1. Introduction
1. L'Assemblée parlementaire a adopté le 28 avril 2009
la
Résolution 1661 (2009) sur le respect des obligations et engagements de la
Serbie et décidé de poursuivre la procédure de suivi à l’égard de
la Serbie. Pour assurer le contrôle de la mise en œuvre de cette
résolution, la commission de suivi a désigné le 1er octobre
2009 M. Davit Harutyunyan (Arménie, GDE) comme corapporteur, et
désigné, en remplacement de M. Andreas Gross (Suisse, SOC), corapporteur
depuis 2006, Mme Sinikka Hurskainen (Finlande,
SOC) le 27 avril 2010, puis M. Indrek Saar (Estonie, SOC) le 31
mai 2011.
2. Trois visites d'information ont été organisées en Serbie du
20 au 22 janvier 2010, du 29 novembre au 2 décembre 2010
et du 19 au 22 septembre 2011 pour évaluer
les derniers développements politiques et juridiques.
3. Nous félicitons la commission des affaires étrangères du Parlement
serbe pour la préparation et la finalisation d'une feuille de route
pour la mise en œuvre des engagements en suspens et des obligations statutaires
conformément à la
Résolution
1661 (2009). Dans cette résolution, l'Assemblée invitait les autorités serbes
«à élaborer une feuille de route pour la mise en œuvre des obligations
et engagements que le pays doit encore honorer en matière de coopération
avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), de
fonctionnement des institutions démocratiques, d’Etat de droit et
de droits de l’homme». Nous remercions la délégation de la Serbie
auprès de l'Assemblée parlementaire et son secrétariat pour leur
collaboration et pour l'envoi à la commission de suivi d'une feuille
de route approuvée par le Parlement serbe le 16 mars 2011
et
mise à jour en décembre 2011. Les corapporteurs souhaitent également
remercier la délégation serbe pour les commentaires soumis à la
commission de suivi le 30 novembre 2011.
4. La préparation de ce rapport et l'organisation des visites
d'information en Serbie ont été possibles grâce à la collaboration
du Parlement de la Serbie et de la délégation serbe auprès de l'Assemblée
parlementaire, ainsi que du Bureau du Conseil de l'Europe à Belgrade,
que les corapporteurs souhaitent vivement remercier pour leur précieuse
assistance.
2. Développements
récents
2.1. Coopération régionale
5. Au cours des derniers mois, la Serbie a accompli
des progrès dans le domaine de la coopération régionale. Une série
de visites diplomatiques ont contribué à améliorer les relations
régionales de la Serbie avec ses pays voisins. Le Président serbe,
M. Tadić, s'est rendu au Monténégro du 7 au 8 juillet 2010, pour
la première fois depuis la dissolution de la Communauté d'Etats
de Serbie-et-Monténégro en juin 2006. Le Président Tadić a assisté,
le 11 juillet 2010, à la commémoration du massacre de Srebrenica,
au cours de laquelle il a exprimé des regrets pour les crimes commis
à Srebrenica. Le Président croate, Mr Josipović, a effectué sa première
visite officielle en Serbie du 18 au 19 juillet 2010. Le Président
Tadić et le Président Josipović ont exprimé le souhait profond d'améliorer
les relations entre leurs pays et déclaré leur accord sur le fait
que les deux voisins sont sur la bonne voie pour le règlement des
questions pendantes (c'est-à-dire le retour des réfugiés serbes
de Croatie, la question de la frontière des Etats, ainsi que celle
des personnes portées disparues et celle des minorités et de la
protection de leurs droits). Au cours de sa visite à Vukovar le 4
novembre 2010, le Président Tadić a rendu hommage aux victimes des
atrocités de la guerre commises en 1991, et avec le Président croate,
M. Josipović, a présenté ses excuses aux familles des personnes assassinées.
Le 6 juillet 2011, au cours de sa première visite officielle à Sarajevo
depuis cinq ans, le Président Tadić a assuré que la Serbie souhaitait
respecter l'intégrité territoriale et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine.
En reconnaissance de son action politique en faveur de la réconciliation
des Balkans et de l’intégration de son pays dans le processus de
construction européenne ainsi que de son soutien à la justice internationale,
Boris Tadić s’est vu décerner, le 2 novembre 2011, le prix Nord-Sud
du Conseil de l'Europe.
6. Convaincus que la Serbie peut jouer un rôle positif et constructif
pour la stabilisation de la région, nous souhaitons que les autorités
serbes poursuivent la mise en œuvre d'une politique extérieure visant
à renforcer le dialogue, la réconciliation et la coopération dans
la région, en particulier avec le Monténégro et la Croatie. Nous
encourageons les autorités serbes à poursuivre le dialogue et à
promouvoir des relations de bon voisinage fondées sur le respect
de la souveraineté des pays voisins
.
7. A la suite de l’adoption de la
Résolution 1786 (2011) sur la réconciliation et le dialogue politique entre les
pays de l’ex-Yougoslavie
, nous encourageons
les autorités serbes à appuyer la création d’une commission régionale
d’établissement des faits relatifs aux crimes de guerre et autres
violations graves des droits de l'homme commis sur le territoire
de l’ex-Yougoslavie (REKOM), en associant tous les pays impliqués dans
ces conflits afin d'améliorer la compréhension mutuelle des événements
passés, d’honorer et de reconnaître toutes les victimes. Nous nous
réjouissons que cette initiative ait recueilli le soutien du Président Boris
Tadić, de la présidente du parlement Slavica Đukić Dejanović et
de nombreux leaders de partis politiques
.
8. Nous saluons un premier accord intervenu le 19 juin 2011 sur
la distribution des biens de l'ex-République fédérative socialiste
de Yougoslavie entre les Etats successeurs et encourageons les autorités
des pays concernés à poursuivre et achever les négociations en cours
.
2.2. Coopération avec
le Conseil de l'Europe
9. Nous saluons la ratification par la Serbie de plusieurs
conventions du Conseil de l'Europe depuis juin 2009, y compris:
- la Charte sociale européenne
(révisée) (STE no 163);
- la Convention sur la cybercriminalité et son Protocole
additionnel (STE nos 185 et 189);
- la Convention sur la lutte contre la traite des êtres
humains (STCE no 197);
- la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à
la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement
du terrorisme (STCE no 198);
- la Convention pour la prévention du terrorisme (STCE no 196);
- le Protocole portant amendement à la Convention européenne
pour la répression du terrorisme (STE no 190);
- la Convention européenne sur la télévision transfrontière
(STE no 132);
- la Convention européenne pour la protection du patrimoine
archéologique (révisée) (STE no 143);
- la Convention-cadre sur la valeur du patrimoine culturel
pour la société (STCE no 199);
- la Convention sur la protection des enfants contre l'exploitation
et les abus sexuels (STCE no 201);
- la Convention européenne sur l'imprescriptibilité des
crimes contre l'humanité et des crimes de guerre (STE no 82);
- la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine
(STE no 164);
- la Convention européenne du paysage (STE no 176);
- le Troisième Protocole additionnel à la Convention européenne
d'extradition (STCE no 209).
10. Au cours de la même période, les conventions suivantes ont
été signées par les autorités serbes et nous les encourageons à
les ratifier dans les meilleurs délais:
- la Convention européenne relative au dédommagement des
victimes d'infractions violentes (STE no 116);
- la Convention européenne sur l'exercice des droits des
enfants (STE no 160);
- la Convention européenne en matière d'adoption des enfants
(révisée) (STCE no 202);
- la Convention du Conseil de l'Europe sur l'accès aux documents
publics (STCE no 205) .
11. Conformément au paragraphe 14.5.6 de la
Résolution 1661 (2009), la Serbie est invitée à signer et ratifier la Convention-cadre
européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités
ou autorités territoriales (Convention de Madrid, STE no 106).
Nous avions été informés en décembre 2010 que le processus de ratification
était prévu dans un futur proche. Nous encourageons les autorités
serbes à y procéder dans les meilleurs délais.
2.3. Coopération avec
l'Union européenne
12. Les derniers mois ont été caractérisés par une activité
intense visant à accélérer l'adhésion de la Serbie à l'Union européenne.
Les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne ont
convenu, le 25 octobre 2010, de demander à la Commission européenne
de préparer un avis sur la candidature d’adhésion de la Serbie.
Le Commissaire européen à l'élargissement et à la politique européenne
de voisinage, M. Štefan Füle, a remis à la Serbie le questionnaire
de la Commission, auquel la Serbie a répondu fin janvier 2011. Le questionnaire
comprenait près de 2 500 questions portant sur 33 domaines.
13. La Serbie a adopté en décembre 2009 un programme national
pour l'intégration de la Serbie dans l'Union européenne et en mars
2010 un plan d'action axé sur des activités fondamentales
(et «dix commandements» de l’Union
européenne) en vue d'obtenir le statut de pays candidat d’ici fin
2011. Nous avons noté qu'un grand nombre de ses activités fondamentales
(telles que la coopération avec le TPIY, le financement des partis
politiques, la réforme du système judiciaire, les organes de réglementation,
l'inclusion des Roms, etc.) font partie des obligations et engagements
en suspens identifiés dans la
Résolution
1661 (2009).
14. Nous notons par ailleurs que l'Accord de stabilisation et
d'association a été ratifié par le Parlement européen le 19 janvier
2011 et par 23 pays de l'Union européenne depuis le 14 juin 2010
.
15. Il est indéniable que la volonté exprimée par les autorités
serbes d'intégrer l'Union européenne a été un moteur dans la conduite
des réformes. Les progrès législatifs réalisés au cours des derniers
mois, mais aussi l'arrestation des fugitifs Mladić et Hadzić (voir infra), en ont été l'illustration
et nous encourageons vivement les autorités serbes à poursuivre
leurs efforts pour achever le processus d'intégration européenne.
16. Nous prenons acte du rapport de suivi publié par la Commission
européenne le 12 octobre 2011. Dans ses conclusions, la Commission
européenne recommande «que le Conseil accorde à la Serbie le statut
de pays candidat, compte tenu des progrès accomplis jusqu'à présent
et étant entendu que le pays reprenne le dialogue avec le Kosovo
et procède rapidement à la mise en œuvre, de bonne foi, des accords
déjà conclus», ainsi que «l'ouverture des négociations d'adhésion
avec la Serbie dès que le pays aura accompli de nouveaux progrès
substantiels en ce qui concerne la priorité essentielle suivante:
réaliser de nouvelles avancées sur la voie de la normalisation des
relations avec le Kosovo, dans le respect des conditions du processus
de stabilisation et d'association, en respectant pleinement les
principes de la coopération régionale inclusive; en respectant pleinement
les dispositions du traité instituant la Communauté de l'énergie;
en trouvant des solutions pour les télécommunications et la reconnaissance
mutuelle des diplômes; en continuant de mettre en œuvre de bonne
foi tous les accords conclus et en coopérant activement avec la
mission EULEX pour que celle-ci exerce ses fonctions sur l'ensemble
du territoire du Kosovo»
. Le 9 décembre
2011, le Conseil européen a décidé de réexaminer en février 2012
la décision d'octroi du statut de pays candidat à la Serbie, sous
réserve de progrès additionnels.
2.4. Coopération avec
le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et poursuites
des criminels de guerre
17. Dans sa
Résolution
1661 (2009), l'Assemblée avait invité la Serbie à coopérer pleinement
avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY).
Nous souhaitons féliciter les autorités serbes pour l'arrestation
et l'extradition des deux derniers fugitifs de guerre recherchés
par le TPIY, Ratko Mladić et Goran Hadzić (arrêtés respectivement
le 26 mai 2011 et le 20 juillet 2011). Ces arrestations marquent
une étape décisive et ouvrent de nouvelles perspectives de justice
pour les victimes du conflit, de réconciliation dans la région et
d'intégration européenne.
18. Les corapporteurs forment le vœu que la ratification de la
Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre
l'humanité et des crimes de guerre (STE no 82)
permette à la justice de poursuivre son cours et encouragent la
Serbie à ratifier la Convention européenne relative au dédommagement
des victimes d'infractions violentes (STE no 116)
signée le 12 octobre 2010, conformément à la
Résolution 1661 (2009) (paragraphe 12).
19. Nous saluons également l'adoption, le 31 mars 2010, par l'Assemblée
nationale de la Serbie, d'une déclaration condamnant les crimes
commis à Srebrenica. Cette déclaration constitue une étape importante dans
le programme de réconciliation et de renforcement des relations
de bon voisinage dans la région, conformément à l'esprit de la
Résolution 1661 (2009).
20. Nous souhaitons que ce processus de réconciliation se poursuive
et que les crimes commis durant le conflit de l'ex-Yougoslavie soient
poursuivis. Nous encourageons les autorités serbes à enquêter sur
les personnes soupçonnées de crimes de guerre, de crimes contre
l'humanité et de génocide, et, s'il existe suffisamment de preuves,
à engager des poursuites à leur encontre.
21. A cet égard, nous pensons que la signature d’un protocole
de coopération et d’extradition mutuelle par les parquets nationaux
spécialisés dans les crimes de guerre en Serbie et en Bosnie-Herzégovine
pourrait contribuer à des enquêtes plus effectives sur les crimes
de guerre commis dans la région.
22. Nous souhaiterions également réitérer la nécessité d'offrir
aux témoins la protection adéquate, conformément à la
Résolution 1784 (2011) de l'Assemblée sur la protection des témoins: pierre
angulaire de la justice et de la réconciliation dans les Balkans.
Avec le Commissaire aux droits de l'homme, nous saluons l'intention
des autorités d'améliorer le système de protection des témoins par
le transfert des compétences concernées au ministère de la Justice
.
2.5. Evénements au Kosovo
23. La coopération avec le Kosovo depuis l'adoption de
la
Résolution 1661 (2009) a été marquée par la poursuite du dialogue et de la
recherche d'une solution par des moyens pacifiques, qui s'est traduite
par la signature d'un protocole et de son annexe portant sur la
coopération technique entre le ministère de l'Intérieur de la Serbie
et la mission «Etat de droit» de l'Union européenne (EULEX) le 11
septembre 2009. Les événements tragiques intervenus cet été dans
le nord du Kosovo montrent cependant que les relations entre Belgrade
et Pristina restent tendues. Rappelons ici quelques faits intervenus
depuis l'adoption de la
Résolution 1661
(2009).
