Rudolf

Schuster

Président de la Slovaquie

Discours prononcé devant l'Assemblée

mardi, 24 juin 2003

Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames, Messieurs les parlementaires, Excellences, Mesdames, Messieurs, c’est avec beaucoup d’émotion et de joie, mais aussi un grand sens des responsabilités que je prends la parole devant cette éminente Assemblée qui représente les quarante-cinq parlements nationaux des pays membres du Conseil de l’Europe.

Je souhaiterais saisir l’occasion qui m’est ainsi offerte pour remercier le Président Schieder de m’avoir généreusement permis de m’adresser à vous au moment même où mon pays célèbre le 10e anniversaire de son adhésion au Conseil de l’Europe en tant qu’Etat indépendant. C’est l’une des raisons pour lesquelles je souhaiterais poursuivre mon allocution devant cette respectable Assemblée hautement démocratique dans ma langue maternelle, laquelle n’est guère employée couramment dans cette instance.

(L’orateur poursuit en slovaque) (Traduction). – Mesdames, Messieurs les parlementaires, depuis qu’elle est devenue indépendante, il y a de cela dix ans, la République slovaque a connu de nombreux changements radicaux dus à son nouveau statut et aux bouleversements survenus en Europe et dans le monde. Aujourd’hui, dans la nouvelle Europe qui est la nôtre, la Slovaquie partage avec ses voisins proches géographiquement, mais aussi avec ceux qui sont plus éloignés, les mêmes valeurs spirituelles et culturelles qui nous sont chères et qu’il nous tient à cœur de protéger.

L’Europe d’aujourd’hui est le théâtre d’une évolution sans précédent des mentalités. La chute du mur de Berlin et l’apparition de nouveaux Etats, dont celui de la Slovaquie, nous permet de repenser les valeurs du Vieux Continent. C’est dans ce contexte que nous devons placer les discussions axées sur l’organisation de l’Europe. Les objectifs visés dans le cadre du processus de l’intégration sont nobles: la sécurité, la solidarité, la prospérité, la paix, la démocratie et l’ouverture au monde qui nous entoure.

L’intégration de l’Europe ne signifie donc pas seulement organiser le Marché unique ni gérer une unité économique et financière. Cette idée prend une dimension entièrement nouvelle lorsque l’on pense qu’elle pourrait nous apporter la paix, permettre l’entente et promouvoir la coopération internationale sur tout le continent européen. Nous sommes à l’aube d’une ère où les pays sont unis au sein du continent européen et où les nations européennes vivent ensemble dans le respect de la démocratie, des droits de l’homme et de l’Etat de droit.

Si l’entité européenne pouvait agir et réagir en tant que telle, elle pourrait garantir la stabilité à l’échelle mondiale. Il nous faut impérativement nous en rendre compte, à l’heure où l’orientation de la coopération en Europe fait l’objet de débats enfiévrés et où, parallèlement, les populations se préoccupent davantage de leur identité nationale.

Cela étant, ce n’est ni en reculant, ni en nous cachant derrière nos frontières nationales que nous pourrons créer de nouveaux emplois, résoudre nos problèmes de sécurité, nous faciliter la tâche pour préserver et pour moderniser nos Etats, ni résoudre les problèmes liés à la criminalité, pas plus que ceux relatifs à la protection de l’environnement. Tous ces problèmes se posent au-delà des frontières.

Le Conseil de l’Europe mérite des félicitations dans la mesure où il permet de faire progresser le processus d’unification en Europe. Il a été le premier organe à ouvrir ses portes aux pays qui ont été involontairement isolés par le tristement célèbre rideau de fer et qui, pendant de nombreuses années, n’ont pas pu profiter de la démocratie. C’est grâce au Conseil de l’Europe, comme nous avons l’habitude de le dire, que nous sommes revenus en Europe même si nous ne l’avons jamais quittée.

La Slovaquie participe à un certain nombre de programmes de coopération gérés par le Conseil de l’Europe qui visent à aider les nouveaux pays membres à créer et à stabiliser leur système démocratique interne. Le Conseil de l’Europe a pu nous aider très efficacement à réformer notre système judiciaire, à mettre en place des institutions démocratiques et à élaborer des textes législatifs tenant compte des évolutions politique, économique et sociale.

