Pavel
Filip
Premier ministre de la République de Moldova
Discours prononcé devant l'Assemblée
lundi, 26 juin 2017
C’est un véritable honneur pour moi que de prendre aujourd’hui la parole devant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Alors que j’interviens devant vous, mon pays et le continent européen tout entier sont confrontés à de véritables défis. Les règles qui existaient auparavant ne peuvent plus être appliquées. Un nouveau monde émerge et de nouveaux instruments sont désormais utilisés par nos sociétés et par le Gouvernement moldave. Notre époque est marquée par une grande complexité, que reflètent les rapports annuels du Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et du Commissaire aux droits de l’homme. Ces documents présentent une évaluation approfondie des déficiences démocratiques de l’Europe, déficiences qui appellent des réponses. Les solutions proposées nécessitent une approche intégrée, car nous avons tiré un enseignement de ces dernières années: les textes du Conseil de l’Europe – il en existe plus de deux cents – constituent de véritables catalyseurs de la transformation. En matière de démocratie parlementaire, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe joue donc un rôle tout particulier.
Dans mon pays, la transformation démocratique est importante et profonde. Elle respecte les principes et les valeurs du Conseil de l’Europe. Nous avons en partage une longue histoire, vingt-deux années de partenariat, depuis l’indépendance de mon pays. Pendant cette période, de nombreuses réformes ont été menées, notamment celle du cadre constitutionnel. Les institutions ont subi des modifications et notre état d’esprit a connu un changement notable. Le Conseil de l’Europe contribue à la réalisation de notre rêve: l’intégration européenne de la République de Moldova.
Nous avons pris plusieurs engagements que nous entendons respecter. Mon gouvernement a pris ses fonctions en janvier 2016. Après une période difficile, au cours de laquelle nous avons dû faire preuve d’un grand courage et mobiliser toutes les ressources possibles, nous avons réussi à engager des réformes importantes. Notre objectif stratégique, inscrit dans le programme 2016-2018 de mon gouvernement, est d’appliquer les dispositions de l’accord d’association entre la République de Moldova et l’Union européenne. L’élection présidentielle de 2016 a abouti à un nouveau paysage politique. Après son élection, j’ai indiqué au Président moldave que, s’il fallait choisir entre la coopération et la coexistence avec notre gouvernement, je choisirais la coopération. Bien que nous appartenions à des camps différents, nous devons travailler ensemble dans l’intérêt du pays.
«La République de Moldova et le Conseil de l’Europe sont liés par une histoire commune de vingt-deux années de coopération et vingt-cinq années d’indépendance, autant d’années qui ont vu des changements radicaux»
Nous voulons renforcer les capacités fonctionnelles et les institutions de l’État afin de regagner la confiance des citoyens. Il s’agit de rendre le gouvernement et l’administration plus transparents et de faire en sorte que celle-ci soit plus ouverte au dialogue avec les citoyens. Sur la question de la transparence, nous avons tenu compte des recommandations de l’Assemblée parlementaire dans le plan d’action du gouvernement.
La stratégie de réforme du système judiciaire 2011-2016 a été prolongée d’une année. Elle vise à mettre l’accent sur l’intégrité au sein du système judiciaire. Nous avons prévu des sanctions financières conséquentes en cas de violation des règlements européens. Deux bureaux spécialisés du procureur ont été mis en place, l’un pour la lutte contre la corruption, l’autre pour la lutte contre la criminalité organisée. Ces nouvelles législations permettent au système judiciaire d’être encore plus efficace. Ainsi, sur les 1 100 procureurs et juges que compte le pays, 36 ont été jugés et condamnés pour faits de corruption. Grâce au savoir-faire et à l’expertise du Conseil de l’Europe, le 1er août 2016, une nouvelle loi a été adoptée afin de réformer le parquet. Les recommandations du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) nous sont aussi précieuses, tout comme la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.
Le Gouvernement moldave s’est lancé, avec le soutien de la Banque mondiale, dans la construction de nouveaux établissements pénitentiaires. Le respect des droits de l’homme est essentiel et nous essayons de corriger nos lacunes le plus rapidement possible. Nous suivons aussi les recommandations du Groupe d’États contre la corruption (GRECO) et nous mettons en œuvre une loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Dans le cadre du cycle d’évaluation actuel, nous continuons de lutter contre la corruption des parlementaires, des procureurs et des juges. Un code de la déontologie est en cours d’élaboration. Un projet visant à lutter contre le blanchiment d’argent et la corruption est également à l’étude.
A la suite des recommandations du Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA), un mécanisme a été mis en place afin de coordonner les politiques. Ce mécanisme est une bonne pratique du point de vue national et international.
