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Rapport | Doc. 12201 | 12 avril 2010

Migrants et réfugiés: un défi permanent pour le Conseil de l’Europe

(Ancienne) Commission des migrations, des réfugiés et de la population

Rapporteure : Mme Doris FIALA, Suisse, ADLE

Résumé

Les problèmes que posent les migrations internationales et l’asile ont aujourd’hui des conséquences considérables pour toutes les sociétés européennes et méritent donc une plus grande attention de la part des 47 Etats membres du Conseil de l’Europe. L’Organisation a une valeur particulière à ajouter en renforçant la protection des droits de l’homme des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées, ainsi qu’en élaborant des politiques de gestion des migrations et en favorisant la diversité culturelle et l’intégration au niveau paneuropéen. Les questions de migration et d’asile ne concernent pas seulement des processus mais aussi des personnes, et le Conseil de l’Europe a un rôle qu’il est le seul à pouvoir jouer sous l’angle des droits de l’homme.

L’Assemblée recommande au Comité des Ministres de formuler une stratégie à moyen terme sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées en Europe, afin de rationaliser les priorités de l’Organisation dans ces domaines et d’améliorer la cohésion et le fonctionnement internes ainsi que la communication externe. A cet effet, elle demande la mise en place d’un projet transversal du Conseil de l’Europe sur les migrants, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées.

L’Assemblée réitère aussi son appel à la création d’un nouveau comité intergouvernemental ayant pour mandat permanent d’examiner les questions relatives à l’asile, aux réfugiés et aux personnes déplacées, afin de remplacer le Comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial, des réfugiés et des apatrides (CAHAR). Ce comité devra travailler en étroite coopération avec le Comité européen sur les migrations (CDMG) et d’autres comités intergouvernementaux. En outre, l’Assemblée souligne la nécessité pour le Conseil de l’Europe de renforcer l’impact et la visibilité des activités du Conseil de l’Europe en la matière, notamment par une coopération internationale accrue avec, entre autres, l’Union européenne, le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’Organisation internationale du travail (OIT), le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et des organisations non gouvernementales nationales et internationales.

A. Projet de recommandation

(open)
1. Les migrations continuent de façonner l’économie, la culture et la société européennes. La mondialisation, avec ses disparités croissantes, et la récession économique récente ajoutent à cela de nouveaux problèmes auxquels l’Union européenne, mais également les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe doivent s’attaquer.
2. Les défis que doit tout particulièrement relever le Conseil de l’Europe vont du renforcement des droits et de la protection des migrants, des réfugiés, des demandeurs d’asile et des personnes déplacées à la nécessité de contribuer à la mise en place d’une stratégie cohérente et coordonnée de gestion des migrations et à l’amélioration de la réactivité face aux nouvelles tendances.
3. L’Assemblée parlementaire estime que le Conseil de l’Europe devrait donner un degré de priorité bien plus élevé à la résolution de ces problèmes, notamment dans le cadre de son processus de réforme. Le Conseil de l’Europe est une organisation fondée sur des valeurs, qui a été créée pour protéger les droits de toutes les personnes en Europe. Les migrants, les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées sont souvent les personnes les plus vulnérables d’Europe. Il est nécessaire de renforcer leurs droits, mais également de veiller à ce que ces droits soient garantis dans la pratique.
4. Le Conseil de l’Europe devrait privilégier les secteurs dans lesquels il peut apporter une valeur ajoutée au niveau paneuropéen. Ses principaux points forts sont ses normes en matière de droits de l’homme et de prééminence du droit. Il présente également l’avantage de pouvoir allier les expériences de ses Etats membres, qui incluent des pays d’origine, de transit et de destination. Tandis que l’Union européenne fait porter l’essentiel de son action sur les processus migratoires, le Conseil de l’Europe devrait se concentrer explicitement et en priorité sur les personnes impliquées dans ces processus et étudier les questions de migrations, d’asile et de personnes déplacées essentiellement sous l’angle des droits de l’homme dans le contexte des processus migratoires.
5. L’Assemblée est d’avis que, pour la définition des priorités et des actions futures, l’Organisation devrait affiner les priorités établies au Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du Conseil de l’Europe tenu en 2005 à Varsovie, ainsi qu’à la Conférence des ministres responsables des questions de migration tenue en 2008 à Kiev. Elle devrait également tenir compte des recommandations de 2005 de la Commission mondiale sur les migrations internationales (CMMI) et des dispositions du Programme de Stockholm de l’Union européenne (2010-2014).
6. L’Assemblée estime important que le Conseil de l’Europe formule sa propre stratégie à moyen terme en matière de migrations, d’asile et de personnes déplacées en Europe. Elle doit rassembler l’essentiel du travail qui a été effectué par les divers organes et secteurs de l’Organisation et rationaliser ses priorités en vue de la création d’un espace européen au sein duquel les migrants et les personnes ayant besoin d’une protection bénéficieraient d’un traitement conforme aux droits de l’homme et au principe de la prééminence du droit, ainsi que d’un accès aux droits fondamentaux et aux recours judiciaires. Plus spécifiquement, cette stratégie devrait renforcer la protection des droits fondamentaux des migrants, demandeurs d’asile, réfugiés et personnes déplacées à toutes les grandes étapes de leurs déplacements; promouvoir la diversité culturelle et accroître le niveau d’intégration des migrants et des réfugiés dans les sociétés européennes; améliorer l’élaboration et la mise en œuvre des politiques dans les Etats membres afin de gérer l’impact à long terme des migrations sur la société; multiplier les activités dans les domaines de la lutte contre la xénophobie, la discrimination et la traite des êtres humains et améliorer la cohésion et la collaboration intra-institutionnelles de l’Organisation dans le domaine des migrations, de l’asile et des personnes déplacées.
7. S’appuyant sur la vaste expérience acquise au sein de tous les secteurs de l’Organisation, l’Assemblée considère qu’il est nécessaire de mettre en place un projet transversal du Conseil de l’Europe sur les migrants, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées en Europe, principalement axé sur la protection de leurs droits et la promotion de leur intégration.
8. L’Assemblée se félicite du travail accompli par le Comité européen sur les migrations (CDMG) sur la protection des droits de l’homme et de la dignité des migrants vulnérables, ainsi que sur le renforcement de la position des migrants et de la cohésion sociale dans son programme d’action pour 2009-2012. Elle le félicite également pour son initiative visant à promouvoir la cohérence entre migrations, développement et intégration en encourageant le dialogue entre les pays d’origine, de transit et de destination. L’Assemblée rend également hommage à l’action d’autres comités intergouvernementaux, du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux et des mécanismes de suivi qui ont, en particulier, traité des questions importantes relatives aux droits de l’homme et à l’intégration. De plus, il convient de mettre en valeur le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe pour ses positions de principe sur de nombreuses questions relatives aux migrations, à l’asile et aux personnes déplacées.
9. L’Assemblée se félicite également de ce que le Comité des Ministres ait traité de nombreuses questions relatives aux migrations, à l’asile et aux personnes déplacées mais regrette qu’il n’ait fait aucun progrès dans l’examen des demandes de création d’un comité pour remplacer l’ancien Comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial, des réfugiés et des apatrides (CAHAR), qui fournissait à l’Organisation une expertise très utile sur les questions relatives à l’asile, aux réfugiés et aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays. Un tel comité pourrait développer des liens étroits avec le CDMG et d’autres comités intergouvernementaux, veillant à ce que, d’un côté, les garanties juridiques dans le processus d’asile et de personnes déplacées soient examinées sérieusement et que, de l’autre, l’impact de ces garanties soit étudié de manière concrète.
10. Compte tenu de ce qui précède, l’Assemblée recommande au Comité des Ministres:
10.1. de créer un poste de coordinateur des migrations, de l’asile et des personnes déplacées qui serait chargé de préparer une stratégie à moyen terme sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées et de mettre en œuvre un projet transversal sur les migrants, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées dans les sociétés européennes;
10.2. d’établir un nouveau comité intergouvernemental ayant pour mandat permanent d’examiner les questions relatives à l’asile, aux réfugiés et aux personnes déplacées afin de remplacer le Comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial, des réfugiés et des apatrides (CAHAR);
10.3. de soutenir le Comité européen sur les migrations (CDMG) et les autres comités directeurs et organes du Conseil de l’Europe dans leurs travaux cherchant à élaborer des politiques migratoires cohérentes et à protéger les droits de ceux qui sont concernés par les processus de migrations, d’asile et de déplacements à l’intérieur de leur propre pays.
11. L’Assemblée recommande que, lors de l’élaboration d’une stratégie à moyen terme sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées, le Comité des Ministres tienne compte des questions prioritaires suivantes et de la nécessité:
11.1. de signer, ratifier et mettre en œuvre toutes les conventions du Conseil de l’Europe touchant les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les personnes déplacées, comprenant entre autres la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5), la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales (STE no 157), la Convention du Conseil de l’Europe relative au statut juridique du travailleur migrant (STE no 93), la Convention européenne sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local (STE no 144), la Convention européenne sur la nationalité (STE no 166), la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie en relation avec la succession d’Etats (STCE no 200) et la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197). Dans des circonstances appropriées, le Comité des Ministres devrait envisager de réviser les conventions que trop peu d’Etats sont prêts à signer ou ratifier;
11.2. de combler les lacunes dans les normes juridiques actuelles du Conseil de l’Europe en développant de nouveaux instruments de droit souple et de droit contraignant et des activités concrètes concernant les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les personnes déplacées. A cet égard, le Comité des Ministres est encouragé à tenir compte, entre autres, des questions spécifiques suivantes, dont certaines font l’objet d’anciennes recommandations de l’Assemblée:
11.2.1. inclure le droit de demande d’asile dans la Convention européenne des droits de l’homme;
11.2.2. réviser la Charte sociale européenne pour veiller à ce que tous les migrants réguliers tombent dans son champ d’application et que des droits minimaux garantissant la dignité humaine soient au moins inclus pour les migrants en situation irrégulière;
11.2.3. élaborer de nouvelles normes et lignes directrices sur l’intégration des migrants dans les sociétés européennes;
11.2.4. œuvrer en faveur de normes communes offrant des droits minimaux aux migrants en situation irrégulière et proposer des stratégies pour s’occuper des migrants en situation irrégulière qui ne peuvent ou ne veulent pas être renvoyés;
11.2.5. compléter les Règles pénitentiaires européennes par des règles européennes pour les centres de rétention de migrants et de demandeurs d’asile;
11.2.6. élaborer des lignes directrices sur les alternatives à la détention des migrants en situation irrégulière et des demandeurs d’asile;
11.2.7. envisager la nécessité d’élaborer des lignes directrices sur le principe de «non-refoulement» compte tenu du nombre croissant de cas d’expulsion dont est saisie la Cour européenne des droits de l’homme et des problèmes liés aux interventions en mer;
11.2.8. envisager la nécessité d’un mécanisme de contrôle de la qualité et de la cohérence des décisions en matière d’asile en Europe;
11.2.9. élaborer des lignes directrices sur les retours volontaires pour compléter les lignes directrices du Comité des Ministres sur les retours forcés, ainsi que des lignes directrices sur l’application des accords de réadmission;
11.2.10. élaborer des lignes directrices sur la réintégration des personnes renvoyées dans leur pays d’origine, qu’il s’agisse de retours volontaires ou forcés;
11.2.11. trouver des solutions durables pour le retour, l’intégration locale ou la réinstallation des personnes déplacées et garantir la protection de leurs droits;
11.3. de promouvoir une coopération européenne et internationale plus étroite impliquant les pays d’origine, de transit et de destination;
11.4. de renforcer la coopération et l’assistance dans le domaine des migrations, de l’asile et des personnes déplacées:
11.4.1. en soutenant un programme d’assistance pour les Etats membres, financé par des contributions volontaires, en vue de renforcer leurs capacités dans le domaine des politiques migratoires et de la planification, notamment pour les pays d’origine et de transit;
11.4.2. en soutenant un programme d’assistance, financé par des contributions volontaires, permettant aux Etats membres qui sont des pays de destination de bénéficier de l’expérience d’autres Etats membres dans le traitement de la question délicate de l’intégration;
11.4.3. en renforçant la coopération avec des acteurs clés dans le domaine des migrations et de l’asile, notamment le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’Organisation internationale du travail (OIT), le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et des organisations non gouvernementales nationales et internationales;
11.4.4. en renforçant la coopération avec l’Union européenne, en particulier compte tenu du Programme de Stockholm récemment adopté et du travail des agences telles que Frontex, l’Agence des droits fondamentaux et le Bureau européen d’appui en matière d’asile, qui doit prochainement être créé;
11.5. de faire davantage d’efforts pour aider les migrants à connaître non seulement leurs droits, mais aussi leurs obligations, pour assurer une meilleure intégration et une meilleure acceptation par le pays hôte;
11.6. de renforcer l’impact et la visibilité des activités du Conseil de l’Europe en matière de droits des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées:
11.6.1. en publiant un recueil des normes du Conseil de l’Europe relatives aux droits de l’homme applicables aux migrants, demandeurs d’asile, réfugiés et personnes déplacées;
11.6.2. en apportant un soutien à un site internet interactif sur les migrations et l’asile partagé par les différents secteurs du Conseil de l’Europe travaillant dans ce domaine;
11.6.3. en soutenant et en renforçant le travail du Groupe de travail informel sur les migrations du Conseil de l’Europe, qui est un mécanisme de liaison entre les différents secteurs de l’Organisation impliqués dans les questions de migrations et d’asile.
12. L’Assemblée encourage le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe à continuer d’accorder la priorité dans son travail à la question des droits des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées.
13. L’Assemblée invite le Comité des Ministres à l’informer dans les deux ans des progrès réalisés en matière de mise en œuvre de la présente recommandation.

