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Rapport | Doc. 12538 | 17 mars 2011

L’eau: une source de conflits

Commission de l'environnement, de l'agriculture et des questions territoriales

Rapporteur : M. Bernard MARQUET, Monaco, ADLE

Origine - Renvoi en commission: Doc. 12176, Renvoi 3670 du 26 avril 2010. 2011 - Deuxième partie de session

Résumé

L’eau fait partie du patrimoine commun de l’humanité et constitue une ressource essentielle à la survie de l’homme. L’eau reste toutefois une ressource limitée et vulnérable; un habitant sur six dans le monde n’a toujours pas accès à l’eau.

La relation entre l’eau et la sécurité devient de plus en plus étroite, si bien que l’eau devient un outil militaire et politique et une nouvelle arme pour les terroristes, entraînant des actes de violence et des conflits pouvant menacer la stabilité politique et sociale d’un pays.

Les gouvernements doivent reconnaître l’accès à l’eau comme un droit de l’homme fondamental et les règles de droit international de l’eau devront être révisées.

Les Etats devraient également mettre en œuvre des programmes d’aide et de coopération avec les pays souffrant du manque d’eau.

A. Projet de résolution 
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			Projet
de résolution adopté à l’unanimité par la commission le 25 février
2011.

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1. L’eau est essentielle à la survie de l’homme, alors qu’un milliard de personnes dans le monde n’a pas accès à l’eau potable.
2. Dans ce contexte, l’Assemblée parlementaire rappelle que lors du Sommet de Johannesbourg, en 2002, l’on avait fixé comme objectif de réduire de moitié d’ici à 2015 le nombre de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable.
3. L’Assemblée souhaite également se référer à sa Résolution 1693 (2009) sur l’eau: un enjeu stratégique pour le Bassin méditerranéen ainsi qu’aux propositions formulées par les parlements au 5e Forum mondial de l’eau, tenu à Istanbul le 19 mars 2009, où a été notamment soulignée l’importance du rôle des parlementaires dans l’élaboration de règles concernant la gestion de l’eau, l’alimentation en eau, la généralisation du principe du droit à l’eau et la mise en œuvre de politiques de l’eau.
4. L’Assemblée regrette toutefois que les gouvernements, de leur côté, dans leur déclaration du 22 mars 2009, n’aient pas reconnu le droit à l’eau et à l’assainissement comme un droit de l’homme.
5. L’Assemblée souhaite également se référer à sa Recommandation 1885 (2009) sur l’élaboration d’un protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à un environnement sain.
6. L’Assemblée rappelle que, le 28 juillet 2010, les Nations Unies ont reconnu l’accès à l’eau et à l’assainissement comme étant un droit de l’homme fondamental et que, le 30 septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme a affirmé à son tour que «le droit fondamental à l’eau potable et à l’assainissement découle du droit à un niveau de vie suffisant et qu’il est indissociable du droit au meilleur état de santé physique et mental susceptible d’être atteint, ainsi que du droit à la vie et à la dignité».
7. Malheureusement, la croissance démographique, les besoins différenciés mais croissants des pays en développement et des pays industrialisés ainsi que les aléas climatiques exacerbent le caractère vital de l’eau qui devient ainsi un enjeu politique souvent générateur de situations conflictuelles.
8. L’Assemblée souhaite souligner que la mondialisation est sans nul doute l’un des facteurs les plus importants dans l’amenuisement des ressources en eau douce et potable, les autres facteurs étant l’irrigation, le gaspillage et la pollution.
9. Il apparaît ainsi plus que nécessaire de prendre les mesures visant à réduire la vétusté des réseaux d’adduction d’eau et de mieux gérer les systèmes d’irrigation.
10. Gardant à l’esprit que l’eau douce reste une ressource limitée et vulnérable mais vitale pour la survie de l’homme, l’Assemblée constate et déplore qu’un habitant sur six dans le monde continue de ne pas avoir accès à l’eau et que pratiquement une personne sur deux vit sans système d’évacuation des eaux usées.
11. En outre, le changement climatique contribue fortement à aggraver le problème de la malnutrition dans les régions les plus arides du globe, engendrant ainsi des millions de réfugiés climatiques.
12. L’Assemblée rappelle à cet égard que le manque d’eau entraîne des actes de violence et des conflits pouvant menacer la stabilité politique et sociale d’un Etat. L’on pourrait citer, ainsi, à titre d’exemples, les événements se déroulant au Proche et Moyen-Orient, dans le Caucase et en Chine, événements qui confirment les relations étroites entre eau et sécurité.
13. L’Assemblée ne peut donc que constater que l’eau est devenue de plus en plus un outil militaire et politique et une nouvelle arme pour les terroristes.
14. En conséquence, l’Assemblée recommande aux autorités des Etats membres et non membres:
14.1. de reconnaître l’accès à l’eau comme un droit de l’homme fondamental (Résolution 64/292 de l’Assemblée générale des Nations Unies du 28 juillet 2010 et Résolution 15/9 du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies du 30 septembre 2010);
14.2. d’appliquer et de réviser, si nécessaire, les règles de droit international de l’eau;
14.3. de revoir les mécanismes de gestion en commun des rivières et des aquifères transfrontaliers;
14.4. de prendre les mesures nécessaires pour organiser les bassins fluviaux;
14.5. de développer les voies navigables internationales;
14.6. d’améliorer la transparence et les flux d’informations entre tous les acteurs;
14.7. de veiller à ce que les activités menées dans leur pays n’endommagent pas les ressources naturelles d’autres pays;
14.8. de saisir la Cour internationale de justice afin de résoudre pacifiquement les conflits de partage de ressources entre plusieurs Etats;
14.9. de promouvoir une tarification plus juste de l’eau et de fournir des services de distribution d’une eau potable, de bonne qualité et en quantité suffisante ainsi qu’un service d’assainissement acceptable, accessible et abordable, tel que recommandé dans la Résolution 15/9 du Conseil des droits de l’homme;
14.10. de donner l’opportunité à chaque citoyen de demander des comptes à son gouvernement et d’exiger des mécanismes d’indemnisation, le cas échéant;
14.11. de mettre en œuvre un programme d’aide et de coopération avec les pays qui souffrent du manque d’eau;
14.12. de prendre des mesures visant à réguler l’utilisation des nappes phréatiques pour favoriser l’économie et éviter le gaspillage;
14.13. de mettre en place des mesures de désalinisation de l’eau afin de transformer à des prix bas l’eau de mer en eau potable;
14.14. de revoir les pratiques et les politiques agricoles afin d’assurer leur viabilité, en encourageant les investissements dans des systèmes d’irrigation performants et en favorisant les transferts de technologie dans ce domaine entre pays développés et pays en développement;
14.15. de mettre en place un contrôle strict des risques de pollutions accidentelles;
14.16. de mettre en place une base de données contenant des informations météorologiques, hydrauliques et socio-économiques.
15. L’Assemblée recommande également aux collectivités territoriales de veiller à offrir à leurs citoyens un bon système d’assainissement des eaux.
16. L’Assemblée encourage les parlements et toutes les instances intéressées à faire partie du bureau d’aide international («Helpdesk»), tel que recommandé lors du 5e Forum mondial de l’eau qui s’est tenu à Istanbul en 2009.