Par ailleurs, un Comité de lutte contre la traite des êtres humains est piloté par le ministère des Affaires étrangères qui s’appuie sur un secrétariat permanent. En ce domaine, nous bénéficions du soutien de l’ensemble de la communauté luttant contre la traite des êtres humains et, partant, de l’expérience d’experts de la société civile et de professionnels.
Grâce au comité consultatif pour la protection des droits de minorités, nous avons adopté pour la période 2017-2027 une stratégie visant à protéger les droits des minorités. Signée en juin 2016, la feuille de route prend en compte les recommandations du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Avec le soutien du Conseil de l’Europe, nous avons également adopté et mis en œuvre une nouvelle loi relative au financement.
La stratégie de décentralisation est prolongée jusqu’en 2018. Selon les recommandations du Conseil de l’Europe et de la Convention-cadre pour la protection des minorités, nous avons créé un groupe de travail qui se penche sur l’autonomie de la Gagaouzie en lien avec l’Assemblée de la Gagaouzie. Ce groupe de travail a adopté plus de 21 décisions et recommandations en direction des collectivités locales. Elles portent sur les modifications à apporter à la législation pour modifier l’organisation territoriale du pays ainsi que sur la répartition des pouvoirs et des responsabilités.
Ce groupe prépare actuellement quatre projets de loi. Voici un an, nous avons organisé en Gagaouzie une session spéciale consacrée aux développements socio-économiques de la région. C’est ainsi qu’en décembre 2016, nous avons approuvé une décision du gouvernement et un plan d’action 2016-2019 pour le développement socio-économique de la Gagaouzie.
Parmi les mesures d’ores et déjà mises en œuvre, je citerai: l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme pour l’apprentissage simultané du roumain et de la langue gagaouze, dès la maternelle et la création d’infrastructures techniques pour le secteur industriel. En outre, plusieurs projets de loi ont été préparés sur le statut ethnique spécial de Taraclia. Consultée, la Commission de Venise a rendu son avis en décembre 2016 et recommandé que les préoccupations de ce territoire soient prises en compte.
De 2016 à 2018, le gouvernement poursuivra ses efforts pour améliorer l’administration publique afin qu’elle fournisse des services de qualité à ses citoyens. Cette réforme de l’administration publique se poursuivra jusqu’en 2020.
Nous nous sommes lancés dans un processus de restructuration du gouvernement qui repose sur la révision du nombre de ministères et d’agences. Il s’agit là du programme de réformes le plus ambitieux jamais lancé en République de Moldova. Il conviendra de renforcer les capacités nécessaires à la poursuite de la réforme, l’objectif étant d’accroître l’efficacité de l’administration publique. Mais il s’agit avant tout, comme je le disais, de fournir des services de plus grande qualité.
Nous avons engagé une réforme de l’administration locale, afin de réduire la bureaucratie. Le nombre de permis et d’autorisations nécessaire a ainsi été réduit de 412 en 2016 à 115, aujourd’hui.
Des mesures ont été prises afin d’améliorer le cadre juridique et l’environnement financier des petites et moyennes entreprises, qui doivent payer un impôt forfaitaire dans le secteur des technologies de l’information. Nous avons lancé un projet relatif à la société de l’information intitulé «Agenda numérique 2020». Nous avons bénéficié à cet égard de l’aide du Conseil de l’Europe, comme pour tout ce qui relève du numérique. Il est important pour nous de coopérer avec l’ensemble des acteurs du secteur de l’information afin d’identifier de nouvelles opportunités.
Le secteur des technologies de l’information se développe. La République de Moldova figure parmi les pays qui bénéficient du meilleur débit internet. Elle n’en reste pas moins extrêmement vulnérable aux cyberattaques, notamment celles touchant les systèmes économiques et électoraux.
Les dispositions de la Convention de Budapest sur la cybercriminalité et de la Convention de Lanzarote sont extrêmement pertinentes. Aussi souhaitons-nous développer un mécanisme de lutte contre l’utilisation abusive des technologies de l’information. À cet égard, nous tirons grand parti de l’expérience du Conseil de l’Europe en la matière.
Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire Général, Mesdames, Messieurs, nous sommes heureux d’annoncer que l’ensemble des réformes que nous avons entreprises correspondent à celles figurant dans le plan d’action du Conseil de l’Europe pour la République de Moldova. Je profite de l’occasion qui m’est offerte, Monsieur le Secrétaire Général, pour vous remercier de votre soutien et de votre présence à l’occasion de son lancement officiel, à Chisinau.