B. Exposé des motifs, par Mme Fiala, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. Le présent rapport a été conçu en réponse aux recommandations du rapport de la Commission mondiale sur les migrations internationales intitulé «Les migrations dans un monde interconnecté: nouvelles perspectives d’action», qui a été publié en 2005 à l’initiative du Secrétaire général des Nations Unies de l’époque, Kofi Annan, en vue de l’établissement de lignes directrices sur l’action publique en ce domaine qui soient à la hauteur des enjeux posés par les migrations internationales dans le contexte de la mondialisation.
2. Le rapport de la commission mondiale recensait six grands axes d’intervention – la gestion des migrations du travail, le renforcement de l’impact des migrations internationales sur l’économie et le développement, le traitement des migrations irrégulières, le renforcement de la cohésion sociale par le biais de l’intégration, la protection des droits des migrants, et l’amélioration de la gouvernance au moyen de la cohérence, du renforcement des capacités et de la coopération – qui nécessitent une action aux niveaux mondial, régional et national.
3. Cinq ans après la publication du rapport de la commission mondiale, il convient d’établir un bilan des activités du Conseil de l’Europe dans les domaines susmentionnés en analysant les résultats obtenus et en dégageant des pistes pour l’avenir. On trouvera dans les chapitres ci-dessous un certain nombre de recommandations qui devraient amener le Conseil de l’Europe à fixer des priorités pour le traitement des questions relatives aux migrations et à l’asile. En outre, en proposant un cadre d’action pour les demandeurs d’asile et les réfugiés, ce rapport examine aussi le plan d’action en dix points du HCR sur la protection des réfugiés et les mouvements migratoires mixtes. Il prend en compte également la situation des personnes déplacées et le rôle du Conseil de l’Europe à cet égard.
4. Compte tenu de l’élargissement de l’Union européenne et des efforts entrepris par cette dernière pour normaliser ses politiques d’immigration et d’asile à l’aide du Pacte européen sur l’immigration et l’asile, et de la politique européenne de voisinage, la question est parfois posée de savoir si le Conseil de l’Europe doit effectivement s’occuper de ces sujets. Le présent rapport montre que les deux institutions européennes disposent de compétences propres bien distinctes et remplissent des rôles complémentaires à l’égard des divers enjeux que les questions de migrations et d’asile représentent pour les sociétés européennes, même si ces compétences et ces rôles devraient être mieux coordonnés. En conséquence, tout en envisageant les politiques et actions que le Conseil de l’Europe pourrait mener à l’avenir dans ce domaine, le présent rapport examinera en parallèle l’action proposée dans le programme de Stockholm de l’Union européenne «Une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens», qui définit les grandes orientations de l’Union pour 2010-2014 dans les domaines de la liberté, de la sécurité et de la justice, y compris en matière de migrations et d’asile.
5. Il va sans dire que le Conseil de l’Europe doit focaliser son travail sur les domaines dans lesquels il dispose d’un avantage comparatif et peut apporter une valeur ajoutée. Le rapporteur se félicite à cet égard du vaste programme de réforme lancé récemment par le nouveau Secrétaire Général du Conseil de l’Europe et exprime l’espoir que les recommandations que l’Assemblée formulera à la suite du présent rapport fourniront la trame d’un projet de rationalisation des activités du Conseil de l’Europe dans le domaine des migrations, de l’asile et des personnes déplacées.
6. Intrinsèquement liées aux problèmes mondiaux importants comme le développement, la croissance économique, la pauvreté et les droits de l’homme, les migrations posent de graves défis. Certains migrants sont soumis à l’exploitation et leurs droits fondamentaux sont bafoués; l’intégration dans les pays d’accueil est parfois difficile; les Etats ne sont pas toujours en mesure d’attirer les migrants dont ils ont besoin et s’ouvrent aux migrations irrégulières. De plus, les migrations privent parfois les pays d’origine de compétences importantes. Pour toutes ces raisons, et d’autres encore, les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe ne peuvent ignorer les questions se rapportant aux migrations. Il importe que tous ces Etats travaillent ensemble, en tant que partenaires égaux, à traiter les enjeux actuels liés aux migrations.
7. Lors de la préparation du présent rapport, le rapporteur a envoyé un questionnaire à l’ensemble des directions et services du Conseil de l’Europe travaillant dans le domaine des migrations et de l’asile et a effectué une visite d’information à Strasbourg les 23 et 24 mars 2009 pour discuter avec les parties intéressées. Le rapporteur remercie tous ceux qui, au sein de l’Organisation, lui ont communiqué des informations pour l’élaboration de ce rapport, que ce soit par écrit ou en se rendant disponibles pour des échanges de vues.

2. Principaux défis en matière de migration et d’asile du point de vue du Conseil de l’Europe

8. Le continent européen a toujours connu des mouvements migratoires. Initialement point de départ de mouvements migratoires, l’Europe est aujourd’hui clairement un continent hôte. Elle accueille la plupart des migrants: plus d’un tiers des migrants du monde y vivent, ce qui représente environ 9 % de la population totale de l’Europe 
			(1) 
			«Les
migrations en Europe: l’expérience de la CEB», résumé, Banque de
développement du Conseil de l’Europe. D’après le rapport de la Commission
mondiale, il y avait 56,1 millions de migrants en Europe (y compris
la partie européenne de l’ex-URSS) en 2005., avec des écarts très marqués selon les pays ou les régions.
9. Les mouvements migratoires continuent à modeler l’Europe, bien que les pressions migratoires évoluent. L’aire du Conseil de l’Europe comprend des pays d’origine, de transit et de destination, un nombre croissant de pays remplissant conjointement les trois fonctions. Beaucoup de pays qui n’étaient pas traditionnellement des pays de destination le sont devenus, et il est de plus en plus important pour l’Europe de disposer d’une politique cohérente de l’immigration afin d’attirer les migrants dont elle a besoin, de les intégrer pleinement et de lutter contre les migrations irrégulières.
10. Les migrations à destination de l’Europe sont inévitables: les disparités démographiques, les moyens de transport, l’intégration économique régionale et les écarts de revenus entre le monde développé et le monde en voie de développement sont autant de facteurs qui favorisent la mobilité vers l’Europe. Cette mobilité va sans doute continuer à s’accroître en prenant des formes multidirectionnelles et circulaires, qui se substitueront aux flux à sens unique qui prédominaient auparavant.
11. Les frontières intérieures de l’Europe et celles de l’Union européenne sont des frontières poreuses, en dépit des efforts de l’Union européenne et de son agence aux frontières extérieures, Frontex. Les migrations irrégulières sont en pleine expansion. Il y aurait aujourd’hui entre 5 et 6 millions de migrants irréguliers dans les pays de l’Union et quelque 500 000 arrivants entreraient chaque année illégalement sur le territoire de l’Union.
12. L’absence de voies légales de migration appropriées a également conduit à la multiplication des réseaux de traite et d’immigration clandestine, réseaux qui sont par nature dangereux et fondés sur l’exploitation. Malgré les efforts déployés par l’Union européenne et les gouvernements de plusieurs pays européens pour lutter contre les migrations irrégulières, ces 5 ou 6 millions de migrants irréguliers ne pourront pas tous faire l’objet de retours forcés ou volontaires. Que faire de ces personnes? Cette question, qui touche aux principes de l’Etat de droit et aux droits de l’homme, reste un défi majeur pour l’Europe.
13. Les flux migratoires présentent aussi un caractère de plus en plus complexe et composite. Ils englobent aussi bien des migrants irréguliers que des personnes à la recherche d’une protection internationale, qui empruntent souvent les mêmes itinéraires, moyens de transport ou réseaux de passeurs et de trafiquants. Les Etats ont répondu aux défis posés par ces mouvements migratoires mixtes et irréguliers principalement par un renforcement des mesures de contrôle, souvent en négligeant d’incorporer dans les procédures – comme l’interception en mer, les contrôles frontaliers, la rétention ou le renvoi vers le pays d’origine – des sauvegardes et mesures de protection suffisantes.
14. L’augmentation de la demande en travailleurs migrants de sexe féminin est telle que les femmes sont de plus en plus incitées à aller chercher du travail à l’étranger. Aujourd’hui, la moitié des migrants internationaux sont des femmes, qui laissent souvent leurs enfants et leurs familles derrière elles. En Europe, bon nombre d’entre elles sont employées dans le secteur du travail domestique. Elles ont pour la plupart des conditions de travail précaires et sont souvent en situation irrégulière. Elles sont particulièrement exposées à la violence, à l’exploitation et à la traite et ont besoin de toute urgence d’une protection renforcée.
15. D’une manière générale, en dépit de la ratification par les Etats membres du Conseil de l’Europe d’un grand nombre de traités internationaux et européens garantissant le respect des droits de l’homme et la dignité des personnes placées sous leur juridiction, trop de migrants, de demandeurs d’asile et de réfugiés sont victimes de discriminations, d’exploitation et d’abus. Ils restent parmi les membres les plus vulnérables de la société. Pour les migrants en situation irrégulière, l’accès aux droits se heurte à des difficultés particulières en cas de rétention, d’expulsion ou de renvoi vers leur pays d’origine. Demander l’asile est devenu de plus en plus difficile dans le contexte des flux migratoires mixtes. Les migrants sont souvent la cible de discours haineux, de harcèlements et de violences. Ils sont souvent rendus injustement responsables de la criminalité et des difficultés économiques et subissent une discrimination largement répandue 
			(2) 
			Message
du Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon à l’occasion
de la Journée internationale des migrants, 18 décembre 2009. .
16. Il existe manifestement un décalage entre la perception du public et la réalité, décalage qui tient en grande partie aux migrations irrégulières. De ce fait, l’intégration des migrants et des réfugiés dans la société est un enjeu majeur pour l’Europe. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles il est si important de ne pas parler uniquement des droits des migrants mais aussi de leurs obligations. En outre, le fait que les questions d’immigration soient souvent abordées sous l’angle de la sécurité publique, dans un cadre assimilant les migrants aux criminels, ne favorise pas l’intégration des migrants et des réfugiés et crée un climat propice à la xénophobie, au racisme et à l’intolérance. Par ailleurs, cela empêche les migrants d’accéder aux services essentiels et met gravement en danger leur santé, leur sécurité et leurs droits.
17. Dans ce contexte, le véritable défi pour les hommes politiques et les décideurs est de parvenir à envisager les flux migratoires et la présence des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés sur leur territoire sous un jour nouveau. Ce changement de perspective s’impose d’autant plus face à la crise économique mondiale actuelle, qui aggrave la vulnérabilité des migrants; ils en sont souvent les premières victimes et les plus gravement touchées. Les crises antérieures ont montré que la limitation de l’immigration constitue une réponse inefficace. L’évolution démographique et l’intégration économique croissante pèsent sur les besoins en matière d’emploi et de mobilité.
18. Cela étant dit, le Conseil de l’Europe en tant qu’organe essentiel de protection des droits de l’homme dans toute l’Europe a un rôle particulier à jouer dans la défense des droits fondamentaux et la protection du bien-être de tous les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés, quels que soient les raisons de leur déplacement ou leur statut dans le pays d’accueil, puisqu’ils sont tous exposés au risque d’exploitation et d’abus. Bien que l’Union européenne réaffirme sans cesse que les politiques d’immigration et d’asile doivent être conformes aux normes des droits de l’homme et respecter la dignité humaine, ses politiques sont plus axées sur les processus qui permettent de protéger le marché commun intérieur que sur les personnes, c’est-à-dire les migrants, les demandeurs d’asile et les réfugiés en tant que tels.
19. Le Conseil de l’Europe devrait, par contre, mettre explicitement en avant sa volonté de placer les individus au cœur du problème et poursuivre une approche des questions de migration et d’asile fondée sur les droits de l’homme. Il devrait axer tout particulièrement ses efforts sur le renforcement des droits des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile, en encourageant leur intégration effective. Le Conseil de l’Europe devrait continuer à lutter contre la xénophobie et les pratiques discriminatoires et s’attaquer aux représentations négatives de ces personnes, en surveillant, le cas échéant, les évolutions dans ce domaine. Ce faisant, il devrait coopérer avec les organes pertinents de l’Union dans le cadre du mémorandum d’accord de 2007, afin de continuer à renforcer les normes de protection des droits de l’homme dans les politiques d’immigration et d’asile de l’Union.
20. Le Conseil de l’Europe ne doit pas non plus oublier que, sur son territoire, 2,5 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur de leur pays du fait de conflits prolongés. Il est nécessaire de relancer les efforts en vue d’un règlement politique de ces conflits et de mettre en place des cadres légaux et normatifs solides pour permettre aux personnes déplacées de jouir pleinement de leurs droits fondamentaux, améliorer leurs conditions de vie et leur donner la possibilité de s’intégrer – même temporairement – sur leur lieu de déplacement ou ailleurs dans le pays. L’incapacité persistante à s’attaquer aux causes fondamentales de ces déplacements, l’impunité pour les crimes commis et la non-prise en compte des intérêts des personnes déplacées entraînent un risque politique grave, comme on l’a vu en août 2008, lors de la guerre sur le territoire géorgien. Ces conflits non réglés peuvent s’embraser de nouveau à tout moment et conduire à de nouveaux déplacements.
21. Enfin, le changement climatique, qui entraîne une dégradation grave des conditions environnementales, des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes et l’épuisement des ressources naturelles, crée aussi de nouveaux défis et fait peser de nouvelles pressions sur la mobilité humaine et la protection internationale, auxquels il conviendrait de répondre à la fois aux niveaux mondial et régional. La communauté mondiale doit prendre des mesures adéquates de prévention, d’adaptation et d’atténuation des impacts afin de permettre aux pays «sensibles» de réduire leur vulnérabilité aux conséquences des catastrophes environnementales et de gérer l’évolution des processus environnementaux. Le Conseil de l’Europe pourrait jouer un rôle proactif à cet égard, en veillant à l’actualisation des cadres opérationnels et de protection internationaux, afin qu’aucune catégorie de personnes contraintes de fuir ou de partir à la recherche d’une vie plus sûre ne soit privée d’une protection nationale ou internationale effective.