24. A la demande de la Serbie, l’Assemblée générale des Nations
Unies a demandé à la Cour internationale de justice un avis consultatif
sur la conformité de la déclaration unilatérale d’indépendance des
institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo avec
le droit international. La cour a statué le 22 juillet 2010 que
la déclaration d’indépendance du Kosovo n’était pas contraire au
droit international
.
25. Le 26 juillet 2010, lors de sa session spéciale, le Parlement
serbe a adopté une résolution sur le Kosovo et a approuvé (par 192
voix sur 220) la «poursuite des activités serbes en défense de sa
souveraineté et de son intégrité territoriale». Le Parti radical
serbe, le Parti démocratique de Serbie et les Démocrates libéraux ont
voté contre.
26. Le 9 septembre 2010, l’Assemblée générale des Nations Unies
a adopté par consensus une résolution conjointe de la Serbie et
de l’Union européenne sur le Kosovo. La résolution reconnaît l’avis
consultatif de la Cour internationale de justice sur la question
précitée et appelle au dialogue entre Belgrade et Pristina. Le Président
Tadić a souligné que cette résolution ouvre la voie à un dialogue
sur de futures solutions au problème du Kosovo et préserve le droit
de la Serbie de défendre son intégrité territoriale et ses intérêts légitimes
au Kosovo par des moyens diplomatiques et pacifiques, en respectant
les droits légitimes de la population albanaise
.
27. Dans une résolution approuvée le 1er décembre
2010, la commission des affaires étrangères du Parlement européen
a demandé l’ouverture «sans retard» de discussions avec le Kosovo
et a salué la volonté de la Serbie d’engager un dialogue dans le
cadre de l’Union européenne, soulignant que l’engagement et la volonté
des deux parties d’arriver à un compromis sont nécessaires pour
la stabilité à long terme de la région et l’amélioration du bien-être
de ses habitants.
28. Nous saluons les discussions entre les représentants serbes
et albanais du Kosovo qui se sont déroulées au 1er semestre
de 2011 et ont privilégié une approche pragmatique, centrée sur
les problèmes quotidiens rencontrés par les citoyens de la région,
sans préjuger de la position des parties concernées sur le statut
du Kosovo. Nous nous réjouissons de l'accord obtenu le 2 juillet
2011 portant sur la liberté de mouvement des personnes et des véhicules
,
et l'échange d'information concernant les registres d'état civil (avec
la coopération technique d'EULEX). Un accord relatif à la reconnaissance
mutuelle des diplômes et titres universitaires (qui seront certifiés
par l’Association universitaire européenne) a été conclu le 22 novembre 2011.
Le médiateur de l’Union européenne a également noté «certains progrès»
s’agissant du droit pour le Kosovo de participer aux forums régionaux
sous son propre drapeau et ses propres emblèmes, droit auquel la
Serbie s’oppose au motif que cela conduirait à reconnaître l’indépendance
du Kosovo
. Nous espérons
que les instances tripartites prévues puissent rapidement être opérationnelles
pour assurer la mise en œuvre de cet accord.
29. Cet accord a été diversement accueilli en Serbie: alors que
le chef de la délégation serbe en charge des négociations, Borislav
Stefanovic, soulignait que cet accord profitait surtout aux Serbes
vivant dans les enclaves au sud de la rivière Ibar, le Parti démocratique
de Serbie (DSS), le Parti radical Serbe (SRS) et le Parti progressiste
serbe (SNS) ont estimé que cet accord s'apparente à une perte progressive
du Kosovo. Le Parti libéral démocratique (LDP) y voit plutôt l'amorce
d'une nouvelle politique, qui profitera aux citoyens
.
30. Nous encourageons la Serbie à continuer à privilégier cette
approche pragmatique et concrète, et à mener à bien les prochaines
discussions portant sur les échanges commerciaux, les télécommunications
et l'approvisionnement énergétique.
31. Dans le même temps, nous exprimons notre vive préoccupation
face à la flambée de violence survenue cet été et qui perdure aujourd'hui
,
montrant que les relations entre les parties concernées restent
fragiles et tendues. La Serbie (et la Bosnie-Herzégovine) ayant
refusé de reconnaître les tampons douaniers portant les symboles
du Kosovo, ou l'inscription «Services douaniers du Kosovo» (tels
que reconnus par l'UNMIK), le Kosovo a décrété le 20 juillet 2011
le boycott des produits en provenance de Serbie et de Bosnie-Herzégovine, une
mesure qui a provoqué des manifestations de protestation dans les
quatre municipalités serbes du nord du Kosovo. Le 25 juillet 2011,
Pristina a tenté de déployer des douaniers et des policiers relevant
de son autorité sur les deux postes frontière Jarinje et Brnjak
pour faire respecter l'embargo commercial, décrété cinq jours plus
tôt, déclenchant la colère des Serbes du nord du Kosovo. Des incidents
violents et tragiques s'ensuivirent, avec la mort d'un policier
kosovar et l'incendie d'un des deux postes frontière.
32. Dans la nuit du 30 au 31 juillet 2011, le Parlement serbe
a adopté une Déclaration sur le Kosovo par 181 voix (sur 207)
,
condamnant la violence et appelant à la reprise du dialogue pour
trouver une solution pacifique à la crise créée par l'action unilatérale
de Pristina et la tentative de contrôle des postes frontière par la
police du Kosovo.
33. Les 4 et 5 août, le commandant de la KFOR a conclu des accords
avec les autorités de Belgrade et de Pristina: les deux postes frontière
seront renommés «zones de sécurité militaire» et contrôlés par les
troupes de la KFOR jusqu'à la mi-septembre. La KFOR veillera au
passage des véhicules de 3,5 tonnes maximum, des convois humanitaires
et des produits alimentaires.
34. A la mi-août 2011, plusieurs bus transportant des passagers
entre Belgrade et l'est du Kosovo ont été refoulés par la police
du Kosovo
.
35. Nous invitons toutes les parties concernées à reprendre le
dialogue, à condamner tout acte de violence et à se conformer aux
accords internationaux – en particulier la Résolution 1244 du Conseil
de Sécurité des Nations Unies et l’Accord de libre-échange centre-européen
(CEFTA) auquel la Serbie et la MINUK (représentant le Kosovo) sont
parties – relatifs à la circulation des personnes et des marchandises.
36. Nous recommandons également aux autorités serbes de poursuivre
le dialogue avec Pristina fondé sur une approche pragmatique centrée
sur les besoins et la sécurité des citoyens, et de faciliter dans
ce contexte la participation des représentants du Kosovo dans les
instances internationales et régionales. Nous souhaitons par ailleurs
rappeler que la commission des questions politiques de l'Assemblée
prépare actuellement un rapport sur la situation au Kosovo et affirmer
notre soutien plein et entier au rapporteur sur la situation au Kosovo,
M. Björn von Sydow, qui a déclaré à l’issue de sa visite dans la
région début novembre 2011 que «la solution pour sortir de l'impasse
dans le nord du Kosovo réside dans la recherche d'un compromis,
avec des concessions de la part de toutes les parties»
.
Nous soulignons également qu’une solution pacifique suppose que
toutes les parties fassent montre d’engagement et de bonne volonté
et soient disposées à parvenir à un compromis.
37. Enfin, nous notons que la question du Kosovo a récemment été
au centre des débats sur l'intégration de la Serbie dans l'Union
européenne. Lors de son voyage officiel en Serbie le 23 août 2011,
Mme Angela Merkel, chancelière de l'Allemagne,
a invité la Serbie à démanteler les «institutions parallèles» serbes
opérant dans le nord du Kosovo
. Cette demande a été considérée comme inacceptable
par le Président Tadić (qui n'envisage pas de quitter le nord du
Kosovo) et a été perçue comme une nouvelle condition posée à l'obtention du
statut de candidat et à l'ouverture des négociations en vue de l'adhésion
de la Serbie à l'Union européenne. A l’approche des élections législatives
de 2012, la question du Kosovo est également un sujet de plus en
plus brûlant de politique intérieure. Nous sommes quelque peu inquiets
que le DSS ait décidé de boycotter les sessions plénières du parlement
depuis le 20 octobre 2011, dans l’attente du débat au sein du parlement
d’une nouvelle déclaration sur le Kosovo.
38. Nous prenons note qu’un accord de principe sur les points
de passage a été conclu le 2 décembre 2011, sous la médiation de
l’Union européenne. Selon l’annonce du Conseil des ministres de
l'Union européenne, les parties vont mettre en place progressivement
des postes de contrôle communs, intégrés et uniques sur tous les
points de passage entre leurs territoires, en présence d’EULEX,
conformément à son mandat
. Le nouveau cycle
de discussions entre Belgrade et Pristina a également abordé l’application
des accords déjà signés. La mise en œuvre pleine et entière de l’accord
relatif à la liberté de circulation est attendue le 26 décembre
2011, conférant ainsi à tous la possibilité de voyager librement.
Les parties devraient commencer à reproduire les documents d’état
civil à compter du 5 décembre 2011, conformément à l’accord sur
le registre d’état civil. Nous espérons que ces accords contribueront
à apaiser les tensions dans le nord du Kosovo et permettront la
poursuite du dialogue entre Belgrade et Pristina par des moyens
pacifiques et diplomatiques.
3. Fonctionnement
des institutions démocratiques
3.1. Réforme de la loi
électorale
39. Deux problèmes essentiels avaient été signalés dans
la
Résolution 1661 (2009). Le premier a trait aux mandats gérés par les partis.
Selon l'avis de la Commission européenne pour la démocratie par
le droit (Commission de Venise), «les membres du parlement sont
considérés comme des représentants de l’ensemble du peuple et ne
doivent des comptes qu’à leur conscience. En conséquence, ils doivent
se conformer uniquement aux règles et aucun ordre ou instruction
ne peut leur être imposé
». Dans sa
Résolution 1747 (2010), l’Assemblée exhorte le parlement de Serbie «à réviser
le cadre constitutionnel existant en vue de supprimer le mandat
géré par le parti et à réviser en conséquence la législation électorale,
afin d’augmenter pour les électeurs la transparence concernant la
procédure d’attribution de sièges aux listes de partis» et «à abroger
les dispositions constitutionnelles et législatives prévoyant le
rappel des représentants du peuple par les partis politiques (ce
qui est appelé le “mandat impératif”
), et les dispositions
législatives (…) permettant le changement d’ordre des candidats
sur les listes des partis après la tenue des élections
». Par
ailleurs, l’OSCE/BIDDH et la Commission de Venise ont souligné,
dans la Directive sur la réglementation des partis politiques
, «qu’il
arrive que des candidats élus sur une liste de parti renoncent à
leur affiliation au parti ou changent de parti au cours de leur
mandat. (…) Les fonctionnaires élus sont élus par les citoyens dans le
cadre d’élections. La législation sur les partis politiques ne doit
pas transférer à un parti politique le contrôle du mandat conféré
par les électeurs
».
40. Il nous a été expliqué que le système des mandats gérés par
les partis a été traditionnellement établi pour garantir la stabilité
politique. Nous avons aussi été informés que le système électoral
devrait être révisé sous peu et qu’un système mixte devrait être
instauré (avec des députés directement élus et des députés élus à
partir des listes des partis). Cependant, le passage à un système
mixte peut ne pas en soi régler entièrement la question des mandats
gérés par les partis, à moins qu'il soit interdit de changer l'ordre
des candidats sur les listes des partis. La réforme du système de
mandats gérés par les partis était un élément essentiel des engagements
postadhésion de la Serbie et des obligations statutaires du Conseil
de l'Europe, comme le rappelle la
Résolution 1661 (2009).
41. Le projet de loi «modifiant et amendant la loi relative à
l’élection des membres du parlement» préparé au printemps 2011 envisageait
l'instauration de ce système mixte. Dans l'avis adopté en mars 2011
, la Commission
de Venise a rappelé la position qu'elle avait prise en 2006 conjointement
avec l'OSCE/BIDDH, spécifiant que «l’article 84 de la loi autorise
les partis à choisir arbitrairement les candidats de la liste qui deviendront
membres du parlement, après les élections, plutôt que d’en déterminer
l’ordre au préalable. Cette procédure limite la transparence du
système et confère aux partis politiques une position de force disproportionnée
vis-à-vis des candidats». La Commission de Venise notait ainsi que
l'amendement proposé ne faisait que «tempérer» l'article 84, qui
prescrit qu’«au moins la moitié des sièges remportés seront alloués aux
candidats selon l’ordre de la liste, tandis que pour le surplus,
l’ancien système de désignation discrétionnaire par les partis subsiste».
42. En 2009, l'Assemblée avait invité les autorités serbes à réviser
ce projet de loi et à s'assurer que la loi électorale était pleinement
en conformité avec les normes européennes, et que soit aboli le
système des mandats gérés par les partis politiques (voir la
Résolution 1661 (2009), paragraphe 14.5.1). Nous prenons note, avec satisfaction,
que la loi sur l'élection des membres du parlement de la République
de Serbie, telle qu'amendée le 25 mai 2011, prévoit à présent que
tous les sièges remportés par un parti politique seront alloués
dans l'ordre des candidats sur la liste des partis, conformément
aux recommandations de la Commission de Venise.
43. Enfin, pour compléter cette réforme électorale, et réitérant
les demandes formulées par l'Assemblée et la Commission de Venise
,
nous invitons les autorités serbes à amender l'article 102.2 de
la Constitution et à supprimer les dispositions constitutionnelles
relatives aux mandats administrés par les partis politiques.
44. L’autre question pendante concerne les lettres de démission
non datées – que les députés remettent aux dirigeants des groupes
avant ou après les élections. Lors de notre visite en novembre 2010,
nous avions été informés que cette pratique n’existe plus depuis
2006 et que les lettres de démission non datées ne sont plus acceptées:
les députés qui souhaitent démissionner de leur parti politique
doivent introduire une requête personnelle auprès de la commission
administrative. Il convient de noter que, le 22 avril 2010, la Cour constitutionnelle
a déclaré inconstitutionnelle la pratique des «lettres de démission
non datées» par les conseillers municipaux, qui permettaient en
fait au parti de gérer le mandat des représentants élus. Nous saluons
donc l'adoption le 25 mai 2011 de la loi abolissant les lettres
de démission non datées.