Ma propre expérience de la politique régionale ou locale me permet de voir à quel point nous avions besoin de l’aide et du soutien du Conseil de l’Europe pour développer la démocratie au niveau de nos autonomies locales naissantes. Nous espérons aujourd’hui que ces autonomies locales nous aideront à remédier aux très fortes disparités qui caractérisent les régions en termes de niveau de vie. En effet, ces disparités continuent de peser lourdement sur le dynamisme de notre croissance économique, et tempèrent la satisfaction de notre population face au processus de transformation et aux réformes en cours.

L’un des grands enjeux pour notre gouvernement est d’améliorer la situation dans les régions, car si, du point de vue de tous les indicateurs pertinents, notre capitale et sa région ne le cèdent en rien à celles de l’Union européenne, et si leurs organes autonomes élaborent d’ambitieux plans de développement futur, les parties orientales de la Slovaquie font face à un taux de chômage vertigineux et à une baisse du niveau d’instruction, sans parler de l’absence chronique de fonds pour le développement régional.

Nous sommes conscients que c’est grâce à la mise en conformité de notre système juridique avec les normes européennes et à notre attitude positive face à la législation européenne que nous avons réussi à nous adapter en relativement peu de temps au système européen des valeurs. La Slovaquie est donc aujourd’hui prête à aider d’autres pays dans les domaines dans lesquels elle a une expérience.

A ce stade, je souhaiterais mettre l’accent en particulier sur notre coopération transfrontalière dont le principal objectif et, en même temps, le principal avantage résident dans le développement de contacts entre les populations, les représentants des autonomies, les petites et moyennes entreprises, les étudiants et les membres des divers syndicats et associations.

Une coopération aussi dynamique, fructueuse et prometteuse est un moyen idéal et efficace pour ajouter au confort des populations qui vivent le long des frontières que la Slovaquie partage avec ses cinq pays voisins. C’est à mon initiative que la coopération de la Slovaquie avec la République tchèque, la République de Pologne et la République de Hongrie a été menée sous les auspices conjoints de Vaclav Havel, d’Alexander Kwasniewski, de Ferenc Màdl et de moi-même.

Mesdames, Messieurs les parlementaires, je pense que, en tant que communauté d’Etats membres du Conseil de l’Europe, nous souscrivons sans réserve à l’idée d’une Europe considérée comme une entité libre, une Europe qui fait de tous les pays et de tous leurs ressortissants des partenaires à égalité ayant les mêmes droits et obligations. Je pense que nous sommes aujourd’hui tous d’accord pour dire que la protection des valeurs respectées par les Européens doit être dynamique, transparente et directe, et que chacun d’entre nous a l’obligation de respecter les règles établies. Nous devons signaler les défaillances du système et trouver des moyens d’y remédier.

Depuis qu’elle est membre du Conseil de l’Europe, la Slovaquie a été, à plus d’une occasion, critiquée pour la manière dont elle se développe, bien que cela n’ait pas été facile pour tous ceux qui, aux niveaux politique, professionnel ou personnel, participent à cette mission difficile du Conseil de l’Europe. Je souhaite en particulier remercier M. Schieder, M. Schwimmer et nos rapporteurs pour les précieux conseils qu’ils nous ont prodigués.

L’un des domaines dans lesquels la Slovaquie continue de faire l’objet de vos critiques a trait à la situation de la population rom. Permettez-moi de saisir l’occasion qui m’est ainsi offerte pour rappeler que, lorsque j’étais maire de Konice, région où la population rom est relativement importante, je me suis efforcé de faire preuve d’efficacité pour aider cette minorité, estimant que les problèmes de cette dernière ne pouvaient être résolus sans la participation active de ses membres. L’expérience que nous avons acquise à ce jour, grâce à la mise en œuvre de programmes de développement, a montré que l’approche paternaliste de l’Etat envers la population rom a eu des conséquences néfastes sur la conscience juridique et l’esprit démocratique des Roms, et même des plus cultivés, ce qui les a souvent conduits à mal interpréter leurs droits et obligations.