Le plan d’action précédent 2013-2016 a donné des résultats concrets au niveau national. Ainsi, une série de lois ont été adoptées dans le domaine judiciaire, dont une loi sur le statut et l’évaluation des juges, une loi sur le renforcement du pouvoir des avocats et leurs capacités de suivi. Nous avons reçu un soutien du Conseil de l’Europe pour tout ce qui relève des élections et pour amender le statut du défenseur des droits.
Nous avons également lancé un projet réunissant les deux communautés riveraines de la rivière Dniestr. Nous pensons obtenir des résultats tangibles.
Le mécanisme conjoint – le cadre de coopération programmatique du Partenariat oriental de l’Union européenne/Conseil de l’Europe – a prouvé son utilité et son efficacité au terme de deux ans de mise en œuvre, notamment pour ce qui relève de projets régionaux bilatéraux thématiques. Une véritable coordination entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne évitera tout chevauchement.
Quelques mots maintenant sur la Convention européenne des droits de l’homme. Notre système s’accompagne de responsabilités partagées. Le principe de subsidiarité doit prévaloir. La République de Moldova continuera de soutenir le processus de réforme et les quatre Déclarations d’Interlaken, d’Izmir, de Brighton et de Bruxelles. Renforcer la sécurité démocratique est également nécessaire. Nous continuerons donc d’apporter notre soutien au programme de détachement de juristes auprès de la Cour européenne des droits de l’homme. Voilà vingt ans que nous avons accédé à la Convention européenne des droits de l’homme. Le rôle de la Convention et de la Cour n’a jamais été aussi complexe qu’aujourd’hui.
Nous comprenons que l’avenir dépend à la fois de la visibilité du Conseil de l’Europe et de la responsabilité de tous les États membres pour garantir le respect des droits au niveau national. Il s’agit donc, non seulement d’adopter des lois conformes aux normes européennes, mais également de les mettre en œuvre.
J’aimerais rappeler l’affaire Catan et autres c. République de Moldova et Fédération de Russie relative aux écoles en Transnistrie. Les droits des enfants ne devraient pas être politisés. Les enfants ne doivent pas être les victimes collatérales des questions politiques. Nous devons mettre l’accent sur l’éducation pour obtenir de bons résultats. Pour cela, nous devons nous appuyer sur l’expertise du Conseil de l’Europe et le dialogue entre les parties.
Ces deux dernières décennies, notre continent a été confronté à de véritables turbulences, à de graves défis et il continue de l’être. Tout le système européen est remis en cause; de profonds changements géopolitiques sont engagés. Malheureusement, ces changements sont accompagnés de conflits non résolus et générateurs d’instabilité régionale.
La contribution du Conseil de l’Europe – son rôle politique, ses mécanismes de suivi, son expertise, ses mesures d’instauration de la confiance – est essentielle. Il n’y a pas de modèle universel de règlement des différends. Les conflits en Géorgie, en Azerbaïdjan, en République de Moldova et la grave crise de la partie est de l’Ukraine doivent être résolus dans le plein respect de l’intégrité territoriale, de la souveraineté de ces pays.
Il est important de tirer des leçons du passé. Le conflit non résolu de la Transnistrie fait obstacle à notre développement économique et divise notre société. Il place injustement notre pays en zone grise. Les acteurs internationaux connaissent les paramètres: le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, la reconnaissance de frontières internationales de la République de Moldova et un statut spécial pour la région de la Transnistrie. Une position conjointe des autorités moldaves a été soumise en vue de rétablir la confiance entre les deux rives. Nous sommes convaincus que si les intérêts des populations étaient considérés comme prioritaires et passaient avant toute considération idéologique, les partenaires pourraient travailler ensemble et progresser. Il n’est pas impossible de résoudre ce conflit, mais ce ne sera ni facile ni rapide, et les institutions devront bénéficier du soutien de la population. Nous avons besoin d’une période de transition et nous espérons bâtir un État capable d’œuvrer pour l’ensemble de ses citoyens. Je forme le vœu que les mesures d’instauration de la confiance créent des conditions propres à résoudre des problèmes concrets.
Nous nous félicitons du soutien du Conseil de l’Europe et de nos autres partenaires internationaux. Les plateformes de négociation existantes doivent être exploitées si nous voulons parvenir à des résultats tangibles.
Mesdames et Messieurs, le Conseil de l’Europe est un catalyseur du changement démocratique en République de Moldova. Je parle non seulement de la définition des normes, mais également de leur mise en œuvre. Nous sommes totalement conscients du fait que nos perspectives européennes sont étroitement liées aux résultats obtenus par notre pays pour le respect de ses engagements. Et au-delà de ces perspectives européennes, ce respect est essentiel pour l’achèvement de la procédure de suivi instaurée par le Conseil de l’Europe.