B. Exposé des motifs, par M. Marquet, rapporteur

(open)

1. Introduction

1. L’eau, patrimoine commun de l’humanité et ressource essentielle à la survie de l’homme, est tout autant nécessaire aux principaux secteurs de l’activité économique (agriculture, production industrielle, production d’énergie, transport de personnes et de biens). Si les trois quarts de la surface du globe sont couverts par des océans et des mers, l’eau douce ne représente que 2,5 % de ce volume. L’essentiel se trouve concentré dans les icebergs et est donc inexploitable en l’état.
2. On estime que 10 % du prélèvement d’eau dans le monde est destiné à la consommation domestique, 20 % à l’industrie et 70 % à l’agriculture. La ressource en eau sert également à maintenir l’équilibre des écosystèmes. Selon les chiffres des Nations Unies, un milliard de personnes n’ont pas accès à l’eau potable, 2,6 milliards n’ont pas accès à un assainissement de base et 2,2 millions meurent chaque année de maladies liées à un manque d’accès à l’eau ou à une mauvaise qualité de l’eau. La disponibilité d’eau douce par habitant a chuté dramatiquement, passant de quelque 17 000 m3 par an au milieu du XXe siècle, à environ 6 000 m3 par an aujourd’hui.
3. Le rapport final du sommet de Johannesbourg de 2002 a fixé comme objectif de réduire de moitié, à l’horizon 2015, «la proportion de personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable ou qui n’ont pas les moyens de s’en procurer (…) et la proportion de personnes qui n’ont pas accès à des services d’assainissement de base».
4. La croissance démographique, les besoins différenciés mais croissants des pays en développement et des pays industrialisés, et les aléas climatiques, qu’il s’agisse de sécheresses récurrentes et de pénuries chroniques ou d’inondations dévastatrices, exacerbent le caractère vital de l’eau qui devient ainsi un enjeu économique majeur et un enjeu politique national ou international générateur de situations conflictuelles entre Etats.
5. Les tensions entre les pays qui separtagent le bassin d’un fleuve pourraient ainsi compromettre le développement durable et renforcer la pauvreté, inciter les flux migratoires et l’instabilité sociale et engendrer des conflits alors que le besoin mutuel de partager la ressource en eau devrait aider à forger une coopération pacifique entre les différentes communautés.