Nous continuons d’accorder une grande attention à cette question et, en ma qualité de chef d’Etat, je me félicite de l’initiative très utile de mon homologue finlandaise, Mme Tarja Halonen. C’est également Mme Halonen qui était à la tête de l’équipe de rapporteurs lorsque la Slovaquie a été acceptée au Conseil de l’Europe. Sur ses recommandations, le Conseil de l’Europe s’attachera à améliorer le niveau de vie de la population rom par l’intermédiaire du Forum européen des Roms. Nous attendons beaucoup de cette initiative grâce à laquelle mon pays bénéficiera de l’assistance et de l’aide nécessaires dans ce domaine délicat.

Mesdames, Messieurs les parlementaires, pour finir, permettez-moi de formuler quelques réflexions sur l’avenir de cette Organisation indispensable. L’intention originelle des pères fondateurs du Conseil de l’Europe d’unir tous les Etats du continent sur les fondations solides de la démocratie va bientôt devenir réalité.

Peut-être que lorsqu’il célébrera son 55e anniversaire, le Conseil de l’Europe sera enfin devenu une Organisation paneuropéenne. Ensuite, le processus d’unification sera éventuellement pris en charge par l’Union européenne, quoique sur une base différente. Tandis que l’Union européenne aura toujours à assurer le respect de ses règles économiques strictes mais raisonnables, c’est au Conseil de l’Europe qu’il incombera de veiller à la défense des nobles idéaux de la démocratie.

Il faut comprendre que ce dont l’Europe d’aujourd’hui a le plus besoin, ce n’est pas de ressources financières mais plutôt d’un approfondissement de nos valeurs éthiques, culturelles et sociales. Il n’est pas possible de satisfaire les nations européennes en unifiant simplement le système économique. Ce qu’il faut surtout, c’est que les cultures européennes œuvrent côte à côte et façonnent librement et spontanément leur avenir commun, fondé principalement sur les principes de la démocratie. S’agissant de son développement, la société européenne arrive actuellement à un tournant où les valeurs culturelles, éthiques et démocratiques s’imbriquent pour former ce que nous considérons comme le pilier fondamental d’une société continentale moderne.

L’Europe est face à des défis qui, si elle parvient à les relever convenablement, entraîneront un renforcement de son développement général. Je pense, au niveau continental, à une vision commune de l’avenir reposant sur un régime démocratique, une vision émergeant de nombreux débats et de la participation active des citoyens, une vision résultant de nouvelles formes de cohésion sociale, soucieuse d’assurer la protection et le bien de nos peuples en termes de solidarité, d’égalité et de responsabilité. Les citoyens attendent de la société qu’elle envoie des signaux positifs et qu’elle fixe des seuils minimaux de garantie civile et démocratique qui ne se monnaient pas sur le marché et au-dessous desquels il ne faut pas laisser notre société tomber.

A cette fin, me plaçant du point de vue de la Slovaquie, pays qui s’installe dans la démocratie, il me paraît opportun d’exprimer l’espoir que, à mesure que nous avancerons, nous verrons l’Union européenne et le Conseil de l’Europe reconsidérer leurs relations mutuelles, de sorte que, malgré leurs missions différentes, les deux organisations reposent sur les saines fondations de valeurs partagées. Elles doivent créer un cadre dans lequel elles ne sont pas en concurrence mais plutôt en synergie. C’est là un autre souhait des Européens.

Mesdames, Messieurs les parlementaires, la justice, comme le respect des droits de l’homme et la protection de la démocratie, est l’une des pierres angulaires de la société européenne. La Cour européenne des Droits de l’Homme, la plus célèbre institution du Conseil de l’Europe, veille sans relâche à la protection des libertés et des droits fondamentaux qui sont ceux des citoyens dans une société démocratique. Cette Cour jouit, légitimement, du respect bien mérité des Européens, conscients qu’elle prend des décisions justes, impartiales et politiquement neutres. Toutefois, vu le nombre de requêtes qui lui sont soumises, nous comprenons tous bien l’importance de sa mission à l’égard des pays d’Europe centrale et orientale. Il semblerait qu’elle soit «victime» de son propre succès.