45. La loi sur le registre des électeurs a été adoptée le 11 décembre
2009. Le parlement a adopté le 20 juin 2011 des amendements à la
loi sur les élections locales de 2007, qui permettra d'abolir formellement
le recours aux lettres de démission non datées au niveau local.
46. Durant notre visite en septembre 2011, nous avions été informés
que la loi sur la Commission nationale électorale était en cours
d'élaboration et devait permettre la création d'une autorité indépendante
et autonome pour la supervision des élections. Compte tenu des élections
législatives qui devraient se tenir au printemps 2012, nous avions
invité les autorités serbes à mettre en place le cadre législatif
en temps utile. Nous avions toutefois été informés de la décision
du ministère des Droits de l’homme et des Minorités, de l’Administration publique
et de l’Autonomie locale de ne pas soumettre un projet de loi régissant
un nouveau système électoral et un projet de loi sur la Commission
nationale électorale, afin d’éviter toute modification substantielle
du système électoral dans l’année précédant la tenue d’élections
régulières.
47. Par ailleurs, nous invitons l'ensemble des acteurs politiques
à contribuer au bon déroulement de la future campagne électorale
et soulignons la nécessité de respecter les procédures démocratiques
et de poursuivre les négociations politiques dans le cadre des institutions.
3.2. Réforme du parlement
48. Nous saluons l'adoption, par le Parlement serbe,
de la loi sur l'Assemblée nationale le 26 février 2010 et son nouveau
règlement, le 28 juillet 2010, conformément à la demande exprimée
par l'Assemblée parlementaire dans la
Résolution 1661 (2009), paragraphe 14.5.4. Le législateur a par ailleurs statué
le 5 juillet 2011 sur l'organisation et le travail des services
du parlement. Ces réformes visent à faire du parlement une institution
plus moderne et efficiente, et à renforcer son rôle et son autonomie
financière et administrative. Le parlement est désormais habilité
à adopter son propre budget. L'adoption d'un nouveau règlement intérieur
a permis d'améliorer le fonctionnement des commissions parlementaires,
de mettre en place des auditions publiques, de faciliter l'exercice
du mandat des parlementaires handicapés. Ce règlement vise à accroître l'efficacité
des travaux par la réduction du temps alloué aux débats parlementaires
lors de l'adoption des lois d'harmonisation avec l'acquis communautaire,
une disposition toutefois déplorée par l'opposition et reflétée dans
le rapport de suivi 2011 de la Commission européenne, qui appelle
à l’application de critères plus stricts aux procédures urgentes
et accélérées visant à une harmonisation avec l’acquis de l’Union
européenne afin de limiter leur application aux mesures d’alignement
technique sur l’acquis de l’Union européenne
.
49. Nous avons eu un long échange de vues avec les députés aussi
bien de la coalition au pouvoir que des principaux partis d'opposition
sur les nouvelles règles introduites au parlement, à savoir l'organisation
des travaux, le temps de parole des députés, la couverture par la
télévision, le rôle de l'opposition, etc. Tandis que les partis
au pouvoir ont mis l’accent sur le rythme des réformes et le grand
nombre de lois adoptées, les partis d'opposition ont déploré l'utilisation
excessive de la procédure d'urgence pour adopter les lois, la limitation
du temps de parole, etc.
50. Nous nous réjouissons également de l'adoption, le 14 juin
2011, de la loi sur le financement des activités politiques par
133 parlementaires (sur 250) de la coalition au pouvoir et du Parti
libéral démocrate (LDP). Cette loi prévoit l'allocation de 0,1%
du budget national au financement des campagnes électorales, et
de 0,15% aux activités des partis politiques (cette dernière disposition
prenant effet au 1er juillet 2012). Cette
loi limite notamment le financement des partis politiques par des
fonds privés
.
3.3. Mise en place des
institutions de contrôle indépendantes
51. Nous saluons la mise en place ou le renforcement
de plusieurs institutions de contrôle indépendantes au cours de
ces derniers mois: l'Agence de lutte contre la corruption, le Médiateur,
le Commissaire pour la protection de l'égalité, le Commissaire pour
la protection de la liberté d'accès aux informations.
52. Nous notons avec satisfaction que l'institution du Médiateur
fonctionne bien, avec du personnel qualifié dans ses bureaux de
Belgrade et de Serbie du Sud. Le Médiateur a reçu près de 6 000
plaintes de citoyens dont les deux tiers ont été résolus. La majorité
des plaintes avaient trait aux droits sociaux et économiques et au
manque de réactivité de l’administration. Depuis 2007, le Médiateur
d’Etat a formulé 270 recommandations individuelles et 50 recommandations
générales
à
l'intention des autorités compétentes, dont 80% ont été mises en
œuvre dans les délais impartis. Le Médiateur soumet des rapports
annuels et spécifiques et peut saisir les tribunaux pour faire des
réclamations contre des lois et réglementations qui violent les
normes constitutionnelles.
53. Il importe de sécuriser les institutions de contrôle indépendantes pour
la pérennisation de la démocratie. A cet égard, il est indispensable
d'allouer des ressources humaines et financières pour permettre
à ces institutions de fonctionner convenablement et de devenir des
organes efficients pour lutter contre la discrimination, la corruption
et autres abus.
54. Par ailleurs, pour qu’elles portent des fruits, ces institutions
de contrôle doivent nécessairement être indépendantes et intervenir
dans le processus décisionnel. A l'issue de notre visite en Serbie
en décembre 2010, nous avions exprimé notre préoccupation du fait
que le nouveau règlement adopté en juillet 2010 par le parlement
permet aux députés de rejeter les rapports de ces organes de réglementation,
au risque d’affecter le travail de ces organes. Nous notons avec
satisfaction que cette disposition a été modifiée après l’amendement
apporté au règlement du parlement le 28 février 2011: les rapports
sont désormais examinés par les commissions parlementaires compétentes.
Ils sont soumis à l’Assemblée nationale, qui adopte les propositions
de conclusions et recommandations quant aux mesures visant à améliorer
la situation dans les domaines concernés.
3.4. Pouvoirs locaux
55. A la suite de l'adoption de la Constitution de 2006,
de nouvelles lois sur l'aménagement du territoire, les collectivités
locales, les élections locales et la capitale ont été adoptées le
29 décembre 2007. La loi sur la juridiction de la province autonome
de Vojvodine a été adoptée en novembre 2009, permettant la promulgation du
Statut de l’Assemblée provinciale de Vojvodine qui avait été adopté
en octobre 2008
.
La question de l'autonomie financière et de la restitution des propriétés
aux collectivités locales et à la province autonome de Vojvodine
reste toutefois pendante.
56. La loi sur la propriété publique a finalement été adoptée
en septembre 2011. Les autorités serbes avaient pris un retard considérable
dans la résolution d’un problème spécifique auquel est confrontée
la Serbie, en l’occurrence la restitution des biens publics aux
collectivités locales. L’adoption, en juillet 2011, de la loi portant
modification de la loi sur les finances locales a modifié la méthode
de calcul des transferts et la part de l’impôt sur les salaires
qui revient aux collectivités locales.
57. Le ministre de l'Economie et du Développement régional a lancé
la mise en place d'unités statistiques régionales (pour se conformer
aux normes de l'Union européenne), mais en faisant observer que
ces unités ne conduiraient pas à la création de régions politiques.
58. Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de
l'Europe a adopté le 18 octobre 2011 la Recommandation 316 (2011)
sur la démocratie locale et régionale pour évaluer l'état des pouvoirs
locaux et régionaux depuis la signature de la Charte européenne
de l'autonomie locale en 2007.
59. Dans son exposé des motifs
, le rapporteur du Congrès Odd Arild Kvalöy
(Norvège, NI) note que la législation serbe en matière d'autonomie
locale est sur la bonne voie et que des progrès considérables ont
été réalisés dans le domaine de la participation des citoyens ou
des minorités aux affaires locales, l'institution de bureaux locaux
chargés des Roms ou de médiateurs au niveau local, voire, dans certaines
villes ou la province autonome de Vojvodine, de bureaux pour les
réfugiés et les personnes déplacées.
60. Le rapporteur du Congrès met toutefois en avant la nécessité
de renforcer le cadre législatif et d'améliorer les ressources financières
des collectivités locales, d'adopter une loi sur la propriété municipale
et sur la restitution des biens aux communes, d’accroître les finances
locales et de renforcer les capacités administratives au niveau
local.
61. Nous nous référons à la Recommandation 316 (2011) du Congrès
et invitons les autorités serbes à la mettre en œuvre et à lever
les réserves formulées par la Serbie au moment de sa ratification
de la Charte européenne de l’autonomie locale et concernant les
articles relatifs au principe de subsidiarité et au principe de
proportionnalité dans le contrôle administratif. Nous prenons acte
des avancées récentes réalisées dans le domaine de la démocratie
locale et de l'adoption, le 27 juin 2011, des amendements sur la
loi sur le financement des autorités locales par 108 voix (sur 127).
Ces amendements visent à accroître les ressources des collectivités
territoriales, qui percevront, à partir du 1er octobre
2011, 80% des impôts sur les revenus (au lieu de 40% auparavant),
la ville-capitale de Belgrade touchant 70% des impôts. Un système
de péréquation financière devrait permettre de soutenir les communes
les plus pauvres par la création d'un fonds de transferts de solidarité.
Ces amendements ont toutefois été critiqués par le Conseil fiscal
et les représentants du Fonds monétaire international en raison
du coût de ces mesures et du risque d'accroissement du déficit public
.
4. Prééminence du
droit
4.1. Réforme du système
judiciaire
62. Dans sa
Résolution
1661 (2009), l’Assemblée appelait les autorités serbes à intensifier
leurs efforts notamment en ce qui concerne le renforcement de la
transparence et de l’efficacité du système judiciaire. En 2009,
la Commission européenne a exprimé son inquiétude quant au manque
de transparence, à la performance et à l’efficacité du système judiciaire.
63. Les réformes judiciaires fondées sur la Stratégie nationale
de réforme de la justice (SNRJ) de 2006 comprennent l’adoption de
la loi sur la Cour constitutionnelle le 24 novembre 2007. Le 22
décembre 2008, le parlement a adopté la loi sur l’organisation des
tribunaux (conduisant à la restructuration du système des tribunaux
et à l’établissement de 34 tribunaux de première instance, 26 tribunaux
supérieurs, 4 cours d’appel et de la Cour suprême de cassation
), la loi sur
les juges, la loi sur le Conseil supérieur de la magistrature, la loi
sur le ministère public, la loi sur le Conseil national des procureurs
et la loi sur les sièges et les districts des juridictions et du
ministère public.
64. Nous tenons à exprimer notre satisfaction quant à l’excellente
coopération mise en place par la Serbie avec la Commission de Venise,
dont l’expertise a, depuis 2009, été sollicitée pour différents
textes législatifs
.
65. Le rapport final du projet de «soutien à la réforme du système
judiciaire serbe, à la lumière des normes du Conseil de l’Europe»
(commandé par la Direction générale des droits de l’homme et des
affaires juridiques (DGHL) du Conseil de l’Europe), a été publié
le 19 août 2010. Il porte sur le niveau d’application de la SNRJ de
2006 en Serbie, les obstacles à son application totale, et les mesures
nécessaires pour atteindre cet objectif.
66. La SNRJ prévoit la création de deux instances autonomes, à
savoir le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) (qui est le
garant de l’autonomie et de l’indépendance des tribunaux et des
juges, et l’instance de gestion et de surveillance du système judiciaire)
et le Conseil national des procureurs (CNP), qui doit garantir l’indépendance
et l’autonomie du ministère public.
67. Le rapport final de la DGHL souligne les efforts faits par
les autorités serbes pour mettre en œuvre cette réforme globale.
En même temps, il met en évidence plusieurs problèmes, notamment
le manque de ressources humaines et financières, le besoin en formation,
la nécessité d’une coopération entre le ministère de la Justice
et le CSM et le CNP, la nécessité de procédures transparentes, etc.
68. La Serbie a programmé les élections pour la composition permanente
du CSM, en l’absence cependant de toute préparation et consultation
appropriées et transparentes. A la suite des difficultés rencontrées
dans la préparation des élections des membres du CSM et du CNP,
les autorités serbes ont décidé d'amender les lois et de préparer
un cadre juridique plus approprié. Ces élections ont été finalisées
en mars 2011, et observées par l'Union européenne et l'OSCE.
69. La Cour constitutionnelle, instituée en 2008, comprend 15
juges nommés pour un mandat de neuf ans renouvelable; sa composition
reste politique
. Compte tenu de l’arriéré d’affaires
auquel est confrontée la Cour constitutionnelle (8 549 affaires
en attente au 15 septembre 2011 par rapport à 7 000 en septembre
2010) et de son peu d’efficacité, nous saluons les mesures prises
en vue de réformer la cour et notons avec satisfaction que la Commission
de Venise a été invitée à adopter un avis sur le projet de loi sur
les modifications et les ajouts à la loi sur la Cour constitutionnelle
de la Serbie
et
encourageons les autorités serbes à prendre en compte les prochaines
recommandations de la Commission de Venise dans son processus de
révision de la législation.
70. Nous devons reconnaître qu’une réforme complète du système
judiciaire a été entreprise. Toutefois, nous tenons à encourager
les autorités serbes à poursuivre leurs efforts en vue de garantir
l’indépendance du pouvoir judiciaire. Comme souligné par la Commission
européenne en 2011, «le cadre constitutionnel et législatif se prête
encore à une influence politique indue sur le judiciaire dans la
mesure où le parlement nomme et destitue le président de la Cour
suprême (qui est également le président
ex
officio du Conseil supérieur de la magistrature) et le
procureur de la République pour un mandat de six ans renouvelable,
sur proposition du gouvernement et en tenant compte de l’avis de
la commission parlementaire compétente. Le parlement nomme également
les présidents des tribunaux et les procureurs pour un mandat de
six ans renouvelable sur la base des propositions non contraignantes
formulées par les conseils respectifs, ainsi que les nouveaux juges
et procureurs adjoints pour une période probatoire de trois ans.