2. Le changement climatique

6. Le réchauffement climatique a des répercussions évidentes sur l’eau, engendrant des précipitations variables, des inondations, des périodes de sécheresse, la fonte des glaciers et l’augmentation du niveau de la mer.
7. Les scientifiques estiment que l’augmentation d’un degré de la température moyenne entraînera une hausse de 1 % des précipitations, puisque l’air chaud absorbe plus d’humidité. Le volume mondial total ne changerait pas mais le cycle de l’eau serait accéléré, affectant la majorité de l’agriculture mondiale qui dépend du volume et de la saison des précipitations.
8. Au cours des dernières années, la température dans le monde a augmenté chaque année de 0,74°C en moyenne. Cette hausse a été plus marquée dans les latitudes nord. Cette augmentation a entraîné, entre autres, la diminution de la superficie de la calotte polaire et de la couverture de neige et de glace sur les montagnes dans les deux hémisphères, et une augmentation significative des précipitations, que ce soit dans l’est de l’Amérique du Nord et du Sud, dans le nord de l’Europe et dans le nord et le centre de l’Asie.
9. Ces phénomènes ont également eu des répercussions importantes sur l’agriculture et sur la gestion de la forêt, et ont entraîné l’apparition de nouvelles maladies à la suite de la présence d’allergènes dans l’environnement. Certaines espèces animales sont ainsi menacées d’extinction.
10. Toutefois, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) insiste sur le fait que ces changements peuvent très difficilement être imputables à une évolution naturelle du climat. Tout en l’énonçant avec prudence, le GIEC établit un lien clair entre le réchauffement climatique et l’activité humaine.
11. Les émissions de gaz à effet de serre sont la principale manifestation de la croissance industrielle. Le GIEC souligne qu’elles ont augmenté de 70 % entre 1970 et 2004 et, si rien n’est fait pour la ralentir, cette augmentation passera de 25 % à 90 % entre 2000 et 2030. Selon certains scénarios, la température pourrait augmenter de 0,2°C au cours des vingt prochaines années.
12. Le changement climatique entraîne non seulement sécheresses et inondations mais engendreaussi indirectement des modifications du débit des cours d’eau, et a un impact important sur l’augmentation des concentrations des substances polluantes et toxiques dans l’eau et du stress hydrique. A titre d’exemple, la surface du lac Tchad est passée de 25 000 km2 à moins de 3 000 km2, puisqu’il a perdu 90 % de ses ressources en eau sous les effets conjugués du changement climatique, de la construction de barrages et des pressions démographiques. L’assèchement de ce lac, qui assure la subsistance de 30 millions de personnes, fait craindre l’apparition de conflits autour des ressources entre les différents acteurs, voire entre les Etats.
13. En modifiant les flux migratoires des populations menacées par les catastrophes écologiques et en rendant encore plus difficile l’accès à l’eau potable dans certaines régions, le changement climatique risque de multiplier les tensions dans les relations internationales et d’être à l’origine de nombreux conflits, voire de guerres.

3. Eau, pauvreté et migration

14. La distribution des richesses dans le monde est inégale. Le seul fait de vivre dans une certaine région du monde peut conduire à une lutte perpétuelle pour l’eau, pour la nourriture et pour le logement.
15. La ressource en eau est vitale pour l’homme mais également pour le développement économique et pour le maintien des écosystèmes. L’on constate, malheureusement, que des milliards d’êtres humains manquent d’eau et de services sanitaires, conséquence, le plus souvent, d’une mauvaise maîtrise des ressources et d’investissements inadéquats si bien que les hommes vivent moins longtemps en bonne santédans les pays du Sud.
16. Le changement climatique contribue également à aggraver le problème de la malnutrition dans les régions les plus arides du globe, ce qui engendre des millions de réfugiés climatiques et compromet le développement des pays concernés. La désertification progresse et menace la subsistance de près d’un milliard de personnes à travers le monde. Selon les chiffres de la Convention des Nations Unies 
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			Les
Nations Unies ont lancé en août 2010 la Décennie pour les déserts
et la lutte contre la désertification (2010-2020). contre la désertification (UNCDD), près de 12 millions d’hectares de terres arables (soit l’équivalent de la surface du Bénin) permettant de nourrir 6 millions de personnes disparaissent chaque année avec l’érosion des sols et la désertification. Ce phénomène concerne aujourd’hui 25 % des terres immergées, 40 % de la population mondiale et 50 % du bétail. En 2010, plus de 8 millions de personnes se sont trouvées dans un état de malnutrition chronique au Niger à cause de la sécheresse. La convention pointe également le fait que, «avec le changement climatique, près de la moitié de la population vivra dans des régions avec de grands besoins en eau en 2030».
17. La dégradation de l’environnement fait également fuir les touristes, entraînant une baisse importante des recettes dans les pays pauvres.
18. Pauvreté et dégradation de l’environnement sont ainsi entrées dans un cercle vicieux. Les problèmes environnementaux aggravent la pauvreté, l’absence d’une autre solution pousse les pauvres à prélever dans la nature de quoi survivre, souvent de façon illégale, par braconnage. Les tensions croissantes qui pèsentsur les ressources environnementales génèrent des conflits dont les pauvres sont les premières victimes.
19. Les migrants environnementaux se retrouvent le plus souvent concentrés dans des zones très réduites et peu adaptées. Dans certains cas, les maigres ressources disponibles sont rapidement épuisées, ce qui ne fait qu’aggraver la situation de ces personnes.
20. A titre d’exemple, dans les régions excentrées des hauts plateaux fertiles de l’Ethiopie, l’on trouve un camp situé en dehors de l’ancienne ville musulmane de Harar, le long d’une rivière desséchée, où vivent 5 000 Somaliens de différentes ethnies qui ont dû quitter la région de l’Ogaden à cause des conflits internes pour l’eau.
21. Très souvent les femmes et les enfants sont attaqués lorsqu’ils cherchent de l’eau ou lorsqu’ils font boire leurs bêtes dans les sources ou les points d’eau, ce qui les oblige à abandonner leur maison et à trouver refuge dans les églises ou les écoles.