A l’heure où nous parlons, des discussions sont en cours pour améliorer l’efficacité de la Cour. Le meilleur moyen pour nous d’y contribuer et de soulager la Cour de Strasbourg d’une partie de sa charge de travail, c’est d’adopter des lois qui soient pleinement en conformité avec la Convention européenne des Droits de l’Homme et la jurisprudence de la Cour. Ce n’est pas à Strasbourg mais plutôt au niveau national que se trouve la solution aux problèmes de la Cour européenne. Les citoyens slovaques ont également appris comment faire appel à la Cour européenne des Droits de l’Homme pour obtenir la protection de leurs droits.

En fait, ils l’ont si bien appris que, s’agissant du nombre de requêtes déposées, nous arrivons en tête des Etats membres du Conseil de l’Europe. Bien que nous ayons élaboré et adopté un train de mesures législatives afin, précisément, d’améliorer la protection des droits de l’homme au niveau national, nous n’avons pas obtenu, jusqu’à présent, les résultats escomptés.

(L’orateur poursuit en anglais) (Traduction). – Mesdames, Messieurs les parlementaires, dans un proche avenir, l’Europe connaîtra des bouleversements qui auront des conséquences encore plus vastes. Le Conseil de l’Europe assumera-t-il pleinement le rôle qui lui revient au sein de la future architecture européenne? Des projets sont en cours en vue d’organiser le 3e Sommet qui devrait permettre d’obtenir les réponses de ses Etats membres sur la question de savoir si le Conseil de l’Europe sera à la hauteur de l’héritage de ses pères fondateurs.

Au nom de mon pays, je tiens, par conséquent, ici, à exprimer mon soutien à l’organisation de ce sommet car, comme un proverbe plein de sagesse le rappelle aux pèlerins: «Souvenez-vous qu’il n’y a pas de chemin tout tracé! Il faut en frayer un soi-même!»

Je vous remercie beaucoup de votre attention. Je suis maintenant prêt à répondre à toutes vos questions.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Monsieur le Président, je vous remercie pour cette allocution fort intéressante et pour votre éloge du Conseil de l’Europe. Vous n’êtes pas sans savoir que les membres de cette Assemblée souhaitent vous soumettre un certain nombre de questions. Vous avez d’ores et déjà annoncé que vous étiez prêt à y répondre. Je rappelle à nos collègues parlementaires que la formulation de chaque question ne doit pas dépasser trente secondes. En l’occurrence, vous devez simplement poser votre question et non pas faire un discours. J’autoriserai des questions supplémentaires en fin de débat seulement et à condition qu’il reste suffisamment de temps. Car nous devons permettre au plus grand nombre de parlementaires possible de poser une première question.

La toute première question émane de M. Ates, au nom du Groupe socialiste.

M. ATES (Turquie) (traduction)

Monsieur le Président, je vous souhaite la bienvenue dans notre hémicycle. Nous vous souhaitons tous un séjour de travail fructueux au Conseil de l’Europe.

Monsieur le Président, nous apprécions tous le fait que, lorsque vous étiez maire de Kosice, vous ayez énormément contribué à la réforme des pouvoirs locaux. Nous apprécions également le soutien que vous apportez à l’action du Conseil de l’Europe dans ce domaine.

Monsieur le Président, jugez-vous le mécanisme de coopération actuel du Conseil de l’Europe suffisant et efficace?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

estime que ces mécanismes fonctionnent très bien. La Slovaquie a approfondi la coopération transfrontalière grâce au Conseil de l’Europe. Il existe un projet avec la République tchèque auquel participent différentes localités des deux pays. Des projets similaires existent avec la Hongrie et l’Autriche. L’Espace Schengen pose effectivement des problèmes qu’il faudra surmonter. La coopération avec l’Ukraine fonctionne très bien même si ce pays est en retard pour le rapprochement avec l’Union européenne. Les règles de la coopération sont simples et pragmatiques.

