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Rapport | Doc. 11466 | 18 décembre 2007

Projet de protocole additionnel à la Convention sur les Droits de l'Homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales

(Ancienne) Commission de la culture, de la science et de l'éducation

Rapporteur : M. Wolfgang WODARG, Allemagne

Résumé

Le protocole additionnel relatif aux tests génétiques à des fins médicales s’inspire des principes figurant dans la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine, afin de définir et de sauvegarder les droits fondamentaux des personnes concernées par les tests génétiques à des fins médicales. Des protocoles relatifs aux tests génétiques à d’autres fins que médicales, comme les assurances, sont en préparation.

L’Assemblée, quoique satisfaite en général du projet de protocole, recommande au Comité des Ministres de prendre en considération quelques amendements avant de l’ouvrir à la signature.

L’Assemblée regrette que 26 des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe ne soient pas parties à la Convention de bioéthique, ou ne l’aient pas encore ratifiée, et les presse de le faire le plus tôt possible.

A. Projet d’avis

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1. Le protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales est le quatrième de la série de protocoles additionnels à cet instrument, après ceux concernant respectivement l’interdiction du clonage d’êtres humains (1997), la transplantation d’organes et de tissus d’origine humaine (2001), et la recherche biomédicale (2004). L’Assemblée parlementaire se félicite de ce nouvel enrichissement de la convention.
2. L’Assemblée regrette que 26 des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe ne soient pas parties à la Convention de bioéthique, ou ne l’aient pas encore ratifiée, et les presse de le faire le plus tôt possible.
3. Des progrès remarquables ont été accomplis dans le domaine de la santé humaine grâce à la recherche en biologie et en médecine. La connaissance du génome humain a été une source d’avancées considérables, en particulier la mise au point des tests génétiques, qui permettent d’identifier les caractéristiques génétiques responsables d’une maladie ou intervenant dans son évolution.
4. Plusieurs centaines de tests génétiques sont actuellement utilisés et d’autres sont en cours d’élaboration. Les tests génétiques font de plus en plus partie intégrante de la pratique médicale, mais on assiste en même temps au développement d’une offre commerciale directe de tests génétiques en dehors de tout système de santé, ce qui peut poser des problèmes éthiques.
5. Le présent protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine s’inspire des principes figurant dans cet instrument, afin de définir et de sauvegarder les droits fondamentaux des personnes concernées par les tests génétiques à des fins médicales.
6. L’Assemblée note que le Comité directeur pour la bioéthique (CDBI) a adopté ce protocole à l’unanimité, au terme d’un examen détaillé.
7. Elle tient à signaler que ce n’est là que le premier d’une série de protocoles relatifs aux tests génétiques et elle suivra de près l’évolution du débat en la matière.
8. L’Assemblée, quoique satisfaite en général du projet de protocole actuel, croit cependant que celui-ci peut être amélioré et recommande donc que le Comité des Ministres considère les amendements suivants:
8.1. à l’article 2.1, ajouter le mot «uniquement» après le mot «effectués»;
8.2. à l’article 6, ajouter les mots «et l’indication médicale» après les mots «test génétique»;
8.3. à l’article 7.1, ajouter à la fin les mots «par un médecin ayant les qualifications appropriées»;
8.4. à l’article 8.2, ajouter les mots «ou d’exclure» après le mot «détecter»;
8.5. à l’article 8.2, ajouter les mots «ou d’exclure la présence d’un tel gène» après les mots «responsable d’une maladie»;
8.6. changer le premier paragraphe de l’article 10 comme suit: «Sous réserve de l’article 13 du présent protocole, un test génétique sur une personne n’ayant pas la capacité de consentir ne peut être effectué que pour son bénéfice direct».