4. L’eau: un nouvel enjeu

22. Il y a 4 500 ans s’est déroulée en Mésopotamie la dernière guerre de l’eau. De nos jours, alors que la demande en eau atteint les limites disponibles, les conflits internes continuent à se développer. Selon certains experts, plus de 50 pays sur cinq continents vont bientôt s’engager dans des conflits pour l’eau, à moins que l’on ne prenne rapidement des décisions sur le partage des rivières et des fleuves transfrontaliers.
23. Ces conflits résultent très souvent de deux facteurs. Le premier est celui du changement rapide ou important dans le milieu physique d’un bassin (construction d’un barrage, détournement d’une rivière) ou dans son milieu politique (morcellement d’une nation) et le second, celui d’une mauvaise gestion de la part des institutions existantes, en l’absence, notamment, de tout traité définissant les responsabilités et les droits de chaque nation.
24. Pourtant, si les mesures sont prises de manière adéquate, un barrage peut contribuer au développement en permettant notamment de réguler l’approvisionnement en eau, de limiter les inondations, d’améliorer la navigation et surtout de produire de l’électricité. Il existe ainsi aujourd’hui près de 45 000 grands barrages dans le monde, selon la Commission mondiale des barrages (CMD). En dix ans, la production hydroélectrique, qui ne dégage pas de gaz à effet de serre et ne produit pas de déchets toxiques, a progressé de près de 20 %. Trois freins existent cependant au développement de cette production: les barrages sont accusés de perturber l’équilibre écologique en amont et en aval, de provoquer des déplacements massifs de population et d’empêcher la reproduction de certains poissons. Au niveau international, considérer l’eau comme une énergie renouvelable ne va pas sans poser certains problèmes.
25. Selon les chiffres des Nations Unies, il existe 263 bassins internationaux (fleuves, lacs ou nappes souterraines) partagés par deux pays ou plus. Ces bassins représentent 60 % des réserves mondiales en eau et 40 % de la population mondiale vit à proximité. Dans un contexte de pénurie, des infrastructures en amont d’un cours d’eau international peuvent avoir un impact sur la qualité de l’eau ou sur sa disponibilité pour les Etats voisins, ce qui peut provoquer, à terme, des tensions et des conflits.
26. Pour certains experts, le danger réside ainsi moins dans la pénurie d’eau que dans la tentation pour un pays de contrôler une voie d’eau internationale. La Turquie, par exemple, finance le projet d’Anatolie du Sud-Est (projet GAP) qui prévoit la construction de 22 barrages et 19 centrales hydroélectriques sur le Tigre et l’Euphrate, qui ont fourni environ 22 % de la consommation turque en 2010. La construction de ces barrages permet à la Turquie de contrôler l’écoulement en aval de l’eau vers la Syrie et l’Irak, accentuant la dépendance de ces pays à l’égard du château d’eau turc. Les relations entre la Turquie, d’une part, et la Syrie et l’Irak, d’autre part, se sont considérablement dégradées depuis le lancement du projet. Au niveau écologique, les scientifiques constatent déjà une forte salinisation des terres en aval, ce qui modifiera profondément l’écosystème de la région.
27. Le manque d’eau entraîne incontestablement des actes de violence et des conflits pouvant menacer la stabilité politique et sociale d’un Etat. Les conflits civils d’aujourd’hui dépassent les frontières et sont à l’origine des guerres internationales de demain.
28. Ces altercations interétatiques autour de l’eau entraînent des tensions régionales, freinent le développement économique et risquent de provoquer des conflits plus importants.
29. Il faut rappeler que la Cour internationale de justice a un rôle important à jouer, même si elle ne peut imposer des décisions à des parties qui n’ont pas sollicité son arbitrage. Elle est dotée d’un arsenal pour œuvrer à la résolution des différends mondiaux, selon des critères d’appréciation bien définis (article 38 de son Statut).
30. Il faut souligner que les experts en matière de sécurité internationale ont souvent ignoré ou sous-estimé le lien réel et complexe entre l’eau et la sécurité.
31. A la fin des années 1980, le Pacific Institute a créé un projet visant à récolter et à regrouper les événements en relation avec l’eau et les conflits.