Le parquet est soumis aux influences politiques en raison de sa
structure hiérarchique et de la pratique actuelle qui consiste à
donner oralement des instructions en dépit de l’obligation légale
d’une formulation écrite»
(traduction
non officielle).
4.2. Renouvellement
du mandat des juges et procureurs
71. La Commission de Venise a commenté les règles qui
s’appliquent aux élections (réélections) générales des juges et
procureurs. Des modifications supplémentaires ont toutefois été
apportées ultérieurement et la question est devenue fortement politisée.
Les élections générales ont été finalisées au 1er janvier
2010 et les autorités ont souligné le fait que la procédure reposait
sur les critères de professionnalisme, de compétence et d’intégrité
.
72. Conformément à l’ensemble de lois adoptées précédemment sur
la réforme du système judiciaire, le Conseil supérieur de la magistrature
(CSM) a décidé, en décembre 2009, de ne pas renouveler le mandat d'environ
un tiers des juges serbes (plus de 800 sur 3 000). Par ailleurs,
150 procureurs sur 700 n'ont pas été réélus. Cette décision a été
sévèrement critiquée par l’Association des juges de Serbie. Il a
été notamment déclaré que la procédure au sein du CSM manquait de
transparence et que le critère de confirmation des juges était plutôt
politique.
73. L’Association des procureurs a également exprimé ses craintes
quant au processus de renouvellement du mandat et a soumis des propositions
concrètes au Conseil national des procureurs (CNP) sur la façon d’améliorer
la procédure. Un accord passé avec le procureur de la République
de Serbie en mars 2010 a permis aux procureurs non réélus de postuler
pour des postes récemment créés de procureurs adjoints
.
74. 827 juges dont le mandat n’avait pas été renouvelé ont interjeté
appel des décisions prises par le CSM auprès de la Cour constitutionnelle.
Certains des juges ont été renommés tandis que d’autres ont rejoint
le Conseil du barreau. Dans un premier arrêt rendu en mai 2010,
la Cour constitutionnelle a reconnu le bien-fondé de l’appel d’un
juge et a ordonné au CSM de reconsidérer sa candidature en tant
que juge de cour d’appel, estimant que la décision de mettre un
terme à ses services ne se justifiait pas
.
75. Afin d'alléger la charge de travail de la Cour constitutionnelle,
la ministre de la Justice, Mme Snezana Malović,
a annoncé que chaque décision concernant l'élection des juges serait
revue par le CSM dès que ses membres permanents seront en place
.
Cette décision a été critiquée par l'Association des juges de Serbie, en
raison du manque de transparence du mode de désignation des membres
du CSM (il a été décidé par la suite que les membres
ex officio du CSM ne siégeront pas
lors de l'examen de ces dossiers) et des critères établis par le
CSM et, de ce fait, du caractère arbitraire de la procédure
.
La délégation serbe a ajouté que la procédure d’élection des membres
permanents du CSM et du CNP avait été lancée en novembre 2010 et
avait tenu informé, dans les délais prescrits par la loi, l’ensemble
des parties intéressées, par l’intermédiaire du Journal officiel
mais également par le biais du site web et des tableaux d’affichage
disponibles dans chaque tribunal
.
76. L'Association des juges serbes a toutefois contesté les «règles
pour la mise en œuvre des décisions sur les critères et indicateurs
et la révision des décisions de la première composition du Conseil
supérieur de la magistrature concernant la cessation des fonctions
judiciaires» adoptées le 23 mai 2011 par le CSM, à l'issue d'un
processus de négociation facilité par la médiation du juge Reisner
proposé par la Commission européenne. Nous notons que les décisions
du CSM peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour constitutionnelle.
77. Le 15 juillet 2011, le CSM et le CNP ont initié la révision
de la procédure des juges non désignés, qui devait être achevée
en septembre 2011. La procédure de révision fait l'objet d'enregistrements
audio. Elle est observée par le Conseil de l'Europe, l'OSCE et l'Union
européenne.
78. L'Association des juges serbes a dénoncé le manque de transparence
de la procédure, et la durée de cette procédure de révision: fin
juillet 2011, le CSM avait auditionné 164 juges et statué sur 26
cas
. 102 auditions
étaient programmées pour le 12 août 2011. Dans une communication
adressée le 25 juillet 2011 à plusieurs organisations internationales,
l'Association des juges dénonce de plus le non-respect par le CSM
de ses propres règles de fonctionnement.
79. La conduite objective et équitable de la procédure de révision
a également été remise en cause par la Fondation néerlandaise Judges
to Judges et l’Association des magistrats européens pour la démocratie
et les libertés (MEDEL), qui ont observé le processus. Dans un courrier
adressé au président Barroso de la Commission européenne, ces deux
associations déplorent de graves dysfonctionnements (tant d’ordre matériel
que procédural) et précisent qu’il faut s’attendre que les décisions
prises selon cette procédure fassent l’objet de recours devant la
Cour constitutionnelle et la Cour européenne des droits de l’homme,
jetant ainsi une ombre sur le système judiciaire serbe dans les
années à venir
.
80. Au cours de notre visite en septembre 2011, des préoccupations
ont par ailleurs été soulevées quant au rôle joué par les membres ex officio au sein du CSM dans les
décisions relatives à la reconduction des juges. Ces membres ne
disposent pas d’un droit de vote mais sont toutefois présents et
peuvent par là même influer sur la décision finale.
81. Ces deux ONG ont en particulier souligné le fait que le CSM
ne disposait plus de la majorité requise (c’est-à-dire 6 juges sur
11, en excluant ceux qui ont participé à la première composition
du Conseil) pour prendre des décisions. La révocation de deux juges
élus, M. Jaksic (à la suite de son arrestation et placement en détention
depuis le 23 septembre 2011 pour une prétendue affaire d’abus de
pouvoir remontant à plus de treize ans
)
et le professeur Dimitrijevic (dont la fonction de doyen de la faculté
de droit de Belgrade a été considérée par l'Agence de lutte contre
la corruption comme donnant lieu à un conflit d’intérêts), suivie
de la démission d'un troisième juge, M. Milimir Lukic, ont rendu
difficile l’atteinte du quorum par le CSM.
82. Les derniers chiffres transmis le 18 novembre 2011 par le
ministère de la Justice montrent que sur les 810 objections reçues,
640 entretiens ont été menés, 282 décisions ont été rendues dont
73 donnant satisfaction aux objections formulées par les candidats,
206 objections ont été rejetées et 3 affaires différées
. 127 décisions relatives à des procureurs
avaient été prises à la mi-septembre 2011
.
83. Nous encourageons le CSM à achever cette procédure dans des
délais raisonnables et dans le respect des normes européennes et
des critères de compétence. La procédure de révision des juges et
procureurs élus et non élus a constitué un processus long et hautement
controversé. Il est de ce fait indispensable de garantir que des
critères objectifs, incontestés et transparents guident l’achèvement
du processus par le CSM, le CNP et la Cour constitutionnelle s’agissant
de l’examen des recours introduits. La mise en place d’un système
judiciaire indépendant fondé sur les normes européennes et non soumis
à l’influence politique est une condition sine qua non pour garantir
la confiance du peuple dans ses institutions judiciaires.
4.3. Autres développements
législatifs récents ou en cours concernant le système judiciaire
84. Nous saluons l’adoption par l’Assemblée nationale
du Code de procédure civile et du Code de procédure pénale (26 septembre
2011), de la loi sur l’exécution des décisions de justice et la
sécurité (5 mai 2011), de la loi sur les notaires (5 mai 2011) et
de la loi sur la profession d’avocat (5 mai 2011). La mise en œuvre
effective de ces lois nouvellement adoptées devrait significativement
réduire le nombre d’affaires portées en justice. La nouvelle loi
sur l’exécution des décisions de justice et la sécurité devrait
améliorer les procès et l’exécution des décisions et permettre de
garantir qu’un procès n’excède pas deux ans
. D’autres
textes législatifs devront être adoptés et nous encourageons les
autorités serbes à recourir à l’expertise du Conseil de l’Europe
pour faire en sorte que ces nouvelles lois soient pleinement conformes
aux normes du Conseil de l’Europe.
85. La révision du Code pénal est actuellement en préparation
et nous invitons les autorités serbes à veiller à sa conformité
avec les normes du Conseil de l’Europe, notamment les recommandations
formulées par le GRECO.
86. Des programmes de formation initiale et continue sont dispensés
par l'Académie judiciaire depuis le 1er janvier
2010 et des formations spécialisées sont proposées en matière de
délinquance juvénile ou de droit de la famille. Des formations continues
sont également proposées s’agissant de la confiscation de biens
dérivant d'activités criminelles, de crime organisé, de corruption
et de blanchiment d'argent
.
87. La loi sur la propriété publique et la loi sur la restitution
des biens
confisqués après la seconde
guerre mondiale – requises par la Commission européenne pour l’obtention
du statut de candidat – ont été adoptées en septembre 2011, bien
qu’elles restent des sujets sensibles. Le 24 novembre 2011, le parlement
a décidé de modifier sa loi sur la restitution des biens nationalisés
entre la prise de pouvoir par les communistes en 1945 et l’année
1968 (ou le versement d’une indemnisation équivalente), afin de
contrer les objections de la Hongrie, qui aurait pu compromettre
la demande de la Serbie du statut de pays candidat à l'adhésion
à l'Union européenne
.
88. La loi sur la restitution de biens appartenant aux églises
et communautés religieuses adoptée en 2006 pose toujours problème:
elle continue d'établir une distinction entre les Eglises et les
communautés religieuses «traditionnelles» et les Eglises et les
communautés religieuses non traditionnelles, et ne prévoit toujours
que la restitution des biens confisqués en 1945 ou ultérieurement,
ce qui continue de poser un problème aux communautés juive et islamique
qui ont été dépossédées de biens avant 1945
. Avec l'ECRI, nous encourageons les autorités
serbes à modifier cette disposition et à veiller à l'application
de cette loi
.
89. Il faut également saluer l'adoption de la loi sur la réhabilitation
le 5 décembre 2011, à la suite de l’accord avec l’Alliance des Hongrois
de Vojvodine, qui aborde, entre autres, les préoccupations spécifiques
de la minorité hongroise quant à la loi sur la restitution.
90. Nous avons également appris avec satisfaction la création
d’une commission parlementaire de suivi des prisons chargée de suivre
l'exécution des décisions pénales, conformément à l’article 278
de la loi sur l’exécution des sanctions pénales. Une commission
composée de cinq membres du parlement contrôlera l’exécution des
sanctions pénales et veillera à l’amélioration des conditions de
vie, du traitement et de la protection des personnes purgeant une
peine d’emprisonnement. Cette commission devrait soumettre un rapport
à l’Assemblée nationale et a proposé des amendements législatifs
afin de renforcer la protection des droits des détenus. Elle sera
habilitée à requérir des informations auprès des autorités pertinentes
et d’ONG indépendantes, de visiter des centres de détention et préparera
son rapport. Nous estimons que la création de cette commission est
un exemple positif de contrôle parlementaire.
5. Droits de l’homme
5.1. Prévention de la
torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants
91. Une délégation du Comité pour la prévention de la
torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT)
du Conseil de l’Europe a effectué sa troisième visite périodique
en Serbie du 1er au 11 février 2011.
Elle a pu examiner les progrès accomplis depuis sa dernière visite
en 2007 ainsi que les mesures prises en vue d'appliquer les recommandations
du Comité, notamment en matière de détention par la police, d'emprisonnement
et de garanties juridiques pour les patients en établissements psychiatriques.
La délégation a également effectué une visite de suivi à l'unique
hôpital pénitentiaire du pays, ainsi qu'à l'hôpital psychiatrique spécial
Dr Laza Lazarević de Belgrade. En outre,
elle s'est rendue pour la première fois à la prison pour femmes
de Požarevac, à l'hôpital psychiatrique spécial de Gornja Toponica
et à l'Institution éducative pour mineurs de Niš. A l’issue de la
visite, la délégation a présenté ses observations préliminaires
aux autorités serbes
.
92. Dans l'attente de la publication du rapport par le CPT en
2012, nous encourageons les autorités serbes à poursuivre leur collaboration
avec le CPT et à autoriser, le moment venu, la publication du rapport.
93. Nous saluons également l'adoption, le 28 juillet 2011 par
le parlement, de la loi complétant la loi de ratification du Protocole
optionnel de la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants des Nations Unies.
5.2. La situation des
médias
94. Au cours de nos visites en Serbie, plusieurs problèmes
concernant les médias nous ont été rapportés. Les médias serbes,
comme ceux de nombreux autres pays, sont confrontés à des défis
économiques qui peuvent mettre en danger le pluralisme et la liberté
des médias. En particulier, la propriété des médias pose aujourd'hui
problème, mais aussi le rôle de l'Etat dans le paysage médiatique,
la viabilité économique des médias, la transparence en matière de
propriété des médias et du fonctionnement de l'agence nationale
de télécommunication, la numérisation des moyens de communication,
etc.
95. Dans son rapport d’octobre 2011 sur «les pressions exercées
et le contrôle des médias en Serbie
», le
Conseil (gouvernemental) de lutte contre la corruption a publié
les résultats d’une enquête menée de janvier 2008 à juin 2010 aux
fins de déterminer la manière dont les organes gouvernementaux influent
sur les médias. Le Conseil de lutte contre la corruption a conclu
que:
- il n’existe aucun média
offrant au public des informations complètes et objectives, du fait
des fortes pressions exercées par les cercles politiques; certains
événements sont passés sous silence ou rapportés de manière incomplète
et sélective;
- s’agissant des 30 principaux organes de médias (12 quotidiens,
7 hebdomadaires, 6 chaînes de télévision et 5 stations de radio),
la propriété de 18 d’entre eux manque de clarté et les véritables propriétaires
sont inconnus du grand public;
- parallèlement aux 15 millions d’euros perçus au titre
de la publicité et de la promotion, les médias bénéficient, au travers
d’un appel d’offre public, d’une enveloppe supplémentaire de 21
à 25 millions d’euros, selon les sources (…). Il s’avère que les
médias reçoivent près d’un quart de leurs revenus d’institutions
gouvernementales. Les agences de relations publiques, de marketing
et de production jouent un rôle particulier dans le financement
des médias et les placent en situation de dépendance économique.
