37 % en 2017. Ainsi, la contestation des pouvoirs de l’Andorre, et précédemment celle des pouvoirs de la Slovaquie, ne peuvent pas être prises à la légère. Nous devons être vigilants.

La Serbie était dans la même situation en 2011: nous n’avions pas de femme parmi les représentants – les femmes n’étaient que suppléantes. Or nous constatons avec satisfaction que la délégation serbe comprend désormais plus de femmes que d’hommes, tout comme celles de la Finlande et de la Suède.

La commission sur la non-discrimination se rallie pleinement à la résolution préparée par la commission du Règlement. Pour renforcer ce texte, la commission propose un amendement qui vise à souligner que, pour atteindre l’égalité authentique, il convient que le principe d’égalité s’applique aux postes à responsabilité.

Je souhaite remercier la délégation de l’Andorre, qui nous a donné l’assurance que la situation actuelle serait corrigée très rapidement et que, lors de la prochaine partie de session, une femme serait présente dans la délégation en qualité de représentante.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est ouverte.

Nous commençons par les porte-paroles des groupes.

M. COAKER (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des socialistes, démocrates et verts* – Nous souhaitons appuyer le projet de résolution et féliciter Mme la présidente de la commission et l’Andorre d’avoir su trouver une solution si raisonnable.

Ce texte est important, et il est important qu’un homme intervienne pour le soutenir. L’égalité entre les hommes et les femmes suppose non seulement que les femmes demandent le changement, mais aussi que les hommes acceptent une répartition plus équitable dans nos sociétés. Si nous voulons imposer des changements dans nos sociétés et nos parlements, l’Assemblée se doit d’être exemplaire, et joindre les actes à la parole.

Si le cas de l’Andorre relève en réalité d’un malentendu, il n’en reste pas moins qu’il faut appliquer les règles à la lettre. Ce point de principe est crucial. Nous constatons des progrès, mais il faut faire plus, et rapidement. La part des femmes à l’Assemblée, hélas, est passée de 39 % en 2016 à 37 % en 2017. Nos principes doivent être appliqués certes avec tact, mais de façon stricte, et l’Andorre doit montrer sa volonté de respecter la règle très vite.

Le principe d’égalité devrait aussi s’appliquer aux postes à responsabilité. Il reste beaucoup à faire avant que l’Assemblée soit exemplaire, tout comme l’ensemble de nos sociétés et de nos pays, y compris le mien. Chacun doit se battre pour faire respecter les principes d’égalité et de justice sociale. Le Conseil de l’Europe doit s’intéresser en priorité aux questions de parité. En approuvant ce projet de résolution, nous démontrerons que le Conseil de l’Europe veut sincèrement mettre en œuvre ce principe fondamental.

M. THIÉRY (Belgique), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe – Monsieur Coaker, nous serons deux hommes à intervenir dans ce débat.

Afin de ne pas m’étendre trop longtemps sur une question à laquelle nous accordons peut-être trop d’importance, je voudrais signaler, au nom de mon groupe, combien le rapport qui nous est présenté nous semble juste et objectif, puisqu’il reflète simplement la réalité.

Nous connaissons tous maintenant la raison qui a amené la commission du Règlement à se saisir de ce problème. Je voudrais simplement insister sur quelques éléments qui, selon mon groupe, doivent être relevés.

Premièrement, le Règlement est le Règlement, et ce principe s’applique à tous les États membres. Si un État ne le respecte pas, il se doit de se mettre en règle dans les plus brefs délais afin de satisfaire aux obligations du Conseil de l’Europe. Sauf erreur de ma part, c’est tout simplement l’objectif de la délégation andorrane – ni plus, ni moins. Je me permets de rappeler que répondre à toutes les exigences des différents règlements est souvent complexe pour les petites délégations, et c’est particulièrement vrai en ce qui concerne le respect de l’égalité de genre – on le voit également pour Monaco et Saint-Marin, voire pour le Lichtenstein.

La question qui nous est soumise ici est bien la conséquence d’une situation que la délégation andorrane n’a pas voulue. Il nous semble important de signaler qu’elle ne devrait pas être réprimandée ou incriminée par ses pairs.