3. Activités du Conseil de l’Europe dans les secteurs prioritaires recensés par le rapport de la Commission mondiale sur les migrations internationales

3.1. Un monde de travail: les migrants dans un marché du travail mondialisé

22. Afin de gérer les migrations internationales et les migrants dans un marché de l’emploi de plus en plus mondialisé, la commission mondiale invite les Etats et autres acteurs concernés à tenir dûment compte de la tendance à l’accroissement des migrations dans la formulation des politiques migratoires. Elle leur recommande à cet égard de rechercher des approches plus réalistes et flexibles des migrations internationales, fondées sur la reconnaissance de la capacité des travailleurs migrants à combler certaines pénuries sur le marché mondial du travail. Elle appelle à mettre en place des programmes de migration temporaire permettant de répondre aux besoins économiques des pays d’origine et de destination, et à passer en revue les obstacles actuels à la mobilité du personnel hautement qualifié. Elle juge en outre nécessaire de multiplier les efforts visant à créer des emplois et des sources de revenus durables dans les pays en développement, afin que leurs citoyens ne se sentent pas contraints de migrer.
23. Le Conseil de l’Europe s’occupe depuis longtemps des questions de gestion des migrations, notamment des voies légales de migration de la main-d’œuvre et du statut du travailleur migrant, ainsi que des problèmes croissants générés par le trafic de migrants en Europe. En 1998, le Conseil de l’Europe a été la première organisation européenne à engager un effort systématique de définition d’une stratégie de gestion des flux migratoires en s’appuyant sur quatre principes intégrés: l’organisation (afin d’optimiser les opportunités et avantages pour les migrants individuels et les sociétés d’accueil et de minimiser le trafic et les mouvements illégaux), la protection, l’intégration et la coopération. Cette stratégie, qui faisait de la protection des droits fondamentaux la base de la gestion des migrations, portait en grande partie sur le renforcement de la coopération entre les pays d’origine et de destination ainsi que sur la réussite de l’intégration des populations immigrées, une attention particulière étant portée au respect plein et entier des droits fondamentaux et de la diversité des migrants.
24. La stratégie de gestion des flux migratoires du Conseil de l’Europe est à l’origine de trois recommandations politiques du Comité des Ministres portant sur l’admission, les droits et les obligations des étudiants migrants, et la coopération avec les pays d’origine (CM/Rec(2006)9), sur les projets de vie en faveur des mineurs migrants non accompagnés (CM/Rec(2007)9 et sur le codéveloppement et les migrants œuvrant au développement dans leur pays d’origine (CM/Rec(2007)10). De plus, en 2006, le Comité européen sur les migrations (CDMG) a publié un document de fond intitulé «Vers une stratégie des flux migratoires: les enjeux pour les pays d’origine», qui contient des indications détaillées sur les moyens d’établir un dialogue mieux concerté entre pays de destination et pays d’origine (qu’il s’agisse d’Etats membres ou de pays extérieurs à l’Europe).
25. La 8e Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables des questions de migration (Kiev, 4-5 septembre 2008) a recentré les objectifs de gestion des flux migratoires sur la promotion et la protection des droits fondamentaux des migrants et la garantie de leurs droits à l’égalité de traitement et à l’égalité des chances, qui suppose de prêter une attention particulière aux groupes de migrants vulnérables, le renforcement du dialogue et de la coopération entre pays d’accueil, pays de transit et pays d’origine, particulièrement à l’intérieur de l’Europe, et le développement d’une plus grande cohérence entre migrations, développement et intégration 
			(3) 
			Déclaration finale
de la 8e Conférence du Conseil de l’Europe
des ministres responsables des questions de migration, Kiev, 4-5 septembre 2008,
CDMG (2008) 43 fin..
26. Ces objectifs ont pris la forme de deux programmes d’activités pour 2009-2012 
			(4) 
			CDMG, Project descriptions 2009-2012 (extraits),
23 janvier 2009, CDMG (2009) Misc 3.: «Renforcer l’autonomisation des migrants et la cohésion sociale» et «Protéger les droits fondamentaux et la dignité des migrants vulnérables». Le Conseil de l’Europe s’est également beaucoup intéressé à la question du sort des mineurs migrants non accompagnés. En 2007, le Comité des Ministres a adopté une recommandation sur les projets de vie des mineurs migrants non accompagnés (CM/Rec(2007)9) visant à développer les capacités des mineurs en leur permettant d’acquérir et de renforcer les compétences nécessaires pour devenir indépendants, responsables et actifs dans la société.
27. Le rapporteur se félicite du travail mené pour le développement de la stratégie de gestion des migrations du Conseil de l’Europe, stratégie qui a évolué avec les priorités du moment. Elle considère que la tâche première du Conseil de l’Europe est de veiller à ce que les flux migratoires et les politiques en ce domaine ne conduisent pas à des violations des droits de l’homme. Cela présuppose le respect de la Convention européenne des droits de l’homme ainsi que des articles 18 et 19 de la Charte sociale européenne révisée vis-à-vis de toutes les personnes en déplacement, à toutes les étapes de leur déplacement, quel que soit leur statut légal.
28. Le rapporteur note aussi avec satisfaction le travail réalisé par le CDMG dans le cadre de l’approche intégrée des migrations économiques, de la cohésion sociale et du développement, adopté lors de la Conférence ministérielle de Kiev en 2008, qui a pour ambition de réunir les pays d’origine, de transit et de destination par le dialogue et autour d’initiatives conjointes de développement, ce qui constitue sans aucun doute la meilleure base de coopération dans un continent aussi divers que l’Europe.
29. Pour assurer à la stratégie de gestion des flux migratoires un caractère durable, il importe de créer tout d’abord des voies légales de migration (c’est-à-dire la possibilité pour les entreprises de recruter directement) qui tiennent compte des besoins véritables des sociétés en termes démographiques et de main-d’œuvre hautement ou peu qualifiée. L’Europe doit définir clairement ses besoins et identifier les migrants qu’elle doit chercher à attirer. Ces besoins peuvent être établis au moyen de politiques ciblées, flexibles et pouvant s’adapter à des situations qui évoluent.
30. La tâche, cependant, n’est pas facile. L’Union européenne s’efforce depuis des années d’établir un cadre général durable pour la politique européenne des migrations et d’asile, dans un but de gestion proactive des fluctuations des flux migratoires, d’équilibre et de coopération. Le programme de Stockholm 2010-2014 met fortement l’accent sur le renforcement du dialogue et des liens de partenariat entre l’Union et les pays tiers, en intégrant la question des migrations à la politique extérieure de l’Union. En outre, avec le Pacte européen sur l’immigration et l’asile adopté l’an dernier en tant qu’élément de la future politique commune de migration et d’asile, les Etats membres se sont engagés à organiser l’immigration légale en tenant compte des priorités, des besoins et des capacités d’accueil des Etats membres, et à renforcer le contrôle de l’immigration irrégulière par le renvoi ou la réadmission dans les pays d’origine ou de transit. Ce pacte prévoit aussi le renforcement de l’efficacité des contrôles frontaliers, l’établissement d’une procédure d’asile commune et la mise en place d’un statut uniforme pour les personnes qui obtiennent la protection internationale. Ces objectifs sont extrêmement ambitieux.
31. Néanmoins, dans l’optique du Conseil de l’Europe, les politiques de l’Union présentent certaines limites sur lesquelles l’Organisation, avec ses 47 Etats membres, ne doit pas fermer les yeux mais chercher au contraire à coopérer étroitement avec l’Union afin de compléter les politiques paneuropéennes par ses activités propres.
32. Dans sa Recommandation 1624 (2003) sur la politique commune en matière de migration et d’asile, l’Assemblée parlementaire soulignait qu’une politique commune au sein de l’Union pourrait aboutir à des écarts considérables entre pays membres et non membres de l’Union, les Etats membres s’engageant dans une certaine direction tandis que les Etats non membres suivraient chacun leur propre voie. Cela nuirait au renforcement de l’unité entre les Etats membres du Conseil de l’Europe, qui constitue un objectif fondamental de ce dernier.
33. Afin de parvenir à la création d’un espace européen où les migrants et les personnes ayant besoin de protection bénéficient d’un traitement conforme aux droits de l’homme et au principe de la prééminence du droit, il convient tout particulièrement de continuer à développer une approche permettant d’intégrer les droits de l’homme dans les politiques de migration et d’asile à l’échelon national et européen, en harmonisant ces politiques non seulement au niveau de l’Union, mais aussi dans l’ensemble de l’espace du Conseil de l’Europe. Cette approche devrait prendre en compte les préoccupations en matière de droits de l’homme à toutes les étapes des procédures, y compris le départ, l’interception en mer, les contrôles aux frontières, les dispositifs de contrôle des migrations irrégulières, la rétention et le retour. Le Conseil de l’Europe est bien placé pour mener à bien cette tâche.
34. Action recommandée: Au vu de ce qui précède, le rapporteur propose que le Conseil de l’Europe continue à s’appuyer dans son travail sur les orientations définies en 2005 lors du 3e Sommet des chefs d’Etat, et en 2008 lors de la Conférence ministérielle de Kiev, et établisse une stratégie commune spécifique à moyen terme sur les migrations, l’asile et les déplacements de population en Europe, incluant des normes minimales à appliquer par tous les Etats membres du Conseil de l’Europe, indépendamment de leur appartenance ou non à d’autres organisations internationales, et sous réserve de l’existence de dispositions plus favorables dans certains Etats membres. Cette stratégie commune viserait:
  • à renforcer l’application de la base conventionnelle des instruments juridiques internationaux existants applicables aux migrants et aux demandeurs d’asile, comme la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5), la Convention du Conseil de l’Europe sur le statut du travailleur migrant (STE no 93), la Convention de l’ONU de 1990 sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention de l’OIT de 1949 sur les travailleurs migrants (révisée) (STE no 97), la Convention de l’OIT de 1975 sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires) (STE no 143) et la Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés;
  • à élaborer, le cas échéant, de nouvelles normes afin d’améliorer la protection des droits de l’homme des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées dans leur pays à toutes les étapes importantes de leur déplacement;
  • à développer les voies légales de migration par la promotion de programmes de migration temporaire et circulaire;
  • à améliorer l’intégration des migrants et des réfugiés dans la société, notamment par la mise en valeur du respect de la diversité culturelle et la lutte contre la discrimination, la xénophobie, l’intolérance et le racisme;
  • à promouvoir la cohérence entre migrations, développement et intégration.