M. EORSI (Hongrie) (traduction)

Monsieur le Président, j’ai beaucoup apprécié le fait que, au début de votre discours, vous ayez abordé de manière approfondie la question de la «loi statutaire hongroise», concernant le statut des minorités. Les libéraux et démocrates européens – dont les libéraux hongrois font partie – ont bien entendu et bien compris vos préoccupations. Vous n’ignorez pas – j’en suis certain – que le Parlement hongrois a voté hier au sujet de l’amendement de cette loi. Cette dernière a aujourd’hui le soutien de l’Union européenne, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l’Europe. En fait, ce texte de loi est également soutenu par tous les pays voisins de la Hongrie. Comment se fait-il que seule la Slovaquie y soit opposée? Comment sortir de cette situation dangereuse?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

regrette que ces difficultés persistent dans le cadre de bonnes relations de voisinage, mais il estime qu’on n’a pas trouvé dans cette loi les moyens d’éviter les discriminations envers les Slovaques. Il faudra passer à nouveau le texte amendé au crible. Les deux parties devraient œuvrer ensemble pour trouver une solution.

M. ATKINSON (Royaume-Uni) (traduction)

Monsieur le Président, tous les Etats membres du Conseil de l’Europe se sont engagés, aux termes de l’Acte final d’Helsinki, à respecter les frontières actuelles du continent européen; à cet égard, votre pays, la Slovaquie, est le seul qui ait modifié ses frontières de manière pacifique. Quels conseils donneriez-vous à cette Assemblée et à notre Organisation pour traiter les conflits séparatistes que connaissent divers Etats membres, et qui restent, à ce jour, non résolus?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

explique que ce «divorce de velours» s’est effectué de manière démocratique et qu’il ne subsiste pas d’hostilité entre les Tchèques et les Slovaques. Il espère que la loi hongroise procédera du même esprit qui permet de surmonter les difficultés tout en préservant les identités et d’aboutir à une coexistence pacifique.

Cependant, les intérêts spécifiques doivent aussi être défendus: la minorité hongroise représente 10 % de la population slovaque et il existe également d’autres minorités. La Slovaquie s’applique à les prendre en compte.

Mme DURRIEU (France)

Je remercie M. le Président Schuster pour son discours et les mots forts qu’il a utilisés quand il a qualifié l’Espace Schengen d’espace d’union et de coopération, qu’il a d’ailleurs su célébrer de la meilleure des façons.

Voilà dix ans que la Slovaquie est membre du Conseil de l’Europe. Il est temps de mettre un terme à la procédure de suivi. Les questions que je vous adresse, monsieur le Président, ne sont pas des critiques mais de simples vérifications. Vous avez répondu en ce qui concerne le problème des nationalités. Qu’en est-il des réformes administratives tendant à plus d’autonomie locale et du rude combat que nous menons, les uns et les autres, contre la corruption?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

déclare que le problème de la corruption n’est pas encore résolu, des difficultés existent en particulier dans la police et au sein de la justice. Le parlement et le gouvernement se sont attelés à la tâche de réformer ces services. Ces mesures ne sont pas encore complètement appliquées mais elles amélioreront la situation.

La Slovaquie a entrepris la décentralisation des compétences administratives. Cependant les collectivités locales n’ont pas encore assez de moyens pour agir. La réforme fiscale permettra une amélioration. Les mesures prises par le parlement et par le gouvernement sont très positives.

M. MIGNON (France)

Monsieur le Président, parmi les problèmes évoqués dans les négociations d’adhésion à l’Union européenne figurent l’adaptation des structures judiciaires et la réforme du droit procédural, dans le sens d’une plus grande transparence des décisions et des actes juridiques.

Quelle est la politique de la Slovaquie dans ce domaine et quelle aide attend-elle, sur le terrain, du Conseil de l’Europe?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

estime qu’il y a eu un grand changement dans le système judiciaire, avec la création d’un conseil judiciaire et la désignation des juges par le Président.