Nous avons la capacité et l’ambition de parvenir à ce résultat. Nous comptons sur le soutien de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour la mise en œuvre de nos réformes dans le cadre de la procédure de postsuivi. Car je puis vous assurer que le moment est venu pour la République de Moldova de passer à l’étape de postsuivi.
La République de Moldova; forte d’un véritable potentiel, peut atteindre ce résultat. Nos citoyens doivent être rassurés et convaincus qu’ils ont leur place dans ce système démocratique. Je suis certain que lors de leur prochaine visite, les corapporteurs de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pourront témoigner de nos résultats.
La Résolution 1955 de l’Assemblée parlementaire d’octobre 2013 confirme tout ce que je viens d’évoquer. La République de Moldova est une jeune démocratie et nos transformations sont en partie dues au soutien du Conseil de l’Europe. Nous avons un mandat clair pour poursuivre l’intégration et l’adaptation de notre pays aux valeurs européennes. Cela est essentiel pour assurer le développement et la modernisation de notre pays.
Nous allons continuer de promouvoir auprès de nos concitoyens une vision claire de nos perspectives européennes. Nous adhérons aux valeurs européennes et il est important de poursuivre nos activités au service de nos citoyens et de l’ensemble de notre société. Il s’agit de veiller à ce que les normes européennes soient irréversibles.
Je l’ai dit, la République de Moldova ne dispose pas de plan B. La République de Moldova a un idéal: l’intégration européenne. Nous sommes convaincus que la réalisation de cet idéal améliorera les conditions de vie de tous les citoyens moldaves.
Nous sommes engagés dans un processus de réforme radical. Des solutions ne seront trouvées que si chacun s’engage avec détermination. Le meilleur moyen est d’agir ensemble, en fonction de valeurs partagées. L’Histoire a montré que l’Europe était capable de trouver des solutions dès lors qu’elle s’en remet à la primauté du droit, aux droits de l’homme, à la démocratie. Nous sommes donc fermement engagés dans un projet européen. Notre pays est pleinement mobilisé. Nous espérons que l’Europe pourra s’adapter, sans renoncer à ses principes. J’espère qu’ainsi nous aurons un avenir meilleur dans un monde en perpétuel mutation.
Mesdames et Messieurs, mon pays, la République de Moldova et ses citoyens ont besoin d’une famille européenne soudée et forte.
LE PRÉSIDENT (interprétation)
Monsieur le Premier ministre, je vous remercie pour votre intervention, particulièrement intéressante. Nous allons maintenant passer aux questions.
Mes chers collègues, je vous rappelle que les questions ne doivent pas dépasser 30 secondes. Vous devez poser une question et non faire un discours.
Nous commençons par les porte-parole des groupes.
M. VAREIKIS (Lituanie), porte-parole du Groupe du Parti populaire européen (interprétation)
Monsieur le Premier ministre, je vous remercie d’avoir souligné l’importance de la procédure de suivi pour votre pays. Ma question concerne la réforme du Code électoral. Quels avantages apportera-t-elle aux Moldaves?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
Cette question, actuellement au centre de toutes les attentions, a fait l’objet de nombreux débats, comme à Bruxelles la semaine dernière. Le projet de réforme émane d’une demande très forte de la population moldave, qui, selon tous les sondages, la plébiscite à plus de 60 %. En effet, la population souhaite changer les élites du pays. La réforme du Code électoral répond à cette volonté de changement. De nombreux débats ont eu lieu et la société civile a été consultée.
J’attire votre attention sur le fait que nous avons demandé l’avis de la Commission de Venise, afin d’améliorer notre projet de loi. Cependant, certains doutent de notre volonté de faire aboutir ce processus de réformes. Ces doutes n’ont pas lieu d’être.
La loi électorale de demain doit garantir tous les droits des électeurs et n’autoriser aucune fraude. Elle doit être parfaitement étanche. Le débat a été très politique. La polarisation fut forte. Nous essayons d’obtenir le consensus le plus large possible, mais le consensus est une notion très relative pour la République de Moldova. Depuis la naissance du pays, certains citoyens tournent leur regard vers l’Ouest, d’autres vers l’Est. Un large consensus est difficile, l’unanimité est impossible. Mais ces divisions ne nous empêchent pas de tenter d’obtenir un consensus sur des sujets importants et difficiles. La question du rapprochement avec l’Union européenne ne faisait pas non plus l’unanimité.
Nous souhaitons aller jusqu’au bout du processus de réforme électorale, et nous tiendrons compte de toutes les recommandations de la Commission de Venise, pour obtenir le meilleur texte possible.