3.2. Migration et développement: réaliser le potentiel de la mobilité humaine

35. S’agissant des questions de migration et de développement, le rapport de la commission mondiale recommande aux Etats et aux parties prenantes: de développer les liens de coopération entre pays riches ou pauvres en main-d’œuvre afin de promouvoir le développement d’un réservoir mondial de professionnels; de faciliter les envois de fonds des personnes travaillant hors de leur pays à l’aide de systèmes de virement plus simples et moins coûteux et en combinant l’investissement de ces fonds avec les politiques macroéconomiques des pays d’origine; d’encourager les diasporas à promouvoir le développement en économisant et en investissant dans leur pays d’origine et en participant à des réseaux de savoir transnationaux; de formuler des politiques et des programmes permettant d’optimiser l’impact des retours et des migrations circulaires sur le développement.
36. Le Conseil de l’Europe a joué un rôle significatif au niveau mondial dans la promotion de solutions nouvelles aux problèmes de développement et de codéveloppement. En 2007, le CDMG a apporté sa contribution au Forum mondial sur la migration et le développement en publiant un document sur les migrations et les diasporas 
			(5) 
			CDMG (2007) 32.. Les recommandations du Comité des Ministres sur le codéveloppement et les migrants œuvrant au développement dans leur pays d’origine (CM/Rec(2007)10) et sur l’admission, les droits et obligations des étudiants migrants et la coopération avec les pays d’origine (CM/Rec(2006)9) méritent également d’être prises en compte dans la discussion sur les liens entre migrations et développement.
37. En 2008, la déclaration finale de la Conférence ministérielle de Kiev a défini des mesures spécifiques visant à renforcer la contribution des migrants et des diasporas au développement dans les pays d’origine et de destination, et leur participation à des programmes de codéveloppement. Ces mesures comprennent notamment: l’élaboration de mesures visant à contrer les effets, dans les pays d’origine, de la perte des compétences des migrants, l’incitation à investir dans l’éducation et la formation dans les pays d’origine, la facilitation des transferts de capitaux, des compétences et des technologies par les migrants vers leur pays d’origine et le renforcement des initiatives de codéveloppement et du rôle des diasporas de migrants en tant qu’acteurs du développement dans les relations internationales.
38. En 2009, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1696 et la Recommandation 1890 sur l’engagement des diasporas européennes: le besoin de réponses gouvernementales et intergouvernementales, appelant les Etats membres à élaborer des politiques de l’immigration globales qui considèrent les diasporas comme des vecteurs du développement, à promouvoir le rôle institutionnel des diasporas par la voie du dialogue et de consultations régulières et à mettre en place des mesures d’incitation à l’intention des communautés ou représentants de diasporas prêts à s’engager dans le développement de leur pays d’origine.
39. Action recommandée: Etant donné le rôle joué jusqu’ici par le Conseil de l’Europe vis-à-vis des politiques en ce domaine, nonobstant les ressources limitées dont dispose l’Organisation pour traiter ces questions, le rapporteur pense qu’il serait utile d’intégrer les questions de développement dans la stratégie commune à moyen terme proposée en matière de migrations, d’asile et de déplacement de population, mais avec un mandat limité couvrant uniquement certains aspects du développement et du codéveloppement, la formation et la promotion des migrations circulaires. Un surcroît d’attention devrait aussi être accordé au resserrement des liens avec les diasporas européennes, d’une part via la création d’un conseil des Européens à l’étranger, comme l’a suggéré l’Assemblée parlementaire à plusieurs reprises 
			(6) 
			Recommandations 1410
(1999), 1650 (2004) et 1890 (2009) de l’Assemblée., et, d’autre part, par l’harmonisation des mesures de type incitatif, en particulier la facilitation des envois de fonds et l’institutionnalisation des relations entre les Etats membres et leurs diasporas.