32. Les événements récents au Proche-Orient et au Moyen-Orient, dans les Balkans, au Timor-Oriental et dans d’autres régions ont contribué à ajouter de nouvelles données, comme on le verra un peu plus loin.
33. C’est ainsi que l’eau est devenue un outil militaire et politique mais malheureusement aussi une arme pour les terroristes.
34. Si la sécurité internationale et les politiques internationales et régionales évoluent en permanence, un facteur reste cependant constant, à savoir que l’eau est indispensable à la vie, et les moyens mis en place pour répondre aux besoins et à la demande en eau dépendent pour la plupart du temps des décideurs politiques.
35. Le stress hydrique interne a également des incidences sur les alliances politiques internationales et vient s’ajouter à celles de la crise humanitaire. Les pays s’adaptent normalement au stress hydrique en important la plus grande partie de leur nourriture, ce qui leur permet d’allouer une plus grande part de leur eau potable aux villes et au secteur industriel.
36. Selon les experts, dans les quinze prochaines années, de plus en plus de personnes vivront dans des pays en situation de stress hydrique et de plus en plus de pays vont rejoindre les rangs d’importateurs de nourriture, ce qui entraînera une augmentation du prix du blé et, pour les pays pauvres, des famines importantes et un besoin accru d’aide humanitaire.
37. Même si la privatisation totale, c’est-à-dire la cession complète (y compris le transfert d’actifs) est plutôt l’exception que la norme, le phénomène de privatisation peut également avoir des répercussions en termes d’augmentation des coûts et de réduction des subventions. En Bolivie, par exemple, à la suite de la privatisation du système hydraulique à Cochabamba, les dépenses en eau ont atteint des sommets, avec des factures d’eau pour certains habitants égales à un quart, voire plus, de leur revenu, ce qui a entraîné des violences civiles.
38. L’eau représente désormais la troisième industrie mondiale après le pétrole et l’électricité, mais son caractère vital et sa raréfaction vont en faire, à court terme, la première source potentielle de profits.
39. A l’Assemblée générale des Nations Unies, le Venezuela a dénoncé la privatisation de l’eau comme facteur de conflit. Le développement du secteur privé porterait un risque d’affrontements communautaires. La marchandisation d’un bien comme l’eau pose en effet le risque que les intérêts économiques continuent à primer sur des problèmes d’ordre environnemental. L’intensité du débat entre partisans et détracteurs de la participation du secteur privé a peut-être occulté le succès rencontré par ce mode de gestion. Des rapports de la Banque mondiale (rapport Gassner) et de l’OCDE montrent des gains de productivité et une meilleure connexion des habitations aux services d’eau et d’assainissement. Néanmoins, si certains Etats décident de s’en remettre à des multinationales pour la gestion de leurs ressources en eau, il revient aux gouvernements d’attribuer aux entreprises privées des contrats d’affermage limités (dans le temps par exemple), en complément d’un cadre réglementaire strict et de mécanismes de plainte et de responsabilisation. Le rapport de l’experte indépendante au Conseil des droits de l’homme (29 juin 2010) rappelle que «les Etats ont le devoir d’imposer une réglementation et une surveillance aux acteurs qu’ils associent à la fourniture de services (…). Quand bien même l’Etat ne fournit pas directement les services, son rôle demeure incontournable et critique».
40. La participation du secteur privé doit être encadrée. Le rapport de 2008 du Conseil des droits de l’homme présente un cadre stratégique qui repose sur trois principes: le devoir de protection de l’Etat contre les violations des droits de l’homme commises par des tiers, la responsabilité des entreprises de respecter les droits de l’homme et la nécessité d’un accès à des voies de recours effectives et à des mécanismes d’examen des violations alléguées des droits de l’homme.
41. Aux Etats-Unis, l’ancienne administration républicaine avait refusé d’interdire le composant chimique nocif désormais proscrit en Europe, l’atrazine, que l’on retrouve, entre autres, dans l’eau du robinet. Quant à Nestlé et d’autres vendeurs d’eau en bouteille, ils se livrent à une compétition effrénée pour capter ce marché de plus en plus lucratif, quitte à saccager sources et rivières.