Ils sont pour la plupart aux mains de militants de partis ou de
personnes liées à ces partis. Les organes gouvernementaux exercent
une influence particulière au travers de la RTS qui, loin d’être un
service public, sert les structures politiques étroitement liées
aux dirigeants des partis au pouvoir.
96. La loi sur les communications électroniques, adoptée par le
parlement le 28 juin 2010, a soulevé de sérieuses préoccupations:
cette loi aurait autorisé les services secrets à avoir accès aux
informations privées disponibles dans les communications électroniques
sans autorisation préalable d’un tribunal. Le médiateur a déposé
une plainte auprès de la Cour constitutionnelle, qui a déclaré cette
loi anticonstitutionnelle à partir de juillet 2010. Toutefois, lors
de notre visite en décembre 2010, nous avons été informés que la
publication de cette décision au Journal officiel avait été retardée
(pour des problèmes de personnel, selon le médiateur) et, de ce
fait, cette loi, bien que non appliquée, était restée en vigueur
jusqu'à sa publication en novembre 2010, ce qui suscitait une insécurité
juridique, en particulier parmi les journalistes.
97. La loi sur l’information publique adoptée en 2009 a également
été perçue par les journalistes comme une pression supplémentaire
. La plupart de ses dispositions
– y compris celles autorisant des amendes disproportionnées pour
diffamation – ont été annulées par la Cour constitutionnelle à l’initiative
du médiateur en juillet 2010.
98. Par ailleurs, plusieurs incidents et actes de violence ont
été signalés: le 15 avril 2011 par exemple, plusieurs individus,
proférant des insultes nationalistes et d'extrême droite, ont attaqué
Csaba Szögi, un journaliste du quotidien en langue hongroise
Magyar Szó basé à Novi Sad
.
Deux journalistes de la télévision B92, Vera Matić, directeur en
chef, et Brankica Stankovic, journaliste d'investigation, vivent
en permanence sous protection policière, tout comme Valdimir Mitric,
journaliste à
Vecernje Novosti,
battu en 2005 par un policier. L'Organisation des médias du Sud-Est
de l'Europe (SEEMO/IPI) a aussi déploré la lenteur des juridictions
à agir contre les auteurs d'attaques contre des journalistes, ou
d'assassinats de journalistes, notamment Slavko Curuvija (1999),
Milan Pantic (2001), Dada Vujasinovic (1994), à propos duquel la
thèse officielle concernant son suicide est aujourd'hui remise en
cause
.
99. Les journalistes déplorent également les sanctions insuffisantes
infligées en cas d'agressions physiques contre des journalistes,
qui ne permettent pas de dissuader les auteurs de ces violences:
au terme d'un procès qui a duré trois ans, l'auteur de l'agression
du cameraman de B92 Boško Branković a été condamné à une assignation
à résidence de dix mois
. Vera Matić relevait
que le Code pénal punit plus sévèrement les menaces (non matérialisées)
contre des journalistes (un à huit ans de prison) que les agressions
contre les journalistes (six mois à cinq ans de prison).
100. Comme attendu, la nouvelle «Stratégie pour le développement
d’un système d’information publique en République de Serbie jusqu’à
2016» (Stratégie médias) a été adoptée le 26 septembre 2011 par
le gouvernement, après un processus de deux ans impliquant les médias
et les associations de journalistes, les conseils des minorités
nationales, les pouvoirs publics et des organisations internationales.
La stratégie – un document non contraignant – établit les bases
de la définition de nouveaux concepts, par exemple l’intérêt public
dans le domaine de l’information et l’applicabilité des dispositions
relatives aux aides d’Etat au financement des médias. La stratégie
devrait permettre un financement plus transparent et équilibré des programmes
d’intérêt public, une réduction des distorsions sur le marché des
médias causées par le financement public de ces derniers, et favoriser
la production de programmes de meilleure qualité à l’intention des
citoyens.
101. Cependant, les journalistes que nous avons rencontrés en septembre
2011 se sont dits fort préoccupés par la possibilité envisagée dans
la stratégie de créer six radiodiffuseurs de service public régionaux,
alors que les financements étaient déjà insuffisants pour les deux
radiodiffuseurs de service public existants. Ils ont également souligné
que les financements publics alloués à ces radiodiffuseurs régionaux
risquent d’entraver l’indépendance des comités éditoriaux.
102. La Stratégie médias est à considérer comme une étape positive,
mais il semble que certains points n’aient pas été suffisamment
creusés, tels que les dispositions relatives aux aides d’Etat et
les exceptions, la réglementation relative à la concentration des
médias, etc. C’est pourquoi nous invitons instamment les autorités
serbes à veiller à la conformité avec les normes européennes de
la législation qui devra être adoptée pour mettre en œuvre la Stratégie
médias et encourageons la Serbie à recourir à l’expertise du Conseil
de l’Europe dans ce domaine.
103. Pour l'heure, nous saluons les amendements à la loi sur l’accès
libre aux informations d'importance publique adoptés par le parlement
en avril 2010 – qui permettront au Commissaire pour la protection
de la liberté d'accès aux informations d'intervenir en cas de violation
de la loi
.
104. Par ailleurs, nous nous réjouissons de l'annonce faite par
le Secrétaire d’Etat au ministère de la Justice de décriminaliser
la diffamation et la calomnie, conformément aux positions de l'Assemblée
parlementaire
. Cette
incrimination, comme le rappelle la SEEMO/IPI, a souvent été utilisée
contre les journalistes en Serbie – y compris lorsqu'ils citent
des déclarations officielles par des personnalités politiques ou
des leaders de partis politiques, ce qui a conduit certains journalistes
à pratiquer l'autocensure. Le Commissaire aux droits de l’homme
a estimé que l’existence même de dispositions pénales relatives
à la diffamation intimide les journalistes et engendre une censure
regrettable
.
105. Nous étions également préoccupés par les sanctions pécuniaires
disproportionnées qui peuvent être infligées lors de procédures
civiles, et qui mettent en danger la survie économique des médias
et donc la liberté d'expression, une mesure qui touche plus particulièrement
le journalisme d'investigation traitant de sujets sensibles. C’est
pourquoi nous saluons les décisions de la Cour constitutionnelle
du 22 juillet 2010 et du 5 mai 2011, qui ont conclu à l’inconstitutionnalité
des dispositions des amendements à la loi sur l’information publique,
relatives aux sanctions pécuniaires disproportionnées infligées
en cas de diffamation aux journalistes et responsables des médias,
ainsi que les dispositions enfreignant les droits à la liberté de
pensée et d’expression. Les journalistes et associations de la presse
se sont également félicités de ces décisions. Nous encourageons
les autorités serbes à veiller à ce que la future législation relative
aux médias renforce la liberté d’expression et des médias et intègre
pleinement les normes du Conseil de l’Europe et la jurisprudence
de la Cour européenne des droits de l’homme.
106. Nous appelons les autorités serbes à prendre toutes les mesures
nécessaires pour protéger efficacement les journalistes, à lutter
contre l'impunité des auteurs de violences à l'égard des journalistes,
à poursuivre, avec diligence, et sanctionner les auteurs de menaces
et d'agressions contre les représentants des médias et à modifier
le Code pénal pour renforcer la protection des journalistes et des
représentants des médias. Il convient toutefois de noter qu'un amendement
du Code pénal sur les «postes d'importance significative» (dans
les secteurs de l'information publique, de la santé publique, de
l'éducation, des transports publics, etc.) permet d'octroyer une
protection légale spéciale dans le cadre de l'exercice de ces missions,
et de prévoir des sanctions plus sévères
.
5.3. Lutte contre la
corruption
107. Nous saluons les actions entreprises par la Serbie
pour combattre la corruption. Cet effort a également été souligné
par le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) qui, dans son
rapport d’évaluation du Troisième Cycle sur la Serbie, a constaté
que la législation pénale serbe était conforme à la Convention pénale du
Conseil de l'Europe sur la corruption (STE no 173)
et que la Serbie était engagée dans un processus de réforme prometteur
visant à améliorer la responsabilité dans le domaine du financement
des partis politiques. Le GRECO a adressé 15 recommandations au
total à la Serbie, concernant les infractions de corruption d’arbitres,
la capacité à poursuivre la corruption à l’étranger, la détection,
l’investigation et la poursuite des faits de corruption, la condamnation
non seulement des infractions mineures en matière de corruption
mais également des faits de corruption de haut niveau commis dans
le secteur public, une vigilance accrue en matière de trafic d'influence
et de corruption dans le secteur privé, la vérification des comptes
des partis, la sanction des pratiques illicites, la réglementation
des dons en espèces et en nature et l’accès du public aux informations,
y compris les rapports des partis politiques sur leur situation
financière
.
108. Les progrès en matière de lutte contre la corruption se sont
poursuivis avec l'action de l’Agence de lutte contre la corruption
à partir de janvier 2010. L'agence a notamment élaboré une base
de données des déclarations de patrimoine des représentants publics,
adopté des décisions en matière de conflits d'intérêt et des lignes
directrices sur l'évaluation des risques de corruption dans les
instances publiques. De nombreux agents publics ont soumis, comme
exigé, des déclarations de ressources à la nouvelle agence. Toutefois,
la corruption reste courante dans de nombreux domaines (en particulier
la justice et le système de santé) et demeure un sérieux problème.
109. Dans le même temps, nous sommes fort préoccupés après la publication
du rapport annuel 2011 de l’ONG Transparency International (TI),
où la Serbie a glissé de la 78e à la
86e position dans l’indice de corruption.
Selon TI Serbie, la lenteur de la réforme du système judiciaire,
l’affaiblissement des institutions et l’absence de tout contrôle
exercé sur des partis politiques considérés par TI comme des «générateurs
de corruption» sont les principales raisons expliquant un niveau
aussi élevé de corruption dans le pays. Les violations de la législation
anticorruption, l’adoption de réglementations contradictoires, la
mise en œuvre discrétionnaire de la législation, le processus de
lobbying non réglementé et l’adoption de règlements légaux en l’absence
de toute transparence ne font que contribuer à la propagation de
la corruption
.
110. Nous avons tenu une série de réunions axées sur la lutte contre
la corruption. A partir des informations recueillies auprès des
ONG et du Conseil de lutte contre la corruption, et des explications
que nous a fournies l’Agence de lutte contre la corruption, nous
avons constaté que ce phénomène reste largement répandu. Nous avons
pris note qu’un certain nombre d’affaires bien connues d’anciens
responsables des secteurs de la santé, du système judiciaire et
de l’énergie ont été portées en justice au cours des derniers mois.
111. Nous sommes heureux de constater que le Code de procédure
pénale révisé et la loi sur le financement des activités politiques
confieront à l’Agence de lutte contre la corruption un rôle prépondérant.
C’est pourquoi il est essentiel que cette agence soit dotée de moyens
suffisants pour lui permettre de contrôler la mise en œuvre effective
des lois et d’appliquer des sanctions en cas de violations – notamment
de la loi sur le financement des activités politiques.
112. Nous avons également été impressionnés par le travail mené
par le Conseil anticorruption, un organe d'Etat créé en 2001. L’expertise
de ce conseil mériterait d’être davantage prise en compte dans les
efforts déployés par les autorités serbes pour lutter contre la
corruption. La poursuite des affaires avérées ou alléguées de corruption
portées à l’attention du procureur et de l’Agence de lutte contre
la corruption – que ce soit par le Conseil anticorruption ou des
ONG – reste une question ouverte.
113. Nous encourageons les autorités serbes à se conformer aux
recommandations du GRECO et à renforcer ainsi leur dispositif de
lutte contre la corruption. Nous saluons à cet égard l'adoption
de la loi sur le financement des partis politiques le 14 juin 2011,
qui reprend largement les recommandations de la Commission de Venise
. Cette loi devrait améliorer
la transparence du financement des partis politiques et des campagnes
électorales et renforcer le rôle de l'Agence de lutte contre la
corruption.
114. D'autres avancées législatives ont été réalisées dans le domaine
de la lutte contre la corruption: élargissement de la définition
des agents auxquels s'applique la loi anticorruption aux juges et
procureurs; élargissement des compétences du Bureau du Procureur
spécial pour le crime organisé en matière de faits criminels dans
l'exercice de fonctions officielles aux employés exerçant des fonctions
publiques
, amendement du Code pénal en matière
de blanchiment d'argent et de lutte contre le terrorisme en septembre 2009.
115. Nous notons aussi que la loi sur la confiscation des biens
acquis de manière criminelle a été déclarée conforme à la Constitution
par la Cour constitutionnelle le 30 juin 2011
.
116. D'autres mesures et activités sont envisagées par le parquet
et le parquet chargé du crime organisé, concernant la mise en place
d'unités spécialisées du parquet pour poursuivre les cas de corruption,
y compris au sein du parquet par l'adoption de plans d'intégrité
découlant des directives de l'Agence de lutte contre la corruption,
les formations spécialisées, le renforcement de la coopération interinstitutionnelle
avec les autres organes publics chargés de la lutte contre la corruption,
etc.
.
117. Nous encourageons les autorités serbes à poursuivre la lutte
contre la corruption, à élaborer et à mettre en œuvre une stratégie
efficace de lutte contre la corruption, et à donner à l'Agence de
lutte contre la corruption les moyens de mettre en œuvre ces politiques
et d'obtenir des résultats. Le nombre de condamnations définitives,
en particulier dans les affaires de haut niveau, reste faible. Les
marchés publics, la privatisation et les dépenses publiques restent
des sujets de préoccupation. Nous saluons les efforts entrepris
par le parquet pour vérifier la conformité de la privatisation controversée
d'une vingtaine d'entreprises, concernant par exemple la Compagnie
du port de Belgrade ou le quotidien
Vecernje
Novosti .
118. Il nous semble par ailleurs indispensable de renforcer la
protection des personnes dénonçant des abus
.
Nous notons avec intérêt l'élaboration de règles par l'Agence de
lutte contre la corruption sur la protection des personnes rapportant
des cas de suspicion de corruption dans le secteur public
.
Nous invitons les autorités serbes à établir, sur cette base, un
système de protection efficace et effectif pour les «donneurs d'alerte»
concernant non seulement les agents du secteur public, mais aussi
les employés du secteur privé.