La situation résulte d’une restructuration interne de deux groupes parlementaires qui, dans l’absolu, ne posait aucun problème, puisqu’il semblait même y avoir un accord de principe entre eux. Malheureusement, cette modification était en contradiction avec le Règlement. Je m’étonne un peu de cette situation, surtout lorsque l’on sait que la délégation andorrane précédente était constituée non pas de deux hommes et de deux femmes, comme aujourd’hui, mais bien de trois femmes et d’un homme, dont deux femmes titulaires en 2015 et 2016, sans que cela ne soit dénoncé par notre institution. Je regrette par ailleurs que la composition de la délégation n’ait pas fait l’objet d’une concertation avant que l’on en arrive à l’officialisation d’une contestation. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas eu de volonté de contourner notre Règlement.

Nous devrions peut-être laisser le principe du droit à l’erreur s’appliquer à cette situation malheureuse. Référons-nous au projet de résolution, tel que la commission nous le présente, en tenant compte des précédents de 2011, 2013 et 2017, tout en veillant à ce que les garanties fournies par le Parlement andorran soient bien respectées, et à ce que la délégation se soit mise en conformité avec le Règlement pour la session d’avril, ce dont nous ne doutons pas.

Mme PALLARÉS (Andorre)* – Je suis membre suppléante de notre délégation, et je souhaiterais vous expliquer ce qui s’est produit. Il ne faut pas aller trop vite – or c’est ce qui s’est passé dans notre cas. Nous avions une coalition de plusieurs membres, équilibrée politiquement; vers la mi-décembre, un changement est survenu.

Nous avons peut-être tout simplement péché par excès. Nous sommes un tout petit Parlement, qui envoie ici une toute petite délégation de quatre membres. Nous souhaitions tout simplement que notre délégation soit aussi représentative que possible. Or l’équilibre politique peut être difficile à trouver. C’est pour cela que nous avons opéré ce changement, sans réfléchir au fait que l’un des groupes parlementaires, en se retrouvant moins représenté, devrait laisser la place de titulaire à un autre groupe.

Ce changement est intervenu quelques jours seulement avant le début de la session. La composition de la délégation, qui compte deux femmes et deux hommes, nous paraissait équitable. Nous n’avons tout simplement pas réfléchi à la répartition entre titulaires et suppléants, puisque, dans les faits, nous sommes toujours tous les quatre présents, et ce afin de respecter nos engagements. À l’exception de quelques privilèges pour le président de la délégation, il n’existe pas de hiérarchie entre nous. Il s’agit simplement de voter. L’un d’entre nous le fait, voilà tout.

J’aimerais également indiquer – c’est d’ailleurs l’objet de l’amendement que nous avons présenté – que, dès que nous avons pris connaissance de cette situation, notre Parlement a réagi, en indiquant, dans une lettre adressée au Président de l’Assemblée, que l’erreur serait corrigée dès la prochaine partie de session. Notre délégation s’est toujours sentie très engagée au sein de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ; elle a toujours été composée majoritairement de femmes, titulaires comme suppléantes – je pense notamment à Sílvia Bonet, qui a été particulièrement active au sein de cette Assemblée. Chaque délégation est différente, mais nous nous engageons à respecter le Règlement et nous rappelons qu’il est très important qu’il y ait de plus en plus de femmes dans les délégations.

Si je pense que la commission du Règlement a parfaitement réagi, nous avons cependant été heurtés du fait que, pour une simple erreur réglementaire, la question de notre situation ait été portée devant l’Assemblée en séance plénière. Nous pensons sincèrement que bien d’autres délégations auraient un effort à faire non seulement sur la question de l’égalité, qui nous occupe aujourd’hui, mais aussi sur celle des suppléants. En effet, si nous avons besoin de suppléants, c’est justement pour qu’ils remplacent les titulaires. Si tout le monde remplissait ses obligations en la matière, cet hémicycle serait toujours plein.

M. JORDANA (Andorre) – Je m’adresse à cette Assemblée en qualité de chef de la délégation andorrane. Nous avons été au centre de l’attention cette semaine, ce que nous ne souhaitions pas. Je remercie Mme De Sutter, ainsi que MM. Thiéry et Coaker, d’être intervenus.