5. Les différentes causes de la pénurie et de l’accroissement des besoins en eau

42. L’internationalisation des finances et du commerce a des répercussions sur des phénomènes mondiaux, y compris sur la demande et la consommation de ressources naturelles. La mondialisation a entraîné une augmentation de la demande en eau en raison notamment de l’expansion et de l’accélération de l’industrialisation.
43. A cela s’ajoute le problème de la quantité limitée de l’eau. Bien que le stock global en eau soit suffisant pour répondre à la demande actuelle, sa consommation va en augmentant, si bien que l’on va ressentir un manque dans les prochaines années. Il y a trois raisons principales à l’amenuisement de la ressource en eau douce: l’irrigation, le gaspillage et la pollution.
44. L’irrigation est un problème majeur car cette pratique représente près de 70 % des ressources mondiales en eau renouvelable. L’irrigation touche directement à l’emploi de centaines de millions d’agriculteurs pour qui la récolte est la source principale de revenu. Il est donc nécessaire d’investir dans des systèmes d’irrigation plus performants. Nombre d’entre eux, tels que l’irrigation gravitaire par aspersion ou encore au goutte-à-goutte, se sont révélés efficaces pour contrôler l’arrosage des champs. Les pays en développement constituant la majorité des pays agricoles, il convient de soutenir et de favoriser des transferts de technologie. A titre d’exemple, l’Algérie, le Maroc et la Tunisie se trouvent sous le seuil de «pénurie absolue» défini par les Nations Unies. Le secteur agricole absorbe environ 80 % de l’eau du Maghreb et la moitié y est perdue par évaporation dans les barrages et les canalisations à ciel ouvert, ou à cause de techniques d’irrigation peu performantes. Il faut également considérer le choix des cultures: la décision du Maroc d’opter pour une agriculture d’exportation très consommatrice en énergie, comme les tomates, apparaît aux yeux de beaucoup comme un non-sens écologique, alors que de nombreuses espèces de céréales demandent moins d’eau.
45. Pour réduire le gaspillage des ressources en eau, il est nécessaire de moderniser les réseaux d’adduction, en particulier dans les pays en développement où les infrastructures sont souvent vétustes. Dans les pays riches, l’urbanisation croissante et l’utilisation d’appareils consommant beaucoup d’eau, les lave-vaisselle par exemple, entraînent une diminution rapide de la quantité d’eau disponible.
46. La pollution est une conséquence de cette urbanisation croissante et de l’industrialisation, en raison notamment des rejets et des émissions des usines et des moyens de transport. Ces rejets augmentent la teneur des cours d’eau en substances toxiques. La mauvaise gestion de l’irrigation peut également entraîner une infiltration de la terre par des produits chimiques (pesticides, nitrates, etc.) et une salinisation des sols.
47. En outre, la population mondiale devrait atteindre environ 9,3 milliards d’habitants en 2050, population qui aura besoin de se nourrir, de se loger, de se vêtir et qui utilisera de l’énergie. Malheureusement, plusieurs pays à taux de croissance démographique très élevés sont localisés dans des zones où la disponibilité en eau est insuffisante. Le manque d’eau s’est déjà fait ressentir dans une partie de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique latine. De nombreux Etats disposent ainsi de moins de 1 700 m3 /habitant/an d’eau douce, et sont donc en situation de stress hydrique. Une vingtaine d’Etats se trouvent quant à eux sous le seuil de 1 000 m3/habitant/an et sont donc en situation de pénurie (en particulier en Afrique et au Moyen-Orient). Cela pourrait aboutir à une compétitivité accrue dans les années à venir, menant à terme à des conflits.
48. Ces querelles ont souvent lieu dans des pays pauvres et divisés qui ne possèdent qu’une ou deux sources de richesse. Dans ces pays, celui qui exerce le contrôle sur l’eau est susceptible de devenir très riche, alors que tous les autres habitants sont destinés à vivre dans la pauvreté. Dans les pays développés, la ressource en eau est contrôlée par le gouvernement et est distribuée de façon raisonnable entre les habitants. Dans les pays sous-développés, ce sont les groupes d’intérêt ou les chefs de bande qui se battent pour ces sources de richesse. On constate que les tensions sont favorisées lorsque, aux problèmes de gestion de l’eau, s’ajoutent les différences ethniques et/ou religieuses, qui entraînent des affrontements intercommunautaires.