5.4. Réfugiés et demandeurs
d'asile
119. Dans sa
Résolution
1661 (2009), l'Assemblée invitait la Serbie à poursuivre les travaux
pour garantir aux réfugiés et aux personnes déplacées, dans la mesure
du possible, un retour durable, sûr et dans de bonnes conditions,
et à ne ménager aucun effort pour trouver des solutions durables
pour ceux qui ont décidé de rester en Serbie (paragraphe 16.6.14).
120. Le Commissaire aux réfugiés de la République de Serbie a indiqué
que 700 000 personnes (soit 10% de la population) ont trouvé refuge
en Serbie à la suite des conflits en ex-Yougoslavie. Il y avait
en 2010 près de 65 000 réfugiés (dont 45 000 vivant en dessous du
seuil de pauvreté) et plus de 210 000 personnes déplacées à l’intérieur
de leur propre pays (PDI). 3 358 personnes, qualifiées de «groupe
très vulnérable» par le Commissaire aux droits de l'homme à l'issue
de sa dernière visite en Serbie
,
vivaient dans 54 centres collectifs. Le nombre de PDI qui sont retournées
au Kosovo est très faible (12 145 entre 2000 et 2009 selon le bureau
du HCR de Pristina)
.
121. Nous encourageons les autorités serbes à poursuivre leurs
programmes d'intégration en vue de trouver des solutions durables
pour ces personnes, d'assurer leur accès aux droits sociaux et économiques
et, dans le cas des PDI, à promouvoir un retour ou un accès à leurs
biens abandonnés dans le cadre des négociations actuelles entre
Belgrade et Pristina.
122. A cet égard, nous sommes d’avis que l’organisation de la Conférence
ministérielle sur la question des réfugiés dans les Balkans, tenue
à Belgrade le 7 novembre 2011, à l’initiative de l’envoyé personnel
du haut-commissaire des Nations Unies chargé de régler les problèmes
de déplacement prolongé de populations dans les Balkans occidentaux,
qui fait suite à la «Conférence sur les solutions durables pour
les réfugiés et les personnes déplacées à l'intérieur du pays: coopération
entre les Etats de la région» organisée par la Serbie en mars 2010
et le Monténégro en juin 2010, pourrait réactiver la mise en œuvre
de la «Déclaration de Sarajevo», signée en 2005. Nous félicitons
les ministres des Affaires étrangères de Serbie, de Bosnie-Herzégovine,
de Croatie et du Monténégro pour la signature d’une déclaration
commune le 14 novembre 2011 dans laquelle ils expriment leur soutien
à un plan de travail fixant des étapes concrètes pour supprimer
les obstacles qui entravent l’atteinte d’une solution durable pour
les derniers réfugiés du conflit de 1991-1995 et appellent à redoubler
d’efforts pour régler le sort des plus anciens réfugiés d’Europe.
Cet accord devrait accélérer la délivrance des documents d’état
civil permettant aux réfugiés et aux rapatriés de jouir pleinement et
effectivement de leurs droits et de retrouver une vie normale. Nous
appelons tous les donateurs à soutenir le programme régional et
ses objectifs au cours des cinq prochaines années afin de trouver
des solutions d’hébergement pour les personnes vivant actuellement
dans des centres collectifs et autres personnes vulnérables, y compris
les détenteurs d'anciens droits de propriété
.
123. Notre attention s'est également portée sur le nombre croissant
de demandeurs d'asile en Serbie. Selon les informations du Haut-Commissariat
des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 28 900 demandes d'asile émanant
de la Serbie ont été enregistrées en 2010, soit une augmentation
de 54% par rapport à l'année précédente
.
La Serbie a ratifié la Convention de Genève de 1951 relative au
statut des réfugiés le 12 mars 2001.
124. Nous tenons à remercier les autorités serbes pour toutes les
informations qu’elles nous ont fournies à propos de la loi sur l’asile
no 109/07, qui régit le statut des réfugiés,
la protection subsidiaire et la protection temporaire accordées
aux demandeurs d’asile. L’octroi du droit d’asile est soumis à une
procédure administrative en deux phases. La décision en première
instance est prise par le Bureau de l’asile (qui fait partie du
ministère de l’Intérieur), alors que la Commission d’asile a compétence
pour trancher en deuxième instance. Deux centres d’asile sont en
activité en Serbie, à Banja Koviljaca et à Bogovadja.
125. Nous avons été informés qu’entre janvier et novembre 2011,
2 731 personnes ont exprimé leur intention de demander l’asile en
Serbie
. 178 requêtes ont été soumises mais
aucune n’a été satisfaite: 37 requêtes (concernant 68 demandeurs
d’asile – car une demande unifiée est impérative pour les membres
d’une même famille) ont été refusées (au motif que les demandeurs
étaient arrivés de pays tiers sûrs), deux requêtes ont été rejetées,
95 requêtes (concernant 124 personnes) ont été suspendues, car leur
nouvelle résidence sur le territoire serbe était inconnue (selon
la loi, une personne doit informer les autorités de sa nouvelle
adresse dans un délai de trois jours suivant son changement de résidence).
Les autorités serbes ont également reconnu que les ressources humaines
en place étaient insuffisantes et ne permettaient pas au Service
de l’asile de mener tout l’éventail de ses activités de manière
prompte et efficace. La nouvelle classification des postes au sein
du ministère de l’Intérieur devrait résoudre les difficultés existantes.
Le Service de l’asile actuel devrait être transformé en un Bureau
de l’asile qui serait une entité organisationnelle séparée, placée
sous l’égide de la police des frontières et dotée de plus de personnel.
126. Notre attention a également été attirée par les mesures prises
par le ministère de l’Intérieur pour lutter contre l’arrivée massive
de faux demandeurs d’asile qui ont quitté la Serbie pour se rendre
dans des pays de l’Union européenne en 2010
, après la libéralisation du
régime des visas
.
Une Commission pour le suivi des voyages sans visas vers l’Union
européenne a été créée en février 2011. Une réglementation détaillée
sur l’exercice des pouvoirs des agents de la police des frontières
et les devoirs des personnes franchissant la frontière de l’Etat
a été adoptée le 2 juin 2011. Plusieurs des actions entrant dans
le champ de ses activités ont trait à la réduction du nombre de
faux demandeurs d’asile, notamment par un contrôle renforcé des passagers
quittant le pays et se rendant dans des pays de l’espace Schengen;
la collecte de données relatives aux organisateurs potentiels de
voyages vers les pays de l’Union européenne et la lutte contre les
groupes organisés de faux demandeurs d’asile; l’adoption d’une stratégie
de réintégration des rapatriés sur la base d’un accord de réadmission;
l’adoption d’une stratégie nationale pour l’amélioration du statut
des Roms; la prévention de la falsification des documents soumis
lors d’une demande de visa pour les pays de l’Union européenne
.
127. Nous comprenons que la Serbie souhaite honorer ses engagements
souscrits au titre du régime de libéralisation des visas et éviter
les abus. Cependant, il nous faut attirer l’attention des autorités
serbes sur le fait que les mesures prises devraient être pleinement
conformes avec les normes du Conseil de l’Europe et ne pas enfreindre
le droit des personnes à quitter leur pays
.
Des abus dans le contexte des régimes de libéralisation des visas
ont été relevés dans d’autres pays de la région. Les dispositions
prises pour combattre ce phénomène se terminent et nous souhaitons
souligner le commentaire publié par le Commissaire aux droits de
l’homme et intitulé «Le droit de quitter son pays doit s’appliquer
sans discrimination». Nous partageons l’avis du Commissaire selon
lequel l’augmentation du nombre de demandes d’asile dans certains
pays n’est pas le fond du problème, mais son symptôme. Elle est
un signe de plus de l’échec de l’Europe à vaincre le cycle de l’antitsiganisme,
de la discrimination et de la marginalisation des populations roms
.
5.5. Liberté d'association
128. Le parlement a adopté en juillet 2009 une loi sur
les associations et créé en avril 2010 le Bureau pour la coopération
avec la société civile. Toutefois, ce bureau n'est pas encore opérationnel
et la coopération entre les autorités et la société civile reste
déséquilibrée
.
129. La Commission de Venise et l’OSCE/BIDDH ont préparé un avis
conjoint relatif à la loi sur les manifestations publiques en octobre
2010 (CDL-AD (2010) 031) et ont relevé certaines lacunes. Les principales
recommandations portent sur le titre de la loi, les règles de notification,
l’application de la loi à la fois aux nationaux et aux non-nationaux
et autres catégories de personnes, le retrait des restrictions globales sur
l’heure et le lieu, la limitation des motifs pour la suspension,
l’interdiction ou la dissolution des réunions. Nous invitons la
Serbie à adopter cette loi en tenant compte des recommandations
de la Commission de Venise.
5.6. Service civil alternatif
130. Dans sa
Résolution
1661 (2009), l'Assemblée avait regretté que la législation sur le
service alternatif et les objecteurs de conscience n’ait pas encore
été adoptée (paragraphe 16.6.2). Nous saluons donc l'adoption par
le parlement le 26 octobre 2009 de la loi sur le service civil régissant
les questions relatives à l'objection de conscience et au service
civil alternatif.
6. Droits des minorités
nationales et lutte contre les discriminations
6.1. Tendance générale
131. De nombreuses avancées positives sont à noter dans
le domaine de la lutte contre la discrimination. Nous renvoyons
à cet égard au rapport publié le 31 mai 2011 par la Commission européenne
contre le racisme et l'intolérance (ECRI), qui souligne les avancées
institutionnelles et législatives, en particulier l'adoption d'une loi
antidiscrimination en mars 2009.
132. Nous saluons l’élection par le parlement, en application de
la loi sur l’interdiction de la discrmination, de Mme Nevena
Petrešić, première Commissaire à l’égalité. Cette institution est
appelée à devenir l'instance clé en matière de protection des droits
des minorités et de promotion de la mise en œuvre complète de la
loi sur la nondiscrimination. Elle devra être dotée de moyens adéquats
pour renforcer la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et,
tout comme l'ECRI
, nous considérons comme prioritaire
le renforcement des capacités du Bureau du Commissaire à l'égalité.
133. Cependant, les discriminations que subissent certains groupes
spécifiques doivent être traitées de manière plus effective encore
par les autorités serbes (voir infra).
134. Des améliorations sont encore possibles dans la poursuite
et l’incrimination des discours de haine. Le Commissaire aux droits
de l’homme a souligné que l’actuelle législation pénale ne contient
pas de disposition spécifique sur le discours de haine. Elle n’aborde
que l’infraction pénale d’incitation à l’intolérance ou à la haine nationale,
raciale ou religieuse, qui ne couvre cependant pas toutes les formes
de discours de haine prévues par la Recommandation no R
(97) 20 du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur le «discours
de haine». La loi sur l’information publique et la loi sur l’interdiction
de la discrimination contiennent des dispositions sur le discours
de haine. L’ECRI a exprimé en 2011 ses préoccupations devant la
lenteur de la mise en œuvre des dispositions pertinentes, rares
étant les poursuites engagées à ce jour comparativement à la fréquence
alléguée des discours de haine, y compris dans les médias
.
135. Nous encourageons vivement la Serbie à mettre en œuvre toutes
les mesures en matière de prévention et de sanction des discriminations
et à renforcer ses programmes en faveur des principes de tolérance,
de respect d’autrui, de réconciliation, de dialogue interculturel
et interreligieux.
136. Nous notons à cet égard que la Serbie a été condamnée par
la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire
Milanović c. Serbie pour n’avoir
pas prévenu les agressions répétées dont M. Milanović, membre de
la communauté Hare Krishna, avait été victime, ni enquêté de manière
appropriée sur ces incidents. La Cour a estimé le 14 décembre 2010
que «traiter la violence motivée par la haine religieuse de la même
manière que des affaires dépourvues de telles connotations revient
à ne pas tenir compte de la nature d’actes particulièrement destructeurs
des droits fondamentaux» et a conclu à une violation de l'article
14 (Interdiction de la discrimination) combiné à l'article 3 (Interdiction
de la torture et des traitements inhumains) de la Convention européenne
des droits de l'homme
.
6.2. 6.2. La situation
des Roms en Serbie
137. On estime qu’il y a entre 100 000 et 500 000 Roms
en Serbie. Le défaut de papiers d’identité est un problème grave
et empêche les Roms d'accéder aux droits sociaux. Les Roms se heurtent
à de multiples discriminations même si certains interlocuteurs ont
reconnu que leur accès à l’éducation et aux soins de santé s’améliorait.
On a observé des cas d'évictions forcées à Belgrade.
138. Pour l'heure, nous saluons la création, en octobre 2009, de
groupes de travail chargés de la mise en œuvre de la Stratégie et
du Plan d'action pour l'amélioration de la situation des Roms et
d'un Conseil pour l'amélioration de la situation des Roms en charge
de la mise en œuvre de la Décennie pour l’intégration des Roms 2005-2015,
la publication d'un guide sur «la protection des enfants roms victimes
de discrimination dans l'éducation», la poursuite de programmes
d'intégration dans les écoles et les universités, l'introduction
d'une discrimination positive envers les Roms
.
139. Nous tenons à saluer les résultats concrets liés à la mise
en œuvre de la Stratégie et du Plan d’action susmentionnés, dont
notamment le recrutement de coordinateurs pour les questions roms
dans 54 collectivités locales autonomes, de 179 assistant(e)s pédagogiques
roms et de 74 femmes roms en qualité de médiatrices de santé; l’inscription,
depuis 2002-2003, de 854 élèves et de 1 580 élèves du secondaire
dans des institutions éducatives par application de mesures positives;
le développement de mesures d’action positive avec l’inscription
de 380 élèves dans le secondaire et 154 étudiants dans des universités
ou des établissements d’enseignement supérieur au cours de l’année
scolaire 2011-2012; l’assistance financière fournie à 176 étudiants
roms à leur inscription en première année de licence; le soutien
d’une campagne de sensibilisation lancée par les autorités serbes,
qui a été appuyée par le Conseil national des Roms et le Bureau
de l’intégration des Roms de l’Assemblée de la province de Vojvodine,
afin d’encourager la participation des Roms au recensement de 2011,
etc.