B. Exposé des motifs, par M. Wolfgang Wodarg

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1. Le protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales est le quatrième de la série de protocoles additionnels à cet instrument, après ceux concernant respectivement l’interdiction du clonage d’êtres humains (1997), la transplantation d’organes et de tissus d’origine humaine (2001), et la recherche biomédicale (2004).
2. La Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine (STE no 164), dite aussi «Convention sur la bioéthique», ouverte à la signature en avril 1997, est entrée en vigueur en décembre 1999. Au total, 34 Etats membres l’ont signée, dont 21 l’ont ratifiée (voir l’annexe). On dénombre 13 signatures non suivies de ratification (dont huit datant de plus de dix ans) et 13 Etats membres n’ayant pas encore signé.
3. Dans de nombreux pays, la ratification de la convention nécessite la révision de différentes lois pour garantir l’entière conformité de la législation interne à cet instrument. Plusieurs pays sont en train de revoir leur législation en la matière et ont déclaré qu’ils ratifieraient la convention à la fin du processus.
4. Si certains Etats membres du Conseil de l’Europe n’ont pas signé ou pas ratifié la convention, c’est peut-être au motif qu’ils possédaient déjà une législation plus avancée dans ce domaine. En Allemagne, le parlement a considéré que le gouvernement ne pouvait s’en remettre à la convention pour se dispenser d’effectuer sa propre analyse de la situation. Toutefois, tant la convention que ses protocoles disposent clairement que les Parties peuvent appliquer des règles encore plus protectrices.
5. Le Protocole sur l’interdiction du clonage d’êtres humains, ouvert à la signature en janvier 1998, est entré en vigueur en mars 2001. Au mois de novembre 2007, 31 Etats l’avaient signé, dont 16 l’avaient ratifié (voir l’annexe). Ce protocole est le seul instrument international légalement contraignant qui interdise le clonage d’êtres humains, et il devra donc être ratifié dans les meilleurs délais par le plus grand nombre possible d’Etats membres afin, d’une part, de prévenir les pratiques non éthiques dans nos pays membres et, d’autre part, de démontrer qu’il existe un consensus européen sur cette question d’importance universelle.
6. Le Protocole sur la transplantation d’organes et de tissus d’origine humaine, ouvert à la signature en janvier 2002, est entré en vigueur en mai 2006. Au mois de novembre 2007, 20 Etats l’avaient signé, dont sept l’avaient ratifié (voir l’annexe).
7. Le Protocole sur la recherche biomédicale, ouvert à la signature en janvier 2005, est entré en vigueur en septembre 2007. Au mois de novembre 2007, 21 Etats membres l’avaient signé, dont cinq l’avaient ratifié (voir l’annexe).
8. Dans sa Recommandation 1160 (1991) sur l’élaboration d’une convention de bioéthique, l’Assemblée parlementaire recommandait au Comité des Ministres «d’envisager une convention-cadre contenant un texte principal avec des principes généraux et des protocoles additionnels sur des aspects spécifiques. La convention doit présenter une formule souple en ce qui concerne sa forme mais ne doit pas constituer le dénominateur commun le plus petit quant à son contenu». Il est préoccupant que, dans certains pays, le processus de ratification de la convention n’ait pas été inscrit en bonne place à l’ordre du jour du parlement et du gouvernement, et il faut espérer que les Etats qui n’ont pas encore signé la convention et ses protocoles le feront dès que possible afin de lever les doutes concernant leur attachement à l’application des principes énoncés dans ces textes.

1. Tests génétiques

9. Des progrès remarquables ont été accomplis sur le chapitre de la santé humaine grâce à la recherche en biologie et en médecine. A cet égard, la génétique est une des sciences perçues comme les plus prometteuses. La connaissance du génome humain a été une source d’avancées considérables, en particulier la mise au point des tests génétiques, qui permettent d’identifier les caractéristiques génétiques responsables d’une maladie (maladies monogéniques) ou intervenant dans son évolution (maladies multifactorielles dont le développement subit aussi l’influence d’autres facteurs). Ces tests permettent de poser ou de confirmer un diagnostic en ce qui concerne une personne présentant déjà des symptômes. Mais ils rendent possible aussi l’identification des mutations génétiques responsables soit d’une maladie qui pourrait se développer dans la suite de la vie, soit d’une prédisposition à une maladie sans aucun symptôme.
10. L’identification précoce de caractéristiques génétiques au moyen d’un test peut se révéler avantageuse pour la santé du patient si elle permet de prendre des mesures préventives ou de limiter les risques en modifiant le comportement, le mode de vie ou l’environnement de l’intéressé. Cependant, cette possibilité reste très limitée avec la plupart des maladies génétiques. En outre, les résultats d’une analyse génétique sont souvent complexes et, dans de nombreux cas, il est difficile aux personnes responsables de comprendre ce qu’ils impliquent.
11. Plusieurs centaines de tests génétiques sont actuellement utilisés et d’autres sont en cours d’élaboration. Les tests génétiques font de plus en plus partie intégrante de la pratique médicale, mais on assiste en même temps au développement d’une offre commerciale directe de tests génétiques en dehors de tout système de santé, ce qui peut poser des problèmes éthiques.