Je crois qu’il faut retenir une chose de tout cela: le droit à l’erreur. It’s an honest mistake: notre erreur était de bonne foi. D’ailleurs, pour être tout à fait franc, nous avons depuis détecté une autre erreur.

Permettez-moi de vous expliquer brièvement ce qu’il s’est passé. L’origine de l’erreur, comme l’a dit Mme Pallarés, vient d’une restructuration interne à notre Parlement. Celle-ci nous a poussés à inverser les places de titulaire et suppléant de deux des membres de la délégation – c’est le seul changement, car la délégation est toujours exactement la même. Nous n’avons simplement pas vu que ce petit changement nous mettait en porte-à-faux avec le Règlement. À aucun moment nous n’avons voulu déguiser quoi que ce soit, contrairement à certains pays membres de cette Assemblée qui nous ont habitués à nous faire croire qu’ils respectaient les règles alors que cela n’était pas vrai. Nous n’avons pas voulu jouer à cela.

Mes chers collègues, le Secrétariat m’a confirmé que la restructuration que j’évoquais n’avait en fait aucune conséquence sur notre délégation: nous n’avions pas besoin de procéder à ce changement. Nous avons voulu être tellement scrupuleux dans notre respect du Règlement que nous avons fini par en violer les dispositions. L’article 6.2.a du Règlement prévoit que les délégations doivent être représentatives de leur Parlement dans la mesure du possible – voilà ce qui nous a poussés à effectuer ce changement, alors qu’il n’en était nul besoin. En étant plus papistes que le pape, nous avons commis une malheureuse erreur.

Non seulement je réaffirme notre volonté de la corriger, mais je vous indique également comment nous allons procéder pour ce faire: nous allons revenir à la composition de départ. Celui qui est suppléant reprendra sa place de titulaire, et celui qui est titulaire reprendra sa place de suppléant.

LE PRÉSIDENT* – La liste des orateurs est épuisée.

J’appelle la réplique de la commission.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission* – Monsieur Coaker, vous avez dit fort justement que le pourcentage de femmes au sein de l’Assemblée avait diminué de 2 points. C’est vrai, et nous pouvons toujours discuter de la portée de cette évolution, mais je crois qu’il faut simplement que nous gardions à tout moment à l’esprit la question de la parité et de l’égalité entre les hommes et les femmes. Soyons vigilants.

Ce que dit M. Thiéry est également très intéressant. Peut-être l’égalité entre les sexes était-elle, il y a quelques années, une question relevant des droits des femmes. Aujourd’hui, nous parlons bien d’égalité hommes-femmes: si, un jour, la situation venait à être renversée et que notre Assemblée comptait 60 % de femmes et 40 % d’hommes, nous devrions continuer d’œuvrer pour le principe d’égalité. Ce n’est pas une question touchant aux droits des femmes: il y va des droits des femmes et des hommes.

Quant au droit à l’erreur, bien sûr, il existe. Nous comprenons bien que les petites délégations rencontrent parfois des difficultés, et nous avons parfaitement compris ce qu’il s’était passé en l’espèce. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous avons retenu une solution déjà employée par le passé: c’est un compromis qui consiste à garantir les pouvoirs de la délégation andorrane et vos droits de vote tout en menaçant de les suspendre si, à l’avenir, les choses n’étaient pas corrigées. La commission a fait preuve de nuance.

LE PRÉSIDENT* – La discussion générale est close.

La commission du Règlement a présenté un projet de résolution sur lequel 2 amendements ont été déposés.

Je vous rappelle que, conformément à notre Règlement, les membres de la délégation d’Andorre ne pourront pas prendre part au vote sur ce texte.

J’ai cru comprendre que la présidente de la commission proposait de considérer l’amendement 1, qui a été adopté à l’unanimité par la commission, comme adopté par l’Assemblée.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission* – En effet, Monsieur le Président.

LE PRÉSIDENT* – Il n’y a pas d’opposition. En conséquence, cet amendement est déclaré définitivement adopté.

Je suis saisi de l’amendement 2.

M. JORDANA (Andorre) – Cet amendement est purement technique. Nous voudrions simplement qu’il soit bien mentionné dans le projet de résolution que le président de notre Parlement a envoyé une lettre au Conseil de l’Europe pour indiquer que nous avions bien détecté l’erreur, et que nous la rectifierions au plus vite. C’est une question de forme: il faut qu’il soit clair que le Parlement d’Andorre reconnaît l’erreur et qu’il la rectifiera.