140. Cependant, les discriminations multiples subies par les Roms
perdurent. Nous invitons les autorités serbes à mettre en œuvre
les recommandations publiées le 31 mai 3011 par la Commission européenne contre
le racisme et l'intolérance
.
L’obtention de documents d’identité et l’accès aux droits sociaux
et aux logements continuent de poser problème.
141. Selon le Commissaire aux droits de l'homme, la non-inscription
des enfants roms dans les registres d'état civil et le défaut de
documents d'identité concernent environ 5% des Roms de Serbie
.
La loi de 2009 sur l’enregistrement des naissances visait à favoriser
les inscriptions au registre des naissances et contenait une disposition
permettant de déclarer les naissances même après expiration du délai
légal. Cependant, comme le reconnaissaient les autorités, la campagne
destinée à informer les Roms des procédures d’enregistrement et
d’aide juridique est insuffisante et c’est pourquoi nous saluons
l’initiative du ministère des Droits de l’homme et des Minorités,
de l’Administration publique et de l’Autonomie locale de lancer
un appel d’offres et d’allouer une somme de 40 000 euros pour soutenir
le projet d’une ONG afin d’identifier les personnes non encore inscrites
sur le registre des naissances et de leur apporter une assistance
juridique dans leur démarche. D’autres mesures administratives ont
été mises en place pour faciliter les procédures devant les tribunaux
et simplifier la délivrance des documents personnels.
142. Nous avions été heureux d’apprendre que le ministère de l’Intérieur
avait rédigé le projet de loi sur la résidence et le domicile des
citoyens qui propose une procédure simplifiée pour la déclaration
de résidence et la délivrance de documents d’identité. Nous pensons
qu’une telle loi devrait également permettre aux bénéficiaires d’avoir
pleinement accès aux droits sociaux. L’adoption de la loi portant
modification de la loi sur les redevances administratives de l’Etat
en juillet 2011 – abolissant les redevances administratives pour
les documents et actes relatifs au droit d’enregistrement subséquent
sur le registre des naissances – et celle de la loi portant modification
à la loi sur la carte d’identité – qui est entrée en vigueur le
4 juin 2011 et simplifie la délivrance des cartes d’identité
– devraient également
faciliter le processus de déclaration des naissances.
143. Le logement et les conditions sanitaires des camps de Roms
situés dans les faubourgs de Belgrade, et notamment à Gazeta et
à Antena, les informations concernant les expulsions forcées ou
le retour non volontaire des populations roms expulsées de Belgrade
vers les villages de Serbie du sud sont préoccupantes
et
les propositions alternatives de logement semblent limitées, voire
inexistantes. Dans ce cadre, il nous sera nécessaire d'obtenir des
informations sur la situation actuelle à Belgrade et la mise en œuvre
de la loi sur le logement social adoptée le 31 août 2009, qui prévoit
l'adoption de plan d'aménagement du territoire dans plusieurs municipalités
pour améliorer les conditions de logement des Roms. La révision d'une
loi sur les permis de résidence permanents et temporaires était
considérée comme nécessaire pour faciliter l'accès des Roms aux
documents d'identité, ainsi que leur inscription dans les registres
d'état civil.
144. Au cours de notre visite de septembre 2011, en coopération
avec le bureau de Belgrade du HCR, nous nous sommes rendus dans
des campements roms à Pancevo et à Krnjača. Nous restons préoccupés
par la situation de la communauté rom, qui, malgré les mesures prises
par les autorités, ne dispose toujours pas d’un accès suffisant
à l’éducation, au logement et aux droits sociaux et fait face à
des discriminations multiples. Aussi nous saluons l'adoption de
la loi sur la résidence temporaire et permanente le 17 novembre
2011, qui devrait assurer les droits des personnes déplacées dans
leur propre pays et garantir qu’elles puissent obtenir des documents
d’identité, être enregistrées et exercer leurs droits sociaux et
économiques.
6.3. La situation de
la minorité albanaise en Serbie du Sud
145. La situation reste précaire en Serbie du Sud où le
chômage et la pauvreté accélèrent les migrations internes de la
minorité albanaise. Des avancées sont à noter dans cette région,
avec la création d'un gouvernement local à Bujanovac en décembre
2010, et d'un Conseil national de la minorité albanaise en 2010.
146. Dans ce contexte, nous nous félicitons de l’ouverture, le
28 octobre 2011, d’un Département multiethnique d’économie à la
faculté d’économie de Subotica et de la signature d’un accord de
coopération avec la faculté d’économie de l’université d'Etat de
Tetovo («l'ex-République yougoslave de Macédoine») afin de proposer
un enseignement supérieur en deux langues. 69 étudiants, dont 40
Albanais et 29 Serbes, ont entamé leurs études le 31 octobre 2011.
147. L’instance de coordination des villes de Preševo, Bujanovac
et Medvedja comprend dans sa composition élargie le ministère des
Droits de l’homme et des Minorités, de l’Administration publique
et de l’Autonomie locale (qui préside l’organe), six vice-présidents
représentant le gouvernement et les trois municipalités, le directeur
de l’instance de coordination, les maires et maires adjoints des
municipalités, les présidents et vice-présidents des conseils municipaux,
des membres des parlements des trois municipalités et d’autres fonctionnaires.
L’instance, dans sa composition élargie, adopte sa stratégie et
contrôle sa mise en œuvre.
148. La défection du président du Parti albanais pour le progrès
démocratique (PDD) en juillet 2011 n'a pas affecté le fonctionnement
de l'instance de coordination. Il avait déploré que toutes les demandes
formulées par les Albanais (y compris une plus grande présence des
Albanais dans les institutions publiques, à commencer par la police,
les douanes et l'administration douanière) aient été ignorées par
l'instance de coordination
. Le Parti pour l'action
démocratique (PzDD) reste ainsi le seul parti albanais dans cette
instance de coordination dont le leader – et membre du parlement
– Riza Halimi avait également menacé de démissionner en raison du non-respect
des principes de fonctionnement de l'instance de coordination
. En signe de protestation,
les responsables albanais ont appelé au boycott du recensement de
2011. Selon les résultats provisoires publiés par le Bureau national
des statistiques, moins de 10% des citoyens des municipalités de
Presevo, Bujanovac et Medvedja ont participé au recensement.
149. L’emploi est l’un des principaux sujets de préoccupation dans
la région. Dans ce contexte, nous souhaiterions mentionner la campagne
de promotion multilingue lancée par le ministère de l’Intérieur
aux fins d’encourager les membres des minorités nationales à s’inscrire
au Centre de formation de base de la police à Sremska Kamenica (COPO).
Un appel a été lancé en mars 2011 pour le recrutement de 50 étudiants
destinés à occuper des fonctions dans l’administration de la police
de Leskovac et de Vranje (regroupant au plan territorial les commissariats
de police de Preševo, Bujanovac et Medvedja). 223 candidats ont
répondu à l’appel, dont 91 représentants de la minorité nationale
albanaise. Le ministre de l’Intérieur a décidé de retenir 21 candidats
pour l’entrée au Centre de formation de base de la police, dont
12 de nationalité albanaise, en guise de mesure positive en faveur
d’une représentation proportionnelle des membres de l’ensemble des minorités
nationales, conformément à la Constitution qui dispose que, concernant
l’emploi dans les organes étatiques, les services publics, les organes
des provinces autonomes et les collectivités locales autonomes,
la composition ethnique de la population et une représentation appropriée
de membres des minorités nationales doivent être prises en compte.
6.4. Mise en œuvre de
la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires
150. Depuis mars 2005, la Serbie est partie à la Charte
européenne des langues régionales ou minoritaires (STE no 148).
Après ratification en février 2006, la Charte est entrée en vigueur
en Serbie le 1er juin 2006. Des mesures
de protection spéciale prévues dans la partie III de la Charte concernent
les langues suivantes: albanais, bosniaque, bulgare, hongrois, romani,
roumain, ruthène, slovaque, ukrainien et croate.
151. Les autorités serbes ont présenté en septembre 2010 le second
rapport périodique sur la mise en œuvre de la Charte
.
Nous attendons la publication des conclusions du Comité d’experts
de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et
en tiendrons compte dans le cadre du processus de suivi.
6.5. Conseils nationaux
des minorités nationales – remarques générales
152. Nous saluons l'adoption de la loi du 31 août 2009,
qui a permis la création des conseils nationaux des minorités nationales
. Les élections
de ces 19 conseils le 6 juin 2010 ont été une avancée positive.
Les membres des conseils nationaux des minorités nationales ont
été élus au suffrage direct par 436 334 membres de 16 minorités
nationales (albanaise, ashkali, bosniaque, bunjevac, bulgare, valaque,
grecque, égyptienne, hongroise, allemande, rom, roumaine, ruthène,
slovaque, ukrainienne et tchèque) dans 883 bureaux de vote. Trois
minorités nationales (macédonienne, slovaque et croate) ont élu
leur conseil national le même jour par le biais de l’assemblée électronique
.
153. Les conseils des minorités nationales endossent tous les mêmes
responsabilités dans leurs domaines de compétence, en l’occurrence
la culture, l’éducation (élaboration des programmes scolaires, élection
des représentants des minorités aux conseils d’administration des
écoles assurant un enseignement dans une langue minoritaire, etc.).
Les conseils nationaux des minorités dont la langue n’est pas représentée
dans le processus éducatif en République de Serbie ne peuvent dans
la pratique pas exercer la plupart des responsabilités statutaires
des conseils nationaux dans le domaine de l’éducation.
154. Lors de notre visite en Serbie en décembre 2010, nous avons
été informés d'irrégularités et d'erreurs observées lors de ces
élections en ce qui concerne la protection des données des registres,
l’absence de règles claires relatives à l’enregistrement des électeurs,
le rôle du ministère des Droits de l’homme et des Minorités dans
la mise en place des conseils, etc. Le médiateur a confirmé qu’il
avait ouvert une enquête sur ces questions. Nous avons également
appris des autorités serbes que l’inscription des électeurs sur
des listes électorales séparées en format électronique est confiée
aux collectivités locales autonomes, conformément à l’article 51,
paragraphe 2 de la loi sur les conseils nationaux des minorités
nationales. L’exigence d’inscription des électeurs sur des listes
électorales spéciales est prescrite par la loi sur les conseils
nationaux des minorités nationales et la réglementation relative
à la tenue de listes électorales séparées pour les minorités nationales.
155. Un an après les élections des conseils nationaux des minorités,
nous notons que certaines personnes déplorent le manque de fonds
publics alloués aux conseils, ce qui compromet la poursuite de leurs
activités
. Après l’amendement de la législation et
l’adoption de la réglementation sur l’allocation des fonds d’Etat
qui ont commencé à être mis en œuvre à compter de janvier 2011,
le montant alloué à chaque conseil national a été modifié. Au total,
le budget alloué par la Serbie aux conseils des minorités nationales
s’est élevé à 141 615 000 RSD (en 2009), 145 148 000 RSD en 2010
et 224 400 000 RSD en 2011. Une évaluation de l'action de ces conseils
serait souhaitable pour améliorer le fonctionnement de ces structures.
6.6. Le Conseil national
de la minorité nationale bosniaque
156. Le Conseil national de la minorité nationale bosniaque
est le seul conseil des minorités à ne pas avoir été mis en place
après les élections, qui se sont déroulées sur fond de divisions
entre la «communauté islamique de Serbie»
(conduite par Adem Zilkic) et «la communauté islamique en Serbie» (conduite par Muamer
Zukorlić) qui perdurent depuis 2007 – même si, officiellement, la
création du conseil national de la minorité et les dissensions entre
les communautés religieuses sont des questions distinctes.
157. Trois listes se sont présentées aux élections en juin 2010.
La Communauté culturelle bosniaque (dirigée par le mufti Zukorlić)
a remporté 17 mandats, la Liste bosniaque (proche du ministre Uglianin)
13 et la Renaissance bosniaque (proche du ministre Ljajić) 5. Deux
membres de la liste Renaissance bosniaque ont décidé de rejoindre
le camp du mufti Zukorlić lors de l’assemblée constituante
.
158. Le conseil devait être formé le 7 juillet 2010. Toutefois,
la veille, le ministre des Droits de l’homme et des Minorités est
intervenu et a instauré une nouvelle règle, exigeant que deux tiers
des membres soient présents à la session d’ouverture, au lieu de
50%. Le boycott par les listes de minorités (Liste bosniaque et
Renaissance bosniaque) de la séance constitutive n’a pas permis
la formation du conseil. Le ministre adjoint Antić a expliqué que
les changements avaient été apportés au mode de scrutin sur le conseil
bosniaque «à des fins de stabilité»
. Cette décision a été critiquée
par la nouvelle Commissaire pour la protection de l’égalité, qui
a déclaré que le changement des règles pour la formation du Conseil
national de la minorité bosniaque était clairement un acte discriminatoire
.
159. La Communauté culturelle bosniaque, dirigée par le mufti Muamer
Zukorlić, a formé le conseil, qui n’est toutefois pas reconnu par
le ministre serbe des Droits de l’homme et des Minorités
. Depuis, des discussions ont
été organisées par le ministre sous les auspices de l’OSCE afin
de trouver un consensus pour établir un conseil avant le 6 décembre
2010, comme l’exige la loi, mais sans succès: de nouvelles élections
devaient être organisées le 17 avril 2011, mais elles ont finalement
été reportées, les partis en lice ne s'étant pas enregistrés dans
les délais impartis. Nous regrettons que la situation soit pour
l'heure bloquée. Dans l’intervalle, conformément à la loi sur les
conseils nationaux des minorités nationales
, le Conseil national
de la minorité nationale bosniaque
élu en 2004 continue d’opérer
jusqu’à l’élection et à la constitution du conseil national
. Nous invitons
les autorités serbes à préparer et tenir les élections avec soin
et sans délai et à faire en sorte que le Conseil national de la
minorité bosniaque soit opérationnel.