M. GROSS (Suisse) (traduction)

Monsieur le Président, c’est avec une rare éloquence que vous avez décrit la façon dont, au cours des travaux que vous avez accomplis ces treize dernières années, vous avez appris à apprécier le Conseil de l’Europe. Pensez-vous pouvoir rester le défenseur du Conseil de l’Europe au sein de l’Union européenne? Beaucoup d’entre nous craignent que votre adhésion n’entraîne une dépréciation du Conseil de l’Europe. Pensez-vous que les membres fondateurs du Conseil de l’Europe aient jamais attaché à notre Organisation autant de prix que vous le faites et continuerez certainement à le faire?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

déclare que la Slovaquie est particulièrement bien placée pour témoigner de l’assistance fournie par le Conseil de l’Europe. Il estime que le Conseil de l’Europe conservera son autorité et son pouvoir dans des domaines éventuellement plus restreints mais extrêmement précieux pour les nouveaux adhérents.

Mme PETROVA-MITEVSKA («l’ex-République yougoslave de Macédoine») (traduction)

Monsieur le Président, il y a, entre nos deux pays, des liens millénaires, qui remontent à l’époque des institutions des saints Cyrille et Méthode, et du voyage de leurs étudiants depuis la Slovaquie jusqu’à Ohrid. Mais, malheureusement, le processus d’intégration récent a fait place à de nouvelles divisions, qui rendent la communication difficile entre nos deux nations. Comment modifier le système de visas que vous appliquez actuellement aux ressortissants de la République de Macédoine et d’autres pays de la région?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

est un fervent ami de la Macédoine et a maintes fois profité des conseils avisés du Président Trajkovski. S’il ne tenait qu’à lui, l’obligation de visa serait abolie mais, avec l’entrée dans l’Union européenne, la décision cesse d’être entièrement du ressort de la Slovaquie. La même question se pose d’ailleurs pour l’Ukraine avec qui la Slovaquie avait l’intention de conclure un accord rendant les visas gratuits. Les discussions vont donc se poursuivre à l’échelle du gouvernement et du parlement, et le Président fera tout son possible pour qu’elles se concluent au mieux.

Mme DAMANAKI (Grèce) (traduction)

Votre Excellence, j’ai écouté avec beaucoup d’attention vos propos sur la communauté rom de votre pays. Si mes informations sont exactes, à la suite d’une accusation avancée par des ONG au sujet d’une prétendue stérilisation des femmes roms, en Slovaquie, le Gouvernement slovaque a porté cette affaire devant la justice du pays. Y a-t-il évolution sur ce point extrêmement délicat?

Mme McCAFFERTY (Royaume-Uni) (traduction)

M’étant rendue en Slovaquie, en tant que rapporteur sur la question de la santé génésique à la lumière du rapport intitulé «Corps et âme» («Body and Soul»), je me félicite de l’enquête approfondie menée par votre gouvernement et des réformes en cours en vue de garantir le droit des patients à la reproduction. Y a-t-il eu des progrès en ce qui concerne la sensibilisation des communautés roms en matière de santé génésique et de droits à la procréation – notamment en ce qui concerne l’amélioration de la pratique du consentement éclairé, et, plus particulièrement encore, l’élaboration d’un formulaire standard, à cet effet, en langue slovaque et dans les langues des minorités ethniques? Quels progrès, également, ont été accomplis en matière de réintégration des infirmières de terrain et de formation d’aides-soignantes d’origine rom? M. le Président peut-il indiquer à cette Assemblée si la stratégie de dix ans relative aux Roms a été officiellement publiée? Dans le cas contraire, pour quelle date espérez- vous cette publication et quel sera le mode de financement de la stratégie en question?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

n’est peut-être pas le mieux placé pour répondre à cette question, mais il sait que le gouvernement et le parlement la traitent avec tout le sérieux nécessaire. Le rapport définitif n’a toujours pas été publié mais des poursuites pénales ont été engagées contre x. Les ONG font du bon travail dans des domaines que ne couvrent pas d’autres institutions, mais elles ont parfois tendance à gonfler certaines affaires. Il importe donc avant tout d’établir la vérité, afin de prendre les décisions justes. Cela n’a pas empêché de revoir la loi afin d’éviter le renouvellement de telles stérilisations forcées.