6. Quelques exemples frappants

6.1. Le Proche-Orient

49. A l’époque des fusées et des missiles à longue portée, la volonté d’Israël de continuer à occuper, depuis la guerre des Six-Jours en 1967, les hauteurs du Golan en territoire syrien à l’est du lac de Tibériade, n’a pas ou plus grand-chose à voir avec une stratégie militaire de protection ou de dissuasion. Il s’agit tout simplement de s’assurer le contrôle d’un véritable «château d’eau» de 1 150 km2, qui fournit chaque année à peu près 500 millions de mètres cubes selon les Nations Unies dont l’essentiel serait canalisé vers le désert du Néguev; environ 70 % des eaux qui affluent vers le lac sont pompés et acheminés vers Israël. Cette occupation du Golan a aussi pour conséquence d’écarter la frontière syrienne des rives du lac et donc de l’eau. Cette réserve est vitale pour la région et, directement ou indirectement, les Israéliens, les Palestiniens et les Jordaniens y puisent.
50. C’est ainsi que très souvent derrière les affrontements se profilent ainsi des microguerres, importantes mais ignorées, pour la maîtrise d’un approvisionnement qui conditionne le développement de l’agriculture et donc la vie dans cette région.
51. Les Accords d’Oslo de 1995 n’avaient pas réussi à trancher la question de la répartition de l’eau en temps de paix, alors que, après le Liban, quatre pays – Israël, la Jordanie, la Syrie et les Territoires palestiniens – dépendent du bassin du Jourdain.
52. Le partage des eaux du Jourdain, comme de celles de ses affluents, sert de toile de fond, de prétexte, d’explication à de nombreux affrontements, notamment en ce qui concerne la colonisation dans les territoires occupés, alors que l’article 12 des Accords d’Oslo précisait que les problèmes d’eau, comme les questions de bruit, d’assainissement, de protection de la faune et de la flore ainsi que des espèces migratrices, devaient être réglés en dehors des discussions et des affrontements politiques.
53. Il est clair que ce genre d’affrontement n’existerait pas si cette région disposait d’eau en quantité importante et si les pluies n’étaient pas aussi irrégulières. Les craintes liées aux ressources en eau sont telles que les Israéliens accusent régulièrement les Palestiniens d’empoisonner ou de colmater des sources et que l’Autorité palestinienne accuse parfois Israël d’avoir maintenu pendant des années une occupation du Liban-Sud pour mettre en place un détournement souterrain du fleuve côtier Litani, qui prend sa source dans la plaine (libanaise) de la Bekaa et change brusquement de direction vers l’ouest et la mer à quelques kilomètres de la frontière nord d’Israël, ou encore de pomper clandestinement de l’eau un peu partout.
54. Il s’agit là de véritables guerres de l’eau qui se révèlent intenses et vitales pour les populations.
55. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a attiré l’attention de l’opinion publique sur la situation critique de l’accès à l’eau pour les habitants de la bande de Gaza où une grande partie de la population n’a pas d’accès direct à l’eau potable et doit compter sur l’eau achetée à des fournisseurs privés.
56. Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA) des Nations Unies, à la suite de l’assaut militaire israélien dans le cadre de l’opération «Plomb durci», 150 000 habitants de Gaza sont toujours affectés par l’insuffisance de l’approvisionnement en eau, dont 50 000 restent sans eau, pendant que les autres reçoivent de l’eau une fois tous les cinq ou six jours.
57. La municipalité de Gaza a été forcée de pomper et de rejeter des tonnes d’eaux usées directement dans la mer pour éviter de polluer et de contaminer les eaux souterraines et l’eau potable.

6.2. Le Caucase

58. La plus grande rivière du Caucase est l’Araxe. Elle coule à la frontière de la Turquie, de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan et de l’Iran pour se jeter dans la Koura. Elle constitue ainsi une source d’eau potable pour un grand nombre d’Etats mais des millions de tonnes d’eaux usées et de déchets industriels la polluent. En outre, il est prévu que, d’ici à dix ans, l’on manquera sévèrement d’eau dans cette région. Ces tensions autour de l’eau sont encore exacerbées par les mauvaises relations émanant d’autres conflits dans la région.

6.3. La Chine

59. En 2000, des milliers d’agriculteurs chinois ont affronté la police au sujet d’un plan gouvernemental visant à récupérer l’écoulement d’eau d’un réservoir local pour les villes, les industries et d’autres utilisations. Les agriculteurs se servaient depuis longtemps de l’eau du fleuve Jaune et une sécheresse avait rendu l’approvisionnement en eau encore plus critique qu’habituellement.
60. Les altercations sont nées dans les pays en aval du bassin fluvial, où il ne reste presque plus d’eau. L’aval du fleuve Jaune a connu des périodes de sécheresse complète, qui se rallongent de plus en plus depuis quelques années.
61. La rivière Salween prend son élan dans le sud de la Chine puis coule à Myanmar (Birmanie) et en Thaïlande. Chacune de ces nations planifie la construction de barrages et de projets de développement le long du Salween, et aucun de ces projets n’est compatible. De plus, la Chine a démontré peu d’intérêt pour la question du partage des eaux. Elle était un des trois pays qui ont voté contre une convention des Nations Unies de 1997 qui établissait des directives et des principes sur l’utilisation des rivières internationales.