Mme MIKKO (Estonie), porte-parole du Groupe socialiste (interprétation)
La République de Moldova a été le premier pays du voisinage oriental de l’Union européenne à bénéficier d’une exemption de visa, ce qui facilite les échanges. Qu’a fait votre gouvernement, récemment, pour que les familles divisées puissent être réunies?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
Ce régime d’exemption de visa fut primordial pour les Moldaves. La liberté de circulation représente un progrès considérable. Ce fut, de la part de l’Union européenne, un signe de confiance et un encouragement à évoluer. Concernant nos efforts, entrepris grâce à l’argent de l’Union européenne, je pourrais évoquer la reconstruction de dizaines d’écoles et de centaines de kilomètres de routes. Je pourrais aussi évoquer les conseils dont nous bénéficions pour la mise en œuvre des réformes dont le pays a grandement besoin. Après l’obtention de cette exemption de visa, plus d’un million de Moldaves ont pu se déplacer sans formalités bureaucratiques, grâce à des passeports biométriques. Les violations du temps de séjour autorisé dans l’Union européenne furent très peu nombreuses, montrant que les Moldaves sont disciplinés.
Concernant les personnes situées à l’étranger, les rapatrier n’est pas facile. Le problème est complexe. Nous savons ce qu’il faut faire, mais les difficultés pratiques sont nombreuses. En République de Moldova, un certain discours populiste incite les Moldaves à revenir au pays. Mais les gens ne reviendront que si les conditions de vie dans le pays s’améliorent, et si nous offrons de meilleures perspectives économiques et de bonnes infrastructures, notamment sanitaires. La population veut vivre correctement, et souhaite disposer de services de santé et d’éducation efficaces. Ne nous laissons pas berner par des discours populistes. Notre agenda de réformes est très vaste, nous voulons résoudre les problèmes.
Par exemple, la justice doit être profondément réformée. Nous voulons modifier l’environnement des entreprises, rendre le pays plus attrayant et offrir de bons salaires. Les investissements publics et sociaux sont nécessaires. Mais, pour investir, il faut une capacité financière. La question est de savoir comment la créer. Le gouvernement doit emprunter, collecter de l’argent par le biais de l’impôt, des taxes et des investisseurs.
Nous avons entrepris des réformes pour limiter le nombre de tracasseries administratives et rendre le climat plus favorable.
Nous avons réduit de 39 à 13 le nombre des services d’inspection. Nous avons décidé de rendre la République de Moldova attrayante, notamment pour que les Moldaves soient dissuadés de partir et, au contraire, pour que les Moldaves de l’étranger soient incités à revenir au pays ou à y investir. Nous avons mis en place des programmes de co-investissement, aux termes desquels l’État complète les investissements privés par des sommes d’un montant équivalent.
M. HOWELL (Royaume-Uni), porte-parole du Groupe des conservateurs européens (interprétation)
Monsieur le Premier ministre, il y a un peu plus d’un an, vous avez déclaré que vous aviez une dernière chance de regagner la confiance des Moldaves. Dans quelle mesure y êtes-vous parvenu? Avez-vous comblé le fossé qui sépare pro-Russes et pro-Européens?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
Cette courte question, dont je vous remercie, monsieur le parlementaire, appelle une réponse circonstanciée. Au début de l’année 2016, lorsque nous sommes arrivés aux affaires, la situation était critique. La grave crise politique de 2015 était devenue, en outre, une grave crise économique. Autant dire que la situation était franchement déplorable! Les dirigeants politiques avaient ainsi perdu toute crédibilité auprès de la population mais aussi auprès de nos partenaires. Recréer de la confiance ne s’annonçait pas simple.
Nous avons dû stabiliser l’économie, parce qu’il fallait bien pouvoir continuer à payer salaires et pensions. Il fallait aussi que nous redevenions crédibles vis-à-vis de nos partenaires financiers extérieurs, car nous n’avions plus accès à des financements étrangers. Nous devions donc convaincre nos partenaires internationaux que nous prenions un nouveau départ. Bien sûr, certains demeurent critiques, considérant plutôt ce gouvernement comme un «punching-ball», dont ils estiment qu’il ne mérite aucune confiance.
Au mois d’avril 2017, un sondeur qui n’est pas du tout un ami du gouvernement a mené une enquête. Alors qu’en 2016 seuls 7 % de la population faisaient confiance au gouvernement, un an plus tard, ils étaient 21 %. Quant à la police, sa cote de confiance est passée de 24 % à 41 %, celle de la justice de 7,8 % à 24 % et celle du parquet de 12 % à 34 %. La confiance progresse donc.
Il y a un peu plus d’un an lorsque l’on demandait aux gens s’ils préféraient un rapprochement avec l’Union européenne ou un rapprochement avec l’Union eurasiatique, les partisans de la seconde option étaient très majoritaires, tout simplement parce qu’ils étaient déçus par l’élite politique du pays. L’Union européenne n’était donc plus populaire. Au mois d’avril 2017, 40 % des Moldaves sont de nouveau attachés à l’Union européenne, et l’option euro-asiatique est moins populaire.