LE PRÉSIDENT* – La présidence a été saisie par la commission du Règlement du sous-amendement oral suivant: «À l’alinéa 2 de l’amendement, supprimer la deuxième phrase».

Je considère que ce sous-amendement est recevable au regard des critères du Règlement.

Il ne peut toutefois être pris en considération si 10 représentants ou suppléants au moins s’y opposent et se lèvent.

Ce n’est pas le cas. Nous allons donc l’examiner.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission* – Il s’agit d’une disposition technique. Le texte de l’amendement 2 est très long. Selon nous, la phrase que nous proposons de supprimer n’apporte rien.

M. JORDANA (Andorre)* – J’aimerais connaître la teneur exacte de ce sous-amendement.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission* – La deuxième phrase de l’amendement – «Après réception de ces pouvoirs, le Service de la Séance de l’Assemblée s’est mis en relation avec le secrétariat de la délégation» – ne présente aucune utilité. Elle n’apporte rien à l’amendement. Nous pensons donc qu’elle peut être supprimée.

M. JORDANA (Andorre)* – Cette précision n’en est pas moins vraie, Madame la rapporteure. Nous avons pris contact avec les services du Conseil de l’Europe dès le 18 janvier. Nous avons envoyé la lettre demandée par le Secrétariat dès réception de sa réponse. Cette précision est peut-être sans importance pour vous, mais pas pour nous, car elle démontre que nous avons réagi avec diligence.

Le sous-amendement oral est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous en revenons à l’amendement 2, ainsi sous-amendé.

Mme De SUTTER (Belgique), présidente de la commission* – Il a été approuvé à une large majorité des membres de la commission.

L’amendement 2, sous-amendé, est adopté.

LE PRÉSIDENT* – Nous allons maintenant procéder au vote sur le projet de résolution contenu dans le Doc. 14475, tel qu’il a été amendé.

Le projet de résolution, amendé, est adopté (23 voix pour, 1 voix contre et 0 abstention).

5. Prochaine séance publique

LE PRÉSIDENT* – La prochaine séance publique aura lieu demain matin à 10 heures, avec l’ordre du jour adopté précédemment par l’Assemblée.

La séance est levée.

La séance est levée à 19 h 55.

SOMMAIRE

1. Rapport annuel d’activité 2017 du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe

M. Muižnieks, Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe

Questions: Mme Christoffersen, M. Kiliç, Mme Brasseur, M. Petter Eide, Mme Filipovski, M. Kern, Mme Kerestevioğlu Demir, M. Rafael Huseynov, Mme Zohrabyan, MM. Schwabe, De Bruyn, Crowe, Vusal Huseynov, Rzayev, Ghiletchi, Goncharenko, Mme Şupac

2. L’évolution de la procédure de suivi de l’Assemblée (janvier-décembre 2017) et l’examen périodique du respect des obligations de l’Estonie, de la Grèce, de la Hongrie et de l’Irlande

Présentation par M. Preda du rapport de la commission de suivi (Doc. 14450 Parties 1 à 5)

Orateurs: M. Kern, Mmes Kavvadia, Filipovski, MM. Ariev, Schennach, Seyidov, Csenger-Zalán, Mme Mikko, MM. Xuclà, Mullen, Mme Kovács, MM. Shehu, Kandelaki, Vlasenko, Németh, Crowe, Kiliç, Sobolev

Réponses de M. le rapporteur et de M. Vareikis, vice-président de la commission de suivi

Vote sur un projet de résolution amendé

3. Protéger les enfants touchés par des conflits armés

Présentation par Mme Fataliyeva du rapport de la commission des questions sociales (Doc. 14461)

Orateurs: MM. Kürkçü, Aktay, Reiss, Mmes Christoffersen, Topcu, MM. Waserman, Vusal Huseynov, Coaker, Bildarratz, Mme Louhelainen, M. Grin, M. Rzayev, Baroness Massey, Mme Gafarova, M. Rafael Huseynov, Mme Zohrabyan, M. Melkumyan