7. Vers une culture de la responsabilité pour préserver la paix

62. Alors que la population mondiale a plus que triplé depuis le début du XXe siècle, l’utilisation des ressources en eau douce a été multipliée par six. Dans les cinquante années à venir, la population mondiale aura encore augmenté de 40 % à 50 %. Avec la croissance de la population, conjuguée à l’industrialisation et à l’urbanisation, les besoins en eau seront considérables et les répercussions sur l’environnement, multiples.
63. La situation est d’autant plus dramatique que la hausse de la consommation d’eau pour les besoins humains n’entraîne pas seulement une baisse de la quantité d’eau disponible pour le développement industriel et agricole, mais constitue également une grave menace pour les écosystèmes aquatiques et leurs espèces. De ce fait, les écosystèmes ne parviennent plus à maintenir l’équilibre de notre environnement.
64. La question se pose alors de savoir s’il y a assez d’eau pour éviter que ne s’ajoute à toutes les raisons de faire la guerre celle du manque d’eau.
65. L’eau douce est une ressource limitée et vulnérable mais vitale pour l’homme. Or, un habitant de la planète sur six continue de ne pas avoir accès à l’eau, alors que pratiquement une personne sur deux vit sans système d’évacuation des eaux usées.
66. Le réchauffement climatique augmentera l’évaporation et réduira sérieusement les précipitations, jusqu’à 20 % au Proche-Orient et en Afrique du Nord et la ration d’eau disponible par personne aura sans doute diminué de moitié dans ces régions d’ici au milieu du siècle.
67. Deux cent soixante bassins-versants fluviaux, partagés par deux ou plusieurs pays, ont été répertoriés. En l’absence d’accords ou de traités, on risque de voir surgir des tensions transfrontalières. Les grands projets qui ne sont pas accompagnés de programmes régionaux de coopération peuvent être à l’origine de conflits.
68. En raison des pressions exercées sur la mer d’Aral, la moitié de sa superficie a disparu, soit deux tiers de son volume d’eau; 36 000 km2 de fonds marins sont désormais recouverts de sel.
69. Cette brusque raréfaction d’un élément au rôle central dans la vie humaine provoquera des tensions et exacerbera les conflits dans le monde entier, alimentant un cercle vicieux. Par exemple, dans les pays en développement, on peut craindre que la raréfaction de l’or bleu ne provoque une dégradation des conditions d’exploitation agricole et une diminution du niveau de vie des paysans. Ces derniers seront alors tentés de quitter leur région natale pour rejoindre des villes où, faute de moyens, les pouvoirs publics ne pourront assurer la construction des infrastructures nécessaires. Cela pourrait générer du mécontentement et donc un recours à la violence comme exutoire au désespoir de ces populations déplacées. Il ne faut donc pas négliger le rôle du manque d’eau dans la dégradation du tissu social.
70. Il devient par conséquent nécessaire et urgent de prendre des mesures visant à mettre à la disposition des Etats des quantités d’eau suffisantes, et de veiller à ce que l’eau présente toutes les qualités d’hygiène et de salubrité.
71. Le 28 juillet 2010, les Nations Unies ont proclamé l’accès à l’eau et à l’assainissement pour répondre aux besoins humains de base comme étant un droit de l’homme fondamental (à l’initiative de la Bolivie) (Résolution A/RES/64/292). Le 30 septembre 2010, le Conseil des droits de l’homme a déclaré, à son tour, que «le droit fondamental à l’eau potable et à l’assainissement découle du droit à un niveau de vie suffisant et qu’il est indissociable du droit au meilleur état de santé physique et mentale susceptible d’être atteint, ainsi que du droit à la vie et à la dignité». Il a réaffirmé que «c’est aux Etats qu’incombe au premier chef la responsabilité de garantir le plein exercice de tous les droits de l’homme» (A/HRC/RES/15/9). C’est pourquoi l’Etat doit faire en sorte de veiller à fournir l’eau gratuitement, ou du moins à ce qu’elle soit fournie à un prix abordable pour les plus défavorisés. L’eau en tant que bien de luxe pour les piscines ou pour laver les voitures doit, au contraire, être considérée comme un bien économique privé et mis à disposition selon les règles du marché.
72. Une bonne gestion des ressources en eau doit être considérée comme un facteur de paix, indispensable pour éviter que la pénurie de cette ressource vitale ne devienne un enjeu géostratégique capable de déclencher des conflits armés. Dans ce contexte, le rôle des collectivités territoriales est très important et les décideurs doivent essayer d’investir dans un bon système d’assainissement des eaux et veiller à fournir un tel système à la population.
73. Bien que des renseignements fiables soient souvent difficiles à obtenir, une base de données contenant des informations météorologiques, hydrauliques et socio-économiques reste la clé pour une gestion efficace à long terme. Des tensions entre les Etats peuvent apparaître lorsque les données ne sont pas partagées de façon adéquate ou sont détournées pour bloquer les plans de développement. Des disparités dans la capacité à gérer et à partager les données peuvent également entraver la coopération.

8. Conclusions et recommandations

74. Il est clair qu’il faudra prévoir à l’avenir une gestion intelligente des ressources en eau, en gardant à l’esprit que l’eau a toujours créé un lien entre les peuples et les a rapprochés. Mais cela dépend en grande partie de la bonne volonté des gouvernements.
75. Compte tenu de ce qui précède, il apparaît urgent que les Etats reconnaissent que l’accès à l’eau est un droit fondamental de l’homme.