Je pense donc que nous sommes sur la bonne voie. Notre administration a pris un certain nombre de mesures, et notre objectif – nous l’avons dit – est clair: à la fin de notre mandat à la tête du pays, l’option pro-européenne devrait être un choix irréversible. Quels que soient nos successeurs, il ne devrait pas y avoir de retour en arrière possible.
Mme RODRÍGUEZ HERNÁNDEZ (Espagne), porte-parole de l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (interprétation)
Malheureusement, Monsieur le Premier ministre, aujourd’hui, le nom de Moldova est synonyme de corruption, notamment à cause de l’affaire Laundromat, qui concerne le circuit bancaire. Or non seulement un certain nombre de responsables ne sont pas en prison mais ils sont toujours en poste. Que faites-vous donc contre la corruption?
Nous sommes également inquiets au sujet du nouveau Code électoral, qui semble réduire certaines libertés. Comment pouvez-vous regagner la confiance des Moldaves avec un tel message autoritaire?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
En fait, votre question peut être divisée en deux. Il est vrai que cette fameuse affaire du vol de 1 milliard, au détriment de trois banques moldaves, a mis le feu aux poudres et provoqué la crise de 2015, mais l’affaire Laundromat est une autre affaire, plutôt de blanchiment d’argent. Ce sont 23 milliards, essentiellement en provenance de la Fédération de Russie, qui ont été blanchis par le système bancaire moldave.
Dès que nous sommes arrivés aux affaires, nous avons essayé d’assainir une situation devenue vraiment critique, même si un certain nombre de choses n’étaient pas du tout du ressort du gouvernement. Nous avons décidé d’aller dans trois directions.
Premièrement, nous avons décidé qu’il était prioritaire de faire en sorte qu’une telle escroquerie bancaire ne puisse jamais se reproduire. Ce fut tout l’objet de nos discussions avec le Fonds monétaire international. Tout un paquet de mesures ont été adoptées pour renforcer le contrôle par la banque centrale, et les fraudes du type de celles dénoncées ne sont plus possibles.
Deuxièmement, nous avons pris des mesures pour essayer de recouvrer l’argent volé. Un contrat a été signé avec une société d’enquête internationale, laquelle a présenté son projet de rapport il y a un mois. Ces enquêteurs ont déjà retrouvé la trace de 600 millions qui ont quitté le pays et ils nous ont dit où était l’argent. Nous essayons de le récupérer, mais l’enquête se poursuit.
Troisièmement, le parquet a intenté des poursuites contre tous les responsables de cette fraude bancaire. Un certain nombre de condamnations ont déjà été prononcées.
Ces fraudes ont évidemment donné un surcroît de vigueur aux mouvements populistes. Nombreux sont effectivement les mouvements qui ont essayé de profiter de ce scandale bancaire.
Même dans l’Union européenne, vous devez savoir que ce type de problème bancaire ne peut pas être résolu du jour au lendemain, car les méthodes d’escroquerie en cause sont très complexes. Quoi qu’il en soit nous menons l’enquête afin de recouvrer les montants détournés: l’un des principaux responsables de ces malversations a ainsi été tout récemment condamné.
Le Président de la République a par ailleurs pris l’initiative d’un référendum sur la fraude bancaire, car l’idée d’assainir les comptes de l’État par le biais de l’impôt ne le satisfait pas. Là encore, il s’agit d’une réaction populiste; de notre côté, nous avons essayé de trouver avec le FMI un accord pour que l’argent ainsi détourné ne soit pas imputé sur le compte de la dette extérieure de notre pays.
Notre gouvernement a donc pris des engagements et essaye d’obtenir des résultats. Je peux vous garantir que les coupables seront tous poursuivis et condamnés.
M. HUNKO (Allemagne), porte-parole du Groupe pour la gauche unitaire européenne (interprétation)
Je voudrais évoquer l’affaire Petrenko. Grigori Petrenko a été l’un de nos collègues: il a occupé les fonctions de rapporteur dans notre assemblée, où il était très estimé. Cela fait plus de deux ans qu’il est mis en cause, parce qu’il a protesté – de manière pourtant pacifique – contre la mainmise des oligarques. Demain ou après-demain, il doit être condamné à quatre ans et demi de prison.
Nous avons été nombreux à lui rendre visite et nous avons vraiment le sentiment qu’il y a en République de Moldova des prisonniers politiques. Quel est votre avis sur ce point? Voulez-vous être le Premier ministre d’un État qui détient des prisonniers politiques dans ses geôles?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
M. Petrenko est-il un prisonnier politique? La réponse est non. Il n’y a pas de prisonniers politiques en République de Moldova, qu’il s’agisse de M. Petrenko ou de qui que ce soit d’autre.