2. Le protocole additionnel

12. Le présent protocole additionnel à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine relatif aux tests génétiques à des fins médicales s’appuie sur les principes figurant dans cet instrument afin d’assurer la protection des personnes concernées dans le domaine particulier des tests génétiques uniquement à des fins médicales.
13. Le protocole a pour objet de définir et de sauvegarder les droits fondamentaux des personnes concernées par les tests génétiques à des fins médicales. D’autres protocoles additionnels (ou d’autres recommandations) porteront sur les tests génétiques effectués à des fins extramédicales (par exemple, la souscription d’un contrat d’assurance ou un recrutement).
14. Voici quelques-uns des plus importants principes énoncés dans le protocole:
  • interdiction de toute discrimination, notamment fondée sur des caractéristiques génétiques;
  • accès équitable à des services génétiques de qualité appropriée;
  • primauté de l’être humain;
  • utilité clinique des tests;
  • supervision médicale individualisée;
  • droit à l’information et aux conseils d’ordre génétique;
  • nécessité d’un consentement libre et informé, susceptible d’être retiré à tout moment;
  • protection des personnes incapables de donner un tel consentement;
  • respect de la vie privée.
15. Qu’ils soient publics ou privés, les services génétiques ont pour but de répondre aux besoins d’individus et de familles qui souhaitent savoir s’ils risquent de contracter ou de transmettre une maladie ou un trouble présentant une composante génétique, ou qui sont atteints d’une telle maladie ou d’un tel trouble. Cela consiste, en particulier, à donner des informations et, au besoin, des conseils d’ordre génétique, à effectuer des tests génétiques et à en interpréter les résultats, à prodiguer des soins aux intéressés et à leur famille, y compris des soins préventifs, ainsi qu’à former les personnes appelées à assurer des services génétiques.
16. Le projet de protocole définit des impératifs de qualité à trois niveaux distincts: le test génétique lui-même, le laboratoire et les personnes assurant des services génétiques.
17. Aux termes du projet de protocole, il incombe à l’Etat d’assurer l’existence d’un tel système, qui garantit la fiabilité d’un test génétique relatif à une maladie déterminée, c’est-à-dire l’exactitude et la reproductibilité des résultats de ce test quant à l’identification de certaines caractéristiques génétiques liées à la maladie en question.
18. Du point de vue du médecin, toute analyse médicale doit être médicalement indiquée et servir à une thérapie médicale. Elle doit être effectuée sous la supervision individualisée d’un médecin lié par le serment d’Hippocrate. Les tests génétiques sont astreints à d’autres impératifs de procédure. Ils doivent s’accompagner d’un avis et de conseils médicaux, par exemple sur les conséquences de leurs résultats. En outre, il faut respecter le droit du patient de n’être pas informé.
19. Le projet de protocole prévoit, dans certaines circonstances, des exceptions à la règle de la supervision médicale individualisée, mais ces exceptions sont limitées aux tests génétiques sans incidences importantes sur la santé des personnes concernées ou des membres de leur famille et sans conséquences notables en matière de choix de procréation.
20. Il peut se poser un problème lorsque quelqu’un n’est pas en mesure de consentir à faire l’objet d’un test. Le projet de protocole énonce les règles à respecter pour assurer la protection des personnes dans ce cas.
21. La protection des données est une autre question importante à cet égard, de même que la discrimination pour des motifs génétiques. La plupart des pays ont déjà des règlements traitant du consentement des patients à des actes médicaux, de la protection des données et de la lutte contre la discrimination. C’est pourquoi les normes existantes en matière de protection des données et les autres textes juridiques pertinents doivent s’appliquer aux tests génétiques.
22. Le dépistage génétique peut poser des problèmes, lui aussi: un seul test peut servir au dépistage de plus de 200 états médicaux potentiels, tandis qu’un patient ne peut recevoir de conseils utiles et suffisants à propos d’un tel nombre de résultats.
23. Le projet de protocole contient des dispositions assez classiques, mais constituant sans doute la première formulation juridiquement contraignante de n’importe quel dépistage, et non pas seulement du dépistage génétique. Un exemple bien connu – et dont les résultats sont excellents – est le dépistage effectué à Chypre avec le test génétique de la bêta-thalassémie, maladie extrêmement grave et très fréquente dans plusieurs îles de Méditerranée, qui ne se déclare que si les parents du patient (pouvant fort bien être sains) ont transmis tous deux l’anomalie à leur enfant. Ce test est proposé à tous ceux qui se marient dans l’île. On peut évidemment refuser de s’y soumettre. Une fois ce dépistage mis en place, on a constaté que le nombre de personnes affectées par la maladie en question retombait presque à zéro (ainsi que le nombre d’avortements subis pour éviter la naissance d’un enfant malade).