160. Lors de notre visite à Novi Pazar en décembre 2010, nous avons
rencontré les principaux acteurs. Nous avons été informés d’un certain
nombre d’incidents, de tensions intra-ethniques et d’une radicalisation
des discours qui pourraient entraîner une situation alarmante. Ces
tensions ethniques ou religieuses prennent des proportions inquiétantes
dans une région en récession économique, où le chômage atteint les
50%
. De ce fait nous notons avec intérêt
que des tentatives de rapprochement sont en cours entre les deux
«communautés islamiques» à l'initiative de la Turquie, qui a dépêché
dans la région une délégation en juin 2011
. Cependant, en dépit de l’annonce
d’un accord (dont les détails n’ont pas été divulgués) aux fins
de réunifier la communauté islamique de Sandzak, la situation reste
bloquée, un certain nombre de questions (sièges de la future communauté
islamique, rôle des actuels leaders des deux communautés) restant
en suspens.
161. Nous appelons les autorités serbes à créer l’environnement
requis et à promouvoir les valeurs du dialogue interreligieux, interethnique
et intercommunautaire. Nous invitons instamment toutes les parties prenantes
impliquées dans le règlement de cette controverse entre les deux
«communautés islamiques» en concurrence à parvenir à un accord et
à apaiser ces tensions qui sont préjudiciables au développement
de la région. Nous encourageons par ailleurs les acteurs de la région
à surmonter leurs divisions actuelles, à mettre l’accent sur le
dialogue, sur une approche constructive fondée sur le respect et
la tolérance mutuelle, et à défendre la souveraineté de la Serbie.
162. Nous réitérons notre ferme conviction que le développement
social et économique de cette région reste la clé pour réussir la
coexistence pacifique et la cohésion sociale. Nous encourageons
les autorités serbes à renforcer leurs efforts dans ce sens.
6.7. Le Conseil national
de la minorité valaque
163. Lors de notre visite en décembre 2010, notre attention
s'est portée sur les difficultés rencontrées lors de l'élection
du Conseil national de la minorité valaque. Nous avons donc rencontré
les représentants des trois groupes valaques de l’est de la Serbie.
La situation de la communauté valaque/roumaine en Serbie a été bien décrite
dans le rapport de M. Jürgen Herrmann (Allemagne, Groupe du parti
populaire européen)
,
qui a souligné que la situation des membres de cette communauté
dans l’est du pays était nettement moins bonne que celle des habitants
de la Vojvodine.
164. Dans sa
Résolution
1632 (2008), l’Assemblée rappelle le principe énoncé à l’article
3 de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales
(STE no 157) et réaffirme que toute tentative
visant à imposer une identité à une personne, ou à un groupe de
personnes, est inadmissible. Elle encourage les membres des minorités
roumaine et valaque de l’est de la Serbie à joindre leurs efforts
et à dépasser leurs désaccords internes dans leur propre intérêt
afin de conserver les spécificités qui constituent leurs identités
(les autorités serbes ont ici pour responsabilité de ne pas entraver
mais au contraire de soutenir les initiatives en ce sens). Elle
prie instamment les autorités serbes de coopérer à la fois avec
l’Eglise orthodoxe serbe et avec l’Eglise orthodoxe roumaine dans
la recherche d’une solution pratique visant à rendre effective la
liberté de religion dans l’est de la Serbie, comme c’est déjà le
cas en Vojvodine
.
165. Une ONG, la Commission des droits de l’homme de Negotin, a
mentionné les difficultés rencontrées par une partie de la communauté
valaque dans l’est de la Serbie et l’interférence des principaux
partis politiques dans le processus électoral. L’intimidation des
électeurs, les interventions illégales dans le registre électoral, la
fraude et autres violations de la loi ont été mentionnées. Ces problèmes
ont été évoqués avec le médiateur au cours de notre visite en décembre
2010. Le médiateur a conclu à certaines omissions durant le processus électoral,
propices à une violation du droit des citoyens à la protection de
leurs informations personnelles s’agissant de l’inscription sur
les listes électorales spéciales des minorités nationales. En effet,
un certain nombre de citoyens ont été inscrits sur des listes spéciales
sans en être avertis et contre leur gré. A la suite de la recommandation
du médiateur datée du 11 février 2011, le ministre des Droits de
l’homme et des Minorités a publié une Instruction sur le traitement
de l’inscription des minorités nationales sur des listes électorales spéciales,
stipulant que la demande d’inscription d’un membre d’une minorité
nationale sur une telle liste doit être soumise personnellement
ou par courrier, ce qui exclut la possibilité pour des tiers de
procéder à des demandes d’inscription sur les listes spéciales.
Le médiateur n’a cependant pas confirmé l’existence d’interventions
illégales sur les listes électorales
.
166. Le ministre des Droits de l’homme et des Minorités a reconnu
que l’identité roumaine de la communauté valaque devait faire l’objet
d’une discussion et a envisagé la création d'un comité d'experts
chargé d’effectuer des recherches sur la communauté valaque. Le
président du nouveau Conseil national de la minorité valaque a indiqué
que le conseil avait décidé de travailler sur l'harmonisation de
la langue valaque, dont l'utilisation reste un sujet de désaccord.
Les autorités serbes ont expliqué que la langue valaque n’est pas
normalisée, d’où la non-mise en œuvre dans la pratique, pour les
membres de la communauté valaque, de certains droits garantis aux
minorités. Cette situation fait obstacle à l’introduction du valaque
dans toutes les sphères de la vie sociale en Serbie, empêche la
création du département de langue valaque et la formation d’enseignants susceptibles
d’enseigner dans cette langue et entrave la mise en œuvre de ces
droits, qui sont des prérequis à l’introduction du valaque comme
langue officielle. Pourtant, le conseil de la minorité valaque travaille
sans entrave. Il a adopté son statut, élu ses organes, organise
régulièrement ses sessions et met en œuvre les activités planifiées,
avec un budget de 7 282 726 RSD en 2011.
Nous
espérons qu’un compromis pragmatique puisse être trouvé au plan
local afin de permettre au conseil de travailler correctement, guidé
par le principe de libre auto-identification contenu à l’article
3 de la Convention-cadre.
167. Les autorités serbes ont également souligné que le recensement
de 2002 montrait que la République de Serbie, sans la province autonome
de Vojvodine et la ville de Belgrade, comptait au total 2 778 Roumains qui
ne représentaient dans aucune des collectivités locales autonomes
plus de 15% de la population. Gardant à l’esprit l’article 14.2
de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales,
la langue roumaine ne remplissait pas les conditions juridiques
requises pour son utilisation officielle dans les collectivités
locales autonomes de la République de Serbie, à l’exception de la
province autonome de Vojvodine
.
168. Nous encourageons toutes les parties concernées à promouvoir
le dialogue et à rechercher les solutions pragmatiques qui permettront
au Conseil national de la minorité valaque de remplir ses missions.
6.8. La situation des
personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT)
169. S’agissant des droits des minorités sexuelles, nous
nous réjouissons de la tenue de la Gay Pride, le 10 octobre 2010,
avec le soutien des dirigeants politiques de Serbie et la pleine
protection de l’Etat. Pour mémoire, en octobre 2009, la Gay Pride
de Belgrade avait été annulée la veille de sa tenue, quand les autorités se
sont rendu compte qu’elles ne seraient pas en mesure de protéger
les participants. La parade de 2010 s’est déroulée sans heurts et
sous étroite protection de la police mais, dans le même temps, des
groupes d’extrémistes (quelque 6 000 membres d’organisations d’extrême
droite et de groupes de
hooligans supporters
de football, selon la police) ont attaqué la police et des bâtiments
officiels (les bureaux du Parti démocratique, du Parti socialiste
et de la télévision nationale) dans divers quartiers de la ville,
et vandalisé des voitures et des magasins dans le centre-ville.
A l’époque, le ministre de l’Intérieur avait indiqué que des enquêtes
minutieuses étaient en cours et le ministre de la Justice avait
proposé des amendements au Code de procédure pénale qui avaient
été adoptés par le parlement dans le cadre de la procédure d’urgence
.
170. Lors de nos rencontres en novembre 2010, les représentants
des ONG ont reconnu que l’organisation de la Gay Pride représentait
une avancée importante. Ils s’étaient sentis protégés par la police.
Ils pensent néanmoins que les déclarations du maire de Belgrade
et du ministre de l’Intérieur, demandant d’éviter l’organisation
d’une autre parade, s’adressent à une société divisée sur la question.
Ils déplorent également que la nature des raisons de la violence,
motivée par la haine, n’ait pas été explicitement reconnue. Ils réclament
donc l’institution d’une loi sur la haine. Les ONG LGBT demandent
également des lois sur les questions familiales et la reconnaissance
administrative des personnes transgenres.
171. Avec le Commissaire aux droits de l'homme
,
nous avions salué la décision de la Cour constitutionnelle de bannir
une organisation extrémiste et encouragé les autorités serbes à
prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une atmosphère
de tolérance, poursuivre les faits de discrimination à l'encontre
des personnes LGBT, y compris en assurant les conditions de sécurité
de l'organisation d'une Gay Pride prévue le 2 octobre 2011 par une
action concertée des autorités locales et nationales. Au cours des semaines
précédant cette manifestation, les déclarations du maire de Belgrade
et la déclaration publiée par le
Syndicat de la police serbe, indiquant ne pas avoir l'intention
d'assurer la sécurité de la parade en raison des mauvaises conditions
de travail
,
étaient inquiétantes. Plusieurs actes de violence contre des membres
de la communauté LGBT au cours de ces dernières semaines étaient
également à déplorer
et doivent faire l'objet de
poursuites.
172. En raison des pressions exercées par un certain nombre de
groupes extrémistes et de l’évaluation du risque menée par le Conseil
national de sécurité, le ministre de l’Intérieur a décidé d’annuler
l’organisation de la Gay Pride et toutes les autres manifestations
publiques qui étaient prévues les 1er et
2 octobre 2011, soulevant ainsi un certain nombre d’inquiétudes
au sein des organisations internationales
et des membres de
l'Assemblée
.
Nous pouvons comprendre que cette décision a été motivée par le
risque élevé d’émeutes et de dommages humains et matériels. Cependant,
nous déplorons que la liberté de réunion n’ait pu être exercée conformément
à la législation, y compris la législation antidiscrimination, et
invitons instamment les autorités à prendre toutes les mesures requises
pour garantir la liberté de parole et d’association.
173. Nous désapprouvons également les déclarations de certains
responsables politiques. Nous notons à cet égard que le Premier
tribunal municipal de Belgrade a rendu le 2 novembre 2011 une décision
à l’encontre du maire de Jagodina – et président du parti Serbie
unie – Dragan Markovic «pour discrimination grave envers la population
LGBT», à la suite d’une déclaration faite le 15 août 2011
. Nous insistons sur la responsabilité des
leaders politiques dans la promotion d’une culture de tolérance
et du respect des droits de l’homme.
7. Conclusions
174. Il ne fait aucun doute que la Serbie a fait des progrès
notables dans de nombreux domaines et avance dans la mise en œuvre
complète de ses engagements. Cependant, certaines questions clés
n’ont toujours pas été résolues, ou l’ont été de manière incomplète,
ou n'ont pas encore été pleinement mises en œuvre: réforme de la
justice, loi électorale, lutte contre la corruption, etc.
175. Nous tenons à cet égard à souligner l'excellente coopération
instituée avec les autorités serbes, comme en témoigne l'adoption,
en mars 2011, d'une feuille de route par la commission des relations
extérieures du parlement, visant à mesurer les accomplissements,
mais aussi les progrès à réaliser, pour mettre en œuvre ses engagements
et ses obligations statutaires (conformément à la
Résolution 1661 (2009)). Cette feuille de route constitue un document de politique
stratégique donnant la vision des autorités sur les processus clés
des réformes concernant les critères qu’ils doivent suivre et les
normes qu’ils doivent atteindre du point de vue de l’Assemblée,
et inclut aussi un plan d’action détaillé des dispositions et mesures
que les autorités envisagent de prendre pour remplir les engagements,
recommandations et obligations statutaires envers le Conseil de l’Europe.
176. Nous sommes pleinement conscients du fait que l'aspiration
de la Serbie à rejoindre l'Union européenne a suscité une forte
mobilisation pour adopter, dans des délais serrés, de nombreuses
lois, et des efforts redoublés pour remplir les conditions d'adhésion
posées par l'Union européenne. A l'approche des prochaines élections
législatives prévues au printemps 2012, la Serbie est dans l'expectative
d'un avis positif de la Commission européenne et de l'ouverture
des négociations d'adhésion à l'Union européenne. La politique d'harmonisation
de la législation serbe avec les normes européennes et l'acquis
communautaire découlant des conditions posées par l'Union européenne
– y compris la coopération avec le TPIY et le dialogue avec Pristina –
est ambitieuse et courageuse. Pour notre part, nous estimons que
les efforts faits par la Serbie pour respecter ses engagements et
obligations et se rapprocher des normes européennes dans le domaine
des droits de l'homme, de l'Etat de droit et de la démocratie doivent
être reconnus et soutenus par le Conseil de l'Europe.
177. En conclusion, nous pouvons dire que la Serbie reste sur la
bonne voie et qu’elle a adopté un nombre impressionnant de lois.
L'adoption d'un aussi grand nombre de lois dans des domaines fondamentaux
(comme la justice) dans de courts délais est plutôt inhabituelle,
et nous souhaiterions nous assurer que ce nouveau cadre législatif
est opérationnel et fonctionne correctement. Aussi devrons-nous
suivre la mise en œuvre de ces lois et veiller à ce que les institutions
démocratiques et légales et les mécanismes nationaux de suivi soient en
place.
178. Toutefois, il nous semble fondamental de nous assurer que
les législations votées produisent leurs effets, et que les changements
structurels requis par la transition d'un pays postyougoslave à
un Etat démocratique soient ancrés. Aussi souhaitons-nous concentrer
plus particulièrement notre attention sur les mécanismes visant
à établir une démocratie durable fondée sur les normes du Conseil
de l’Europe, notamment la réforme du système judiciaire (y compris
une procédure transparente de nomination ou de reconduction des juges
et l’établissement des instances juridiques supérieures), la mise
en place d'un système transparent de financement des partis politiques,
des médias indépendants, la révision de la loi électorale et la
conformité complète des lois sur la liberté d'expression, d’association,
etc., avec les normes du Conseil de l’Europe et leur mise en application
intégrale.