3.3. Le défi des migrations irrégulières: souveraineté nationale et sécurité des individus

40. Les migrations irrégulières sont un problème extrêmement complexe dû à la fois à l’absence d’emplois et d’autres opportunités dans les pays d’origine (facteurs d’incitation) et à la demande de main-d’œuvre bon marché et flexible dans les pays de destination (facteurs d’attraction). L’augmentation des migrations irrégulières depuis plusieurs années tient aussi à l’absence de possibilités de migration légale; elle est en outre facilitée par les réseaux criminels qui tirent profit du transport illégal de migrants et de la traite des êtres humains. Le développement des communautés «diasporiques» et des réseaux sociaux transnationaux favorise également le déplacement des individus d’un pays à l’autre sous des formes illégales.
41. La lutte contre les migrations irrégulières est aujourd’hui certainement l’une des tâches les plus difficiles pour les pays européens. Le droit souverain des Etats à décider qui peut entrer et séjourner sur leur territoire est solidement établi, mais le fait d’être entré dans un pays en enfreignant la législation sur l’immigration ne peut justifier que les migrants soient privés de leurs droits fondamentaux, tels que prévus par les instruments des droits de l’homme, et n’affecte aucunement l’obligation pour un Etat de protéger les migrants en situation irrégulière. Aux termes des traités et du droit coutumier existants, les Etats sont soumis à l’obligation minimale de faire respecter les droits fondamentaux de tout être humain.
42. Outre qu’elles soulèvent une question de protection, les migrations irrégulières constituent un problème particulièrement sensible qui tend à polariser l’opinion en opposant fréquemment ceux que préoccupent le contrôle des frontières et la sécurité nationale à ceux dont le souci principal est la protection des droits de l’homme des migrants concernés. Dans le discours politique et dans celui des médias, les migrations irrégulières sont souvent décrites comme un danger pour l’Etat. Lorsqu’elles impliquent des activités de corruption et de criminalité organisée, les migrations irrégulières peuvent effectivement devenir un danger pour la sécurité publique. Cela est particulièrement vrai lorsque l’entrée illégale dans un pays est facilitée par des passeurs ou des trafiquants d’êtres humains ou lorsque des groupes criminels luttent entre eux pour le contrôle du travail des migrants après leur arrivée dans le pays. L’arrivée dans un pays d’un nombre important de migrants irréguliers et de demandeurs d’asile peut poser un défi grave aux capacités de l’Etat à gérer ce type de situation. En cas de forte attention de la part des médias, les migrations irrégulières peuvent aussi miner la confiance du public dans l’intégrité et l’efficacité des politiques de migration et d’asile de l’Etat. Les migrations irrégulières peuvent donc affaiblir l’Etat et nuire à sa capacité à développer des voies de migration légale.
43. Les migrations irrégulières peuvent également mettre en danger la sécurité individuelle des migrants eux-mêmes. On estime que 2 000 migrants meurent chaque année en tentant de traverser la Méditerranée de l’Afrique vers l’Europe. En outre, de par leur situation illégale, les migrants irréguliers vivent dans une insécurité permanente et sont exposés à toutes sortes de risques, notamment l’exploitation et l’expulsion. Dans la plupart des pays, ils sont aussi exclus de l’ensemble des services qui leur sont effectivement offerts, y compris les soins de santé d’urgence, ou ont beaucoup de mal à y accéder.
44. En cherchant de quelle façon répondre aux défis ci-dessus, la commission mondiale a recensé cinq domaines dans lesquels les Etats et d’autres parties prenantes pourraient engager des efforts particuliers. Ces domaines sont les suivants: l’ouverture d’un débat objectif sur les effets négatifs des migrations irrégulières et sur leur prévention; une meilleure prise en compte des droits de l’homme dans le dialogue et la coopération interétatiques; la création de possibilités supplémentaires de migration légale et la répression des employeurs qui embauchent des migrants en situation irrégulière; la lutte contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains; et le respect des droits de l’homme des migrants, de la procédure d’asile et des principes de protection des réfugiés.
45. En tant que principale organisation intergouvernementale des droits de l’homme sur le continent européen, le Conseil de l’Europe a un rôle particulier à jouer dans la promotion des droits des migrants irréguliers, même si cela est politiquement difficile. Ces droits couvrent notamment la dignité humaine, l’intégrité physique ainsi que la sécurité, la protection à l’égard du racisme et de la discrimination, et les droits sociaux minimaux.
46. Parmi les travaux réalisés dans ce domaine, les contributions les plus pertinentes à ce jour sont les 20 principes directeurs sur le retour forcé (CM(2005)40addfinalE), adoptés en 2005 par le Comité des Ministres sur recommandation de l’Assemblée parlementaire, et les projets de vie en faveur des mineurs migrants non accompagnés (CM/Rec(2007)9), qui visent à encourager la conception et la mise en œuvre de projets durables pour le retour et la réintégration des enfants. Pendant les dernières années, l’Assemblée parlementaire a adopté plusieurs résolutions et recommandations sur les droits des migrants irréguliers et, en particulier, l’arrivée massive de migrants irréguliers, les boat people, le trafic, l’exploitation des migrants irréguliers, les programmes de régularisation, les programmes de retour, la légalité de la rétention et les normes minimales concernant les conditions de rétention des migrants irréguliers. Ces questions, ainsi que d’autres connexes, sont aussi des sujets de préoccupation du Commissaire aux droits de l’homme, du Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), du Comité européen sur les migrations (CDMG) et d’autres organes intergouvernementaux du Conseil de l’Europe.
47. D’autres documents méritent d’être mentionnés à cet égard: en 2006, la Direction générale de la cohésion sociale a publié l’étude «Migrants irréguliers: accès aux droits sociaux minimaux», dans laquelle elle a formulé différentes recommandations sur la prestation de services dans les domaines du logement, de l’éducation, de la sécurité sociale et de l’aide sociale, ainsi que sur les conditions équitables d’emploi et la régularisation. En 2008, le CDMG a, pour sa part, publié deux séries de rapports sur les politiques nationales relatives aux migrants irréguliers en vue d’identifier les meilleures normes et les moyens les plus efficaces d’améliorer la coopération entre pays d’origine et pays d’accueil. Les conclusions de cette étude des politiques nationales n’ont pas encore été rendues publiques à ce jour. Plus récemment, le Commissaire aux droits de l’homme a publié un document intitulé «La criminalisation des migrations en Europe: quelles incidences pour les droits de l’homme?», qui appelle les Etats membres du Conseil de l’Europe à inverser la tendance croissante à criminaliser les migrations et à adopter une approche conforme aux droits de l’homme à l’égard des migrations irrégulières.
48. Le rapporteur est néanmoins d’avis que le Conseil de l’Europe n’a pas encore exploité pleinement son potentiel pour ce qui est de la fixation et de la mise en œuvre de normes pour le traitement des migrants en situation irrégulière. Elle partage les préoccupations exprimées par le Commissaire aux droits de l’homme à propos du développement et de la mise en œuvre de la politique d’immigration de l’Union européenne, et notamment des procédures applicables au contrôle des frontières, à la rétention et au retour des migrants irréguliers, conformément au programme de Stockholm.
49. Action recommandée: Le rapporteur juge important que le Conseil de l’Europe adopte une position proactive – comme il l’a fait à maintes reprises dans le passé – et développe ses propres normes communes et des principes d’action audacieux afin de garantir que le traitement des migrants irréguliers est effectivement fondé sur des droits. Ces normes et principes devraient comprendre:
  • des règles applicables à la rétention des migrants irréguliers, sur le modèle des Règles pénitentiaires européennes, des lignes directrices sur les programmes de retour volontaire concernant les migrants irréguliers et les demandeurs d’asile, des dispositions de sauvegarde des droits de l’homme dans les accords de réadmission et des mesures de protection des droits de l’homme au passage des frontières;
  • l’engagement d’inverser la tendance actuelle à la criminalisation des migrations;
  • la prise en compte des besoins de protection spécifiques des catégories les plus vulnérables – comme les mineurs non accompagnés, les enfants de migrants irréguliers et les femmes, en particulier les victimes de la traite – qui devraient être considérées comme des victimes et non comme des migrants irréguliers;
  • l’amélioration de l’accès aux droits sociaux; à cet égard, la Charte sociale européenne révisée devrait être actualisée afin de préciser que les migrants irréguliers doivent avoir accès aux droits minimaux garantissant le respect de la dignité humaine;
  • la régularisation des migrants irréguliers: les migrants irréguliers ne peuvent pas tous être forcés à retourner dans leur pays ou n’y retourneront pas tous volontairement. Il est donc essentiel de définir l’attitude à adopter à l’égard des millions de migrants irréguliers restants et d’examiner les options existantes pour régulariser leur situation (soit à l’aide de programmes ponctuels de régularisation, soit par la voie des demandes individuelles ou d’autres méthodes) et/ou de garantir à ces personnes au moins certains droits minimaux.
50. Le rapporteur invite aussi le CDMG à présenter, dès que possible, les conclusions de l’analyse des politiques nationales relatives aux migrants irréguliers, dans un but de mise en commun des pratiques exemplaires.
51. Le rapporteur reconnaît la nécessité de trouver des dispositifs permettant de réduire les migrations irrégulières et de renvoyer les migrants irréguliers dans leur pays d’origine. Parallèlement aux questions de protection des droits de l’homme, le Conseil de l’Europe devrait examiner aussi les moyens de soutenir les accords de réadmission et de les rendre plus efficaces, tout en garantissant le respect des droits de l’homme. Le rapporteur juge en outre importantes la tenue d’un débat ouvert entre pays d’origine, de transit et de destination sur les causes essentielles des migrations irrégulières, et la définition de programmes de formation et de soutien à l’intention des personnes qui sont en contact direct avec les migrants en situation irrégulière.
52. Afin d’examiner effectivement ces différents aspects, le rapporteur propose la mise en place d’un projet transversal spécifique du Conseil de l’Europe consacré aux enjeux des migrations irrégulières ou, éventuellement, de traiter ces questions dans le cadre d’un projet transversal plus large sur les migrants, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées dans les sociétés européennes.
a. Migration irrégulière et asile
53. Le rapport de la commission mondiale n’examine pas spécifiquement la question de l’asile comme telle; il évoque cependant l’asile en relation avec les flux migratoires mixtes et le risque d’une assimilation de la question de l’asile à celle des migrations irrégulières, qui aboutirait à mettre en danger les droits des personnes qui cherchent à obtenir le statut de réfugié.
54. D’importants liens existent effectivement entre migrations irrégulières et asile: premièrement, les mouvements en provenance d’un pays peuvent inclure à la fois des personnes qui répondent aux conditions d’accès à l’asile et d’autres qui n’y répondent pas, surtout lorsque le pays en question est affecté simultanément par des violations des droits de l’homme, un conflit armé, l’instabilité politique et un effondrement de l’économie. Deuxièmement, un grand nombre de demandeurs d’asile se déplacent de manière illégale, souvent en se servant de réseaux de trafic de migrants, car ils ne peuvent obtenir les papiers nécessaires pour voyager légalement. Troisièmement, certains migrants n’ayant manifestement pas besoin d’une protection internationale déposent néanmoins une demande d’asile à leur arrivée dans un pays afin de prolonger au maximum le délai au terme duquel ils peuvent faire l’objet d’une décision de rapatriement. Enfin, les migrants qui quittent leur pays pour des raisons économiques peuvent tomber dans le dénuement et se trouver exposés à des violations des droits de l’homme lorsqu’ils sont en transit et nécessiter protection et assistance, même s’ils n’ont pas de motifs valables pour prétendre au statut de réfugiés.
55. Comme le souligne la commission mondiale, l’institution de l’asile ne devrait pas être remise en cause par les efforts qu’engagent les Etats pour enrayer les migrations irrégulières. L’article 31 de la Convention de l’ONU de 1951 sur les réfugiés stipule que ces derniers ne peuvent faire l’objet de sanctions pénales du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers dans le pays, sous réserve qu’ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables pour justifier leur entrée ou leur séjour irréguliers. Préoccupée par le statut indéterminé qui est fréquemment celui des demandeurs d’asile pendant des mois et parfois des années du fait de l’arriéré des dossiers à traiter, la commission appelle instamment tous les Etats à mettre en place des procédures rapides, équitables et efficaces pour statuer sur l’octroi du statut de réfugié. Dans les situations d’arrivées en masse, elle recommande aux Etats d’examiner la possibilité d’accorder de prime abord le statut de réfugié aux nouveaux arrivants.
56. Il existe actuellement de grandes disparités dans la manière dont les 47 Etats membres du Conseil de l’Europe accueillent les réfugiés et les demandeurs d’asile, tiennent compte de leurs besoins en matière de protection et traitent leurs demandes. Tout en se félicitant du projet de l’Union européenne, qui prévoit la mise en place d’un système européen commun d’asile (SECA) dans les 27 Etats membres d’ici à 2012 et d’un bureau européen d’appui en matière d’asile (European Asylum Support Office, EASO) en 2010, le rapporteur considère essentiel d’assurer l’harmonisation des règles d’asile et de veiller à leur application systématique dans tous les Etats membres du Conseil de l’Europe.
57. Reconnaissant la qualité et la cohérence des décisions d’asile comme un enjeu majeur dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, l’Assemblée parlementaire a adopté récemment une résolution (Résolution 1695 (2009)) et une recommandation (Recommandation 1889 (2009)) à ce sujet. Elle souligne que les très faibles taux d’acceptation des demandes d’asile dans certains pays ou pour certains groupes de demandeurs d’asile sont dus à différents problèmes comme les difficultés à accéder à la procédure d’asile, l’insuffisance des garanties procédurales, des interprétations restrictives et divergentes des critères d’éligibilité, un manque d’informations objectives et fiables sur le pays d’origine, un défaut d’appréciation des faits, des pressions politiques ou un manque de formation du personnel. L’Assemblée invite le Comité des Ministres à élaborer des lignes directrices pour remédier aux difficultés soulignées ci-dessus.
58. Au fil des années, le Comité des Ministres a adopté un certain nombre de normes paneuropéennes, entre autres des recommandations couvrant la formation des fonctionnaires en charge des procédures d’asile, la rétention des demandeurs d’asile, le retour des demandeurs d’asile déboutés ainsi que la protection subsidiaire et temporaire 
			(7) 
			Voir le site www.coe.int/T/E/Legal_Affairs/Legal_cooperation/Foreigners_and_citizens/Asylum,_réfugiés_and_stateless_persons/..
59. La protection des demandeurs d’asile en Europe a été tout particulièrement renforcée par l’exécution de la Convention européenne des droits de l’homme et notamment de son mécanisme (Règle 39 – Mesures provisoires) visant à empêcher l’extradition des personnes susceptibles de subir un traitement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme. Cette mesure est contraignante pour l’ensemble des Etats membres; sa non-application constitue une violation des obligations internationales de l’Etat en matière de droits de l’homme et une atteinte au principe de non-refoulement prévu dans le droit d’asile.
60. L’augmentation rapide des requêtes invoquant la Règle 39 soumises à la Cour européenne des droits de l’homme (concernant le plus souvent des mesures d’expulsion/d’extradition) est particulièrement préoccupante. Ce nombre est passé d’environ 1 000 en 2007 à plus de 3 000 en 2008 et à 2 083 en 2009 (dont 621 ont été satisfaites). Toutefois, cela ne constitue que la partie visible de l’iceberg compte tenu du nombre de requêtes potentielles; la Cour et le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe devront par conséquent examiner les mesures à prendre pour traiter au mieux l’afflux croissant de ces requêtes. L’Assemblée prépare actuellement un rapport sur le sujet et adressera au Comité des Ministres des recommandations supplémentaires à ce propos.
61. Ces dernières années, la pression exercée sur les Etats membres du Conseil de l’Europe pour qu’ils traitent les demandes d’asile rapidement est devenue de plus en plus forte. En 2005, l’Assemblée parlementaire a adopté la Résolution 1471 (2005) sur les procédures d’asile accélérées dans les Etats membres du Conseil de l’Europe. Elle y recommandait de n’appliquer les procédures d’asile accélérées qu’à titre exceptionnel et y soulignait que ces procédures risquent de nuire à la qualité et à la cohérence des décisions. En 2008, le Comité directeur pour les droits de l’homme (CDDH) a préparé les Lignes directrices sur la protection des droits de l’homme dans le contexte des procédures d’asile accélérées. Le rapporteur se félicite que le Comité des Ministres ait décidé d’aborder ce sujet important. Malheureusement, ces lignes directrices ne tiennent pas compte de certaines des recommandations de l’Assemblée. En particulier, elles n’indiquent pas clairement que ce type de procédure doit rester l’exception en pratique et ne recommandent pas aux Etats membres de s’abstenir d’imposer automatiquement et systématiquement des délais courts pour le dépôt d’une demande d’asile, contrairement à ce que l’Assemblée préconisait compte tenu de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Jabari c. Turquie 
			(8) 
			Jabari
c. Turquie (Requête no 40035/98),
arrêt du 11 juillet 2000..
62. Dans ce contexte, le rapporteur regrette que les appels répétés de l’Assemblée au Comité des Ministres pour qu’il veille à ce que le droit d’asile soit intégré à la Convention européenne des droits de l’homme 
			(9) 
			La
Recommandation de l’Assemblée 1440 (2000) appelle le Comité des
Ministres à «engager une action en vue de l’incorporation du droit
d’asile dans la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales et à faire rapport sur les progrès réalisés
dans l’accomplissement de cet objectif dans un délai d’un an». n’aient pas été suivis. Elle comprend les difficultés qui empêchent les Etats membres d’envisager actuellement une telle modification de la Convention; cependant, il convient de ne pas perdre de vue cet objectif, étant donné l’importance du droit d’asile dans la jurisprudence de la Convention.
63. Le rapporteur déplore également la dissolution en 2006 du Comité ad hoc d’experts sur les aspects juridiques de l’asile territorial, des réfugiés et des apatrides (CAHAR), qui a privé le Conseil de l’Europe de son groupe d’experts pour le suivi et l’élaboration de nouvelles normes en matière d’asile, de réfugiés et de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays. A maintes reprises, l’Assemblée parlementaire a recommandé au Comité des Ministres de mettre en place au sein du Conseil de l’Europe un nouveau comité permanent qui aurait pour mission d’examiner les questions en rapport avec l’asile et les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays. L’Organisation devrait inscrire cette création au rang de ses grandes priorités car un tel comité a une responsabilité et un rôle majeurs à jouer dans l’amélioration des normes de protection des demandeurs d’asile et des réfugiés, mais peut également contribuer à l’harmonisation des procédures d’asile dans toute l’Europe. La présence au Conseil de l’Europe d’un bureau du HCR en est la meilleure preuve. En effet, aucune autre organisation internationale n’accorde d’importance au travail du Conseil de l’Europe au point d’y avoir un bureau. Le HCR a d’ailleurs toujours appuyé les appels en faveur de la reconstitution du CAHAR.
64. Le rapporteur insiste sur le fait que le Conseil de l’Europe devrait agir en faveur du renforcement des normes de protection internationale pour les demandeurs d’asile, en particulier eu égard à l’accroissement des flux mixtes de migrants en Europe. Elle considère les deux priorités suivantes comme des priorités absolues pour le Conseil de l’Europe, dans l’ordre indiqué:
  • établir un nouveau comité intergouvernemental ayant pour mandat permanent d’examiner les questions relatives aux demandeurs d’asile, aux réfugiés et aux personnes déplacées, afin de remplacer le CAHAR. Ce comité devrait être chargé d’examiner les diverses questions concernant les demandeurs d’asile, les réfugiés et les personnes déplacées que le rapporteur soulève dans son rapport. Il devrait en outre veiller à ce que les normes pertinentes des droits de l’homme soient effectivement intégrées au régime européen en matière d’asile et applicables à tous les Etats membres du Conseil de l’Europe;
  • incorporer le droit d’asile dans la Convention européenne des droits de l’homme.