3. Conclusion

24. Le protocole additionnel en cours d’examen n’est pas exhaustif, mais d’autres suivront pour couvrir le reste de la question. Il assure une protection équilibrée et appropriée aux personnes qui subissent un test génétique à des fins médicales. Il vient donc compléter utilement la série des textes juridiques produits par le Conseil de l’Europe dans le domaine de la biomédecine.
25. Il pourrait cependant être amélioré par quelques amendements.

Annexe – Etat des signatures et ratifications de la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine

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Ce document est disponible sur le site internet du Conseil de l’Europe à l’adresse suivante: http://www.coe.int/fr/web/conventions/full-list/-/conventions/treaty/164.

Commission chargée du rapport: commission de la culture, de la science et de l’éducation.

Renvoi en commission: Doc. 11440 et Renvoi no 3376 du 1er octobre 2007.

Projet de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 10 décembre 2007.

Membres de la commission: M. Jacques Legendre (Président), Baronne Hooper, M. Wolfgang Wodarg, Mme Anne Brasseur (Vice-Présidents), M. Hans Ager, M. Kornél Almássy, Mme Donka Banović, M. Lars Barfoed, M. Rony Bargetze, M. Walter Bartoš, Mme Marie-Louise Bemelmans-Videc, M. Radu Mircea Berceanu, M. Levan Berdzenishvili, Mme Oksana Bilozir, Mme Guðfinna Bjarnadóttir, Mme Maria Luisa Boccia, Mme Margherita Boniver, M. Ioannis Bougas, M. Ivan Brajović, M. Osman Coşkunoğlu, M. Vlad Cubreacov, M. Ivica Dačić, M. Joseph Debono Grech, M. Ferdinand Devínsky, M. Daniel Ducarme, Mme Åse Gunhild Woie Duesund, M. Detlef Dzembritzki, Mme Anke Eymer, M. Relu Fenechiu, Mme Blanca Fernández-Capel, Mme Maria Emelina Fernández-Soriano, M. Axel Fischer, M. José Freire Antunes, M. Ioannis Giannellis-Theodosiadis, M. Stefan Glǎvan, M. Vladimir Grachev, M. Andreas Gross, M. Raffi Hovannisian, M. Rafael Huseynov, M. Fazail İbrahimli, Mme Halide İncekara, Mme Evguenia Jivkova, M. Morgan Johansson, Mme Liana Kanelli, Mme Cecilia Keaveney, M. Ali Rashid Khalil, M. József Kozma, M. Jean-Pierre Kucheida, M. Markku Laukkanen, M. Yves Leterme, Mme Jagoda Majska-Martinčević, Mme Milica Marković, M. Tomasz Markowski, Mme Muriel Marland-Militello, M. Andrew McIntosh, M. Ivan Melnikov, Mme Maria Manuela Melo, Mme Assunta Meloni,M. Paskal Milo, Mme Christine Muttonen, Mme Miroslava Nĕmcová, M. Edward O’Hara, M. Kent Olsson, M. Andrey Pantev, Mme Antigoni Papadopoulos, M. Azis Pollozhani, Mme Majda Potrata, M. Lluís Maria de Puig, M. Zbigniew Rau, Mme Anta Rugāte, M. Indrek Saar, M. André Schneider (remplaçant: M. Philippe Nachbar), M. Urs Schweitzer, M. Vitaliy Shybko, Mme Geraldine Smith (remplaçant: M. Robert Walter), Mme Albertina Soliani, M. Yury Solonin, M. Christophe Spiliotis-Saquet, M. Valeriy Sudarenkov, M. Petro Symonenko, M. Mehmet Tekelioğlu, M. Piotr Wach, M. Emanuelis Zingeris.

N.B. Les noms des membres présents à la réunion sont indiqués en gras.

Voir 8e séance, 24 janvier 2008 (adoption du projet d’avis amendé); et Avis no 267.