Réponse de Mme la rapporteure et de M. le président de la commission des questions sociales

Vote sur un projet de résolution amendé

4. Contestation pour des raisons formelles des pouvoirs non encore ratifiés de la délégation parlementaire de l’Andorre

Présentation par Mme De Sutter du rapport de la commission du Règlement (Doc. 14475)

Présentation par Mme Kovács du rapport de la commission sur l’égalité, saisie pour avis (Doc. 14481)

Orateurs: MM. Coaker, Thiéry, Mme Pallarés, M. Jordana

Réponse de Mme De Sutter

Vote sur un projet de résolution amendé

5. Prochaine séance publique

Appendix / Annexe

Representatives or Substitutes who signed the register of attendance in accordance with Rule 12.2 of the Rules of Procedure.The names of members substituted follow (in brackets) the names of participating members.

Liste des représentants ou suppléants ayant signé le registre de présence, conformément à l’article 12.2 du Règlement.Le nom des personnes remplacées suit celui des Membres remplaçant, entre parenthèses.

ÅBERG, Boriana [Ms]

ADAM, Claude [M.] (HETTO-GAASCH, Françoise [Mme])

AEG, Raivo [Mr] (KROSS, Eerik-Niiles [Mr])

AKTAY, Yasin [Mr]

ARIEV, Volodymyr [Mr]

ARNAUT, Damir [Mr]

BADEA, Viorel Riceard [M.] (BRĂILOIU, Tit-Liviu [Mr])

BARNETT, Doris [Ms]

BARTOS, Mónika [Ms] (CSÖBÖR, Katalin [Mme])

BATRINCEA, Vlad [Mr]

BECHT, Olivier [M.]

BEREZA, Boryslav [Mr]

BERNHARD, Marc [Mr]

BILDARRATZ, Jokin [Mr]

BİLGEHAN, Gülsün [Mme]

BRASSEUR, Anne [Mme]

BRUYN, Piet De [Mr]

ĆATOVIĆ, Marija Maja [Ms]

CHRISTOFFERSEN, Lise [Ms]

CILEVIČS, Boriss [Mr] (LAIZĀNE, Inese [Ms])

COAKER, Vernon [Mr] (WILSON, Phil [Mr])

CROWE, Seán [Mr]

CSENGER-ZALÁN, Zsolt [Mr]

DUNDEE, Alexander [The Earl of] [ ]

EIDE, Petter [Mr] (EIDE, Espen Barth [Mr])

ENGIN, Didem [Ms] (BAYKAL, Deniz [Mr])

ESTRELA, Edite [Mme] (ROSETA, Helena [Mme])

FILIPOVSKI, Dubravka [Ms] (PANTIĆ PILJA, Biljana [Ms])

GAFAROVA, Sahiba [Ms]

GERMANN, Hannes [Mr] (FRIDEZ, Pierre-Alain [M.])

GHILETCHI, Valeriu [Mr]

GOLUB, Vladyslav [Mr] (GERASHCHENKO, Iryna [Mme])

GONÇALVES, Carlos Alberto [M.]

GONCHARENKO, Oleksii [Mr]

GRAF, Martin [Mr]

GRIN, Jean-Pierre [M.] (LOMBARDI, Filippo [M.])

HAIDER, Roman [Mr]

HEER, Alfred [Mr]

HEINRICH, Gabriela [Ms]

HOFFMANN, Rózsa [Mme] (GULYÁS, Gergely [Mr])

HOWELL, John [Mr]

HUSEYNOV, Rafael [Mr]

HUSEYNOV, Vusal [Mr] (HAJIYEV, Sabir [Mr])

JONES, Susan Elan [Ms]

JORDANA, Carles [Mr]

JØRGENSEN, Jan E. [Mr] (HENRIKSEN, Martin [Mr])

KALMARI, Anne [Ms]

KANDELAKI, Giorgi [Mr] (BAKRADZE, David [Mr])

KAVVADIA, Ioanneta [Ms]

KERESTECİOĞLU DEMİR, Filiz [Ms]

KERN, Claude [M.] (GOY-CHAVENT, Sylvie [Mme])

KILIÇ, Akif Çağatay [Mr]

KLEINWAECHTER, Norbert [Mr]

KLEINWAECHTER, Norbert [Mr]

KOPŘIVA, František [Mr]

KOVÁCS, Elvira [Ms]

KOX, Tiny [Mr]

KÜRKÇÜ, Ertuğrul [Mr]

LACROIX, Christophe [M.]