3.4. Diversité et cohésion: les migrants dans la société

65. L’intégration effective des migrants et d’autres groupes minoritaires représente un objectif de sécurité «douce» pour les sociétés européennes; c’est pourquoi le maintien de la cohésion sociale et la promotion de la diversité culturelle et du dialogue interculturel en Europe sont parmi les défis et enjeux les plus difficiles auxquels les Etats s’efforcent de faire face dans toute l’Europe en élaborant des stratégies. La tolérance et le pluralisme constituent les fondements d’une société réellement démocratique et les Etats ont un rôle important à jouer dans le développement d’une société où les migrants pourront vivre sans craindre la xénophobie, le racisme et la discrimination. Cependant, l’intégration est un processus à double sens: les migrants doivent s’intégrer mais la société hôte doit aussi s’adapter et intégrer les migrants. D’autre part, les migrants ont aussi des obligations et des responsabilités vis-à-vis du pays d’accueil et doivent être prêts à les respecter.
66. L’intégration n’est pas une science exacte. Les différentes actions menées en Europe devraient être mises en commun afin d’établir autant que possible des bonnes pratiques en la matière. L’apprentissage de la langue, la sensibilisation à la citoyenneté, la participation démocratique, l’accès au travail, à l’éducation et au logement, la protection des droits et la mise en place de passerelles entre communautés sont essentiels à l’intégration et doivent être pris en considération dans toute stratégie élaborée dans ce domaine.
67. Tout en reconnaissant le droit des Etats à fixer leur propre politique quant à la situation des migrants dans la société, le rapport de la commission mondiale souligne, premièrement, que tous les migrants doivent être en mesure d’exercer leurs droits fondamentaux et de bénéficier de normes minimales en matière de travail. Ils doivent être adéquatement informés de leurs droits et de leurs obligations. Les migrants de longue durée en situation régulière devraient être encouragés à devenir des citoyens actifs du pays où ils se sont installés. La commission mondiale déclare, deuxièmement, que les processus d’intégration doivent mettre en valeur la diversité sociale, favoriser la cohésion sociale et prévenir la marginalisation des communautés de migrants. Troisièmement, elle juge nécessaire d’accorder une attention particulière à l’autonomisation et à la protection des femmes migrantes, qui devraient participer activement à la mise en œuvre des politiques et programmes d’intégration. Par ailleurs, les droits et les besoins des enfants immigrés en matière d’aide sociale et d’éducation devraient être pleinement respectés, et les personnes et organisations ayant une influence sur l’opinion publique devraient traiter la question des migrations internationales d’une manière objective et responsable.
68. La promotion de l’intégration et du dialogue interculturel contribue à la réalisation de l’objectif fondamental du Conseil de l’Europe. Le 3e Sommet a inscrit l’intégration parmi les quatre priorités de l’Organisation en matière de migration. Il a également mis l’accent tout particulièrement sur le dialogue interculturel comme moyen de renforcer la sensibilisation, la compréhension, la réconciliation et la tolérance, mais aussi de prévenir les conflits et de permettre l’intégration et la cohésion dans la société. Il n’est donc pas surprenant que de nombreux secteurs du Conseil de l’Europe aient consacré du temps et des ressources à des projets dans ce domaine.
69. Parmi les projets entrepris à cet égard, le rapporteur souhaite mentionner spécifiquement les indicateurs de l’intégration 
			(10) 
			Document MG-ID (2004)
5 rév. établis par le CDMG en 2004 sous forme d’une série de huit indicateurs couvrant l’emploi, le revenu, le logement, la santé, l’alimentation, l’éducation, l’information et la culture, qui constituent un outil de référence pour les personnes chargées de développer des politiques d’intégration des migrants.
70. Le rapporteur souligne également le travail accompli par le Service des politiques sociales sur la mise en œuvre du programme d’action établi à partir du rapport de la task force de haut niveau sur «La cohésion sociale au XXIe siècle: vers une Europe active, juste et cohésive sur le plan social» (document CM(2007)175). Les quatre éléments du programme s’appliquent aux migrants et à leurs communautés en faisant spécifiquement référence à la nécessité de renforcer les politiques fondées sur les droits et destinées à intégrer les travailleurs immigrés, à la construction d’une Europe des responsabilités sociales et partagées, au renforcement de la représentation et de la prise de décision démocratique ainsi qu’à la promotion du dialogue social et de l’engagement civique, et à la nécessité d’adopter, dans le cadre d’une campagne internationale, des codes de bonnes pratiques en matière de migration et d’intégration des migrants.
71. En avril 2008, le Comité des Ministres a adopté une recommandation (relative à la promotion de l’intégration des enfants de migrants ou issus de l’immigration (CM/Rec(2008)04), qui appelle les gouvernements des Etats membres à intégrer dans leurs politiques et leurs pratiques des dispositions visant à améliorer l’intégration des enfants primo-arrivants dans le système scolaire, à donner à ces enfants les compétences linguistiques requises au niveau préscolaire, à préparer ensuite les enfants de migrants à un passage réussi de l’école au marché du travail, et à surmonter les difficultés auxquelles sont confrontés ces enfants qui vivent dans des zones défavorisées ou de ségrégation.
72. Gérer la diversité culturelle grandissante en Europe dans le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales est une énorme tâche qui reste à accomplir. En mai 2008, lors de leur 118e session ministérielle, les ministres des Affaires étrangères du Conseil de l’Europe ont lancé le Livre blanc sur le dialogue interculturel «Vivre ensemble dans l’égale dignité». Ce livre blanc affirme qu’une identité européenne ne saurait se construire si elle ne repose pas sur des valeurs fondamentales partagées, sur le respect du patrimoine commun et de la diversité culturelle ainsi que sur le respect de la dignité de chaque individu. C’est la raison pour laquelle il propose une conception fondée sur la dignité humaine de chaque individu.
73. Le rapporteur souligne également le travail de l’Assemblée sur l’intégration des immigrés dans les Etats membres du Conseil de l’Europe (Recommandation 1625 (2003)) et sur les mesures visant à améliorer la participation démocratique des migrants (Recommandation 1840 (2008)).
74. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux a publié plusieurs rapports sur les questions d’intégration, notamment sur la participation des résidents étrangers à la vie publique locale (Recommandation 76 (2000)), la participation des résidents étrangers à la vie publique locale: les conseils consultatifs (Recommandation 115 (2002), Résolution 141 (2002)), un pacte pour l’intégration et la participation des personnes issues de l’immigration dans les villes et régions d’Europe (Recommandation 153 (2004), Résolution 181 (2004)), l’accès des migrants aux droits sociaux: le rôle des pouvoirs locaux et régionaux (Recommandation 194 (2006), Résolution 218 (2006)), l’amélioration de l’intégration des migrants par des politiques locales de logement (Recommandation 252 (2008), Résolution 270 (2008)) et le dialogue intercommunautaire, surtout en ce qui concerne les communautés religieuses (en particulier musulmanes) et les réponses et mesures préventives à adopter au niveau local pour prévenir l’extrémisme (en cours de préparation).
75. Le Congrès, conjointement avec le CDMG, participe activement au Réseau CLIP (Cities for Local Integration Policy), un réseau de villes européennes axé sur les politiques locales d’intégration des migrants, qui a été lancé en 2006. Son objectif est d’encourager l’échange d’idées novatrices sur les mesures locales destinées à intégrer les migrants et, ce faisant, de rapprocher les villes européennes et de renforcer leurs liens sur les questions d’intégration. Le premier module de recherche du réseau a abouti à la publication d’un rapport sur le logement et l’intégration des migrants en Europe. Ce réseau regroupe 25 villes.
76. Parmi les autres actions menées par des villes en faveur de l’intégration des migrants, il convient de citer le projet des cités interculturelles, initiative lancée conjointement en 2008 par le Conseil de l’Europe (Direction de la culture et du patrimoine culturel et naturel) et la Commission européenne.
77. L’ECRI (Commission européenne contre le racisme et l’intolérance), avec ses activités de surveillance par pays et son travail sur des thèmes généraux, est l’un des acteurs essentiels de la lutte contre le racisme et la discrimination, non seulement au sein du Conseil de l’Europe, mais aussi dans l’ensemble de l’Europe. L’Organisation accomplit également un travail important dans les domaines de la cohésion sociale et de l’éducation. A titre d’exemple, l’emploi massif des normes de compétences linguistiques élaborées par le Conseil de l’Europe a des incidences majeures sur les politiques et pratiques en matière de prescriptions de forme, de formation et de tests relatifs à l’entrée, à la résidence et à la citoyenneté. Le rapporteur aimerait attirer aussi l’attention sur les deux séminaires «Donner la parole aux jeunes réfugiés en Europe aujourd’hui», organisés en 2006 et en 2008 par la Direction de la jeunesse et du sport
78. Action recommandée: Le rapporteur salue le travail accompli par le Conseil de l’Europe concernant les différents aspects de l’intégration des migrants dans la société. Elle considère néanmoins qu’il serait souhaitable que l’Organisation accorde beaucoup plus d’attention à la question de l’intégration, en poursuivant une approche plus cohérente. Plus important, le Conseil de l’Europe devrait examiner de nouveau la possibilité d’élaborer en son sein des normes et lignes directrices supplémentaires sur l’intégration. Il pourrait, pour ce faire, utiliser les indicateurs d’intégration définis par le CDMG.