Je vous avoue que je ne connais pas tous les détails de cette affaire, ni d’autres affaires pendantes devant les tribunaux et qui feraient l’objet de discussions ici, au Conseil de l’Europe. Je voudrais dire néanmoins que le nombre d’affaires de ce type, rapporté aux plus de 220 000 affaires actuellement pendantes devant les tribunaux moldaves, est très faible.
Lorsque nous avons commencé à lutter contre la corruption, on nous a accusés de ne pas lancer de poursuites contre les personnalités de haut niveau. Nous avons ensuite élaboré une stratégie avec le Conseil de l’Europe que nous avons mise en œuvre afin de réformer l’institution judiciaire, et ces dix-huit derniers mois, des dizaines de procureurs, de juges, de présidents de conseils régionaux, de chefs d’agence, ont été poursuivis par la justice et condamnés. Et pourtant on accuse notre justice d’être sélective!
Nous sommes quelque peu perplexes: d’un côté, l’Europe nous dit qu’il faut lutter contre la corruption, et que c’est une condition nécessaire pour recevoir des financements, et d’un autre côté, avant même que l’un des principaux acteurs du scandale, M. Shor, ayant conduit au défaut des banques soit condamné, j’ai entendu des voix s’élever au sein du Parlement européen, prétendant que cette personne aussi devait être considérée comme un prisonnier politique! Nous ne comprenons pas bien cela. Il y a eu d’autres affaires impliquant des personnalités de haut niveau – je pense notamment à la condamnation d’un ancien Premier ministre: à chaque fois, dès que la décision a été rendue publique, toutes ces questions se sont comme évaporées.
Le principe de non-ingérence dans la procédure judiciaire est primordial pour notre gouvernement, qui le respecte scrupuleusement. Nous attendons la décision des tribunaux. Si nécessaire, nous agirons en utilisant les instruments à notre disposition, c’est-à-dire en amendant les lois en vigueur afin de veiller que les tribunaux de notre pays soient bel et bien indépendants.
LE PRÉSIDENT (interprétation)
Nous prenons à présent les questions par séries de trois.
Mme DURRIEU (France)
Monsieur le Premier ministre, la Moldavie jouit ici d’une grande sympathie. Dans le même temps, comme vous l’avez compris, nous avons quelques doutes liés aux problèmes de corruption. Votre venue a dissipé un certain nombre de ces doutes. Je, vous remercie, car les propos que vous avez tenus redonnent confiance en l’avenir de la Moldavie.
J’en viens à ma question: quels sont les derniers obstacles aux réformes, et surtout comment ferez-vous pour reprendre en main les médias qui me semblent contrôlés par les forces de l’argent et peut-être par la Fédération de Russie?
M. CORLATEAN (Roumanie) (interprétation)
Monsieur le Premier ministre, au nom de la délégation roumaine, je vous souhaite la bienvenue à Strasbourg. Vous avez présenté un rapport, écrit en roumain et en anglais, sur les réalisations de votre gouvernement en matière de lutte contre la corruption, de réforme de la justice et d’engagements européens. Dans tous ces domaines, il y a eu beaucoup d’évolutions positives.
Comment votre gouvernement entend-il mettre en œuvre les arrêts rendus par la Cour constitutionnelle de la République de Moldova, notamment sur l’utilisation des langues? Il a été reconnu, pour des raisons historiques, que c’est la langue roumaine qui devait être retenue comme langue d’État. Le gouvernement n’est-il pas obligé de respecter cette décision, qui est contraignante pour tous?
Mme CHRISTOFFERSEN (Norvège) (interprétation)
Monsieur le Premier ministre, le plan d’action du Conseil de l’Europe concernant la République de Moldova qui a été adopté récemment aborde un certain nombre de questions préoccupantes: la lutte contre la corruption, le renforcement de la transparence, le financement des partis et l’amélioration de l’indépendance du pouvoir judiciaire. D’après vous, quelles mesures décisives devraient être prises en priorité afin de dépolitiser les institutions?