Il a été maire d’une ville qui comptait de nombreux Roms et la coexistence n’a jamais posé de problèmes. Il estime que, dans cette affaire, il convient d’impliquer la communauté mais que, les adultes pouvant difficilement être rééduqués, il importe avant tout de s’adresser aux enfants. A force de tout recevoir de l’Etat, les Roms se sont trouvés marginalisés et ont perdu la conscience de leurs obligations. Il faut maintenant y remédier en leur faisant prendre conscience de leurs devoirs en même temps que de leurs droits.

Il conclut en indiquant que, dès que le rapport définitif sera établi, il informera le Conseil des mesures prises.

M. JASKIERNIA (Pologne) (traduction)

La Slovaquie et la Pologne étant à la veille de l’adhésion à l’Union européenne, d’aucuns se demandent ce qu’il adviendra de notre coopération régionale. Quelle est la position de la Slovaquie au sujet du rôle éventuel du Groupe dit de Visegrad – Initiative de l’Europe centrale – après l’intégration dans l’Union européenne?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

est heureux que cette question vienne d’un Polonais, les deux pays étant liés par une coopération multiforme. Il pense que le Groupe de Visegrad continuera d’être utile à l’ensemble de la région. Il se peut même qu’il soit élargi et si certains estiment qu’il conviendrait de le dissoudre, ils ont certainement tort. Il faut au contraire le renforcer car il a permis de grands succès, tirant la Slovaquie de l’isolement qui la menaçait avant 1998 et lui permettant d’arriver aux portes de l’Union européenne.

Mme AGUIAR (Portugal)

Monsieur le Président de la République slovaque, je me réjouis de votre présence à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Je vous félicite et je me permets de vous poser une question concernant l’évolution de la participation des femmes à la vie politique, dans un marché du travail qui, ces dix dernières années, a subi tant de transformations en République slovaque. J’ai abordé cette problématique au cours de la visite que notre commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes a faite à votre pays. A cette occasion, nous avons défendu l’adoption de mesures de discrimination positive pour aboutir à une égalité réelle.

Monsieur le Président, je voudrais connaître votre avis à ce sujet.

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

a, tout au long de sa carrière politique, travaillé avec des femmes, et des femmes de très grande valeur. Le Gouvernement et le Parlement slovaques comptent des femmes en leur sein et la population active est à 44 % féminine. Il y a également eu quatre femmes ambassadeurs auprès du Conseil de l’Europe. Cependant, si l’on veut chercher du négatif, on en trouvera toujours, pour donner des leçons aux autres. Mieux vaut donc commencer par balayer devant sa porte. Le Président pense que tout gouvernement pourrait compter au moins trois ou quatre femmes. Or ce n’est pas le cas partout. Il existe même des parlements où la proportion de femmes n’atteint pas le cinquième. Les parlements et les gouvernements seraient bien avisés d’établir une feuille de route pour régler cette question, qui exige de toute façon de coopérer en s’abstenant de toute critique.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie. Si je puis me permettre, je dirai que nous avons entendu non seulement quatre ambassadrices de leur pays, mais aussi quatre ambassadrices des plus dynamiques!

La question suivante émane de M. Mercan, qui représente la Turquie.

M. MERCAN (Turquie) (traduction)

J’ai déjà obtenu une réponse partielle à ma question. La Slovaquie a entamé une réforme importante sur le plan juridictionnel et, Monsieur le Président, vous y avez personnellement contribué. Jugez-vous que l’indépendance juridictionnelle de votre pays est aujourd’hui largement réalisée? Ou considérez-vous que l’on puisse encore progresser?

M. Schuster, Président de la Slovaquie (interprétation)

indique que les choses ont bien progressé. Les juges sont désormais nommés à vie par le Président, qui peut éventuellement les destituer. Cependant, certaines questions restent en suspens: ainsi la lutte contre la corruption a fait l’objet de mesures qui n’ont pas encore toute l’ampleur souhaitable, mais qui devraient être complétées à court terme. En tout état de cause, on peut affirmer que l’indépendance de la justice est acquise en Slovaquie.

LE PRÉSIDENT (traduction)

Je vous remercie.

Cette série de questions à M. le Président Schuster arrive à son terme. Je voudrais vous adresser mes remerciements les plus chaleureux pour votre discours, vos observations et vos réponses.