3.5. Une approche fondée sur des principes: législation, normes et droits de l’homme

79. En ce qui concerne la protection des droits des migrants, le rapport de la commission mondiale souligne la nécessité de renforcer et mettre en œuvre d’une façon plus efficace et sans discrimination le cadre législatif et normatif applicable aux migrants internationaux 
			(11) 
			Au niveau mondial,
le cadre législatif et normatif relatif aux migrants repose essentiellement
sur les instruments suivants: la Déclaration universelle des droits
de l’homme et les sept traités des Nations Unies sur les droits
de l’homme portant exécution des droits définis dans ladite déclaration;
la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes
de discrimination raciale (1965); le Pacte international relatif
aux droits civils et politiques (1966); le Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels (1966); la Convention
sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard
des femmes (1979); la Convention contre la torture et autres peines
ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (1984); la Convention
relative aux droits de l’enfant (1989) et la Convention internationale
sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et
de leur famille (1990). Par ailleurs, des dispositions importantes
relatives aux droits des migrants sont énoncées dans les conventions
de l’OIT sur le travail ainsi que dans la Convention des Nations
Unies de 1951 relative aux réfugiés et son Protocole de 1967, dans
la Convention de Vienne sur les relations consulaires et dans les
deux protocoles contre la traite des êtres humains et le trafic
illicite de migrants additionnels à la Convention des Nations Unies
contre la criminalité transnationale organisée. , de s’assurer que le principe de responsabilité de l’Etat pour la protection des personnes se trouvant sur son territoire est mis en pratique et de veiller à ce que tous les migrants puissent bénéficier d’un travail décent et d’une protection contre l’exploitation et les abus, en protégeant tout particulièrement les femmes migrantes qui travaillent comme employées de maison et les enfants migrants.
80. Au fil des années, l’Organisation a accumulé un acquis important, qui définit les obligations juridiques que les Etats membres sont tenus de respecter. Ses instruments essentiels pour la protection des travailleurs migrants et de leur famille, et des demandeurs d’asile et des réfugiés comprennent: la Convention européenne des droits de l’homme (STE no 5), l’Accord européen relatif à la suppression des visas pour les réfugiés (STE no 31), la Charte sociale européenne (révisée) (STE nos 35 et 163), la Convention européenne de sécurité sociale (STE no 78), la Convention européenne relative au statut juridique du travailleur migrant (STE no 93), la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (STE no 126), la Convention européenne sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local (STE no 144), la Convention européenne sur l’exercice des droits des enfants (STE no 160), la Convention européenne sur la nationalité (STE no 166), le Protocole no 12 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (STE no 177), la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197), la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention des cas d’apatridie en relation avec la succession d’Etats (STCE no 200) et la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels (STCE no 201, pas encore entrée en vigueur).
81. Parmi les instruments plus récents, deux sont particulièrement importants dans le contexte de la protection contre l’exploitation et les abus. Mentionnons d’abord la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains (STCE no 197), entrée en vigueur le 1er février 2008, qui est le premier traité européen en ce domaine. Il s’agit d’un traité détaillé axé principalement sur la protection des victimes de la traite et la garantie de leurs droits. D’autre part, la Convention sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels a été élaborée dans le cadre du programme transversal «Construire une Europe pour et avec les enfants», programme spécialement conçu pour les enfants se trouvant dans des situations particulièrement vulnérables, notamment les victimes d’exploitation et d’abus sexuels, ainsi que pour les enfants victimes de la traite et les mineurs non accompagnés.
82. L’un des atouts principaux du travail du Conseil de l’Europe réside dans son dispositif de suivi fondé sur des traités. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) est un organe important, qui a pour mission de combattre le racisme, la xénophobie, l’antisémitisme et l’intolérance sous l’angle de la protection des droits de l’homme. Le Comité européen des Droits sociaux (CEDS) statue en droit sur la conformité des situations nationales avec la Charte sociale européenne, le protocole additionnel de 1988 et la Charte sociale européenne révisée. Il adopte des conclusions dans le cadre de la procédure de rapports et des décisions dans le cadre de la procédure de réclamations collectives. Le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) joue évidemment un rôle important dans la surveillance des conditions de rétention des migrants irréguliers et demandeurs d’asile, et dans le développement de normes en la matière. Le Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA) est chargé de veiller à la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la traite des êtres humains. Le Commissaire aux droits de l’homme, instance indépendante du Conseil de l’Europe, accorde également une importance particulière aux droits des migrants dans le cadre de sa mission.
83. D’autres organes du Conseil de l’Europe remplissent également un rôle important, en particulier le Comité européen sur les migrations (CDMG), qui examine l’évolution du statut légal des migrants, et le Centre Nord-Sud, qui est devenu un important lieu de dialogue entre les cultures et une passerelle entre l’Europe et les régions voisines.
84. Le Conseil de l’Europe a en outre élaboré un certain nombre d’instruments non contraignants, sous forme de recommandations, de règles ou de principes directeurs, qui ont été mentionnés dans les chapitres précédents. Ces instruments s’inspirent essentiellement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de garanties de procédure, de recours effectif et suspensif, d’assistance sociale et médicale, de respect de la vie privée et familiale et de protection des personnes particulièrement vulnérables.
85. Le rapporteur, néanmoins, est au regret de constater que, malgré les mécanismes de suivi incorporés à plusieurs des instruments juridiques du Conseil de l’Europe et les nombreuses initiatives internationales appelant les Etats à renforcer les droits des migrants en adhérant aux traités internationaux pertinents et en assurant leur mise en œuvre, ces efforts sont loin d’avoir été couronnés de succès. La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (2000), par exemple, n’a été ratifiée que par 30 Etats, dont seulement 4 Etats membres du Conseil de l’Europe (Albanie, Azerbaïdjan, Bosnie-Herzégovine et Turquie) qui ne font pas partie de l’Union européenne.
86. Il en va de même pour les traités du Conseil de l’Europe: à l’exception de la Convention européenne des droits de l’homme et de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, auxquelles ont accédé tous les Etats membres, le rythme d’adhésion aux divers instruments est resté lent: à ce jour, la Convention du Conseil de l’Europe sur le statut du travailleur migrant n’a été ratifiée que par 11 pays, la Convention européenne de sécurité sociale et la Convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local par 8 pays, la Convention européenne sur la nationalité par 16 pays et la Charte sociale européenne révisée par 29 pays.
87. Il est aussi regrettable que l’Union européenne ne tienne pas suffisamment compte des cadres existants élaborés par le Conseil de l’Europe. Toutefois, l’adhésion de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme constitue un pas en avant dont il convient de se féliciter.
88. Action recommandée: Le Conseil de l’Europe devrait intensifier les efforts consacrés au travail normatif portant sur les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays. Ce travail, qui devrait constituer un aspect important de la stratégie à moyen terme proposée sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées (voir paragraphe 89), devrait comprendre quatre éléments:
  • le renforcement de la base conventionnelle existante du Conseil de l’Europe, en incitant les Etats membres à signer et ratifier les conventions pertinentes. En cas de difficultés insurmontables empêchant la signature et la ratification par certains Etats, la possibilité de réviser les conventions devrait être examinée;
  • le comblement des lacunes dans les normes juridiques en vigueur par l’actualisation des traités actuels du Conseil de l’Europe, afin de garantir la protection des migrants et des demandeurs d’asile, notamment en incorporant le droit d’asile dans la Convention européenne des droits de l’homme, en révisant la Charte sociale européenne pour assurer que tous les migrants légaux entrent effectivement dans le champ d’application de ce traité et que les migrants irréguliers aient accès aux droits minimaux nécessaires au respect de la dignité humaine, et en reconnaissant que le champ de protection de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales s’étend aux migrants, au moins au regard de l’article 6. En outre, la future convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique devrait inclure des dispositions sur la protection légale et le soutien des femmes migrantes à l’égard de la violence et des abus à caractère sexiste, et cela, quel que soit leur statut légal;
  • remédier aux lacunes des normes existantes en élaborant de nouvelles normes pertinentes dans les domaines où le Conseil de l’Europe peut avoir un impact important, notamment en ce qui concerne l’intégration des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées dans les sociétés européennes;
  • combler les lacunes des normes existantes en élaborant un ensemble complet de normes destinées à consolider les droits – aux différentes étapes (départ, transit, arrivée, séjour et retour) – de l’ensemble des catégories de migrants, de demandeurs d’asile, de réfugiés et de personnes déplacées. Les règles et principes directeurs suivants devraient être examinés en priorité 
			(12) 
			Plusieurs d’entre eux
ont déjà été mentionnés dans le texte et sont rappelés ici afin
de donner une vue d’ensemble des nombreuses activités qui pourraient
être entreprises.:
  • principes directeurs sur le non-refoulement, compte tenu du nombre croissant d’affaires d’expulsion portées devant la Cour européenne des droits de l’homme et des problèmes liés aux interventions en mer et aux opérations de sauvetage en mer;
  • principes directeurs sur l’harmonisation des mécanismes de protection relatifs à l’entrée, au séjour et au retour des mineurs non accompagnés;
  • principes directeurs sur les normes communes concernant l’accès des migrants irréguliers aux droits minimaux;
  • règles sur les centres de rétention des migrants et des demandeurs d’asile, comme complément aux Règles pénitentiaires européennes;
  • lignes directrices sur les alternatives à la détention des migrants et des demandeurs d’asile;
  • recommandations sur les moyens d’assurer et de contrôler la qualité et la cohérence des décisions d’asile en Europe;
  • principes directeurs sur le retour volontaire, comme complément aux principes directeurs du Comité des Ministres sur les retours forcés;
  • principes directeurs sur la mise en œuvre des accords de réadmission.
89. Les normes existantes du Conseil de l’Europe applicables aux migrants, aux demandeurs d’asile et aux réfugiés devraient être publiées sous forme d’un recueil qui serait régulièrement mis à jour.

3.6. Parvenir à la cohérence: la gouvernance des migrations internationales

90. Dans un but d’amélioration de la gouvernance des migrations internationales, la commission mondiale souligne la nécessité de renforcer la cohérence et les capacités à l’échelon national, de développer les consultations et la coopération entre Etats au niveau régional, et d’établir un dialogue et une coopération plus efficaces entre gouvernements et entre organisations internationales au niveau mondial. A cette fin, elle recommande notamment aux Etats de mettre en place des politiques nationales de l’immigration cohérentes et invite la communauté internationale à soutenir les efforts engagés par les Etats en vue de formuler et mettre en œuvre des politiques nationales de l’immigration en assurant les ressources, l’expertise et la formation adéquates.
91. L’une des fonctions statutaires du Conseil de l’Europe est de soutenir la coopération intergouvernementale et d’assister les Etats membres dans l’élaboration et l’harmonisation des politiques sur la base des normes existantes. Le CDMG est le principal organe intergouvernemental chargé de développer la coopération européenne dans le domaine des migrations, de l’intégration sociale et des relations entre communautés. Il a organisé huit conférences avec les ministres responsables des questions migratoires, qui ont donné aux Etats membres l’opportunité unique d’établir un dialogue à l’échelon gouvernemental le plus élevé et de fixer des agendas sur les questions d’intérêt commun.
92. Le CDMG apporte également un soutien individuel à certains pays par le biais de programmes d’assistance. La communauté internationale, en effet, a tout intérêt à soutenir les pays qui ont besoin d’accroître leurs capacités dans le domaine des politiques de migration, que ce soit par la fourniture de ressources techniques et financières, le partage d’une expertise adéquate ou la mise en place d’initiatives de formation. Plus spécifiquement, de tels efforts devraient aider les Etats:
  • à définir les objectifs de leur politique nationale de migration;
  • à mettre en place un système légal efficace et équitable, en relation avec les migrations;
  • à créer un cadre d’agents de migration bien formés incluant des fonctionnaires, des policiers, des gardes-frontière et des agents chargés de l’examen des demandes d’obtention du statut de réfugié;
  • à développer une infrastructure pour apporter une aide sociale, éducative et légale aux migrants et aider la société d’accueil à s’adapter à la présence des migrants;
  • à développer les capacités de collecte et d’analyse de données, d’enquête, de suivi et d’évaluation.
93. Conformément à cet objectif, le Conseil de l’Europe devrait axer son aide sur le renforcement des capacités des pays qui sont traditionnellement des pays d’origine et de transit en matière de politiques et de planification des migrations. Il devrait aussi s’efforcer d’améliorer la coopération dans le domaine de l’intégration des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées.
94. En ce qui concerne la coopération internationale, divers organes du Conseil de l’Europe s’occupent de questions touchant aux migrations et à l’asile, et travailllent en partenariat avec plusieurs acteurs essentiels en ce domaine, notamment le HCR, le HCDH, l’OIM, l’OIT, le CICR et maintenant de plus en plus avec l’Union européenne.
95. Le rapporteur est particulièrement préoccupé par le potentiel de coopération non exploité entre le Conseil de l’Europe et l’Union européenne. Malgré la forte participation de l’Union au cofinancement des programmes d’assistance du Conseil de l’Europe, les entretiens menés par le rapporteur dans un grand nombre de secteurs de l’Organisation lui ont confirmé que les possibilités de coopération sont très réduites en termes réels.
96. Plus important encore, le rapporteur considère que la convergence accrue entre le Conseil de l’Europe et l’Union du point de vue des pays membres appelle la mise en place d’un système beaucoup plus cohérent de protection des droits fondamentaux et d’un espace juridique commun à toute l’Europe, de manière à en faire profiter au mieux l’ensemble des personnes et des pays concernés. L’accession de l’Union européenne à la Convention européenne des droits de l’homme représente à cet égard une étape décisive de la relation entre les deux institutions. Néanmoins, il conviendrait d’établir une cohérence beaucoup plus forte entre le droit de l’Union européenne et les normes émanant des conventions du Conseil de l’Europe. Pour ce faire, le développement des consultations en amont du processus d’élaboration des normes, comme le prévoit le mémorandum d’accord signé en 2007 entre la Commission européenne et le Conseil de l’Europe, est une nécessité.
97. Le rapporteur est également préoccupé par le fait que les représentants du Conseil de l’Europe sont fréquemment absents des grands forums internationaux sur les migrations, comme le Forum mondial sur la migration et le développement. Cela prive l’Organisation de la possibilité non seulement de faire connaître le travail important qu’elle effectue au niveau régional mais aussi de se tenir au courant des évolutions les plus récentes et de faire valoir ses normes en matière de droits de l’homme. Par conséquent, en dépit des contraintes budgétaires, des efforts devraient être faits pour améliorer la promotion du travail de l’Organisation.