M. Filip, Premier ministre de la République de Moldova (interprétation)
Pour ce qui est de la lutte contre la corruption, dont j’ai déjà parlé, je suis pour ma part absolument convaincu que si l’on veut obtenir de bons résultats, si l’on veut favoriser le développement économique et accroître le bien-être de nos citoyens, il est nécessaire non seulement de mettre en œuvre des incitations fiscales et de créer un environnement favorable aux investisseurs étrangers, mais aussi d’éliminer la corruption. Celle-ci peut être présente aussi bien au plus haut niveau que tout en bas de l’échelle, et prend des formes très diverses. Il est toujours possible d’améliorer notre politique en la matière: nous en sommes parfaitement conscients. Mais il faut reconnaître que nous avons déjà obtenu de bons résultats: c’est ce qui me donne de l’espoir pour l’avenir. Nous avons élaboré une stratégie de réforme de la justice, notamment du bureau du procureur, et nous avons vu émerger des affaires impliquant des personnalités de haut niveau.
Cette année, nos recettes fiscales ont été plus élevées de 30 %, alors que le PIB et le niveau des échanges sont restés les mêmes. Ce sont là les effets positifs des réformes engagées. Le processus n’est pas aisé, mais nous sommes engagés dans la bonne voie.
Pour ce qui est des médias, je sais que la liberté d’expression a donné lieu à des discussions en Europe. Mais on ne peut pas dire que les médias ne sont pas libres en République de Moldova. Il existe des chaînes de télévision d’opposition assez critiques à l’égard du gouvernement. Je n’ai pas réagi à leurs critiques, mais comment réagiriez-vous si une chaîne vous critiquait et critiquait votre propre famille de manière très dure en usant de termes que je n’oserais répéter? Sans doute les poursuivriez-vous. Pour ma part, je ne l’ai pas fait.
De même, il est arrivé qu’une personne se plaigne du fait qu’une chaîne de télévision avait été fermée. En fait, dès que cette chaîne a reçu de nouveaux financements, elle a pu rouvrir – ce qui est une bonne chose. Il est toujours facile de se faire passer pour une victime alors que l’on attend de recevoir de nouveaux financements!
Je puis donc vous assurer que la liberté des médias est bien réelle dans mon pays et que nous ferons de notre mieux pour maintenir cette liberté. Nous avons créé un groupe au sein du Parlement moldave qui travaille sur l’amélioration de la législation relative à l’audiovisuel. Nous bénéficions du soutien du Conseil de l’Europe en la matière.
Quant à l’arrêt rendu par la Cour constitutionnelle sur la langue roumaine, Monsieur Corlatean, je dois dire que, depuis ma naissance, je parle roumain et que je continue de m’exprimer en roumain au sein de ma famille. Vous noterez également que, depuis que j’ai pris mes fonctions de Premier ministre, le roumain est la langue officielle de notre site internet. Quoi qu’il en soit, il n’est pas dans nos habitudes, de discuter les décisions de la Cour constitutionnelle; nous les appliquons.
Les valeurs telles que la langue ou l’identité nationale sont trop souvent des sujets exploités par des responsables politiques pour diviser la société. Aussi ai-je lancé un appel aux responsables politiques moldaves pour leur demander de se concentrer sur ce qui unit notre société et sur ce qui peut aider notre pays à se développer.
Pour ce qui est de dépolitiser les institutions, le meilleur exemple que je pourrais citer est celui de la réforme du gouvernement dans laquelle nous nous sommes lancés et qui devrait être pleinement mise en œuvre d’ici à la fin du mois de juillet. Les postes au sein du gouvernement ne seront plus répartis en fonction des affiliations politiques. Seuls les ministres seront nommés sur une base politique. Ce sont les secrétaires d’État qui assureront la continuité, qui auront la mémoire institutionnelle. Tout ne dépendra pas des élections.
Nous avons cherché à faire de même lorsque nous avons adopté la loi relative au bureau du procureur afin de le rendre indépendant de toute influence politique.
Permettez-moi d’ajouter quelques éléments à propos des médias.
L’un des problèmes qui se posent encore est celui de la propagande. Nous avons donc élaboré un projet de loi afin de lutter contre cette dernière et j’espère que nous aurons bientôt éliminé ce problème. La propagande divise notre pays.
J’aimerais que vous me compreniez bien: nous aurons une discussion tout à fait sérieuse sur le sujet et nous aurons besoin de l’expertise et de tout le savoir-faire du Conseil de l’Europe. Il ne s’agit pas ici de fermer des chaînes de télévision, mais de veiller à ce que les programmes produits au niveau local et diffusés sur ces chaînes soient autres.
LE PRÉSIDENT (interprétation)
Mes chers collègues, il nous faut maintenant arrêter les questions à M. Filip, que je remercie vivement pour son allocution et ses réponses.
La République de Moldova est l’un de nos partenaires les plus solides en matière de coopération. Nous sommes heureux d’avoir pu discuter des initiatives en matière de réforme en vue de remplir vos obligations et engagements en tant qu’État membre.
Monsieur le Premier ministre, je vous souhaite le plein succès, à vous et au peuple de la République de Moldova.