LEITE RAMOS, Luís [M.]

LOGVYNSKYI, Georgii [Mr]

LOPUSHANSKYI, Andrii [Mr] (DZHEMILIEV, Mustafa [Mr])

LOUHELAINEN, Anne [Ms] (PACKALÉN, Tom [Mr])

MAROSZ, Ján [Mr]

MASIULIS, Kęstutis [Mr] (BUTKEVIČIUS, Algirdas [Mr])

MASSEY, Doreen [Baroness]

McCARTHY, Kerry [Ms]

MEHL, Emilie Enger [Ms]

MELKUMYAN, Mikayel [M.] (RUSTAMYAN, Armen [M.])

MENDES, Ana Catarina [Mme]

MIKKO, Marianne [Ms]

MULLEN, Rónán [Mr] (COWEN, Barry [Mr])

MÜLLER, Thomas [Mr]

MUNYAMA, Killion [Mr] (TRUSKOLASKI, Krzysztof [Mr])

NÉMETH, Zsolt [Mr]

NICK, Andreas [Mr]

NISSINEN, Johan [Mr]

NORDQVIST, Rasmus [Mr] (JENSEN, Mogens [Mr])

OBREMSKI, Jarosław [Mr] (ARENT, Iwona [Ms])

OHLSSON, Carina [Ms]

ÖNAL, Suat [Mr]

PALLARÉS, Judith [Ms] (NAUDI ZAMORA, Víctor [M.])

PAVIĆEVIĆ, Sanja [Ms] (SEKULIĆ, Predrag [Mr])

PISCO, Paulo [M.]

PODERYS, Virgilijus [Mr] (TAMAŠUNIENĖ, Rita [Ms])

PREDA, Cezar Florin [M.]

REISS, Frédéric [M.] (ABAD, Damien [M.])

ROCA, Jordi [Mr] (MATARÍ, Juan José [M.])

ROJHAN GUSTAFSSON, Azadeh [Ms] (GUNNARSSON, Jonas [Mr])

RZAYEV, Rovshan [Mr] (PASHAYEVA, Ganira [Ms])

SCHENNACH, Stefan [Mr]

SCHOU, Ingjerd [Ms]

SCHWABE, Frank [Mr]

ŠEPIĆ, Senad [Mr]

SEYIDOV, Samad [Mr]

SHARMA, Virendra [Mr]

SHEHU, Tritan [Mr]

SILVA, Adão [M.]

SOBOLEV, Serhiy [Mr]

STELLINI, David [Mr]

ŞUPAC, Inna [Ms]

SUTTER, Petra De [Ms] (VERCAMER, Stefaan [M.])

THIÉRY, Damien [M.]

TOPCU, Zühal [Ms]

VAREIKIS, Egidijus [Mr]

VEJKEY, Imre [Mr]

VEN, Mart van de [Mr]

VLASENKO, Sergiy [Mr] (BILOVOL, Oleksandr [Mr])

VOVK, Viktor [Mr] (LIASHKO, Oleh [Mr])

WASERMAN, Sylvain [M.]

XUCLÀ, Jordi [Mr] (BARREIRO, José Manuel [Mr])

YEMETS, Leonid [Mr]

YENEROĞLU, Mustafa [Mr]

ZINGERIS, Emanuelis [Mr]

ZOHRABYAN, Naira [Mme]

Also signed the register / Ont également signé le registre

Representatives or Substitutes not authorised to vote / Représentants ou suppléants non autorisés à voter

AGHAYEVA, Ulviyye [Ms]

ATSHEMYAN, Karine [Ms]

CORREIA, Telmo [M.]

GOGUADZE, Nino [Ms]

GUNNARSSON, Jonas [Mr]

MAKHMUDYAN, Rustam [Mr]

MARUKYAN, Edmon [Mr]

RUSSELL, Simon [Lord]

RUSTAMYAN, Armen [M.]

Observers / Observateurs

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Partners for democracy / Partenaires pour la démocratie

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