3.7. Améliorer la cohésion et les capacités intra-institutionnelles

98. Lors de la préparation de ce rapport, le rapporteur a été vivement impressionné par la quantité énorme d’énergie et d’efforts consacrés par les divers organes et secteurs du Conseil de l’Europe aux questions concernant le statut, la protection, les droits et l’intégration des migrants, demandeurs d’asile, réfugiés et personnes déplacées, ainsi qu’à la lutte contre les phénomènes de société négatifs comme la xénophobie et le racisme ou le trafic de migrants et la traite des êtres humains.
99. Les activités vont de la coopération intergouvernementale au traitement des requêtes individuelles déposées devant la Cour européenne des droits de l’homme et des recours collectifs soumis au titre de la Charte sociale européenne. Elles couvrent le travail de surveillance effectué notamment par le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT), la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI), le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le GRETA et la commission de l’Assemblée parlementaire sur les migrations, les réfugiés et la population. Elles incluent également l’ensemble du travail sur les médias et la lutte contre le racisme et l’intolérance, le travail sur l’éducation et la culture, la contribution du Centre Nord-Sud de Lisbonne et de la banque du Conseil de l’Europe, ainsi que le travail mené par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux.
100. Ces différents secteurs, cependant, sont structurellement indépendants, avec leurs propres objectifs et programmes d’activité et des ressources limitées, ce qui laisse peu de place à une action coordonnée. Les flux d’information internes sont en fait restreints et reposent surtout sur les contacts informels, ce qui aboutit parfois à une duplication du travail ou à la présentation d’approches différentes sur un même sujet par des secteurs différents de l’Organisation.
101. Pour remédier à ces défauts structurels, une task force informelle intersecrétariat sur les migrations a été créée en 2006 afin de développer les synergies et les échanges entre les secrétariats traitant de questions se rapportant aux migrations. Bien que fortement appréciée par nombre des personnes ayant répondu au questionnaire établi par le rapporteur et constituant certainement une initiative bienvenue, la task force a eu du mal à fonctionner efficacement en raison de l’insuffisance du soutien politique, des ressources humaines et de l’accès aux financements. En outre, les habitudes de travail qui prévalent à l’intérieur de l’Organisation ne sont favorables ni au développement de la visibilité interne ou externe, ni à la promotion du travail réalisé.
102. Le rapporteur est convaincu qu’une forte amélioration de la coopération interne est nécessaire pour axer les ressources sur des questions politiquement pertinentes, d’une manière qui permette d’accroître l’impact et la visibilité du travail. Le fait de savoir si une structure informelle (comme c’est le cas aujourd’hui) ou une structure plus formelle est la mieux indiquée pour développer les synergies internes n’est toujours pas clair. Néanmoins, la task force en tant que telle et les questions concernant la migration, l’asile et les personnes déplacées devraient bénéficier d’un soutien beaucoup plus vigoureux de la part du Secrétaire Général et du conseil exécutif.
103. Action recommandée: Au vu de ce qui précède, et compte tenu du besoin urgent d’accroître l’impact du travail du Conseil de l’Europe, le rapporteur propose de créer un poste de coordinateur des questions concernant la migration, l’asile et les personnes déplacées. Le coordinateur serait chargé notamment:
  • de préparer une stratégie à moyen terme sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées;
  • de prendre la direction du projet transversal proposé sur les migrants, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées dans les sociétés européennes;
  • d’assurer la liaison avec les différents secteurs de l’Organisation traitant des questions de migrations internationales, et de diffuser l’information;
  • d’harmoniser et de superviser la mise à jour régulière du site web interactif consacré aux migrations;
  • de superviser la publication d’un recueil de textes sur les droits de l’homme des migrants, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées, sur la base du travail des différents organes du Conseil de l’Europe;
  • de jouer le rôle d’interface sur les questions de migrations et d’asile dans la communication internationale.

4. Conclusions et perspectives

104. La mobilité des individus est aujourd’hui un aspect intrinsèque du monde interconnecté résultant de la mondialisation. A cette question extrêmement complexe et sensible sont liés de nombreux enjeux évoqués dans le présent rapport. Le Conseil de l’Europe, qui a toutes les raisons d’être fier de ses réalisations, qui sont nombreuses et parfaitement conformes aux recommandations de la Commission mondiale sur les migrations internationales, doit maintenant se tourner vers les défis à venir pour les Etats membres et réfléchir aux moyens les mieux adaptés pour y faire face. Comme indiqué tout au long de ce rapport, un certain nombre de questions préoccupantes requièrent une attention supplémentaire de la part du Conseil de l’Europe ainsi que l’élaboration de réponses prenant en compte les questions de protection et fondées sur les droits de l’homme.
105. Premièrement, l’Organisation doit absolument rehausser le profil et l’importance qu’elle attache aux questions concernant les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les personnes déplacées dans les sociétés européennes. Ces personnes sont, en effet, parmi les plus vulnérables et l’amélioration de la protection de leurs droits fondamentaux ainsi que le respect de la diversité culturelle et des normes d’intégration des migrants et des réfugiés devraient donc faire partie des priorités de l’Organisation. Cela exige également d’affecter des ressources supplémentaires aux activités pertinentes. Il n’est pas nécessaire que le niveau de ces ressources soit très élevé; l’important est de regrouper le travail et de lui donner une visibilité et une unité qui lui font actuellement défaut.
106. Deuxièmement, le Conseil de l’Europe doit disposer de perspectives claires et établir pour ce faire une stratégie à moyen terme sur les migrations, l’asile et les personnes déplacées. Cette stratégie devrait inclure des mesures pour améliorer la protection effective des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous les migrants, quel que soit leur statut légal, des demandeurs d’asile, des réfugiés et des personnes déplacées. Elle devrait aussi fournir une approche globale de la gestion des flux migratoires.
107. Troisièmement, le Conseil de l’Europe doit réfléchir aux moyens d’accroître l’impact et la visibilité de son travail en ce domaine. Il dispose d’une abondance de normes et de standards légaux et possède l’avantage de pouvoir synthétiser les positions des gouvernements, des parlements, des autorités locales et de la société civile de la quasi-totalité de l’Europe en une vision commune des questions et des solutions concernant les migrations, l’asile et les personnes déplacées. Cela lui confère un pouvoir de négociation significatif que l’Organisation devrait beaucoup mieux mettre en valeur dans ses relations avec l’Union européenne et avec d’autres partenaires. Egalement, pour assurer un meilleur impact à son travail, le Conseil de l’Europe devrait être prêt et apte à travailler en réseau et être présent au sein des forums internationaux pertinents.
108. Quatrièmement, compte tenu de ce qui précède et au vu du renforcement de la cohésion interne et du travail de définition d’une vision commune des questions concernant les migrations, l’asile et les personnes déplacées, il paraît nécessaire de stimuler fortement la coordination et l’échange d’informations internes. Cela n’exigera pas de changements structurels importants dans le fonctionnement de l’Organisation; cependant, la création d’un poste de coordinateur des questions concernant la migration, l’asile et les personnes déplacées serait souhaitable.
109. Enfin, pour mieux équilibrer les activités intergouvernementales menées dans le domaine des migrations ainsi que sur les questions touchant à l’asile et aux personnes déplacées, le rapporteur recommande fortement la création d’un nouveau comité intergouvernemental doté d’un mandat permanent, qui serait chargé d’examiner les questions concernant l’asile, les réfugiés et les personnes déplacées et qui travaillerait en relation étroite avec d’autres comités directeurs, notamment le Comité directeur pour les droits de l’homme, le Comité européen sur les migrations (CDMG) et le Comité européen de coopération juridique (CDCJ).

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Commission chargée du rapport: commission des migrations, des réfugiés et de la population

Renvoi en commission: Doc. 11085, Renvoi 3298 du 22 janvier 2007

Projet de recommandation adopté à l’unanimité par la commission le 30 mars 2010

Membres de la commission: M. John Greenway (Président), M. Giacomo Santini (1er Vice-Président), M. Tadeusz Iwiński (2e Vice-Président), Mme Tina Acketoft (3e Vice-Présidente), M. Francis Agius, M. Pedro Agramunt, M. Francisco Assis, M. Alexander van der Bellen, M. Ryszard Bender, M. Márton Braun, M. André Bugnon, M. Sergej Chelemendik, M. Vannino Chiti, M. Christopher Chope (remplaçant: M. Michael Hancock), M. Desislav Chukolov, M. Boriss Cilevičs, M. Titus Corlăţean, Mme Claire Curtis-Thomas (remplaçant: M. Bill Etherington), M. David Darchiashvili, M. Nikolaos Dendias,M. Arcadio Díaz Tejera, M. Tuur Elzinga, M. Valeriy Fedorov, M. Oleksandr Feldman, M. Relu Fenechiu, Mme Doris Fiala, M. Bernard Fournier, M. Aristophanes Georgiou, M. Paul Giacobbi, Mme Angelika Graf, Mme Annette Groth, M. Michael Hagberg (remplaçant: M. Göran Lindblad), Mme Gultakin Hajibayli, M. Doug Henderson, Mme Anette Hübinger, M. Jean Huss, M. Denis Jacquat, M. Zmago Jelinčič Plemeniti, M. Mustafa Jemiliev, M. Tomáš Jirsa, Mme Corien W.A. Jonker, M. Reijo Kallio, M. Ruslan Kondratov, M. Franz Eduard Kühnel, M. Geert Lambert, M. Pavel Lebeda, M. Arminas Lydeka, M. Jean-Pierre Masseret, M. Slavko Matić, Mme Nursuna Memecan, M. Ronan Mullen, M. Gebhard Negele, Mme Korneliya Ninova, Mme Steinunn Valdís Óskarsdóttir, M. Alexey Ostrovsky, M. Evangelos Papachristos, M. Jørgen Poulsen, M. Cezar Florin Preda (remplaçant: M. Iosif Veniamin Blaga), M. Gabino Puche (remplaçant: M. Gonzalo Robles Orozco), M. Milorad Pupovac, M. Volodymyr Pylypenko, Mme Mailis Reps, M. Branko Ružić,M. Džavid Šabović,M. Samad Seyidov, M. Joachim Spatz, M. Lorenzo Stolfi, M. Giacomo Stucchi, M. László Szakács, Mme Elke Tindemans, M. Dragan Todorović, Mme Anette Trettebergstuen, M. Tuğrul Türkeş, Mme Özlem Türköne, M. Michał Wojtczak, M. Marco Zacchera, M. Yury Zelenskiy, M. Andrej Zernovski, Mme Naira Zohrabyan

N.B. Les noms des membres ayant participé à la réunion sont indiqués en gras

Secrétariat de la commission: M. Neville, Mme Odrats, M. Ekström